Article 4
La section 3 du chapitre V du titre II du livre II du même code est ainsi rétablie :
« Section 3
« Agence française de l'adoption
« Art. L. 225-15. - Il est créé une Agence française de l'adoption qui a pour mission d'informer, de conseiller et de servir d'intermédiaire pour l'adoption de mineurs étrangers de quinze ans.
« L'Etat, les départements et des personnes morales de droit privé constituent à cette fin un groupement d'intérêt public.
« L'Agence française de l'adoption est autorisée à intervenir comme intermédiaire pour l'adoption dans l'ensemble des départements.
« Elle est habilitée à intervenir comme intermédiaire pour l'adoption dans les Etats parties à la convention de La Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale. A la demande du ministre chargé des affaires étrangères, après avis de l'Autorité centrale pour l'adoption internationale, l'Agence française de l'adoption suspend ou cesse son activité dans l'un de ces pays si les procédures d'adoption ne peuvent plus être menées dans les conditions définies par la convention précitée, et la reprend, le cas échéant, lorsque ces conditions peuvent de nouveau être respectées. Pour exercer son activité dans les autres pays d'origine des mineurs, elle doit obtenir l'habilitation du ministre chargé des affaires étrangères prévue à l'article L. 225-12.
« Pour l'exercice de son activité, dans les pays d'origine, elle s'appuie sur un réseau de correspondants.
« Elle assure ses compétences dans le strict respect des principes d'égalité et de neutralité.
« Art. L. 225-16. - Dans chaque département, le président du conseil général désigne au sein de ses services au moins une personne chargée d'assurer les relations avec l'Agence française de l'adoption.
« Outre les moyens mis à la disposition de l'agence par les personnes morales de droit privé qui en sont membres, l'Etat et les départements assurent sa prise en charge financière selon des modalités définies par voie réglementaire.
« Le personnel de l'agence est soumis au secret professionnel dans les conditions prévues aux articles 226-13 et 226-14 du code pénal.
« Les dispositions des articles L. 225-14-1 et L. 225-14-2 du présent code sont applicables à l'agence. »
Mme la présidente. Je suis saisie de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 3 est présenté par M. Milon, au nom de la commission.
L'amendement n° 20 est présenté par Mmes Campion et Le Texier, MM. Madec et Michel, Mme Cerisier-ben Guiga et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 225-15 du code de l'action sociale et des familles :
« L'Agence française de l'adoption est constituée sous la forme d'un groupement d'intérêt public. L'État et les départements en sont membres de droit. Les organismes autorisés pour l'adoption mentionnés à l'article L. 225-11 et les associations de parents adoptifs dont la liste est fixée par un arrêté du ministre chargé des Affaires étrangères y disposent d'une voix consultative au sein du conseil d'administration.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 3.
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement a pour objet de préciser que les personnes morales de droit privé, membres du groupement d'intérêt public constitutif de l'Agence française de l'adoption, sont les organismes agréés pour l'adoption et les associations de parents adoptifs dont la liste est fixée par le ministre des affaires étrangères. Ils y disposeront d'une voix consultative.
Mme la présidente. La parole est à Mme Claire-Lise Campion, pour présenter l'amendement n° 20.
Mme Claire-Lise Campion. Nous rejoignons totalement les arguments développés par M. le rapporteur.
En effet, nous estimons que la rédaction de l'article 4 relatif à la composition du GIP et au rôle que peuvent jouer les personnes morales de droit privé est trop vague.
Par cet amendement, nous précisons que les personnes morales concernées sont les organismes agréés pour l'adoption ainsi que les associations de parents adoptifs et qu'elles disposent d'une voix consultative au sein du conseil d'administration du GIP.
Mme la présidente. L'amendement n° 22, présenté par Mmes Cerisier-ben Guiga, Campion et Le Texier, MM. Madec, Michel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 225-15 du code de l'action sociale et des familles, après les mots :
L'Etat
insérer les mots :
représenté par les ministères des Affaires étrangères, de la Justice, de la sécurité sociale, des personnes âgées, des personnes handicapées et de la famille
La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Nous proposons une variante rédactionnelle. Je retirerai cet amendement si les amendements identiques sont adoptés.
