sommaire
présidence de Mme Michèle André
2. Dépôt d'un rapport de la Cour des comptes
4. Réforme de l'adoption. - Adoption définitive d'une proposition de loi
Discussion générale : MM. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille ; Alain Milon, rapporteur de la commission des affaires sociales ; Mmes Claire-Lise Campion, Sylvie Desmarescaux, Christiane Kammermann, Muguette Dini, Eliane Assassi, Monique Cerisier-ben Guiga, Joëlle Garriaud-Maylam.
M. le ministre délégué.
Clôture de la discussion générale.
Demande de renvoi à la commission
Motion no 2 rectifié de Mme Raymonde Le Texier. - Mme Raymonde Le Texier, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 31 de Mme Muguette Dini. - Mme Muguette Dini, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Retrait.
Amendement no 30 de Mme Joëlle Garriaud-Maylam. - Mme Joëlle Garriaud-Maylam, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Retrait.
Reprise de l'amendement no 30 rectifié bis par Mme Monique Cerisier-ben Guiga. - Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales ; le ministre délégué, Mme Joëlle Garriaud-Maylam. - Rejet.
Amendement no 16 de Mme Claire-Lise Campion. - Mme Claire-Lise Campion, MM. le rapporteur, le ministre délégué, Mmes Monique Cerisier-ben Guiga, Hélène Luc. - Rejet.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 1er
Amendement no 5 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Mme Josiane Mathon, MM. le rapporteur, le ministre délégué, Gérard Bailly. - Rejet.
Amendements nos 6 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et 13 rectifié de M. Roger Madec. - Mme Josiane Mathon, MM. Roger Madec, le rapporteur, le ministre délégué, Mmes Monique Cerisier-ben Guiga, Muguette Dini, M. Adrien Giraud. - Rejet des deux amendements.
Amendement no 14 de M. Roger Madec. - MM. Roger Madec, le rapporteur, le ministre délégué, Jean-Pierre Michel, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, M. le président de la commission. - Rejet.
Amendement no 15 de Mme Raymonde Le Texier. - Mme Raymonde Le Texier, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Mme Claire-Lise Campion.
Amendements nos 17 et 18 de Mme Claire-Lise Campion. - Mme Claire-Lise Campion, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet des deux amendements.
Amendement no 32 rectifié de Mme Muguette Dini. - Mme Muguette Dini, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Retrait.
Adoption de l'article.
Article additionnel après l'article 2
Amendement no 33 de Mme Muguette Dini. - Mme Muguette Dini, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Retrait.
Amendements identiques nos 7 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et 19 de Mme Claire-Lise Campion ; amendement no 4 rectifié ter de M. Bernard Seillier. - Mmes Eliane Assassi, Claire-Lise Campion, MM. Bernard Seillier, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet des trois amendements.
Adoption de l'article.
Amendements identiques nos 3 de la commission et 20 de Mme Claire-Lise Campion ; amendements nos 22, 23 de Mme Monique Cerisier-ben Guiga et 8 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - M. le rapporteur, Mmes Claire-Lise Campion, Monique Cerisier-ben Guiga, Josiane Mathon, M. le ministre délégué. - Retrait de l'amendement no 3 ; rejet des amendements nos 20, 22, 23 et 8.
Amendement no 21 de Mme Claire-Lise Campion. - Mme Claire-Lise Campion, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 24 de Mme Monique Cerisier-ben Guiga. - Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 25 de Mme Monique Cerisier-ben Guiga. - Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Adoption de l'article.
Article additionnel après l'article 4
Amendement no 9 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Mme Eliane Assassi, MM. le rapporteur, le ministre délégué, Mme Monique Cerisier-ben Guiga. - Rejet.
Articles additionnels après l'article 6
Amendement no 34 de Mme Muguette Dini. - Mme Muguette Dini, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Retrait.
Amendement no 27 de Mme Claire-Lise Campion. - Mme Claire-Lise Campion, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Articles additionnels avant l'article 7
Amendements nos 10 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et 26 de Mme Claire-Lise Campion. - Mmes Josiane Mathon, Claire-Lise Campion, MM. le rapporteur, le ministre délégué, Mme Raymonde Le Texier. - Rejet des deux amendements.
Amendement no 11 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Rejet.
Article additionnel après l'article 7
Amendements identiques nos 1 rectifié de Mme Muguette Dini et 29 de Mme Claire-Lise Campion. - Mmes Muguette Dini, Claire-Lise Campion, MM. le rapporteur, le ministre délégué, Michel Mercier. - Retrait de l'amendement no 1 rectifié ; rejet de l'amendement no 29.
Intitulé de la proposition de loi
Amendement no 12 de Mme Claire-Lise Campion. - Mme Claire-Lise Campion, MM. le rapporteur, le ministre délégué, Mme Monique Cerisier-ben Guiga. - Rejet.
Mmes Monique Papon, Claire-Lise Campion, Muguette Dini, Josiane Mathon, M. Jacques Pelletier, Mme Isabelle Debré, M. le ministre délégué.
Adoption définitive d'une proposition de loi.
6. Dépôt d'une proposition de loi constitutionnelle
7. Dépôt d'une proposition de loi organique
8. Dépôt de propositions de loi
9. Texte soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution
11. Dépôt de rapports d'information
12. Ordre du jour
compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE Mme Michèle André
vice-présidente
1
PROCÈS-VERBAL
Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
DÉPÔT D'UN RAPPORT de la Cour des comptes
Mme la présidente. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier président de la Cour des comptes le rapport préliminaire au prochain débat d'orientation budgétaire, établi en application des articles 48 et 58-3 de la loi organique du 1er août 2001.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
3
MISSIONs D'INFORMATION
Mme la présidente. L'ordre du jour appelle l'examen des demandes d'autorisation de missions d'information suivantes :
1°) demandes présentées par la commission des affaires sociales tendant à obtenir du Sénat l'autorisation de désigner deux missions d'information :
- l'une en vue de se rendre à la Réunion et à Mayotte pour y examiner la prise en charge de la périnatalité et de la petite enfance ;
- l'autre portant sur les conditions de mise sur le marché et de suivi des médicaments.
2°) demande présentée par la commission des affaires économiques et du Plan tendant à obtenir du Sénat l'autorisation de désigner une mission d'information en vue de se rendre en Lituanie et en Estonie pour étudier la situation économique de ces pays et leurs relations avec la France, notamment dans le cadre de leur récente intégration à l'Union européenne.
Il a été donné connaissance de ces demandes au Sénat au cours de ses séances des mardi 10 mai et jeudi 16 juin 2005.
Je vais consulter le Sénat sur ces demandes.
Il n'y a pas d'opposition ?...
En conséquence, les commissions intéressées sont autorisées, en application de l'article 21 du règlement, à désigner ces missions d'information.
4
Réforme de l'adoption
Adoption définitive d'une proposition de loi
Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, portant réforme de l'adoption (nos 300, 398).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre délégué.
M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, on ne peut aborder la question de l'adoption sans émotion, sans penser d'abord à tous ces couples qui se sont formés en espérant avoir un enfant, qui n'en ont pas eu, qui se sont lancés un jour dans le long parcours de l'adoption, semé d'épreuves personnelles, de remises en cause et de rebondissements, au terme duquel l'arrivée tant attendue d'un enfant à aimer, d'un enfant à élever, n'est pas toujours au rendez-vous.
On ne peut aborder cette question sans penser aussi à la souffrance des enfants abandonnés, sans famille, parfois maltraités, qui, en France et à l'étranger, sont privés d'une mère et d'un père pour les aider à grandir.
A l'heure actuelle, 25 000 foyers français sont dans l'attente d'un enfant à adopter. En examinant cette proposition de loi, mesdames, messieurs les sénateurs, vous allez leur apporter un réel espoir de voir leur parcours simplifié et facilité dans les mois et les années à venir.
La création de l'Agence française de l'adoption sera l'un des points essentiels de cette réforme. Chaque année, ce sont 10 000 couples qui demandent à pouvoir adopter et qui se présentent dans les services des conseils généraux pour obtenir ce sésame qu'est l'attestation d'agrément, première étape d'un long chemin.
Par le vote de ce texte, vous permettrez à ces familles d'être accueillies, conseillées et informées pour pouvoir adopter un enfant qui, rappelons-le, est quatre fois sur cinq issu d'un pays étranger.
Adopter un enfant et l'accepter tel qu'il est comme étant le sien nécessite un vrai travail sur soi-même, une préparation particulière qui n'est pas toujours facile pour les familles quand celles-ci choisissent une démarche individuelle, sans aucun accompagnement.
Le texte qui vous est soumis aujourd'hui ne porte pas sur la réforme des conditions ou des critères nécessaires pour devenir parents adoptifs, il ne porte pas sur les conditions d'adoption d'enfants issus de pays dont les lois sont différentes des nôtres. Une réflexion sur ce point est actuellement en cours au Parlement, et ses conclusions, une fois connues, pourront peut-être permettre d'envisager d'autres réformes, s'agissant plus particulièrement du traitement en droit français de la kafala, démarche reconnue par la tradition coranique, qui fait actuellement l'objet, au sein du Conseil supérieur de l'adoption, d'un travail de réflexion technique dont je suis avec attention les progrès.
Par conséquent, ne précipitons pas les choses et laissons nos concitoyens et leurs représentants réfléchir sans passion à ces faits de société et à ces besoins exprimés. Attachons-nous en revanche à faciliter le déroulement des formalités d'adoption par la mise en place de nouvelles procédures, et cela le plus rapidement possible, car je sais que les couples concernés attendent depuis plusieurs années une telle évolution et que l'impatience les gagne.
Ce texte vise donc simplement, dans un premier temps, mais cela me paraît essentiel, à organiser, à harmoniser la procédure de l'agrément sur l'ensemble du territoire national. En effet, nous le savons tous, il existe actuellement, à cet égard, de grandes différences d'un département à l'autre.
Ce texte vise en outre à accompagner les futurs adoptants dans leurs démarches pour constituer leur dossier en vue d'adopter un enfant à l'étranger. Il a pour objet de les aider à mieux respecter leurs engagements à l'égard du pays d'origine de l'enfant.
Ce texte vise enfin à reconnaître l'effort financier des familles adoptives. A ce titre, il tend à doubler le montant de la prime à l'adoption.
Au travers de ses différents articles, cette proposition de loi pose la base de la réforme.
Tout d'abord, pour ce qui concerne l'harmonisation, elle prévoit la mise en place d'un formulaire d'arrêté d'agrément unique pour l'ensemble des conseils généraux et d'une notice d'accompagnement présentant fidèlement le projet d'adoption, ainsi que la possibilité, pour les familles en attente d'agrément, de bénéficier d'une réunion d'information centrée sur ce qu'est l'adoption d'un enfant français ou étranger.
Ensuite, pour ce qui concerne l'organisation, est prévue une aide de proximité pour les familles, par la mise à disposition, dans chaque département, d'une personne des services chargés de l'adoption, qui bénéficiera d'une formation spécifique dans le cadre de l'Agence.
Par ailleurs, pour ce qui concerne la facilitation de la démarche, l'Agence française de l'adoption sera là pour aider les familles à constituer leur dossier de demande d'adoption à l'étranger et à disposer des services d'un correspondant local dans certains pays, qui aura pour mission de les informer et de les assister sur place quand elles iront chercher leur enfant.
Enfin, il est prévu d'apporter aux familles, au travers des services de l'adoption des départements et de ceux de l'Agence, une aide pour leur permettre de respecter leurs engagements à l'égard des pays d'origine des enfants en matière de suivi.
Ce texte sera complété par des dispositions relatives à l'information des familles sur la santé des enfants et leur prise en charge médicale en cas de problème.
Quant à l'Agence française de l'adoption, ce sera un organisme public, qui prendra la forme d'un groupement d'intérêt public. Ses statuts seront élaborés en partenariat avec les représentants des départements, lesquels seront, avec l'Etat, l'une des parties constitutives.
Cette agence sera donc un organisme d'information, de conseil et d'aide à la constitution des dossiers d'adoption. Elle aura pour vocation non pas de se substituer aux organismes agréés pour l'adoption, mais de permettre aux familles qui ne peuvent ou ne veulent pas passer par ces organismes de voir leur projet mieux accompagné avant, pendant et après la démarche d'adoption.
L'Agence permettra surtout aux familles d'avoir accès aux pays, de plus en plus nombreux, qui se sont fermés aux démarches individuelles ou qui en ont annoncé la fin prochaine.
Les organismes agréés pour l'adoption et les associations familiales doivent pouvoir être informés des travaux et des projets de l'Agence. Des rencontres régulières permettront d'échanger des informations sur les pays et d'actualiser la base de connaissances sur Internet. Celle-ci sera naturellement maintenue. Ainsi, nous pourrons conjuguer les différences des associations, afin de mieux adapter notre action et d'être plus opérationnels dans les divers pays d'origine des enfants.
C'est au Conseil supérieur de l'adoption que revient cependant la mission de réflexion, de concertation et de proposition en matière d'adoption. Cette réforme est d'ailleurs issue, pour une grande part, des remarquables travaux de cette instance, dont je tiens à remercier ici le président, M. le député Yves Nicolin.
Cette proposition de loi n'est pas une fin en soi. D'autres adaptations de notre droit sur la famille et, le cas échéant, sur l'adoption pourront voir le jour à la suite des travaux qui sont actuellement en cours. L'amélioration de notre dispositif relatif à l'adoption, s'agissant en particulier de tout ce qui concerne l'information des familles sur la santé des enfants et leur prise en charge médicale en cas de problème, est un chantier à mener parallèlement, dans l'intérêt des enfants et des familles.
Mesdames, messieurs les sénateurs, cette proposition de loi est la base d'une réforme pour la réussite de laquelle mon ministère s'engage à faire paraître rapidement les décrets d'application une fois la loi définitivement adoptée. Le Gouvernement s'engage en outre à assumer ses responsabilités pour ce qui concerne les conséquences induites par la mise en oeuvre du dispositif. Afin de répondre au plus vite à l'attente des familles, je souhaite que l'Agence puisse être instaurée dès le début de 2006.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie par avance de la discussion que nous allons avoir en vue d'apporter des réponses concrètes et adaptées aux attentes de ceux de nos concitoyens qui cherchent à adopter un enfant. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, en dépit des lois successives qui, depuis trente ans, ont organisé le droit de l'adoption, le système français laisse encore dans une attente dramatiquement longue et humainement difficile des parents sans enfants et des enfants sans parents.
Aujourd'hui, près de 25 000 foyers attendent d'adopter un enfant et ce chiffre augmente régulièrement des 8 000 agréments supplémentaires accordés chaque année. Face à cette demande, 5 000 adoptions seulement ont eu lieu en 2004, qui ont concerné, dans 80 % des cas, des enfants de nationalité étrangère.
L'origine géographique de ces enfants a d'ailleurs beaucoup varié ces dernières années. Elle se répartit désormais de manière presque égale entre l'Amérique du Sud, l'Afrique, l'Europe et l'Asie, alors que ce dernier continent représentait près de la moitié des adoptions il y a encore six ans. Les enfants adoptés en France proviennent de soixante-dix-sept pays différents, au premier plan desquels figurent Haïti, la Chine, la Russie, l'Ethiopie, le Vietnam et la Colombie.
Dans le même temps, plusieurs pays ont été exclus de l'adoption internationale, notamment le Cambodge et la Roumanie, en raison du comportement de certaines familles prêtes à tout pour pouvoir adopter et de celui de quelques orphelinats plus guidés par des intérêts mercantiles que par celui des enfants.
Parallèlement, le nombre d'adoptions d'enfants français ne cesse de diminuer : il ne s'établit plus désormais qu'à un millier environ.
Face à ces constats, l'amélioration de l'organisation « à la française » des procédures d'adoption devient une impérieuse nécessité. C'est l'objet de la proposition de loi soumise à notre examen, qui tend à réformer ces procédures sur trois points.
Le premier axe de réforme porte sur les procédures d'agrément, qui sont gérées au niveau départemental. Or cette gestion entraîne des inégalités de traitement entre les candidats car les critères varient considérablement d'un département à l'autre.
De même, le contenu et la forme de l'agrément peuvent être différents ; ils peuvent, notamment, être plus ou moins précis. Certains départements, par exemple, ne fournissent pas de renseignements relatifs au projet d'adoption des candidats ; cette lacune peut susciter l'incompréhension des pays d'origine des enfants et desservir le demandeur.
Le Conseil supérieur de l'adoption a souligné ces difficultés, et la proposition de loi reprend, sur ce sujet, l'essentiel de ses propositions.
Ainsi, l'agrément sera désormais délivré par un arrêté dont la forme et le contenu seront définis par décret afin que les départements produisent un document unique plus lisible. Il sera accordé ou refusé dans un délai de neuf mois à compter de la confirmation de la demande et non plus à partir de la date de la demande elle-même, ce qui permettra d'instruire correctement les dossiers des candidats réellement motivés.
L'agrément sera désormais accompagné obligatoirement d'une notice précisant le projet d'adoption des futurs parents, qui sera révisable à tout moment en fonction de l'évolution de leur situation. Cette notice permettra de donner un caractère plus concret à l'agrément, qui est trop souvent perçu comme un « permis d'adopter ».
Enfin, les conseils généraux proposeront systématiquement aux candidats d'assister, s'ils le souhaitent, à des réunions d'information durant la période d'agrément. Je regrette, à titre personnel, que ces réunions n'aient pas été rendues obligatoires, car la procédure d'agrément se résume trop souvent à une évaluation alors que le temps qui y est consacré devrait être utilisé par les postulants pour avancer dans leur démarche et mûrir leur réflexion sur l'adoption, voire pour y renoncer.
Le deuxième axe de réforme porte sur le renforcement de l'aide aux candidats à l'adoption internationale.
La multitude d'acteurs qui interviennent dans l'adoption internationale aide moins les candidats qu'elle ne les handicape. Entre le Conseil supérieur de l'adoption, l'Autorité centrale pour l'adoption internationale, la Mission de l'adoption internationale et la cinquantaine d'organismes autorisés, qui sont eux-mêmes très exigeants dans la sélection des dossiers, il leur est parfois difficile de savoir à qui s'adresser. En conséquence, nombreux sont ceux qui choisissent d'engager des démarches individuelles alors même qu'elles sont de moins en moins bien accueillies par les pays d'origine ; en Chine et en Ethiopie elles sont même interdites et elles sont très difficiles en Russie et en Bulgarie. Le nombre de pays qui modifient leur législation dans ce sens va croissant afin de mieux protéger les adoptants comme les adoptés.
Pour rassurer les Etats étrangers sur la qualité du système français d'adoption internationale et aider les familles dont le dossier n'a pas été retenu par un organisme agréé, la proposition de loi prévoit la création de l'Agence française de l'adoption internationale, l'AFA. Cette nouvelle structure sera chargée d'informer et de conseiller les familles sur l'adoption internationale, de les aider à constituer leur dossier via son correspondant départemental, d'organiser le dialogue avec les pays étrangers, en particulier ceux qui sont fermés aux démarches individuelles, et de créer des relais locaux pour assister les familles sur place.
L'AFA n'a pas vocation à supprimer les démarches individuelles, elle vise à en réduire le nombre en offrant un service supplémentaire aux adoptants parallèlement à ceux que proposent les organismes autorisés pour l'adoption, les OAA. Elle constituera donc une troisième voie pour l'adoption internationale.
La commission des affaires sociales s'est montrée très favorable à la création de l'AFA. Elle a toutefois souhaité, monsieur le ministre, que soit précisé le rôle consultatif des associations de parents adoptifs et des OAA au sein de son conseil d'administration.
Elle a, par ailleurs, approuvé le fait de doubler le montant de la prime à l'adoption qui sera versée aux familles à l'arrivée de l'enfant et qui devrait ainsi passer de 812 euros à 1 624 euros en 2005. Nous avions d'ailleurs déjà adopté cette disposition dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, mais le Conseil constitutionnel l'avait censurée pour des raisons techniques.
Cette aide supplémentaire ne couvrira, bien sûr, qu'une faible partie des frais engagés pour une adoption internationale, qui atteignent entre 8 000 et 17 000 euros, mais elle constituera un « coup de pouce » bienvenu pour les familles.
La commission a jugé très utile de prévoir un suivi renforcé des enfants après leur arrivée en France, jusqu'au prononcé de l'adoption plénière ou jusqu'à la transcription du jugement étranger, et même au-delà si l'adoptant le demande, notamment s'il s'y est engagé envers l'État d'origine de l'enfant.
Avec l'enfant, c'est toute la famille qui sera mieux soutenue dans les premières années suivant l'adoption, et tous ceux qui ont vécu ces instants savent combien il est nécessaire d'être aidé et écouté.
Le troisième axe de réforme, à nos yeux essentiel, porte sur le développement de l'adoption nationale.
Comme je vous le disais, en 2001, seuls 1 150 des 2 882 pupilles de l'État ont fait l'objet d'un placement en vue d'adoption, ce qui signifie que plus de 1 700 enfants n'ont pas trouvé de parents, en raison de leur état de santé, de leur appartenance à une fratrie et surtout de leur âge. Par comparaison, rappelons que 5 000 adoptions nationales sont réalisées chaque année au Royaume-Uni, soit le nombre annuel total d'adoptions en France.
Comment expliquer cet écart ? D'abord, la majorité des candidats se tournent vers l'adoption internationale, qui leur garantit souvent de se voir confier un enfant plus jeune. Mais ensuite et surtout, l'adoption des enfants français se heurte au faible nombre de pupilles adoptables. Le problème est régulièrement soulevé par les associations de parents adoptifs : des enfants, pourtant délaissés par leurs parents biologiques et placés sous la protection de l'aide sociale à l'enfance, ne peuvent être adoptés parce qu'ils n'ont pas été légalement abandonnés selon la procédure judiciaire d'abandon figurant à l'article 350 du code civil.
Les services sociaux privilégient en effet, parfois jusqu'à l'absurde, les statuts qui maintiennent un lien entre le mineur et ses parents biologiques. On le constate parfaitement dans le nombre croissant des mises sous tutelle, qui sont passées de 2 730 en 1999 à près de 4 000 en 2003.
Or il nous paraît juste, lorsque ces enfants sont en situation d'abandon manifeste de la part de leurs parents, que soit prononcée une décision judiciaire d'abandon afin de leur permettre d'accéder, le plus tôt possible, au statut plus protecteur de pupille de l'État et de leur offrir l'espoir d'une autre vie.
Le texte vise donc à assouplir les critères auxquels se réfère le juge pour accepter ou pour refuser la demande de déclaration d'abandon d'un mineur accueilli par un particulier ou par les services de l'aide sociale à l'enfance.
Jusqu'à présent, l'état de grande détresse des parents pouvait faire obstacle à cette déclaration. Désormais, le juge s'en tiendra aux seuls critères affectifs et objectifs de la notion de désintéressement prolongé de l'enfant.
L'objectif est d'inciter les juges, mais surtout les services sociaux qui présentent les demandes, à utiliser cette procédure pour offrir un avenir à des enfants délaissés.
Je ne vous cacherai pas, mes chers collègues, que cette disposition a fait l'objet d'un long débat au sein de la commission. C'est pourquoi je souhaite rappeler solennellement qu'il ne s'agit absolument pas de « profiter » du manque de moyens matériels des parents, voire de leur indigence, pour « accroître le nombre des enfants adoptables ».
La détresse matérielle des parents appelle une aide circonstanciée, appropriée, elle explique que des parents soient contraints de se séparer momentanément de leurs enfants pour assurer leur santé, voire leur survie. Elle ne peut pas expliquer la solitude affective dans laquelle se trouvent certains enfants bien longtemps après que leurs parents ont été obligés de se séparer d'eux.
Il appartient à la collectivité de soutenir ces parents qui entendent maintenir les liens familiaux mais qui en sont empêchés par une incapacité financière due au chômage, à la précarité. La misère, la certitude que les enfants sont placés, donc qu'ils ne manquent de rien, peuvent annihiler les capacités psychologiques et masquer les sentiments cachés pour ne pas exhiber la réalité du quotidien. Il appartient aux services sociaux de soutenir la parentalité possible.
Mais appartient-il à la collectivité de soutenir une parentalité inexistante lorsque pendant un an, voire beaucoup plus longtemps en réalité, rien de ce qui peut ressembler à un maintien des liens familiaux ne se fait plus jour ?
Grandir sans famille, grandir sans statut protecteur, n'est pas une fatalité, même quand l'adoption n'est pas la meilleure solution pour certains enfants. Encore faut-il savoir évaluer chaque situation depuis l'intérêt individuel de chaque enfant, s'assurer que l'adoption est envisagée, entre autres solutions, avant qu'il apparaisse vraiment que ce n'est pas la réponse à la solitude ou à l'isolement de cet enfant-là.
Au-delà de cette proposition de loi, je souhaite, monsieur le ministre, évoquer l'impossibilité d'adopter des enfants algériens ou marocains lorsqu'ils ne sont pas nés en France et le problème de l'ouverture de l'adoption aux couples liés par un pacte civil de solidarité.
Je sais que le Conseil supérieur de l'adoption et les organisations de parents mènent à ce sujet une réflexion approfondie ; je souhaite que ces réflexions aboutissent rapidement à une proposition de loi que je soutiendrai de toute ma conviction tant il est vrai que notre devoir est de donner des parents à un enfant.
Il serait opportun que cette question de l'interdiction de l'adoption pour des enfants au seul motif de leur lieu de naissance soit revue très rapidement. De la même façon, une réflexion me semble devoir être menée sur la protection de l'enfant qui, dans notre pays, est un peu délaissée par rapport à celle de la famille.
Pour conclure, je souhaite, au nom de la commission des affaires sociales, souligner la qualité de cette initiative parlementaire. Nous attendons une mise en oeuvre rapide de ces dispositions, dans l'intérêt des milliers d'enfants abandonnés en France et à l'étranger et dans celui des nombreuses familles qui attendent pendant trop longtemps de se voir confier un enfant. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Sous réserve de l'adoption de l'amendement qu'elle vous soumettra, la commission vous invite, mes chers collègues, à adopter cette proposition de loi.
Mme la présidente. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe Union pour un mouvement populaire, 33 minutes ;
Groupe socialiste, 23 minutes ;
Groupe UC-UDF, 11 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 9 minutes ;
Réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe, 6 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Claire-Lise Campion.
Mme Claire-Lise Campion. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je débuterai mon intervention en soulignant que nous légiférons aujourd'hui sur un texte qui n'a fait l'objet, de la part de la commission des affaires sociales, d'aucune audition et que d'une seule réunion de travail, au cours de laquelle de nombreuses et très intéressantes questions ont été soulevées, mais sans que l'on puisse suffisamment les approfondir. Nous le regrettons vivement !
Le groupe socialiste a tout de même pu entendre, dans l'urgence, Mme Claire Brisset, défenseure des enfants, différentes associations représentant les parents adoptants et un chef de service de l'adoption appartenant à un conseil général. J'en profite pour remercier ces personnes et signaler la diligence avec laquelle elles ont répondu à notre invitation.
Il est ressorti de ces auditions des points de vue parfois très divergents au sujet desquels le manque de temps pour effectuer un travail de réflexion approfondi se fait durement ressentir. Je réitère donc mon profond regret de constater que, une fois de plus, les parlementaires travaillent dans l'urgence, sans pouvoir prendre le recul nécessaire afin de légiférer avec une bonne connaissance des dossiers. Ni les adoptants ni les adoptés ne méritent une telle précipitation !
La proposition de loi qui nous est présentée aujourd'hui vise à faciliter et à augmenter le nombre d'adoptions prononcées en France. Ce n'est en aucun cas la réforme d'ampleur attendue ; il ne s'agit que d'une vision partielle et réduite ne concernant exclusivement, ou presque, que les adoptants. C'est la raison pour laquelle nous vous proposerons, mes chers collègues, d'adopter un amendement visant à modifier le titre de la proposition de loi.
Ces dispositions portées par les parents adoptants sont apparemment difficilement contestables tant les objectifs sont louables : venir en aide aux enfants délaissés, leur offrir un foyer, de l'amour.
Cette initiative a pour origine le constat suivant : en France, 25 000 familles souhaitent adopter un enfant alors que « seuls », si je puis m'exprimer ainsi, 2 000 enfants sont pupilles de l'Etat et donc en situation d'être adoptés. On comptait en effet 150 000 pupilles de l'Etat en 1900, 20 000 en 1980, ce chiffre étant passé à 2 000 en 2005.
Cette chute importante tient certainement à une meilleure maîtrise de la contraception et à une meilleure politique d'accompagnement et d'accueil des femmes célibataires. Nous ne pouvons que nous en réjouir. Mais c'est aussi la raison pour laquelle de nombreuses familles - plus de 80 % - titulaires d'un agrément délivré par les conseils généraux se tournent vers l'adoption à l'étranger.
La situation est telle que, dans un rapport sur l'adoption internationale rendu en 2002, on peut lire : « 35 %, et demain peut-être près de la moitié des candidats français à l'adoption, [...] auront entre les mains ce que d'aucuns considèrent comme un permis d'adopter, [...] sans pouvoir aboutir dans leur démarche ».
Or, face à la frustration et à l'insatisfaction grandissante de ces familles, de nombreuses critiques sont émises pour dénoncer la complexité, le coût souvent prohibitif et le caractère parfois opaque et discriminant des procédures d'adoption à l'étranger.
Pourtant, la France, le 30 juin 1998, a ratifié la convention de La Haye. Par la loi du 5 juillet 1996 et celle du 6 février 2001, elle a mis en conformité sa législation nationale avec le traité. Depuis, toute personne résidant en France, titulaire d'un agrément délivré par un conseil général, doit, pour adopter dans un pays ayant également ratifié la Convention de La Haye, passer, soit par la Mission de l'adoption internationale, soit par un organisme agréé pour l'adoption.
Cependant, 60 % des adoptants continuent de privilégier des démarches individuelles afin d'adopter un enfant dans un pays d'origine, qui, pour 77 % des cas en 2003, n'avait pas ratifié la Convention de La Haye.
C'est dans ce contexte que la proposition de loi portant réforme de l'adoption se donne pour finalité de faire de l'adoption l'un des piliers de la politique familiale de la France et prévoit de créer un nouvel organisme dans le paysage institutionnel de l'adoption. Permettez-moi de douter du bien-fondé de l'objectif et de l'efficacité du moyen !
L'adoption, je l'évoquais précédemment, est faite pour les enfants délaissés. Il ne s'agit en aucune façon d'en faire un pilier de notre politique familiale.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Très bien !
Mme Claire-Lise Campion. Elle est un droit de l'enfant délaissé à une famille ; c'est une mesure de protection de l'enfant, pas une variable compensatoire à la dénatalité ni un droit des adoptants.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Très bien !
Mme Claire-Lise Campion. En d'autres termes, si cette proposition de loi ne vise qu'à satisfaire le désir d'enfant, même si ce souci est humainement compréhensible, je m'interroge sur la portée philosophique et éthique d'un tel projet.
S'agissant des moyens, la proposition de loi envisage de réformer notre système d'adoption sur trois points.
Le premier point porte sur l'amélioration des procédures d'agrément sur le plan départemental.
La disparité de la forme et de la présentation de l'agrément suivant le département est largement reconnue. Ce manque d'uniformisation nationale des critères d'évaluation et le manque d'information des candidats à l'adoption sont autant d'éléments qui ne plaident pas en notre faveur auprès des pays d'origine.
L'évaluation sociale et psychologique doit être plus rigoureuse dans sa formulation, plus explicite et plus cohérente. En ce sens, l'harmonisation de la forme et du contenu de l'agrément est une avancée réelle, que nous approuvons, d'autant que cette homogénéisation devra obligatoirement s'appuyer sur le professionnalisme et la formation aux spécificités de l'adoption des équipes chargées des procédures d'agrément des conseils généraux.
Par ailleurs, si la notice, complément de l'agrément, est rendue obligatoire, les postulants pourront enfin bénéficier d'un traitement égal sur l'ensemble du territoire national.
La proposition de loi prévoit également une meilleure formation des adoptants. Ce point est essentiel. Les pays scandinaves et l'Espagne, pays d'accueil en progression sensible, ont mis en place de véritables sessions de préparation des candidats aux différents aspects de l'adoption internationale : connaissance des principaux pays d'origine, de leurs règles et de leurs pratiques, des données psychologiques, éducatives et culturelles de l'adoption, des institutions d'accompagnement que sont les organismes agréés pour l'adoption ainsi que des questions d'ordre juridique, judiciaire et financier.
Au terme d'une telle préparation, les candidats sont, bien évidemment, mieux à même de formuler un projet d'adoption plus précis et plus réaliste, voire d'y renoncer sans que cela soit vécu de manière dramatique. Le texte va, là encore, dans le bon sens.
Cela dit, nous sommes d'accord avec M. le rapporteur sur le fait que cette information devrait être plus contraignante pour les adoptants. Les pays d'origine sont en effet sensibles à l'instauration de tels dispositifs.
La majoration de la prime d'adoption est une mesure nécessaire, mais, en aucun cas, elle ne permettra de couvrir les frais considérables engagés par les familles qui adoptent à l'étranger. Je le rappelle, les coûts engagés dans ce domaine sont loin d'être négligeables. Ils oscillent entre 10 000 euros et 20 000 euros.
Même si certains conseils généraux, comme celui de l'Essonne, que je connais bien, accordent des prêts, cela ne rend pas pour autant l'adoption accessible à tous. Il était donc nécessaire d'apporter une aide supplémentaire aux parents.
Cependant, je regrette que la proposition de loi ne prenne pas mieux en compte le fait que la présence des futurs parents est souvent requise un long moment sur le territoire des pays d'origine afin que soient remplies toutes les formalités. N'oublions pas que la majorité des adoptants se lancent individuellement dans les démarches. Aussi, dans un but d'équité, nous vous proposerons d'adopter un amendement permettant à ces familles de bénéficier d'un congé précédant l'adoption.
