MESURES DIVERSES ET DISPOSITIONS
RELATIVES À LA TRÉSORERIE
Article additionnel après l'article 59
M. le président. L'amendement n° 261, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Après l'article 59, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le I de l'article 52 de la loi n° 2002-92 du 22 janvier 2002 relative à la Corse est ainsi rédigé :
« I. - Les débiteurs de cotisations patronales, dues au régime de base obligatoire de sécurité sociale des salariés agricoles pour des périodes antérieures au 1er janvier 2003, installés en Corse au 23 janvier 2002 ou au moment de la promulgation de la présente loi, peuvent bénéficier d'une aide de l'Etat, dans la limite de 50 % de la totalité des cotisations patronales dues.
« Les débiteurs dont l'exploitation ou l'entreprise agricole est issue d'une reprise, fusion, absorption, dans le cadre familial, ou qui a connu une évolution de son statut juridique avec persistance de dettes antérieures de cotisations sociales pour l'emploi de main-d'oeuvre salariée agricole, peuvent bénéficier des présentes dispositions pour ces dettes antérieures, sous réserve qu'ils s'engagent personnellement à reprendre à leur compte lesdites dettes. »
« II. - Dans le troisième alinéa du II de l'article 52 de la loi n° 2002-92 du 22 janvier 2002 précitée, les mots : "au 31 décembre 1998" sont remplacés par les mots : "au 31 décembre 2002".
« III. - Dans le cinquième alinéa du II de l'article 52 de la loi n° 2002-92 du 22 janvier 2002 précitée, les mots : "au 1er janvier 1999" sont remplacés par les mots : "au 1er janvier 2003".
« IV. - Le septième alinéa du II de l'article 52 de la loi n° 2002-92 du 22 janvier 2002 précitée est complété par les mots : ", pour les seules parts salariales non visées par les dispositions de l'article L. 725-21 du code rural ;".
« V. - Le III de l'article 52 de la loi n° 2002-92 du 22 janvier 2002 précitée est supprimé.
« VI. - La demande d'aide prévue au I de l'article 52 de la loi n° 2002-92 du 22 janvier 2002 précitée doit être présentée à l'autorité administrative de l'Etat dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi. »
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-François Mattei, ministre. Cet amendement vise à modifier le dispositif de prise en charge par l'Etat de 50 % des cotisations patronales dues au régime des salariés agricoles.
M. Roland Muzeau. C'est « l'amendement Corse » !
M. Guy Fischer. Toujours les mêmes !
M. Jean-François Mattei, ministre. Cette modification permettra à l'ensemble des agriculteurs potentiellement éligibles à cette aide de pouvoir déposer un dossier de demande de prise en charge, alors que certains sont actuellement forclos.
M. Roland Muzeau. Toujours plus !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Ça continue !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Nous avons un régime un peu particulier pour la Corse. Sagesse !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 261.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 59.
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Tout au long d'un débat au cours duquel l'article 40 de la Constitution fut largement employé, sans oublier l'article 38 du règlement du Sénat, comme au bon vieux temps du débat sur les retraites, vous ne nous avez en rien convaincus, monsieur le ministre. Nos collègues rapporteurs, la majorité UMP-UDF et vous-même avez usé d'une confondante dextérité et d'un flot de bonnes paroles pour nous présenter un budget qui, à notre sens, est non sincère, sans financements crédibles ; bref ce sont des effets d'annonce pour nous faire avaler une bien amère pilule, et les Français s'en rendront compte très bientôt.
Si, pour vous, « remettre de la cohérence dans notre système d'assurance maladie », « l'adapter » ou « le moderniser », c'est jeter les bases de sa privatisation, il faut le dire très clairement. Notre collègue Alain Vasselle se trompait de cible, lundi dernier, lorsqu'il accusait le groupe communiste républicain et citoyen de pratiquer la langue de bois ! (M. Dominique Leclerc s'exclame.) Ce soir, officiellement, nous disons que le débat qui aura lieu dans un an quasiment jour pour jour portera sur la réforme de la sécurité sociale, dont tous les fondements auront été posés au cours de ces derniers mois.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Je confondais socialistes et communistes, mais c'était bonnet blanc et blanc bonnet !