On oublie toujours les associations d'enfants majeurs adoptés parce qu'elles sont en cours de constitution et qu'elles n'existent donc pas encore formellement. Je pense que leur présence serait souhaitable au sein de toutes ces instances.
Mme la présidente. L'amendement n° 8, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 225-15 du code de l'action sociale et des familles, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'Agence française de l'adoption comprend un collège consultatif composé d'au moins deux représentants des associations de parents adoptifs, de représentants d'associations d'adoptés majeurs et des organismes autorisés pour l'adoption.
La parole est à Mme Josiane Mathon.
Mme Josiane Mathon. J'irai dans le même sens que ma collègue Monique Cerisier-ben Guiga : les représentants des associations d'enfants adoptés majeurs doivent être associés à la composition de l'AFA.
Mme la présidente. L'amendement n° 23, présenté par Mmes Cerisier-ben Guiga, Campion et Le Texier, MM. Madec, Michel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 225-15 du code de l'action sociale et des familles, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'agence est dotée d'un collège consultatif composé de représentants d'associations de parents adoptifs, d'associations d'adoptés majeurs et d'organismes agréés pour l'adoption.
La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. C'est un amendement de repli, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L'amendement n° 22 vise à préciser quels sont les membres étatiques du GIP constitutif de l'AFA. Or, cette précision relève du statut de l'Agence et non pas de la loi. Pour cette raison, la commission émet un avis défavorable.
L'amendement n° 8 est relatif à la composition du conseil d'administration de l'AFA. Il ne semble pas que les enfants adoptés se soient déjà constitués en association. La commission demande donc à Mme Mathon de bien vouloir le retirer.
Quant à l'amendement n° 23, la commission demande à Mme Monique Cerisier-ben Guiga de bien vouloir le retirer au profit de l'amendement n° 3 de la commission, qui est plus complet.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Au nom du Gouvernement, je voudrais demander à M. le rapporteur de bien vouloir retirer l'amendement n° 3. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme Raymonde Le Texier. Ben voyons !
Mme Josiane Mathon. Ah non !
Mme Claire-Lise Campion. Supprimez les sénateurs !
Mme Raymonde Le Texier. A quoi servons-nous ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Cet amendement témoigne bien sûr de votre souci, monsieur le rapporteur, de veiller à ce que les associations de parents adoptifs et les organismes agréés pour l'adoption ne soient pas exclus de l'Agence française de l'adoption.
Le rôle que les associations et les organismes autorisés sont appelés à jouer au sein de cette agence est effectivement essentiel, car ils doivent pouvoir faire part de leurs expériences et de leur vécu. Toutefois, cela relève, en réalité, non pas de la loi, mais de la convention constitutive du groupement d'intérêt public sous la forme duquel l'agence sera créée, si vous adoptez, mesdames, messieurs les sénateurs, cette proposition de loi.
Je m'engage donc à prendre en compte votre souci et à veiller à ce que les associations de parents adoptifs et les organismes agréés pour l'adoption bénéficient d'une place particulière au sein de ce groupement d'intérêt public, afin qu'ils puissent faire valoir leurs expériences et leurs connaissances.
Mme Raymonde Le Texier. Ce n'est pas ce que nous demandons !
M. Philippe Bas, ministre délégué. Sous le bénéfice de cet engagement, je vous demande donc, monsieur le rapporteur, de bien vouloir retirer votre amendement.
Mme la présidente. Monsieur le rapporteur, l'amendement n° 3 est-il maintenu ?
M. Alain Milon, rapporteur. Ce matin, lors de la réunion de la commission des affaires sociales, j'ai indiqué que, si le Gouvernement s'engageait fermement à faire en sorte que les représentants des associations de parents adoptifs et les OAA soient des membres consultatifs au sein du conseil d'administration de l'AFA, je retirerais cet amendement.
Mme Raymonde Le Texier. C'est dur d'être dans la majorité !
M. Alain Milon, rapporteur. Non, madame Le Texier, ce n'est pas si difficile que cela !
Comme M. le ministre a pris cet engagement, je retire l'amendement n° 3.