Je souhaite enfin souligner le suivi renforcé des enfants après leur adoption.
Un nombre important de pays d'origine attachent, à juste titre, une importance toute particulière à la nécessité que soit mis en place un tel accompagnement. A cet égard, je vous rappelle les résultats partiels d'une étude commandée par la direction générale de l'action sociale et du ministère de la santé en mars dernier : entre 10 % et 20 % des enfants adoptés, selon les départements, se retrouvent placés dans les foyers de l'aide sociale à l'enfance, voire momentanément en hôpital psychiatrique.
Cependant, un tel dispositif nécessite des moyens, un personnel formé. Les premières estimations faites par le conseil général dans mon département de l'Essonne en vue d'intégrer les différentes dispositions d'accompagnement de la proposition de loi, que ce soit l'accompagnement des parents adoptants ou celui des enfants adoptés, tablent sur un investissement annuel de l'ordre de 100 000 euros.
Or le dispositif de compensation des dépenses des conseils généraux a tout simplement été supprimé à l'Assemblée nationale. Nous vous proposerons donc de revenir sur cette suppression. Il ne suffit pas de transférer des compétences ou des charges nouvelles aux conseils généraux, encore faut-il leur donner les moyens de remplir ces missions !
Le deuxième point porte sur le renforcement de l'aide aux candidats à l'adoption internationale avec la création d'un nouvel organisme : l'agence française de l'adoption, l'AFA.
Un grand nombre d'acteurs interviennent dans l'adoption internationale. La complexité de ce dispositif constitue un véritable handicap pour la France vis-à-vis des pays d'origine.
Placé jusqu'à une période très récente sous l'autorité du Premier ministre et, depuis le 14 juin, sous l'autorité du ministère chargé de la famille - M. le Ministre pourra certainement nous éclairer sur cette modification -, le Conseil supérieur de l'adoption comporte des représentants des associations et des ministères concernés. Il émet des avis et il est consulté sur les mesures législatives et réglementaires prises en ce domaine.
L'Autorité centrale pour l'adoption internationale, rattachée au ministère des affaires étrangères, est, quant à elle, chargée de coordonner les travaux des administrations concernées.
Pour sa part, la MAI met en oeuvre les décisions du ministère des affaires étrangères et a, en particulier, la charge d'instruire les dossiers d'habilitation des OAA. Notre collègue, Monique Cerisier-ben Guiga, reviendra plus longuement sur cette partie du texte.
Alors que les pays d'origine réclament une plus grande lisibilité structurelle et privilégient l'interlocuteur unique, la proposition de loi prévoit la création d'un quatrième organisme. On ne peut que s'interroger sur ses compétences et, surtout, sur son articulation avec les trois qui existent. Cela ne va pas dans le sens d'une meilleure crédibilité de la France en matière d'adoption internationale ! Nous avons d'ailleurs eu l'occasion d'en débattre en commission.
La multiplicité des instances ne peut que contribuer au manque d'efficacité de l'action publique. La proposition de loi n'aboutit finalement qu'à ajouter un peu plus de confusion dans notre paysage institutionnel.
Cette agence prend la forme d'un groupement d'intérêt public, composé de l'Etat, des départements et de personnes morales de droit privé. Les conseils généraux, quant à eux, devront nommer un représentant « adoption », chargé d'accompagner les couples dans leurs démarches et d'assurer les relations avec l'AFA.
La mise en place d'un tel dispositif peut apporter une réelle amélioration à l'aide proposée aux adoptants et crédibiliser les démarches aux yeux des interlocuteurs étrangers. Cependant, plusieurs questions restent posées.
Ainsi, comment peut-on clarifier le rôle des différentes institutions compétentes en matière d'adoption en superposant une nouvelle institution ? Son organisation dépend, une fois de plus, du pouvoir réglementaire et laisse le législateur que nous sommes dans l'expectative.
Comment cette nouvelle institution sera-t-elle financée ? Je vous le rappelle, c'est à la demande du Gouvernement que la compensation financière des charges transférées a été supprimée à l'Assemblée nationale.
Comment les frais engagés par l'Etat et les conseils généraux s'articuleront-ils ?
Comment clarifier la mission et les conditions d'agrément des organismes agréés pour l'adoption, qui sont aujourd'hui au nombre de quarante, alors que le rapport « Mission sur le dispositif français de l'adoption internationale » de 2003 établit un bilan précis qui ne semble pas avoir été pris en compte ?
Le troisième point porte sur l'article 3 de la proposition de loi, dont le but, avouons-le, est bien de multiplier le nombre d'enfants adoptables en France.
Le texte qui nous est proposé vise ainsi à assouplir les critères auxquels se réfère le juge pour accepter ou refuser la demande de déclaration d'abandon. L'article 350 du code civil prévoyait, jusqu'à présent, que seul l'état de grande détresse des parents pouvait faire obstacle à cette déclaration.
J'entends parfaitement les arguments qui ont guidé cette position. Depuis l'instauration de cette clause restrictive, entre 1981 et 2001, le nombre d'enfants déclarés abandonnés a diminué de moitié. Certains enfants vont de foyers en foyers, de famille d'accueil en famille d'accueil et connaissent une instabilité affective complète. Cependant, on ne peut oublier que l'accueil d'un enfant à l'aide sociale à l'enfance n'est pas une fin en soi, mais un temps donné, un moyen. Sa mission est de tout mettre en oeuvre pour que ne soit pas rompu le lien entre les parents et l'enfant et pour permettre à l'enfant de retrouver sa place auprès des siens.
Par ailleurs, le fait de faciliter les déclarations d'abandon judiciaire ne résoudrait pas, pour autant, la distorsion qualitative : les enfants dans cette situation sont souvent âgés et peu préparés à l'adoption.
Cette disposition a été votée « au nom de l'intérêt supérieur de l'enfant », malgré les inquiétudes exprimées quant à ses conséquences psychologiques. Sommes-nous vraiment certains que la rupture définitive de tout lien avec la famille d'origine soit la meilleure solution pour l'enfant ? Celle-ci leur donne-t-elle les meilleures chances de se bâtir et de construire un avenir ?
Le lien du sang est une réalité dont on ne peut se séparer. Même si une adoption est réussie, il n'est pas rare que le jeune soit rattrapé par les questions de son origine. Cette mesure a, selon moi, été votée dans l'urgence, sans prendre suffisamment le temps de la réflexion.
Mme Raymonde Le Texier. Très bien !
Mme Claire-Lise Campion. En revanche, rien n'est prévu pour les pupilles de l'Etat qui sont en situation d'être adoptés mais qui ne trouvent pas de famille. Ils sont un millier. Il est de notre responsabilité, en tant que parlementaires, de prendre en compte le droit de ces enfants.
Le souci des candidats à l'adoption est légitime, mais il est également de notre responsabilité de tenir un discours de vérité auprès des adoptants.
L'adoption plénière est devenue la seule voie envisagée par les familles qui souhaitent établir un lien stable et sécurisant alors qu'une rupture définitive avec la famille biologique peut ne pas correspondre à l'intérêt de l'enfant adopté.
Or il existe aussi le régime de l'adoption simple, qui présente l'avantage pour l'enfant de ne pas rompre brutalement, ni de façon irrévocable, avec son histoire.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est tout à fait vrai !
Mme Claire-Lise Campion. Nous, les responsables politiques, pas plus que les professionnels confrontés à ces situations, n'avons su suffisamment mettre en avant ce dispositif et en proposer d'autres ; je pense, par exemple, au parrainage.
L'adoption doit être une réponse pour les enfants, elle l'est parfois pour les adultes qui les accueillent, et c'est bien ainsi. Mais c'est d'abord à l'égard des enfants que nous avons des devoirs, ne l'oublions pas ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Desmarescaux.
Mme Sylvie Desmarescaux. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il n'y a pas si longtemps encore, l'adoption était une réalité troublante que bien des parents adoptifs s'efforçaient de cacher ou de faire oublier.
Aujourd'hui, la réalité est tout autre et il est de plus en plus admis que les liens du sang ne sont pas indispensables à la parenté. Je dirais qu'adopter un enfant, c'est une histoire d'amour et, malheureusement trop souvent, une histoire de patience.
Je constate que la proposition de loi a pour objectif d'assouplir et d'accélérer les procédures d'adoption pour les foyers français en attente d'un enfant.
Au niveau national, dois-je rappeler que 25 000 familles sont actuellement agréées et en attente d'enfants ? Dans le département du Nord, 329 agréments ont été délivrés en 2004 et 188 enfants ont été adoptables. Le nombre d'agréments valides au 31 décembre 2004 est encore de 1 600. Par ailleurs, 151 enfants en provenance de l'étranger ont pu être accueillis.
Monsieur le ministre, la proposition de loi va dans le bon sens. Elle clarifie la procédure et harmonise les agréments au niveau national. Ils seront désormais délivrés par arrêté ; leur forme et leur contenu seront définis par décret.
L'agrément a été institué à l'origine dans l'intérêt de l'enfant, afin qu'il bénéficie d'une famille capable de lui assurer santé, sécurité et épanouissement. A l'heure actuelle, il existe des inégalités dans le traitement des dossiers selon les départements. Je me permets donc d'insister de nouveau sur l'importance de l'harmonisation des décisions en la matière.
La proposition de loi vise également un meilleur accompagnement de l'adoptant par la prolongation du suivi du mineur adopté. A ce propos, je tiens à saluer l'ouverture récente, à Lille, d'une « maison de l'adoption ».
Cette maison s'adresse aux personnes ayant déjà adopté un ou plusieurs enfants. Sur place, on trouve une équipe de professionnels, ainsi que des membres bénévoles d'associations et des parents concernés par l'adoption, qui apportent leur expérience et leur écoute. Ils réalisent un travail important avec les familles, et en premier lieu un travail d'identification des difficultés qu'elles peuvent rencontrer ; ils tentent ensuite de trouver une solution.
Dans un même souci d'accompagnement, la proposition de loi crée l'Agence française de l'adoption, qui est chargée de diffuser informations et conseils aux parents en attente d'un enfant.
Pour moi, l'adoption est synonyme de joie, mais aussi de souffrance due à l'attente, à l'incertitude et aux enquêtes sociales.
Permettez-moi de comparer la procédure d'adoption à celle de la procréation médicalement assistée. Certes, dans le cadre de la PMA, les couples doivent en outre affronter les traitements médicaux, mais, dans les deux cas, les espoirs sont fréquemment déçus et l'attente est longue.
A l'occasion de l'examen du projet de loi relatif à la bioéthique, j'avais été chargée de rapporter au nom de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes. J'avais alors proposé que les couples soient tenus informés des possibilités d'adoption et incités à effectuer les démarches en ce sens en cas d'échecs répétés. Je pense sincèrement que les familles manquent encore d'information à ce sujet.
Néanmoins, parallèlement à cette information nécessaire, il convient de remédier aux nombreux cas d'enfants qui ne peuvent être déclarés adoptables. La question de la suppression de l'interdiction de prononcer un abandon d'enfant en cas de « grande détresse des parents » a suscité un débat important à l'Assemblée nationale, mais aussi au sein de notre commission des affaires sociales.
A mon sens, que l'on parle d'adoption ou de procréation médicalement assistée, le débat est de même nature et porte sur « le droit à l'enfant » et « les droits de l'enfant ».
Tout n'est pas permis lorsque l'on traite de sujets qui ont à voir avec la vie humaine et les sentiments. L'adoption a pour objet de réunir des parents en désir d'enfant et des enfants en mal d'amour. L'intérêt de chacun doit être au centre de nos préoccupations.
J'ai beaucoup réfléchi à la suppression de la mention « sauf le cas de grande détresse des parents » dans l'article 350 du code civil. Je considère que cette suppression va dans l'intérêt de tous : l'intérêt de l'enfant, d'abord, qui pourra se voir reconnaître « adoptable » et être accueilli dans une famille qui saura lui donner tout l'amour dont il a besoin, veiller à sa santé mais aussi à son épanouissement ; l'intérêt des parents adoptifs, ensuite, qui accueilleront chez eux l'enfant qu'ils attendaient ; l'intérêt des parents biologiques, enfin, qui ont toujours la possibilité de remédier à la situation et de garder leur enfant auprès d'eux.
Certains ont évoqué la faiblesse de la durée retenue - un an - pour introduire une demande de déclaration d'abandon, ce qui ne laisserait que peu de temps aux parents pour régler les difficultés qu'ils peuvent rencontrer et, ainsi, garder leur enfant sous leur responsabilité. Dans les faits, la procédure est beaucoup plus longue.
Il faut d'abord que les services sociaux fassent le constat d'un désintéressement manifeste des parents biologiques à l'égard de l'enfant, et ce pendant une durée minimale d'un an.
Il faut ensuite que l'ASE intervienne auprès du juge du tribunal de grande instance, ce qu'elle fait rarement immédiatement après que le délai est passé. Puis, le juge fait procéder à une enquête et, enfin, déclare l'abandon. Le délai d'un an est donc largement allongé.
Voilà pourquoi je suis favorable à l'article 3 de la proposition de loi. Celui-ci permettra de déclarer davantage d'enfants adoptables, tout en laissant un large pouvoir d'appréciation au juge et une chance aux parents biologiques de porter de nouveau un intérêt à leur enfant.
Pour conclure, je dirai que, si la proposition de loi est une première étape primordiale, bien des choses reposent sur vous, monsieur le ministre. Vous avez promis de publier des décrets, de diffuser des circulaires. Je sais que je peux compter sur vous pour que tout soit fait dans les meilleurs délais ; je vous en remercie par avance. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Christiane Kammermann.
Mme Christiane Kammermann. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi dont nous allons débattre aujourd'hui est importante. Elle est très attendue par des milliers de familles et par des milliers d'enfants qui se trouvent seuls, en France ou à l'étranger.
Les chiffres sont révélateurs. Comme vous l'avez rappelé, à ce jour, 25 000 familles sont en attente d'adoption et, chaque année, 8 000 agréments sont délivrés par les présidents de conseils généraux. Seuls 5 000 enfants par an sont adoptés. L'écart entre le nombre d'agréments et le nombre d'enfants adoptés ne cesse de se creuser. Par ailleurs, le nombre d'adoptions d'enfants français ne cesse de diminuer. Nous pouvons aisément imaginer, au regard de ces quelques chiffres, les situations d'attente dans lesquelles se trouvent les familles.
La présente proposition de loi s'inscrit dans une construction progressive, le phénomène de l'adoption étant en perpétuelle évolution en France comme à l'étranger. Notre système législatif doit sans cesse s'adapter aux nouveaux besoins des familles.
La proposition de loi dont nous débattons aujourd'hui prend en compte les insuffisances du système, apporte des solutions, crée un nouvel organisme - l'Agence française de l'adoption - dont nous attendons beaucoup.
Dans toutes les dispositions proposées, l'intérêt de l'enfant domine. Je tiens à saluer l'action du Conseil supérieur de l'adoption, dont les travaux, qui ont duré deux ans, sont à l'origine du texte. Je salue également le Gouvernement, qui poursuivra l'action engagée dans un esprit de protection de la famille et des droits de l'enfant.
M. Alain Milon, qui s'est particulièrement investi dans sa mission, a présenté les trois grands axes de la réforme : l'amélioration des procédures d'agrément au niveau départemental ; le renforcement de l'aide aux candidats à l'adoption internationale ; le développement de l'adoption nationale, par le biais d'une mesure concernant la déclaration judiciaire d'abandon.
Sur ces trois points, je tiens à souligner les avancées significatives du texte.
Premier point : l'amélioration des procédures d'agrément au niveau départemental. Il était important de garantir l'égalité entre les demandeurs. On a pu effectivement constater des disparités, selon les départements, dans les critères retenus pour délivrer l'agrément à la base du projet d'adoption. La forme et le contenu de l'agrément pouvaient également varier.
L'harmonisation prévue par le texte permettra de traiter de façon équitable les familles voulant adopter. Elle permettra également une meilleure lisibilité pour les pays étrangers, ceux-ci demandant des renseignements de plus en plus précis. C'est pourquoi la notice qui sera dorénavant annexée à l'arrêté d'agrément sera très utile. Elle viendra préciser le projet d'adoption et représentera un instrument précieux puisqu'elle évoluera en fonction des changements de situation des demandeurs.
Deuxième point positif : le délai d'examen des demandes d'agrément se trouvera allongé, permettant un examen approfondi des dossiers.
Quant aux réunions d'information prévues par le texte, je pense que nombre de candidats à l'adoption voudront y assister. Les futurs parents déplorent en effet l'absence d'information au cours de la procédure. Ces réunions attireront leur attention sur des points auxquels ils n'auraient peut-être pas pensé. Ils seront mieux préparés à accueillir l'enfant, car un évènement aussi important n'est jamais simple, ni pour l'enfant, qui a vécu douloureusement une séparation, ni pour les parents, qui peuvent avoir une vision idéalisée de l'adoption.
En ce qui concerne le renforcement de l'aide aux candidats à l'adoption internationale, j'espère que d'importants moyens pourront accompagner la création de l'Agence française de l'adoption, mesure centrale de la réforme.
La création de cette agence est d'autant plus importante qu'elle accompagnera le plus grand nombre d'adoptions : celles qui auront lieu en dehors du cadre des organismes agréés pour l'adoption.
Elle apportera une information complète, une aide concrète et un accompagnement personnalisé aux candidats à l'adoption. L'agence sera ainsi un soutien efficace pour 60 % des adoptants, qui, jusqu'à présent, étaient contraints d'effectuer leurs démarches seuls, avec tous les risques d'abus que cela comporte.
Les familles manquent d'informations sur ce qui les attend dans leurs démarches à l'étranger. Les difficultés qu'elles rencontrent varient considérablement d'un pays à l'autre. Aussi la proposition de loi peut-elle métamorphoser la façon dont l'adoption est perçue par nos concitoyens.
Troisième point positif : l'accompagnement renforcé, qui se poursuivra même après le prononcé d'adoption définitive et répondra à la demande des adoptants, mais également à celle des pays d'origine.
Comme je l'ai dit précédemment, les pays d'origine sont de plus en plus exigeants en ce qui concerne le profil des familles adoptantes et les informations fournies. Certains pays, comme la Russie, refusent désormais l'adoption à titre individuel et ne souhaitent traiter qu'avec une instance nationale. Cet état de fait, qui représente bien entendu un progrès pour la protection des enfants, ne doit pas pénaliser, comme c'est le cas trop souvent, les candidatures de couples français.
Je veux insister sur l'insuffisance des moyens dont disposent les fonctionnaires chargés de la mission d'accompagnement. Il était reproché à la Mission d'adoption internationale, qui sera ainsi remplacée, d'être trop administrative et rigide, peut-être pas assez à l'écoute, par manque de temps et de moyens.
Je crois que l'accueil des parents est essentiel. Si l'Agence française de l'adoption dispose de moyens importants, d'un personnel formé, d'une organisation bien étudiée, elle pourra alors constituer une avancée très significative.
Par ailleurs, je souhaite, monsieur le ministre, vous poser une question concernant les Français expatriés.
On peut en effet s'interroger sur l'aboutissement des démarches engagées par des Français résidant à l'étranger ou venant à s'expatrier en cours de procédure. Des familles se trouvant dans ce cas de figure m'ont fait part de leur déception, car la Mission d'adoption internationale refusait de prendre en charge leur dossier alors qu'elles avaient pourtant obtenu un agrément. Qu'en sera-t-il avec l'Agence française de l'adoption ? Les Français de l'étranger que, je représente, souhaitent savoir s'ils peuvent espérer une avancée sur ce point.
Je voudrais en outre attirer votre attention sur les frais considérables engagés pour l'adoption d'un enfant à l'étranger, la procédure qui est actuellement la plus courante.
Les familles ont à supporter des frais qui ne sont pas toujours prévisibles : frais de dossiers, voyages et séjours parfois longs et répétés, frais malheureusement inattendus liés aux réalités locales. C'est pourquoi je salue l'initiative de cette proposition de loi qui majore la prime d'accueil du jeune enfant. Mais j'espère qu'il sera possible d'aller plus loin.
L'adoption est une histoire d'amour. Il est choquant qu'elle puisse dépendre des moyens dont disposent les futurs parents. Il faut empêcher que les Français puissent ressentir l'adoption comme une injustice.
Cette proposition de loi a le mérite d'apporter des solutions en matière tant d'adoption internationale que d'adoption interne. Il faut se féliciter qu'un amendement adopté par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale ait permis d'évoquer les difficultés des enfants en situation d'abandon. La mesure envisagée permettra aux tribunaux de déclarer un abandon d'enfant au bout d'un an de délaissement de cet enfant, même en cas de grande détresse des parents.
Il me semble que, si l'article 350 du code civil, dans sa rédaction actuelle, a le mérite de prendre en considération la difficile situation des parents, il a également pour effet de nuire à l'enfant. En effet, cette disposition place des espoirs malheureusement infondés dans la capacité de certains parents à sortir d'une situation difficile et à revenir vers leur enfant. Trop souvent, bien que l'enfant soit concrètement abandonné, les années s'écoulent sans que l'on puisse permettre à une famille de le recueillir, de l'adopter définitivement, de lui apporter la sécurité dont il a tant besoin.
Le choix est difficile. Il est difficile de décider que les parents biologiques n'auront plus de droits sur leur enfant. Mais il faut considérer en priorité l'intérêt de l'enfant. En prenant en considération la grande détresse des parents, on risque fort d'oublier celle de l'enfant. La réalité sur le terrain nous enseigne malheureusement que certains parents n'ont fait que donner la vie et que c'est tout ce qu'ils pourront jamais donner à leur enfant !
L'adoption interne est peu développée. Des blocages tels que celui qui découle de l'application de l'article 350 du code civil dans sa rédaction actuelle font que les adoptants se tournent vers l'étranger, alors que des enfants sur notre sol auraient besoin d'eux. On peut donc espérer que la proposition de loi permette de résoudre de nombreux cas douloureux.
L'adoption est une rencontre : celle d'un couple sans enfant, prêt à donner son amour, et celle d'un enfant sans parents, qui rêve de recevoir cet amour.
Je vous remercie, monsieur le ministre, mes chers collègues, au nom de tous ces parents et des enfants qui vont les rejoindre.
Mes chers collègues, je serai heureuse de voter pour eux, avec vous, cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Muguette Dini.
Mme Muguette Dini. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'adoption, c'est le parcours du combattant ! Tous les couples concernés vous le diront.
Pourquoi est-ce si compliqué ? Pourquoi est-ce si long ? Pourquoi y a-t-il si peu d'enfants français adoptables ?
Cette proposition de loi tente d'apporter quelques réponses à ces questions simples, mais pourtant essentielles pour l'équilibre et l'avenir des enfants adoptés.
Il me semble, néanmoins, que le texte qui nous est proposé aurait dû, compte tenu des réalités du terrain, être plus ambitieux.
Mon expérience de quatre ans à la tête d'une commission d'agrément en vue d'adoption et de membre d'un conseil de famille m'a donné l'occasion de m'intéresser de très près à ces questions d'adoption.
Ceux qui ont exercé ces responsabilités savent à quel point l'on sort perplexe et bouleversé de ces réunions mensuelles : elles mettent en perspective sa propre parentalité, font réfléchir à la détresse des couples en désir d'enfant et obligent à se poser la question de l'intérêt supérieur de l'enfant.
Pourquoi l'adoption est-elle si compliquée ?
Découvrir que son couple est stérile, en détecter le responsable, tenter des procréations médicalement assistées et constater, au bout du compte, qu'il faut faire le deuil de l'enfant biologique est un parcours long et difficile. Entre le moment où un couple éprouve son premier désir d'enfant et celui où il envisage enfin l'adoption, où il se sent enfin prêt, il s'est écoulé des mois, des années.
Le temps nécessaire à l'instruction du dossier, à son propre mûrissement, semble alors interminable. Le délai de neuf mois entre la date de confirmation de la demande et celui de la délivrance de l'agrément prévu par la loi me semble tout à fait raisonnable. N'est-il pas celui de la gestation ?
En revanche, il me semble que nous n'avons pas le droit de déroger à cette règle en allongeant le délai ! Cette limite doit être absolue. C'est pourquoi j'ai déposé un amendement tendant à prévoir que, au-delà de ces neufs mois, l'agrément serait tacitement accordé. Cela obligera, bien sûr, les services des conseils généraux à être très rigoureux dans la gestion des enquêtes, mais cela donnera également confiance aux requérants dans l'attention que leurs portent les services.
Les commissions d'agrément en vue d'adoption sont très souvent confrontées à des demandes étonnantes, en particulier à certaines provenant de couples relativement âgés. La loi ne prévoit aucune limite d'âge pour l'agrément. L'intérêt supérieur de l'enfant est-il respecté lorsqu'on lui donne des parents qui pourraient être ses grands-parents ?
Les conditions d'adoption devraient établir un écart d'âge maximal, acceptable, entre l'adopté et l'adoptant ou un âge limite à partir duquel l'adoption ne serait plus possible. J'ai déposé un amendement en ce sens.
L'harmonisation de la forme et du contenu de l'agrément sur l'ensemble du territoire national rendra plus compréhensibles et plus équitables les décisions d'agrément pour les candidats. Elles seront plus claires pour les services d'adoption des pays d'origine des enfants étrangers.
Pourquoi l'adoption est-elle si longue ?
Deux cas de figure se présentent : adoption nationale ou adoption internationale.
Dans la première hypothèse, un couple, encore jeune, souhaite adopter un pupille de l'Etat et décide d'attendre. Compte tenu du nombre très réduit de pupilles de l'Etat, les délais sont très longs, rarement en dessous de deux ans, voire souvent bien plus longs.
Se pose alors la question de savoir pourquoi il y a en France si peu d'enfants adoptables ?
C'est le moment d'évoquer la politique que nous menons, depuis plusieurs années, qui consiste à privilégier les liens du sang au détriment des liens affectifs.
Un directeur de maison d'enfants à caractère social m'a fait part, la semaine dernière, du cas suivant. Oriane a dix ans. Elle vit dans un établissement du Rhône, après avoir vécu dans des familles d'accueil depuis sa naissance. Elle voit sa maman, prostituée à Toulouse, une fois par an et fait le voyage en voiture, accompagnée d'une éducatrice et d'une assistante sociale. Elle reste près de sa mère environ une heure et demie et repart après quelques câlins, sans avoir rien échangé.
Mme Raymonde Le Texier. Les câlins, ce n'est pas rien ! C'est bien les câlins !
Mme Muguette Dini. Imaginez la souffrance de cette enfant, son espoir - toujours déçu - de vivre avec une mère idéalisée et par ailleurs totalement incapable de la prendre en charge. Bien entendu, Oriane va très mal.
Cela fait maintenant dix ans que les responsables de cette petite fille se bercent de l'illusion que cette situation est préférable pour elle à celle d'avoir été déclarée abandonnée dans ses toutes premières années et d'avoir ainsi pu être adoptée.
Mme Raymonde Le Texier. Et qu'en dit cette petite !
Mme Muguette Dini. Dans cet établissement ouvert depuis trente-trois ans, le directeur a recensé que 43 enfants sur 388 ont connu une situation similaire, soit en moyenne 10 % par an. Si l'on rapporte ce chiffre au nombre d'enfants confiés aux services de l'enfance de tous les départements de France - soit 135 000 enfants -, ce sont 13 500 enfants qui sont concernés.
Sans doute ce chiffre est-il excessif. Mais il n'est pas absurde d'imaginer que 2 % à 3 % des enfants confiés - soit 2 500 à 4 000 enfants - pourraient être déclarés abandonnés très tôt, et donc adoptables.
Ces enfants pourraient ainsi trouver dans une famille adoptive un équilibre qu'ils ont définitivement perdu. Ils pourraient éviter une souffrance psychologique et affective qu'ils ne peuvent gérer et dont ils se remettent rarement une fois devenus adultes.
Il est nécessaire d'admettre que certains hommes et certaines femmes sont inaptes à être parents. (Mme Raymonde Le Texier s'exclame.) Il n'y a aucune raison que notre société laisse des enfants dans des situations de maltraitance affectives, psychiques, physiques et quelquefois sexuelles sans chercher à y porter remède. L'article 3 de la proposition de loi, qui prévoit la modification de l'article 350 du code civil, va dans ce sens.
Ainsi, la décision du tribunal d'instance ne prendra plus en compte les cas de grande détresse des parents, mais elle se fondera sur le « désintérêt manifeste » de ceux-ci, mettant de la sorte l'intérêt de l'enfant au coeur du dispositif. Encore faudrait-il revoir les critères d'appréciation de cette notion !
Quoi qu'il en soit, au-delà de ces modifications législatives, c'est de la prégnance de l'idéologie du lien du sang qu'il faut se défaire. En effet, ce raisonnement conduit trop systématiquement les services sociaux à privilégier, parfois jusqu'à l'absurde, les statuts qui maintiennent un lien entre le mineur et ses parents biologiques.
On le sait, des enfants délaissés par leurs parents et placés sous la protection de l'aide sociale à l'enfance ne peuvent être adoptés car ils n'ont pas été légalement abandonnés.
La modification de l'article 350 du code civil devrait permettre d'offrir plus facilement un avenir à des enfants très tôt délaissés. L'adoption doit alors pouvoir constituer un réel recours, les enfants pouvant être adoptés beaucoup plus jeunes.
Cette mesure est susceptible de réduire la longueur de la procédure d'abandon qui est à l'origine, bien souvent, de l'élévation de l'âge moyen des enfants pouvant faire l'objet d'une adoption, rendant de fait celle-ci à peu près impossible. Cela pourrait éviter qu'une majorité de couples ne se tournent vers l'autre forme de l'adoption, à savoir l'adoption internationale, qui leur garantit généralement de se voir confier un enfant plus jeune.
Et nous voici dans le second cas de figure : le couple décide de se tourner vers l'adoption internationale. Il s'engage alors sur un chemin long, difficile et extrêmement contraignant.
Nous connaissons tous les attentes, les désillusions, les espoirs déçus ainsi que les difficultés administratives et le coût des adoptions internationales.
La création de l'Agence française de l'adoption doit permettre, telle qu'elle fonctionnera, de répondre à cette forte demande de soutien exprimée par nos concitoyens.
Sans doute faudrait-il aussi veiller à ce que les personnels de nos ambassades et consulats soient mieux formés à l'accueil des couples et que ces derniers puissent être accueillis dans un lieu confidentiel, aidés dans leurs démarches quand celles-ci nécessitent l'intervention de nos services consulaires.
A cet égard, je me réjouis de l'annonce faite par le ministère des affaires étrangères de nommer prochainement dans les postes consulaires des principaux pays d'origine un « référent adoption », chargé d'informer et de conseiller les adoptants sur les spécificités du pays, d'assurer la relation officielle avec les organismes locaux et d'instruire les demandes de visa.
En revanche, je m'étonne que, parallèlement à la création de l'Agence, le texte ne traite nullement du rôle désormais dévolu à la Mission de l'adoption internationale. La multiplication des organismes chargés de l'adoption rend très confuse, aux yeux de nos concitoyens, les modalités de l'adoption internationale.
Par ailleurs, l'un des obstacles majeurs à surmonter concerne la durée du séjour du couple dans le pays d'adoption.
Il serait souhaitable de prévoir avant l'adoption la possibilité d'un congé, dont la durée, à déterminer, devrait être suffisante pour que les candidats à l'adoption puissent satisfaire les demandes du pays d'origine et, surtout, faire la connaissance de l'enfant.
Il serait intéressant également que l'agence édite une brochure, réactualisée chaque année, relative aux démarches à suivre au retour du pays d'origine.
Dans tous les cas, qu'il s'agisse d'une adoption nationale ou d'une adoption internationale, il n'est pas facile de se retrouver parents du jour au lendemain, sans préparation spécifique ni suivi réel. Il est donc appréciable que la France se dote enfin de dispositions permettant une information sur les réalités de l'adoption et sur les répercussions qu'elle peut avoir sur les familles. Proposer aux candidats à l'adoption des réunions d'information est appréciable mais bien peu contraignant. Pourtant, on connaît tout l'avantage qu'en retirent les participants dans les départements où cela se pratique déjà.
La proposition de loi prévoit que, au-delà de l'adoption plénière en France ou de la transcription du jugement étranger, l'accompagnement par le service de l'aide sociale à l'enfance est prolongé à la demande de l'adoptant.
Cet accompagnement doit être effectif et obligatoire sur une plus longue période. En effet, il est déjà difficile pour les parents biologiques d'avouer qu'ils rencontrent des difficultés dans leurs relations avec leur enfant. Imaginez quel sentiment de culpabilité on peut éprouver dans le cas d'un enfant adopté, lorsque l'entourage, les enquêteurs sociaux et autres personnes bien intentionnées ont souvent mis en garde sur la difficulté d'adopter. Nombre de parents adoptifs sont dans l'incapacité d'en parler. Quelquefois, la situation se dégrade et peut aboutir à des maltraitances, voire à des abandons. Les conseils de famille sont régulièrement confrontés à ces situations.
Tout couple adoptant en France ou à l'étranger devrait être assuré d'un suivi consistant, au minimum, en un contact annuel avec un référent jusqu'à la majorité de l'enfant. Cela permettrait, par nécessité ou en cas de difficultés, de conseiller et d'aider les parents. C'est l'objet d'un des amendements que j'ai déposés.
Telles sont, de manière résumée, les principales observations que je souhaitais faire sur ce texte.
Les modifications que je propose sont le fruit d'une réflexion guidée par mon expérience. Elles sont le reflet des remarques et des demandes exprimées par des couples qui ont fait ces démarches. J'espère, monsieur le ministre, que vous pourrez répondre à mes interrogations et lever ces quelques réserves.
