M. le président. L'amendement n° 110, présenté par Mme Didier, MM. Coquelle et Billout, Mme Demessine, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Haut comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire, créé par l'article 7 de la loi n° du relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire, organise périodiquement des débats citoyens concernant la gestion durable des matières et des déchets nucléaires radioactifs.
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. De septembre 2005 à janvier 2006, trois mille personnes ont participé aux débats organisés partout en France par la Commission particulière du débat public sur la gestion des déchets radioactifs.
Cette démarche particulièrement intéressante a permis aux différentes parties de donner leur point de vue sur la question du devenir des déchets radioactifs et de débattre entre elles afin de faire connaître l'ensemble des arguments avancés par les uns et les autres à tous les citoyens intéressés par ce sujet.
Des exigences fortes se sont exprimées, notamment celle du partage des connaissances, que l'on retrouve de manière récurrente à chaque réunion. Bien entendu, ce partage suppose à la fois l'accès à l'information pour tous et l'expertise plurielle.
Dans ce sens, des propositions ont fait l'objet d'un large consensus, par exemple la création d'un lieu permanent et général de dialogue, mais aussi la mise en place de rendez-vous périodiques plus fréquents avec le public. L'ensemble serait fondé sur les centres de ressources accessibles à tous, ce qui permettrait une information ne provenant pas exclusivement de l'État ou des entreprises concernées par cette activité.
Ajoutons que, sur les questions relatives à la gestion des déchets, le débat public ne peut être purement local ni se limiter à une seule période de quatre mois en 2015, lorsqu'il s'agira de décider du choix du site de stockage.
Notons que la création d'une structure permanente d'information du public est également un souhait exprimé par la Cour des comptes.
Dans cet esprit, nous souhaitons, par cet amendement, confier ce rôle au haut comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire, créé par l'article 7 de la loi relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire.
Nous estimons en effet qu'une telle mission rentrerait complètement dans le cadre des missions de ce comité pour ce qui relève de la diffusion de l'information sur les risques liés aux activités nucléaires.
Au regard de la suspicion entourant les activités nucléaires, les enjeux relatifs à la transparence sont fondamentaux.
Tel est le sens de l'amendement que nous soumettons à votre vote.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri Revol, rapporteur. Dans cet amendement, le haut comité est fidèle à la mission que nous lui confions au travers de la loi relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire.
Il revient en effet à cette enceinte de démocratie participative et de concertation d'être un lieu de débat sur l'ensemble des questions nucléaires, en particulier la gestion des déchets.
La commission est favorable à cet amendement, sous réserve d'une rectification : l'expression « des débats citoyens » est ambiguë, car elle laisse entendre la conduite d'opérations de grande envergure dépassant de très loin le cadre du haut comité et associant l'ensemble de la population comme peuvent le faire, par exemple, les débats publics ou les conférences de citoyens.
Cela supposerait une logistique et une organisation lourdes et coûteuses, qui sortiraient très largement du cadre d'action naturel du haut comité.
Nous vous invitons donc à remplacer les mots « des débats citoyens » par les mots « des concertations et des débats ». Si vous acceptiez cette rectification, la commission émettrait un avis favorable.
M. le président. Madame Didier, acceptez-vous la rectification suggérée par M. le rapporteur ?
Mme Évelyne Didier. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 110 rectifié, présenté par Mme Didier, MM. Coquelle et Billout, Mme Demessine, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, et ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le haut comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire, créé par l'article 7 de la loi n° du relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire, organise périodiquement des concertations et des débats concernant la gestion durable des matières et des déchets nucléaires radioactifs.
Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?
M. Henri Revol, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.
M. Bruno Sido. J'ai tenté - je ne sais pas si j'y suis parvenu - de faire valoir que l'information du public était une chose importante.
Par conséquent, je voterai cet amendement n° 110 rectifié. Mais peut-être est-ce le moment pour le Gouvernement de nous expliquer comment il compte organiser le débat public et, en amont, l'information du public, à l'échelon local et national, dans les dix ans à venir.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 6.
TITRE II
ORGANISATION ET FINANCEMENTS DE LA GESTION DES MATIÈRES ET DÉCHETS RADIOACTIFS
M. le président. L'amendement n° 84 rectifié, présenté par MM. Piras, Raoul et Teston, Mme Demontès et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Dans l'intitulé de ce titre, après le mot :
gestion
insérer le mot :
durable
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Il s'agit d'un amendement de coordination.
En modifiant le titre du projet de loi par l'ajout du terme « durable », les députés ont tenu à affirmer que la gestion des matières et déchets radioactifs devait s'inscrire dans le long terme. De la même manière, il convient de modifier l'intitulé du titre II pour prendre en compte cette juste préoccupation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri Revol, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 20, présenté par M. Revol, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans l'intitulé de ce titre, après les mots :
des matières et
insérer le mot :
des
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, l'intitulé du titre II est ainsi modifié.
Article 7
Dans l'article L. 542-6 du code de l'environnement, les mots : « des laboratoires » sont remplacés par les mots : « d'un laboratoire souterrain ou d'un centre de stockage en couche géologique profonde ».
M. le président. L'amendement n° 85, présenté par MM. Piras, Raoul, Teston et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Dans cet article, remplacer les mots :
d'un laboratoire souterrain ou d'un centre de stockage
par les mots :
des laboratoires souterrains ou des centres de stockage
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. En prévoyant la création de plusieurs laboratoires souterrains de recherche, la loi Bataille de 1991 permettait le choix entre plusieurs sites d'implantation d'un centre de stockage en couche géologique profonde.
L'article 7 tel qu'il est rédigé entérine a contrario le fait qu'il n'y aura qu'un seul centre de stockage en couche géologique profonde. Cette solution est regrettable, car elle est en contradiction avec les orientations de la loi Bataille, qui laissait la porte ouverte à d'autres choix d'implantation.
La nouvelle rédaction proposée par cet amendement offre la possibilité d'autres zones d'études, d'autres laboratoires de recherche, dans le respect du fonctionnement de nos institutions, contrairement à la rédaction actuelle de l'article 7, dont l'adoption reviendrait pour nous à avaliser l'existence d'un seul et unique laboratoire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri Revol, rapporteur. Nous avons longuement débattu de ce sujet hier. Nous pourrions discuter à l'infini de la question de savoir s'il faut un ou plusieurs laboratoires ou centres de stockage. Soyons pragmatiques : nous disposons aujourd'hui d'un laboratoire souterrain et nous envisageons la création d'un centre de stockage en couche géologique profonde.
Pour cette raison, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Loos, ministre délégué. J'ai en effet eu hier l'occasion de m'exprimer sur cette question.
Je rappellerai donc que la Commission nationale d'évaluation a mis un terme aux recherches menées sur le granite de la Vienne, en 2000. En effet, lorsque le Gouvernement a tenté de trouver un nouveau site, il a connu une très forte opposition. Dès lors, l'existence potentielle d'un second laboratoire a disparu.
Par conséquent, le Gouvernement émet également un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. Je suis quelque peu étonné : des membres de votre majorité, monsieur le ministre délégué - parmi lesquels des ministres de l'écologie - ont été en première ligne pour manifester lorsqu'il s'est agi de prévoir l'implantation éventuelle d'un laboratoire de recherche dans le massif granitique du Segréen. Je prends acte de ce changement de position, même si je le trouve un peu curieux.
M. Jean Bizet. Des noms ! (Sourires.)
M. Daniel Raoul. Ici, nous ne faisons pas de délation ! (Nouveaux sourires.)
M. Gérard Longuet. En tout état de cause, cher collègue Raoul, il s'agirait moins de délation que d'un enrichissement du débat !
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Je voudrais exprimer mon opposition à cet amendement, même si je reconnais qu'il n'est pas dépourvu de légitimité, puisqu'il fait référence à la loi de 1991 et qu'il est empreint de réalisme dans la mesure où il résulte du constat que nous n'avons pas été en mesure de trouver un nouveau site.
Pour autant, la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale n'est pas satisfaisante, car elle ne va pas jusqu'au bout de la démarche, en feignant d'ignorer l'existence du laboratoire qui est situé dans le callovo-oxfordien de la région de Bure-Saudron.
S'il devait y avoir un amendement sur cet article, il faudrait qu'il ait pour objet de remplacer l'expression « des laboratoires » par les termes « du laboratoire situé dans le callovo-oxfordien de Bure-Saudron ».
C'est d'ailleurs le sens des amendements que je défendrai lors de l'examen de l'article 7 bis. J'aurai pu déposer un amendement à l'article 7 avec plus de pertinence. Dans ce cas, en effet, il aurait consacré d'emblée le constat réaliste qui s'impose à nous aujourd'hui : au bout de quinze ans, nous avons été en mesure - c'est déjà une réussite - de trouver un site, mais un site seulement.
En désignant ce site, on rassure les populations concernant tous les dispositifs législatifs et réglementaires visant à transformer le lieu d'études en emplacement de stockage éventuel, encore que, comme vous nous l'avez expliqué, monsieur le ministre délégué, il ne s'agisse pas à proprement parler de la même implantation, puisqu'il faudra sans doute un nouveau puits d'accès.
À mon sens, le législateur donnerait plus d'autorité à son texte en visant la seule réalité. À se cacher derrière son petit doigt, on inquiète inutilement les populations, qui savent être concernées par des dispositifs et qui ne comprendraient pas que ceux-ci ne soient pas énoncés clairement comme étant précisément ceux qui les concernent.
Lorsque l'on précise qu'il n'y a qu'un laboratoire, et un seul, et qu'il est parfaitement désigné géographiquement, chacun comprend qu'il ne peut pas y en avoir d'autre. C'est la raison pour laquelle je m'oppose à cet amendement, qui entretient une fiction.
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.
M. Bruno Sido. Je ne reviendrai pas plus longuement sur le sujet, que M. Longuet a excellemment traité. Je me suis d'ailleurs déjà exprimé sur ce point lors de l'examen d'un amendement précédent.
Mais je dirai tout de même que, en vertu d'un principe général, ce qu'une loi fait, une autre peut le défaire. Par ailleurs, la loi Bataille n'est pas la Bible, et elle n'a pas vocation à nous accompagner pendant des siècles sans changement. Le projet de loi que nous examinons aujourd'hui réécrit ce qui figure dans la loi Bataille. Dont acte !