Mme Raymonde Le Texier. C'est honteux !
Mme la présidente. L'amendement n° 3 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les autres amendements ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote sur l'amendement n° 20.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Mon explication de vote commencera par une protestation.
A quoi sert le Sénat ? Depuis trois ans, ce n'est pas la première fois que je participe à un débat au cours duquel, systématiquement, on fait retirer à la majorité les amendements qu'elle a déposés, on la fait voter contre les amendements déposés par l'opposition pour obtenir, au final, un vote conforme ! Dès lors, on évite une deuxième lecture par l'Assemblée nationale et par le Sénat, puis une réunion de la commission mixte paritaire.
C'est ainsi que la démocratie représentative est complètement dévalorisée dans notre pays.
Mme Raymonde Le Texier. C'est scandaleux !
Mme Josiane Mathon. C'est suicidaire !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Dans ces conditions, à quoi sert le Sénat ? A rien !
Lorsque nous examinons des mesures d'ordre législatif, vous avez systématiquement recours aux décrets, au règlement, aux circulaires alors que, s'agissant de la loi Fillon, vous nous avez fait adopter des dispositions qui relèvent, selon le Conseil constitutionnel, du domaine réglementaire. Tout cela ne tient vraiment pas debout !
Nous ne retirerons pas nos amendements, madame la présidente, et nous constatons que l'honneur du Sénat, sa raison d'être sont vraiment bafoués dans un tel débat. ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. L'amendement n° 21, présenté par Mmes Campion et Le Texier, MM. Madec et Michel, Mme Cerisier-ben Guiga et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 225-15 du code de l'action sociale et des familles par les mots suivants :
y compris les départements d'Outre-mer, les collectivités territoriales d'Outre-mer ou la Nouvelle Calédonie.
La parole est à Mme Claire-Lise Campion.
Mme Claire-Lise Campion. Cet amendement vise à préciser que les collectivités territoriales d'outre-mer ne sont pas oubliées.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Comme dans tous les départements, l'Agence française de l'adoption est compétente pour agir dans les départements d'outre-mer où elle disposera également d'un correspondant.
S'agissant des collectivités territoriales d'outre-mer et de la Nouvelle-Calédonie, compte tenu du faible nombre de candidats à l'adoption internationale qui y sont domiciliés, il conviendra de réfléchir à un système de représentation de l'Agence plus souple et moins coûteux.
Dans ces conditions, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° 24, présenté par Mmes Cerisier-ben Guiga, Campion et Le Texier, MM. Madec, Michel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 225-15 du code de l'action sociale et des familles par une phrase ainsi rédigée :
« Le statut et la protection sociale de ces correspondants sont déterminés par décret.
La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Cette fois, c'est moi qui demande qu'un point soit précisé par décret.
Mme Raymonde Le Texier. Le ministre ne sera pas d'accord !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Tout à fait ! Il suffit que je le demande pour que le ministre s'y oppose !
Je représente les Français établis hors de France, dont les recrutés locaux et les contractuels travaillant dans un certain nombre de ministères, notamment celui des affaires étrangères. Or, les correspondants de l'Agence française de l'adoption ne seront ni des contractuels ni des fonctionnaires du ministère des affaires étrangères.
Ils pourront être, par exemple, des fonctionnaires appartenant à d'autres collectivités. Dès lors, nous devons avoir la certitude qu'ils bénéficieront d'un détachement et qu'ils ne seront pas contraints de se mettre en disponibilité pour aller travailler à l'étranger, cas que nous connaissons à l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger.
S'il s'agit de contractuels, nous devons nous demander s'ils obtiendront le droit de séjourner et de travailler dans le pays où ils seront envoyés, et s'ils bénéficieront sur place d'une assurance maladie de source française. En effet, ils iront en Lettonie, en Ukraine, à Madagascar, en Colombie, au Vietnam, en Ethiopie, en Russie, en Chine, en Haïti..., autant de pays qui sont bien connus pour la « qualité » de leur protection sociale en matière d'assurance maladie, d'assurance chômage ou d'assurance vieillesse !
