M. André Lardeux, rapporteur. Tel qu'il est actuellement rédigé, l'article 53 semble donner à l'employeur un droit de regard sur les jours de congé de présence parentale pris par son salarié. En cas de non-respect du délai de quarante-huit heures ou si le congé ne convient pas à l'employeur, il semble notamment sous-entendu que celui-ci pourrait s'opposer à l'absence de son salarié. Bien évidemment, il ne doit pas en être ainsi, car le congé de présence parentale est un droit.
Pour autant, la courtoisie veut que le salarié respecte, dans la mesure du possible, un délai de prévenance à l'égard de son employeur, afin que celui-ci puisse s'organiser.
Le présent amendement prévoit donc une simple information de la part du salarié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à cet amendement de courtoisie. (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 86, présenté par Mme Hermange, est ainsi libellé :
Supprimer le sixième alinéa du texte proposé par le IV de cet article pour l'article L. 122-28-9 du code du travail.
La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange.
Mme Marie-Thérèse Hermange. Le dispositif de congé et d'allocation journalière de présence parentale a pour objet d'offrir au parent une plus grande souplesse dans l'organisation de sa vie familiale et professionnelle.
Or il me semble qu'au regard de cet objectif la disposition qui prévoit la possibilité de conclure une convention entre le salarié et son employeur formalise la procédure d'octroi de la prestation de manière excessive.
Cet amendement a donc pour objet de supprimer la mention explicite au recours à cette convention. Les parents qui se trouvent dans de telles situations ont suffisamment de soucis pour que l'on veuille leur simplifier la tâche.
Mme Isabelle Debré. Excellent !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. André Lardeux, rapporteur. Le projet de loi me semble très peu contraignant à cet égard, puisque l'on n'impose pas d'obligation au salarié : on lui donne la possibilité de passer une convention avec son employeur pour déterminer les modalités de prise des jours de congé.
Aucune formalité supplémentaire n'est imposée et cette disposition reste donc extrêmement souple.
Supprimer toute mention d'une convention reviendrait en réalité à l'interdire ; c'est d'ailleurs l'interprétation des tribunaux dans le cas du congé parental d'éducation. Or les membres du groupe de travail de M. Brun mis en place dans le cadre de la préparation de la conférence de la famille ont regretté cet état de fait et demandé qu'une telle convention soit possible, afin de faciliter les conditions de retour du salarié en congé.
La commission considère qu'il serait dommage de se priver de cet outil. Elle émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 86.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Un certain nombre de familles craignent, effectivement, que cette convention facultative ne se retourne contre elles et ne soit interprétée par l'employeur comme une convention obligatoire - tel n'est pas le cas - subordonnant à l'accord de l'employeur la possibilité de prendre ce congé de présence parentale.
L'Assemblée nationale avait conçu cette disposition dans l'intérêt du salarié qui prendrait le congé de présence parentale, pour organiser les modalités de son travail au cours de cette durée. C'était, j'en suis certain, l'intention de l'Assemblée comme du Gouvernement.
Toutefois, à partir du moment où une difficulté d'interprétation peut survenir et où le parent peut se sentir tenu de conclure une convention qui réduirait ses droits, j'émets un avis favorable sur l'amendement présenté par Mme Hermange.
M. le président. L'amendement n° 276, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après le VI bis de cet article, insérer trois paragraphes ainsi rédigés :
... - 1°Après l'article 40 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, il est inséré un article 40 bis ainsi rédigé :
« Art. 40 bis. - Le congé de présence parentale est accordé au fonctionnaire lorsque la maladie, l'accident ou le handicap d'un enfant à charge présente une particulière gravité rendant indispensables une présence soutenue de sa mère ou de son père et des soins contraignants. Les modalités d'appréciation de la gravité de la maladie, de l'accident ou du handicap sont définies par décret en Conseil d'État.
« Ce congé est accordé de droit, sur demande écrite du fonctionnaire. Le nombre de jours de congé dont il peut bénéficier à ce titre ne peut excéder trois cent dix jours ouvrés au cours d'une période de trente-six mois. Chacun de ces jours ne peut être fractionné. La période de congé ne peut être imputée sur la durée du congé annuel.