M. Roland Muzeau. C'est comme l'UDF et l'UMP !
M. Guy Fischer. Je ne reviendrai pas sur les propos que j'ai tenus dans la discussion générale, sinon pour réaffirmer l'illisibilité des mesures que vous avez à dessein dispersées dans de multiples textes et mesures réglementaires.
Vous mettez en cause la solidarité nationale, fondement même de notre système de protection sociale. Vous mettez en danger la sécurité sociale.
Non seulement vous ne vous attaquez pas fermement au déficit, notamment de la branche assurance maladie, mais vous le laissez filer, pour mieux nous convaincre, l'an prochain, que le Gouvernement n'a pas les moyens d'inverser la tendance d'un gouffre financier qui se sera, bien entendu, encore creusé. Et vous avancez des chiffres avec assurance, fondés sur une très aléatoire hypothèse de retour de la croissance.
Je voudrais, au passage, dénoncer une hypocrisie : vous maintenez votre volonté d'augmenter le prix des cigarettes de 20 % dans le projet de loi de finances, mais, échéances électorales obligent, le Premier ministre vient de décider un moratoire gelant les taxes pendant quatre ans. Cette concession purement politicienne est contreproductive pour la politique de santé publique, si nécessaire face au drame national que représente le cancer.
M. Gilbert Chabroux. Absolument !
M. Guy Fischer. Vous faites des annonces dont nous savons tous que leur financement ne sera pas assuré, sinon par des redéploiements de crédits. Les hôpitaux sont étranglés par le manque de personnels et de crédits. Le nouveau mode de tarification à l'activité que vous instaurez va à présent les obliger à produire, à se transformer en de véritables entreprises recherchant la rentabilité, et tout le volet « service public » de l'hôpital public sera mis en difficulté.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Mais non !
M. Guy Fischer. Le plan « vieillissement et solidarité » que vous avez annoncé comporte, certes, une mesure phare : la création d'un cinquième risque,...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ce n'est pas un risque, c'est une autre branche !
M. Guy Fischer. ... mais elle rompt avec la notion de solidarité nationale, puisque la création d'une caisse nationale de solidarité pour l'autonomie préfigure, à notre avis, l'exclusion des personnes âgées et handicapées de la sécurité sociale. Mais je ne relance pas le débat. Nous en reparlerons ultérieurement.
Vous avez rejeté notre amendement visant à dégager 400 millions d'euros pour les personnes âgées, ce qui a suscité une large discussion.
Toujours concernant la vieillesse, vous n'avez pas non plus revalorisé les pensions et retraites au niveau des salaires, vous en êtes resté à 1,7 %.
Pour tenter de masquer l'absence de moyens, vous culpabilisez les assurés sociaux, qui font les frais de vos mesures d'économies : augmentation du forfait hospitalier, déremboursement de médicaments, hausse des cotisations mutualistes. En effet, les mutuelles devront trouver les ressources pour faire face à l'augmentation des charges que vous leur imposez : c'est mathématique.
Nous, nous avons fait des propositions réalistes. Vous les avez refusées. Nous avions proposé pourtant des mesures de nature à dégager près de 35 milliards d'euros de recettes par an, en modulant l'assiette des cotisations afin d'encourager les entreprises créatrices d'emplois.
Nous avons également proposé d'instituer une cotisation additionnelle sur les produits financiers des entreprises afin de soumettre à contribution sociale des revenus qui en sont scandaleusement exemptés.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Fischer.
M. Guy Fischer. Concernant les AT-MP, le Gouvernement est resté sourd à la détresse des salariés victimes de l'amiante et à la détresse de leur famille. Il en est de même des éthers de glycol. Aucun de nos amendements n'a été retenu ! On ne peut que dénoncer la majorité parlementaire d'avoir bâillonné le débat sur un sujet aussi douloureux.
Vous préparez bel et bien la seconde étape de la privatisation de la protection sociale ! Déjà, des signes sont clairs : je pense notamment à la part de plus en plus importante que prend le privé dans le circuit hospitalier.