Au demeurant, cette proposition de loi devrait permettre de défendre au mieux les intérêts de l'enfant, tout en donnant une réponse à l'attente des futurs parents. C'est avec beaucoup d'espoir que le groupe de l'UC-UDF la votera. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Eliane Assassi.
Mme Eliane Assassi. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la présente proposition de loi portant réforme de l'adoption vise à donner un cadre à une procédure longue et complexe qui concerne 25 000 familles en attente d'un enfant.
Dans l'adoption sont parties prenantes, d'une part, l'enfant, d'autre part, les personnes qui, pour diverses raisons, ne peuvent pas avoir d'enfants ou qui, en ayant déjà, décident d'agrandir leur famille par l'adoption. Je le dis clairement : quel que soit le désir des adultes, il ne faut jamais oublier que c'est toujours l'intérêt de l'enfant qui doit primer. La défenseure des enfants, Claire Brisset, utilise à ce propos une formule tout à fait adaptée : « L'adoption consiste à offrir un foyer à un enfant qui en est privé et non pas un enfant à un foyer qui en aurait le désir. »
S'agissant des enfants issus des pays pauvres, j'aurais tendance à dire que leur premier intérêt serait de ne pas être « adoptables ». Il est toujours regrettable que des enfants soient abandonnés et donc soumis à l'adoption au motif que le niveau de vie de leur famille est si faible qu'elle ne peut en assurer l'éducation. C'est pourquoi je suis un peu gênée d'entendre le précédent ministre de la famille se réjouir et souhaiter l'augmentation des adoptions dans les années à venir.
D'un autre côté, il est évident que les enfants concernés ont le droit de grandir dans des conditions de vie acceptables qui leur permettent de s'épanouir comme tous les autres enfants. A cet égard, faciliter la procédure d'adoption internationale était non seulement nécessaire mais surtout urgent.
L'adoption est actuellement régie par la loi du 5 juillet 1996 relative à l'adoption et par celle du 6 février 2001 relative à l'adoption internationale, après que la loi du 11 juillet 1966 portant réforme de l'adoption et celle du 22 décembre 1976 modifiant certaines dispositions concernant l'adoption ont autorisé l'adoption par les célibataires et par les couples ayant déjà des enfants. En dépit de cette législation, le système français de l'adoption se révèle peu efficace.
L'écart entre le nombre d'agréments et le nombre d'enfants adoptés ne cesse de se creuser : en 2004, 5 000 adoptions sont intervenues, concernant en majorité des enfants de nationalité étrangère. Le nombre d'adoptions d'enfants français ne cesse pour sa part de diminuer, puisqu'il s'établit à environ 1 500 par an. Cette situation crée au sein des familles des insatisfactions et explique le recours de plus en plus fréquent à l'adoption internationale.
L'adoption doit donc être réformée, tant la procédure d'agrément que l'organisation des démarches individuelles des familles. Il est courant de parler de véritable parcours du combattant pour des familles qui souhaitent adopter des enfants étrangers.
La procédure d'agrément est aujourd'hui très imparfaite. Actuellement, chaque conseil général a la responsabilité de délivrer un agrément aux parents ayant déposé une demande d'adoption, que celle-ci porte sur un enfant né en France ou sur un enfant né à l'étranger. Les agréments sont de ce fait très inégalement délivrés d'un département à l'autre, le taux pouvant varier de 66 % à 98 %.
Théoriquement, l'enquête qui suit la demande d'agrément ne doit pas dépasser neuf mois, puisque c'est le délai imparti au conseil général pour délivrer ou non l'agrément aux personnes candidates à l'adoption. Mais, de manière générale, ce délai est souvent dépassé.
Les différences existant entre les taux d'agrément départementaux s'expliquent en partie par les écarts de pratiques entre les services de l'aide sociale à l'enfance : certains départements ajoutent leurs propres critères et refusent par exemple de délivrer un agrément aux personnes célibataires ou aux couples ayant déjà des enfants, ignorant ainsi les lois de 1966 et de 1976.
Une harmonisation au niveau national apparaissait donc nécessaire afin de ne pas décourager les candidats à l'adoption. La proposition de loi permet de ce point de vue une amélioration de la procédure d'agrément au niveau départemental, puisqu'elle met en place un document dont la forme et le contenu seront identiques sur l'ensemble du territoire. L'agrément sera ainsi plus précis pour les autorités des pays d'origine des enfants.
Nous espérons maintenant, si la procédure d'agrément tend à s'uniformiser, que les enquêtes soient menées dans le respect de la loi. Ce type d'enquête constitue une activité très spécifique, qui doit être de la compétence de professionnels formés, bénéficiant d'un encadrement de grande qualité. La défenseure des enfants regrette d'ailleurs que les enquêteurs ne disposent pas d'un guide d'entretien national. Mais peut-être aurez-vous une réponse à nous apporter à ce sujet, monsieur le ministre ?
Par ailleurs, il nous semble cohérent de n'exiger qu'un seul agrément lorsque les candidats à l'adoption souhaitent adopter une fratrie, plutôt que de faire déposer une demande par enfant. Cette disposition permettra de raccourcir les délais d'adoption simultanée de plusieurs enfants, ce qui est évidemment dans l'intérêt de ces derniers.
Enfin, les réunions d'information prévues pendant la période d'agrément seront utiles aux familles pour qu'elles ne se sentent pas livrées à elles-mêmes une fois l'enfant arrivé dans le foyer.
L'information et l'accompagnement des familles candidates à l'adoption sont en effet essentiels, notamment lorsqu'il s'agit d'adoption internationale. La multiplication des interlocuteurs des familles adoptantes ne simplifie pas leur parcours. Entre la Mission de l'adoption internationale, chargée de diffuser l'information aux familles tout en étant le relais des autorités étrangères chargées de l'adoption internationale, et les OAA, très sélectifs dans le choix des dossiers qu'ils acceptent de traiter, il est souvent difficile d'accéder à l'adoption internationale par ce biais.
En ce sens, la création de l'Agence française de l'adoption rendra les démarches d'adoption internationale plus simples. En effet, l'Agence française de l'adoption a pour vocation d'aider et d'orienter dans leurs démarches les parents candidats à l'adoption. Elle s'apparente à une troisième voie, qui prendra place au côté des démarches individuelles et à celles des organismes agréés, lesquels sont le plus souvent des associations, à l'instar de Médecins du monde.
Cependant, la seule création de l'Agence française de l'adoption ne sera pas suffisante si, dans les pays d'origine des enfants « adoptables », les personnels consulaires français ne sont pas mis à contribution.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Il n'y en a plus !
Mme Eliane Assassi. Toujours dans un souci d'un meilleur encadrement des parents adoptifs, ces personnels devront recevoir une formation leur permettant d'apporter un soutien moral, mais aussi des renseignements de qualité sur la fiabilité des divers organismes d'adoption présents dans le pays d'origine, de façon à éviter les filières mafieuses.
Par ailleurs, nous émettons des doutes quant à la forme juridique choisie pour cette agence, qui sera constituée en un groupement d'intérêt public, ce qui exonère ainsi l'Etat d'une partie de sa mission de service public en matière d'adoption.
Nous nous posons également des questions sur le financement de cette agence et nous craignons une fois encore que sa création ne soit synonyme de transferts de charges non compensés de l'Etat aux départements.
L'adoption internationale a également un coût. Celui-ci est généralement très élevé, puisqu'il est compris entre 10 000 et 20 000 euros pour un enfant. Son importance rend les familles inégales devant l'adoption.
Nous estimons que ce coût devrait être mieux pris en charge par la solidarité nationale. La proposition de loi prévoit que le montant de la prestation d'accueil du jeune enfant, la PAJE, sera majoré en cas d'adoption. En l'occurrence, il est prévu que la prime d'adoption, qui constitue l'une des composantes de la PAJE, sera doublée. Elle passerait ainsi de 800 à 1 600 euros environ. Nous restons, malgré cela, bien en deçà des besoins financiers rencontrés par les familles adoptantes. Nous souhaiterions, par exemple, qu'une aide soit accordée au cas par cas et selon les ressources des familles adoptantes.
Toutes ces dispositions sont de nature à faciliter la procédure d'adoption, ce qui est dans l'intérêt des enfants adoptables en attente d'une famille. Mais ces mêmes dispositions contrastent avec certaines décisions récentes du Gouvernement et avec une mesure adoptée à l'Assemblée nationale.
En effet, dans le projet de loi portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique, le Gouvernement a décidé de supprimer le congé d'adoption auquel a droit un fonctionnaire en plus de son congé de paternité, au motif que le régime général de la sécurité sociale ne prévoit pas cette possibilité pour les salariés du secteur privé en cas d'adoption.
Lors de l'examen de ce texte dans notre assemblée, nous avons souhaité la suppression de cette disposition. Elle est contraire à la générosité affichée dans la présente proposition de loi. Nous proposerons donc que soit rallongé le congé d'adoption.
Enfin, ce texte contient un article qui n'est pas acceptable.
L'article 3 prévoit en effet de rendre adoptables les enfants dont les parents se trouvent dans un état de grande détresse, ce qui n'est pas le cas actuellement. Cette mesure mérite un débat de fond : les difficultés sociales et financières importantes que rencontrent certaines familles ne sont pas synonymes d'une volonté d'abandon des enfants.
Il arrive néanmoins que des parents cessent de s'occuper de leurs enfants et, dans ce cas, que doit-on faire des enfants ? Doit-on ou non les couper de leur famille ? C'est une question que l'on ne peut pas trancher en supprimant simplement du code civil la condition qui interdit l'abandon judiciaire d'enfants de familles en grande détresse. L'adoption de cet article par l'Assemblée nationale donne encore l'impression d'une stigmatisation des foyers les plus modestes. C'est pourquoi nous demanderons la suppression de l'article 3 afin que s'engage un débat sur les moyens appropriés d'aider ces familles à rester unies.
Nous défendrons par ailleurs des amendements qui paraissent nécessaires pour améliorer le texte, s'agissant notamment de la possibilité d'adopter quelle que soit son orientation sexuelle ou encore concernant les enfants soumis à des dispositions législatives qui interdisent leur adoption. Notre vote sur ce texte sera conditionné par l'adoption de nos amendements.
Dans tous les cas, qu'il s'agisse d'adoption d'enfants de nationalité française ou d'enfants de nationalité étrangère, notre volonté est, certes, de faciliter la procédure d'adoption, afin d'offrir rapidement un foyer aux enfants qui en ont besoin, mais également de donner, chaque fois que cela est possible, aux familles ou aux pays pauvres les moyens de ne pas se retrouver dans l'obligation d'abandonner leurs enfants. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Madame la présidente, permettez-moi de me féliciter que, grâce à la loi sur la parité (Mmes Raymonde Le Texier, Claire-Lise Campion. et Josiane Mathon applaudissent.), notre hémicycle soit aujourd'hui peuplé de femmes alors que nous discutons d'un texte qui porte sur l'adoption, donc sur l'enfance.
Mme Raymonde Le Texier. Cela n'intéresse pas les hommes !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Nous sommes tous très sensibles au thème de l'adoption !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Merci à tous les hommes présents !
Ma remarque est néanmoins douce-amère dans la mesure où je constate que le représentant du Gouvernement ainsi que le rapporteur du texte sont des hommes tandis que tous les parlementaires « de base » inscrits dans la discussion générale sont des femmes, ce qui prouve que la hiérarchie en place dans notre société se retrouve à l'échelle de notre hémicycle aujourd'hui.
Je constate également que notre société demeure patriarcale, que l'enfance, donc l'adoption, demeure une affaire de femmes et que les groupes politiques qui ont pris part à la discussion ont tous bien volontiers laissé aux femmes le soin de s'exprimer sur ce sujet. Nous en sommes encore aux trois « K » assignés à la femme allemande : kinder, küche, kirche ! (Mme Eliane Assassi s'esclaffe.)
Mes chers collègues, je centrerai mon propos sur l'Agence française de l'adoption.
Le concept de l'Agence française de l'adoption qui nous est présenté à l'article 4 de la proposition de loi est-il adapté à l'adoption internationale ? Autrement dit, la création de l'Agence française de l'adoption rapprochera-t-elle davantage d'enfants abandonnés, issus majoritairement de pays déshérités, de citoyens français qui aspirent à devenir leurs parents ? Je voudrais le croire mais ma connaissance des difficultés de l'adoption internationale et l'examen attentif du texte m'incitent au scepticisme.
En effet, l'objectif du Gouvernement et des auteurs de la proposition de loi est de doubler le nombre des adoptions, ce qui ne peut se faire que par un recours toujours plus important à l'adoption internationale, même si l'on tente d'augmenter le nombre d'enfants adoptables en France par la modification de l'article 350 du code civil.
Il faut donc, tout d'abord, répondre à la demande d'accompagnement des familles que les organisations agréées pour l'adoption ne peuvent aider, faute de moyens - elles sont souvent bénévoles -, ou dont elles refusent la candidature en fonction de leurs critères propres.
Par ailleurs, de plus en plus de pays se ferment à l'adoption individuelle et réclament, à juste titre, la garantie de l'Etat d'accueil pour les enfants qu'ils confient.
On nous propose donc un dispositif qui vise, en principe, à répondre à ces deux demandes. Je crains que ce dispositif, monsieur le rapporteur, ne permette pas de corriger les défauts majeurs de l'encadrement institutionnel de l'adoption en France : multiplicité des intervenants, émiettement des structures associatives, empilement des institutions. Le tout est à peu près incompréhensible pour les candidats à l'adoption et source de méfiance pour les pays d'origine des enfants.
En effet, dans le système actuel, qui intervient ? En simplifiant, disons que l'aide sociale à l'enfance, l'ASE, reçoit et instruit les demandes d'agrément. Le président du conseil général donne l'agrément, d'une façon discrétionnaire. L'aide sociale à l'enfance s'occupe de l'apparentement si l'enfant est pupille de l'Etat.
La Mission de l'adoption internationale, la MAI, créée en 1987, centralise et diffuse l'information, assure le dialogue avec les pays d'origine, délivre les visas d'entrée en France des enfants.
L'Autorité centrale pour l'adoption internationale, l'ACAI, est l'interface avec les pays d'origine dans le cadre de la convention de la Haye de 1993, dont la France est signataire aux côtés de trente-cinq pays. Elle habilite les organisations autorisées pour l'adoption, les OAA, au nombre d'une quarantaine, qui ont aidé efficacement les parents dans 40 % des adoptions réalisées à l'étranger en 2003 ou 2004. (M. le président de la commission des affaires sociales acquiesce.)
Depuis 2002, le Conseil supérieur de l'adoption, le CSA - à ne pas confondre avec le Conseil supérieur de l'audiovisuel ! (Sourires.) - a pour mission d'orienter la politique française d'adoption.
ASE, MAI, CSA, ACAI, OAA... Comment les parents s'y retrouvent-ils ? Ils s'y retrouvent mal : 60 % de ceux qui parviennent à adopter à l'étranger trouvent un enfant par leurs propres moyens et beaucoup doivent y renoncer.
Quel remède nous propose-t-on ? Une structure supplémentaire qui offrirait - j'emploie volontairement le conditionnel - aux parents une troisième voie, alternative à la démarche individuelle et à l'aide des OAA. Où sont la rationalisation, la coordination, les personnels spécialisés et le financement ? Je ne les vois pas dans le texte qui nous est proposé.
La structure en elle-même suscite nombre d'interrogations.
La première de ces interrogations porte sur l'indépendance de l'Agence. Nous lisons que l'AFA « assure ses compétences dans le strict respect des principes d'égalité et de neutralité ». C'est très bien, mais nous proposerons, par précaution, un amendement visant à ajouter la laïcité à ces principes. La définition trop vague de la composition de l'AFA et de ses modes de fonctionnement ne nous donne pas assez de garantie d'indépendance sur ce plan.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ah bon !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Par ailleurs, dans quelle mesure pouvons-nous être assurés que ce GIP, groupement d'intérêt public, sera indépendant du pouvoir politique - quel qu'il soit, compte tenu des alternances - qui aura nommé son président et son directeur, d'une façon discrétionnaire, soyons clairs ? Les familles ne veulent pas avoir à quémander des enfants ni à recourir à des passe-droits clientélistes.
Le deuxième type d'interrogation porte sur le pouvoir dans l'Agence. Le GIP est composé de l'Etat, des conseils généraux et de personnes morales de droit privé.
Premièrement, que faut-il comprendre par « l'Etat » ? S'agit-il des ministères ? Lesquels ? Dans la mesure où l'adoption internationale est appelée à se développer, la participation du ministère des affaires étrangères et du ministère de la justice aux côtés du ministère chargé de la famille nous paraît indispensable et doit absolument être précisée dans le texte.
Deuxièmement, quelles seront les personnes morales de droit privé ? Des associations, des entreprises ? Dans quel objectif et avec quel pouvoir ?
Troisièmement, quels seront le poids et les pouvoirs respectifs des différents partenaires dans le conseil d'administration ? Le texte ne nous en dit rien. On en revient toujours au décret mais, en réalité, on ne sait pas sur quoi l'on vote.
Quatrièmement, quelles seront les relations entre l'Agence et les organisations ? L'Agence agira en complément des organisations avec l'agrément de l'autorité centrale. S'agissant d'êtres humains et non d'entités abstraites, nous savons que cela peut dégénérer en concurrence. Il n'est donc pas souhaitable que les OAA siègent dans le conseil d'administration de l'AFA avec voix délibérative, et nombre d'entre elles, d'ailleurs, ne souhaitent pas cogérer l'AFA.
En revanche, une bonne concertation entre l'Agence et les organisations est nécessaire. Donc, oui à la concertation, non à la cogestion. De plus, les associations d'adoptés majeurs, qui ne vont pas tarder à se constituer, et de parents adoptifs doivent pouvoir être consultées dans un cadre approprié, un collège consultatif, par exemple
Le troisième type d'interrogation concerne le financement de l'Agence. Les départements s'inquiètent car la charge supplémentaire peut être importante et il n'est pas prévu dans le texte que les départements, quand ils ont peu d'adoptions, mutualisent leurs correspondants, par exemple.
Le quatrième type d'interrogation porte sur le rôle d'intermédiaire de l'AFA pour les adoptions à l'étranger.
Il s'agit là de mon domaine, et je voudrais savoir si, dans cette fonction, l'AFA sera capable de rendre aux parents les mêmes services que les OAA : conseil, recherche des enfants, suivi ?
Dans quels pays l'AFA interviendra-t-elle ? Si elle doit intervenir dans les trois, quatre ou cinq pays où il y a beaucoup d'enfants adoptables, et seulement dans ceux-là, c'est trop facile ! Il sera aisé, en effet, de faire du chiffre et de laisser aux OAA les pays plus difficiles et l'adoption individuelle. Cela ne me paraît pas correct, sauf en ce qui concerne la Chine, où ce point peut être très positif dans la mesure où nous avons vraiment besoin d'un interlocuteur unique et qui appartienne au service public.
Par ailleurs, l'AFA facturera-t-elle ses prestations ? C'est admissible, mais il faut savoir dans quelles conditions et sur quels critères elle le fera. Qui seront ses correspondants et qui les rémunérera ? Qui les formera ?
Nous avons tout à l'heure parlé du personnel consulaire. Soyons clairs, celui-ci n'aura pas grand-chose à voir là dedans et, de toute façon, les consulats sont des coquilles vides, il n'y a plus d'agents et surtout pas dans les services sociaux.
Le ministère des affaires étrangères prévoit d'avoir des agents référents, aptes à vérifier la transparence des procédures et leur rigueur juridique, mais il tient absolument à séparer cette fonction de celle de l'accompagnement des familles. Il ne veut pas avoir à s'en occuper. Les correspondants de l'AFA ne seront donc pas des personnels du ministère des affaires étrangères et n'auront pas le statut diplomatique. Cela pose donc le problème de leur statut, de leur protection sociale, du lieu où ils exerceront leur mission et de leur crédibilité aux yeux du pays d'origine.
Enfin, si l'Agence française de l'adoption n'est pas mieux dotée que ne l'a été la mission de l'adoption internationale, elle ne sera ni plus efficace ni plus accueillante. La MAI a surtout pâti du manque de personnel et de la rotation trop rapide de celui-ci. Je me rappelle être allée mendier du personnel aux affaires sociales et à la justice ! Sous prétexte que les locaux de la MAI étaient situés dans le ministère des affaires étrangères, les autres ministères ne voulaient pas participer à la dotation.
Ne nous leurrons pas, il faut deux ans pour former un bon spécialiste de l'adoption internationale. Dans ces conditions, comment seront recrutés et formés les personnels de l'Agence ? Comment l'expérience et le savoir acquis par la Mission de l'adoption internationale seront-t-ils transmis à l'AFA ?
Voilà trop de questions auxquelles nous ne pouvons pas répondre parce que nous étudions à la hâte un texte trop peu élaboré et à l'orientation incertaine. Il est très difficile à amender, car nous travaillons sur une base qui n'est pas solide.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est un sujet délicat !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Face à une adoption devenue très majoritairement internationale, la France n'a pas besoin d'ajouter un étage au feuilleté des institutions actuelles. Il lui faudrait une structure qui fédère et coordonne les instruments créés au fil des trente dernières années grâce à l'initiative des associations, auxquelles je rends hommage, et des gouvernements successifs.
La proposition de loi qui nous est présentée ajoute un peu plus de confusion dans notre paysage institutionnel en matière d'adoption.
Les adoptants risquent d'en être les premières victimes puisque de nombreux pays exigent aujourd'hui d'avoir un interlocuteur unique et clairement identifié, ce qui ne sera pas le cas.
C'est pourquoi il conviendrait de clarifier la composition et le rôle tant des organismes existants que de l'Agence française pour l'adoption. Mais nous n'y sommes pas encore.
Sans une spécialisation des instances plus forte qu'aujourd'hui, une répartition des tâches plus claire, une hiérarchisation et une coordination, d'ailleurs préconisée par le rapport des inspections générales de décembre 2003, il est à craindre que la démarche d'adoption ne reste difficile et onéreuse - 10 000 à 20 000 euros, ce n'est pas rien ! -, au point qu'elle écarte de nombreux parents potentiels.
Enfin, il ne faut pas tenter de faire croire aux 25 000 parents titulaires d'un agrément que la création d'un organisme supplémentaire facilitera beaucoup l'adoption à l'étranger et multipliera leurs chances d'adopter un enfant. Je vous en prie, ne jouons pas avec leur espérance ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, voilà quelques années, l'éminent démographe Louis Fouché avait déclaré que, pour combler le déficit démographique français et financer l'avenir de nos retraites, il était indispensable que les Français adoptent de nombreux enfants, et surtout à l'étranger.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Quelle horreur !
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Cette nécessité a pour corollaire une démarche noble et généreuse, celle d'offrir une famille, mais aussi protection et affection à un enfant abandonné, où qu'il se trouve de par le monde. C'est le principe même de l'adoption internationale, une voie empruntée par un nombre croissant de Français, ainsi que l'atteste l'explosion des demandes ces dernières années.
Au vu du nombre important de demandes qui restent insatisfaites - 25 000 familles sont en attente d'un enfant -, force est de reconnaître que nos structures n'ont pas suivi cette évolution et qu'il nous faut les réformer.
Il est également dramatique de constater que, dans certains pays, comme à Madagascar - je m'en étais d'ailleurs inquiétée auprès du ministre des affaires étrangères voilà déjà plusieurs mois -, les adoptions ont été gelées, alors que de nombreuses familles françaises avaient déjà noué des relations avec les enfants qui leur avaient été attribués.
Le chiffre le plus frappant quand on parle d'adoption est sans doute celui qui résulte du décalage entre les 4 000 enfants adoptés à l'étranger par nos compatriotes en 2004 et les 45 000 enfants concernés chaque année par l'adoption internationale. Il faut donc remercier notre collègue député Yves Nicolin pour sa proposition, qui devrait faciliter les procédures et raccourcir les délais dans un objectif « gagnant-gagnant », c'est-à-dire permettre à un plus grand nombre d'enfants d'être adoptés par un plus grand nombre de familles.
Pour atteindre cet objectif, le texte propose plusieurs mesures pertinentes.
Tout d'abord, il harmonise la procédure d'agrément dans les départements, la rendant ainsi plus équitable pour les adoptants et plus claire pour les pays d'origine des adoptés.
La réduction du délai d'instruction des demandes, ramené à neuf mois à partir de l'acceptation du dossier, est appréciable, mais nécessitera de mettre des moyens supplémentaires à la disposition des services d'aide sociale à l'enfance dans les départements où les demandes sont les plus nombreuses. Cela semble être la condition indispensable pour que ce délai, relativement court au regard des pratiques administratives actuelles, soit effectivement tenu.
Ensuite, le doublement de la prime d'accueil et l'élargissement du droit à congé permettront d'améliorer la situation financière des adoptants tout en leur donnant le temps de s'impliquer dans leur projet.
Enfin, l'Agence française de l'adoption, l'AFA, créée sous forme de groupement d'intérêt public et se substituant à la Mission de l'adoption internationale, devrait bénéficier de moyens plus conséquents pour aider les adoptants individuels dans leurs démarches et assumer l'interface avec les organismes étrangers, ce qui suppose un nombre important de relais à l'étranger.
Monsieur le ministre, vous nous avez dit que d'autres améliorations pourraient être apportées à ce processus d'adoption internationale. Je vous en remercie, car c'est indispensable.
J'examinerai les mesures proposées à l'aune des difficultés particulières que rencontrent nos compatriotes résidant à l'étranger, plus enclins encore que nos compatriotes de métropole à recourir, pour des raisons évidentes, à l'adoption internationale. Pour eux, les procédures sont loin d'être évidentes au regard du droit français. Et il n'est pas toujours simple d'apprécier la meilleure voie possible pour l'adoption, selon que nos compatriotes expatriés résident ou non dans un pays signataire de la convention de La Haye de 1993.
Lorsque l'adoptant réside dans un pays signataire de cette convention, il n'a pas le choix et doit s'adresser aux autorités de son pays de résidence. C'est seulement une fois l'adoption obtenue que la procédure de transcription du jugement d'adoption est présentée en France.
Cette procédure, qui ne pose pas de problème de fond, s'avère cependant longue et coûteuse. Les délais de la transcription, m'a-t-on signalé à de très nombreuses reprises, sont souvent plus longs que ceux de l'adoption en elle-même. Le délai d'attente le plus courant est d'un an, le tribunal de grande instance de Nantes, seul compétent pour les adoptions internationales, étant surchargé et manquant de moyens adéquats.
La traduction de tous les documents par un traducteur agréé est exigée, ce qui, en plus des frais occasionnés, suppose de lourdes démarches pour légaliser les pièces fournies au tribunal. L'exemple du Venezuela est significatif à cet égard : l'adoption y est gratuite dans son intégralité mais, paradoxalement, des frais importants doivent être engagés pour satisfaire aux requêtes de l'administration française.
Si l'on veut faciliter les démarches de nos compatriotes de l'étranger, il faut absolument simplifier ces procédures de transcription, éviter d'allonger les délais et d'accroître les coûts. Est-il vraiment nécessaire d'exiger que les traductions soient faites par des traducteurs assermentés alors que, dans le cas de pays de langue largement accessible et pratiquée comme l'espagnol ou l'anglais, une traduction certifiée sincère par le consulat devrait pouvoir suffire ?
Monsieur le ministre, le Gouvernement ne pourrait-il pas, dans son souci affirmé de simplification administrative, faciliter la transcription des jugements d'adoption étrangers, notamment quand ceux-ci émanent de pays signataires de la convention de La Haye ou d'Etats membres de l'Union européenne ?
S'agissant de l'Union européenne, l'harmonisation du droit de l'adoption y est indispensable. Il faut savoir, par exemple, que la transcription en France d'un jugement d'adoption obtenu en Grande-Bretagne est très compliquée, tout simplement parce que les Britanniques ne demandent pas d'engagement à renoncement des parents, tandis que la France l'exige dans sa procédure d'adoption plénière.
J'en viens au cas des Français résidant dans un pays non signataire de la convention de La Haye. Ces derniers se trouvent devant un choix presque cornélien.
Ils peuvent présenter leur demande d'agrément en France, dans un département où ils ont un domicile, en ont eu un ou ont gardé des attaches : ils dépendent alors du dispositif français, avec l'obligation de se déplacer en France pour les besoins de l'enquête sociale si celle-ci ne peut être réalisée sur place par les autorités consulaires.
Une fois l'agrément obtenu, ils n'ont pas toujours la chance d'obtenir de la part du pays de résidence un visa pour leur enfant. Certains Etats ne reconnaissant pas l'agrément français refusent en effet d'octroyer un visa pour l'enfant adopté, ou tout au moins tergiversent très longtemps.
Certaines familles, au Cambodge mais aussi dans d'autres pays, se voient quasiment contraintes de s'installer dans le pays d'origine de l'enfant afin de ne pas en être séparées.
Il s'agit là d'un obstacle totalement dissuasif, qui incite nos expatriés à demander l'agrément plutôt dans leur pays d'accueil. Ils dépendent alors des conditions d'adoption locales et d'un environnement juridique, social et culturel souvent moins favorable. Ils doivent ensuite faire transcrire le jugement d'adoption étranger afin d'obtenir un visa français pour l'enfant.
Dans ce parcours incertain, les adoptants ont besoin de conseils avisés et d'une aide tout au long du processus, aide que la MAI n'a pas toujours été en mesure de prodiguer par manque de personnel, de moyens et, en conséquence, de connaissance approfondie des législations des pays d'accueil de nos ressortissants. Aussi mettons-nous beaucoup d'espoir dans la nouvelle Agence française de l'adoption, dont le rôle sera non seulement de conseiller les candidats individuels résidant à l'étranger mais aussi de les accompagner dans toutes leurs démarches, qu'ils aient choisi de demander l'agrément en France ou dans leur pays d'accueil.
Il est donc important que l'AFA dispose de nombreux correspondants à l'étranger et puisse recruter des référents connaissant bien le droit de l'adoption du pays concerné. Je pense notamment à des parents ayant réussi une adoption ou à des personnalités qualifiées qui seraient désignées par l'ambassadeur après consultation des élus de l'Assemblée des Français de l'étranger de la circonscription.
Dans certains pays, où l'adoption française est particulièrement importante, il semble indispensable d'affecter ou de maintenir une assistante sociale chargée à temps plein des relations entre les adoptants et les organismes compétents.
J'approuve la proposition de notre excellent rapporteur et de la commission des affaires sociales d'associer au groupement d'intérêt public les associations compétentes pour l'adoption. Se priver de leur expérience aurait été une grave erreur, car rien ne vaut de vivre les situations au quotidien pour en apprécier tous les ressorts.
Il serait infiniment souhaitable également, monsieur le ministre, que l'Assemblée des Français de l'étranger soit représentée par un de ses membres au sein du conseil d'administration de l'AFA. Cette présence me paraît indispensable pour permettre à l'Assemblée des Français de l'étranger de prendre conscience des difficultés de nos compatriotes expatriés en ce domaine et pour mettre en place des solutions appropriées.
Afin de faciliter véritablement l'adoption pour nos expatriés dans un pays non signataire de la convention de La Haye, une mesure simple et efficace consisterait à autoriser les ambassadeurs en poste dans ces pays à octroyer eux-mêmes l'agrément, après consultation des comités consulaires pour l'action et la protection sociale. Ces organismes ont d'ailleurs l'habitude de réaliser ou de superviser des enquêtes sociales et pourraient parfaitement assurer le suivi des adoptions, d'autant que la réforme prévoit que les personnels consulaires pourront bénéficier d'une formation renforcée.
Cette suggestion est l'objet de l'amendement que j'ai déposé à l'article 1er de la proposition de loi. Je souhaite évidemment que le Sénat approuve cette mesure favorable aux Français de l'étranger, d'autant plus que celle-ci, techniquement réalisable, serait budgétairement neutre.
Je ne vois en effet que des avantages à une telle mesure : elle contribuerait à décharger certains départements de dossiers qu'ils ont l'impression justifiée de mal contrôler, du fait de l'éloignement des candidats à l'adoption, et la France montrerait ainsi son intérêt à ce que nos ressortissants résidant à l'étranger utilisent de préférence le dispositif français de l'adoption plutôt que les dispositifs étrangers.
Il nous reste par ailleurs à examiner le cas difficile des expatriés « ultramobiles », qui changent de pays tous les deux ou trois ans, un délai trop court pour aboutir à une adoption, ce qui implique des transferts compliqués de dossier ou un redémarrage à zéro de la procédure à chaque mobilité. L'AFA devra également trouver des solutions d'accompagnement pour ces situations.
Enfin, s'agissant du doublement de la prime d'adoption consentie aux familles et de l'extension des droits au congé d'adoption, il faut souligner qu'une fois de plus les Français de l'étranger en sont exclus, du fait du principe de territorialité de nos lois. Il serait malgré tout opportun, à mon avis, d'accorder une aide forfaitaire aux adoptants français expatriés, notamment lorsqu'ils sont déjà bénéficiaires d'aides du ministère des affaires étrangères, comme des bourses scolaires ou des allocations temporaires.
Quant aux congés d'adoption, pour que nos ressortissants détachés par l'Etat puissent en bénéficier, il suffirait d'élargir l'interprétation de la définition de l' « organisme autorisé pour l'adoption » prévu à l'article L. 122-26 du code de la sécurité sociale, en incluant les autorisations d'adoption données par les organismes officiels des pays parties à la convention de La Haye. Nos personnels résidant à l'étranger qui adoptent un enfant dans leur pays de résidence pourraient ainsi bénéficier de ce congé à l'arrivée de l'enfant, et ce avant que le jugement d'adoption ne soit prononcé en France. Ce n'est pas le cas actuellement, et cette discrimination est très mal comprise.