« Pendant les jours de congé de présence parentale, le fonctionnaire n'est pas rémunéré. Il n'acquiert pas de droits à la retraite, sous réserve des dispositions de l'article L.9 du code des pensions civiles et militaires.
« À l'issue de la période du congé de présence parentale ou en cas de diminution des ressources du ménage ou en cas de décès de l'enfant, le fonctionnaire est réaffecté dans son ancien emploi. Dans le cas où celui-ci ne peut lui être proposé, il est affecté dans un emploi le plus proche de son dernier lieu de travail. S'il le demande, il peut également être affecté dans un emploi le plus proche de son domicile sous réserve de l'application de l'article 60 ci-dessous.
« Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article. »
2° A l'article 32 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 susmentionnée, les mots « et congé de présence parentale » sont supprimés.
3° L'intitulé de la section 6 du chapitre V de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 susmentionnée est ainsi rédigé : « Section 6 - Congé parental.».
4° L'article 54 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 susmentionnée est abrogé.
5° Au septième alinéa de l'article L. 9 du code des pensions civiles et militaires, la mention : « 54 bis » est remplacée par la mention : « 40 bis ».
... - 1° Après l'article 60 quinquies de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, il est inséré un article 60 sexies ainsi rédigé :
« Art. 60 sexies. - Le congé de présence parentale est accordé au fonctionnaire lorsque la maladie, l'accident ou le handicap d'un enfant à charge présente une particulière gravité rendant indispensables une présence soutenue de sa mère ou de son père et des soins contraignants. Les modalités d'appréciation de la gravité de la maladie, de l'accident ou du handicap sont définies par décret en Conseil d'État.
« Ce congé est accordé de droit, sur demande écrite du fonctionnaire. Le nombre de jours de congé dont il peut bénéficier à ce titre ne peut excéder trois cent dix jours ouvrés au cours d'une période de trente-six mois. Chacun de ces jours ne peut être fractionné. La période de congé ne peut être imputée sur la durée du congé annuel.
« Pendant les jours de congé de présence parentale, le fonctionnaire n'est pas rémunéré. Il n'acquiert pas de droits à la retraite, sous réserve des dispositions de l'article L.9 du code des pensions civiles et militaires.
« À l'issue de la période du congé de présence parentale ou en cas de diminution des ressources du ménage ou en cas de décès de l'enfant, le fonctionnaire est réaffecté dans son ancien emploi. Dans le cas où celui-ci ne peut lui être proposé, il est affecté dans un emploi le plus proche de son dernier lieu de travail. S'il le demande, il peut également être affecté dans un emploi le plus proche de son domicile sous réserve de l'application de l'article 54 ci-dessus.
« Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article. »
2° A l'article 55 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 susmentionnée, les mots « et congé de présence parentale » sont supprimés.
3° L'intitulé de la section 6 du chapitre V de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 susmentionnée est ainsi rédigé : « Section 6 - Congé parental ».
4° L'article 75 bis de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 susmentionné est abrogé.
... - 1° A l'article 41 de la loi n°86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, il est inséré un 11° ainsi rédigé :
« 11° A un congé de présence parentale, accordé au fonctionnaire lorsque la maladie, l'accident ou le handicap d'un enfant à charge présente une particulière gravité rendant indispensables une présence soutenue de sa mère ou de son père et des soins contraignants. Les modalités d'appréciation de la gravité de la maladie, de l'accident ou du handicap sont définies par décret en Conseil d'État.
« Ce congé est accordé de droit, sur demande écrite du fonctionnaire. Le nombre de jours de congé dont il peut bénéficier à ce titre ne peut excéder trois cent dix jours ouvrés au cours d'une période de trente-six mois. Chacun de ces jours ne peut être fractionné. La période de congé ne peut être imputée sur la durée du congé annuel.
« Pendant les jours de congé de présence parentale, le fonctionnaire n'est pas rémunéré. Il n'acquiert pas de droits à la retraite, sous réserve des dispositions de l'article L.9 du code des pensions civiles et militaires.