Je disais lundi que vous aviez provoqué une levée de boucliers parmi les quatre syndicats de médecins et les syndicats de professionnels de santé. Ils ont dénoncé, avec une unanimité qui ne trompe pas, l'absence de moyens en personnels.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 est bâti sur un principe unique : la culpabilisation, la stigmatisation. Nous l'avons vu pour les indemnités journalières et les allocations de longue durée. Bien entendu, nous ne partageons pas cette conception ultralibérale. C'est pourquoi nous voterons résolument contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Gilbert Chabroux.
M. Gilbert Chabroux. Nous parvenons au terme de trois jours de débat, et nous nous interrogeons d'abord sur ce que ce débat a apporté, sur son utilité et son intérêt.
Les conditions de travail n'ont pas été bonnes, particulièrement pour la commission des affaires sociales, qui n'a eu que très peu de temps pour examiner les amendements. Les rapporteurs ont un certain mérite d'avoir pu faire ce travail dans de telles conditions, et il faut apprécier leur efficacité. Je n'en dirai pas plus. Il est vrai que le travail était délicat.
Ces conditions, qui n'étaient pas bonnes au départ, se sont sensiblement dégradées à la fin du débat. Nous garderons un très mauvais souvenir du comportement de la droite, qui a fait preuve de sectarisme et d'intolérance. Elle n'a même pas accepté que nous présentions nos amendements avant d'invoquer l'article 40 de la Constitution. C'est du jamais vu. La branche AT-MP devrait pourtant nous préoccuper ! Vous avez balayé tous nos amendements d'un revers de main.
Que sur les 10 000 cancers annuels d'origine professionnelle, seuls 800 soient reconnus ne semble guère vous soucier.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Si, nous les prenons en compte ! N'utilisez pas les malades et les morts pour polémiquer.
M. Gilbert Chabroux. Le fait qu'un million de salariés soient exposés à des risques cancérigènes,...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Vous n'en avez pas le monopole !
M. Gilbert Chabroux. ... ne méritait-il pas une discussion ?
Nous n'avons pas compris que vous invoquiez l'article 40 de la Constitution, que vous utilisiez l'article 38...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Une seule fois, face à l'abus !
M. Gilbert Chabroux. ... pour empêcher le débat.
Ce texte ne suscitait pas par lui-même beaucoup d'intérêt, puisqu'il s'agit à nouveau d'un texte de transition dans l'attente de la réforme qui interviendra plus tard.
La situation de la sécurité sociale est catastrophique. Elle va encore s'aggraver. Certains se sentent sans doute déjà dépassés par l'ampleur du problème. C'est probablement pour cette raison que nos collègues de droite ont été aussi peu présents, aussi peu nombreux pour suivre le débat et y participer. La séance de lundi après-midi était sans doute mal placée, mais le Gouvernement était bien seul !
Où en sommes-nous après ces trois jours de débat ? Rien n'a changé. Nous avons pu faire voter deux amendements par faveur, nous a-t-on dit, par dérogation...
M. Alain Vasselle, rapporteur. Non ! Ne dévalorisez pas vos amendements !
M. Gilbert Chabroux. ... parce que c'était du domaine réglementaire, mais qu'il fallait faire un geste.
M. Claude Domeizel. Un peu par inadvertance !
M. Gilbert Chabroux. Peut-être, et nous n'allons pas nous glorifier du résultat !
Tous nos amendements étaient intéressants, il est bien dommage que vous n'en ayez retenu que deux !
Le déficit de la sécurité sociale va encore s'aggraver et vous en assumerez la responsabilité, puisque vous n'avez pas voulu entendre ce que nous avons dit.
Parler de déficit « abyssal » relève-t-il de l'inconscience ou du cynisme ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. C'est de la pédagogie !
M. Gilbert Chabroux. Oui, pour mieux préparer la privatisation !
Le déficit de la sécurité sociale va s'accroître et non se stabiliser : 10,6 milliards d'euros pour l'assurance maladie cette année et 10,9 milliards d'euros pour l'année prochaine.
Où est la stabilisation avec un déficit cumulé du régime général qui dépassera les 30 milliards d'euros ?
Les prévisions que vous faites seront d'ailleurs encore une fois dépassées car elles ne sont pas réalistes, qu'il s'agisse de la masse salariale sur laquelle sont calculées les cotisations ou des droits sur le tabac.
Les dépenses ne pourront être maîtrisées avec un ONDAM à 4 % et à 4,12 % pour les hôpitaux.