Certains ont tout fait pour qu'il n'y ait pas de deuxième laboratoire. Je ne les pointe pas du doigt. Comme l'a dit aujourd'hui M. le ministre délégué, il nous est impossible de disposer d'un autre laboratoire, pour des raisons multiples. Certes, nous savons où se trouve cet éventuel centre de stockage. Il n'y a aucune ambiguïté là-dessus. Mais on ne peut pas l'écrire dans la loi, car cela n'aurait pas beaucoup d'intérêt.
Par conséquent, il est inutile, me semble-t-il, de revenir éternellement sur la question. Aujourd'hui, il y a un laboratoire, et ce n'est pas la peine de faire croire aux gens que l'on va continuer à chercher un autre site, puisque, en France, visiblement, personne n'en veut. Ne nous cachons pas derrière notre petit doigt !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol, rapporteur. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, pour la clarté et la bonne compréhension de nos débats, la commission vous propose d'examiner en priorité l'article 8.
En effet, sur cet article, le Gouvernement a déposé un amendement n° 154 rectifié qui, d'une certaine manière, regroupe sous le seul article 8 les problématiques actuelles de l'article 7 bis et de l'article 8, à savoir la procédure d'autorisation de création d'un centre de stockage.
En conséquence, le Gouvernement a déposé sur l'article 7 bis un amendement de suppression n° 153. Or il me paraît difficile que le Sénat se prononce sur celui-ci avant d'avoir tranché sur l'amendement n° 154 rectifié. Mes collègues Claude Biwer et Gérard Longuet, qui ont eux aussi déposé des amendements sur l'article 7 bis, partagent mon sentiment.
Je demande donc, monsieur le président, l'examen par priorité de l'article 8, avant celui de l'article 7 bis.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de priorité formulée par la commission ?
M. François Loos, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à cette demande de priorité, puisque son amendement visait précisément à supprimer l'article 7 bis, pour pouvoir examiner directement l'article 8 ! (Sourires.)
M. le président. La priorité est ordonnée.
Article 8 (priorité)
Après l'article L. 542-10 du code de l'environnement, il est inséré un article L. 542-10-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 542-10-1. - Un centre de stockage en couche géologique profonde de déchets radioactifs est une installation nucléaire de base.
« Par dérogation aux règles applicables aux autres installations nucléaires de base :
« - le dépôt de la demande d'autorisation de création du centre est précédé d'un rapport de la commission nationale mentionnée à l'article L. 542-3 et d'un débat public au sens de l'article L. 121-1 ;
« - la demande est transmise, accompagnée de ce rapport, du compte rendu du débat public et d'un avis de l'Autorité de sûreté nucléaire, à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques qui l'évalue et rend compte de ses travaux aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat ;
« - l'autorisation de création peut ensuite être délivrée par décret en Conseil d'État après enquête publique et avis des collectivités territoriales situées en tout ou partie dans les zones de proximité mentionnées à l'article L. 542-11.
« Lors de l'examen de la demande d'autorisation, la sûreté du centre est appréciée au regard des différentes étapes de sa gestion, y compris sa fermeture définitive. L'autorisation fixe la durée minimale pendant laquelle, à titre de précaution, la réversibilité du stockage doit être assurée. Cette durée ne peut être inférieure à cent ans.
« Les dispositions des articles L. 542-8 et L. 542-9 sont applicables à l'autorisation de création d'un centre de stockage en couche géologique profonde. »
M. le président. L'amendement n° 133 rectifié, présenté par MM. Longuet et Biwer, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L.542-10-1 du code de l'environnement :
Le centre de stockage en couche géologique profonde de déchets radioactifs situé dans le callovo-oxfordien de la région de Bure est une installation nucléaire de base.
La parole est à M. Gérard Longuet.
M. Gérard Longuet. Cet amendement a pour objet de rappeler qu'il existe un laboratoire situé dans le callovo-oxfordien de Bure. C'est toujours le même souci d'appeler un chat un chat et de ne pas continuer à entretenir une fiction.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri Revol, rapporteur. Il s'agit, une fois de plus, de mentionner dans la loi le centre de stockage de déchets radioactifs en couche géologique profonde situé dans le callovo-oxfordien.
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Loos, ministre délégué. Je suis pleinement conscient de l'intérêt que présente cet amendement et je confirme ce que j'ai dit à plusieurs reprises - cela figure d'ailleurs dans l'exposé des motifs du projet de loi - à savoir que le site de stockage devrait se situer à proximité du laboratoire souterrain.
J'émets cependant un avis défavorable, car il importe de conserver à la loi son caractère général, même si, par ailleurs, je donne publiquement dans cet hémicycle toutes les assurances sur le fait qu'il s'agit d'un site localisé dans le callovo-oxfordien de la région de Bure.
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.
M. Bruno Sido. Oui, monsieur le ministre délégué, la loi doit rester générale et se garder de toute mention de cas particuliers.
Je propose cependant une porte de sortie honorable aux auteurs de cet amendement, car sa rédaction ne me paraît pas excellente. En effet, il indique, au présent, que le centre de stockage est une installation nucléaire de base. Or il n'existe pas encore de centre de stockage ; nous avons seulement un laboratoire, que l'on ne peut définir comme étant une installation nucléaire de base.
Pour cette raison, l'amendement peut être retiré. (Sourires.)
M. Daniel Raoul. Carrément !
M. Jean-François Le Grand. Où l'on voit le callovo s'opposer à l'oxfordien !
M. le président. Monsieur Longuet, l'amendement n° 133 rectifié est-il maintenu ?
M. Gérard Longuet. J'ai la volonté profonde de le maintenir, monsieur le président.
En effet, je ne veux pas entretenir la population locale dans l'équivoque, en laissant entendre que le stockage est une hypothèse lointaine, en tout cas peu probable, et que les dispositions générales que nous allons introduire par voie législative s'appliqueront peut-être, et seulement peut-être sur son territoire.
Nous le savons parfaitement, il existe un laboratoire et un seul ; des études sont conduites dans un banc d'argile du sous-sol, et un seul banc, à partir d'un site situé sur la commune de Bure, dans la Meuse, et dont les galeries s'étendent dans le département mitoyen de la Haute-Marne, sur le territoire de la commune de Saudron.
Mais vous ne voulez pas que les choses soient dites. Pourtant, si ce qui va sans dire va mieux en le disant, cela signifie que, inversement, ce qui n'est pas dit ne va pas très bien...
Je veux donc attirer votre attention, mes chers collègues, sur la nécessité d'introduire dans ce texte des dispositions claires au regard des populations locales intéressées, sauf à les inciter à rechercher ailleurs que dans la loi les assurances qu'elles attendent.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Loos, ministre délégué. Je comprends bien votre préoccupation, monsieur Longuet, et je la partage, sachant qu'il est en effet préférable de dire les choses telles qu'elles sont.
Mais, je le répète, les précisions que vous souhaitez voir figurer dans la loi apparaissent clairement dans l'exposé des motifs, à deux reprises, à propos des articles 1er et 9. Votre demande me paraît donc satisfaite.
Par ailleurs, Bruno Sido l'a dit à juste raison, il n'existe pas encore de centre de stockage et le laboratoire existant ne peut être considéré comme une installation nucléaire de base. Par conséquent, le texte même de l'amendement ne correspond pas à la réalité.
M. le président. La parole est à M. Charles Guené, pour explication de vote.
M. Charles Guené. Il s'agit moins d'une explication de vote que d'une proposition, monsieur le président. Pourquoi en effet ne pas sous-amender l'amendement n° 154 rectifié pour préciser que le Gouvernement présentera un autre projet de loi fixant les conditions de réversibilité dans des sites ayant déjà fait l'objet d'expérimentations ?
M. Charles Guené. Dans ce cas, notre ami Gérard Longuet pourrait retirer son amendement.
M. Bernard Piras. Astucieux !
M. Jean-François Le Grand. Et même habile !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol, rapporteur. La commission a longuement débattu de cet amendement et, je veux le dire solennellement, il n'y a aucune ambiguïté aux yeux du législateur : un laboratoire a été installé à Bure, dans la formation du callovo-oxfordien, qui constitue la seule zone propice à l'implantation éventuelle d'un centre de stockage, sous les conditions et précautions que nous inscrivons dans la loi. Par conséquent, le centre de stockage sera situé, sans équivoque possible, dans la zone dite de « transposition » - selon le langage des techniciens -, et non ailleurs.
Tels sont les motifs pour lesquels la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
En revanche, elle ne s'opposera pas à la possibilité éventuelle de donner satisfaction à M. Longuet dans la suite de l'examen de cet article.
M. le président. Compte tenu de la proposition de M .Guené, qui semble rallier les suffrages de la commission et du Gouvernement, maintenez-vous toujours cet amendement, monsieur Longuet ?
M. Gérard Longuet. Non, monsieur le président. Compte tenu des propositions de clarification qui ont été faites, je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 133 rectifié est retiré.
Je suis saisi de quinze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 37 rectifié, présenté par M. Biwer et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi les troisième à avant-dernier alinéas du texte proposé par cet article pour l'article L. 542-10-1 du code de l'environnement :
« - le dépôt de la demande d'autorisation de création du centre est précédé d'un rapport de la commission nationale mentionnée à l'article L. 542-3, d'un débat public au sens de l'article L. 121-1, d'une enquête publique et du recueil de l'avis des collectivités territoriales situées en tout ou partie dans les zones de proximité mentionnées à l'article L. 542-11 ;
« - au vu de ces rapports et avis, le Gouvernement présente un projet de loi autorisant la création d'un centre de stockage réversible en couche géologique profonde de déchets radioactifs ;
« - en cas de vote favorable, la création de ce centre peut être décidée par décret en Conseil d'État ;
« Lors de l'examen de la demande d'autorisation, la sûreté du centre est appréciée au regard des différentes étapes de sa gestion, y compris sa fermeture définitive. L'autorisation fixe la durée minimale pendant laquelle, à titre de précaution, la réversibilité du stockage doit être assurée. Cette durée ne peut être inférieure à trois cents ans.
La parole est à M. Claude Biwer.
M. Claude Biwer. Cet amendement, en coordination avec l'amendement n° 36 rectifié déposé sur l'article 7 bis, vise à détailler la procédure d'autorisation de création du centre de stockage en couche géologique profonde.