« À l'issue du congé de présence parentale ou en cas de diminution des ressources du ménage ou en cas de décès de l'enfant, le fonctionnaire est réaffecté de plein droit, au besoin en surnombre, dans son établissement d'origine.
« Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article. »
2° A l'article 39 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 susmentionnée, les mots : « et congé de présence parentale » sont supprimés.
3° L'intitulé de la section 6 du chapitre IV de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 susmentionnée est ainsi rédigé : « Section 6 - Congé parental ».
4° L'article 64-1 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 susmentionnée est abrogé.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Philippe Bas, ministre délégué. Cet amendement a pour objet d'étendre le dispositif aux fonctionnaires.
Cette mesure n'a pu être adoptée à l'Assemblée nationale, car il fallait se donner le temps de la concertation avec les organisations représentatives des fonctionnaires.
Cette concertation ayant eu lieu, nous sommes parvenus au dispositif qui figure dans cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. André Lardeux, rapporteur. La commission émet un avis favorable.
M. le président. L'amendement n° 241, présenté par Mme Campion, M. Cazeau, Mme Demontès, M. Domeizel, Mmes Printz et Le Texier, M. Godefroy, Mme Alquier et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du VII de cet article, remplacer la date :
1er mai 2006
par la date :
1er janvier 2006
La parole est à Mme Claire-Lise Campion.
Mme Claire-Lise Campion. Cet amendement tend à permettre aux familles de bénéficier plus rapidement de la mesure proposée dans le PLFSS.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. André Lardeux, rapporteur. Pour des raisons pratiques, la commission est défavorable à cet amendement.
Il s'agit d'un congé relativement difficile à gérer. Par conséquent, il faut laisser un peu de temps aux CAF pour mettre en place ce dispositif, donc nous en tenir à la date proposée dans le projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Quand bien même nous voudrions le faire, ce serait impossible : c'est en effet la première fois que les CAF vont servir une telle prestation journalière.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. Madame Campion, l'amendement est-il maintenu ?
Mme Claire-Lise Campion. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l'article 53, modifié.
(L'article 53 est adopté.)
Article 54
Le 4° du VIII de l'article 60 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 (n° 2003-1199 du 18 décembre 2003) est abrogé.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 203 est présenté par MM. Fischer, Muzeau et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 242 est présenté par Mme Campion, M. Cazeau, Mme Demontès, M. Domeizel, Mmes Printz, Le Texier et Schillinger, M. Godefroy, Mme Alquier et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Guy Fischer, pour défendre l'amendement n° 203.
M. Guy Fischer. Les dispositions d'entrée en vigueur de la PAJE prévoyaient que seuls les enfants nés ou adoptés à compter du 1er janvier 2004 bénéficiaient de la nouvelle prestation, mais que les enfants nés entre le 1er janvier 2001 et le 1er janvier 2004 pourraient se trouver soumis, à compter de janvier 2007, au système de la PAJE.
L'objet de cet article est de revenir sur cette exception, par mesure d'économie.
Nous souhaitons supprimer cet article, parce qu'il remet en cause un engagement précis.
Nous ne souhaitons pas cautionner le fait que le Gouvernement ne tienne pas l'un de ses engagements. C'est un discrédit pour le travail législatif et, plus généralement, pour le travail politique : la parole donnée devant la nation doit être tenue.
Par ailleurs, nous considérons que cette mesure porte atteinte à l'intérêt des enfants et de leurs familles, qui se retrouvent privés de l'un de leurs droits.
Pourquoi vouloir priver les familles qui ont des enfants âgés de trois à six ans du bénéfice de la PAJE, dont tout le monde se plaît à dire que c'est une réussite ? Nous l'avons entendu tant dans les propos de MM. les rapporteurs que dans ceux de M. le ministre.
La décision figurant dans l'article 54 conduit au maintien de deux régimes de prestations pour la petite enfance.
Cela pénalise surtout les familles qui ont recours à un mode de garde extérieur et qui percevront les anciennes prestations pour l'emploi d'une assistante maternelle ou d'une aide à domicile. Dans certains cas, la différence peut varier de 50 % entre la PAJE et l'ancienne prestation.