Les seules mesures d'économies contenues dans ce texte font porter l'effort de façon quasi exclusive sur les assurés sociaux. Sous couvert de responsabilisation, elle pénalisent tout le monde.
Les mutuelles ont déjà annoncé leur intention d'augmenter les cotisations de 10 % et des millions de personnes n'ont pas d'assurance complémentaire et seront frappées de plein fouet.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Chabroux.
M. Gilbert Chabroux. Il n'y a rien dans ce PLFSS, ou peu de choses, pour les personnes âgées, pour le secteur de l'hébergement et des soins à domicile. Les leçons de la canicule n'ont pas été tirées. Nous persistons à le penser cela.
Vous avez insisté, au cours du débat, sur la réforme que constitue la tarification à l'activité. Mais cette réforme risque d'être détournée de son objectif si vous ne faites pas la différence, pourtant fondamentale, entre les hôpitaux publics et le secteur privé.
Pour la branche famille, la prestation d'accueil du jeune enfant n'est pas une mesure nouvelle, c'est un habillage habile de prestations déjà existantes. Vous vous focalisez sur l'accueil individuel au détriment de la garde collective.
S'agissant de la branche vieillesse - M. Claude Domeizel en a parlé longement -, le texte reste aussi vide qu'il l'était en arrivant devant le Sénat. Vous n'envisagez nullement d'abonder le fonds de réserve pour les retraites.
Ce qui nous préoccupe le plus, c'est l'absence de réponse à la question que j'ai posée sur la privatisation.
J'ai présenté un amendement, il n'y a eu de réponse ni de la commission ni du Gouvernement.
M. le président. Je vous prie de conclure, monsieur Chabroux.
M. Gilbert Chabroux. S'ils avaient répondu, je n'aurais pas besoin de dire cela !
Nous avons vraiment peur d'aller vers cette privatisation. Nous avons l'impression que nous allons entrer dans un système où l'on préférera les mécanismes individuels aux logiques solidaires, nous l'avons vu avec la canicule du mois d'août et la mise en cause des familles.
L'année dernière, c'étaient les petites phrases sur les gros risques et les petits risques.
Cette année, c'est la distinction que fait le Premier ministre entre ce qui relève de la solidarité collective et ce qui relève de la responsabilité individuelle. Nous sommes vraiment très inquiets.
Les socialistes s'opposeront de toute leur force à une telle évolution. Nous voterons donc contre le texte que vous nous avez présenté compte tenu des lourdes menaces qu'il porte en germe. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 s'est déroulé dans un contexte particulier.
D'une part, la situation des comptes de la branche santé est plus que préoccupante. Un déficit cumulé depuis 1997 de 30 milliards d'euros, et 10 milliards de déficit prévus pour la seule année 2004. C'est du jamais vu !
Dans ce contexte, chacun est bien conscient qu'une réforme d'envergure s'impose, comme elle s'imposait en matière de retraites.
Nous nous félicitons que l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 ait été l'occasion pour le Gouvernement de rappeler son engagement de présenter d'ici à l'été prochain un texte d'envergure. Mais la mise en place du Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie représente déjà une démarche positive.
D'autre part, les perspectives de croissance pour l'année à venir sont encore faibles, ce qui ne pourra qu'aggraver les choses.
Pour l'heure, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, à l'instar de celui de 2003, est un texte de transition et d'attente.
D'attente, certes, mais il contient des éléments positifs. Tel est le cas de la suppression du FOREC, de la tarification à l'activité et de la création de la prestation d'accueil du jeune enfant.
Toutefois, ces mesures ne sont pas des remèdes miracles.
Je ne reviendrai pas sur ce que chacun s'accorde à reconnaître : le budget global a largement montré ses limites en assurant une rente de situation à certains établissements et en étranglant ceux dont l'activité croît parce que les malades leur font confiance. La tarification à l'activité que vous mettez en place, monsieur le ministre, était donc très attendue.
Il est cependant de notre devoir de formuler à son endroit une critique et une recommandation.
La critique porte sur le fait qu'il aurait été préférable de mettre en oeuvre cette nouvelle tarification après avoir « rebasé » au préalable les établissements déficitaires, afin de partir sur un terrain assaini.