Je connais bien la situation des contractuels et des recrutés locaux du ministère des affaires étrangères ou de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger. C'est pourquoi je ne veux pas que les contractuels de l'Agence française de l'adoption subissent la même précarité sociale.
Cet amendement vise donc à ce que le statut et la protection sociale des correspondants de l'AFA soient déterminés par décret.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Vous ne vous étonnerez pas, madame Cerisier-ben Guiga, que la commission soit défavorable à cet amendement.
Les correspondants seront des salariés de l'AFA. La précision que vous demandez ressort donc du règlement de cette agence.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Certes, les correspondants seront des salariés de l'AFA, mais ils se trouveront à l'étranger et seront soumis, de ce fait, au droit du pays de résidence, si d'autres mesures ne sont pas prises en temps utile.
Il existe des milliers d'exemples de personnes ayant travaillé pour la France dans un grand nombre d'institutions à l'étranger, sans avoir bénéficié d'aucune garantie. Ainsi, un certain nombre d'enseignants de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger sont, pendant plusieurs mois, en situation irrégulière dans les pays où ils travaillent avant de bénéficier d'un contrat. C'est la France, Etat de droit, qui organise cela ! Des milliers de contractuels du ministère des affaires étrangères se retrouvent aujourd'hui, à mon âge, dans la misère parce que, jamais, on ne les a fait cotiser à une caisse de retraite.
Et il faudrait accepter aujourd'hui d'envoyer des correspondants de l'AFA dans des pays du type de ceux que j'ai cités, sans prévoir leur statut, en se contentant de répondre qu'ils seront salariés ? Cet argument est bien léger ! Ne travaillant pas en France, ils ne bénéficieront nullement des droits des salariés français !
Je maintiens donc cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Je précise de nouveau que l'Agence française de l'adoption établira un règlement qui fixera le statut de ses salariés.
Mme la présidente. L'amendement n° 25, présenté par Mmes Cerisier-ben Guiga, Campion et Le Texier, MM. Madec, Michel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 225-15 du code de l'action sociale et des familles, remplacer les mots :
principes d'égalité et de neutralité
par les mots :
principes d'égalité, de neutralité et de laïcité
La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Cet amendement vise à ajouter le concept de laïcité à ceux d'égalité et de neutralité, peut-être parce que la France célèbre cette année le centenaire de la loi sur la séparation de l'Eglise et de l'Etat, mais surtout parce que, de façon tout à fait compréhensible, un certain nombre d'OAA se sont constitués sur des bases confessionnelles. Or, ces OAA vont faire partie de l'Agence française de l'adoption, mais nous n'avons pas de réelles garanties sur leur caractère consultatif : le Gouvernement prévoit qu'il sera fixé par décret, mais il n'en précise pas le contenu.
Certes, le critère confessionnel est tout à fait respectable pour les personnes qui appartiennent à ces religions et qui passent par ces organismes pour adopter des enfants. Pour autant, il ne faudrait pas que, d'une manière directe ou indirecte, des associations confessionnelles pèsent sur les choix d'un service public délégué.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L'AFA est une agence nationale publique. A ce titre, elle obéit aux exigences de laïcité.
Cette précision paraît donc inutile et la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Madame la sénatrice, le Gouvernement partage entièrement votre souci : l'Agence française de l'adoption doit respecter le principe de laïcité. Mais quelle meilleure garantie que la Constitution pour assurer le respect de ce principe ? S'il était violé, les juges appliqueraient tout naturellement la Constitution ! Il n'est donc point besoin d'ajouter une disposition spécifique dans cette proposition de loi. Ou alors, il faudrait le faire pour toutes les lois de la République !
Contentons-nous de la Constitution, qui suffit à garantir le respect du principe de laïcité par ce nouvel organisme.
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Ce raisonnement est aussi valable pour l'égalité et la neutralité, qui sont des principes constitutionnels au même titre que la laïcité. (M. Michel Mercier acquiesce.)
Mme Raymonde Le Texier. Absolument !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Dans ce cas, qu'on les supprime également !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 4.
(L'article 4 est adopté.)