Nous ne comprenons pas comment vous pouvez affirmer qu'il faut pouvoir concilier au mieux vie professionnelle et vie familiale et, dans le même temps, vouloir réaliser une économie de 430 millions d'euros au détriment des familles.
C'est pourquoi nous demandons la suppression de cet article et le maintien des droits des familles. Nous le demandons avec d'autant plus d'insistance que nous constatons avec inquiétude à quel point la branche famille devient, pour ce gouvernement, la variable d'ajustement budgétaire de la sécurité sociale. Nous ne pouvons l'accepter !
M. le président. La parole est à Mme Claire-Lise Campion, pour défendre l'amendement n° 242
Mme Claire-Lise Campion. L'article 54 est choquant ; il ne fait pas honneur au Gouvernement s'agissant de sa politique familiale.
Comme vient de le dire notre collègue M. Fischer, vous revenez, monsieur le ministre, sur des engagements que vous aviez pris dans la loi de financement de la sécurité sociale de 2004. En effet, le 1er janvier 2007 y était inscrit en tant que date de basculement dans le dispositif de la PAJE pour l'ensemble des familles, quelle que soit la date de naissance de l'enfant.
Vous revenez donc sur des engagements pris devant l'ensemble de nos concitoyens, et notamment devant les familles concernées, puisque l'article 54 prévoit d'abroger cette disposition.
Vous nous direz sans doute, monsieur le ministre, que les familles concernées continueront de bénéficier de l'aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée, l'AFEAMA, et de l'allocation de garde d'enfant à domicile, l'AGED. Mais, sur le principe, il n'est pas imaginable de cautionner une telle décision. Les raisons en sont claires : il s'agit de réaliser 430 millions d'euros d'économies sur trois ans ; ce sont des économies substantielles.
Les familles sauront sans doute apprécier cette décision.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. André Lardeux, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements qui visent à supprimer l'article 54.
La proposition du Gouvernement ne remet en effet nullement en cause les avantages existants : aucune famille ne verra diminuées ou supprimées les allocations qui lui sont versées. Donc, personne n'est lésé.
De nombreuses familles ont eu un nouvel enfant. Par conséquent, elles ne sont plus concernées puisqu'elles relèvent du dispositif PAJE.
Cette disposition concerne les enfants de trois à six ans, qui, pour beaucoup d'entre eux, sont scolarisés, ce qui limite la portée de la mesure.
Je l'ai dit lors de la discussion générale, tout budget est le résultat d'un choix entre des inconvénients. Les finances de la branche famille, comme des autres branches, sont tendues.
Je comprends donc parfaitement que l'arbitrage du Gouvernement se soit finalement porté sur cette solution plutôt que sur d'autres, qui auraient été plus préjudiciables.
Je remercie Mme Campion et M. Fischer de défendre avec ardeur le PLFSS pour 2004, qu'ils n'ont pas voté.
M. Guy Fischer. Mais ce n'est pas tout ou rien ! Nous sommes pragmatiques !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Je suis tenté de commencer cette intervention comme M. Lardeux a conclu la sienne. Je me réjouis, moi aussi, que vous vous fassiez, madame la sénatrice, monsieur le sénateur, les plus éloquents défenseurs de cette prestation d'accueil du jeune enfant, que vous avez rejetée lors de sa création et que, en tout état de cause, vous n'avez pas créée quand vous en aviez la possibilité.
M. Paul Blanc. Et voilà !
Mme Isabelle Debré. Exactement !
M. Philippe Bas, ministre délégué. Cette disposition exprime notre sens des responsabilités.
La branche famille connaît en effet un déficit. Ce déficit est certes conjoncturel, mais il est élevé.
Le Gouvernement n'a pas voulu toucher aux droits des familles puisque, au contraire, ce sont 200 000 familles supplémentaires qui bénéficieront de la PAJE par rapport au dispositif antérieur. Du moins était-ce ce que nous croyions au moment du vote de la PAJE. En réalité, 250 000 familles en bénéficieront.
En outre, nous créons, entre 2002 et 2008, 72 000 places de crèche. La convention d'objectifs et de gestion représente une hausse de 7,5 % par an pendant quatre ans. Connaissez-vous des budgets publics qui augmentent de 7,5 % par an pendant quatre ans ? Eh bien ! nous le faisons pour que notre équipement en crèches augmente de près d'un tiers au cours de la période et parce que nous savons que c'est nécessaire pour faciliter la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle.
Enfin, madame Campion, monsieur Fischer, je vous précise qu'aucune famille n'est perdante.
Certes, l'entrée en vigueur d'une petite partie de la PAJE est reportée de deux ans, mais ce report permet le maintien du dispositif actuel de l'AGED et de l'AFEAMA, qui a été fortement enrichi non pas par une réduction d'impôt, qui ne bénéficierait qu'à ceux qui paient l'impôt sur le revenu, mais par un crédit d'impôt, qui bénéficie à tout le monde et dont le montant est doublé pour 2006.
Alors, quand je vous entends aujourd'hui nous faire la leçon sur l'application d'un texte que vous n'avez pas voté, dont bénéficieront 250 000 familles au lieu de 200 000, qui est assorti d'un crédit d'impôt, lequel est doublé pour l'année prochaine, et ce alors que nous créons 72 000 places de crèche, les bras m'en tombent. (M. Paul Blanc applaudit.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 203 et 242.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 54.
(L'article 54 est adopté.)
Article additionnel après l'article 54
M. le président. L'amendement n° 287, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'article 54, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 512-2 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le second alinéa est supprimé.
2° Après le premier alinéa, il est inséré neuf alinéas ainsi rédigés :
« Ces étrangers bénéficient des prestations familiales sous réserve qu'il soit justifié, pour les enfants qui sont à leur charge et au titre desquels les prestations familiales sont demandées, de l'une des situations suivantes :
« - leur naissance en France ;
« - leur entrée régulière dans le cadre de la procédure de regroupement familial visée au livre IV du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
« - leur qualité de membre de famille de réfugié ;
« - leur qualité d'enfant d'étranger titulaire de la carte de séjour mentionnée au 10° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
« - leur qualité d'enfant d'étranger titulaire de la carte de séjour mentionnée à l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
« - leur qualité d'enfant d'étranger titulaire de la carte de séjour mentionnée à l'article L. 313-8 ou au 5° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
« - leur qualité d'enfant d'étranger titulaire de la carte de séjour mentionnée au 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à la condition que le ou les enfants en cause soient entrés en France au plus tard en même temps que l'un de leurs parents titulaires de la carte susmentionnée »
« Un décret fixe la liste des titres et justifications attestant de la régularité de l'entrée et du séjour des bénéficiaires étrangers. Il détermine également la nature des documents exigés pour justifier que les enfants que ces étrangers ont à charge et au titre desquels des prestations familiales sont demandées remplissent les conditions prévues aux alinéas précédents ».
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Philippe Bas, ministre délégué. Le présent amendement est important : il vise à assurer la pérennité de notre règle en matière d'attribution des allocations familiales aux parents d'enfants étrangers qui ne sont pas entrés en France au titre du regroupement familial, quelle que soit leur situation en France. Cette règle est prévue depuis 1987 dans le code de la sécurité sociale.
Cette mesure se justifie par une raison essentielle, qui touche d'ailleurs à l'intérêt même de ces enfants et de ces familles : avant de procéder au regroupement familial, il est vérifié que les parents ont les moyens financiers de faire vivre décemment les enfants venant de leur pays d'origine et de les accueillir dans un logement convenable.
Quand on voit l'état d'insalubrité de certains meublés dans lesquels vivent, à Paris, des familles venues d'Afrique, insalubrité telle qu'elle peut conduire à de véritables catastrophes, comme cela s'est malheureusement produit récemment, on mesure à quel point le respect de la règle du regroupement familial s'impose.
Si cette règle peut être contournée sans la moindre conséquence, alors, il n'y a plus de raison de penser qu'elle continuera de s'appliquer.
Or un certain nombre de contentieux ont mis en cause l'application de cette règle issue, je le répète, d'un décret de 1957. Devant ces difficultés juridiques, le Gouvernement a pris la décision de consolider celle-ci par la voie législative. Il a également introduit un certain nombre d'exceptions à l'impossibilité de recevoir des allocations familiales lorsque les enfants ne sont pas entrés en France au titre du regroupement familial. Je citerai les plus importantes : d'une part, les demandeurs d'asile, car la France s'honore de respecter ses engagements internationaux dans ce domaine,...
M. Guy Fischer. De moins en moins !
M. Philippe Bas, ministre délégué. ...engagements qui ont d'ailleurs une portée constitutionnelle depuis le préambule de la Constitution de 1946, et, d'autre part, les enfants dont les parents viennent exercer leur activité en France au titre de la recherche ou de l'enseignement supérieur.
Telle est l'économie générale de cet amendement important.
Il ne faut pas laisser dépérir une règle appliquée depuis 1987 par tous les gouvernements successifs, de gauche comme de droite, sous prétexte qu'elle se heurte aujourd'hui à des difficultés juridiques. Sinon, c'est en toute impunité que la règle du regroupement familial pourra être violée, et ce sera, bien entendu, au détriment des familles elles-mêmes.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Autain. Elle n'a pas pu examiner cet amendement !
M. André Lardeux, rapporteur. C'est exact, monsieur Autain,...
M. François Autain. C'est dommage !
M. André Lardeux, rapporteur. ...et j'en tiendrai compte dans l'avis que je formulerai.
M. le ministre a expliqué que les étrangers en situation régulière peuvent se trouver dans des situations différentes au regard des prestations familiales, selon que leurs enfants sont arrivés sur le territoire au titre du regroupement familial ou non.
M. François Autain. On ne s'en était pas aperçu avant !
M. André Lardeux, rapporteur. Parfois, même, cette différenciation entre les situations des enfants se fait à l'intérieur d'une même fratrie, ce qui pose quelques problèmes et explique que, lors de contentieux, la Cour de cassation a fait remarquer à l'État qu'il y avait rupture d'égalité, ce qu'a confirmé la Cour européenne des droits de l'homme.
Comme l'a expliqué M. le ministre, en l'absence de clarification juridique des conditions d'octroi de ces prestations pour les étrangers en situation régulière, la jurisprudence risque de s'étendre progressivement,...
M. François Autain. Il faut arrêter l'incendie !
M. André Lardeux, rapporteur. ... notamment à des personnes qui ne sont pas en situation régulière.
L'amendement présenté par le Gouvernement est donc nécessaire. À l'évidence, la commission n'a pas pu l'examiner, puisqu'il a été déposé tardivement. D'ailleurs, si j'avais quelques reproches à faire à M. le ministre, c'est le premier que je lui ferais : pourquoi avoir attendu la dernière minute, alors que le problème n'est pas nouveau ?
M. Guy Fischer. Voilà quatre ans que cela dure !
M. André Lardeux, rapporteur. N'ayant pas étudié cet amendement, la commission n'a pas pu obtenir un début de réponse à un certain nombre de questions, notamment en ce qui concerne le nombre d'enfants concernés et la facilité ou non des contrôles.
Cela étant, je tiens à « tordre le cou » à certaines rumeurs. Il est assez curieux, d'ailleurs, de constater la vitesse à laquelle se répand une rumeur dans ce pays. Un article de presse a annoncé, je ne sais sur quelles bases, que 40 000 enfants seraient exclus du bénéfice des allocations familiales. Cette allégation est purement fantaisiste ! Mais je veux bien admettre que le journaliste qui a écrit cet article n'avait pas à sa disposition les informations nécessaires.
Ensuite, dans la foulée de cet article, un communiqué du groupe CRC du Sénat a vilipendé cette disposition. Là non plus, je n'ai pas de remarque particulière à faire ; cela fait partie de la polémique classique entre majorité et opposition.