Les Français de l'étranger, monsieur le ministre, comme l'ensemble de nos compatriotes, sont très attentifs à vos réponses et vous seraient reconnaissants des améliorations que vous pourriez apporter à leur vie quotidienne d'adoptants.
Vous l'aurez compris, je voterai cette proposition de loi, qui améliore le dispositif de l'adoption internationale en fluidifiant les circuits et en clarifiant le rôle de chacun des acteurs ; mais j'ai conscience qu'il nous faudra revenir plus en profondeur sur certains aspects du droit de l'adoption dans notre pays, et réfléchir aux améliorations à lui apporter, s'agissant notamment de la différenciation entre adoption simple et adoption plénière, pratique contraire à celle de beaucoup d'autres pays. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Bas, ministre délégué. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d'abord à remercier M. le rapporteur Alain Milon de nous avoir fait profiter de sa connaissance très approfondie du dossier et d'avoir présenté de manière complète cette proposition de loi.
Monsieur le rapporteur, vous avez souligné l'importance de l'unification des procédures d'agrément. C'est, en effet, le premier objectif de cette proposition de loi, les procédures actuelles entraînant, dans la situation actuelle, de nombreuses inégalités de traitement qu'il était devenu urgent de supprimer.
Vous avez également insisté sur l'intérêt du renforcement de l'aide à l'adoption internationale. A l'heure actuelle, compte tenu du nombre d'organismes intervenant dans la procédure d'adoption, les couples adoptants peuvent se sentir un peu perdus et ne pas savoir à qui s'adresser. Beaucoup de couples en viennent donc à entreprendre des démarches individuelles particulièrement difficiles et souvent douloureuses. Comme vous l'avez souligné tout à l'heure, monsieur le rapporteur, la création de l'Agence française de l'adoption contribuera à remédier à cette situation en rendant un meilleur service aux parents.
Plusieurs orateurs se sont dits préoccupés des conséquences de la création de l'Agence sur la répartition des rôles entre différents organismes. Je souhaite revenir sur cette dernière en répondant notamment à Mmes Dini, Campion et Cerisier-ben Guiga.
Le paysage de l'adoption ne sera pas complexifié du fait de cette réforme.
Premièrement, le Conseil supérieur de l'adoption, qui sera désormais placé auprès du ministre chargé de la famille, restera l'instance de consultation, d'avis et de réflexion, avec une compétence pleine et entière tant pour l'adoption nationale que pour l'adoption internationale. Il n'intervient bien évidemment dans aucune procédure dans laquelle seraient engagés les parents.
Deuxièmement, l'Autorité centrale pour l'adoption internationale exercera exclusivement la mission de régulation et de veille sur l'application de la convention de La Haye, sur la protection de l'enfance et sur la coopération en matière d'adoption internationale.
Troisièmement, la Mission de l'adoption internationale, qui transférera à l'Agence l'essentiel de ses missions, deviendra, pour ses missions régaliennes, le secrétariat général de l'Autorité centrale. Elle n'exercera plus que ses missions régaliennes de l'Etat, en particulier la délivrance de visas pour les enfants adoptés et le contrôle des organismes intermédiaires pour l'adoption.
La gestion des dossiers individuels et l'information des candidats seront entièrement et exclusivement assurées par l'Agence française de l'adoption. La réforme permettra ainsi de mettre fin à un système dans lequel la Mission de l'adoption internationale exerçait parallèlement les missions de l'Etat et celles qui relèvent du champ de compétences des intermédiaires pour l'adoption.
Monsieur le rapporteur, vous avez également souligné l'apport de la proposition de loi pour servir le développement de l'adoption nationale. Les pupilles adoptables qui ne trouvent pas de parents en raison soit de leur santé, soit de leur âge, soit du fait de leur appartenance à une fratrie, sont, il est vrai, au nombre de 1 700, chiffre qui donne à s'interroger, comparé avec celui du Royaume-Uni, à savoir 5000.
Pourquoi cet écart ? Ce dernier est sans doute dû à notre législation en matière de tutelle et de reconnaissance du fait qu'un enfant est pupille adoptable.
L'adoption nationale des pupilles de l'Etat me préoccupe tout comme vous. Le tiers des pupilles font l'objet chaque année d'une proposition d'adoption. C'est insuffisant et injuste. II faut mettre en relation plus active les familles et ces enfants. S'il existe un fichier national informatisé, le SIAPE, ou système d'information pour l'adoption des pupilles de l'Etat, il doit être développé par une meilleure information des différents acteurs.
Nous y reviendrons lors de la discussion des articles. L'objectif est non d'accroître le nombre d'enfants adoptables, mais de donner une chance à des enfants réellement et complètement abandonnés, sur proposition des services de l'aide sociale à l'enfance, sur décision du juge des enfants, prise après des délais et selon des procédures de nature à garantir tout le discernement nécessaire de la part du magistrat.
Madame Campion, je vous remercie d'avoir souligné l'apport de la proposition de loi quant à l'agrément, puisque le traitement des demandes des parents adoptants va être unifié sur l'ensemble du territoire national.
Vous avez insisté sur la nécessité d'information des parents adoptants, point qui est extrêmement important, en effet. La création de l'Agence, les notices qui seront désormais données aux parents adoptants, les réunions qui seront organisées sur l'initiative de l'Agence en liaison avec les conseils généraux permettront de progresser dans cette voie.
L'urgence que vous invoquez, madame la sénatrice, nous la ressentons tous, tout comme les parents qui attendent depuis des années un enfant. Je l'ai dit, cette proposition de loi est une première étape, qui fait suite aux travaux du Conseil supérieur de l'adoption. C'est, au-delà de la création de l'Agence, un vrai texte de loi sur l'adoption. Il n'y a donc pas lieu, à mon sens, d'en changer l'intitulé.
Quant à la clarification des rôles entre les différentes institutions, je l'ai évoquée à l'instant.
Madame Desmarescaux, vous avez comparé les procédures relatives à la procréation médicalement assistée et l'adoption. C'est vrai, des espoirs sont souvent déçus, les attentes sont toujours longues, et les familles manquent d'information. Cette proposition de loi permettra, je crois, d'améliorer cette information.
Quant à la question de l'abandon d'enfant, aujourd'hui impossible dans le cas de détresse des parents, elle a fait l'objet d'un amendement à l'Assemblée nationale. Nous aurons l'occasion d'y revenir au cours du débat. L'important est, en effet, d'avoir toutes les garanties que les procédures mises en oeuvre permettent de faire passer au premier plan l'intérêt de l'enfant adoptable sans pour autant arriver à des excès qu'il nous faudrait éviter.
En réalité, la durée des procédures, le rôle des services sociaux, de l'aide sociale à l'enfant et du juge, ainsi que l'ensemble des délais sont autant de garanties que les décisions seront prises par le juge des enfants avec tout le discernement nécessaire.
Je souligne également que les maisons de l'adoption créées depuis quelques mois dans plusieurs villes de France montrent, à l'évidence, le besoin d'information des familles sur lequel, madame Desmarescaux, vous êtes revenue tout à l'heure. Le texte va dans ce sens en complétant ces initiatives individuelles.
Madame Kammermann, je vous remercie d'avoir souligné l'intérêt de l'unification de l'agrément pour servir l'égalité entre les couples. Vous avez également dit que le texte apporterait un meilleur soutien aux parents actuellement engagés dans une démarche individuelle d'adoption internationale et confrontés à des difficultés croissantes du fait des pratiques en vigueur dans les pays vers lesquels ils se tournent pour adopter un enfant.
L'information sur laquelle vous avez, vous aussi, insisté est en effet un aspect extrêmement important pour préparer les futurs parents à leur rôle et leur éviter d'idéaliser leur situation de futurs parents adoptifs. A cet égard, les réunions prévues, qui vont tout à fait dans ce sens, sont l'un des apports de cette proposition de loi.
Pour les 60 % d'adoptants engagés dans une démarche individuelle à l'étranger dépourvue de toute aide, la création de l'Agence va apporter une réponse très précieuse et particulièrement opportune en raison de l'évolution de la situation internationale pour l'adoption.
Les moyens de l'Agence internationale qui sera créée devront, bien sûr, être suffisants pour lui permettre de répondre à l'ensemble de ses missions. Le Gouvernement y veillera, naturellement.
Je voudrais souligner toute l'importance que le Gouvernement attache à la question de l'adoption d'enfants par des Français résidant à l'étranger.
Actuellement, la Mission pour l'adoption internationale reconnaît, comme c'est son devoir, les mêmes droits à tous les couples demandeurs, qu'ils résident en France ou à l'étranger. Si vous connaissiez le moindre cas particulier infirmant cette situation, il faudrait naturellement nous le signaler, tant il n'y a pas, pour l'accès à l'adoption, de discrimination possible entre Français selon qu'ils résident à l'étranger ou sur le territoire national.
Madame Dini, vous avez souligné le caractère raisonnable du délai de neuf mois prévu par la loi, pourvu que ce dernier ne soit pas dépassé. Bien entendu, je souscris totalement à votre observation.
Je tiens à souligner aussi que l'adoption des pupilles doit pouvoir être développée non seulement qualitativement, par l'augmentation du nombre des organismes régionaux de concertation en adoption, mais aussi quantitativement, grâce à une meilleure utilisation du fichier SIAPE.
Je reviens un instant sur les difficultés des Français résidant à l'étranger pour adopter, que vous avez évoquées, tout comme Mme Kammermann et Mme Garriaud-Maylam.
Nos concitoyens résidant à l'étranger peuvent, en effet, rencontrer des difficultés, en particulier, dans les pays non signataires de la Convention de La Haye. Une concertation avec le ministère des affaires étrangères est actuellement organisée au cas par cas afin de les aider à résoudre leurs problèmes dans le respect des lois internationales. La plupart des conseils généraux facilitent, quant à eux, le déroulement des formalités tendant à l'obtention de l'agrément pour ces familles en regroupant sur quelques jours les enquêtes nécessaires, et s'appuient, pour le suivi des enfants, sur les personnels sociaux des ambassades.
L'Agence reprendra les missions d'information et d'aide à la constitution des dossiers, et apportera, dans certains pays, un soutien local dans les démarches. Il y aura désormais des référents représentant l'Agence dans les principaux Etats concernés.
Madame Garriaud-Maylam, vous avez souligné la nécessité de simplifier les procédures de transcription. Vous avez notamment évoqué le caractère excessif des exigences en matière de traduction de ces actes et souhaité qu'une traduction certifiée conforme par le consulat soit être rendue possible. Je retiens cette proposition. Le texte qui vous est soumis ne répond pas à toutes les questions. Il se concentre sur certains points, mais c'est effectivement une piste intéressante à examiner.
Je suis tout à fait d'accord avec Mme Assassi quand elle affirme que tous les enfants ont le droit de grandir dans des conditions de vie favorables à leur épanouissement. Cela vaut pour l'adoption internationale, mais aussi, bien sûr, pour l'adoption nationale. L'unification des agréments, l'égalité de traitement qu'elle implique entre tous les couples demandeurs constitue évidemment un progrès très important dans cette direction.
Je souligne également que le guide de bonnes pratiques à l'usage des personnels qui sera mis en place en 2006 permettra d'améliorer le traitement des demandes partout sur le territoire national.
De plus, la participation des départements à l'activité de l'Agence permettra une meilleure formation de l'ensemble des départements pour unifier davantage l'instruction des dossiers d'agrément.
Je vous confirme, par ailleurs, que le ministère des affaires étrangères met actuellement en place une action de formation à l'intention des futurs agents consulaires, de manière qu'ils connaissent ces procédures et puissent assister les parents demandeurs dans leurs démarches.
Madame Cerisier-ben Guiga, vous vous êtes demandée si le concept de l'Agence française de l'adoption serait adapté à l'adoption internationale.
Je ne vous étonnerai pas en vous répondant que, pour le Gouvernement, la réponse est « oui » : en effet, aujourd'hui, comme je le rappelais à l'instant, 60 % des démarches d'adoption sont des démarches individuelles internationales, que les parents font donc tout seuls et qui s'adressent souvent à des pays non signataires de la convention de La Haye. La création de cette agence va donc, à l'évidence, permettre à ces parents de recevoir un soutien dont ils ne peuvent bénéficier actuellement.
Vous vous êtes interrogée sur la neutralité de la future agence. Sachez que, pas plus que celle des services des conseils généraux qui instruisent les demandes d'agrément, la neutralité de ce futur établissement ne peut a priori être suspectée.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Mais si, on suspecte !
M. Philippe Bas, ministre délégué. L'exigence de neutralité est une exigence fondamentale de notre Etat de droit ; elle est due à tous les couples adoptants, et nous veillerons, bien entendu, à ce qu'elle soit respectée.
Je soulignerai, en conclusion, les trois progrès majeurs que ce texte permettra d'accomplir.
Tout d'abord, les couples adoptants bénéficieront, sur tout le territoire national, d'une égalité de traitement.
Ensuite, les couples engagés dans une démarche internationale individuelle, c'est-à-dire les plus nombreux, aujourd'hui, et ceux qui se heurtent à des difficultés croissantes du fait de l'évolution des pratiques et des législations des pays d'origine des enfants, seront aidés et secourus.
Enfin, les dispositions du texte favoriseront l'adoption des pupilles.
L'objet de ce texte est donc à la fois essentiel et spécifique.
D'autres réflexions sont, bien sûr, en cours, qui permettront de prendre en compte nombre des observations très pertinentes présentées pendant cette discussion générale, notamment l'assouplissement des conditions et des critères nécessaires pour devenir parent adoptif ou l'amélioration des conditions d'adoption d'enfants issus de pays dont les lois sont différentes de nos lois occidentales.
Plus particulièrement, le traitement en droit français de la kafala, auquel vous avez fait allusion, monsieur le rapporteur, sera amélioré, puisqu'une réflexion est actuellement menée au sein du Conseil supérieur de l'adoption.
Je le disais tout à l'heure, c'est un travail que je suis avec beaucoup d'attention. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Demande de renvoi à la commission
Mme la présidente. Je suis saisie, par Mmes Le Texier et Campion, MM. Michel, Cazeau, Madec et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, d'une motion n° 2 rectifié, tendant au renvoi à la commission.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l'article 44, alinéa 5 du règlement, le Sénat décide qu'il y a lieu de renvoyer à la commission des affaires sociales la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale portant réforme de l'adoption (n° 300, 2004-2005).
Je rappelle que, en application de l'article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
Aucune explication de vote n'est admise.
La parole est à Mme Raymonde Le Texier, auteur de la motion.
Mme Raymonde Le Texier. Ce texte sur l'adoption internationale devrait être un texte important, nécessaire et attendu.
Sujet sensible s'il en est, l'adoption est souvent l'aboutissement d'un parcours complexe : du renoncement à l'enfant biologique à la procédure d'agrément, jusqu'à l'arrivée de l'enfant, le chemin parcouru par les adoptants est semé de désirs comme de frustrations, et toujours émaillé de nombreux obstacles.
Quant au chemin de l'enfant, il commence par le délaissement, quand il aurait dû être tissé d'amour.
Pour autant, il s'agit, pour les parlementaires, de savoir raison garder et d'examiner avec attention, lucidité et objectivité les enjeux comme les conséquences de cette proposition de loi.
Or, la façon dont ce texte nous a été amené ne donne pas le temps de la réflexion, occulte l'espace du débat et ne permet donc pas de donner un avis éclairé.
Comment juger en conscience d'un texte dont le passage en commission est annoncé la veille pour le lendemain et qui est présenté au vote la semaine qui suit, le tout au détriment des personnes et institutions directement concernées par les mesures, à savoir, en particulier, les conseils généraux, les associations de parents, celles d'enfants adoptés, ainsi que le personnel des consulats ?
Pourquoi tant de hâte, alors que le rapport d'information sur la famille, qui prend en compte la question de l'adoption, n'a pas encore rendu ses conclusions ? Pourquoi tant de précipitation, alors que le choix de passer par une proposition de loi a déjà permis de s'exonérer de l'avis du Conseil d'Etat ? Pourquoi un tel passage en force, alors que, sur ce type de texte, il devrait être possible de trouver un consensus au-delà des appartenances politiques ?
Choisirait-on, dans cette affaire, une fois encore, de privilégier la forme plutôt que le fond, la communication plutôt que la raison, l'effet d'annonce plutôt que la réflexion ?
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Très bien !
Mme Raymonde Le Texier. Il serait regrettable qu'une telle impatience ait pour effet d'apporter une réponse inadaptée aux enjeux, ingérable face aux enjeux et incomplète face aux besoins.
Ce serait d'autant plus dommageable que nul ne conteste la nécessité de mettre en place des critères d'agrément identiques sur l'ensemble du territoire, d'améliorer l'accompagnement des familles et de faciliter l'accueil des enfants.
Malheureusement, si nous sommes d'accord sur ces objectifs, nous sommes beaucoup plus réservés sur les réponses que cette proposition de loi est censée apporter.
Outre le fait qu'un certain nombre de points n'y sont même pas abordés, ce texte quelque peu sommaire laisse la part belle aux décrets d'application. C'est, là aussi, un enjeu du débat que nous devrions avoir. A l'heure où la démocratie représentative est attaquée, ce type de méthode ne respecte pas le Parlement et ne grandit pas le Gouvernement. Dans ce jeu de « perdant-perdant », c'est bien la démocratie que l'on oublie, sans que l'efficacité soit au rendez-vous. (Mme Monique Cerisier-ben Guiga applaudit.) L'examen du texte le démontrera.
Commençons par la question de l'agrément. Harmoniser les critères est indispensable, tant il existe, à l'heure actuelle, d'inégalités entre les départements. L'abondance de dossiers, alliée à la pénurie d'enfants, a abouti à la mise en oeuvre de procédures hétéroclites, voire, ici et là, à l'instauration de critères officieux plus restrictifs que ceux qui sont définis par le législateur : critères d'âge, éviction des célibataires, discriminations sociales, pour n'en citer que quelques-uns.
L'harmonisation est l'un des motifs invoqués pour justifier la proposition de loi. Elle prend en compte les attentes des pays partenaires en matière d'adoption internationale, las de se trouver face à autant de procédures que de services instructeurs et ne comprenant guère le fonctionnement de ces « 95 France ».
Tout cela est bien. Cependant, les moyens mis en oeuvre pour obtenir cette harmonisation sont susceptibles de donner lieu à nombre de dérogations lors des procédures conduisant à l'agrément.
En parlant de « recommandations » ou d'un « code de bonne conduite », le Gouvernement se décharge de ses responsabilités, qui consistent à faire en sorte que chaque citoyen vivant sur le territoire soit soumis à la même loi. Ne serait-il pas temps, pour l'Etat, d'assumer son rôle et de rappeler que libre administration des collectivités locales ne signifie pas libre interprétation des lois de la République ?
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Très bien !
Mme Raymonde Le Texier. Faute de ce rappel à la règle, le « code de bonne conduite » ne sera qu'une façon, pour l'Etat, de se dédouaner à bon compte de ses obligations et risque de ne réduire que partiellement les inégalités, que ces dernières soient liées à l'utilisation de critères officieux ou à la diversité des procédures.
Ce désengagement de l'Etat se confirme à un autre niveau : le remplacement de la Mission de l'adoption internationale, la MAI, par l'Agence française de l'adoption, l'AFA.
La MAI, placée sous l'autorité du ministre des affaires étrangères, faisait fonction de service interministériel. L'AFA, elle, sera un groupement d'intérêt public associant l'Etat, les conseils généraux et les OAA, les organismes autorisés pour l'adoption. Elle gardera les mêmes missions et le même personnel que la MAI.
Je constate, en premier lieu, que nous sommes bien loin de la simplification annoncée, puisque le texte ne vise là qu'à remplacer un organisme par un autre : s'agissant du triptyque constitué par le Conseil supérieur de l'adoption, l'Autorité centrale pour l'adoption internationale et la Mission de l'adoption internationale, on ne fait que substituer l'AFA à la MAI. Le millefeuille demeure ; seul le nom d'une des couches varie ! Là encore, le sens de la manoeuvre laisse dubitatif.
La MAI n'avait certes pas fait la preuve de sa capacité à accompagner les parents adoptants, et ce en raison d'un manque criant de moyens. Ce diagnostic est confirmé par un excellent rapport interministériel, paru en 2003 et portant sur le dispositif français de l'adoption internationale. Le remède envisagé alors par les inspecteurs généraux des ministères concernés avait le mérite de la clarté et de la simplicité : donner à la MAI les moyens d'accomplir sa mission.
Changer le nom et la structure juridique de l'organisme suffira-t-il à résoudre le problème ? Bien sûr que non ! Pourquoi ne pas prendre en compte les suggestions des fonctionnaires chargés du contrôle et de l'évaluation de ce type de dispositif ?
Voilà deux questions qu'il aurait été intéressant d'aborder en commission, mais que, faute de temps, nous n'avons même pas soulevées.
Je constate, en second lieu, que les OAA, en tant que prestataires de services, sont membres du Conseil supérieur de l'adoption, instance de conseil et de consultation. Elles ont déjà une place reconnue dans l'édifice complexe de l'adoption en France. Pourquoi faire le forcing pour les installer au sein même de la future agence et créer un mélange des genres malsain et préjudiciable à la crédibilité de chacun ? II y a là collusion d'intérêts.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est consultatif !
Mme Raymonde Le Texier. Peut-être !
Les rédacteurs du rapport interministériel cité précédemment soulignaient déjà le grand « bazar » des OAA : sur une quarantaine d'OAA, quatre totalisaient 50 % des adoptions et douze seulement réalisaient plus de trente adoptions annuelles, mais, surtout, seul un tiers satisfait aux conditions d'habilitation du décret du 18 avril 2002 !
De surcroît, l'absence de contrôle facilite l'opacité du système. Vu l'abondance des dossiers, la taille souvent modeste des organisations et, bien souvent, leurs origines confessionnelles, la sélection des candidats se fait selon des critères restrictifs et souvent discutables dans un Etat laïque.
Si les OAA appartenaient au domaine privé et étaient indépendants financièrement, cela pourrait être acceptable ; mais ils sont tous subventionnés par l'Etat et bénéficient ainsi, souvent, des avantages liés à la détention d'un agrément sans se plier aux obligations qui en découlent : des droits, donc, mais peu de respect des devoirs !
Ces éléments expliquent pourquoi, en France, à la différence des autres pays « adoptants », 70 % à 75 % des parents choisissent d'engager des démarches individuelles.
Cette proposition de loi - nous ne pouvons que le constater - tend à légaliser les dérives et les incohérences actuelles. Elle met sur le même plan des organisations efficaces, rigoureuses et soucieuses du respect de leurs obligations et celles qui n'apportent pas des garanties suffisantes pour être considérées comme des partenaires fiables.
Pourquoi ne pas avoir saisi l'opportunité de ce texte pour mettre en place une stratégie visant à mieux contrôler ce secteur et à encourager son efficacité et sa professionnalisation ?
Cela aurait mérité - chacun en conviendra - que l'on prenne le temps de chercher ensemble une réponse plus adaptée. Je pense, d'ailleurs, que nos interrogations sont largement partagées au sein de la commission des affaires sociales.
En effet, alors que le texte a déjà été débattu à l'Assemblée nationale, les imprécisions et les dérives qu'il porte en germe sont telles que M. le rapporteur a voulu limiter les dégâts en proposant, en commission, un amendement visant à clarifier la composition de l'AFA et à ne donner aux OAA qu'un rôle consultatif, amendement que nous soutiendrons, bien entendu.
La précipitation avec laquelle ce texte nous a été présenté n'a pas non plus permis d'aborder la question du financement de l'Agence française pour l'adoption. Sachant que le manque de moyens a eu raison de la MAI, le flou entourant les ressources de l'AFA autorise toutes les craintes. Quel sera l'apport financier de l'Etat ? Quelle sera la part des conseils généraux ? Cette part sera-t-elle modulée en fonction de leurs ressources et de leur situation ? Y aura-t-il participation financière des candidats à l'adoption ? Des prestations pourront-elles leur être facturées ?
Cette absence de précision en matière financière suscite la suspicion : le choix de faire de l'AFA un groupement d'intérêt public ne permettra-t-il pas à l'Etat, à terme, de se défausser sur les conseils généraux du poids du financement de l'Agence ? Les conseils généraux n'ont d'ailleurs guère été associés à cette démarche. Ils devront pourtant assumer ces dépenses, alors qu'ils ont déjà peine à faire face aux transferts de charges et de personnels que l'Etat ne cesse d'effectuer. Or, en la circonstance, il s'agit non pas de transferts résultant de la décentralisation, mais bien de missions nouvelles. Des ressources nouvelles devront donc être trouvées.
Ces questions n'ont malheureusement pas été abordées, et nul ne sait encore précisément évaluer le poids des dépenses liées à ces nouvelles responsabilités. Reconnaissons-le, les problèmes que nous soulevons ne sont pas anodins. Y répondre par décret risque, à terme, de faire l'effet d'une déflagration. La naissance de cette nouvelle Agence ne se présente pas sous les auspices les plus favorables.
La suppression, dans l'article 3, de l'exception liée à l'état de « grande détresse des parents biologiques » est un autre exemple de confusion entre vitesse et précipitation. Nous en avons déjà beaucoup parlé. A priori, on pourrait penser que l'intérêt, pour les enfants en situation de délaissement, est que leur soit trouvée au plus vite une famille adoptive. Cette question, évoquée en commission, a soulevé des problèmes fondamentaux, qui n'ont été qu'effleurés : filiation, origine, identité, peut-être aussi mythe de la famille idéale. Cette question vaudrait à tout le moins la peine que l'on s'y arrête longuement et que l'on sollicite peut-être le point de vue, par exemple, des services de l'aide sociale à l'enfance et des magistrats concernés.
Dans le même ordre d'idée, il aurait été souhaitable que l'on s'interroge sur le temps qui s'écoule entre le moment où le constat de délaissement de l'enfant est transmis par les services sociaux et celui où le magistrat prononce la déclaration judiciaire d'abandon. Un an, deux ans, trois ans sont parfois nécessaires. Ces années s'ajoutent à la première année, au minimum, de placement de l'enfant. Ces délais, on le comprend bien, rendent plus douloureuse et difficile la transition entre la famille d'accueil et la famille adoptante. Monsieur le ministre, un code de bonne conduite semble souhaitable.
Enfin, j'évoquerai quelques-unes des omissions non négligeables de cette proposition de loi.
Rien n'est plus inégalitaire dans son fonctionnement que l'adoption internationale. Le coût de ce type d'adoption, cela a été dit, varie entre 20 000 et 30 000 euros. Il exclut d'emblée nombre de familles.
La plupart des pays demandent également que l'adoptant passe du temps dans le pays d'origine de l'enfant, ce qui est très bien. Pourtant, il n'est pas aisé de partir un mois, au minimum, et d'assumer une absence d'une telle durée vis-à-vis de son employeur, ainsi que les frais de voyage et d'hébergement.
Certes, le congé d'adoption est de droit, mais, contrairement au congé de maternité, il n'est pas rémunéré. C'est une injustice flagrante pour les parents adoptifs et une discrimination inacceptable que n'ont pas à subir les parents biologiques. Une telle différenciation est d'autant plus injustifiable que, quelle que soit l'origine de l'enfant, celui-ci participera, une fois adulte, au financement de la solidarité nationale. Pour quelle raison n'en bénéficierait-il pas au commencement de sa vie ?
Ces questions et ces restrictions ont suscité des débats lors de la réunion de la commission des affaires sociales. Mais, alors même que les problèmes évoqués ont trouvé des échos chez les parlementaires présents, comme chez tous les professionnels du secteur et les parents adoptants, les discussions ont été abrégées et les échanges tronqués, faute de temps. Faute de temps toujours, aucune audition n'a pu être réalisée par la commission, ce qui a empêché une appréciation plus fine et plus objective des besoins et des solutions.
Jouer les chambres d'enregistrement et voter un texte a minima, c'est, dans le meilleur des cas, nous le savons tous, laisser au Gouvernement le soin de régler par décret un certain nombre des problèmes que nous avons énumérés et qui, vous en conviendrez, sont loin d'être accessoires.
En contrevenant au principe de séparation des pouvoirs, une telle substitution est néfaste à la bonne santé de notre démocratie représentative et, par ricochet, débouche souvent sur la promulgation de textes boiteux qui ne résolvent rien, mais promettent beaucoup.
Or, nous légiférons sur le droit de l'enfant à avoir une famille, nous légiférons pour faciliter aux parents le parcours du long chemin, semé d'obstacles sans cesse renouvelés, jusqu'à la rencontre avec l'enfant. Personne ici n'a envie de traiter ces questions à la légère. Laissons du temps au temps. Ce texte vaut la peine que nous retournions travailler en commission ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. J'émets un avis défavorable sur la motion tendant au renvoi à la commission dans la mesure où la présente proposition de loi nous a été transmise immédiatement après son vote par l'Assemblée nationale, le 14 avril dernier.
Le 11 mai, j'ai été nommé rapporteur de la commission des affaires sociales sur ce texte et, dès le 7 juin, j'ai procédé à des auditions, auxquelles vous avez assisté.
Mmes Raymonde Le Texier et Mme Claire-Lise Campion. Pas nous !
M. Alain Milon, rapporteur. Le 7 juin, j'ai ainsi auditionné M. Richard Bos, de la Mission de l'adoption internationale, Enfance et familles d'adoption, Médecins du monde, les Amis des enfants du monde, Enfance et avenir, Mme Marie-Christine Le Boursicot, membre du Conseil supérieur de l'adoption, Me Guillaume Le Maignan, avocat à la cour, Mouvement pour l'adoption sans frontière - cette audition fut d'ailleurs extrêmement intéressante -, l'Union nationale des associations familiales, mais également le représentant des présidents de conseils généraux, M. Bernard Cazeau.
Nous avons fait le nécessaire, madame la sénatrice, pour que soient conviés à ces réunions les sénateurs membres de la commission des affaires sociales. Certains se sont déplacés et ont assisté à ces réunions de travail et d'information.
Notre commission s'est elle-même réunie mercredi dernier. Nous avons beaucoup discuté, et nous l'avons encore fait ce matin, en examinant l'amendement que vous avez déposé, madame la sénatrice. (Mme Raymonde Le Texier fait un signe d'approbation.) Tout a donc été fait pour que chacun soit pleinement informé.
Mme Raymonde Le Texier. Ce n'est pas la commission que je remets en cause, vous le savez !
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Gouvernement partage le sentiment exprimé par M. le rapporteur.
Cette proposition de loi s'appuie sur les travaux du Conseil supérieur de l'adoption, mais également sur plusieurs rapports dans lesquels sont pointées les insuffisances de notre dispositif d'adoption.
Compte tenu de la date à laquelle ce texte a été adopté par l'Assemblée nationale, de celle à laquelle M. le rapporteur pour le Sénat a été désigné, de celle, enfin, à laquelle la commission a commencé de procéder à ses auditions, il me semble que les conditions sont réunies...
Mme Raymonde Le Texier. Pas au Sénat ! Ce sont des conditions de travail inadmissibles !
Mme Raymonde Le Texier. Il se passe de plus en plus de choses incroyables dans cette maison !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Le rapporteur était peut-être au courant, mais pas nous !
Mme la présidente. Je mets aux voix la motion n° 2 rectifié, tendant au renvoi à la commission.
(La motion n'est pas adoptée.)
Mme la présidente. En conséquence, nous passons à la discussion des articles.
Article 1er
I. - L'article L. 225-2 du code de l'action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« L'agrément est accordé pour cinq ans, dans un délai de neuf mois, par le président du conseil général après avis d'une commission dont la composition est fixée par voie réglementaire. Le délai court à compter de la date à laquelle la personne confirme sa demande d'agrément dans les conditions fixées par voie réglementaire. L'agrément est délivré par un arrêté dont la forme et le contenu sont définis par décret. » ;
2° Il est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« L'agrément est délivré pour l'accueil d'un ou de plusieurs enfants simultanément. Une notice, dont la forme et le contenu sont définis par décret, décrivant le projet d'adoption des personnes agréées est jointe à l'agrément. Cette notice peut être révisée par le président du conseil général sur demande du candidat à l'adoption.
« L'agrément est caduc à compter de l'arrivée au foyer d'au moins un enfant français ou étranger, ou de plusieurs simultanément. »
II. - Après le premier alinéa de l'article L. 225-3 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les conseils généraux proposent aux candidats des réunions d'information pendant la période d'agrément. »
Mme la présidente. L'amendement n° 31, présenté par Mme Dini et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après la première phrase du texte proposé par le 1° du I de cet article pour rédiger le dernier alinéa de l'article L. 225-2 du code de l'action sociale et des familles, insérer une phrase ainsi rédigée :
Au delà de ce délai de 9 mois, l'agrément est considéré comme étant tacitement accordé.
La parole est à Mme Muguette Dini.
Mme Muguette Dini. Cet amendement tend à prévoir que, au-delà du délai de neuf mois après la confirmation de la demande d'agrément, celui-ci sera tacitement accordé. Cette disposition obligera les services des conseils généraux à être très rigoureux dans la gestion des enquêtes et donnera confiance aux requérants s'agissant de l'attention que leur portent ces services. Il arrive en effet assez souvent que les délais soient dépassés.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Madame la sénatrice, l'agrément tacite ne permettrait aux candidats de disposer ni des documents faisant foi de leur évaluation sociale et psychologique ni de la notice. Cette situation empêcherait de facto l'acceptation de leur dossier par les pays d'origine.
La disposition que vous proposez étant inutile, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. A défaut, la commission émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Madame la sénatrice, le Gouvernement souhaite bien évidemment que le délai de neuf mois soit respecté ; mais, dans l'hypothèse où, par exception, il ne le serait pas, il serait à mon sens extrêmement risqué de se passer, pour donner un agrément, de tous les examens nécessaires sur la pertinence de la demande d'adoption des parents. Ceux-ci constituent tout de même une garantie pour l'éducation de l'enfant.