Monsieur le ministre délégué, votre amendement n° 154 rectifié, tendant à réécrire l'article 8, vise également à clarifier le processus. Il rappelle que le dépôt de la demande d'autorisation de création du centre doit être précédé d'un débat public, du recueil de l'avis des collectivités territoriales situées en tout ou partie dans une zone de consultation définie par décret, ainsi que de la saisine de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, et qu'elle doit donner lieu à la présentation de rapports de l'ANDRA, de l'Autorité de sûreté nucléaire et de la Commission nationale.
Je regrette que vous ayez omis l'enquête publique, ce que prévoit le présent amendement.
Cela étant, j'adhère globalement à votre démarche, à deux exceptions près.
Tout d'abord, il me paraît indispensable que le Parlement soit appelé à se prononcer sur l'ouverture du centre de stockage.
Ensuite, nous proposons d'allonger la durée de la réversibilité du stockage en la portant à un minimum de trois cents ans, au lieu de cent ans, qui est la durée de remplissage d'un centre.
Notre proposition se fonde sur l'avis de l'Autorité de sûreté nucléaire sur les recherches relatives à la gestion des déchets à haute activité et à vie longue menées dans le cadre de la loi du 30 décembre 1991. Cet avis se réfère aux estimations de l'ANDRA selon lesquelles la réversibilité du stockage pourrait être assurée sur deux ou trois siècles. Il est donc très important d'étendre à trois siècles la durée de la réversibilité, au regard des populations concernées.
En effet, le remplissage du centre devant durer environ un siècle, il est nécessaire de conserver une période de réversibilité avant sa fermeture définitive.
M. le président. L'amendement n° 154 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Remplacer les troisième à avant-dernier alinéas du texte proposé par cet article pour l'article L. 542-10-1 du code de l'environnement par six alinéas ainsi rédigés :
« - le dépôt de la demande d'autorisation de création du centre est précédé d'un débat public au sens de l'article L. 121-1 sur la base d'un dossier réalisé par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs créée à l'article L. 542-11 ;
« - la demande d'autorisation de création du centre donne lieu à un rapport de la commission nationale mentionnée à l'article L. 542-3, à un avis de l'Autorité de sûreté nucléaire et au recueil de l'avis des collectivités territoriales situées en tout ou partie dans une zone de consultation définie par décret ;
« - la demande est transmise, accompagnée du compte rendu du débat public, du rapport de la commission nationale mentionnée à l'article L. 542-3, et de l'avis de l'Autorité de sûreté nucléaire, à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, qui l'évalue et rend compte de ses travaux aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat ;
« - le Gouvernement présente ensuite un projet de loi fixant les conditions de réversibilité. Après promulgation de cette loi, l'autorisation de création du centre peut être délivrée par décret en Conseil d'État, pris après enquête publique ;
« - L'autorisation de création d'un centre de stockage en couche géologique profonde de déchets radioactifs ne garantissant pas la réversibilité de ce centre dans les conditions prévues par cette loi ne peut être délivrée ;
« - Lors de l'examen de la demande d'autorisation de création, la sûreté du centre est appréciée au regard des différentes étapes de sa gestion, y compris sa fermeture définitive. L'autorisation fixe la durée minimale pendant laquelle, à titre de précaution, la réversibilité du stockage doit être assurée. Cette durée ne peut être inférieure à cent ans.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Loos, ministre délégué. Cet amendement permet de clarifier le processus d'autorisation de création d'un centre de stockage en couche géologique profonde en rassemblant les dispositions prévues initialement dans les articles 7 bis et 8 et concernant la répartition des rôles entre le Parlement et le Gouvernement.
Il s'agit en particulier de positionner clairement l'étape du projet de loi en se fondant sur le processus normalement mis en oeuvre dans le cadre d'une installation nucléaire de base et en prévoyant le rendez-vous parlementaire en amont de la délivrance éventuelle du décret.
M. le président. Le sous-amendement n° 165, présenté par Mme Didier, MM. Coquelle et Billout, Mme Demessine, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le quatrième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 154 rectifié pour remplacer les troisième à avant-dernier alinéas de l'article L. 542-10-1 du code de l'environnement :
« le Gouvernement présente ensuite un projet de loi fixant les conditions de réversibilité et portant autorisation de création d'un centre de stockage en couche géologique profonde. Après enquête publique, un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application de cette loi ;
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Nous estimons que seule la représentation nationale dispose de la légitimité démocratique pour autoriser la création d'un centre de stockage en couche géologique profonde.
M. le président. Le sous-amendement n° 159 rectifié, présenté par MM. Longuet et Biwer, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le dernier alinéa du texte proposé par l'amendement 154 rectifié :
L'autorisation de création du centre de stockage en couche géologique profonde de déchets radioactifs dans le callovo-oxfordien de la région de Bure ne peut être délivrée si elle ne garantit pas la réversibilité sous tous ses aspects de ce centre dans les conditions prévues par cette loi.
Le sous-amendement n° 156 rectifié, présenté par MM. Longuet et Biwer, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du dernier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 154 rectifié, après les mots :
au regard
insérer les mots :
du plan de circulation des déchets radioactifs établi par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs et
Le sous-amendement n° 157 rectifié, présenté par MM. Longuet et Biwer, est ainsi libellé :
Après la première phrase du dernier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 154 rectifié, insérer une phrase ainsi rédigée :
Seule une loi peut autoriser celle-ci.
La parole est à M. Gérard Longuet, pour défendre ces trois sous-amendements.
M. Gérard Longuet. Le sous-amendement n° 159 rectifié concerne l'application de la réversibilité au site du callovo-oxfordien de la région de Bure. À cet égard, j'attends avec impatience et intérêt la proposition de notre collègue Charles Guené.
Le sous-amendement n° 156 rectifié vise à introduire dans l'amendement n° 154 rectifié la prise en considération du plan de circulation des déchets radioactifs établi par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs. Sauf démonstration contraire de M. le ministre délégué, nous souhaitons que l'accès au laboratoire soit pris en compte au titre des conditions de sécurité et de réversibilité. Ce point n'est pas clairement mentionné dans l'amendement du Gouvernement.
Enfin, le sous-amendement n° 157 rectifié vise à soumettre la fermeture définitive du centre de stockage à une autorisation résultant d'une disposition législative votée par le Parlement à l'expiration du délai de réversibilité, de cent ans dans le texte qui nous est soumis, durée que notre collègue Claude Biwer propose de porter à trois cents ans.
Cela étant, peut-on légiférer pour trois siècles ? Notre société produit des déchets qui seront toujours nocifs dans trois siècles. Il me paraît donc raisonnable de poser le principe de l'examen d'une disposition législative par le Parlement afin de créer une pression suffisante pour que chacun prenne ses responsabilités face aux populations directement concernées.
M. le président. Le sous-amendement n° 166, présenté par Mme Didier, MM. Coquelle et Billout, Mme Demessine, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Remplacer les deux dernières phrases du dernier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 154 rectifié pour remplacer les troisième à avant-dernier alinéas de l'article L. 542-10-1 du code de l'environnement par une phrase ainsi rédigée :
À titre de précaution, le stockage est maintenu réversible pendant toute la durée de son exploitation et au-delà pendant une durée de surveillance instituée pour permettre de reprendre et entreposer les déchets, si nécessaire, au vu des résultats de cette surveillance.
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Nous souhaitons concrétiser la possibilité de rendre réversible le stockage en couche géologique profonde et introduire la notion de surveillance.
M. le président. Le sous-amendement n° 158 rectifié, présenté par MM. Longuet et Biwer, est ainsi libellé :
À la fin de la dernière phrase du dernier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 154 rectifié, remplacer les mots :
cent ans
par les mots :
trois cents ans
Ce sous-amendement a été défendu.
L'amendement n° 69, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et M. Desessard, est ainsi libellé :
Après les mots :
à l'article L. 542-3
rédiger ainsi la fin du troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 542-10-1 du code de l'environnement :
, d'un débat public au sens de l'article L. 121-1, d'une consultation par voie référendaire des populations des départements concernés par le site, et d'un vote au Parlement
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet. Il s'agit de préciser selon quelles modalités les populations des départements concernés par le site seront consultées.
Comme vous le savez, plus de 50 000 habitants de la Meuse et de la Haute-Marne se sont exprimés dans le cadre d'une pétition organisée par le monde associatif. D'une façon plus large, à la question : « S'il devait y avoir un projet d'enfouissement de déchets nucléaires dans votre département, souhaiteriez-vous être consulté par référendum ? », posée le 23 septembre 2005 par l'IFOP, 89 % des personnes interrogées ont répondu oui.
Au-delà de ce qui est déjà prévu, des modalités nouvelles de consultation du public doivent être mises en place pour permettre aux populations locales de valider l'hypothèse de l'installation d'un équipement aussi lourd.
Ces dispositions de consultation des populations locales existaient déjà dans la loi Bataille. L'amendement n° 69 a pour objet de consolider encore cette démarche.
M. le président. L'amendement n° 86, présenté par MM. Piras, Raoul et Teston, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le quatrième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 542-10-1 du code de l'environnement, après les mots :
du compte rendu du débat public
insérer les mots :
, de l'avis du conseil général du territoire concerné
La parole est à M. Bernard Piras.
M. Bernard Piras. L'article 8 est extrêmement important puisque y est prévue la procédure au terme de laquelle la création d'un centre de stockage en couche géologique profonde sera autorisée. Il a suscité de vifs débats à l'Assemblée nationale, qui l'a substantiellement modifié par l'adoption d'un certain nombre d'amendements visant à conforter la procédure d'autorisation de mise en oeuvre du centre de stockage.
Notre amendement vise à renforcer encore cette procédure en rendant obligatoire la prise en compte de l'avis du conseil général concerné par un site de stockage avant que la demande de sa création ne soit transmise au Parlement. Il a également pour objet de permettre à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques d'avoir tous les éléments en main et de disposer non seulement de l'avis de l'Autorité de sûreté nucléaire, mais également de celui du conseil général.
M. le président. L'amendement n° 111, présenté par Mme Didier, MM. Coquelle et Billout, Mme Demessine, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le quatrième alinéa du texte proposé par cet article pour insérer un article L. 542-10-1 dans le code de l'environnement par un membre de phrase ainsi rédigé :
les conclusions de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques portent sur le respect des dispositions du présent article, et en particulier de la réversibilité du projet de stockage ;
L'amendement n° 112, présenté par Mme Didier, MM. Coquelle et Billout, Mme Demessine, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après le quatrième alinéa du texte proposé par cet article pour insérer un article L. 542-10-1 dans le code de l'environnement, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« - un projet de loi portant autorisation de création d'un centre de stockage est ensuite déposé sur le bureau des assemblées ;
La parole est à Mme Évelyne Didier, pour présenter ces deux amendements.