Article additionnel après l'article 4
Mme la présidente. L'amendement n° 9, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l'article 370-3 du code civil est supprimé.
La parole est à Mme Eliane Assassi.
Mme Eliane Assassi. La loi du 6 février 2001 dispose que « l'adoption d'un mineur étranger ne peut être prononcée si sa loi personnelle prohibe cette institution, sauf si ce mineur est né et réside habituellement en France ».
Par conséquent, les enfants nés dans les pays de droit coranique ne peuvent être adoptés par des candidats de nationalité française. Or ces enfants sont d'ores et déjà accueillis par des couples français dans le cadre d'une kafala judiciaire, qui est « le recueil légal des enfants abandonnés ou dont les parents s'avèrent incapables d'assurer l'éducation ».
Avant l'introduction de cette disposition dans l'article 370-3 du code civil, le juge appréciait au cas par cas la situation des enfants et prononçait le plus souvent une adoption, qu'elle soit simple ou plénière. Depuis 2001, la France s'interdit d'accepter ces enfants sur son territoire dans le cadre de la procédure d'adoption.
Dans son rapport annuel pour 2004, la Défenseure des enfants, Mme Claire Brisset, dénonce cet état de fait : « Il s'agit d'un véritable recul dans la prise en compte de l'intérêt de ces enfants, pour lesquels la jurisprudence antérieure de la Cour de cassation ouvrait cette possibilité. [...] Dans le cas d'un projet d'adoption par des ressortissants français d'un enfant sans filiation établie, abandonné au Maroc ou en Algérie, et dans la mesure où le tuteur public de cet enfant donne son accord, ce qui est fréquent, il est tout à fait discutable que l'on veuille continuer d'appliquer la législation marocaine ou algérienne à un enfant potentiellement français. »
La situation actuelle fait de ces enfants qui ne sont pas adoptables tout en étant abandonnés des enfants au « milieu du gué », pour reprendre une expression utilisée en 1996 par M. Jean-François Mattei dans son rapport établi au nom de la commission spéciale de l'Assemblée nationale.
L'objet de cet amendement est de permettre à ces enfants d'avoir un lien de filiation avec leurs parents de coeur.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Lors de la discussion générale, M. le ministre délégué est intervenu à deux reprises sur ce sujet. Dans mon discours liminaire, j'ai également évoqué cette question à laquelle, vous le savez, je suis personnellement très sensible.
Toutefois, la commission des affaires sociales a considéré que cette question n'entrait pas dans le champ de la proposition de loi que nous examinons ici, lequel se limite à l'organisation des procédures d'adoption. En revanche, ce problème mérite d'être examiné et traité à l'avenir.
La commission demande donc le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Gouvernement est lui aussi très sensible à cette question, comme j'ai eu l'occasion de le souligner lors de la discussion générale. Ce point devra donc faire l'objet de réflexions approfondies, et pourra, le cas échéant, être traité dans une phase ultérieure.
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Je m'abstiendrai sur cet amendement.
En effet, il nous faut examiner attentivement les difficultés que soulève la kafala, en particulier au Maroc et en Algérie où le problème se pose de manière plus fréquente.
Lors de l'examen de précédents textes relatifs à l'adoption, j'avais moi-même déposé des amendements visant à assimiler la kafala algérienne à une adoption simple. Depuis la réforme de la moudawana, il pourrait en être de même pour la kafala judiciaire marocaine. Je précise qu'une kafala notariée existe également.
Je tiens à mettre en garde contre les risques d'impérialisme judiciaire et culturel qui nous guettent : ne pas respecter la législation interne de pays partenaires demande une réflexion approfondie, et il nous faut plutôt envisager une négociation avec ces Etats. Nous devons nous attendre à ce que ces derniers établissent une discrimination confessionnelle et n'accordent la kafala qu'à des personnes musulmanes qui offriront des garanties d'éducation religieuse des enfants.
Il ne s'agit donc pas ici d'une adoption neutre et laïque, comme en France. Ce problème est difficile, voire douloureux, pour les familles françaises originaires de pays musulmans, qui, c'est vrai, préfèrent se tourner vers ces pays-là, où de nombreux enfants attendent d'être adoptés.