A l'instar de la commission des affaires sociales, je vous demande, madame la sénatrice, de bien vouloir retirer votre amendement.
Mme la présidente. Madame Dini, l'amendement est-il maintenu ?
Mme Muguette Dini. Non, je le retire, madame la présidente, mais j'insiste pour que l'on trouve un moyen de garantir aux couples que, au bout de neuf mois, ils obtiendront une réponse à leur demande d'agrément.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
Mme la présidente. L'amendement n° 31 est retiré.
L'amendement n° 30, présenté par Mme Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :
Compléter le second alinéa du texte proposé par le 2° du I de cet article pour compléter l'article L. 225-2 du code de l'action sociale et des familles par une phrase ainsi rédigée :
Pour les Français de l'étranger établis dans un pays non signataire de la Convention de La Haye du 29 mai 1993, l'agrément peut être accordé par l'ambassadeur de France, après avis du Comité consulaire pour l'Action et la Protection sociale dans la circonscription de résidence. »
La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. J'ai déjà exposé au cours de la discussion générale les raisons pour lesquelles cet amendement me paraît important. Son dépôt est en effet inspiré par un souci de simplification administrative et d'aide aux Français désireux de recourir à l'adoption internationale. Mais je suppose que l'on va me demander de retirer ce texte...
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Madame la sénatrice, les Français résidant à l'étranger ont la possibilité d'être agréés pour l'adoption dans le département métropolitain de leur dernier lieu de résidence. Dans ce cas, l'enquête sociale et psychologique est effectuée par le service social de l'ambassade. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Madame Garriaud-Maylam, l'amendement est-il maintenu ?
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. J'avais supposé que l'on me demanderait de le retirer, et je le retire donc bien volontiers, madame la présidente ! (Sourires.)
Mme la présidente. L'amendement n° 30 est retiré.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Je le reprends, madame la présidente, en le modifiant comme suit : « Pour les Français de l'étranger établis dans un pays non signataire de la Convention de La Haye du 29 mai 1993, l'agrément sera accordé par le conseil général de Loire-Atlantique, sur proposition de l'ambassadeur de France, à condition que le poste diplomatique comprenne un service social. »
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Si l'on veut que cela ne fonctionne pas du tout, c'est ce qu'il faut faire !
Mme la présidente. Je suis donc saisie d'un amendement n° 30 rectifié, présenté par Mme Monique Cerisier-ben Guiga, et qui est ainsi libellé :
Compléter le second alinéa du texte proposé par le 2° du I de cet article pour compléter l'article L. 225-2 du code de l'action sociale et des familles par une phrase ainsi rédigée :
« Pour les Français de l'étranger établis dans un pays non signataire de la Convention de La Haye du 29 mai 1993, l'agrément sera accordé par le conseil général de Loire-Atlantique, sur proposition de l'ambassadeur de France, à condition que le poste diplomatique comprenne un service social. »
La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour le défendre.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Ma collègue Joëlle Garriaud-Maylam a raison de le signaler : les familles françaises qui résident durablement à l'étranger se heurtent à un véritable problème, même si des arrangements sont trouvés. Pour obtenir un agrément, elles doivent se soumettre aux procédures locales, puis, si leur pays de résidence n'est pas signataire de la convention de La Haye, elles doivent obtenir l'exequatur du jugement local. C'est en général un peu difficile et coûteux.
Toutefois, dans tous les cas dont j'ai eu à connaître et pour lesquels je suis intervenue, tant la Mission de l'adoption internationale que le parquet de Nantes se sont toujours montrés extrêmement raisonnables. Il est vrai qu'il est souvent nécessaire de retricoter à l'endroit ce que les familles ont tricoté à l'envers, ce qui n'est pas toujours simple !
Je propose donc une solution intermédiaire : il y a à Nantes, en Loire-Atlantique, une sorte de préfecture des Français de l'étranger. Tous les services qui les concernent y sont situés : l'état civil, le parquet. Pourquoi donc ne pas déléguer au conseil général de Loire-Atlantique les problèmes concernant les agréments des Français de l'étranger qui ne résident pas dans des pays régis par la convention de La Haye ?
Une telle délégation n'est possible que si l'ambassadeur peut être guidé dans son jugement par un véritable service social. La présence d'un comité consulaire pour l'action et la protection sociale ne permet pas du tout d'affirmer qu'il a été réellement procédé à une enquête sociale.
Un tel comité n'est pas une structure lourde. Il est composé du consul, des élus, de membres d'associations. Ce n'est donc pas cette instance qui peut apporter les garanties permettant de délivrer un agrément.
En revanche, s'il existe dans le consulat un véritable service social disposant d'une assistante sociale professionnelle, les choses sont alors tout à fait différentes, et la délégation susvisée serait envisageable. Voilà pourquoi j'ai repris l'amendement n° 30, en le rectifiant.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. On ne peut pas traiter d'un tel sujet sur le coin d'une table. Je suis d'ailleurs étonné qu'un membre du groupe ayant déposé la motion tendant au renvoi à la commission se permette de reprendre à la volée un amendement et de le rectifier de façon improvisée (Applaudissements sur les travées de l'UMP. -Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) ...
Mme Hélène Luc. C'est le droit des parlementaires !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Aux termes de cet amendement rectifié, les demandes d'agrément formulées par tous les Français établis dans des pays non signataires de la convention de La Haye seraient traitées dans le département de Loire-Atlantique. Or, comme l'ont indiqué les différents orateurs, le tribunal de grande instance de Nantes est complètement saturé par le traitement des demandes d'adoption. La mesure proposée conduirait à alourdir les charges supportées par ce département. Ce n'est pas très sérieux !
Ce sujet extrêmement important est temporairement réglé puisqu'il relève du département français dans lequel le Français résidait auparavant. Cependant, je souhaite que ce réel problème soit étudié à l'occasion de la discussion d'un futur texte.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Je n'aime pas beaucoup que l'on me dise que j'improvise n'importe quoi ! Je suis quand même sénateur des Français établis hors de France depuis treize ans, ...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Cela ne fait rien, c'est improvisé !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. ...et, par conséquent, je connais ce cas de figure.
Monsieur le président de la commission, le problème est que vous vous figurez que les Français de l'étranger ont des résidences en France !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je n'ai pas dit cela !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Or tel n'est pas le cas de la majorité d'entre eux.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je ne dis pas n'importe quoi non plus ! Je suis moi aussi sénateur depuis très longtemps.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Ne prétendez donc pas que je dis n'importe quoi !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Vous avez improvisé !
Mme Hélène Luc. Mais cela se fait souvent quand un parlementaire reprend un amendement !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. J'ai improvisé parce que nous examinons un texte en séance publique alors que le travail en commission n'a pas été effectué. Un sénateur tel que moi, membre de la commission des affaires étrangères, n'a pas pu confier le soin d'examiner ces questions-là à ses collègues.
Nous ne travaillons pas dans de bonnes conditions, et c'est pourquoi nous demandions le renvoi à la commission. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Souvenez-vous de la façon dont les ministres de votre tendance politique nous faisaient travailler voilà trois ans ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Ce n'est pas un argument !
Mme la présidente. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam, pour explication de vote.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Si j'ai accepté de retirer l'amendement n° 30, c'est non pas parce que je pensais qu'il n'avait pas d'importance, bien évidemment, ...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Bien sûr !
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. ...mais parce qu'un travail en profondeur doit être réalisé. Toutes les propositions que j'ai faites - mais il y en a eu d'autres, telle la représentation de l'Assemblée des Français de l'étranger au sein du conseil d'administration de l'AFA - méritent des réponses. Je me satisfais de celle que vient de m'apporter M. le ministre ; il s'est engagé à ce que ces mesures soient étudiées en profondeur.
M. Jean-Pierre Michel. Les promesses n'engagent que ceux qui les reçoivent !
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Par ailleurs, je maintiens que les comités consulaires pour l'action et la protection sociale peuvent être compétents en l'espèce dans la mesure où ils réalisent déjà des enquêtes sociales extrêmement approfondies, par exemple pour ce qui concerne l'attribution de bourses.
Je rejoins les propos de ma collègue Mme Cerisier-ben Guiga sur le fait qu'il faut du personnel bien formé. Mais ce point fait partie de la réforme telle qu'elle nous a été proposée, et nous devrions donc disposer d'un personnel suffisamment formé pour pouvoir mener à bien ces enquêtes.
Quant au rattachement au conseil général de Loire-Atlantique, je suis sceptique en raison de son caractère très artificiel. Bien sûr, comme je l'ai rappelé tout à l'heure dans mon intervention, le tribunal de grande instance de Nantes est le seul compétent pour statuer sur les demandes d'adoption internationale. Mais il me semble dommage de prévoir une telle mesure.
Effectivement, il faut soit que l'agrément soit délivré par un conseil général de France avec lequel les Français de l'étranger en question entretiennent un lien véritable, soit que la demande soit examinée par l'ambassadeur, après avis du comité consulaire, composé de personnes qui connaissent très bien, en principe, la législation et les pratiques du pays de résidence. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme Hélène Luc. Madame Garriaud-Maylam, vous votez contre votre amendement ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ce n'est pas son amendement ; il a été rectifié !
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Et je ne suis pas favorable aux dispositions de l'amendement rectifié !
Mme la présidente. L'amendement n° 16, présenté par Mmes Campion et Le Texier, MM. Madec et Michel, Mme Cerisier-ben Guiga et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par le II de cet article pour insérer un alinéa après le premier alinéa de l'article L. 225-3 du code de l'action sociale et des familles :
« Pendant toute la procédure d'agrément, ces personnes bénéficient de réunions d'information animées par les conseils généraux ou leurs partenaires en matière d'adoption, notamment les associations de familles adoptives, de personnes adoptées et les organismes autorisés pour l'adoption. »
La parole est à Mme Claire-Lise Campion.
Mme Claire-Lise Campion. Afin de mieux accompagner les candidats à l'adoption, il nous paraît opportun de rendre complémentaires et obligatoires les réunions d'information pendant la procédure d'agrément.
Par ailleurs, il est nécessaire que ces réunions, qui sont destinées aux postulants, soient animées par des intervenants extérieurs aux services sociaux, confrontés notamment à la réalité de l'adoption à l'étranger.
En distinguant les réunions d'information de la procédure d'évaluation, on permet ainsi aux candidats à l'adoption de les aborder en toute sérénité, en étant parfaitement libres de pouvoir évoquer leurs interrogations, sans crainte de voir leurs propos évalués.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. J'ai dit précédemment que j'étais assez favorable à ce que les parents adoptants participent au moins à une réunion d'information obligatoire dans le cadre de l'information qui doit leur être dispensée.
Actuellement, durant la période d'agrément, les réunions d'information sont facultatives. Néanmoins, on peut considérer que la grande majorité des candidats à l'adoption s'y rendront. Par conséquent, la commission s'en remet, sur ce point, à l'avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement. L'objectif recherché relève de la diffusion des bonnes pratiques entre départements, diffusion qui s'effectue notamment par l'intermédiaire de l'organisation de journées techniques à l'attention des professionnels et par la réalisation d'un guide qui leur sera destiné afin de les aider dans la mise en oeuvre de la procédure d'agrément. Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, ce guide des bonnes pratiques sera disponible au début de l'année prochaine.
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Nous voterons en faveur de cet amendement, qui nous paraît important.
Les réunions d'information qu'il tend à mettre en place seraient bien utiles à toutes les familles en attente d'enfants biologiques ou adoptifs, la situation, même si elle est parfois un peu compliquée pour les familles adoptives, n'étant pas fondamentalement différente.
Dans la société fragmentée qui est la nôtre aujourd'hui, les devoirs affectifs et éducatifs envers les enfants se transmettent difficilement par la tradition familiale. Toutes les dispositions allant dans le sens de la prévention du traitement négligent des enfants sont positives.
Dans le cas particulier de l'adoption internationale, il faut vraiment aider les parents à prendre conscience d'un certain nombre de points. Il existe tout d'abord une différence culturelle entre les différents pays. Les candidats à l'adoption vont devoir engager une procédure dans une société qui ne fonctionne pas du tout de la même façon que la leur. Ils doivent aussi penser que l'enfant qu'ils adopteront, même s'ils le recueillent tout bébé, aura eu un vécu intra-utérin dans un autre univers sonore, gustatif, dont il a la mémoire. Il faut qu'ils sachent ce que cela signifie. Il faut aussi qu'ils sachent que le vécu de l'enfant a pu être traumatique, aussi bien dans sa vie intra-utérine que par la suite. Il faut préparer les parents aux difficultés qui surgiront au moment où ils s'y attendront le moins. Et disant cela, je m'exprime en connaissance de cause, pour avoir vécu l'adoption d'un enfant dans ma famille.
Si nous soutenons que les réunions d'information doivent être animées notamment par des associations de familles adoptives, de personnes adoptées et par les organismes autorisés pour l'adoption, c'est parce que les échanges horizontaux entre personnes confrontées aux mêmes problèmes sont bénéfiques. La parole du professionnel qu'est le travailleur social est utile, mais elle apparaît comme celle de l'autorité, et est donc parfois vécue ou ressentie comme une contrainte. En tout cas, cette parole est moins écoutée. L'homologue, parent ayant l'expérience de l'adoption ou enfant adopté, dira peut-être la même chose que le travailleur social, mais sa parole sera entendue différemment dans un contexte plus favorable à la communication. C'est pourquoi ces réunions nous paraissent de nature à aider les familles adoptives puis les enfants adoptés.
Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Luc, pour explication de vote.
Mme Hélène Luc. Les membres du groupe communiste républicain et citoyen voteront cet amendement.
Ayant travaillé avec une association qui s'occupe des adoptions, j'ai eu l'occasion de côtoyer de nombreuses familles adoptantes. Je sais donc ce que représente pour elles, par exemple, le fait de se rendre plusieurs fois à l'étranger, en Bulgarie, au Vietnam ou ailleurs, et d'y vivre dans des conditions très difficiles.
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je ne vois vraiment pas ce qui vous empêche d'être favorables à cet amendement qui tend à améliorer la situation en permettant aux familles, qui réalisent une action si difficile, si appréciable pour les enfants qu'elles vont adopter, de participer à des réunions qui les réconfortent. Ces familles y trouvent parfois une aide, notamment psychologique. On ne dira jamais assez à quel point elles sont méritantes : elles ont droit au respect et à toute l'aide de l'Etat.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Cela ne va-t-il pas nuire aux parents vivant hors de France dans un pays non signataire de la convention de La Haye ?
Mme Hélène Luc. Cela n'a pas de sens !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
Articles additionnels après l'article 1er
Mme la présidente. L'amendement n° 5, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 1er insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 225-4 du code de l'action sociale et des familles est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La décision de retrait d'agrément est prononcée par arrêté du président du conseil général après consultation d'une commission dont la composition est fixée par voie réglementaire. La forme et le contenu de cet arrêté sont définis par décret. »
La parole est à Mme Josiane Mathon.
Mme Josiane Mathon. Le président du conseil général qui, après avoir pris connaissance de l'avis de la commission départementale d'adoption, décide ou non d'accorder l'agrément à des candidats à l'adoption prend pour cela un arrêté dont la forme et le contenu seront désormais uniformisés sur l'ensemble du territoire national.
Dans ces conditions, nous souhaitons préciser que le retrait de l'agrément par le président du conseil général devra également prendre la forme d'un arrêté, toujours après consultation de la commission départementale d'adoption, en raison du parallélisme des procédures.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission départementale d'adoption a pour mission de donner un avis sur l'opportunité de délivrer ou non l'agrément. La demande de retrait de l'agrément d'adoption, comme celle qui est relative à l'agrément des assistants maternels et familiaux, est le seul fait du président du conseil général, le plus souvent à la demande des services sociaux. La commission considère qu'il ne convient pas de compliquer la procédure. Par conséquent, elle émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Le retrait de l'agrément est pris par arrêté du président du conseil général parce que l'agrément lui-même est pris par un tel arrêté. C'est le principe du parallélisme des formes qui s'applique toujours en l'absence de texte contraire. Par conséquent, le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bailly, pour explication de vote.
M. Gérard Bailly. En ma qualité de président de conseil général et en raison du rôle important que les élus jouent dans le domaine qui nous intéresse aujourd'hui, je suis très défavorable à cet amendement.
Aujourd'hui, quelque 24 000 familles souhaitent adopter, soit un nombre bien supérieur à celui des enfants adoptables.
Il nous faut envisager une demande d'adoption par un couple homosexuel : le président de conseil général que je suis ne peut accepter une telle demande.
J'ai eu à refuser de telles demandes. Une affaire a été gagnée, une autre perdue, un appel étant en cours devant la Cour européenne des droits de l'homme, à Bruxelles. Je connais donc parfaitement ce dossier.
Un président de conseil général a une certaine responsabilité ; je n'ai pas envie de me retrouver, dans huit ou dix ans, face à un enfant qui me reprochera, parce que j'aurai donné l'agrément, de ne pas avoir eu de papa ou de maman. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Roger Madec. C'est honteux !
M. Gérard Bailly. J'ai le droit d'avoir mon opinion et de m'exprimer !
Actuellement, je le répète, 24 000 foyers agréés peuvent adopter dans ce pays. Les enfants adoptés peuvent donc espérer avoir deux parents.
J'estime qu'il serait inadmissible de voter cet amendement. (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 6, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 225-4 du code de l'action sociale et des familles est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La constatation de l'âge, de la situation de célibat, de la situation conjugale au titre des articles 144, 515-1 ou 515-8 du code civil, de la présence d'enfant au foyer ou de l'orientation sexuelle du demandeur, ne peut être un motif de refus car ne dépréciant aucunement l'aptitude à accueillir dans le cadre du projet d'adoption. »
La parole est à Mme Josiane Mathon.
Mme Josiane Mathon. Comme mon collègue M. Bailly s'est trompé d'amendement lors de son explication de vote, je vais pouvoir lui répondre en présentant le mien !
L'amendement n° 6 prévoit d'ajouter aux actuels critères qui ne peuvent motiver un refus d'agrément et qui sont la seule constatation de l'âge, de la situation matrimoniale du demandeur ou de la présence d'enfants au foyer, un autre critère qui est celui de la constatation de l'orientation sexuelle du demandeur ou de sa situation conjugale, qu'il soit célibataire, marié, en concubinage ou lié par un PACS.
Soyons clairs, notre amendement a pour objet non pas de conférer un quelconque « droit à l'enfant », mais bien d'assurer qu'un enfant puisse être adopté dans une famille aimante, et ce quelle que soit la situation de la ou des personnes candidates à l'adoption.
En effet, tout le monde sait bien qu'un célibataire a moins de chances de recevoir l'agrément qu'un couple, et cela malgré la loi de 1966.
Cette situation est discriminante dans la procédure d'adoption alors qu'elle ne préjuge en rien les capacités de la personne à élever, mais surtout à aimer l'enfant adopté.
Il en est de même lorsque les personnes qui souhaitent adopter sont homosexuelles. La demande d'agrément est faite officiellement par un célibataire et cette personne se trouve donc dans l'obligation de cacher son homosexualité et sa vie de couple si elle veut obtenir l'agrément. Si elle ne le fait pas, l'agrément lui sera à coup sûr refusé. Un tel refus est non seulement discriminatoire, mais de plus il préjuge du fait que l'enfant ne sera pas heureux dans une famille homosexuelle.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ce n'est pas le débat !
Mme Josiane Mathon. Il semble bien hasardeux de dire qu'un couple homosexuel ne peut pas aimer un enfant de la même manière qu'un couple hétérosexuel.
Par ailleurs, l'adoption par des homosexuels pose la question de l'homoparentalité, qui existe déjà dans les faits. En effet, il n'est pas rare aujourd'hui qu'un enfant de parents divorcés vive avec le compagnon de son père ou la compagne de sa mère. Certes, l'enfant conserve sa filiation avec son père ou sa mère biologique mais, dans la vie courante, il est amené à vivre avec un couple homosexuel.
Notre amendement a donc pour objectif de faire évoluer les mentalités, monsieur le président du conseil général, et c'est pourquoi nous vous proposons de l'adopter.
Mme la présidente. L'amendement n° 13 rectifié, présenté par M. Madec, Mme Campion, M. Michel, Mme Blandin, M. C. Gautier, Mmes Le Texier, Cerisier-ben Guiga et Demontes, MM. Godefroy et Assouline, Mme Tasca, MM. Saunier et Domeizel, Mmes San Vicente et Bergé-Lavigne, MM. Raoul, Yung, Frimat et Lagauche, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 225-4 du code de l'action sociale et des familles est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il ne peut être refusé ou retiré d'agrément sur le seul fondement de l'orientation sexuelle du demandeur. »
La parole est à M. Roger Madec.
M. Roger Madec. Conformément à l'esprit de cette proposition de loi dont l'objectif est de faciliter les procédures d'adoption, l'amendement n° 13 rectifié tend à clarifier et à harmoniser les procédures d'agrément entre les différents candidats et entre les départements.
Depuis 1966, l'adoption plénière est ouverte aux personnes seules. Or, aujourd'hui, ces dernières font face à de fortes discriminations en raison de leur orientation sexuelle, et l'intervention de notre collègue président de conseil général souligne la nécessité de cet amendement.
Ni le code civil ni le code de l'action sociale et des familles ne prévoient de quelconques différences de traitement. Pourtant, en raison de la jurisprudence du Conseil d'Etat, des conseils généraux peuvent aujourd'hui refuser ou retirer un agrément sur la seule cause d'homosexualité, et cela en dépit « des qualités humaines et éducatives certaines » des postulants à l'adoption.
Cette situation relève de la rupture d'égalité devant la loi et de l'arbitraire le plus absolu. Dans certains départements, des personnes se verront refuser l'agrément en raison de leur orientation sexuelle ; dans d'autres, seules les capacités éducatives seront prises en compte, comme cela devrait être le cas partout.
En raison de ces pratiques administratives, les personnes victimes de ces discriminations sont alors incitées à cacher leur orientation sexuelle, au mépris du respect de la liberté individuelle et de leurs droits : telle est la situation actuelle.
Il ne s'agit pas de se demander si les personnes aujourd'hui victimes de discrimination en raison de leur orientation sexuelle devraient avoir accès à l'adoption ou pas. Cette question ne devrait plus se poser depuis 1966, car, de fait, elles y ont accès. Il s'agit simplement d'éviter à ces personnes d'avoir à se cacher ou d'êtres soumises à l'arbitraire.
En outre, ces différences de traitement sont, de manière évidente, en complète contradiction avec l'esprit du législateur. En effet, le code pénal punit, dans son article L.225-2, les discriminations fondées sur l'orientation sexuelle.
En adoptant la loi du 30 décembre 2004 portant création de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, le Parlement a réaffirmé sa volonté de mettre un terme aux discriminations opérées entre les personnes physiques à raison de leur orientation sexuelle.
La lutte contre les discriminations est donc un principe transversal qui doit irriguer toute nouvelle mesure législative. Dès lors, cette proposition de loi doit appliquer ce principe en matière d'adoption.
Seule l'analyse in concreto de l'intérêt de l'enfant et des qualités éducatives de l'adoptant doit être prise en compte lors de la délivrance de l'agrément. Considérer que l'orientation sexuelle prédétermine a priori les qualités humaines et éducatives d'une personne est en soi arbitraire et discriminatoire.
Enfin, cette discrimination consacrée par le Conseil d'Etat est non seulement illégitime, mais elle est de plus en pleine incohérence avec la jurisprudence de la Cour de cassation en matière d'évolution de l'autorité parentale.
Ainsi, au moment d'un divorce dû au changement d'orientation sexuelle de l'un des conjoints, la jurisprudence montre que l'autorité parentale conjointe est le plus souvent maintenue et que la résidence habituelle de l'enfant est parfois fixée au domicile du parent homosexuel.
Je vous demande donc, mes chers collègues, d'adopter cet amendement d'harmonisation qui, sur le fond, ne modifie en rien le droit reconnu depuis 1966 aux personnes seules à adopter des enfants mais qui, sur la forme, met fin à l'hypocrisie des procédures d'agrément, aux différences de traitement entre départements et aux discriminations fondées sur l'orientation sexuelle.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Madame Mathon, nous avons déjà beaucoup parlé ce matin, en commission, du sujet que traite votre amendement n° 6, et je l'ai moi-même évoqué dans mon intervention.
Actuellement, la législation n'interdit pas la délivrance de l'agrément aux célibataires ou aux familles nombreuses. Il n'est donc pas nécessaire de préciser que ces éléments ne peuvent conduire au refus de sa délivrance.
Par ailleurs, si la question de l'ouverture de l'adoption aux couples homosexuels mérite un vrai débat - et vous savez que je suis d'accord pour que nous l'engagions -, elle n'a pas sa place dans la discussion de cette proposition dont l'objet est de modifier non pas le droit de l'adoption, mais seulement son organisation.
M. Roger Madec. Mais alors où ?
M. Alain Milon, rapporteur. En conséquence, l'avis est défavorable.
L'amendement n° 13 rectifié, quant à lui, est satisfait par le droit existant qui interdit toute discrimination en fonction des orientations sexuelles.
Mme Hélène Luc. Ce n'est pas un argument !
M. Alain Milon, rapporteur. L'avis est donc, là aussi, défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. De même que la commission, le Gouvernement n'est pas favorable à ces amendements, qui sortent de l'objet de notre débat.
Le droit des personnes seules à adopter des enfants est en effet reconnu depuis 1966, et les principes fondamentaux de notre droit constitutionnel interdisent toute discrimination dans l'accès à ce droit.
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote sur l'amendement n° 6.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Sur ce sujet, je citerai une personnalité reconnue, Mme Claire Brisset, Défenseure des enfants. Si l'amendement n'est pas voté aujourd'hui, la pièce sera néanmoins versée au dossier et on pourra toujours y réfléchir.
Voilà ce qu'écrit Mme Claire Brisset dans son rapport de 2004 : « L'homosexualité ne saurait constituer un critère inavoué de refus d'agrément pour un futur adoptant, ce qui n'est pas la pratique dans tous les départements. Depuis près de quarante ans, la loi a rendu possible de créer un lien de filiation entre un enfant et un célibataire, quels que soient ses choix sexuels, cette adoption n'établissant de filiation qu'avec un seul parent.
« Bien évidemment, un hypothétique droit à l'adoption ne peut être garanti à qui que ce soit et quelle que soit son orientation sexuelle. Il arrive que des parents hétérosexuels se séparent, puis que l'un ou l'autre crée un nouveau couple, mais homosexuel, les enfants - adoptifs ou non - sont alors élevés par ce couple homosexuel. Actuellement, aucune donnée ne permet de comparer le devenir de ces enfants avec celui d'enfants vivant dans un couple hétérosexuel. »
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. On va attendre d'en avoir !
Mme la présidente. La parole est à M. Roger Madec, pour explication de vote.
M. Roger Madec. Madame la présidente, j'ai bien entendu les propos de M. le rapporteur et j'ai noté son ouverture.
Cependant, je m'inscris en faux par rapport à l'argumentation qui a été la sienne pour repousser notre amendement : la législation actuelle ne permet pas de répondre à la demande d'une personne qui avoue son homosexualité.
M. Alain Milon, rapporteur. Si !
M. Roger Madec. Le plus bel exemple, c'est la franchise de M. Bailly. Je suis en désaccord total avec lui mais, au moins, il est franc !
Je connais de nombreux cas où le refus est déguisé sous d'autres motifs.
Je vous citerai celui d'une femme lesbienne et célibataire, qui est haut fonctionnaire dans un ministère. Elle a eu le malheur de dire, lors de l'entretien, qu'elle était homosexuelle. Sa demande a été refusée pour un motif tout à fait déguisé mais, comme son dossier était apparemment solide, on lui a conseillé de déménager, lui indiquant que dans le département voisin, elle pourrait aboutir.
Mme Hélène Luc. Hypocrisie !
M. Roger Madec. Effectivement, elle a déménagé et, dans son nouveau département, elle a obtenu l'agrément. On nage en pleine hypocrisie !
De même, j'ai eu connaissance de plusieurs cas où les droits ne sont pas les mêmes selon que l'on a les moyens ou que l'on est socialement défavorisé.
Ainsi, je connais deux personnes qui ont eu recours à des mères porteuses aux Etats-Unis : il en coûte environ 300 000 francs et on peut adopter en toute légalité, au consulat, un enfant né ainsi. Quand on est ouvrier ou employé et que l'on n'a pas de moyens financiers, ce n'est pas possible !
Donc, la législation actuelle nage en pleine hypocrisie et, tant que l'on laissera ce droit d'interprétation aux présidents de conseils généraux, il faudra encore la faire évoluer.
Mme la présidente. La parole est à Mme Muguette Dini, pour explication de vote.
Mme Muguette Dini. Je suis étonnée qu'on aborde ce problème sous l'angle du droit des adultes, homosexuels ou non, à adopter un enfant.
Les commissions d'agrément, en tout cas celle que j'ai présidée pendant plusieurs années, s'attachent avant tout à l'intérêt de l'enfant.
Il nous est arrivé très souvent de donner des agréments à des personnes célibataires, le plus fréquemment à des femmes. Chaque fois, nous recherchions le référent de l'autre sexe auquel l'enfant allait pouvoir se raccrocher : si le demandeur était une jeune femme, nous nous demandions quel homme, autour d'elle, pourrait symboliser l'image de l'homme pour l'enfant ; si c'était un homme, quelle femme pourrait jouer ce rôle. C'était souvent le frère, la soeur, un cousin, le grand-père, la grand-mère.
Mme Raymonde Le Texier. Et les mères célibataires ?
Mme Muguette Dini. La question est de savoir non pas si la personne est homosexuelle ou non, mais s'il y a, dans son entourage, un référent de l'autre sexe. Il me semble que c'est ce référent de l'autre sexe qui va permettre à l'enfant de se construire. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, c'est un débat important.
Monsieur About, monsieur Madec, je souhaiterais que vous cessiez ces conversations privées !
Madame Dini, veuillez poursuivre.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. J'en ai assez des quolibets et des lazzis !
Mme Muguette Dini. J'avais terminé, madame la présidente.
Je voulais seulement conclure sur l'importance, pour l'enfant, de pouvoir s'identifier aux deux sexes. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Adrien Giraud, pour explication de vote.
M. Adrien Giraud. Monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis peiné et profondément touché par certains des propos que j'entends dans cette Haute Assemblée.
Nous parlons de l'adoption d'enfants. Adopter un enfant, c'est aller trouver un petit coeur qui cherche le bonheur. J'ai l'impression que, sur le fond, nous sommes tous d'accord. Pourtant, nous sommes en train de dramatiser l'adoption, d'en faire un monstre. Mes chers collègues, nous ne sommes pas des ordinateurs : nous devons aussi travailler avec notre coeur !
Mme la présidente. L'amendement n° 14, présenté par M. Madec, Mme Campion, M. Michel, Mme Blandin, M. C. Gautier, Mmes Le Texier, Cerisier-ben Guiga et Demontes, MM. Godefroy et Assouline, Mme Tasca, MM. Saunier et Domeizel, Mmes San Vicente et Bergé-Lavigne, MM. Raoul, Yung, Frimat et Lagauche, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 343-1 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Si l'adoptant est pacsé, le consentement de son partenaire est nécessaire à moins qu'il ne soit dans l'impossibilité de manifester sa volonté. »
La parole est à M. Roger Madec.
M. Roger Madec. Cet amendement tend à harmoniser les procédures de l'adoption plénière par une personne seule, qu'elle soit mariée ou pacsée.
Depuis 1966, une personne seule peut adopter un enfant ; elle doit avoir plus de vingt-huit ans et peut être célibataire ou mariée, auquel cas le conjoint doit donner son consentement. En revanche, une personne pacsée ne peut se porter candidate à l'adoption.
Cette différence de traitement paraît injustifiée au regard de la définition même du PACS. Aux termes de l'article 515-1 du code civil, le PACS est un contrat conclu par deux personne pour organiser leur vie commune, ce qui suppose, comme l'a précisé le Conseil constitutionnel dans sa décision du 9 novembre 1999, que les partenaires partagent « une résidence commune » ainsi qu'« une vie de couple », à l'instar des couples mariés.
En d'autres termes, si les mariés et les pacsés ont des statuts différents, les uns et les autres vivent la même réalité conjugale. Comment, dès lors, distinguer entre couple marié et couple pacsé lorsqu'il s'agit d'enfants ?
Un foyer se constitue autour d'un couple au sein d'une résidence commune, et cela indépendamment du lien juridique qui unit ses membres. Le désir d'enfant est aussi légitime chez les personnes mariées que chez les personnes pacsées, même si ces dernières n'ont pas droit à l'adoption.
Il est dès lors injustifié de faire dépendre la capacité d'adoption du statut juridique du couple d'accueil. Le fait d'être marié ou pacsé ne préjuge en rien des qualités humaines et de la capacité éducative de l'adoptant. On ne voit donc pas en quoi le lien juridique unissant une personne à son partenaire pourrait influer lors de l'évaluation au cas par cas à laquelle procèdent les conseils généraux.
En outre, cette incohérence du code civil provoque des effets pervers. Ainsi, une personne ne souhaitant pas se marier pour des raisons intimes mais qui désire adopter un enfant ne pourra pas se pacser parce que la loi lui interdirait alors l'adoption, situation qui encourage les adoptions dans un cadre monoparental.
En conséquence, il est juste et légitime qu'une personne pacsée puisse avoir accès à l'adoption et, pour respecter le parallélisme des formes, il convient dès lors d'exiger que le partenaire d'un pacsé donne également son consentement.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Encore une fois, il revient à cette proposition de loi non pas de modifier le droit de l'adoption, mais seulement d'en améliorer les procédures.