En revanche, un communiqué m'a beaucoup surpris : celui de Mme Brisset, défenseure des enfants, qui, s'en prenant avec virulence à la proposition du Gouvernement, a sommé celui-ci de retirer l'amendement. Cela prouve que Mme Brisset n'a rien compris à la question. Cette personne n'est donc pas à la place où elle devrait être et il faudra, le moment venu, en tirer les conclusions. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Guy Fischer. Son départ est programmé !
M. André Lardeux, rapporteur. Cela étant, à titre personnel, je n'ai pas d'objection à ce que le Sénat adopte cet amendement. Mais, comme la commission ne l'a pas examiné, je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Cet après-midi, nous avons vécu deux événements : le Gouvernement Villepin-Sarkozy a confisqué les retraites des travailleurs étrangers...
M. Guy Fischer. ... et il s'attaque maintenant aux enfants. Après les déclarations, il passe à l'acte ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Eh oui !
Cet amendement est arrivé en catastrophe pour relayer le message lancé à la cantonade sur les médias : « Vous, les immigrés, vous, les étrangers, si vous ne vous tenez pas tranquilles, si vous ne surveillez pas vos enfants, on vous supprimera les allocations familiales ! » M. Sarkozy exulte, mais, nous, nous considérons que ce genre d'amendement ne devrait pas avoir cours ici.
Ces mesures, présentées par le Gouvernement à la dernière minute, sont très graves, puisqu'elles tendent à remettre en cause la jurisprudence de la Cour de cassation concernant le versement des allocations familiales pour les familles étrangères.
En vertu d'un décret de 1987, les familles étrangères devaient justifier de la régularité du séjour de leurs enfants soit par un titre de séjour, soit par un extrait d'acte de naissance en France, soit par le certificat médical de l'Office des migrations internationales s'ils étaient entrés en France grâce au regroupement familial.
Cette situation était particulièrement injuste, puisqu'une famille pouvait se voir reconnaître le droit à des allocations familiales pour les seuls enfants nés en France et pas pour leurs frères et soeurs nés à l'étranger.
Mme Brisset, défenseure des enfants, a été saisie de nombreux cas de mineurs à la charge de leurs parents étrangers en situation régulière, mais pour lesquels leurs parents ne pouvaient pas obtenir les prestations familiales habituelles. Elle a donc été amenée à dénoncer cette situation dans son rapport pour l'année 2004 et parle, à ce sujet, d'une « discrimination qui n'est fondée ni en droit ni en équité ».
Les propos que vient de tenir M. le rapporteur à son encontre me laissent présager son prompt remplacement. D'ailleurs, son mandat arrive à terme, me semble-t-il.
Mme Isabelle Debré. Elle ne sera pas remplacée, puisque son mandat arrive à terme !
M. Guy Fischer. M. le rapporteur aurait certainement voulu que la fin de son mandat fût hâtée ! Je sais interpréter ses déclarations !
M. Paul Blanc. C'est un procès d'intention !
M. Guy Fischer. Cette situation a été clarifiée par la Cour de cassation, qui s'est prononcée, dans un arrêt du 16 avril 2004, en faveur du versement des allocations familiales aux familles étrangères, quelle que soit la situation de séjour des enfants. Elle considère ainsi que « les étrangers résidant régulièrement en France avec leurs enfants mineurs bénéficient de plein droit des prestations familiales ».
Pourtant, cette situation discriminatoire perdure, et le code de la sécurité sociale n'a pas été modifié dans le sens donné par la Cour de cassation.
Cet amendement, qui subordonne le versement des allocations familiales à la régularité du séjour de l'enfant sur le territoire, tend donc à ignorer la jurisprudence de la Cour de cassation et entérine une situation contraire à l'équité, à l'intérêt de l'enfant, et à la convention internationale des droits de l'enfant, comme l'a noté en juin 2004 le comité des droits de l'enfant des Nations unies. D'ailleurs, si je ne me trompe, le 19 novembre, c'est-à-dire demain, a lieu. la journée nationale des droits de l'enfant.
Je soulignerai, enfin, que la loi ne prévoit pas d'obligation pour les mineurs étrangers de détenir un titre de séjour.
Cet amendement est vraiment incompréhensible au regard du droit et de la jurisprudence, mais il confirme l'obsession du Gouvernement de vouloir réduire de plus en plus les droits des étrangers qui sont en situation régulière et n'aspirent qu'à vivre dignement sur notre territoire.
Nous voterons, bien évidemment, contre cet amendement.
M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.
M. François Autain. Cet amendement, s'il était adopté, aurait des conséquences très graves ; mon collègue vient de le dire.
Il serait peut-être excessif d'établir un lien de causalité entre le dépôt tardif de cet amendement par le Gouvernement et les événements de ces dernières semaines dans les banlieues. Je n'irai pas jusque là, monsieur le ministre, mais vous comprendrez que nous serions tentés de le faire. Sinon, comment expliquer que vous n'ayez pas déposé cet amendement plus tôt ou, pourquoi pas, ajouté un article sur ce sujet dans le projet de loi avant que ce dernier ait été adopté par le Conseil des ministres ?
Comme vous l'avez rappelé tout à l'heure, il s'agit de clarifier la législation en matière de regroupement familial. Dommage que vous n'y ayez pas pensé plus tôt !
En tout cas, il est difficile de ne pas rattacher cet amendement aux déclarations du Président de la République relatives au regroupement familial lors de sa dernière intervention télévisée. Je sais que vous lui portez une grande d'admiration, pour en avoir été longtemps le premier collaborateur, et je comprends que vous vous soyez exécuté très rapidement.
Quoi qu'il en soit, non seulement cet amendement est néfaste pour l'avenir de ces enfants de l'immigration, mais, de plus, il viole le principe d'égalité posé par notre Constitution et les nombreux textes internationaux en vigueur.
S'agissant du sort des enfants issus de l'immigration, les mesures relatives au regroupement familial deviennent de plus en plus complexes au grès des réformes successives de la législation sur les étrangers. Vous avez cité tout à l'heure le décret de 1987, mais, avant d'en arriver là, plusieurs modifications successives sont intervenues.
Un nombre croissant d'enfants ont été amenés à vivre sur le territoire français en dehors de la procédure prévue dans ce décret. La suppression brutale des allocations familiales dont bénéficient actuellement leurs familles serait criminelle. Elle nuirait en effet gravement à l'avenir de ces enfants, déjà fragilisés en tant qu'étrangers vivant sur notre territoire - et ce qui n'est pas leur faute ! -, et réduirait considérablement leurs chances de pouvoir un jour s'assimiler à la nation française. On sait en effet que ce processus d'assimilation est long et difficile et qu'il se solde malheureusement encore trop souvent par un échec.
Vous espérez, même si vous ne le dites pas, que cette restriction des prestations aura un effet dissuasif sur l'entrée de ces enfants sur notre territoire. Mais c'est oublier que le regroupement familial obéit moins à des considérations économiques qu'à des motivations affectives. Je ne m'étendrai pas, chacun comprendra ! Nous y avons fait allusion cet après-midi lorsqu'il s'est agi de supprimer le droit à la retraite des travailleurs étrangers qui souhaitaient pouvoir vivre au sein de leur famille, dans leur pays d'origine.
Sur ce point, le Gouvernement fait fausse route. Il ne fait preuve ni de justice ni de générosité, comme nous avons eu l'occasion de le constater tout au long de la discussion de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.
En outre, le Gouvernement viole le principe constitutionnel d'égalité, comme je l'ai expliqué lors de la défense de la motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité.
Par ailleurs, et c'est nouveau, il se met en contradiction avec tous les textes internationaux sur le sujet. La Cour de cassation, dans l'un de ses arrêts, a rappelé le Gouvernement à ses obligations en ce domaine.
Cet amendement ne va certainement pas arranger les choses ! S'il est adopté, non seulement il rendra caduc cet arrêt de la Cour de cassation, mais il mettra également le droit français en contradiction avec les textes internationaux. Compte tenu de la gravité de la situation, il n'est pas inutile d'énumérer les principaux de ces textes.