Comme d'habitude, en France, on laisse de côté l'adoption simple. Or il serait bon, dans la réflexion qui nous attend, de considérer, à côté de l'adoption plénière, l'adoption simple comme un moyen efficace de régler le problème des enfants pris en charge par la kafala, sans qu'il soit pour autant attenté à la souveraineté des pays du sud de la Méditerranée.
Mme la présidente. Madame Assassi, l'amendement n° 9 est-il maintenu ?
Mme Eliane Assassi. Je suis satisfaite d'avoir entendu M. le rapporteur et M. le ministre dire qu'ils étaient très sensibles à cette question et que celle-ci fera l'objet d'un débat approfondi. Nous le souhaitons également.
Néanmoins, et tout le monde le comprendra, dans le contexte du débat d'aujourd'hui, je maintiens cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 9.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 5
Au premier alinéa de l'article L. 331-7 du code de la sécurité sociale, les mots : « ou un organisme autorisé pour l'adoption » sont remplacés par les mots : «, un organisme français autorisé pour l'adoption ou l'Agence française de l'adoption ». - (Adopté.)
Article 6
Dans la première phrase du cinquième alinéa de l'article L. 122-26 du code du travail, les mots : « ou un organisme autorisé pour l'adoption » sont remplacés par les mots : «, un organisme français autorisé pour l'adoption ou l'Agence française de l'adoption ». - (Adopté.)
Articles additionnels après l'article 6
M. le président. L'amendement n° 34, présenté par Mme Dini et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans la première phrase du cinquième alinéa de l'article L. 122-26 du code du travail, les mots : « à dater de l'arrivée de l'enfant au foyer » sont remplacés par les mots : « pour accueillir l'enfant au foyer dans des conditions fixées par voie réglementaire ».
La parole est à Mme Muguette Dini.
Mme Muguette Dini. Cet amendement vise à prévoir un congé avant l'arrivée de l'enfant au foyer.
De même que la naissance d'un enfant est un événement familial que les parents doivent préparer dans les meilleures conditions, il semble souhaitable que les parents aient le droit de suspendre leur contrat de travail, non à dater de l'arrivée effective de l'enfant adopté, mais plus tôt, afin de l'accueillir au mieux et d'effectuer les formalités nécessaires dans son pays d'origine.
Le pouvoir réglementaire devrait pouvoir fixer une échéance antérieure à l'arrivée effective de l'enfant et cet amendement a pour objet de le permettre.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement est satisfait par l'état actuel du droit, qui permet au salarié adoptant de cesser son activité, dans le cadre de ses congés d'adoption, sept jours avant l'arrivée de l'enfant à son foyer.
Pour cette raison, la commission demande le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Madame Dini, l'amendement n° 34 est-il maintenu ?
Mme Muguette Dini. Non, je le retire, madame la présidente.
Toutefois, permettez-moi de faire remarquer que, lorsqu'il s'agit de se rendre à l'étranger et de faire connaissance avec l'enfant adopté, qui se trouve probablement encore dans une institution, sept jours ne sont guère suffisants ! C'est pourquoi il faut envisager sérieusement d'allonger ce congé.
Mme la présidente. L'amendement n° 34 est retiré.
L'amendement n° 27, présenté par Mmes Campion et Le Texier, MM. Madec et Michel, Mme Cerisier-ben Guiga et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 331-7 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Elle est aussi accordée pendant le congé défini à l'article L. 122-28-10 du code du travail. »
La parole est à Mme Claire-Lise Campion.
Mme Claire-Lise Campion. Selon le droit en vigueur, la période de congé dont bénéficie le salarié titulaire d'un agrément ne donne pas droit à une indemnité journalière de repos. L'amendement vise à permettre au salarié de percevoir cette indemnité.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Le salarié qui part à l'étranger en vue d'adopter un enfant bénéficie, s'il est titulaire d'un agrément, d'un congé non rémunéré de six semaines. Dans ce cadre, l'indemnité de repos ne lui est évidemment pas versée dans la mesure où il n'accueille pas encore l'enfant
Dans ces conditions, la commission a émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?