Toutefois, la commission a été sensible aux arguments avancés par les auteurs de cet amendement et elle souhaiterait entendre l'avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement, qui soulève un problème de première importance sur l'évolution de notre société.
Pour être traitée dans un esprit de responsabilité, cette question exige le dialogue, le débat et l'examen des différents paramètres, notamment l'intérêt de l'enfant.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Michel. Refuser cet amendement revient à laisser subsister une aberration totale dans notre droit.
En effet, les couples mariés peuvent adopter, de même que les célibataires. En général, les célibataires qui demandent l'adoption vivent en couple, comme on le constate dans les conseils généraux. En revanche, deux personnes pacsées, qui ont donc avec l'Etat un lien social, un contrat signé qui emporte des droits, ne peuvent pas adopter.
C'est de l'hypocrisie et c'est aussi une idiotie totale qui, comme l'a dit M. Madec, a pour effet d'encourager les adoptions monoparentales. Cette situation incite les gens à adopter en tant célibataires, à vivre en concubinage plutôt que de se pacser, c'est-à-dire à ne pas entrer dans le lien social avec la République, ce que le PACS devait tendre à éviter.
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. L'aberrant de nos jours est d'obliger des personnes voulant adopter à se marier !
D'une part, la solidité des couples et leur capacité à éduquer des enfants ne dépendent pas du lien du mariage, qui - le nombre de divorces suffit à le démontrer - ne peut franchement plus être considéré comme une pierre de touche.
D'autre part, obliger un célibataire qui vit avec un autre célibataire à adopter en tant que célibataire a pour effet de priver l'enfant du soutien du partenaire du parent adoptif si jamais il arrive malheur à ce dernier, car le partenaire du parent adoptif perd alors tout lien avec l'enfant qu'il a pourtant contribuer à élever. Il serait naturel qu'il continue à l'élever, notamment s'il était pacsé. La situation actuelle est en contradiction avec l'intérêt de l'enfant.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Cet amendement me trouble un peu, car j'ai le sentiment que, ou bien il ne va pas assez loin ou bien il va trop loin.
Mme Marie-Thérèse Hermange. C'est vrai !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Si l'adoptant est pacsé, il faudrait donc le consentement de l'autre partenaire.
Mme Eliane Assassi. Et alors ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Or, en théorie, un PACS est un contrat qui unit deux êtres et, puisqu'il y a vie commune, l'adoption devrait en conséquence être réalisée par les deux partenaires. Il est dès lors étonnant, surtout si l'on souhaite l'identification du PACS à une autre grande institution, de demander non pas la possibilité d'une adoption par les deux partenaires mais seulement le consentement de l'autre.
M. Roger Madec. Comme dans le mariage !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Non, dans le mariage, ce sont, dans la grande majorité des cas, les deux époux qui adoptent !
Mme Marie-Thérèse Hermange. Bien sûr !
M. Roger Madec. Mais non !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il y a manifestement là une ambiguïté. Cet amendement mérite, à mon avis, d'être étudié plus en profondeur. Je ne voudrais pas qu'il soit simplement « balayé » ; je souhaiterais donc qu'il soit retiré pour être traité dans le cadre plus complet dans lequel M. le rapporteur a annoncé que nous allions aborder ce sujet.
Très honnêtement, monsieur Madec, on ne peut pas le voter en l'état, car il n'est pas tout à fait logique.
C'est en somme du fait d'une vie commune que le consentement de l'autre est réclamé. Certes, le contrat donne une existence légale à cette vie commune. Cependant, si deux personnes partagent une vie commune, c'est aussi pour assumer ensemble l'enfant qu'elles vont adopter. Pourquoi un seul des deux partenaires serait-il l'adoptant ?
Il n'y a pas là, à mon avis, une très grande cohérence, raison pour laquelle je souhaite le retrait ; à défaut, je serais obligé de voter contre, ce que je regretterais, car cet amendement soulève un problème qui mérite d'être étudié.
Mme la présidente. Monsieur Madec, l'amendement n° 14 est-il maintenu ?
M. Roger Madec. Nous le maintenons. M. About s'est montré conciliant dans ses propos et, s'il le veut, je suis prêt à débattre de la question. Je n'accepterai cependant pas que l'on dise que cet amendement est bâclé.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je n'ai pas dit cela !
M. Roger Madec. C'est vrai, et il est vrai aussi que les délais dont nous disposons pour discuter de la proposition de loi qui nous est soumise sont très courts. Il suffit de rappeler que, ce matin en commission, nous avons examiné en une demi-heure les amendements présentés !
Vous n'êtes pas en cause, monsieur le président de la commission des affaires sociales, puisque vous êtes tenu de vous plier au calendrier imposé par le Gouvernement, mais, effectivement, cette proposition de loi aurait mérité plus de réflexion.
J'enregistre donc vos propos relativement conciliants et même ouverts en ce qui concerne ce débat, mais je maintiens l'amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 15, présenté par Mme Le Texier, M. Madec, Mmes Campion et Cerisier-ben Guiga, M. Michel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article 365 du code civil est ainsi rédigé :
« L'adoptant est seul investi à l'égard de l'adopté de tous les droits d'autorité parentale, à moins qu'il ne soit le conjoint ou le partenaire du père ou de la mère de l'adopté ; dans ce cas, l'adoptant a l'autorité concurremment avec son conjoint ou son partenaire, ils en assurent conjointement l'exercice. »
La parole est à Mme Raymonde Le Texier.
Mme Raymonde Le Texier. Cet amendement vise à mettre fin à une autre anomalie de taille.
L'adoption simple entraîne le transfert de l'autorité parentale des parents biologiques aux parents adoptifs. Toutefois, cette règle reçoit un aménagement lorsque l'adoptant est marié avec le père ou la mère de l'adopté. Dans ce cas, l'adoptant et son conjoint détiennent en commun l'autorité parentale, mais l'exercice de celle-ci est réservé au parent d'origine.
Nous souhaitons, par cet amendement, que cet aménagement soit étendu au PACS, en conformité avec la réforme de l'autorité parentale de 2002.
En effet, dans le cas d'un couple pacsé, des juridictions reconnaissent aujourd'hui l'adoption simple pour le partenaire du parent. C'est alors le partenaire du parent qui est investi de l'autorité parentale et le parent biologique, le parent d'origine, n'a plus qu'à demander au juge une délégation de l'autorité parentale pour continuer à avoir l'autorité parentale sur ses propres enfants ! C'est notamment le sens de la décision rendue par le tribunal de grande instance de Paris le 27 juin 2001.
Afin de remédier à cette situation surréaliste, il convient d'étendre la règle de dévolution de l'autorité parentale prévue en cas de mariage entre l'adoptant et le parent de l'adopté au PACS. Ainsi, en cas d'adoption simple d'un enfant par le partenaire pacsé du père ou de la mère de l'adopté, le partenaire pacsé détiendra l'autorité parentale avec le père ou la mère d'origine de l'adopté.
Tel est l'objet de notre amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Je rappelle qu'il revient à cette proposition de loi non pas de modifier le droit de l'adoption, mais seulement d'en améliorer les procédures.
L'avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 15.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 2
I. - Le code de l'action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° La section 3 du chapitre V du titre II du livre II devient la section 4 du même chapitre ;
2° Les articles L. 225-15, L. 225-16, L. 225-17 et L. 225-18 deviennent respectivement les articles L. 225-17, L. 225-18, L. 225-19 et L. 225-20 ;
3° L'article L. 225-18, tel qu'il résulte du 2°, est ainsi rédigé :
« Art. L. 225-18. - Le mineur placé en vue d'adoption ou adopté bénéficie d'un accompagnement par le service de l'aide sociale à l'enfance ou l'organisme mentionné à l'article L. 225-11 à compter de son arrivée au foyer de l'adoptant et jusqu'au prononcé de l'adoption plénière en France ou jusqu'à la transcription du jugement étranger. Cet accompagnement est prolongé si l'adoptant le demande, notamment s'il s'y est engagé envers l'Etat d'origine de l'enfant. Dans ce dernier cas, il s'effectue selon les modalités de calendrier déterminées au moment de l'engagement. »
II. - Aux articles L. 122-28-10 du code du travail et L. 512-4 du code de la sécurité sociale, la référence : « L. 225-15 » est remplacée par la référence : « L. 225-17 » et, à l'article 1067 du code général des impôts, la référence : « L. 225-18 » est remplacée par la référence : « L. 225-20 ».
Mme la présidente. La parole est à Mme Claire-Lise Campion, sur l'article.
Mme Claire-Lise Campion. L'article 2 met en place le suivi obligatoire par les services de l'aide sociale à l'enfance du mineur dès son arrivée au foyer de l'adoptant et jusqu'au prononcé de l'adoption plénière en France ou jusqu'à la transcription du jugement étranger, le suivi pouvant être prolongé au-delà au regard des exigences des pays d'origine des enfants ou à la demande des adoptants eux-mêmes.
Les pays d'origine seront sensibles à l'instauration de ce dispositif : ils sont nombreux, en effet, à attacher une importance particulière à la mise en place de ce type d'accompagnement.
La question de la formation des personnels d'accompagnement des conseils généraux et celle du financement d'une telle mesure se posent cependant.
En effet, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, un tel dispositif nécessite des moyens et donc un personnel formé. Les estimations que certains départements ont pu réaliser ne sont pas négligeables et ont un impact réel sur le plan financier, alors que le dispositif de compensation des dépenses pour les conseils généraux a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Mme la présidente. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 17, présenté par Mmes Campion et Le Texier, MM. Madec et Michel, Mme Cerisier-ben Guiga et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la première phrase du texte proposé par le 3° du I de cet article pour l'article L. 225-18 du code de l'action sociale et des familles :
Si le service de l'aide sociale à l'enfance ou l'organisme mentionné à l'article L. 225-11 le jugent utile, le mineur placé en vue d'adoption ou adopté bénéficie d'un accompagnement à compter de son arrivée au foyer de l'adoptant et jusqu'au prononcé de l'adoption plénière.
La parole est à Mme Claire-Lise Campion.
Mme Claire-Lise Campion. Cet amendement a pour objet de laisser le service départemental de l'aide sociale à l'enfance juge de l'accompagnement du mineur - il ne s'agit pas de le rendre systématique - en fonction, par exemple, de l'âge de l'enfant.
Mme la présidente. L'amendement n° 18, présenté par Mmes Campion et Le Texier, MM. Madec et Michel, Mme Cerisier-ben Guiga et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du texte proposé par le 3° du I de cet article pour l'article L. 225-18 du code de l'action sociale et des familles, après les mots :
de l'adoption
insérer les mots :
simple ou
La parole est à Mme Claire-Lise Campion.
Mme Claire-Lise Campion. Il nous semble important que les deux modes d'adoption, notamment l'adoption simple, soient concernés par la mise en place de l'accompagnement.
C'est un amendement que nous déposons un peu sous forme de question, monsieur le ministre. En effet, nous nous demandons pourquoi l'adoption simple est oubliée dans le dispositif de l'accompagnement. Nous nous interrogeons d'autant plus que, ainsi que j'ai eu l'occasion de le dire dans la discussion générale, c'est une forme d'adoption à part entière, qui ne rompt pas le lien avec les parents et qui peut répondre à un certain nombre de questions, notamment à celles qui nous sont posées à travers l'article 3 que nous examinerons ultérieurement.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L'amendement n° 17 tend à subordonner le suivi de l'enfant à une décision de l'ASE et est contraire à l'objectif de la proposition loi qui est de renforcer ce suivi.
En outre, cet amendement méconnaît les exigences des pays d'origine en la matière. La commission y est donc défavorable.
Pour ce qui est de l'amendement n° 18, la commission se rangera à l'avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. S'agissant de l'amendement n° 17, le Gouvernement n'est pas favorable à son adoption : il préfère que le suivi soit systématique et non pas facultatif.
Pour ce qui est de l'amendement n° 18, le Gouvernement considère qu'il est en réalité sans objet dans la mesure où les enfants arrivant en France, et qui bénéficient d'une adoption simple, sont d'ores et déjà suivis au titre de l'article L.225-18 du code de l'action sociale et des familles jusqu'à la transcription du jugement d'adoption. Par conséquent, le Gouvernement émet, là aussi, un avis défavorable.
Mme la présidente. L'amendement n° 32 rectifié, présenté par Mme Dini et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé parle 3° du I de cet article pour l'article L. 225-18 du code de l'action sociale et des familles par deux phrases ainsi rédigées :
Dans tous les cas, un accompagnement par le service de l'aide sociale à l'enfance ou l'organisme mentionné à l'article L. 225-11 doit être mis en place. Il consiste, au minimum, en un contact annuel avec un référent jusqu'à la majorité de l'enfant. »
La parole est à Mme Muguette Dini.
Mme Muguette Dini. Cet amendement vise à rendre obligatoire un contact régulier entre les services de l'aide à l'enfance et les familles ayant adopté un enfant.
C'est rarement dans les premiers mois de l'arrivée de l'enfant, français ou étranger, dans sa famille adoptive que se détectent les difficultés relationnelles. Lorsqu'elles surviennent, l'adoption plénière est prononcée depuis longtemps et il n'y a plus personne à qui en parler.
Il semble qu'un contact annuel pourrait déclencher un appel au secours de certaines familles avant que la situation ne se soit dramatiquement dégradée. Les cas de maltraitance, de rejet de l'enfant, de nouvel abandon existent. Aucune statistique n'a été produite à ce sujet.
J'ai souhaité qu'un observatoire de l'adoption soit mis en place dans le département du Rhône. Pour l'instant, faute de disposer d'un droit de regard sur ce qui se passe après l'adoption plénière, c'est totalement impossible !
Cet amendement, dont l'objet principal est l'accompagnement de l'enfant jusqu'à sa majorité, tout en présentant l'avantage d'alimenter un tel outil d'observation, permettrait de se faire une idée sur l'adoption dans notre pays.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Madame la sénatrice, l'obligation de suivi de l'enfant adopté jusqu'à sa majorité ne me paraît respectueuse ni de la vie privée de l'enfant ni de la vie privée de la famille.
Il convient, à mon sens, de s'en tenir aux engagements pris par les parents envers les autorités des pays d'origine de leur enfant. Je demande donc le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Gouvernement partage le sentiment de la commission.
Je comprends, madame la sénatrice, après vous avoir écoutée pendant la discussion générale, ce qui motive votre amendement, à savoir un certain nombre de situations très dégradées, longtemps après l'adoption.
Pour autant, ces situations doivent être traitées dans le cadre du droit commun, car, si on appliquait votre amendement, on aboutirait à une différenciation des droits des parents selon qu'ils seraient parents adoptifs ou parents naturels, ce qui me paraît impossible.
Mme la présidente. Madame Dini, l'amendement est-il maintenu ?
Mme Muguette Dini. Non, je le retire, mais je souhaitais, même si ma proposition n'était sans doute pas la bonne, attirer l'attention sur les difficultés qu'éprouvent les parents adoptifs à parler de leurs problèmes. Ils ont encore plus de mal à les exposer que les autres. J'ignore comment venir à bout de cette situation, mais ce serait une bonne chose si l'on pouvait trouver une solution.
Mme la présidente. L'amendement n° 32 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'article 2.
(L'article 2 est adopté.)
Article additionnel après l'article 2
Mme la présidente. L'amendement n° 33, présenté par Mme Dini et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 344 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L'écart d'âge maximum entre l'enfant qu'ils se proposent d'adopter et le plus jeune des adoptants est de 45 ans. »
La parole est à Mme Muguette Dini.
Mme Muguette Dini. Mon expérience de présidente de commission m'a permis de constater qu'il pouvait y avoir des demandes d'agrément assez extraordinaires, émanant en particulier de personnes que je qualifierai de « très âgées », puisque ayant presque mon âge ! (Sourires.)
Un écart d'âge minimum entre les parents adoptants et l'enfant adopté est fixé par l'article 344 du code civil. Cet amendement a pour objet la fixation, au même article, d'un écart d'âge maximum entre l'enfant et le parent adoptant s'il est seul, et entre l'enfant et le plus jeune des parents adoptants si l'adoption est réalisée par un couple. La France ne serait pas une exception, puisque de nombreux pays européens ont retenu cette disposition.
Elle permettrait, par exemple, d'interdire l'adoption d'un nouveau-né par un couple dont le plus jeune des parents aurait 50 ans, mais permettrait également à ces derniers d'adopter un enfant âgé d'au moins 5 ans.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Lors de l'examen de cette proposition de loi, il n'avait pas semblé opportun à la commission de fixer un écart d'âge maximal entre l'adopté et l'adoptant dans la mesure où ce critère relève déjà des législations des pays d'origine qui effectuent l'apparentement.
Je demande donc le retrait de l'amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Gouvernement partage cet avis. Il souhaite, en effet, que l'on ne rigidifie pas trop les procédures d'adoption. Il existe aussi des cas où, malgré un écart d'âge assez faible, un enfant qui n'a pas pu être adopté en bas âge le sera par un couple jeune, avec d'excellents résultats, compte tenu des qualités éducatives du couple adoptant.
C'est la raison pour laquelle, madame la sénatrice, je demande à mon tour le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Madame Dini, l'amendement est-il maintenu ?
Mme Muguette Dini. Monsieur le ministre, vous êtes très persuasif, aussi vais-je retirer mon amendement.
Je remarque néanmoins que, à chaque question que je pose, vous me parlez des pays d'origine. Mais il y a aussi des enfants, des pupilles français !
Peut-être ne ferons-nous rien aujourd'hui, mais, je pense qu'à terme, avec les évolutions qui conduisent des femmes de soixante ans, voire de soixante-cinq ans, à recourir à la procréation médicalement assistée - je ne suis d'ailleurs pas certaine qu'à cet âge une femme soit tout à fait apte à élever un petit enfant : il y a un âge pour tout - nous serons appelés à revenir sur cette question.
M. Alain Milon, rapporteur. Je connais une dame de cinquante-cinq ans qui élève à merveille un enfant adopté à l'âge de cinq ans !
Mme Muguette Dini. Cela correspond à l'écart d'âge de cinquante ans que je préconise !
Mme la présidente. L'amendement n° 33 est retiré.
Article 3
Dans la première phrase du premier alinéa de l'article 350 du code civil, les mots : « sauf le cas de grande détresse des parents et » sont supprimés.
Mme la présidente. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 7 est présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 19 est présenté par Mmes Campion et Le Texier, MM. Madec et Michel, Mme Cerisier-ben Guiga et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Eliane Assassi, pour présenter l'amendement n° 7.
Mme Eliane Assassi. Monsieur le ministre, mes chers collègues, l'article 3 supprime, dans l'article 350 du code civil relatif à l'abandon des enfants victimes d'un désintérêt parental prolongé, le critère de « grande détresse » des parents qui interdit de prononcer l'abandon des enfants dont les parents se trouveraient dans ce cas.
Cette disposition n'existait pas dans le texte initial de la proposition de loi et a été introduite par un amendement de la commission des lois à l'Assemblée nationale.
Nous regrettons bien évidemment qu'une telle disposition ait été adoptée précipitamment sans qu'aucune consultation avec l'ensemble des acteurs concernés n'ait eu lieu. En effet, il aurait été utile, afin d'éclairer nos débats sur la notion de « grande détresse », d'entendre, par exemple, les associations qui viennent en aide à ces familles en grande difficulté. En l'état, il nous semble que cette mesure stigmatise davantage encore les familles pauvres en sous-entendant qu'elles ne peuvent pas élever leurs enfants et se trouvent contraintes de les abandonner, plus qu'elle ne les aide à les élever.
Il faut s'interroger, non pas sur les moyens de faciliter l'abandon et donc l'adoption ultérieure d'enfants issus de familles pauvres, mais plutôt sur les raisons qui acculent ces familles à une grande détresse. Supprimer brutalement et sans concession le critère de « grande détresse » dans le but de rendre plus rapide l'adoption, c'est ignorer le respect des liens entre l'enfant et ses parents biologiques.
Nous nous opposons à l'article 3 et nous en demandons, par conséquent, la suppression.
Mme la présidente. La parole est à Mme Claire-Lise Campion, pour présenter l'amendement n° 19.
Mme Claire-Lise Campion. Il s'agit d'un amendement de sagesse. En effet, les conditions dans lesquelles nous avons examiné ce texte ne nous ont pas permis de mesurer l'impact réel de cet article 3.
Tout en étant consciente que la clause de l'état de « grande détresse » des parents telle qu'elle est prévue à l'article 350 du code civil ne permet pas à un certain nombre d'enfants d'être adoptés et peut engendrer pour eux des situations d'instabilité affective, je considère que faciliter les déclarations d'abandon judiciaire ne supprimerait pas pour autant la distorsion qualitative existante, les enfants se trouvant souvent, dans ce cas, âgés et peu préparés à l'adoption. De plus, aucune étude chiffrée n'apporte d'éléments précis sur ce point.
Enfin, le lien du sang est une réalité dont on ne peut s'affranchir aussi simplement. Sommes-nous absolument certains qu'une décision de rupture définitive de toute relation avec la famille d'origine soit la meilleure solution pour l'enfant et lui donne les meilleures chances de se construire un avenir ?
Il existe, par ailleurs d'autres voies juridiques telles que l'adoption simple, - j'y reviens- qui présente pour l'enfant l'avantage de ne pas rompre brutalement et irrévocablement avec son histoire. Or, je répète que nous ne l'avons pas suffisamment prise en compte et c'est pourquoi nous vous proposons cet amendement de raison, qui tend à supprimer l'article 3 afin de nous donner la possibilité de débattre de cette question dans un contexte dépassionné.
Mme la présidente. L'amendement n° 4 rectifié ter, présenté par MM. Seillier, Gournac, Laffitte, Mouly, Othily, Pelletier et Revet, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
I - Le premier alinéa de l'article 350 du code civil est ainsi rédigé :
« L'enfant recueilli par un particulier, un établissement ou un service de l'aide sociale à l'enfance, dont les parents se sont manifestement désintéressés pendant l'année qui précède l'introduction de la demande en déclaration d'abandon, malgré l'accompagnement prévu notamment par les dispositions des articles L. 221-1 et suivants du code de l'action sociale et des familles et l'article 375 du présent code et celui fourni par les institutions compétentes, peut être déclaré abandonné par le tribunal de grande instance et sans préjudice des dispositions du quatrième alinéa. La demande en déclaration d'abandon est obligatoirement transmise par le particulier, l'établissement ou le service de l'aide sociale à l'enfance qui a recueilli l'enfant à l'expiration du délai d'un an dès lors que les parents se sont manifestement désintéressés de l'enfant. »
II - Le deuxième alinéa de l'article 350 du code civil est ainsi rédigé :
« Sont considérés comme s'étant manifestement désintéressés de leur enfant les parents qui, malgré l'accompagnement prévu notamment par les dispositions des articles L. 221-1 du code de l'action sociale et des familles et l'article 375 du présent code et celui fourni par les institutions compétentes, n'ont pas entretenu avec lui les relations nécessaires au maintien de liens affectifs, et qu'aucun témoignage contraire n'a pu être recueilli ».
La parole est à M. Bernard Seillier.
M. Bernard Seillier. Cet amendement se présente comme un amendement de repli par rapport aux deux qui viennent d'être exposés.
Je voudrais, ici, me faire l'avocat de l'éminente dignité des pauvres et des gens en situation d'exclusion, et plaider également pour tous les efforts consentis depuis des années par de nombreux gouvernements en faveur de la cohésion sociale et de la lutte contre l'exclusion et la pauvreté. En effet, en matière de cohésion sociale, on ne peut attendre des résultats favorables et positifs si l'on ne défend pas la cohésion familiale.
C'est bien le coeur du sujet car si, jusqu'à présent, l'examen de ce texte a été abordé, à l'Assemblée nationale comme au Sénat, sans qu'aient été auditionnées ni les personnes concernées ni les associations qui agissent auprès d'elles, il faudra bien prendre en considération cette situation, très rapidement introduite dans le code civil sous cette formule, il est vrai un peu lapidaire, de « personnes en situation de grande détresse ».
Quelle est la réalité de ces familles ? Elles se trouvent confrontées dans leur vie quotidienne à un combat avec des travailleurs sociaux. Elles vivent l'intervention administrative et judiciaire avec un fort sentiment d'injustice et la peur du placement. En effet, le placement, parce qu'il rappelle des mauvais souvenirs, parce qu'il met fin au projet familial, seule richesse des plus pauvres, parce qu'il crée un décalage entre les parents et leurs enfants, notamment dans leurs conditions de vie, difficile ensuite à combler, demeure pour les familles ce que l'on doit à tout prix éviter.
Comme le disait une mère, après un long temps de placement, on ne se connaît plus, on doit apprendre à connaître ses propres enfants. Quand on a les enfants en fin de semaine, on est attentif à les gâter, ce qui ne favorise pas la mise en place de limites. On peut d'ailleurs observer que le terme « violence » est régulièrement employé par les familles - violence de l'intervention sociale, de l'intervention éducative et de l'intervention du juge - comme en écho d'ailleurs à l'usage du même terme par les professionnels.
Dans ce contexte, quelle place réserve-t-on aux parents d'enfants placés ? Comment peut se traduire en actes la volonté des professionnels de prendre en compte les compétences parentales et de favoriser la « bientraitance » ?
Le placement, devenu le barycentre du travail social et éducatif, signant l'échec d'une intervention sociale ou éducative, influe sur la liberté de parole des familles auxquelles l'accès aux écrits des professionnels est souvent interdit, pour des raisons autant pratiques que juridiques. Comment, dans ces conditions, peut-on parler de contractualisation de l'action sociale et éducative ?
La peur du placement des enfants diminue la liberté de parole des familles et favorise le déni. L'aide sociale à l'enfance, malgré la réalité, est toujours perçue comme une institution « rapteuse » d'enfants.
De fait, on constate que se mettent en place des logiques qu'il est très difficile de briser.
Les familles les plus en difficulté ont parfois une histoire douloureuse par rapport à la direction départementale des affaires sanitaires et sociales, la DDASS, et ont construit une représentation de l'aide sociale à l'enfance. Elles ont peu de réseaux de solidarité, ce qui explique qu'elles fuient les services sociaux, se réfugiant dans la solitude et le refus de l'intervention de tout travailleur social. Elles s'installent dans une sorte de « spirale de l'enfermement »
Les travailleurs sociaux considèrent alors qu'il n'existe plus de collaboration possible avec une famille qui leur échappe physiquement ou qui dénie souvent l'existence de ce qui lui est reproché dans son attitude vis-à-vis de son enfant. L'anxiété des professionnels, qui se sentent souvent très seuls, se développe. Un signalement est rédigé pour le parquet et le juge, saisi du dossier, en l'absence de toute possibilité d'intervention en milieu ouvert, est amené à placer les enfants.
A cela, il faut ajouter des pratiques qui ne favorisent pas le dialogue : je pense, par exemple, au fait que, très fréquemment, le juge des enfants reçoive les travailleurs sociaux ou les éducateurs pendant un long moment, immédiatement avant l'audience avec la famille, comme s'il existait une connivence entre eux qui s'opposerait à une écoute attentive et sans a priori des familles les plus en difficulté.
Dès lors, pour les parents, tout est joué d'avance. Ils affirment : « Le juge ne nous a pas écoutés et nous a fait taire ; on ne peut pas discuter avec ce juge-là. Dès que l'on dit quelque chose, il monte d'un ton ». Un avocat a même parlé de « guet-apens » du placement.
L'incompréhension, qui se double d'un sentiment d'impuissance et d'humiliation, peut se traduire par des réactions violentes : un bureau renversé, des portes qui claquent. Une mère déclare : « Je n'ai pas écouté le reste et je suis partie en claquant la porte. Cela m'a soulagée ! ». Une autre attitude consiste, au contraire, « à faire la biche », selon l'expression utilisée par une mère de famille qui a expliqué qu'elle avait « trop peur de se mettre à dos les éducateurs » et que son mari lui avait dit de se taire. Elle a ajouté : « On a peur que les paroles se retournent contre nous ! ».
Les juges des enfants, pour leur part, déclarent que peu de parents s'opposent aux mesures proposées.
La question des droits de visite et d'hébergement est emblématique des difficultés que rencontrent les familles. Ces droits sont rarement fixés avec précision dans le contrat d'accueil provisoire ou dans les décisions d'assistance éducative.
Au-delà de l'aspect juridique et du souci de souplesse, que l'on peut comprendre, il n'empêche qu'une telle omission laisse aux équipes éducatives des établissement et services un pouvoir considérable sur la famille.
Deux exemples, pris dans deux départements différents, sont éclairants :
Pour rendre une visite d'une heure à leurs enfants placés dans un établissement, les parents sont parfois absents de leur domicile durant cinq heures en raison des horaires d'autobus et des changements à effectuer. Il leur arrive d'être en retard, ce qui leur est reproché.
Une maman, démunie de tout moyen matériel et en situation irrégulière, ne pouvait plus rendre visite à ses enfants placés dans un lieu accessible uniquement par le train, car elle craignait d'être interpellée, n'ayant pas de titre de transport.
De ces deux situations - le retard de la famille et l'absence de la mère auprès de ses enfants - les équipes éducatives tirent des conclusions quant à la qualité de l'attachement des parents à leurs enfants. Une mère de famille se lamentait : « On croit que je ne m'intéresse pas à mes enfants ! ». Une autorité dans le domaine de la lutte contre l'exclusion déclarait que, dans certains cas, elle avait le sentiment d'être en face de familles non pas « démissionnaires », mais « démissionnées ».
A l'inverse, un établissement organise les visites de la façon la plus souple possible, en fonction de la décision du magistrat. Si la vie des enfants, et de leurs camarades, ne s'en trouve pas perturbée inconsidérément, les parents sont autorisés à leur rendre visite sans rendez-vous. Une mère peut s'y rendre tous les soirs et baigner son fils ; une famille peut y déjeuner avec son enfant quand elle le souhaite et sans prévenir ; des pères et des mères participent à des groupes de vie du foyer et prennent part à la préparation des repas.
J'ajoute un dernier exemple positif : M. et Mme B. ont quatre enfants, dont les trois garçons aînés sont placés à l'aide sociale à l'enfance, la plus jeune, Sabrina, âgée de quatre ans, vivant avec eux. Ils ont beaucoup de mal à maintenir des liens réguliers avec leurs enfants placés. En effet, voir ses enfants dans une salle, une heure par mois, est décourageant.
L'occasion leur a été donnée de passer plusieurs week-ends à l'espace de vie créé par une association.
C'est là qu'intervient sur le terrain, à côté des travailleurs sociaux, un autre acteur sur lequel se fondent les plus grands espoirs dans la lutte contre l'exclusion et la pauvreté : je veux parler de la vie associative et des initiatives prises par les associations en coopération avec les institutions administratives et professionnelles.
Cette association a permis à M. et Mme B. de reconquérir auprès de leurs fils une place de parents plus concrète en termes de prise en charge et à la jeune soeur de se retrouver au sein de la fratrie. Aujourd'hui, les droits de visite aux garçons ont été étendus et les travailleurs sociaux envisagent des visites avec sortie au domicile familial. Dans le même temps, la famille a été relogée et un projet de vacances pour cet été, dans une maison de vacances familiale, se met en place.
Après avoir vécu au jour le jour, les parents parviennent aujourd'hui à construire des projets d'avenir, à se fixer des objectifs et à se mobiliser pour atteindre leur but. Ils ont senti qu'ils étaient soutenus, dans leur projet, par un certain nombre de partenaires.
Sur cette question de la difficulté du maintien des liens entre les parents et les enfants placés, je veux citer l'exemple suivant : des parents doivent dépenser cinquante euros pour se rendre à la pouponnière où leur enfant est placé. Lorsque ce dernier fait encore la sieste lorsqu'ils arrivent à l'établissement, les heures de visite étant strictes, ils ne le voient que très peu de temps. Alors, ils se découragent et n'y vont plus aussi régulièrement. Ensuite, ils se voient accusés de se désintéresser de leur enfant.
Il est difficile pour la plupart des parents d'aller voir leurs enfants qui sont placés. Ces parents souffrent du regard négatif qui est porté sur eux. Le moment où ils doivent quitter leurs enfants est toujours dur : les enfants pleurent, et les parents sont, là encore, découragés.
Face à ces difficultés, je tiens à insister sur l'importance de la présence du tissu associatif et de son action dans la lutte contre l'exclusion et pour la cohésion sociale
Les exemples que je viens de donner sont récents et illustrent des situations concrètes et actuelles.
Je vous ai par ailleurs cité des extraits du rapport publié, en juin 2000, par M. Naves, inspecteur général des affaires sociales, et M. Cathala, inspecteur des services judiciaires. Permettez-moi de souligner que je n'ai trouvé aucune mention de cette publication importante sur le placement des enfants et des adolescents dans les rapports et études de l'Assemblée nationale ou du Sénat sur cette question.
Je ne formule aucun reproche à cet égard, dans la mesure où notre débat devait se cantonner strictement aux modalités d'adoption. Cependant, la suppression d'un membre de phrase qui couvre le champ énorme des familles en situation de détresse ne peut être traitée aussi facilement.
C'est pourquoi je propose, par cet amendement, d'en faire mention et de rappeler l'accompagnement des professionnels et des institutions compétentes, prévu aux articles L. 221-1 et 375 du code civil. Il s'agit de permettre à ces associations et aux pouvoirs publics de prendre leurs responsabilités pour que les situations soient tranchées en connaissance de cause
A la réalité douloureuse des familles qui demandent des adoptions, s'ajoute celle, très douloureuse, des familles qui vivent dans la grande misère et qui se comptent par millions en France aujourd'hui, hélas !
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission est défavorable aux amendements identiques nos 7 et 19. En effet, elle est opposée à la suppression de l'ouverture, très maîtrisée, que constitue l'article 3 en matière de déclaration judiciaire d'abandon.