Mme Évelyne Didier. L'article 8 vise à introduire dans le code de l'environnement un nouvel article qui définit un centre de stockage en couche géologique profonde comme une installation nucléaire de base et qui précise les règles et les conditions à mettre en oeuvre pour sa création.
Dans la version initiale du projet de loi, l'autorisation de création était accordée par le Conseil d'État, mais n'était pas soumise au vote du Parlement. Le texte a donc considérablement évolué au cours de son examen par les députés, puisque a été notamment instaurée la remise aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat d'un rapport de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques relatif au dossier de demande d'autorisation.
Pourtant, cette disposition nous paraît très limitée puisque le Parlement ne pourra pas s'exprimer par un vote, ce qui, vous en conviendrez, est sa principale vocation.
Notre groupe avait prévu de longue date de déposer cet amendement. Nous avons constaté que le rapporteur avait choisi de faire de même : c'est la preuve que, lorsque les idées cheminent, elles peuvent parfois aboutir au consensus.
Monsieur le ministre délégué, vous avez déclaré lors de votre audition par la commission des affaires économiques que la Constitution ne permettait pas au Parlement « de se substituer au pouvoir exécutif pour délivrer une autorisation de nature éminemment technique ». Nous ne pouvons pas être d'accord avec de tels propos. La décision de créer un centre d'enfouissement n'est pas « éminemment » technique, elle est « éminemment » politique.
Nous estimons avant tout qu'il n'est pas acceptable de laisser cette décision d'autorisation au seul pouvoir du Gouvernement. C'est pourquoi, par l'amendement n° 112, nous proposons qu'elle soit soumise au vote du Parlement, comme c'est d'ailleurs le cas dans d'autres pays européens. Encore une fois, cela nous semble être une garantie de transparence et de démocratie.
L'amendement n° 111, quant à lui, vise à rappeler que l'évaluation du rapport remis par la Commission nationale d'évaluation à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques doit porter sur le respect des dispositions de l'article 7 bis - son sort semble en suspens -, notamment sur la garantie de réversibilité. Il s'agit, là encore, d'une exigence forte qui s'est exprimée lors du débat public.
Je souhaite par ailleurs revenir sur la question de l'acceptabilité par les territoires de la décision relative à la création d'un centre de stockage.
La pétition demandant un référendum dans les départements de la Meuse et de la Haute-Marne, qui a recueilli plusieurs dizaines de milliers de signatures, témoigne de la réelle volonté des populations de faire entendre leur avis sur la question de l'implantation géographique des lieux de stockage des déchets, mais aussi sur celle des voies à suivre pour stocker ces déchets. Au demeurant, mes chers collègues, vous noterez que cette pétition est signée aussi bien par des « anti » que par des pronucléaires ; elle est même signée par des personnes qui sont convaincues de la pertinence du choix du stockage en couche géologique profonde !
J'ai bien entendu nos collègues qui craignent que le vote ne soit négatif à tous les coups. Cependant, nous avons le temps, avant la décision finale, de bien faire mesurer tous les enjeux à la population.
Par ailleurs, je voudrais rappeler que les personnes que nous avons rencontrées avaient pour principale revendication d'être respectées, écoutées, reconnues. Ce qu'elles ne supportent pas, c'est de ne pas avoir leur mot à dire dans le débat. J'ai entendu des convictions fortes, je n'ai jamais entendu d'ultimatum. Les interventions du public lors des débats organisés par la Commission nationale du débat public confirment aussi cette volonté de participation populaire.
Certes, la décision de construire un centre de stockage souterrain n'est pas un sujet dont l'intérêt et les enjeux se limiteraient à l'échelon local. En effet, l'avenir des déchets est un sujet qui concerne l'ensemble de la population nationale, puisque c'est l'aval d'une filière industrielle qui est en jeu, filière dont toute la population tire les bénéfices en matière énergétique. Cependant, il est difficile de nier que les premières personnes légitimées à donner leur avis sont les habitants des territoires pressentis pour la construction du centre de stockage !
Nous souhaitons donc réaffirmer qu'il est impossible de gérer ce sujet sensible de manière autoritaire. C'est pourquoi il faut aller au-delà de l'organisation d'un débat public tel qu'il est défini dans le code de l'environnement, et au-delà de la consultation des élus des collectivités territoriales. Chaque citoyen doit avoir le droit d'exprimer son avis sur ce sujet.
Affirmer cela, c'est aussi permettre au Parlement, en définitive, de voter en réelle connaissance de l'avis des populations concernées.
Pour finir, j'indiquerai que la loi organique relative au référendum local d'août 2003 ne permet pas l'organisation à l'échelon départemental d'un référendum portant sur des sujets qui ne relèvent pas des compétences du conseil général. C'est pourquoi nous n'avons pas déposé d'amendement allant en ce sens, même si nous estimons que cette solution serait tout à fait opportune et justifiée.
M. le président. L'amendement n° 87 rectifié, présenté par MM. Piras, Raoul et Teston, Mmes Voynet, Demontès et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Remplacer l'antépénultième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 542-10-1 du code de l'environnement par deux alinéas ainsi rédigés :
« - À l'issue de cette première étape, le gouvernement soumet au Parlement un projet de loi autorisant la création d'un centre de stockage des déchets radioactifs à haute activité et à vie longue après enquête publique et avis des collectivités territoriales situées en tout ou partie dans les zones de proximité mentionnées à l'article L. 542-11.
« Après vote conforme du Parlement, l'autorisation de création peut ensuite être délivrée par décret en Conseil d'État.
La parole est à M. Bernard Piras.
M. Bernard Piras. Comme l'amendement n° 111, que vient de présenter Mme Didier, cet amendement vise à renforcer le processus démocratique devant aboutir à autoriser la création d'un centre de stockage en couche géologique profonde de déchets radioactifs.
Si l'article 7 bis prévoit que le Gouvernement présente un projet de loi sur les conditions de réversibilité du centre de stockage en couche géologique profonde, il n'y est pas question d'un projet de loi portant sur la décision ultime de créer un tel centre de stockage en profondeur. Une fois que les conditions de réversibilité auront été approuvées - en admettant qu'elles le soient ! -, la décision pourra donc être actée sans que le Parlement ait de nouveau à se prononcer. Pour notre part, nous pensons au contraire que le choix d'un site de stockage doit être validé par une loi votée par le Parlement.
L'amendement n° 87 rectifié s'inscrit donc, en réalité, dans le prolongement du dispositif imaginé par la loi Bataille, qui prévoyait ce type de procédure. Il a également pour objet de faire en sorte que l'autorisation de création d'un tel centre ne puisse être délivrée qu'après un vote conforme du Parlement.
M. le président. L'amendement n° 152, présenté par MM. Sido et Guené, est ainsi libellé :
Dans le cinquième alinéa du texte proposé par cet article pour insérer un article L. 542-10-1 dans le code de l'environnement, supprimer les mots :
de création
L'amendement n° 148, présenté par MM. Sido et Guené, est ainsi libellé :
Après les mots:
en tout ou partie dans
rédiger comme suit la fin du cinquième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 542-10-1 du code de l'environnement :
une zone de consultation définie par décret.
La parole est à M. Bruno Sido, pour présenter ces deux amendements.
M. Bruno Sido. Je voudrais tout d'abord remercier le Gouvernement d'avoir récrit une partie de l'article 8 en tenant compte, au fond, des préoccupations qui étaient les miennes et qui m'ont poussé à déposer ces deux amendements.
J'insisterai sur la complexité du texte issu des travaux de l'Assemblée nationale : on se trouvait finalement en présence de cinq zones distinctes sans plus savoir lesquelles étaient concernées ; la nécessité de créer une zone de consultation n'était plus très claire, et l'on avait du mal à en comprendre les contours. C'est ce à quoi tendait à remédier l'amendement n° 148, l'amendement n° 152 étant purement rédactionnel.
Le Gouvernement a déposé un amendement visant à répondre à ces difficultés, je l'en remercie.
Je tiens pour terminer à relever que Mme Didier a elle-même reconnu que les collectivités locales ne pouvaient pas organiser de référendum puisque, tout simplement, la loi l'interdit. Cela figurera au procès-verbal, et j'en suis heureux.
M. le président. L'amendement n° 70, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et M. Desessard, est ainsi libellé :
Compléter l'antépénultième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 542-10-1 du code de l'environnement par une phrase ainsi rédigée :
Les collectivités territoriales dont une partie du territoire est distante de moins de dix kilomètres de l'accès principal aux installations souterraines ont un droit de veto sur la création d'un centre de stockage en couche géologique profonde.
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet. Plusieurs intervenants l'ont souligné, un éventuel centre de stockage en couche géologique profonde n'est pas une installation d'intérêt local, mais résulte de choix effectués au niveau national et débattus par le Parlement.
Le choix du site retenu pour l'implantation du centre de stockage ne peut reposer sur des éléments exclusivement techniques - ce n'est d'ailleurs pas le cas ici -, je l'ai démontré hier : c'est sur la base d'éléments qui sont tout sauf techniques que la recherche d'autres sites, dans le granit notamment, a été interrompue.
J'entends fréquemment invoquer la légitime réserve de la population pour expliquer pourquoi il est impossible de la consulter : on a si peur qu'elle ne refuse !
Pour ma part, je souhaite au contraire que l'on aille au contact de cette population, et les différents amendements que j'ai déposés sur cet article ont tous le même objet : que la consultation du public ait lieu par voie de référendum et que le droit soit reconnu aux populations d'être pleinement associées à un choix lourd qui engage pour des siècles l'avenir de leur territoire.
Cela impose une seule stratégie : aller au contact, convaincre, apporter des arguments, et des arguments qui ne soient pas seulement financiers, associer les populations qui vont devoir subir les conséquences de l'implantation d'un centre de stockage aux arguments qui fondent une stratégie nationale sur le plan énergétique.
L'amendement n° 71, qui va être appelé dans quelques instants, a le même objet.
M. le président. L'amendement n° 121 rectifié, présenté par MM. Longuet et Biwer, est ainsi libellé :
Compléter la première phrase de l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 542-10-1 du code de l'environnement, par les mots :
, et du plan de circulation des déchets radioactifs établi par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs
La parole est à M. Gérard Longuet.
M. Gérard Longuet. Cet amendement vise à introduire la prise en considération du plan de circulation des déchets radioactifs établi par l'ANDRA parmi les critères d'autorisation du laboratoire.
M. le président. L'amendement n° 113, présenté par Mme Didier, MM. Coquelle et Billout, Mme Demessine, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Remplacer les deux dernières phrases du sixième alinéa du texte proposé par cet article pour insérer un article L. 542-10-1 dans le code de l'environnement par une phrase ainsi rédigée :
À titre de précaution, le stockage est maintenu réversible pendant toute la durée de son exploitation et au-delà pendant une durée de surveillance instituée pour permettre de reprendre et entreposer les déchets, si nécessaire, au vu des résultats de cette surveillance.
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Depuis le début de l'examen de ce projet de loi, nous insistons pour que le stockage soit considéré comme une solution non pas provisoire, mais réversible, ce qui n'est pas tout à fait la même chose.
En effet, le stockage n'est pas provisoire ; il est possible même qu'il devienne définitif. Pour autant, il doit à notre avis demeurer réversible, au cas où un événement surviendrait qui invaliderait cette solution.
L'amendement n° 113 tend donc à mieux définir la notion de réversibilité.
En effet, au vu des résultats du débat public, il conviendrait de rendre beaucoup plus contraignante l'obligation de réversibilité du stockage pendant un temps assez long - notre collègue M. Biwer propose trois cents ans - afin de donner tout son sens à la notion de réversibilité.
Nous vous proposons donc de préciser que, à titre de précaution, le stockage est maintenu réversible pendant toute la durée de son exploitation et, au-delà, pendant une durée de surveillance instituée pour permettre de reprendre et entreposer les déchets, si nécessaire, au vu des résultats de cette surveillance. Cette nouvelle rédaction aurait également pour avantage d'introduire la notion de surveillance.
Par ailleurs, le texte initial définit une durée de cent ans durant laquelle la réversibilité est assurée. Cette durée est plus ou moins théorique : cent ans, c'est beaucoup à l'aune d'une vie humaine, mais c'est bien peu de chose rapporté à la durée de vie des éléments nucléaires !
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen vous proposent donc à la fois de mieux définir la notion de réversibilité et de retirer la mention de durée - sauf à indiquer une durée suffisamment longue pour qu'elle nous convienne également.
M. le président. L'amendement n° 71, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et M. Desessard, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi la dernière phrase de l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 542-10-1 du code de l'environnement :
La réversibilité devra être assurée, à titre de précaution, de manière indéfinie.
Cet amendement a été défendu.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 38 est présenté par MM. Biwer, C. Gaudin et les membres du groupe Union centriste-UDF.
L'amendement n° 134 est présenté par M. Longuet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
À la fin de l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 542-10-1 du code de l'environnement, remplacer les mots :
cent ans
par les mots :
trois cents ans
La parole est à M. Claude Biwer, pour présenter l'amendement n° 38.
M. Claude Biwer. Cet amendement de coordination propose de porter de cent à trois cents ans la période de réversibilité.
Il n'existe pas de consensus parmi les scientifiques sur la période de réversibilité qui doit être appliquée au centre de stockage. En outre, il n'est pas impossible que, dans les décennies à venir, l'évolution des connaissances et des techniques permette à moyen terme d'éviter de recourir au stockage des déchets en couche profonde. La réversibilité du stockage semble donc intéressante si elle est assurée suffisamment longtemps, ainsi que l'ont souligné nombre de nos collègues. Une durée de trois cents ans nous paraît digne d'intérêt.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour présenter l'amendement n° 134.
M. Gérard Longuet. Il est défendu.
M. le président. Je suis maintenant saisi d'un sous-amendement n° 167, présenté par M. Guené, et ainsi libellé :
Avant le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 154 rectifié du Gouvernement, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« - la demande d'autorisation doit concerner une couche géologique ayant fait l'objet d'études au moyen d'un laboratoire souterrain ; »
La parole est à M. Charles Guené.
M. Charles Guené. Conformément à ce que j'avais annoncé plus tôt dans le débat, et pour donner satisfaction à M. Longuet, je propose en effet ce sous-amendement à l'amendement n° 154 rectifié.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble des amendements et des sous-amendements ?
M. Henri Revol, rapporteur. L'amendement n° 37 rectifié est un amendement de conséquence de l'amendement n° 36 rectifié par lequel M. Biwer propose un rendez-vous législatif différent de la formule qui a été retenue par la commission et qui prévoit que les différentes étapes du projet du centre de stockage soient encadrées par deux lois.
Je salue la cohérence de votre démarche, monsieur Biwer, mais, en vertu de la même cohérence, la commission émet un avis défavorable.
L'amendement n° 154 rectifié reprend en les clarifiant des dispositions qui étaient un peu dispersées dans le projet de loi. La commission émet donc un avis favorable.
S'agissant du sous-amendement n° 167, que la commission n'a pas pu examiner, j'émets en tant que rapporteur un avis favorable.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 165, la commission privilégie un encadrement de la création d'un centre de stockage géologique par deux lois : l'une fixant les conditions de la réversibilité et permettant de bloquer le processus d'autorisation, l'autre permettant de marquer la fin de la période de réversibilité.
J'ai déjà indiqué pour quelles raisons cette architecture nous semblait la plus équilibrée. Bien évidemment, l'amendement qui nous est proposé est incompatible avec le schéma que je viens de décrire et que nous avons adopté à l'occasion de deux amendements.
La commission émet donc un avis défavorable.
J'en viens au sous-amendement n° 159 rectifié.
M. Gérard Longuet. Il est retiré !
M. le président. Le sous-amendement n° 159 rectifié est retiré.
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Henri Revol, rapporteur. Le sous-amendement n° 156 rectifié est important dans la mesure où, nous le savons bien, si nos concitoyens ont globalement confiance dans la sûreté de nos installations nucléaires, ils sont parfois inquiets quant au transport des matières radioactives. Cela sera d'autant plus vrai pour un centre de stockage à haute activité et à vie longue.
La commission se demande toutefois si c'est bien dans les documents de sûreté liés aux centres de stockage que doit figurer le plan de transport. Aussi elle aimerait connaître l'avis du Gouvernement pour voir comment cette exigence particulière en matière de transport de déchets pourra être prise en compte, peut-être sous une forme différente de celle que propose M. Longuet.
Le sous-amendement n° 157 rectifié est essentiel puisqu'il met en place l'un des deux rendez-vous législatifs dont nous avons déjà parlé, encadrant la création puis l'exploitation du centre de stockage géologique. Il signifie clairement que le centre qui serait éventuellement créé en 2025 ne pourrait devenir définitif que par le vote d'une loi donnant ainsi toute sa force au principe fondamental de réversibilité.
Ce sous-amendement marquera, je le crois, la contribution forte du Sénat sur ce texte. La commission émet donc un avis favorable.
Le sous-amendement n° 158 rectifié consacre également l'importance du principe de la réversibilité, en particulier du point de vue des habitants de Bure et de sa région, que nous comprenons, mon cher collègue. Cependant, le fait de porter à trois cents ans la durée de réversibilité poserait deux difficultés majeures. D'une part, cela déséquilibrerait le rapport sûreté-réversibilité et, d'autre part, cela ne garantirait pas à nos arrière-petits-enfants la possibilité de décider eux-mêmes ce qu'ils souhaitent faire du centre de stockage.
Autant il est possible en matière de nucléaire de prendre des engagements sur quelques décennies, autant cela semble plus difficile à imaginer sur trois cents ans. Trois cents ans, mes chers collègues, c'est tout de même très long. Imaginez des installations que l'on garantirait pendant trois cents ans !
M. Bruno Sido. Cela ferait remonter à Louis XIV !
M. Henri Revol, rapporteur. Bien sûr, le château de Versailles a bien tenu le coup. Il est d'ailleurs dommage que nous ayons abandonné les locaux dont nous étions propriétaires. (Sourires.)
La commission émet donc un avis défavorable.
Le sous-amendement n° 166 vise également à insister sur le caractère fondamental de ce fameux principe de réversibilité, auquel nous sommes tous très attachés.
Toutefois, trop de réversibilité peut tuer la réversibilité. En effet, maintenir le centre de stockage réversible pendant plusieurs milliers d'années - trois cents ans déjà - signifierait en fait que le centre doit être conçu pour être éternellement accessible à l'entrée comme à la sortie.
Cela représenterait un risque exorbitant en matière de sûreté de l'installation, puisqu'une installation toujours accessible signifie une installation dont les parois intérieures et les accès ne seront jamais scellés dans des matières maximisant la sûreté de l'installation.
Les experts nous garantissent aujourd'hui que l'on peut optimiser l'équilibre entre la sûreté et la réversibilité en garantissant cette dernière pendant environ un siècle, mais au-delà l'équilibre serait peut-être rompu.
La commission émet donc un avis défavorable.
L'amendement n° 69 vise deux objectifs. Il prévoit tout d'abord que la création d'un centre de stockage sera précédée d'un vote du Parlement - sur ce point, les auteurs de l'amendement ont déjà obtenu satisfaction - ; il prévoit ensuite l'organisation d'un référendum local pour autoriser la création du centre.
En cela, l'amendement relève d'une démarche déjà initiée sur le plan local - un essai de consultation - sur laquelle il y aurait beaucoup à dire en termes de représentativité.
Les 50 000 signatures revendiquées par les partisans d'une association de la région de Bure ont été obtenues dans des conditions discutables, un peu à la sauvette.
M. Henri Revol, rapporteur. En effet, interroger quelqu'un au bord de la route en lui demandant s'il est pour ou contre la création d'un centre de stockage relève d'un procédé discutable.
M. Bruno Sido. Des mineurs ont même signé !
M. Bernard Piras. Les mineurs sont aussi concernés !
M. Henri Revol, rapporteur. Quoi qu'il en soit, un référendum local ne saurait devenir la règle, aujourd'hui, pour la création du centre de stockage, demain, pour la création de toutes les installations nucléaires et pour toutes les installations classées de France.
Il faut bien sûr une concertation et une consultation locale particulières, et l'article 8 nous apporte toutes ces garanties puisqu'il prévoit non seulement une enquête publique et un débat public, mais aussi la consultation de l'ensemble des collectivités locales concernées.
La commission émet donc un avis défavorable.
En ce qui concerne l'amendement n° 86, la commission fera tout d'abord une remarque de forme. Il est possible que le périmètre du centre de stockage ne soit pas situé sur un seul département et qu'il se trouve sur deux départements, comme c'est le cas aujourd'hui pour le laboratoire de recherche. Dans ces conditions, il serait peut-être préférable de parler de « conseils généraux » plutôt que de « conseil général ».
M. Bernard Piras. Je n'y vois pas d'objection !
M. Henri Revol, rapporteur. Par ailleurs, sur le fond, cette fois, cet amendement nous semble satisfait, mon cher collègue, puisque les dispositions que nous proposons vont au-delà. Dans le cadre de l'article 8, il est en effet évident que le Parlement se verra transmettre non seulement l'avis des conseils généraux consultés, comme vous le demandez, mais aussi celui de toutes les collectivités locales concernées.
Cette disposition, je le rappelle, concernerait trente-trois communes si le site du centre de stockage était situé à proximité du laboratoire actuel.
Cet amendement ne nous semble donc pas nécessaire et je demande à son auteur de le retirer.
M. Bernard Piras. Je le retire !
M. Henri Revol, rapporteur. S'agissant de l'amendement n° 111, je remercie Mme Didier et ses collègues d'avoir bien voulu rappeler une fois de plus que la question de la réversibilité est essentielle.
Telle est la raison pour laquelle l'amendement n° 154 rectifié du Gouvernement reprend les dispositions de la commission, et celles-ci vont bien au-delà d'une simple mention de la question de la réversibilité dans le rapport de l'office d'évaluation des choix scientifiques et technologiques demandé par l'amendement n° 111.
Nous proposons en effet que ce soit par une loi que le Parlement impose les conditions de réversibilité d'un éventuel centre de stockage. Dans ces conditions, la commission demande le retrait de l'amendement.
Mme Évelyne Didier. Je le retire !
M. Henri Revol, rapporteur. S'agissant de l'amendement n° 112, la commission préconise un encadrement de la création d'un centre de stockage géologique par deux lois : la première fixant les conditions de la réversibilité et permettant de bloquer éventuellement le processus d'autorisation, la seconde permettant de marquer la fin de la période de réversibilité.
J'ai déjà indiqué pour quelles raisons cette architecture nous semblait la plus équilibrée. Bien évidemment, l'amendement qui nous est proposé est incompatible avec le schéma que je viens de décrire.
La commission émet donc un avis défavorable.
L'amendement n° 87 rectifié ayant un objet analogue au précédent, la commission émet le même avis défavorable.
J'en viens maintenant aux amendements nos 152 et 148, pour en demander le retrait.
M. Bruno Sido. Ils sont retirés !
M. le président. Les amendements nos 152 et 148 sont retirés.
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Henri Revol, rapporteur. En ce qui concerne l'amendement n° 70, le dispositif actuel prévoit que toutes les communes situées dans un rayon de dix kilomètres autour de l'installation sont consultées pour la création d'un centre de stockage.
Pour mémoire, cela signifie qu'une trentaine de communes ayant une population moyenne de deux cents habitants devraient être consultées si le centre de stockage était situé à proximité de l'actuel laboratoire souterrain.
Ce dispositif semble donc équilibré et il serait sans doute excessif d'aller au-delà et de donner à chaque collectivité un droit de veto sur l'ensemble du projet. Le droit de veto existe, mais nous le réservons au Parlement, comme cela a été souhaité par la majorité.
La commission émet donc un avis défavorable.
L'amendement n° 121 rectifié n'est plus utile, puisqu'il est identique au sous-amendement n° 156 rectifié de M. Longuet. La commission en demande le retrait.
L'amendement n° 113 s'ajoute à la liste des amendements qui visent à insister sur le caractère fondamental du principe de réversibilité.
La commission émet un avis défavorable.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 71.
Mme Dominique Voynet. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 71 est retiré.
Veuillez poursuivre et achever votre propos, monsieur le rapporteur.
M. Henri Revol, rapporteur. Enfin, s'agissant des amendements identiques nos 38 et 134, j'ai déjà exprimé mon opposition à la proposition qui consiste à porter la durée de réversibilité à trois cents ans.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements et des sous-amendements, à l'exception de l'amendement n° 154 rectifié ?
M. François Loos, ministre délégué. S'agissant de l'amendement n° 37 rectifié, la Commission nationale d'évaluation a préconisé un délai de réversibilité de cent ans et le Gouvernement a retenu cette proposition.
Comme l'a rappelé M. le rapporteur, eu égard à l'état actuel de nos connaissances, d'un point de vue technique, il me paraît difficile de nous engager sur une durée supérieure à cent ans.
C'est pourquoi le Gouvernement a émis un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n° 154 rectifié du Gouvernement fait l'objet de plusieurs sous-amendements.
Le sous-amendement n° 167 reprend l'objet de l'amendement n° 133 rectifié. Monsieur Guené, dans un souci de précision, je vous invite à en rectifier la rédaction en ajoutant les mots « de création » après les mots « demande d'autorisation ». Le Gouvernement sera favorable au sous-amendement ainsi rectifié.
M. le président. Monsieur Guené, acceptez-vous de modifier votre sous-amendement dans le sens suggéré par M. le ministre délégué ?
M. Charles Guené. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 167 rectifié, présenté par M. Guené, et ainsi libellé :
Avant le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 154 rectifié du Gouvernement, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« - la demande d'autorisation de création doit concerner une couche géologique ayant fait l'objet d'études au moyen d'un laboratoire souterrain ; »
Veuillez poursuivre, monsieur le ministre délégué.
M. François Loos, ministre délégué. Le sous-amendement n° 165 s'inscrit dans un dispositif différent de celui que nous proposons : j'y suis donc défavorable.
Sur le sous-amendement n° 156 rectifié, relatif au plan de circulation, la commission a souhaité entendre la position du Gouvernement.
La question des plans de circulation est certes importante, mais il faut savoir que la sûreté des transports de matières radioactives est d'ores et déjà assurée quelles que soient leur provenance ou leur destination, y compris hors des régions de stockage. Je rappelle en effet qu'il circule des déchets bien au-delà des zones de stockage.
Ce type de transport obéit à des réglementations nationale et internationale. Les modèles de conteneurs, en particulier, sont soumis à un régime d'autorisation individuel. Il en ira ainsi pour tous les types de transports de matières nucléaires.
J'ajoute que la sûreté n'est pas appréciée au moment de la demande d'autorisation de création du stockage. Elle est assurée par des règles générales qui s'imposent.
Le dossier soumis à débat et enquête publique devra présenter les éléments d'information permettant au public d'apprécier l'impact du projet en termes de volume et de plan de transport.
Telles sont les raisons pour lesquelles ce sous-amendement ne me semble pas justifié. Il ne ferait que compliquer l'exercice puisque des textes s'appliquent déjà au transport de matières nucléaires. Il n'y a pas de raison de prévoir des règles différentes s'agissant du stockage, d'autant que tous les éléments d'information nécessaires figureront automatiquement dans le dossier d'enquête publique.
Je vous invite donc à retirer ce sous-amendement, qui n'a pas d'objet réel.
Je suis en revanche favorable au sous-amendement n° 157 rectifié, qui prévoit que la décision de fermeture d'un centre de stockage devra être prise dans une loi.
Le sous-amendement n° 166 fait lui aussi référence à la durée de réversibilité de trois cents ans. La Commission nationale d'évaluation et l'Autorité de sûreté nucléaire ont, je le rappelle, préconisé une durée de cent ans, durée qui a par ailleurs été retenue par la commission. Je suis donc défavorable à ce sous-amendement.
Je suis également défavorable au sous-amendement n° 158 rectifié, pour les mêmes raisons.
L'amendement n° 69 vise à faire précéder le dépôt d'une demande d'autorisation de création d'un centre à une consultation par voie référendaire.
L'article 8, dans sa rédaction actuelle, apporte toutes les garanties d'une bonne consultation des populations. J'ajoute qu'aucun autre type d'installation industrielle ne donne lieu à un si grand nombre de consultations. C'est pourquoi j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
Je suis également défavorable à l'amendement n° 112, qui s'inscrit dans une architecture - pour reprendre le terme de M. le rapporteur - incompatible avec celle que propose le Gouvernement.
Les mêmes arguments valent pour l'amendement n° 87 rectifié, sur lequel le Gouvernement a également émis un avis défavorable.
L'amendement n° 70 vise à accorder un droit de veto aux collectivités locales dont le territoire est situé à moins de dix kilomètres de l'entrée du centre de stockage.
Le Gouvernement considère que le dispositif prévu à l'article 8 est équilibré. Je suis donc défavorable à cet amendement.
Je suis également défavorable à l'amendement n° 121 rectifié, car le transport de matières nucléaires fait déjà l'objet de réglementations internationale et nationale.
Les amendements nos 113, 38 et 134 faisant eux aussi référence à la durée de réversibilité de trois cents ans, j'y suis également défavorable.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote sur l'amendement n° 37 rectifié.
M. Gérard Longuet. Je suis très favorable à cet amendement. M. Claude Biwer et moi-même souhaitons que le Gouvernement présente un projet de loi autorisant le passage d'un centre d'études à un centre de stockage réversible.
Nous comprenons fort bien que le Gouvernement et la filière électronucléaire, dont il a la responsabilité au nom de la nation tout entière, soient contraints de ne pas différer indéfiniment la décision de créer un centre de stockage après que les études auront été conduites dans le sous-sol callovo-oxfordien de Bure-Saudron. Il est normal que le Gouvernement ne veuille pas faire peser sur la décision de créer un centre de stockage l'aléa d'un vote du Parlement à l'horizon de 2015, c'est-à-dire dans neuf ans.
Le Gouvernement nous proposera d'ailleurs, après l'examen en première lecture du projet de loi à l'Assemblée nationale, un rendez-vous législatif portant non pas sur la création d'un centre, mais sur le principe de la réversibilité, ce qui constitue indéniablement un progrès par rapport aux dispositions initiales du projet de loi, qui ne prévoyait qu'une procédure administrative.
Nous sommes favorables à ce rendez-vous législatif. La loi du 30 décembre 1991, dite loi Bataille, prévoyait, dans son article 4, un rendez-vous législatif à échéance de quinze ans. Nous avons acquis la certitude absolue que c'est la perspective de ce rendez-vous qui a permis d'établir un dialogue permanent et, pourquoi ne pas le dire, des relations qui sont devenues confiantes entre les autorités publiques chargées de l'énergie, en particulier de l'énergie nucléaire, les populations et leurs élus.
L'immense majorité des maires géographiquement concernés sont favorables au laboratoire et envisagent sans appréhension sa transformation en centre de stockage.
Les parlementaires ont également évolué. Ainsi, les deux députés de la Meuse, qui n'appartiennent pas à ma formation politique, après avoir condamné le principe du laboratoire en 1997 - ce qui a sans doute contribué à leur élection - le soutiennent aujourd'hui. À tout pécheur miséricorde, il y a beaucoup plus de joie, cher Charles Revet, pour le bon pasteur à voir la brebis égarée regagner le troupeau... Vous connaissez tous la parabole ! (M. Charles Guené s'exclame.) Mais cela ne vous concerne pas, mon cher collègue. Vous n'êtes pas une brebis égarée, vous, vous êtes croyant ! (Sourires.)
Voilà pour la conversion des deux députés égarés.
Le rendez-vous législatif prévu dans la loi Bataille a donc eu la vertu d'établir la confiance. Ne croyez pas pour autant qu'en l'absence d'un tel rendez-vous il ne se serait rien passé. Simplement, le débat n'aurait pas eu lieu au Parlement, qui est l'enceinte naturelle d'un débat national, et il serait resté sur le terrain de la manifestation, de la pétition, du référendum local, avec tous les aléas, les imprécisions, les contradictions, l'émotion aussi, propres à cette forme de dialogue.
Je suis profondément républicain, partisan d'un système parlementaire dans lequel les élus prennent leurs responsabilités. Les électeurs ont, le cas échéant, la possibilité de les désavouer, ce qu'ils ne se privent d'ailleurs pas de faire. Mais au moins ont-ils des interlocuteurs qui assument leurs responsabilités !
La décision, considérable, que constitue le passage d'un centre d'études à un centre de stockage mérite un débat parlementaire. Ce débat, monsieur le ministre délégué, vous l'avez accepté, mais sous une forme restreinte, en le cantonnant à la question de la réversibilité.
Il s'agissait d'un débat in abstracto. Grâce au sous-amendement n° 167 rectifié, il s'agit désormais d'un débat in concreto, qui vise le seul site susceptible d'accueillir dans l'avenir un centre de stockage permanent. Nous avons donc progressé, mais je reste frustré d'un débat global.
Le débat législatif que vous nous proposez ne portera que sur la réversibilité. Mais vous n'empêcherez pas - et je le souhaite d'ailleurs profondément - que l'on aborde alors non seulement la réversibilité technique, c'est-à-dire la capacité à récupérer des fûts dans des galeries qui n'auraient pas été trop déformées, mais aussi la réversibilité sous tous ses aspects.
Le débat sur la réversibilité débouchera alors sur un débat global sur la gestion des déchets nucléaires, compte tenu de la progression observée dans les deux autres voies que sont la séparation-transmutation et l'entreposage, avec la perspective de pouvoir entreposer sur des périodes plus longues que celles que nous maîtrisons actuellement.
Puisque le débat sera global, pourquoi diable ne pas accepter les amendements qui y font référence, et qui prévoient que seule une loi pourra autoriser la transformation du laboratoire en centre de stockage ?
De cette façon, les électeurs, nos compatriotes, nos concitoyens, et j'utilise ce terme à dessein, auront la certitude que, le moment venu, c'est le problème dans son ensemble qui sera examiné par le Parlement. Et nous ne faisons rien d'autre aujourd'hui !
Chacun a reconnu que le débat de 1991 fut de qualité. Celui de 2006 n'est pas médiocre, bien au contraire. Il est respectueux et représentatif de tous les points de vue. Il n'aurait pas été choquant de prévoir, en 2015, un débat sur la transformation d'un centre d'études en un centre de stockage.
Vous nous proposez une solution intermédiaire. En d'autres termes, vous reconnaissez que nous avons raison mais, pour des considérations qui sont sans doute d'ordre juridique, vous ne pouvez pas accéder à notre demande.
Je reste néanmoins persuadé que l'amendement n° 37 rectifié, comme tous les amendements qui portent cette conviction, et que je voterai obstinément, même s'ils ne sont pas adoptés, a l'immense mérite de préconiser le recours à la loi dans un domaine de tradition administrative. Mais pouvons-nous avoir la certitude que les établissements classés seront encore présents dans plusieurs milliers d'années ? La réponse est bien évidemment négative.
J'aurais préféré que, dans un, deux ou cinq siècles, on puisse dire que la représentation nationale a su prendre ses responsabilités plutôt que de laisser à un Premier ministre le soin de signer un décret, rédigé sur proposition des administrations compétentes.
En d'autres termes, j'aurais préféré que les parlementaires prennent leurs responsabilités.
En 1991, les députés ont pris leurs responsabilités en adoptant, en première lecture, dans un climat responsable, le projet de loi relatif aux recherches sur la gestion des déchets radioactifs. Les sénateurs feront de même, et plus encore en 2015, en s'appuyant sur neuf années supplémentaires d'expériences et de dialogues.
Si vous ne pouvez pas l'accepter aujourd'hui, monsieur le ministre délégué, vous en reconnaissez cependant la nécessité en fixant ce rendez-vous législatif à propos de la réversibilité. C'est une moitié du chemin. Si vous aviez parcouru tout le chemin, vous auriez sans doute contribué, peut-être à apaiser d'éventuelles inquiétudes, mais aussi et surtout à satisfaire le besoin de dialogue et de considération qu'expriment les populations concernées directement par le laboratoire.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Loos, ministre délégué. Je ne souhaite pas contredire Gérard Longuet. Il s'agit pour moi d'exprimer mon respect pour les populations concernées.
Il faut être très clair : nous avons besoin d'un site de stockage. Même si trois axes complémentaires doivent être étudiés, l'un d'eux peut effectivement préoccuper les gens qui habitent à proximité du site. Il est donc normal que la concertation s'organise et que le débat s'engage.
Je suis tout à fait d'accord avec le rendez-vous parlementaire qui vient d'être évoqué. J'ai d'ailleurs rédigé un amendement qui permet de l'organiser et de reposer ainsi, avec le recul nécessaire, la question de la réversibilité. Quant à savoir si la durée de réversibilité du stockage ne peut être inférieure à trois cents ans, si les études qui seront menées d'ici à 2015 conduisent à adopter une autre position, cette question pourra être rediscutée et la solution, modifiée, et ce sans aucun problème.
Au demeurant, que dit la Constitution sur ce point ? Aux termes de son article 34, la loi est votée par le Parlement. Or la loi fixe les règles et détermine les principes fondamentaux : la préservation de l'environnement en fait partie.
Par conséquent, pour respecter tout simplement la Constitution, il est nécessaire de présenter un projet de loi sur les principes fondamentaux de l'environnement.
S'agissant de la demande exprimée par l'amendement n° 37 rectifié, je n'ai absolument pas la volonté de m'opposer à un débat franc et clair, à l'issue duquel le Parlement pourra prendre toutes ses responsabilités, afin que la représentation nationale puisse faire le travail qui est le sien.
Mais il est clair également que la Constitution sépare les rôles.
Par conséquent, selon moi, le projet de loi, tel qu'il est rédigé, n'enlève rien à ma volonté de voir la représentation nationale prendre toutes ses responsabilités lors du débat que nous devrons naturellement organiser dans dix ans.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol, rapporteur. Je souhaite redire que l'avis exprimé par la commission n'a pas été pris à la légère, puisque tous les arguments avancés par nos collègues Claude Biwer et Gérard Longuet ont été pris en considération.
Deux projets de loi relatifs au nucléaire sont en cours de discussion au Parlement.
M. Michel Teston. Hélas !
M. Henri Revol, rapporteur. Il s'agit, d'une part, du projet de loi relatif à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire et, d'autre part, du projet de loi de programme relatif à la gestion durable des matières et des déchets radioactifs, que nous sommes en train d'examiner.
Quand on additionne les mesures qui vont être mises en place à la suite de l'adoption de ces deux projets de loi, on s'aperçoit qu'elles garantissent que rien ne sera fait sans que le Parlement se penche de nouveau, notamment en 2015 et en 2025, sur les problèmes fondamentaux, comme le souhaitent nos collègues et les populations qu'ils représentent.
Le projet de loi tend en effet à préciser qu'un tel rendez-vous aura lieu, afin de vérifier que toutes les conditions sont réunies pour prendre une décision, dans le cadre d'un environnement législatif solide, qui n'existait pas, mais qui sera en place avec l'adoption du projet de loi relatif à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire.
Par conséquent, mes chers collègues, vous pouvez être sûrs que la représentation nationale apporte aux populations locales les garanties que vous souhaitez. Telle est la raison pour laquelle la commission vous invite à retirer l'amendement n° 37 rectifié. Sinon, elle confirmera son avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Claude Biwer, pour explication de vote.
M. Claude Biwer. Si beaucoup de choses ont été dites, je retiens en priorité les difficultés que nous avons rencontrées pour trouver un deuxième site.
Si nous avons trouvé le premier site, c'est parce que, localement, des élus se sont « mouillés », au niveau aussi bien des communes que des départements.
À l'époque, en tant que conseiller général, j'ai fait partie des trente et un élus qui se sont unanimement déclarés favorables à ce choix. Chacun savait alors que rien ne serait fait en dehors du Parlement, Gérard Longuet le répétait tout à l'heure.
Lorsque nous avons compris - et ce n'était pas si facile ! - que le Parlement serait saisi dans un délai donné et que nous bénéficiions ainsi d'un véritable parapluie, nous avons pu avancer.
Aujourd'hui, on nous dit ici que cela n'est pas nécessaire, que l'on verra plus tard ; paradoxalement, on nous dit aussi que ce qu'une loi peut faire, une autre loi peut le défaire.
Qu'en est-il donc du principe du rendez-vous législatif ? Veut-on se priver de consulter le Parlement plutôt que de prévoir de le saisir de la question quitte à constater alors que, les positons ayant changé, il faut aussi modifier la loi ?
Pour ce qui nous concerne, dans le cadre de nos responsabilités, nous n'avons pas déposé ces amendements à la légère. C'est que nous sommes confrontés à la réalité du débat, monsieur le ministre délégué.
Tout à l'heure, monsieur le rapporteur, vous disiez que des pétitions étaient signées dans des conditions parfois assez singulières. Il est vrai que, dans le secteur dont je parle, il ne faut pas trop circuler, car, entre la gendarmerie et les pétitionnaires, il y a de quoi être arrêté trois fois par jour ! (Sourires.)
Nous avons soutenu ce projet de loi et nous continuons à le soutenir dans cette assemblée, mais nous voudrions aussi que l'on rassure les populations concernées. J'ai pris, comme Gérard Longuet, des engagements vis-à-vis d'elles. Par conséquent, nous souhaiterions que le texte évolue dans ce sens.
Je maintiens donc l'amendement n° 37 rectifié, car je considère qu'il serait logique que l'on envisage les choses ainsi.
M. le président. La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.
M. Alain Fouché. Ayant été confronté à ces dossiers dans mon département, la Vienne, je les connais un peu. En effet, un projet très important d'installation de laboratoire, qui était bien avancé, a été arrêté.
Pour ma part, je voterai les amendements qui ont été déposés par MM. Longuet et Biwer. En effet, un certain nombre de pressions pouvant être exercées en ces matières, pourquoi ne pas le dire, il est préférable que le Parlement soit saisi des éventuelles évolutions à décider.
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.
M. Bruno Sido. Ce point très important relève à l'évidence du domaine réglementaire. Voilà quelques années, un coup de téléphone, une circulaire, et la procédure était décidée !
Ce qui est très particulier dans ce domaine, c'est que le stockage est effectué pour une période quasi indéfinie, puisqu'on sait très bien que la réversibilité n'est mentionnée que par respect du principe de précaution. Le stockage est donc potentiellement définitif.
Dans cette affaire, je trouve dommage que l'on n'ait pas pris la décision de réfléchir sur le concept même de stockage. En effet, selon la rédaction actuelle de la loi, les recherches sur le stockage doivent continuer ; si elles donnent des résultats, il faudra, le moment venu, donner une autorisation de stockage. Le Parlement sera alors saisi des conditions de réversibilité. Mais il ne sera pas saisi, ce que je regrette profondément, du concept même de stockage, volet du problème qui n'est tout de même pas inintéressant si l'on veut bien admettre que la solution, à supposer qu'elle soit retenue, engage quasiment l'éternité !
À l'inverse, je n'ignore pas que la saisine du Parlement en amont risque d'inciter les collectivités à renoncer à se prononcer elles-mêmes et à se défausser, en attendant que le législateur tranche.
Donc, tout en regrettant que nous n'ayons pas à nous prononcer sur le concept même de stockage, et parce que je souhaite que toutes les collectivités s'impliquent dans le processus, je ne voterai pas l'amendement n° 37 rectifié, bien qu'il me paraisse intéressant.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Voynet, pour explication de vote.
Mme Dominique Voynet. Je ne sais plus exactement de quoi nous sommes en train de débattre. En effet, hier, il m'avait semblé que les parlementaires de la majorité avaient insisté sur le fait que le stockage devait être retenu comme une option de référence. J'avais donc imaginé que, après avoir débattu, ils s'étaient forgé une conviction. Or j'entends dans la bouche de M. Sido qu'il n'en est rien, et j'en suis évidemment un peu inquiète.
Je ne me doutais pas, en posant la question de la réversibilité voilà quelques années, que le concept aurait autant de succès. Je pense cependant que l'on doit en traiter d'une façon plus sérieuse qu'on ne l'a fait jusqu'ici.
Monsieur le rapporteur, vous avez fait mine de plaisanter à propos des amendements de Mme Didier. (Protestations sur les travées de l'UMP.)
M. Henri Revol, rapporteur. Mais non !
Mme Dominique Voynet. Vous avez fait mine de plaisanter, je n'ai pas dit que vous ne preniez pas ces questions au sérieux.
Je crois tout simplement que, si nous nous posons des questions sur la réversibilité, c'est parce que nous sommes confrontés à un défi inédit. En effet, la demi-vie des matières et des déchets radioactifs qui sont destinés à être stockés dans les couches géologiques profondes excède les capacités de projection de l'esprit humain. Cent ans, comme l'a dit M. le ministre délégué, c'est long, trois cents ans, cela ne paraît pas techniquement accessible. Quid de vingt-quatre mille ans, durée qui est celle de la demi-vie du plutonium ?
On l'aura compris au fil du débat, il ne s'agit pas tant de reprendre les déchets, dont on ne sait d'ailleurs plus très bien s'ils seront ou non « conteneurés », que de garder la mémoire du site.
J'avais d'ailleurs cru comprendre que la barrière géologique avait justement pour objet d'éviter un travail trop lourd pour la mise en place de conteneurs. Mais j'ai réalisé hier, au cours du débat, que certains n'excluaient pas le « conteneurage » des déchets de haute activité à vie longue. Ce mot de « conteneurage » est un terme affreux, mais il fait partie du terrible jargon que nous utilisons ici.
Les mots ont un sens et je voudrais pointer la divergence qui existe entre l'amendement présenté par M. Biwer et celui qui est défendu par le Gouvernement.
M. Biwer nous demande d'adopter un amendement visant à prévoir que « le Gouvernement présente un projet de loi autorisant la création d'un centre de stockage réversible ».
Quant à l'amendement n° 154 rectifié, il est ainsi rédigé : « Le Gouvernement présente ensuite un projet de loi fixant les conditions de réversibilité ».
Une précision s'impose donc.
Gérard Longuet a évoqué le large soutien des parlementaires de la Meuse à ce projet, en évoquant la « conversion » de deux députés initialement hostiles. Or je viens de relire leurs interventions à l'Assemblée nationale. L'un d'entre eux y a d'ailleurs défendu une question préalable. Tous deux ont insisté sur le fait que le consentement des populations avait été obtenu dans un contexte très différent, puisqu'il s'agissait alors de créer plusieurs laboratoires et de tester la réversibilité.
J'ai sous les yeux la lettre du président du conseil général de la Meuse - nous l'avons tous reçue -, qui évoque une motion votée à l'unanimité des membres du conseil général mettant notamment en évidence « le refus de l'hypothèse d'un stockage irréversible » et insistant - c'est le point fondamental pour le conseil général - sur le fait que le principe de réversibilité ne doit pas avoir de durée minimum.
J'ai donc l'impression qu'il s'agit d'un jeu de dupes : on adopte des formulations ampoulées et ambiguës qui visent à laisser croire aux populations que la réversibilité est un concept robuste. Pour ma part, j'y vois plus que jamais une figure de rhétorique !
M. le président. La parole est à M. Charles Guené, pour explication de vote.
M. Charles Guené. Certains auraient souhaité que la rédaction de l'article 8 soit plus précise, je le comprends, mais, personnellement, elle me satisfait.
En effet, le Gouvernement devant présenter au Parlement un projet de loi fixant les conditions de la réversibilité du centre de stockage et toute autorisation de création du centre devant garantir cette réversibilité, vous ne pouvez pas dire que le Parlement ne pourra pas s'exprimer et qu'il n'y aura pas véritablement de débat !
Personnellement, je ne voterai pas l'amendement n° 37 rectifié, bien que j'en comprenne le principe, car nous disposons déjà de toutes les précautions nécessaires.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Loos, ministre délégué. Je n'ai sans doute pas suffisamment présenté l'amendement n° 154 rectifié, mais je pensais qu'il avait été débattu en commission et qu'il n'était donc pas nécessaire de revenir dans le détail sur le dispositif proposé par le Gouvernement.
Or nous avons beaucoup plus parlé des dispositifs concurrents que de ce dispositif-là, qui est extrêmement riche, surtout avec le sous-amendement n° 157 rectifié de M. Gérard Longuet permettant d'assurer qu'une éventuelle fermeture résultera d'une loi.
Je me dois donc de commenter plus avant le texte du Gouvernement.
Mesdames, messieurs les sénateurs, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques non seulement sera saisi de l'ensemble du dossier - le rapport de la Commission nationale d'évaluation et tous les avis recueillis - qui aura été constitué au préalable, mais fournira lui-même un rapport. Enfin, le Gouvernement présentera un projet de loi relatif au principe de la réversibilité, principe sur lequel tout repose aujourd'hui.
Par conséquent, le dispositif que nous proposons répond très précisément aux préoccupations des uns et des autres, et je remercie M. Charles Guené de l'avoir dit. Il permet, à toutes les étapes, d'avoir les débats nécessaires et de mettre en garde sur tel ou tel choix ou, au contraire, d'appuyer telle ou telle solution qui serait présentée. Le Parlement traitera la question non pas en une fois, mais à trois reprises, d'abord avec l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, qui lui-même va l'étudier dans tous les sens, et ensuite par le biais de deux projets de loi clés pour le stockage éventuel.
Alors, arrêtons de nous poser de fausses questions, d'autant que ce dispositif est le résultat d'un débat qui, à l'Assemblée nationale, a été au moins aussi long, si ce n'est plus long, que celui que nous avons ici ! Je ne veux pas dire pour autant que ce dispositif n'est plus perfectible. Il l'est, et plusieurs sous-amendements, dont j'approuve certains, ont d'ailleurs été présentés. Par conséquent, il me semble qu'il devrait recueillir l'accord du Sénat.
M. le président. Mes chers collègues, chacun l'aura compris, le Sénat doit maintenant choisir entre l'amendement n° 37 rectifié et l'amendement n° 154 rectifié, ou repousser les deux.
Je mets aux voix l'amendement n° 37 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 167 rectifié.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Monsieur Longuet, le sous-amendement n° 159 rectifié est-il maintenu ?
M. Gérard Longuet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. Le sous-amendement n° 159 rectifié est retiré.
Monsieur Gérard Longuet, en est-il de même du sous-amendement n° 156 rectifié ?
M. Gérard Longuet. Je le retire également, monsieur le président.
M. le président. Le sous-amendement n° 156 rectifié est retiré.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 157 rectifié.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 158 rectifié.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements nos 69, 112, 87 rectifié, 70, 121 rectifié et 113 ainsi que les amendements identiques nos 38 et 134 n'ont plus d'objet.
L'amendement n° 22, présenté par M. Revol, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après les mots :
à l'autorisation
supprimer la fin du dernier alinéa du texte proposé par cet article pour insérer l'article L. 542-10-1 du code de l'environnement.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel de cohérence avec le reste de l'article.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?