Passons maintenant à la recommandation : la mise en oeuvre de cette réforme ambitieuse ne se fera pas sans poser aux établissements d'importantes difficultés. Il est capital de les accompagner pour qu'ils s'adaptent au nouveau système.
A cet égard, je vous remercie, monsieur le ministre, de nous avoir donné l'assurance que tout serait fait pour atténuer les difficultés de trésorerie que ne manqueront pas de rencontrer les établissements de santé. Mais il est aussi capital d'appliquer cette réforme avec prudence et vigilance.
Ma collègue Valérie Létard vous a fait remarquer que la durée trop brève de l'expérimentation avant l'application à tout le territoire de la tarification à l'activité était dangereuse. C'est pourquoi je me réjouis que la proposition de la commission des affaires sociales tendant à créer un comité chargé d'évaluer l'application de cette réforme ait été adoptée. Je regrette, en revanche, que l'amendement présenté par mon groupe pour une évaluation complète du dispositif en 2006 ait été rejeté.
L'évaluation sera déterminante, car d'importantes interrogations demeurent. Que restera-t-il de la péréquation entre régions lorsque la tarification à l'activité sera pleinement appliquée ? La réponse n'est pas encore claire.
Etant originaire de la Réunion, où le retard en matière de santé par rapport à la moyenne nationale est patent, malgré les progrès spectaculaires qui ont été réalisés depuis la départementalisation en 1946, je peux affirmer à quel point cette péréquation est vitale pour des collectivités qui, comme la mienne, sont affectées d'un retard sanitaire.
En outre, je vous remercie, monsieur le ministre, d'avoir dissipé nos craintes sur les moyens supplémentaires effectifs dont disposeront les hôpitaux publics pour financer certaines fournitures particulièrement onéreuses, au-delà des tarifs de prestation.
Comme nous pouvons le constater, la tarification n'a pas fini de soulever des questions importantes qu'il nous appartient de résoudre.
Notre système de soins ne peut plus se contenter de petits gains, d'économies de bouts de chandelle, le plus souvent illusoires. On peut penser au déremboursement de l'homéopathie.
Dans le même ordre d'idées, nous nous félicitons que les certificats sportifs et les certificats de constatation de coups et blessures ou de sévices continuent d'être remboursés, comme l'a réclamé le groupe de l'Union centriste. Refuser de les rembourser n'aurait rien rapporté et aurait été, sur le plan des principes, assez choquant.
La grande réforme dont notre système de soins a tant besoin devra prendre en compte les propositions de l'UDF, formulées par notre collègue de l'Assemblée nationale Jean-Luc Préel.
Je me réjouis de l'adoption de notre amendement tendant à transformer la CMU en aide personnalisée à la santé inversement proportionnelle aux revenus, mais je regrette le rejet de celui qui visait à lutter contre la fraude en introduisant une photo d'identité sur les cartes Vitale de seconde génération. La responsabilisation de toutes les parties prenantes au système de soins est une urgence.
Dans ce contexte de déficit vertigineux de l'assurance maladie, il est logique que tous les yeux se soient tournés vers la branche santé. Toutefois, nous tenons à réaffirmer notre soutien à la politique familiale menée par le Gouvernement.
Par ailleurs, la situation de la branche santé ne doit pas nous faire oublier qu'en matière de retraites nous ne sommes qu'au milieu du gué. Le train des réformes est incontestablement en route. Il ne doit pas s'arrêter en chemin.
Rappelons pour mémoire que la loi du 21 août dernier portant réforme du système de retraites ne permet de faire face qu'à 50 % du besoin de financement qui se présentera à nous d'ici à 2020.
Tout en regrettant que seul deux de nos amendements, sur la vingtaine que nous avions présentés, aient été adoptés, et afin d'encourager la marche des réformes, je voterai avec mon groupe de l'Union centriste le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004.
Il ne me reste plus qu'à remercier la commission des affaires sociales, la commission des finances, leurs présidents, MM. About et Arthuis, ainsi que leurs rapporteurs, MM. Lardeux, Leclerc, Lorrain, Vasselle et Gouteyron, pour l'excellence de leur travail. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Francis Giraud.
M. Francis Giraud. La situation financière de la sécurité sociale est très mauvaise, en particulier celle de l'assurance maladie. Le faible dynamisme des recettes et la progression rapide des dépenses conduisent à un déficit qui n'est pas tenable à terme.
C'est dans ce cadre que le projet de financement de la sécurité sociale pour 2004 présente les premières pistes de la modernisation de l'assurance maladie afin de sauver le système de solidarité auquel nous sommes tous attachés.
Cette modernisation a été engagée selon un calendrier précis et une méthode fondée sur un diagnostic incontestable qui sera celui du Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie. Tous les acteurs du système pourront participer aux débats. Puis ce sera le moment des choix sur lesquels le Parlement sera amené à se prononcer.
Ce projet de loi comporte plusieurs mesures importantes. Dans la logique d'une clarification des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale, et par respect des engagements pris par le Gouvernement, le FOREC est enfin supprimé. La sécurité sociale n'aura ainsi plus à supporter les choix effectués par l'Etat en matière de politique de l'emploi.
De même, ce texte comporte une importante réforme structurelle de l'hôpital : la tarification à l'activité.
De plus, les professionnels de santé sont responsabilisés par le renforcement de la maîtrise médicalisée des dépenses et une efficacité accrue des soins dans le cadre de nouveaux accords avalisés par l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé, l'ANAES.
Ce texte responsabilise aussi le secteur de l'industrie pharmaceutique en encadrant la promotion et en encourageant le développement des médicaments génériques.
Il met en place plusieurs dispositions tendant à corriger certains excès de la consommation médicale, dans une logique de responsabilisation des patients.
Nous nous réjouissons, par ailleurs, de la mise en place de la prestation d'accueil du jeune enfant, qui constitue un renouveau de notre politique familiale. Celle-ci avait besoin de plus de simplicité et de dynamisme afin que les parents puissent avoir le choix de travailler ou non et le choix du mode de garde de leurs enfants.
Nous nous félicitons également de la réforme annoncée du statut des assistantes maternelles et des mesures en faveur du développement des crèches.
Enfin, l'évolution annoncée de notre système de réparation du risque professionnel, afin notamment d'améliorer l'indemnisation des accidents du travail et des maladies professionnelles les plus graves, nous satisfait. L'amélioration de notre politique de prévention devra faire partie intégrante de cette réflexion et des choix qui seront opérés.
Je voudrais féliciter MM. les rapporteurs, dont les travaux de qualité ont permis à notre Haute Assemblée de débattre de ce sujet si important.
Je remercie également MM. les ministres qui sont venus présenter ce texte et qui ont fait preuve d'une grande qualité d'écoute. Cela a permis à notre Haute Assemblée d'améliorer le projet de loi.
Pour toutes ces raisons, le groupe UMP votera ce texte annonciateur de grandes réformes à venir, pour lesquelles nous assurons le Gouvernement de tout notre soutien. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin
n° 93
:
Nombre de votants | 316 |
Nombre de suffrages exprimés | 315 |
Majorité absolue des suffrages | 158 |
Pour | 202 |
Contre | 113 |
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voilà donc parvenus à la fin de ce débat complexe sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, qui a donné lieu à des rapports de très grande qualité ; j'en remercie l'ensemble des rapporteurs.
Ce débat a donné lieu également à des échanges, parfois vifs, mais, en tout cas, jamais dénués d'intérêt.
Toutefois, au-delà de la satisfaction que nous ressentons d'avoir mené à bien ce travail, je voudrais me faire l'interprète de nos rapporteurs et, plus largement, de l'ensemble de nos collègues pour déplorer les conditions de travail consternantes qui nous ont été imposées cette année.
J'admets que l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale est toujours difficile par définition : il se présente dans des créneaux de temps traditionnellement très contraignants. Cela dit, nous avons été cette fois spécialement « gâtés », si je puis dire, coincés que nous étions entre le marathon éreintant de l'examen du projet de loi relatif aux responsabilités locales, qui s'est achevé à cinq heures trente du matin dimanche dernier, et l'examen du budget, qui va commencer dans quelques heures.
Nous n'avons disposé que de trois malheureux jours - même pas des jours entiers - pour adopter un texte qui mobilise la moitié des prélèvements obligatoires et dont les dépenses dépassent d'environ 10 milliards d'euros celles du budget de l'Etat.
Cette situation confine donc à l'absurde. Nous ne pouvons pas accepter plus longtemps de travailler ainsi à marche forcée, sur un volume d'amendements sans cesse croissant - car il est bien naturel qu'à sa huitième édition le débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale trouve désormais sa vitesse de croisière et que nos collègues s'attachent à y apporter leur contribution.
Nous avions examiné l'an dernier 170 amendements. Nous avons, cette année, dépassé le seuil de 260...
M. Claude Domeizel. C'est proportionnel au « trou » !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. ... sans voir, bien sûr, le temps qui nous était imparti allongé à due concurrence.
Dès lors que nous souhaitons établir un véritable débat, présenter une analyse sérieuse des dispositions, offrir un lieu de discussions réelles entre la majorité et l'opposition, bref remplir le mandat qui nous a été confié, je demande solennellement au Gouvernement de tenir compte de ces contraintes lors de l'élaboration de l'ordre du jour pour l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 et d'envisager qu'une semaine lui soit désormais réellement consacrée.
Plus largement, il m'apparaît indispensable aussi de procéder de manière urgente à la réforme de la loi organique relative aux lois de financement, que nous réclamons avec la plus grande insistance afin d'organiser le travail de la façon la plus intéressante.
Mon dernier mot sera pour remercier les présidents de séance qui se sont succédé : Serge Vinçon, Jean-Claude Gaudin et, bien entendu, également Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis de la commission des finances. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. ministre.
M. Jean-François Mattei, ministre. C'est avec plaisir qu'à mon tour je remercie la commission des affaires sociales, son président, ses rapporteurs MM. Alain Vasselle, André Lardeux, Jean-Louis Lorrain et Dominique Leclerc, sans oublier Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis de la commission des finances.
Je remercie également l'ensemble des intervenants de la majorité qui ont apporté leur soutien, parfois critique - c'est bien normal - au texte du Gouvernement.
M. Claude Domeizel. Pas trop critique !
M. Jean-François Mattei, ministre. Je remercie le groupe de l'Union centriste de sa participation et de ses idées, parfois un peu en avance par rapport au déroulement des réformes que nous proposons. Je suis heureux de la position de ce groupe, qui montre ainsi tout l'intérêt qu'il met à accompagner la démarche que le Gouvernement a engagée.
Je remercie aussi naturellement l'opposition...
M. Claude Domeizel. Très présente !
M. Jean-François Mattei, ministre. ... pour ses interventions, que nous avons entendues avec beaucoup d'intérêt, comme d'ailleurs l'an dernier.
Je veux enfin remercier les services de mon administration du travail difficile et contraignant de préparation qu'ils ont accompli sous notre autorité.
Je ne vais pas poursuivre mon propos compte tenu de l'heure avancée. Je me proposais en effet maintenant de répondre, point par point, à l'ensemble des questions qui avaient été soulevées. (Sourires.) Mais, après tout, je l'ai fait une première fois dans la discussion générale et une seconde fois dans le cadre du débat sur l'assurance maladie.
Il me semble que, dans l'ensemble, sauf sur les amendements relatifs au rapport annexé qui, on le sait, n'a pas de valeur normative, ce Gouvernement s'est efforcé de répondre en argumentant.
Mesdames, messieurs les sénateurs, en votant ce texte, vous contribuez au débat qui s'est désormais ouvert dans le pays sur la réforme de notre sécurité sociale et, plus particulièrement, de notre assurance maladie.
L'année dernière, nous avons débattu d'un PLFSS de transition. Nous avons cette année un PLFSS de clarification. L'année prochaine, nous examinerons, je l'espère, un PLFSS de responsabilisation, après que la réforme aura été arrêtée, comme l'a annoncé M. le Premier ministre. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. A la fin de ce débat, je veux me réjouir de l'ambiance qui a présidé à la conclusion de ces travaux. Ceux-ci ont été de qualité et j'ai été heureux d'y participer au moins à deux titres.
Avant de lever la séance, il me revient de remercier le personnel du Sénat, qui, ces jours-ci, a accompli un effort considérable.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Tout à fait !
M. le président. Je veux lui dire que nous en prenons acte et que nous sommes parfaitement conscients de ses compétences et de son ardeur au travail. (Applaudissements.)