Ce dispositif, qui permet d'offrir, grâce au statut plus protecteur de pupille de l'Etat, un avenir à des enfants manifestement délaissés, mérite en effet d'être développé.
En outre, le critère de grande détresse est délicat à prendre en compte par les magistrats puisque, par définition, l'ensemble des familles dont les enfants sont placés à l'aide sociale à l'enfance sont manifestement en grande détresse.
S'agissant de l'amendement n° 4 rectifié ter, la précision qu'il tend à introduire me paraît compliquer inutilement la rédaction de l'article 350 du code civil, sans pour autant pour améliorer le dispositif.
A l'heure actuelle, les services sociaux, mais également les magistrats chargés de l'instruction de la demande de déclaration judiciaire d'abandon, ont à coeur de maintenir les liens biologiques entre les parents et les enfants et de s'assurer, en dernière extrémité, qu'il n'existe effectivement pas d'autre solution pour offrir un avenir à l'enfant placé que d'ouvrir la voie de son adoption.
J'ajoute que la déclaration judiciaire d'abandon, qui ne concerne que deux cents enfants sur les 135 000 enfants placés à l'aide sociale à l'enfance, ne rompt pas le lien juridique avec la famille d'origine tant qu'une adoption n'est pas prononcée, que le lien de filiation reste intact et que l'enfant se voit, en fait, doté d'un tuteur et d'un conseil de famille. Le statut de pupille évite les placements successifs, provisoires, les aller-retour entre les différentes familles d'accueil, qui, vous le savez, sont extrêmement destructeurs pour un enfant.
Dans ces conditions, la commission se ralliera à l'avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. S'agissant des amendements identiques nos 7 et 19, le Gouvernement partage l'avis défavorable de la commission.
En ce qui concerne l'amendement n° 4 rectifié ter, je veux dire à M. Seillier que j'ai été très touché par la présentation qu'il a faite des motifs de son amendement.
Il s'agit d'une question importante, qui ne va pas de soi et qui justifie pleinement notre débat. J'y ai beaucoup réfléchi et j'ai écouté très attentivement les propos que vous avez tenus à cet égard, monsieur le sénateur.
Le passage au statut de pupille de l'Etat ne peut en aucun cas être brutal. Pour que cette procédure soit enclenchée, il faut que les services sociaux en prennent l'initiative, que les services de l'aide sociale à l'enfance saisissent le juge des enfants, que ce dernier procède à une expertise pour prendre une décision « éclairée », selon le terme du code civil. La décision de passage au statut de pupille de l'Etat est prise à l'issue d'une procédure dont la durée, qui n'est jamais inférieure à un an, peut aller jusqu'à dix-huit mois, voire deux ans et même davantage.
La disposition que vous souhaitez amender, monsieur le sénateur, et qui a été adoptée par l'Assemblée nationale, continue à exiger, comme le veut notre code civil actuellement, la démonstration du fait que les parents se sont manifestement désintéressés de l'enfant, pour que celui-ci puisse être déclaré adoptable.
En aucun cas, et c'est une exigence impérieuse, la situation sociale des parents ne peut ni ne doit entrer en ligne de compte dans l'appréciation de leur désintérêt pour l'enfant. Il doit s'agir, je le répète, d'un désintérêt manifeste, c'est-à-dire d'une situation d'une gravité tout à fait exceptionnelle, qui ne peut concerner que quelques centaines d'enfants.
J'ai bien écouté les exemples émouvants que vous avez cités, monsieur le sénateur. Mais, précisément, ces cas ne montrent pas de désintérêt manifeste des parents pour leur enfant. Bien au contraire, ils témoignent de l'existence d'un intérêt très manifeste de leur part. Il ne s'agit donc pas de situations où ces enfants pourraient être retirés définitivement à leur famille pour pouvoir être adoptés.
La priorité du Gouvernement est que les familles en difficulté et vulnérables soient davantage soutenues. Tel est d'ailleurs l'un des objets de la conférence de la famille qui se tiendra en septembre prochain.
Cependant, nous devons penser également aux enfants qui se trouvent parfois, eux aussi, dans des situations de grande détresse. On ne doit pas, sous prétexte de la détresse de leurs propres parents, empêcher leur adoption. Quand un enfant est totalement délaissé, abandonné, maltraité même, le priver de la possibilité d'être éduqué, de grandir et de s'épanouir dans une famille aimante, revient à le sacrifier à ses parents.
On a rappelé tout à l'heure que, chaque année, en France, 1 700 enfants sont reconnus comme pupilles de l'Etat. En Grande-Bretagne, on en compte 5 000. Plusieurs milliers d'enfants en situation très grave pourraient donc probablement faire l'objet, chez nous, d'une procédure d'adoption s'ils étaient reconnus adoptables à la suite d'une procédure qui est non pas brutale, mais lente, je le répète, puisqu'elle comprend plusieurs filtres. Ce sont peut-être 3 000 enfants dont la grande détresse doit, elle aussi, être prise en considération.
En conscience, et après y avoir beaucoup réfléchi, je vous demande, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer votre amendement.
Mme la présidente. Monsieur Seillier, l'amendement n° 4 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Bernard Seillier. En conscience également, je ne puis retirer cet amendement.
J'ai dû mal me faire comprendre, monsieur le ministre. Vous dites avoir été ému par les cas que j'ai cités, mais j'ai essayé de vous expliquer que ces familles ont tendance, avec le temps, à se décourager. Après avoir manifesté au départ de l'intérêt pour garder leurs enfants, elles finissent par baisser les bras. Les parents ressentent une espèce de « collusion », si je puis dire, entre les magistrats et les travailleurs sociaux. Ils redoutent donc la procédure devant les juges et restent finalement sur la touche.
Mon amendement présente également un autre aspect auquel vous serez peut-être sensible, monsieur le ministre : la suppression de cette mention dans le code civil sera symboliquement ressentie comme un coup de poignard par toutes les associations qui luttent pour faire en sorte que les familles en difficulté ne se dissolvent pas davantage et, au contraire, se reconstruisent.
Le père des quatre enfants dont j'ai parlé tout à l'heure a très récemment indiqué qu'il a désormais compris qu'il pouvait être le père de ses enfants ; il a reconnu sa capacité éducative.
Dans ces cas particuliers, le symbolisme de cet amendement proposé par l'Assemblée nationale est catastrophique. En effet, on est en train de porter un préjudice terrible à tous les militants désintéressés, aux bénévoles des associations qui font des efforts pour oeuvrer auprès de ces familles.
Tout en respectant vos arguments, monsieur le ministre, - je connais votre sensibilité et votre exigence - je ne puis retirer cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 7 et 19.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas les amendements.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 4 rectifié ter.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 3.
(L'article 3 est adopté.)
Article 4
La section 3 du chapitre V du titre II du livre II du même code est ainsi rétablie :
« Section 3
« Agence française de l'adoption
« Art. L. 225-15. - Il est créé une Agence française de l'adoption qui a pour mission d'informer, de conseiller et de servir d'intermédiaire pour l'adoption de mineurs étrangers de quinze ans.
« L'Etat, les départements et des personnes morales de droit privé constituent à cette fin un groupement d'intérêt public.
« L'Agence française de l'adoption est autorisée à intervenir comme intermédiaire pour l'adoption dans l'ensemble des départements.
« Elle est habilitée à intervenir comme intermédiaire pour l'adoption dans les Etats parties à la convention de La Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale. A la demande du ministre chargé des affaires étrangères, après avis de l'Autorité centrale pour l'adoption internationale, l'Agence française de l'adoption suspend ou cesse son activité dans l'un de ces pays si les procédures d'adoption ne peuvent plus être menées dans les conditions définies par la convention précitée, et la reprend, le cas échéant, lorsque ces conditions peuvent de nouveau être respectées. Pour exercer son activité dans les autres pays d'origine des mineurs, elle doit obtenir l'habilitation du ministre chargé des affaires étrangères prévue à l'article L. 225-12.
« Pour l'exercice de son activité, dans les pays d'origine, elle s'appuie sur un réseau de correspondants.
« Elle assure ses compétences dans le strict respect des principes d'égalité et de neutralité.
« Art. L. 225-16. - Dans chaque département, le président du conseil général désigne au sein de ses services au moins une personne chargée d'assurer les relations avec l'Agence française de l'adoption.
« Outre les moyens mis à la disposition de l'agence par les personnes morales de droit privé qui en sont membres, l'Etat et les départements assurent sa prise en charge financière selon des modalités définies par voie réglementaire.
« Le personnel de l'agence est soumis au secret professionnel dans les conditions prévues aux articles 226-13 et 226-14 du code pénal.
« Les dispositions des articles L. 225-14-1 et L. 225-14-2 du présent code sont applicables à l'agence. »
Mme la présidente. Je suis saisie de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 3 est présenté par M. Milon, au nom de la commission.
L'amendement n° 20 est présenté par Mmes Campion et Le Texier, MM. Madec et Michel, Mme Cerisier-ben Guiga et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 225-15 du code de l'action sociale et des familles :
« L'Agence française de l'adoption est constituée sous la forme d'un groupement d'intérêt public. L'État et les départements en sont membres de droit. Les organismes autorisés pour l'adoption mentionnés à l'article L. 225-11 et les associations de parents adoptifs dont la liste est fixée par un arrêté du ministre chargé des Affaires étrangères y disposent d'une voix consultative au sein du conseil d'administration.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 3.
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement a pour objet de préciser que les personnes morales de droit privé, membres du groupement d'intérêt public constitutif de l'Agence française de l'adoption, sont les organismes agréés pour l'adoption et les associations de parents adoptifs dont la liste est fixée par le ministre des affaires étrangères. Ils y disposeront d'une voix consultative.
Mme la présidente. La parole est à Mme Claire-Lise Campion, pour présenter l'amendement n° 20.
Mme Claire-Lise Campion. Nous rejoignons totalement les arguments développés par M. le rapporteur.
En effet, nous estimons que la rédaction de l'article 4 relatif à la composition du GIP et au rôle que peuvent jouer les personnes morales de droit privé est trop vague.
Par cet amendement, nous précisons que les personnes morales concernées sont les organismes agréés pour l'adoption ainsi que les associations de parents adoptifs et qu'elles disposent d'une voix consultative au sein du conseil d'administration du GIP.
Mme la présidente. L'amendement n° 22, présenté par Mmes Cerisier-ben Guiga, Campion et Le Texier, MM. Madec, Michel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 225-15 du code de l'action sociale et des familles, après les mots :
L'Etat
insérer les mots :
représenté par les ministères des Affaires étrangères, de la Justice, de la sécurité sociale, des personnes âgées, des personnes handicapées et de la famille
La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Nous proposons une variante rédactionnelle. Je retirerai cet amendement si les amendements identiques sont adoptés.
On oublie toujours les associations d'enfants majeurs adoptés parce qu'elles sont en cours de constitution et qu'elles n'existent donc pas encore formellement. Je pense que leur présence serait souhaitable au sein de toutes ces instances.
Mme la présidente. L'amendement n° 8, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 225-15 du code de l'action sociale et des familles, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'Agence française de l'adoption comprend un collège consultatif composé d'au moins deux représentants des associations de parents adoptifs, de représentants d'associations d'adoptés majeurs et des organismes autorisés pour l'adoption.
La parole est à Mme Josiane Mathon.
Mme Josiane Mathon. J'irai dans le même sens que ma collègue Monique Cerisier-ben Guiga : les représentants des associations d'enfants adoptés majeurs doivent être associés à la composition de l'AFA.
Mme la présidente. L'amendement n° 23, présenté par Mmes Cerisier-ben Guiga, Campion et Le Texier, MM. Madec, Michel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 225-15 du code de l'action sociale et des familles, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'agence est dotée d'un collège consultatif composé de représentants d'associations de parents adoptifs, d'associations d'adoptés majeurs et d'organismes agréés pour l'adoption.
La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. C'est un amendement de repli, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L'amendement n° 22 vise à préciser quels sont les membres étatiques du GIP constitutif de l'AFA. Or, cette précision relève du statut de l'Agence et non pas de la loi. Pour cette raison, la commission émet un avis défavorable.
L'amendement n° 8 est relatif à la composition du conseil d'administration de l'AFA. Il ne semble pas que les enfants adoptés se soient déjà constitués en association. La commission demande donc à Mme Mathon de bien vouloir le retirer.
Quant à l'amendement n° 23, la commission demande à Mme Monique Cerisier-ben Guiga de bien vouloir le retirer au profit de l'amendement n° 3 de la commission, qui est plus complet.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Au nom du Gouvernement, je voudrais demander à M. le rapporteur de bien vouloir retirer l'amendement n° 3. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme Raymonde Le Texier. Ben voyons !
Mme Josiane Mathon. Ah non !
Mme Claire-Lise Campion. Supprimez les sénateurs !
Mme Raymonde Le Texier. A quoi servons-nous ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Cet amendement témoigne bien sûr de votre souci, monsieur le rapporteur, de veiller à ce que les associations de parents adoptifs et les organismes agréés pour l'adoption ne soient pas exclus de l'Agence française de l'adoption.
Le rôle que les associations et les organismes autorisés sont appelés à jouer au sein de cette agence est effectivement essentiel, car ils doivent pouvoir faire part de leurs expériences et de leur vécu. Toutefois, cela relève, en réalité, non pas de la loi, mais de la convention constitutive du groupement d'intérêt public sous la forme duquel l'agence sera créée, si vous adoptez, mesdames, messieurs les sénateurs, cette proposition de loi.
Je m'engage donc à prendre en compte votre souci et à veiller à ce que les associations de parents adoptifs et les organismes agréés pour l'adoption bénéficient d'une place particulière au sein de ce groupement d'intérêt public, afin qu'ils puissent faire valoir leurs expériences et leurs connaissances.
Mme Raymonde Le Texier. Ce n'est pas ce que nous demandons !
M. Philippe Bas, ministre délégué. Sous le bénéfice de cet engagement, je vous demande donc, monsieur le rapporteur, de bien vouloir retirer votre amendement.
Mme la présidente. Monsieur le rapporteur, l'amendement n° 3 est-il maintenu ?
M. Alain Milon, rapporteur. Ce matin, lors de la réunion de la commission des affaires sociales, j'ai indiqué que, si le Gouvernement s'engageait fermement à faire en sorte que les représentants des associations de parents adoptifs et les OAA soient des membres consultatifs au sein du conseil d'administration de l'AFA, je retirerais cet amendement.
Mme Raymonde Le Texier. C'est dur d'être dans la majorité !
M. Alain Milon, rapporteur. Non, madame Le Texier, ce n'est pas si difficile que cela !
Comme M. le ministre a pris cet engagement, je retire l'amendement n° 3.
Mme Raymonde Le Texier. C'est honteux !
Mme la présidente. L'amendement n° 3 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les autres amendements ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote sur l'amendement n° 20.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Mon explication de vote commencera par une protestation.
A quoi sert le Sénat ? Depuis trois ans, ce n'est pas la première fois que je participe à un débat au cours duquel, systématiquement, on fait retirer à la majorité les amendements qu'elle a déposés, on la fait voter contre les amendements déposés par l'opposition pour obtenir, au final, un vote conforme ! Dès lors, on évite une deuxième lecture par l'Assemblée nationale et par le Sénat, puis une réunion de la commission mixte paritaire.
C'est ainsi que la démocratie représentative est complètement dévalorisée dans notre pays.
Mme Raymonde Le Texier. C'est scandaleux !
Mme Josiane Mathon. C'est suicidaire !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Dans ces conditions, à quoi sert le Sénat ? A rien !
Lorsque nous examinons des mesures d'ordre législatif, vous avez systématiquement recours aux décrets, au règlement, aux circulaires alors que, s'agissant de la loi Fillon, vous nous avez fait adopter des dispositions qui relèvent, selon le Conseil constitutionnel, du domaine réglementaire. Tout cela ne tient vraiment pas debout !
Nous ne retirerons pas nos amendements, madame la présidente, et nous constatons que l'honneur du Sénat, sa raison d'être sont vraiment bafoués dans un tel débat. ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. L'amendement n° 21, présenté par Mmes Campion et Le Texier, MM. Madec et Michel, Mme Cerisier-ben Guiga et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 225-15 du code de l'action sociale et des familles par les mots suivants :
y compris les départements d'Outre-mer, les collectivités territoriales d'Outre-mer ou la Nouvelle Calédonie.
La parole est à Mme Claire-Lise Campion.
Mme Claire-Lise Campion. Cet amendement vise à préciser que les collectivités territoriales d'outre-mer ne sont pas oubliées.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Comme dans tous les départements, l'Agence française de l'adoption est compétente pour agir dans les départements d'outre-mer où elle disposera également d'un correspondant.
S'agissant des collectivités territoriales d'outre-mer et de la Nouvelle-Calédonie, compte tenu du faible nombre de candidats à l'adoption internationale qui y sont domiciliés, il conviendra de réfléchir à un système de représentation de l'Agence plus souple et moins coûteux.
Dans ces conditions, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° 24, présenté par Mmes Cerisier-ben Guiga, Campion et Le Texier, MM. Madec, Michel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 225-15 du code de l'action sociale et des familles par une phrase ainsi rédigée :
« Le statut et la protection sociale de ces correspondants sont déterminés par décret.
La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Cette fois, c'est moi qui demande qu'un point soit précisé par décret.
Mme Raymonde Le Texier. Le ministre ne sera pas d'accord !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Tout à fait ! Il suffit que je le demande pour que le ministre s'y oppose !
Je représente les Français établis hors de France, dont les recrutés locaux et les contractuels travaillant dans un certain nombre de ministères, notamment celui des affaires étrangères. Or, les correspondants de l'Agence française de l'adoption ne seront ni des contractuels ni des fonctionnaires du ministère des affaires étrangères.
Ils pourront être, par exemple, des fonctionnaires appartenant à d'autres collectivités. Dès lors, nous devons avoir la certitude qu'ils bénéficieront d'un détachement et qu'ils ne seront pas contraints de se mettre en disponibilité pour aller travailler à l'étranger, cas que nous connaissons à l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger.
S'il s'agit de contractuels, nous devons nous demander s'ils obtiendront le droit de séjourner et de travailler dans le pays où ils seront envoyés, et s'ils bénéficieront sur place d'une assurance maladie de source française. En effet, ils iront en Lettonie, en Ukraine, à Madagascar, en Colombie, au Vietnam, en Ethiopie, en Russie, en Chine, en Haïti..., autant de pays qui sont bien connus pour la « qualité » de leur protection sociale en matière d'assurance maladie, d'assurance chômage ou d'assurance vieillesse !
Je connais bien la situation des contractuels et des recrutés locaux du ministère des affaires étrangères ou de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger. C'est pourquoi je ne veux pas que les contractuels de l'Agence française de l'adoption subissent la même précarité sociale.
Cet amendement vise donc à ce que le statut et la protection sociale des correspondants de l'AFA soient déterminés par décret.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Vous ne vous étonnerez pas, madame Cerisier-ben Guiga, que la commission soit défavorable à cet amendement.
Les correspondants seront des salariés de l'AFA. La précision que vous demandez ressort donc du règlement de cette agence.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Certes, les correspondants seront des salariés de l'AFA, mais ils se trouveront à l'étranger et seront soumis, de ce fait, au droit du pays de résidence, si d'autres mesures ne sont pas prises en temps utile.
Il existe des milliers d'exemples de personnes ayant travaillé pour la France dans un grand nombre d'institutions à l'étranger, sans avoir bénéficié d'aucune garantie. Ainsi, un certain nombre d'enseignants de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger sont, pendant plusieurs mois, en situation irrégulière dans les pays où ils travaillent avant de bénéficier d'un contrat. C'est la France, Etat de droit, qui organise cela ! Des milliers de contractuels du ministère des affaires étrangères se retrouvent aujourd'hui, à mon âge, dans la misère parce que, jamais, on ne les a fait cotiser à une caisse de retraite.
Et il faudrait accepter aujourd'hui d'envoyer des correspondants de l'AFA dans des pays du type de ceux que j'ai cités, sans prévoir leur statut, en se contentant de répondre qu'ils seront salariés ? Cet argument est bien léger ! Ne travaillant pas en France, ils ne bénéficieront nullement des droits des salariés français !
Je maintiens donc cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Je précise de nouveau que l'Agence française de l'adoption établira un règlement qui fixera le statut de ses salariés.
Mme la présidente. L'amendement n° 25, présenté par Mmes Cerisier-ben Guiga, Campion et Le Texier, MM. Madec, Michel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 225-15 du code de l'action sociale et des familles, remplacer les mots :
principes d'égalité et de neutralité
par les mots :
principes d'égalité, de neutralité et de laïcité
La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Cet amendement vise à ajouter le concept de laïcité à ceux d'égalité et de neutralité, peut-être parce que la France célèbre cette année le centenaire de la loi sur la séparation de l'Eglise et de l'Etat, mais surtout parce que, de façon tout à fait compréhensible, un certain nombre d'OAA se sont constitués sur des bases confessionnelles. Or, ces OAA vont faire partie de l'Agence française de l'adoption, mais nous n'avons pas de réelles garanties sur leur caractère consultatif : le Gouvernement prévoit qu'il sera fixé par décret, mais il n'en précise pas le contenu.
Certes, le critère confessionnel est tout à fait respectable pour les personnes qui appartiennent à ces religions et qui passent par ces organismes pour adopter des enfants. Pour autant, il ne faudrait pas que, d'une manière directe ou indirecte, des associations confessionnelles pèsent sur les choix d'un service public délégué.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. L'AFA est une agence nationale publique. A ce titre, elle obéit aux exigences de laïcité.
Cette précision paraît donc inutile et la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Madame la sénatrice, le Gouvernement partage entièrement votre souci : l'Agence française de l'adoption doit respecter le principe de laïcité. Mais quelle meilleure garantie que la Constitution pour assurer le respect de ce principe ? S'il était violé, les juges appliqueraient tout naturellement la Constitution ! Il n'est donc point besoin d'ajouter une disposition spécifique dans cette proposition de loi. Ou alors, il faudrait le faire pour toutes les lois de la République !
Contentons-nous de la Constitution, qui suffit à garantir le respect du principe de laïcité par ce nouvel organisme.
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Ce raisonnement est aussi valable pour l'égalité et la neutralité, qui sont des principes constitutionnels au même titre que la laïcité. (M. Michel Mercier acquiesce.)
Mme Raymonde Le Texier. Absolument !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Dans ce cas, qu'on les supprime également !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 4.
(L'article 4 est adopté.)
Article additionnel après l'article 4
Mme la présidente. L'amendement n° 9, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l'article 370-3 du code civil est supprimé.
La parole est à Mme Eliane Assassi.
Mme Eliane Assassi. La loi du 6 février 2001 dispose que « l'adoption d'un mineur étranger ne peut être prononcée si sa loi personnelle prohibe cette institution, sauf si ce mineur est né et réside habituellement en France ».
Par conséquent, les enfants nés dans les pays de droit coranique ne peuvent être adoptés par des candidats de nationalité française. Or ces enfants sont d'ores et déjà accueillis par des couples français dans le cadre d'une kafala judiciaire, qui est « le recueil légal des enfants abandonnés ou dont les parents s'avèrent incapables d'assurer l'éducation ».
Avant l'introduction de cette disposition dans l'article 370-3 du code civil, le juge appréciait au cas par cas la situation des enfants et prononçait le plus souvent une adoption, qu'elle soit simple ou plénière. Depuis 2001, la France s'interdit d'accepter ces enfants sur son territoire dans le cadre de la procédure d'adoption.
Dans son rapport annuel pour 2004, la Défenseure des enfants, Mme Claire Brisset, dénonce cet état de fait : « Il s'agit d'un véritable recul dans la prise en compte de l'intérêt de ces enfants, pour lesquels la jurisprudence antérieure de la Cour de cassation ouvrait cette possibilité. [...] Dans le cas d'un projet d'adoption par des ressortissants français d'un enfant sans filiation établie, abandonné au Maroc ou en Algérie, et dans la mesure où le tuteur public de cet enfant donne son accord, ce qui est fréquent, il est tout à fait discutable que l'on veuille continuer d'appliquer la législation marocaine ou algérienne à un enfant potentiellement français. »
La situation actuelle fait de ces enfants qui ne sont pas adoptables tout en étant abandonnés des enfants au « milieu du gué », pour reprendre une expression utilisée en 1996 par M. Jean-François Mattei dans son rapport établi au nom de la commission spéciale de l'Assemblée nationale.
L'objet de cet amendement est de permettre à ces enfants d'avoir un lien de filiation avec leurs parents de coeur.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Lors de la discussion générale, M. le ministre délégué est intervenu à deux reprises sur ce sujet. Dans mon discours liminaire, j'ai également évoqué cette question à laquelle, vous le savez, je suis personnellement très sensible.
Toutefois, la commission des affaires sociales a considéré que cette question n'entrait pas dans le champ de la proposition de loi que nous examinons ici, lequel se limite à l'organisation des procédures d'adoption. En revanche, ce problème mérite d'être examiné et traité à l'avenir.
La commission demande donc le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Gouvernement est lui aussi très sensible à cette question, comme j'ai eu l'occasion de le souligner lors de la discussion générale. Ce point devra donc faire l'objet de réflexions approfondies, et pourra, le cas échéant, être traité dans une phase ultérieure.
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Je m'abstiendrai sur cet amendement.
En effet, il nous faut examiner attentivement les difficultés que soulève la kafala, en particulier au Maroc et en Algérie où le problème se pose de manière plus fréquente.
Lors de l'examen de précédents textes relatifs à l'adoption, j'avais moi-même déposé des amendements visant à assimiler la kafala algérienne à une adoption simple. Depuis la réforme de la moudawana, il pourrait en être de même pour la kafala judiciaire marocaine. Je précise qu'une kafala notariée existe également.
Je tiens à mettre en garde contre les risques d'impérialisme judiciaire et culturel qui nous guettent : ne pas respecter la législation interne de pays partenaires demande une réflexion approfondie, et il nous faut plutôt envisager une négociation avec ces Etats. Nous devons nous attendre à ce que ces derniers établissent une discrimination confessionnelle et n'accordent la kafala qu'à des personnes musulmanes qui offriront des garanties d'éducation religieuse des enfants.
Il ne s'agit donc pas ici d'une adoption neutre et laïque, comme en France. Ce problème est difficile, voire douloureux, pour les familles françaises originaires de pays musulmans, qui, c'est vrai, préfèrent se tourner vers ces pays-là, où de nombreux enfants attendent d'être adoptés.
Comme d'habitude, en France, on laisse de côté l'adoption simple. Or il serait bon, dans la réflexion qui nous attend, de considérer, à côté de l'adoption plénière, l'adoption simple comme un moyen efficace de régler le problème des enfants pris en charge par la kafala, sans qu'il soit pour autant attenté à la souveraineté des pays du sud de la Méditerranée.
Mme la présidente. Madame Assassi, l'amendement n° 9 est-il maintenu ?
Mme Eliane Assassi. Je suis satisfaite d'avoir entendu M. le rapporteur et M. le ministre dire qu'ils étaient très sensibles à cette question et que celle-ci fera l'objet d'un débat approfondi. Nous le souhaitons également.
Néanmoins, et tout le monde le comprendra, dans le contexte du débat d'aujourd'hui, je maintiens cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 9.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 5
Au premier alinéa de l'article L. 331-7 du code de la sécurité sociale, les mots : « ou un organisme autorisé pour l'adoption » sont remplacés par les mots : «, un organisme français autorisé pour l'adoption ou l'Agence française de l'adoption ». - (Adopté.)
Article 6
Dans la première phrase du cinquième alinéa de l'article L. 122-26 du code du travail, les mots : « ou un organisme autorisé pour l'adoption » sont remplacés par les mots : «, un organisme français autorisé pour l'adoption ou l'Agence française de l'adoption ». - (Adopté.)
Articles additionnels après l'article 6
M. le président. L'amendement n° 34, présenté par Mme Dini et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans la première phrase du cinquième alinéa de l'article L. 122-26 du code du travail, les mots : « à dater de l'arrivée de l'enfant au foyer » sont remplacés par les mots : « pour accueillir l'enfant au foyer dans des conditions fixées par voie réglementaire ».
La parole est à Mme Muguette Dini.
Mme Muguette Dini. Cet amendement vise à prévoir un congé avant l'arrivée de l'enfant au foyer.
De même que la naissance d'un enfant est un événement familial que les parents doivent préparer dans les meilleures conditions, il semble souhaitable que les parents aient le droit de suspendre leur contrat de travail, non à dater de l'arrivée effective de l'enfant adopté, mais plus tôt, afin de l'accueillir au mieux et d'effectuer les formalités nécessaires dans son pays d'origine.
Le pouvoir réglementaire devrait pouvoir fixer une échéance antérieure à l'arrivée effective de l'enfant et cet amendement a pour objet de le permettre.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement est satisfait par l'état actuel du droit, qui permet au salarié adoptant de cesser son activité, dans le cadre de ses congés d'adoption, sept jours avant l'arrivée de l'enfant à son foyer.
Pour cette raison, la commission demande le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Madame Dini, l'amendement n° 34 est-il maintenu ?
Mme Muguette Dini. Non, je le retire, madame la présidente.
Toutefois, permettez-moi de faire remarquer que, lorsqu'il s'agit de se rendre à l'étranger et de faire connaissance avec l'enfant adopté, qui se trouve probablement encore dans une institution, sept jours ne sont guère suffisants ! C'est pourquoi il faut envisager sérieusement d'allonger ce congé.
Mme la présidente. L'amendement n° 34 est retiré.
L'amendement n° 27, présenté par Mmes Campion et Le Texier, MM. Madec et Michel, Mme Cerisier-ben Guiga et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 331-7 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Elle est aussi accordée pendant le congé défini à l'article L. 122-28-10 du code du travail. »
La parole est à Mme Claire-Lise Campion.
Mme Claire-Lise Campion. Selon le droit en vigueur, la période de congé dont bénéficie le salarié titulaire d'un agrément ne donne pas droit à une indemnité journalière de repos. L'amendement vise à permettre au salarié de percevoir cette indemnité.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Le salarié qui part à l'étranger en vue d'adopter un enfant bénéficie, s'il est titulaire d'un agrément, d'un congé non rémunéré de six semaines. Dans ce cadre, l'indemnité de repos ne lui est évidemment pas versée dans la mesure où il n'accueille pas encore l'enfant
Dans ces conditions, la commission a émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 27.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 6 bis
I. - Dans le premier alinéa de l'article L. 122-30 du code du travail, la référence : « L. 122-28-7 » est remplacée par la référence : « L. 122-28-10 ».
II. - Les modalités d'application du présent article seront précisées par décret. - (Adopté.)
Articles additionnels avant l'article 7
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 10, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Le cinquième alinéa de l'article L. 122-26 du code du travail est ainsi modifié :
1° Dans la première phrase, le mot : « dix » est remplacé par le mot : « seize », et le mot : « vingt-deux » est remplacé par le mot : « vingt huit ».
2° Dans la deuxième phrase, le mot : « dix-huit » est remplacé par le mot : « vingt-deux ».
3° Dans la troisième phrase, après les mots : « sept jours calendaires » sont ajoutés les mots : « ou six semaines en cas d'adoption internationale ».
II. La perte de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Josiane Mathon.
Mme Josiane Mathon. Je défendrai ensemble les amendements nos 10 et 11, qui ont trait tous deux au congé parental en cas d'adoption.
Ces amendements sont directement inspirés de la proposition de loi relative aux congés parentaux en cas d'adoption qu'a élaborée M. Yves Nicolin, auteur de la présente proposition de loi. Ils sont également motivés par le fait que le Gouvernement, dans son projet de loi portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique, prévoit de supprimer le congé parental en cas d'adoption auquel a droit un fonctionnaire, au motif qu'il faut aligner les droits des fonctionnaires sur ceux des salariés, même si cela se fait au détriment de la famille.
Pourquoi vouloir toujours tirer les droits sociaux vers le bas, au lieu d'assurer une meilleure protection aux salariés, en l'occurrence à leurs enfants ?
Ces amendements visent donc à permettre aux parents adoptifs de prendre un congé supplémentaire d'une durée de six semaines, et ce dans tous les cas de figure.
En effet, s'agissant de la période précédant l'adoption, les dispositions du code du travail et du code de la sécurité sociale prévoient la possibilité de prendre une partie du congé d'adoption dans les sept jours qui précèdent l'arrivée de l'enfant. Par ailleurs, en application de l'article L. 122-28-10 du code du travail, tout salarié titulaire de l'agrément en vue de l'adoption a le droit de bénéficier d'un congé non rémunéré d'une durée maximale de six semaines s'il se rend dans les départements ou territoires d'outre-mer ou à l'étranger pour adopter son enfant.
Mais ce délai est parfois insuffisant, compte tenu des incertitudes qui pèsent sur la date d'arrivée au foyer de l'enfant. C'est pourquoi nous proposons ce congé supplémentaire de six semaines, qui pourra être pris avant l'arrivée de l'enfant au foyer ou réparti, selon le souhait des parents, entre la période précédant l'adoption et celle qui suit l'arrivée de l'enfant au foyer.
Mme la présidente. L'amendement n° 26, présenté par Mmes Campion et Le Texier, MM. Madec et Michel, Mme Cerisier-ben Guiga et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le cinquième alinéa de l'article L. 122-26 du code du travail est ainsi modifié :
I. - Dans la première phrase, le mot : « dix » est remplacé par le mot : « seize », et le mot : « vingt-deux » est remplacé par le mot : « vingt-huit ».
II. - Dans la deuxième phrase, le mot : « dix-huit » est remplacé par le mot : « vingt-deux ».
III. - Dans la troisième phrase, après les mots : « sept jours calendaires » sont ajoutés les mots : « ou six semaines en cas d'adoption internationale ».
La parole est à Mme Claire-Lise Campion.
Mme Claire-Lise Campion. S'agissant de l'adoption, il nous paraît essentiel de reconnaître aux parents qui adoptent un enfant les mêmes droits qu'à l'ensemble des parents. Nous l'avons dit à diverses reprises cet après-midi, la procédure est souvent lourde, longue et complexe, source d'angoisse, d'incertitudes, sans oublier la crainte qu'elle ne puisse aboutir.
Il importe donc d'accorder aux parents une tranquillité d'esprit au moment de l'arrivée de l'enfant. En leur accordant les mêmes droits qu'aux parents naturels, l'Etat reconnaîtrait ainsi leur fonction de parents.
Ainsi, cet amendement a un double objet. D'une part, il s'agit, comme le prévoit la proposition de loi no 1361 à l'Assemblée nationale, d'accroître le congé d'adoption en alignant sa durée sur celle qui a été prévue pour le congé maternité. D'autre part, il s'agit de faire passer de sept jours calendaires à six semaines le congé antérieur à l'adoption. Il convient en effet de prolonger ce congé pour l'adoption internationale, car de nombreux pays exigent la présence des candidats à l'adoption pendant une durée supérieure à sept jours, ainsi que nous l'avons dit précédemment.
Mme la présidente. L'amendement n° 11, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. L'article L. 331-7 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Dans la première phrase du deuxième alinéa, le mot : « dix » est remplacé par le mot : « seize », et le mot : « vingt-deux » est remplacé par le mot : « vingt-huit ».
2° Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « En cas d'adoption internationale, la période d'indemnisation est de six semaines avant la date prévue de cette arrivée ».
3° Dans le troisième alinéa, le mot : « dix-huit » est remplacé par le mot : « vingt-deux »
II. La perte de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement a déjà été présenté.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. S'agissant des amendements nos 10 et 26, il ne nous semble pas opportun de prévoir la même durée pour le congé de maternité, dont la phase préalable à la naissance constitue une nécessité de santé pour la mère, et pour le congé d'adoption. La durée de ce congé d'adoption s'établit en outre déjà à dix semaines rémunérées, ce qui paraît suffisant pour accueillir l'enfant adopté. C'est pourquoi la commission émet un avis défavorable.
Concernant l'amendement n° 11, comme pour l'amendement n° 10 dont il constitue le pendant, la commission émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Le Texier, pour explication de vote sur l'amendement n° 10.
Mme Raymonde Le Texier. En ce qui concerne l'extension du congé de maternité, notamment prénatal, on a bien compris l'intérêt qu'une telle mesure peut présenter lorsqu'il s'agit de séjourner à l'étranger pendant trente ou quarante jours, selon les cas, avant de revenir avec son enfant.
S'agissant de l'adoption en France, on demande aux parents adoptants de prendre progressivement contact avec l'enfant pendant un mois, par des sensibilisations ou préparations, des adaptations à la crèche, à raison d'une heure la première journée, de deux heures le lendemain, etc.
Cela devrait conduire les parents à courir comme des fous après leurs heures de travail pour cette rencontre avec leur enfant, dont on perçoit bien l'intérêt. Or, en fait, ils ne courent pas tant que ça. En effet, dans la plupart des cas, les employeurs ont de l'empathie à l'égard de ces parents, ils comprennent leur démarche et ils les autorisent à s'absenter.
Il me semble paradoxal que les employeurs soient plus sensibles à ce problème que les parlementaires ou le Gouvernement. Aussi, je souhaite que nous ne soyons pas trop « pingres » et que nous adoptions cet amendement.
Il en est de même pour la demande de rétribution de ce long séjour à l'étranger lorsqu'il s'agit d'aller prendre contact avec son enfant. Il est discriminatoire d'accorder un congé prénatal rémunéré à une femme qui aura un enfant biologique et de ne pas l'accorder à une femme ou à un homme qui doit aller à l'autre bout du monde pendant un mois pour revenir avec son enfant.
Hélas ! je prêche dans le désert. Monsieur le ministre, vous devriez tout de même être un peu plus sensible à ce type de problème !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 11.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 7
Le premier alinéa de l'article L. 531-2 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le montant de la prime est majoré en cas d'adoption. » - (Adopté.)
Article additionnel après l'article 7
Mme la présidente. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 1 rectifié est présenté par Mme Dini et les membres du groupe Union centriste-UDF.
L'amendement n° 29 est présenté par Mmes Campion et Le Texier, MM. Madec, Michel et Cazeau, Mme Cerisier-ben Guiga et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I - Pour les collectivités territoriales, les charges éventuelles qui résulteraient de l'application de la présente loi, sont compensées par le relèvement à due concurrence de la dotation globale de décentralisation.
II - Pour l'Etat, les charges éventuelles qui résulteraient de l'application de cette loi sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III - Pour les organismes de sécurité sociale, les charges éventuelles qui résulteraient de l'application de cette loi sont compensées à due concurrence par l'institution d'une contribution additionnelle à la contribution visée à l'article L. 137-7-1 du code de la sécurité sociale.
La parole est à Mme Muguette Dini, pour défendre l'amendement n° 1 rectifié.
Mme Muguette Dini. Il s'agit, par cet amendement, d'aider les départements à assumer les nouvelles charges auxquelles ils vont devoir faire face.
Avant cette réforme, seule la compétence d'agrément des candidats à l'adoption relevait de la responsabilité du président du conseil général. Désormais, la mise en place de l'Agence française de l'adoption associera le département à de nouvelles missions et fera appel à sa participation financière.
Cette réforme se traduit en effet par de nouvelles attributions et de nouvelles responsabilités : dans le domaine de l'adoption internationale en termes d'accompagnement des adoptants, déjà agréés ; au sein de l'Agence française de l'adoption, puisqu'un référent du conseil général y sera désigné.
Selon l'esprit des lois de décentralisation, les départements ont regretté que la réforme résultant des travaux de l'Assemblée nationale ne prévoie pas l'attribution de ressources par l'Etat aux collectivités départementales. Cet amendement répare cet oubli à un moment où les dépenses sociales grèvent de manière très sensible les budgets départementaux.
Mme la présidente. La parole est à Mme Claire-Lise Campion, pour défendre l'amendement n° 29.
Mme Claire-Lise Campion. De plus en plus, si nous n'y prenons garde, les départements sont confrontés à des transferts de charges sans que celles-ci soient compensées. Je n'aurai pas ce soir l'outrecuidance de remonter dans le temps. Je rappellerai simplement que voilà quelques mois, dans cet hémicycle, lors du débat sur le statut des assistants maternels et familiaux, il a fallu batailler pour que la compensation puisse apparaître dans la loi et pour que les départements ne soient pas pénalisés financièrement.
Ce soir, avec cette proposition de loi sur l'adoption, se pose de nouveau la question du financement des charges nouvelles pour les départements.
Avant cette réforme, seule la compétence d'agrément des candidats à l'adoption relevait de la responsabilité du président du conseil général. Désormais, la mise en place d'une agence française de l'adoption, l'AFA, associera le département à de nouvelles missions et fera appel à sa participation financière. Cette réforme se traduit en effet par de nouvelles attributions et de nouvelles responsabilités : dans le domaine de l'adoption internationale en termes d'accompagnement des adoptants, déjà agréés ; au sein de l'Agence française de l'adoption, puisqu'un référent du conseil général y sera désigné.
Selon l'esprit des lois de décentralisation, les départements ont regretté que la réforme issue des travaux de l'Assemblée nationale ne prévoie pas l'attribution de ressources par l'Etat aux collectivités départementales. Cet amendement répare cet oubli, à un moment où les dépenses sociales grèvent de manière très sensible les budgets départementaux. Est-il besoin de le rappeler, une fois encore ?
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Nous partageons le souci des auteurs de ces amendements de ne pas voir les départements financer l'essentiel de la réforme proposée pour le système d'adoption. Cependant, la création d'un GIP comme support de l'Agence française de l'adoption permet de mutualiser les financements des différents partenaires, ce qui nous a paru éviter l'écueil que vous désignez.
Voilà pourquoi la commission demande le retrait de ces amendements. A défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Même avis et même demande de retrait.
Les dispositions de la proposition de loi visent essentiellement à clarifier les modalités d'accompagnement de l'adoption par les services départementaux, qui, aujourd'hui, sont déjà des acteurs majeurs de cette politique. Il s'agit de clarifier les compétences, d'améliorer la procédure de l'adoption et de mieux coordonner les actions des différents partenaires.
Je voudrais donc rassurer les auteurs de ces amendements en leur indiquant qu'il n'est pas nécessaire d'introduire dans cette proposition de loi des dispositions relatives à la compensation, tout simplement parce qu'elle n'implique pas de charges nouvelles.
Mme la présidente. L'amendement n° 1 rectifié est-il maintenu ?
M. Michel Mercier. Monsieur le ministre, je comprends bien la nécessité d'un vote conforme pour que l'Agence puisse être créée. Je suis d'accord pour qu'elle le soit parce qu'elle constitue progrès.
Cependant, on ne peut pas gommer tous les problèmes en disant qu'ils n'existent pas.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Bravo !
M. Michel Mercier. Ce n'est pas la première fois que je tiens de tels propos ici et je les réitérerai chaque fois qu'il le faudra !
Vous nous avez fort bien expliqué, monsieur le ministre, qu'il était urgent de créer l'Agence, et je le crois. C'est l'objet essentiel de la proposition de loi et on va vous permettre de le faire en adoptant le texte conforme
Néanmoins, cela ne signifie pas qu'il n'y a pas de problème, notamment financier, et que tout est réglé. M. le rapporteur et vous-même auriez dû nous dire : un problème se pose, nous en sommes conscients ; on ne peut pas le régler maintenant, mais nous prenons l'engagement de le résoudre à l'occasion de l'examen d'un prochain texte, dès que cela sera possible.
Les parlementaires sont des gens responsables et ils peuvent comprendre qu'il existe un certain nombre d'urgences, une gradation et que, aujourd'hui, ce qui importe avant tout, c'est de créer l'Agence. A cet effet, même si nous n'aimons pas beaucoup procéder ainsi, nous allons, je le répète, voter ce texte, car il y a un objectif.
Vous ne pouvez pas nier, cependant, les problèmes qui se posent ; je pense notamment à la compensation financière pour les départements. Il faudra nous aider à résoudre cette difficulté. Monsieur le ministre, compte tenu du nombre de textes que vous aurez à défendre devant le Sénat, vous trouverez facilement l'occasion de le faire !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Bas, ministre délégué. Je tiens à répondre à M. Mercier on ne peut plus clairement.
J'ai dit à l'instant que la proposition de loi avait pour objet de modifier des procédures et qu'elle n'impliquait pas en elle-même de charges nouvelles. Toutefois, si un problème survenait au moment de la mise en place de l'Agence, nous en discuterions ensemble, naturellement.
M. Michel Mercier. Très bien !
Mme Muguette Dini. Dans ces conditions, je retire l'amendement n° 1 rectifié, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 1 rectifié est retiré.
Madame Campion, qu'en est-il de l'amendement n° 29 ?
Mme Claire-Lise Campion. Je le maintiens, madame la présidente.
Mme la présidente. L'article 8 a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Intitulé de la proposition de loi
Mme la présidente. L'amendement n° 12, présenté par Mmes Campion et Le Texier, MM. Madec et Michel, Mme Cerisier-ben Guiga et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit l'intitulé de la proposition de loi :
Proposition de loi portant diverses dispositions relatives à l'adoption.
La parole est à Mme Claire-Lise Campion.
Mme Claire-Lise Campion. Ce texte, dont nous apprécions certaines dispositions - j'ai eu l'occasion de le dire au cours de la discussion générale -, est cependant très incomplet. S'il apporte un plus, notamment quant à la procédure d'agrément, il nous laisse dans l'expectative s'agissant de la problématique de l'adoption ; il crée même de la confusion dans notre paysage institutionnel.
Sont abordés, ici, quelques points, mais on ne répond pas à l'ensemble des questions fondamentales que pose aujourd'hui l'adoption. D'ailleurs, comme l'a très bien rappelé ma collègue Raymonde Le Texier, la précipitation dans laquelle s'est déroulée la discussion de ce texte et la forme qu'elle a revêtue - une proposition de loi adoptée à l'Assemblée Nationale dans le cadre d'une niche parlementaire - attestent plus d'une « réformette » que d''une véritable réforme.
Par conséquent, parler d'une réforme de l'adoption au détour de l'examen de cette proposition de loi nous semble une erreur : c'est donner de l'espoir à des centaines de familles, qui risquent d'être considérablement déçues. On sait leur attente !
Telles sont les raisons qui nous conduisent à proposer de nous rapprocher de la réalité des choses en modifiant l'intitulé de cette proposition de loi. Nous espérons, monsieur le ministre, qu'un projet de loi tendant à répondre aux vrais problèmes sera prochainement inscrit à notre ordre du jour, qu'il sera l'occasion d'une véritable consultation et qu'il donnera des espoirs fondés à tous ceux qui sont aujourd'hui dans l'attente d'une adoption.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission est bien entendu défavorable à cet amendement. Quoi que l'on puisse en penser, cette proposition de loi constitue bien une réforme des procédures d'adoption.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. A force de baptiser « réforme » tout et n'importe quoi, on finit par dévaloriser l'idée même de réforme dans ce pays. (Protestations sur les travées de l'UMP.) Cette phraséologie de la réforme qui ne correspond plus à rien, à laquelle on recourt à tout propos, coupe progressivement ceux qui l'emploient du pays profond. On en a vu le résultat à l'occasion du récent référendum.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 12.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Vote sur l'ensemble
Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à Mme Monique Papon, pour explication de vote.
Mme Monique Papon. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte dont nous avons débattu aujourd'hui est le fruit d'une réflexion approfondie sur l'adoption.
Cette réflexion a pris en compte l'évolution du phénomène de l'adoption, avec le recours de plus en plus fréquent à l'adoption internationale, souvent en dehors du cadre des organismes agréés pour l'adoption. Elle a également pris en compte les insuffisances du système, pour déboucher sur des solutions concrètes.
Je vous remercie, monsieur le rapporteur, de la grande attention que vous avez prêtée au texte et de la clarté des explications que vous nous avez données lors des réunions de la commission des affaires sociales.
Je salue également l'action du Gouvernement, qui veillera à la mise en place de la réforme avec un grand souci de protection de la famille et de l'enfant. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre concours et de votre parfaite attention.
Dans tous les cas, et quel que soit son âge, l'enfant adopté a son histoire, plus ou moins longue, souvent difficile, faite d'éléments connus ou non. L'accompagnement prévu dans la proposition de loi revêt donc une grande importance pour cet enfant, issu bien souvent, comme nous l'avons vu, d'un autre pays, imprégné d'habitudes de vie différentes et pouvant manifester des difficultés à s'adapter à sa nouvelle famille.
L'accompagnement sera également très positif pour les futurs parents, en les aidant à réfléchir sur leurs motivations et leurs attentes. La qualité de l'écoute qui leur sera accordée présentera une grande importance pour permettre le passage de l'attente d'un enfant imaginé à la préparation de l'arrivée d'un enfant bien réel.
Comme nous l'avons souligné aujourd'hui, l'harmonisation des procédures d'agrément évitera l'apparition de situations d'injustice et apportera une cohérence qui manquait. La phase du suivi des dossiers des adoptants en demande d'agrément bénéficiera de plusieurs améliorations ; des soutiens sociaux et financiers seront apportés ; l'Agence française de l'adoption ouvrira une nouvelle voie ; encadrés, les futurs parents auront sans doute moins l'impression d'accomplir un parcours du combattant...
Une étape importante est donc franchie, qui sera complétée dans l'avenir par d'autres, toujours dans le sens de la protection de la famille et de l'intérêt prioritaire de l'enfant.
En raison de la qualité des mesures présentées, j'ose espérer, mes chers collègues, que ce texte recueillera l'unanimité de vos suffrages. Pour sa part, bien évidemment, le groupe de l'UMP votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Claire-Lise Campion, pour explication de vote.
Mme Claire-Lise Campion. Je voudrais, à l'occasion de cette explication de vote, revenir sur nos conditions de travail.
Nous avons commencé l'examen de ce texte à quinze heures ; et nous l'achevons maintenant alors qu'il n'est pas encore vingt heures, et sans qu'un vrai débat ait pu avoir lieu. Au cours de la discussion, tous les amendements ont été écartés, balayés d'un revers de main, bien que la question de l'adoption suscite des attentes fortes.
Après cinq années de présence ici au Sénat, je ne puis me prévaloir d'une très grande ancienneté, mais je me souviens avoir eu la chance de pouvoir travailler dans un autre esprit au début de mon mandat. Je regrette que, s'agissant d'un problème aussi important que l'adoption, nous ne puissions plus bénéficier des mêmes conditions qu'alors pour conduire notre réflexion, car il y avait un vrai débat à mener, au nom des enfants et au nom des parents qui désirent adopter.
Nous ne pouvons donc être très fiers de la façon dont nous avons travaillé cet après-midi au Sénat. Nous pourrions même en arriver à douter de notre rôle de parlementaires dans la démocratie qui est la nôtre : ce soir un vote conforme nous est de fait demandé sur un texte dont l'examen n'aura duré que quelques heures, demain le Gouvernement procédera par ordonnances, alors même, Mme Cerisier-ben Guiga l'a rappelé, que nos concitoyens viennent d'exprimer fortement leurs doutes. Une telle attitude me semble être de l'ordre du suicide politique. Pourquoi, dans ces conditions, ne pas supprimer, totalement ou partiellement, le Parlement ?
S'agissant du texte, il comporte, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire au nom des membres de mon groupe, de bonnes mesures, quoique insuffisantes. M. le rapporteur, M. le ministre et M. le président de la commission nous ont dit que nous aurions d'autres débats sur l'adoption : nous les attendons avec impatience, tant nous sommes frustrés par les conditions de la discussion de cet après-midi.
En tout état de cause, nous nous abstiendrons sur ce texte.
Mme la présidente. La parole est à Mme Muguette Dini, pour explication de vote.
Mme Muguette Dini. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre discussion aura permis de constater que cette proposition de loi est très en deçà de l'attente des couples et des services de l'enfance, sans parler de celle des enfants, puisque ces derniers n'ont malheureusement pas le droit à la parole.
Pouvez-vous imaginer, monsieur le ministre, la déception de tous les couples concernés par l'adoption, qui attendaient de la mise en oeuvre de ce texte de nombreuses réformes et qui vont découvrir que, sous l'intitulé « réforme de l'adoption », n'était en réalité envisagée que la création de l'Agence française de l'adoption ?
Loin de moi cependant l'idée de critiquer cette création : elle représentait une nécessité, et était attendue depuis très longtemps. N'aurait-il pas mieux valu, dès lors, intituler le texte « proposition de loi portant création de l'Agence française de l'adoption » ?
Au-delà de cette remarque de fond, je voudrais revenir sur la forme. Je sais, monsieur le ministre, que la responsabilité de suivre ce dossier ne vous est échue que très récemment. Cette proposition de loi, dont on parle depuis un an, est-elle tout à coup devenue tellement urgente que l'on ne puisse en modifier une virgule ? (Mme Monique Cerisier-ben Guiga applaudit.)
Sans que vous l'ayez dit clairement, c'est bien à un vote conforme que, avec beaucoup de courtoisie, vous nous avez conviés. Je le regrette. Cela pose la question de l'exercice de notre démocratie. En effet, à quoi servirait le Sénat si, tout à coup, le Gouvernement décidait que tous les textes doivent être votés conformes ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
D'autres que moi ont entendu récemment M. le président du Sénat demander au nouveau Premier ministre de ne plus recourir à cette pratique. Il ne semble pas avoir été entendu.
Plus prosaïquement, je me demande ce que je vais bien pouvoir répondre à tous ceux de mes correspondants que j'ai sollicités et qui, sachant que j'allais intervenir sur ce sujet, avaient placé beaucoup d'espoirs dans la future loi et dans les amendements que j'ai présentés. Certains de ceux-ci m'avaient été suggérés par des couples, d'autres par les services d'aide à l'enfance... On ne pourra pas indéfiniment les laisser sans réponse.
J'ai pris bonne note, monsieur le ministre, de votre attention aux questions qui n'ont pas reçu de réponse au travers de ce texte et de votre volonté de compléter et d'améliorer l'ensemble des dispositions concernant l'adoption. Il n'est bien sûr pas question pour le groupe de l'Union centriste-UDF, que je représente ici, d'entraver en quoi que ce soit la création de l'Agence française de l'adoption. Nous voterons donc ce texte sans réserves, dans l'attente d'une nouvelle réforme qui devra voir le jour très rapidement. Je déposerai une proposition de loi allant dans ce sens.
Mme la présidente. La parole est à Mme Josiane Mathon, pour explication de vote.
Mme Josiane Mathon. Il eût été à mon sens préférable et plus honorable, monsieur le ministre, d'avouer que vous souhaitiez un vote conforme, comme nous le redoutions tous ici.
Cela étant, je regrette que certains de mes collègues aient accepté une sorte d' « euthanasie politique » en retirant leurs amendements au lieu de les maintenir. Je déplore sincèrement, madame Dini, que vous ayez fait ce choix.
En effet, je crois que ce texte méritait beaucoup mieux. Des amendements très intéressants avaient été déposés, qui permettaient de progresser, mais le travail accompli n'aura servi à rien. Cela est tout à fait regrettable pour la démocratie, pour toutes les associations qui sont dans l'attente.
Nous espérons que c'est la dernière fois qu'un débat se déroule dans de telles conditions.
Mmes Monique Cerisier-ben Guiga et Raymonde Le Texier. Vous rêvez !
Mme Josiane Mathon. Quoi qu'il en soit, nous nous abstiendrons sur ce texte.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Pelletier, pour explication de vote.
M. Jacques Pelletier. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, comment améliorer l'accompagnement des candidats à l'adoption sans perdre de vue que l'essentiel demeure l'intérêt de l'enfant ? Voilà la question difficile et délicate à laquelle nos collègues de l'Assemblée nationale ont souhaité apporter une réponse au travers de cette proposition de loi.
Les chiffres montrent que l'écart entre le nombre des familles demandeuses et le nombre d'enfants français pouvant être adoptés ne cesse de s'accroître - cela est heureux -, ce qui explique le recours de plus en plus important à l'adoption internationale : 8 000 nouvelles familles s'ajoutent chaque année aux 25 000 familles possédant déjà un agrément. L'adoption internationale fait naître le besoin d'une meilleure coordination entre la France et les pays tiers. A l'évidence, la création de l'Agence française de l'adoption permet de satisfaire cette attente.
La démarche des adoptants correspond, dans la quasi-totalité des cas, à la dernière étape d'un processus longuement mûri, qui répond à l'un des besoins les plus profonds de l'être humain : élever, accompagner un enfant, aider à son épanouissement, et finalement lui transmettre une part de soi-même pour lui permettre de faire face au monde.
La présente proposition de loi, comme l'a rappelé M. le rapporteur, n'avait pas pour objet de « reformater » le droit de l'adoption. Elle vise simplement à offrir de nouvelles garanties, qui permettront d'améliorer les procédures.
Je regrette moi aussi, bien évidemment, que le vote conforme devienne, dans notre assemblée, une mauvaise habitude.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Très mauvaise !
M. Jacques Pelletier. En effet, les navettes parlementaires permettent souvent d'améliorer les textes.
L'harmonisation des critères d'agrément, ou encore l'amélioration du suivi social de l'enfant constituent cependant autant de progrès notables, répondant à des nécessités qui appelaient une prise de position de la part du législateur.
Plus largement, ce débat sur l'adoption a permis de poser le problème des liens du sang.
Je regrette vivement, à cet égard, que la Haute Assemblée n'ait pas adopté l'amendement de mon collègue Bernard Seillier, qui tendait à permettre aux tribunaux de s'assurer que toutes dispositions avaient été prises, concernant l'accompagnement des parents, avant que l'on puisse constater le désintérêt manifeste de ces derniers. Cette question appelle, à mon sens, une nouvelle réflexion du législateur, des pouvoirs publics et des acteurs de l'accompagnement vers l'adoption, afin que l'intérêt de l'enfant soit pris en compte au mieux.
Ce texte introduisant néanmoins de nouveaux outils permettant de faciliter le long et délicat processus vers l'adoption, je le voterai, avec la majorité des membres du groupe du RDSE.
Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Debré, pour explication de vote.
Mme Isabelle Debré. Malgré quelques critiques plus ou moins recevables (Protestations sur les travées du groupe socialiste) - certaines le sont, d'autres le sont moins -, nous avons fait un grand pas en avant dans l'intérêt des enfants.
Militante active des droits de l'enfant depuis plus de quinze ans, je considère comme très important d'aller plus loin dans la réforme ; nous sommes d'ailleurs tous d'accord sur ce point.
Aujourd'hui, nous avons fait un grand pas en avant. Nous allons permettre à des enfants de pouvoir nouer des liens affectifs, des liens familiaux. Il était vraiment nécessaire de faciliter l'adoption en France. Je vois trop d'enfants ballottés d'une famille à l'autre, dans des familles d'accueil, qui sont d'ailleurs payées pour les recevoir.
Mme Raymonde Le Texier. Cela ne changera pas !
Mme Isabelle Debré. Nous allons faciliter l'adoption, et des familles pourront ainsi nouer des liens familiaux et affectifs avec des enfants qui, jusqu'à présent, n'étaient pas adoptables.
Un grand pas a été franchi, mais il nous reste, malgré cela, monsieur le ministre, énormément de travail à accomplir. Nous comptons sur vous, et nous vous aiderons à travailler en ce sens, dans l'intérêt des enfants avant tout. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Bas, ministre délégué. Aux termes de ce débat, je voudrais tout d'abord remercier M. le rapporteur d'avoir éclairé les travaux de la Haute Assemblée avec la compétence et l'expérience que nous lui reconnaissons tous. Je souhaite également remercier chacun des orateurs qui sont intervenus cet après-midi.
Si le Sénat adopte ce texte, nous enregistrerons trois progrès essentiels pour les couples en attente d'adoption, trois progrès essentiels pour les enfants qui seront reçus dans ces familles : l'égalité sur l'ensemble du territoire national des couples adoptants, l'amélioration des aides pour les couples actuellement engagés dans une démarche internationale individuelle et, enfin, toutes les dispositions destinées à faciliter l'adoption des pupilles.
Le vote de la Haute Assemblée sera un signal d'espoir adressé à tous les couples en attente d'adoption qui vivent cette attente, avec toutes les incertitudes qu'elle comporte, dans la souffrance et souvent dans l'angoisse.
Le vote de cette proposition de loi permettra à l'Agence française de l'adoption d'être mise en place dès le 1er janvier prochain, ce qui est à mes yeux le plus important.
Je souhaite souligner - je l'ai dit à plusieurs reprises lors de ce débat - l'intérêt que le Gouvernement porte à un grand nombre de propositions qui ont été présentées. Ce texte constitue une étape très importante sur le chemin de l'amélioration du régime de l'adoption, mais ce n'est pas la dernière. Des réflexions en cours vont se poursuivre et permettront d'approfondir toutes les propositions présentées cet après-midi, avant de prendre en compte nombre d'entre elles.
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
Mme Raymonde Le Texier. Le groupe socialiste s'abstient.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le groupe CRC également.
(La proposition de loi est adoptée définitivement.)
5
DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI
Mme la présidente. J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-299 du 31 mars 2005 relative à la création à titre provisoire d'institutions communes aux régimes de sécurité sociale des travailleurs indépendants.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 425, distribué et renvoyé à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
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DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI constitutionnelle
Mme la présidente. J'ai reçu de MM. Hubert Haenel, Daniel Bernardet, Roger Besse, Dominique Braye, Louis de Broissia, Auguste Cazalet, Jean-Pierre Chauveau, Philippe Dallier, Michel Doublet, André Dulait, Jean-Paul Emin, Bernard Fournier, François Gerbaud, Daniel Goulet, Louis Grillot, Georges Gruillot, Pierre Hérisson, Jean-François Humbert, Alain Lambert, Mme Elisabeth Lamure, MM. Robert Laufoaulu, Dominique Leclerc, Jean-François Le Grand, Philippe Leroy, Pierre Martin, Alain Milon, Mmes Monique Papon, Janine Rozier, MM. Bernard Saugey, Louis Souvet, Yannick Texier, Mme Paulette Brisepierre, MM. Robert Del Picchia, André Ferrand et Mme Joëlle Garriaud-Maylam une proposition de loi instaurant pour le maire, le président de conseil général et pour le président de conseil régional, une prestation de serment.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 419, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
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DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI organique
Mme la présidente. J'ai reçu de MM. Hubert Haenel, José Balarello, Daniel Bernardet, Roger Besse, Dominique Braye, Louis de Broissia, Auguste Cazalet, Jean-Pierre Chauveau, Philippe Dallier, Michel Doublet, André Dulait, Jean-Paul Emin, Bernard Fournier, François Gerbaud, Daniel Goulet, Louis Grillot, Georges Gruillot, Pierre Hérisson, Jean-François Humbert, Alain Lambert, Robert Laufoaulu, Dominique Leclerc, Jean-François Le Grand, Philippe Leroy, Alain Milon, Mme Janine Rozier, MM. Bernard Saugey, Louis Souvet, Yannick Texier, Mme Paulette Brisepierre, MM. Robert Del Picchia, André Ferrand et Mme Joëlle Garriaud-Maylam une proposition de loi organique modifiant l'article 6 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature.
La proposition de loi organique sera imprimée sous le n° 420, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
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DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI
Mme la présidente. J'ai reçu de MM. Hubert Haenel, Daniel Bernardet, Roger Besse, Dominique Braye, Louis de Broissia, Auguste Cazalet, Jean-Pierre Chauveau, Philippe Dallier, Michel Doublet, André Dulait, Jean-Paul Emin, Bernard Fournier, François Gerbaud, Daniel Goulet, Louis Grillot, Georges Gruillot, Pierre Hérisson, Jean-François Humbert, Alain Lambert, Mme Elisabeth Lamure, MM. Robert Laufoaulu, Dominique Leclerc, Jean-François Le Grand, Philippe Leroy, Pierre Martin, Alain Milon, Mmes Monique Papon, Janine Rozier, MM. Bernard Saugey, Louis Souvet, Yannick Texier, Mme Paulette Brisepierre, MM. Robert Del Picchia, André Ferrand et Mme Joëlle Garriaud-Maylam une proposition de loi constitutionnelle instaurant pour le Président de la République, pour le président du Sénat et pour le président de l'Assemblée nationale, une prestation de serment.
La proposition de loi constitutionnelle sera imprimée sous le n° 421, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de MM. Roland Courteau et Raymond Courrière une proposition de loi visant à inscrire d'office l'ensemble des citoyens français sur les listes électorales.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 422, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de M. Jean-Paul Alduy une proposition de loi relative à la pérennisation du régime d'assurance-chômage des professions du spectacle, de l'audiovisuel et du cinéma dans le cadre de la solidarité interprofessionnelle.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 423, distribuée et renvoyée à la commission des affaires culturelles, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de M. Jean-Louis Masson une proposition de loi tendant à moderniser l'élection des membres des chambres de métiers de Moselle et d'Alsace.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 424, distribuée et renvoyée à la commission des affaires économiques, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
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TEXTE SOUMIS AU SÉNAT EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
Mme la présidente. J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 2505/96 portant ouverture et mode de gestion de contingents tarifaires communautaires autonomes pour certains produits agricoles et industriels.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-2906 et distribué.
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DÉPÔT DE RAPPORTS
Mme la présidente. J'ai reçu de M. Dominique Leclerc un rapport fait au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif au développement des services à la personne et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale. (n° 411, 2004-2005).
Le rapport sera imprimé sous le n° 414 et distribué.
J'ai reçu de Mme Bariza Khiari un rapport fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, ratifiant l'ordonnance n° 2004-1391 du 20 décembre 2004 relative à la partie législative du code du tourisme (n° 354, 2004-2005).
Le rapport sera imprimé sous le n° 415 et distribué.
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DÉPÔT DE RAPPORTS D'INFORMATION
Mme la présidente. J'ai reçu de M. Jean Arthuis un rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur la globalisation de l'économie et les délocalisations d'activité et d'emplois.
Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 416 et distribué.
J'ai reçu de M. Claude Belot un rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur le financement des télévisions locales.
Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 417 et distribué.
J'ai reçu de MM. André Boyer et Jean-Guy Branger un rapport d'information fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur l'action de l'Etat en mer.
Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 418 et distribué.
J'ai reçu de M. Yves Fréville un rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur le maintien en condition opérationnelle de la flotte.
Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 426 et distribué.
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ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au jeudi 22 juin 2005 :
A neuf heures trente :
1. Discussion du projet de loi (n° 330, 2004-2005), adopté par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la justice.
Rapport (n° 330, 2004-2005) de M. François Zocchetto, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Aucune inscription de parole dans la discussion générale n'est plus recevable.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
2. Discussion des conclusions du rapport (n° 409, 2004-2005) de M. François Zocchetto, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur la proposition de loi (n° 358, 2004-2005) de M. Laurent Béteille précisant le déroulement de l'audience d'homologation de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.
Aucune inscription de parole dans la discussion générale n'est plus recevable.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
A quinze heures et, éventuellement, le soir :
3. Discussion des conclusions du rapport (n° 410, 2004 2005) de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion sur le projet de loi d'orientation sur l'énergie.
M. Henri Revol, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire.
4. Suite éventuelle de l'ordre du jour du matin.
Délai limite pour les inscriptions de parole et pour le dépôt des amendements
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif au développement des services à la personne et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale (n° 411, 2004 2005) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : vendredi 24 juin 2005, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : vendredi 24 juin 2005, à seize heures.
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, de sauvegarde des entreprises (n° 235, 2004-2005) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 27 juin 2005, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 27 juin 2005, à seize heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures cinq.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD