SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN
1. Procès-verbal (p. 1).
2. Décès d'un ancien sénateur (p. 2).
3. Communication relative à une commission mixte paritaire (p. 3).
4. Dépôt du rapport annuel du Conseil supérieur de l'audiovisuel (p. 4).
5. Questions orales (p. 5).
AMÉNAGEMENTS DE LA VOIE FERRÉE NICE-CUNEO (p. 6)
Question de M. José Balarello. - MM. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer ; José Balarello.
FINANCEMENT DU LOGEMENT DES SAISONNIERS (p. 7)
Question de Mme Michelle Demessine. - M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer ; Mme Michelle Demessine.
TRAVAUX D'AMÉNAGEMENT DE LA RN 21 (p. 8)
Question de M. Dominique Mortemousque. - MM. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer ; Dominique Mortemousque.
CRÉATION D'UN NOUVEL AÉROPORT À TOULOUSE (p. 9)
Question de M. Gérard Roujas. - MM. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer ; Gérard Roujas.
PROJET DE CONSTRUCTION
DE L'AUTOROUTE A 103 EN SEINE-SAINT-DENIS (p. 10)
Question de M. Christian Demuynck. - MM. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer ; Christian Demuynck.
DÉSENCLAVEMENT DU SUD DU TARN (p. 11)
Question de M. Jean-Marc Pastor. - MM. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer ; Jean-Marc Pastor.
DÉSENCLAVEMENT DU VAL-D'OISE (p. 12)
Question de Mme Nelly Olin. - M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer ; Mme Nelly Olin.
POLITIQUE DES TRANSPORTS EN CORRÈZE (p. 13)
Question de M. Bernard Murat. - MM. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer ; Bernard Murat.
BILAN DU CONTRAT DE PLAN ÉTAT/RÉGION ÎLE-DE-FRANCE
EN MATIÈRE D'ÉQUIPEMENTS DE TRANSPORTS (p. 14)
Question de M. Roger Karoutchi. - MM. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer ; Roger Karoutchi.
NÉGOCIATIONS D'ACCORDS BILATÉRAUX
ENTRE L'UNION EUROPÉENNE ET LA SUISSE (p. 15)
Question de M. Jean-Paul Amoudry. - Mme Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes ; M. Jean-Paul Amoudry.
MISE EN OEUVRE DE LA DIRECTIVE EUROPÉENNE
SUR LE CHOCOLAT (p. 16)
Question de M. Michel Pelchat. - Mme Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes ; M. Michel Pelchat.
MESURES D'AIDES EN FAVEUR
DES JEUNES AGRICULTEURS (p. 17)
Question de M. Bernard Joly. - MM. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales ; Bernard Joly.
POLITIQUE DE L'EAU (p. 18)
Question de M. Jacques Pelletier. - MM. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales ; Jacques Pelletier.
STATUT DES ÉLUS LOCAUX
ET INDEMNITÉS DE FONCTION (p. 19)
Question de M. Yves Coquelle. - MM. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales ; Yves Coquelle.
SITUATION DES FORCES DE SÉCURITÉ
DANS LES YVELINES (p. 20)
Question de M. Gérard Larcher. - MM. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales ; Gérard Larcher.
LUTTE CONTRE LA POLLUTION SONORE
DES DEUX-ROUES (p. 21)
Question de M. Alain Gournac. - Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable ; M. Alain Gournac.
RÉGLEMENTATION SUR LA PÊCHE
DANS LA GRANDE BRIÈRE MOTTIÈRE (p. 22)
Question de M. André Trillard. - Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable ; M. André Trillard.
NÉGOCIATIONS SUR LA PÉRENNISATION
DU SYSTÈME DE TVA RÉDUITE
SUR LES TRAVAUX D'ENTRETIEN DES LOGEMENTS (p. 23)
Question de M. Denis Badré. - Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable ; M. Denis Badré.
Suspension et reprise de la séance (p. 24)
PRÉSIDENCE DE M. DANIEL HOEFFEL
6. Conférence des présidents (p. 25).
M. le président, Mmes Michelle Demessine, Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie.
7. Confiance dans l'économie numérique. - Discussion d'un projet de loi (p. 26).
Discussion générale : Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie ; MM. Pierre Hérisson, rapporteur de la commission des affaires économiques ; Bruno Sido, rapporteur de la commission des affaires économiques ; Louis de Broissia, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles ; Alex Türk, rapporteur pour avis de la commission des lois ; Mme Odette Terrade, MM. René Trégouët, Christian Gaudin, Pierre-Yvon Trémel, Jean-François Le Grand, Henri Weber, Jean-Louis Lorrain, Michel Teston.
Mme la ministre déléguée.
Clôture de la discussion générale.
Article additionnel avant l'article 1er A (p. 27)
Amendement n° 165 de M. Pierre-Yvon Trémel. - MM. Pierre-Yvon Trémel, Bruno Sido, rapporteur ; Mme la ministre déléguée, M. Joël Bourdin, au nom de la commission des finances. - Irrecevabilité.
Article 1er A (p. 28)
M. Daniel Raoul.
Amendements n°s 148 de Mme Odette Terrade, 11 de la commission et sous-amendements n°s 198 de M. Jean-François Le Grand, 213, 214 de M. Paul Blanc, 166 et 167 rectifié de M. Pierre-Yvon Trémel ; amendements n°s 47 de M. Alex Türk, rapporteur pour avis, 132 de M. René Trégouët, 12, 13 de la commission et sous-amendements n°s 199 de M. Jean-François Le Grand et 142 rectifié de M. Christian Gaudin ; amendements n°s 48, 49 de M. Alex Türk, rapporteur pour avis, 14 de la commission et 98 de M. Jean-François Le Grand. - Mme Odette Terrade, MM. Bruno Sido, rapporteur ; Pierre Hérisson, rapporteur ; Jean-François Le Grand, Paul Blanc, Daniel Raoul, Pierre-Yvon Trémel, Alex Türk, rapporteur pour avis ; René Trégouët, Christian Gaudin, Mme la ministre déléguée, M. Gérard Larcher, président de la commission des affaires économiques. - Retrait de l'amendement n° 132 ; rejet de l'amendement n° 148.
Suspension et reprise de la séance (p. 29)
PRÉSIDENCE DE M. GUY FISCHER
Rectification du sous-amendement n° 198. - MM. Jean-François Le Grand, Bruno Sido, rapporteur ; le président de la commission, Daniel Raoul, Paul Blanc. - Rejet, par scrutin public, du sous-amendement n° 198 rectifié ; retrait des sous-amendements n°s 213 et 214 ; rejet du sous-amendement n° 166 ; adoption du sous-amendement n° 167 rectifié et, par scrutin public, des amendements n° 11 et 47 modifiés devenant sans objet ; adoption de l'amendement n° 12 ; rejet du sous-amendement n° 199 ; adoption du sous-amendement n° 142 rectifié, des amendements n° 13 et 48 modifiés et de l'amendement n° 14, l'amendement n° 49 devenant sans objet ; retrait de l'amendement n° 98.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 1er A (p. 30)
Amendement n° 168 de M. Pierre-Yvon Trémel. - MM. Daniel Raoul, Bruno Sido, rapporteur ; Mme la ministre déléguée. - Retrait.
Amendements identiques n°s 99 rectifié bis de M. Jean Pépin et 130 de M. Jean-Paul Amoudry. - MM. Jean-François Le Grand, Christian Gaudin, Bruno Sido, rapporteur ; Mme la ministre déléguée. - Rejet des deux amendements.
Amendement n° 129 de M. Jean-Paul Amoudry. - MM. Christian Gaudin, Bruno Sido, rapporteur ; Mme la ministre déléguée. - Rejet.
Article 1er B (p. 31)
Amendements n°s 149 de Mme Odette Terrade, 15 de la commission et sous-amendements n°s 169 à 171 de M. Pierre-Yvon Trémel et 201 du Gouvernement ; amendement n° 2 rectifié de M. Philippe Nogrix. - Mme Odette Terrade, MM. Bruno Sido, rapporteur ; Michel Teston, Mme la ministre déléguée, M. Philippe Nogrix. - Retrait de l'amendement n° 2 rectifié ; rejet de l'amendement n° 149 et des sous-amendements n°s 169 à 171 ; adoption du sous-amendement n° 201 et de l'amendement n° 15 modifié rédigeant l'article.
Articles additionnels après l'article 1er B (p. 32)
Amendements n°s 172 et 173 de M. Pierre-Yvon Trémel. - MM. Henri Weber, Bruno Sido, rapporteur ; Mme la ministre déléguée. - Rejet des deux amendements.
Amendement n° 174 de M. Simon Sutour. - MM. Daniel Raoul, Bruno Sido, rapporteur ; Mme la ministre déléguée. - Rejet.
Amendements n°s 211 et 212 de la commission. - M. Pierre Hérisson, rapporteur ; Mme la ministre déléguée, M. Philippe Adnot, au nom de la commission des finances. - Irrecevabilité des deux amendements.
Article 1er (p. 33)
Amendement n° 16 rectifié de la commission et sous-amendement n° 143 rectifié de M. Bernard Barraux ; amendements n°s 85 rectifié (identique à l'amendement n°16 rectifié) de M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis, et 175 de Mme Danièle Pourtaud. - MM. Bruno Sido, rapporteur ; Jean-François Le Grand, Louis de Broissia, rapporteur pour avis ; Mmes Danièle Pourtaud, la ministre déléguée, M. Michel Pelchat. - Rejet du sous-amendement n° 143 rectifié ; adoption des amendements n°s 16 rectifié et 85 rectifié rédigeant l'article, l'amendement n° 175 devenant sans objet.
Articles additionnels après l'article 1er (p. 34)
Amendements identiques n°s 17 de la commission et 86 de M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis. - MM. Bruno Sido, rapporteur ; Louis de Broissia, rapporteur pour avis ; Mme la ministre déléguée. - Adoption des deux amendements insérant un article additionnel.
Renvoi de la suite de la discussion.
8. Communication relative à une commission mixte paritaire (p. 35).
9. Dépôt d'un rapport du Gouvernement (p. 36).
10. Dépôt d'une proposition de loi organique (p. 37).
11. Dépôt de propositions de loi (p. 38).
12. Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution (p. 39).
13. Dépôt d'un rapport (p. 40).
14. Dépôt de rapports d'information (p. 41).
15. Ordre du jour (p. 42).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN
vice-président
M. le président. La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente.)
PROCÈS-VERBAL
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
DÉCÈS D'UN ANCIEN SÉNATEUR
M. le président. J'ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Christian Masson, qui fut sénateur des Ardennes de 1984 à 1989.
COMMUNICATION RELATIVE
À UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE
M. le président. J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de programme pour l'outre-mer est parvenue à l'adoption d'un texte commun.
DÉPÔT DU RAPPORT ANNUEL
DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE L'AUDIOVISUEL
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le président du Conseil supérieur de l'audiovisuel, en application de l'article 18 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée relative à la liberté de communication, le rapport annuel établi par le Conseil supérieur de l'audiovisuel, pour l'année 2002.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
QUESTIONS ORALES
M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.
AMÉNAGEMENTS DE LA VOIE FERRÉE NICE-CUNEO
M. le président. La parole est à M. José Balarello, auteur de la question n° 260, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
M. José Balarello. Monsieur le ministre, la ligne ferroviaire Nice-Monaco-Vintimille-Cuneo-Turin, qui traverse la vallée de la Roya, est depuis plusieurs années obsolète. Malgré les nombreuses questions orales et écrites posées sur le sujet, ainsi que les nombreux courriers adressés aux différents interlocuteurs tant français qu'italiens concernés par ce dossier, le problème de sa modernisation subsiste. Aussi vous demanderai-je, monsieur le ministre, de bien vouloir répondre à deux questions.
Tout d'abord, dans quel délai examinerez-vous, avec votre collègue italien chargé des transports ferroviaires, le problème de la remise en état de l'électrification du tronçon de quarante-deux kilomètres de la voie ferrée Nice-Cuneo situé en France, laquelle a été détruite en 1944, lors de la dernière guerre ? Cette électrification permettrait d'accélérer les convois franco-italiens et d'augmenter le trafic de marchandises. J'ajoute que, en territoire italien, l'électrification de la ligne a déjà été réalisée.
Par ailleurs, monsieur le ministre, quand les autorités ferroviaires françaises et italiennes se décideront-elles, poussées par leurs gouvernements respectifs et par l'Europe, à supprimer la rupture de charge ferroviaire, à Vintimille, sur l'axe Roya-Menton-Monaco ? Cette modification mineure aurait une influence importante sur l'économie de l'est de la Côte d'Azur.
La tenue en 2006 à Turin des jeux Olympiques d'hiver, dont le principal aéroport de desserte sera celui de Nice-Côte d'Azur, ainsi que le développement économique de l'est de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, exigent que des réponses soient apportées à ces questions urgentes.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur le sénateur, des aménagements sur les lignes existantes du littoral et des Alpes du Sud sont inscrits au contrat de plan Etat-région PACA pour la période 2000-2006. Il en est ainsi, notamment de la réalisation de la deuxième phase du programme de modernisation de la ligne ferroviaire Nice-Breil vers la vallée de la Roya. Cette modernisation de la desserte d'une partie de la ligne qui mène à Cuneo permettra de densifier les dessertes périurbaines de l'agglomération niçoise et de réduire encore les temps de parcours.
La question de l'amélioration des liaisons franco-italiennes dans les Alpes du Sud est traitée, vous le savez, dans le cadre de la conférence intergouvernementale, la CIG. L'un des groupes de travail constitués par la CIG a pour mission d'examiner les perspectives de développement du transport ferroviaire. Au printemps 2002, la CIG a adopté son mandat. Il prévoit, en particulier, l'examen des perspectives de développement des lignes ferroviaires existantes Marseille-Menton-Monaco-Gênes et Nice-Vintimille-Cuneo en fonction des besoins en matière de déplacements entre les deux pays.
Une analyse multimodale de ces besoins pour les voyageurs et le fret entre la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et l'Italie a été engagée sur le fondement de ce mandat. Elle est aujourd'hui cofinancée par l'Etat français et par le conseil régional de Provence-Alpes-Côte d'Azur. Ses conclusions devraient être disponibles cet été. Les premiers résultats des projections de trafic ont été présentés à Paris le 7 avril dernier au groupe de travail chargé des questions ferroviaires. Le groupe poursuit donc ses travaux sur ces premières bases.
M. le président. La parole est à M. José Balarello.
M. José Balarello. Monsieur le ministre, le problème de la ligne Nice-Sospel-Breil est différent de celui que j'ai soulevé. La modernisation de cette ligne est inscrite au contrat de plan et elle est financée par la région. Les questions que je vous ai posées sont tout autres.
A cet égard, je dois vous dire, monsieur le ministre, que je suis assez désespéré. En effet, en consultant mes archives, je me suis aperçu que la première question sur ce sujet - sans réponse à ce jour - date du 1er octobre 1992 ! Par la suite, j'ai réitéré mes questions en 1999, en 2000, en 2002, sans jamais pouvoir obtenir de réponse !
Monsieur le ministre, je constate que la décentralisation présente tout de même de grandes vertus. En effet, si vous ne faites pas en sorte que la décision puisse être prise à l'échelon du département par la direction départementale de l'équipement des Alpes-Maritimes, la direction régionale de la SNCF de Marseille et le préfet, nous n'en sortirons pas. Si, dans dix ans, je siège toujours dans cette assemblée, je continuerai à poser en vain les mêmes questions !
La ligne Nice-Breil n'est pas électrifiée et ne le sera jamais, mais il n'est pas normal que le tronçon reliant Vintimille à Cuneo, sur une importante ligne menant à Turin où circulent vingt-trois trains par jour - ce trafic pourrait, d'ailleurs, être multiplié par deux ou trois -, soit, en territoire français, non électrifié sur quarante-deux kilomètres, alors qu'il pourrait l'être. Encore y faudrait-il une volonté sinon européenne, en tout cas franco-italienne !
Enfin, la rupture de charge actuelle en gare de Vintimille est parfaitement ridicule. Elle pourrait être supprimée grâce à cent mètres de voie ferrée, les tunnels existant déjà ; cela permettrait de doubler ou de tripler le trafic et de rejoindre Menton et Monaco sans être obligé de faire une halte en gare de Vintimille pour attendre le train en provenance de Gênes pendant une demi-heure ou trois quarts d'heure, ce qui est dissuasif, surtout en période hivernale.
Monsieur le ministre, je vous en supplie : décentralisez la décision, demandez aux autorités locales de régler le problème ! Nous n'en sortirons jamais si la décision doit continuer à relever de Paris et de Rome !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Gilles de Robien, ministre. Je prends les deux engagements suivants : premièrement, je saisirai pour avis la direction départementale de l'équipement ; deuxièmement, je vous promets, monsieur Balarello, d'aborder ce sujet avec M. Lunardi le 4 juillet prochain.
M. José Balarello. Je vous remercie !
FINANCEMENT DU LOGEMENT DES SAISONNIERS
M. le président. La parole est à Mme Michelle Demessine, auteur de la question n° 255, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
Mme Michelle Demessine. Je souhaite interroger M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sur les difficultés rencontrées par les conseils généraux, quant au financement du logement des travailleurs saisonniers, à la suite du non-renouvellement de la dotation spécifique relative aux prêts locatifs à usage social - les PLUS - et aux prêts locatifs sociaux - les PLS - qui leur était allouée.
Principale difficulté à laquelle sont confrontés les travailleurs saisonniers, la question du logement a fait l'objet, sous la précédente législature, de plusieurs réformes ciblées répondant aux attentes de cette catégorie professionnelle très présente dans les départements touristiques.
Ces réformes avaient été élaborées conjointement par les secrétariats d'Etat au logement et au tourisme et par les professionnels, employeurs et salariés, de la montagne et du tourisme.
Il s'agissait tout d'abord de rendre les saisonniers éligibles aux allocations logement et de permettre l'accès au financement public pour les constructions destinées aux saisonniers, ce financement étant, jusqu'alors réservé au logement social. Un accord entre l'Etat et l'Union d'économie sociale du logement, l'UESL, est intervenu en octobre 2001 pour l'accompagnement du 1 % logement, et un montage financier adéquat a été prévu pour les constructions dédiées aux saisonniers, compte tenu de leur spécificité, tels le surcoût engendré ou l'inoccupation fréquente des locaux. Enfin, un chargé de mission a été spécialement mis à disposition par l'Etat.
Alors que, dans de nombreux départements, aucun nouveau programme n'était mis en oeuvre, ces mesures ont amené la création, sur l'ensemble du territoire, de plusieurs centaines de logements destinés aux saisonniers. Pour le département de la Savoie, par exemple, fortement utilisateur de cette main-d'oeuvre, 300 logements dévolus aux travailleurs saisonniers ont été construits en 2002, ce qui a permis de rattraper un retard important en la matière. L'estimation globale des besoins, évalués à 800 logements pour ce département, a donné lieu à l'établissement d'un programme de construction sur trois ans. Plusieurs années seront nécessaires pour répondre aux besoins exprimés par les employeurs, qui se trouvent confrontés à des difficultés de recrutement en raison du manque de solutions d'hébergement pour les salariés désireux d'accéder à un logement décent, indépendant du contrat de travail.
Malgré l'effet positif de ces dispositions sur la projection de programmes de réalisation de logements et sur l'économie locale, il apparaît que, dans un strict souci d'économies budgétaires nationales, la dotation spécifique en PLUS et en PLS allouée aux départements pour les saisonniers ne sera pas reconduite. Or supprimer cette dotation aura des conséquences désastreuses pour le développement des zones concernées, pour l'attractivité professionnelle de ces régions et pour la qualité de vie des saisonniers amenés à y séjourner.
Ainsi, pour le département de la Savoie, la disparition de cette ligne budgétaire supprimera du programme de construction plus de 300 logements prévus pour 2003. Qui plus est, avec la disparition de ces aides à la construction, c'est un nombre équivalent d'emplois directs et indirects, pourtant vitaux pour le dynamisme du département, qui seront supprimés.
Par ailleurs, ce choix budgétaire national va faire peser sur les finances des conseils généraux des charges financières supplémentaires, qu'il va leur falloir assumer par un accroissement de la fiscalité locale compte tenu des engagements déjà pris, alors même qu'ils sont particulièrement touchés par une sollicitation financière de plus en plus lourde résultant d'un désengagement de l'Etat, au nom d'une certaine conception de la décentralisation.
Pour avoir été en partie, comme vous le savez, monsieur le ministre, à l'origine de ces mesures, je vous rappelle que la France, premier pays touristique au monde, dispose en la matière d'un potentiel déterminant pour son économie, potentiel qu'il convient d'encourager et non de décourager, comme semble y conduire cette décision.
Je me permets donc de vous proposer de doter le logement des saisonniers d'une enveloppe nationale spécifique.
A défaut, je vous demande, monsieur le ministre, quelles dispositions vous envisagez de mettre en oeuvre afin de pallier les difficultés que rencontrent les départements confrontés à cette baisse de dotations.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Madame le sénateur, le logement des travailleurs saisonniers est évidemment une de mes préoccupations en tant que ministre chargé tout à la fois du logement et du tourisme. C'est en agissant sur l'ensemble de la chaîne du logement que j'entends répondre à ce besoin essentiel pour assurer à la fois le dynamisme de nos territoires et l'activité touristique de notre pays.
Je peux vous l'annoncer d'emblée, je ne ferai pas de grand plan logement des travailleurs saisonniers qui permettrait un superbe effet d'annonce qui ne réglerait rien sur le terrain. On voit ce qu'il en est aujourd'hui ! Ce n'est pas comme cela que le Gouvernement entend travailler et ce n'est pas comme cela qu'il travaille depuis plus d'un an.
Quels sont les besoins des travailleurs saisonniers en matière de logement ? Ces travailleurs ont évidemment besoin d'un logement décent, locatif de statut social, intermédiaire ou libre selon leur niveau de revenu.
Concernant le logement locatif libre, le Gouvernement a décidé de mettre en place un nouveau dispositif d'incitation fiscale pour la réalisation de logements locatifs, qu'il s'agisse de logements neufs ou de logements très dégradés qui ne permettaient plus d'offrir aux occupants des conditions de vie décente et qui seront donc rénovés par leurs propriétaires.
Ce dispositif, contrairement au mécanisme précédent, est conçu pour fonctionner et pour permettre le développement d'une offre nouvelle là où existent de véritables besoins de logements locatifs, notamment dans les zones touristiques.
Concernant le logement locatif social, c'est au niveau local que doivent être définis les besoins et les moyens pour y répondre. Pour la Savoie, l'ensemble des partenaires locaux a estimé cette année les besoins à trois cents logements locatifs sociaux. Tous ensemble, directement ou par l'intermédiaire du préfet, ils m'ont saisi de ce sujet. Hervé Gaymard m'a personnellement présenté ce dossier et montré tous les enjeux qui s'y attachaient.
C'est donc sans hésiter que j'ai décidé d'accorder, dès cette année, une enveloppe exceptionnelle de trois cents logements locatifs sociaux à ce département pour qu'il puisse mettre en oeuvre le programme qui avait été aussi bien élaboré au niveau local.
L'actuel Gouvernement a la volonté d'écouter les gens du terrain, d'entendre leur demande et d'y répondre chaque fois qu'il le peut, dans le simple souci d'être efficace et de traiter les problèmes.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. L'intervention de M. le ministre a le mérite d'être claire, même si, bien entendu, je ne partage pas son avis. Si j'en crois sa réponse, nous revenons à la case départ.
En effet, votre programme, monsieur le ministre, ne comprend pas de mesures spécifiques pour les travailleurs saisonniers. Je le regrette beaucoup, sachant que les mesures générales ne répondront pas à leurs besoins.
TRAVAUX D'AMÉNAGEMENT DE LA RN 21
M. le président. La parole est à M. Dominique Mortemousque, auteur de la question n° 281, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
M. Dominique Mortemousque. Monsieur le ministre, mon prédécesseur, Xavier Darcos, s'était déjà exprimé au Sénat afin de connaître l'état d'avancement des travaux d'infrastructures routières en Dordogne et, plus précisément, le calendrier des travaux de l'autoroute A 89 reliant Bordeaux à Clermont-Ferrand.
Aujourd'hui, je prends le relais pour vous interroger sur des travaux tout aussi importants : il s'agit de l'aménagement de la RN 21, qui assure la liaison entre Limoges, Périgueux, Bergerac, Agen, Auch, Tarbes et l'Espagne via le Somport.
En 1996, cinq départements, au sein de l'association Euro-Sud, présidée par M. Jean François-Poncet, ont obtenu l'inscription de cet axe au schéma routier transeuropéen.
Sur les 394 kilomètres de cet axe, qui présente un intérêt Europe-régions puisqu'il concerne le Limousin, la région Midi-Pyrénées et l'Aquitaine, avec pour priorité le Lot-et-Garonne et la Dordogne, une vingtaine de kilomètres ont été réalisés à ce jour.
L'enjeu financier et économique pour les travaux d'aménagement à effectuer sur cet axe est important.
A ce jour, où en sommes-nous ? Quelles sont, monsieur le ministre, les intentions du Gouvernement sur les choix d'aménagement pour la RN 21, qui présente de graves lacunes en termes d'accessibilité, mais aussi de visibilité et donc d'insécurité ?
Lors du dernier comité interministériel pour l'aménagement du territoire, le département de la Dordogne a été choisi par le Gouvernement pour l'expérimentation d'un contrat territorial adapté aux besoins ruraux, concernant notamment les services publics.
Il va sans dire que transports et services publics sont indissociables en termes d'aménagement du territoire.
C'est donc avec un grand intérêt que les Périgourdins attendent de votre part des éléments de réponse sur les travaux de la RN 21, qui constitue un axe privilégié de notre réseau routier.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur le sénateur, vous m'interrogez sur la question très importante des travaux d'aménagement de la RN 21, je vous en remercie.
Comme vous le savez, en tant qu'itinéraire bis, cette route nationale favorise les migrations estivales et constitue un enjeu important de desserte des territoires situés à l'écart des réseaux rapides.
Elle est également classée dans le réseau transeuropéen. Elle supporte un trafic moyen de 5 000 à 6 000 véhicules par jour, avec des pointes à plus de 10 000 véhicules par jour à l'approche des principales agglomérations. L'accidentologie constatée y est préoccupante, en particulier sur la section Villeneuve-sur-Lot-Agen.
C'est à ce titre que la RN 21 donne lieu à des aménagements ponctuels tels que des déviations d'agglomération et des créneaux de dépassement. Les solutions adaptées aux trafics rencontrés permettront de faire baisser l'insécurité tout en diminuant les temps de parcours et d'accès au réseau autoroutier.
Les importants moyens financiers retenus à l'actuel contrat de plan qui s'élèvent à près de 105 millions d'euros permettront de poursuivre les aménagements engagés au cours des précédents contrats. Il s'agit notamment de l'aménagement des déviations de Bergerac et d'Agen - pour chacune d'elles, une première tranche devrait être mise en service à la fin de cette année -, de l'aménagement en artère interurbaine à deux fois deux voies de la section Villeneuve-sur-Lot-Agen et de la construction de deux créneaux supplémentaires sur la section Périgueux-Limoges.
Par ailleurs, afin de définir le parti d'aménagement à long terme de la RN 21 et de planifier les aménagements correspondants, j'ai demandé à mes services de conduire une étude d'itinéraire.
Les aménagements à réaliser devront notamment permettre de répondre aux besoins d'échanges entre les deux dipôles Agen-Villeneuve-sur-Lot et Bergerac-Périgueux et de constituer un itinéraire de substitution aux axes nord-sud lors des grandes migrations estivales. A cet égard, le tronçon Périgueux-Agen reliant les autoroutes A 89 et A 62 revêt une importance particulière.
Les conclusions de cette étude sont attendues en 2004. Vous en aurez bien sûr connaissance. Je propose qu'une intense concertation ait lieu à ce moment-là afin de concrétiser cette étude en travaux sur le terrain.
M. le président. La parole est à M. Dominique Mortemousque.
M. Dominique Mortemousque. Je souhaite simplement remercier M. le ministre de sa réponse.
CRÉATION D'UN NOUVEL AÉROPORT À TOULOUSE
M. le président. La parole est à M. Gérard Roujas, auteur de la question n° 275, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
M. Gérard Roujas. Comme vous le savez, monsieur le ministre, M. le préfet de la Haute-Garonne a présenté en janvier 2003 une préétude portant sur la création d'une nouvelle plate-forme aéroporturaire dans la région toulousaine.
Cette préétude a soulevé de multiples réactions d'hostilité aussi bien de la part des élus que de la part des populations directement concernées par les huit sites répertoriés pour la réalisation de cette infrastructure, les sites du Nord toulousain semblant faire l'objet d'une attention plus poussée.
Il apparaît évident, aujourd'hui, que cette préétude, menée par Aéroports de Paris, a été conduite sans aucune consultation et que le choix des sites a été fait avec une légèreté, un manque de respect des populations et de leurs élus indignes d'une démocratie vivante.
Comment la population ne réagirait-elle pas lorsqu'elle constate par exemple que, pour l'un des sites répertoriés, il est écrit en toutes lettres : « destruction du village » ?
Il apparaît tout aussi évident que la démonstration de la nécessité d'une nouvelle plate-forme n'est pas apportée.
Le non-respect des règles obligatoires de protection de l'environnement dans l'approche aérienne de Toulouse-Blagnac doit-il conduire à la création de ce monstre, qui, selon les dires, pourrait accueillir 20 millions de passagers à l'horizon 2020 ?
Il apparaît évident, enfin, que la réalisation d'une ligne TGV reliant Toulouse à Paris et à d'autres métropoles est plus que jamais une priorité absolue.
Pourquoi, par ailleurs, ne pas renforcer l'utilisation des aéroports de Tarbes ou de Carcassonne, prêts à accueillir aussi bien des passagers nationaux ou internationaux que du fret supplémentaire ?
Depuis janvier dernier, la très forte mobilisation des élus et des populations a conduit M. le secrétaire d'Etat aux transports à annoncer l'abandon des sites situés sur le vignoble AOC du Frontonnais et à affirmer que rien ne serait fait contre l'avis des élus.
Cette réponse, par son inconséquence, n'a eu d'autre effet que de jeter de l'huile sur le feu pour l'ensemble des autres sites et a mis en grande difficulté les élus concernés.
Nous attendons du Gouvernement que vous représentez, monsieur le ministre, qu'il fasse un choix politique et un choix de société, un choix qui ne remette pas en cause la politique d'aménagement et de développement durable engagée par les élus de ces territoires.
Dans ce contexte, monsieur le ministre, je vous demande de considérer la préétude présentée en janvier 2003 comme nulle et non avenue.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur le sénateur, pour répondre d'emblée à votre interpellation, je dirai de façon catégorique : il m'est difficile de mettre fin à un projet qui n'existe pas !
Cette réponse suffirait, mais je vais l'expliciter : il n'existe pas aujourd'hui de projet de construction d'un nouvel aéroport pour la région toulousaine. Ce qui existe, en revanche, c'est un constat, puis une démarche.
Le constat se fonde sur la situation de l'aéroport de Toulouse, qui est enserré dans des zones très urbanisées, qui a un potentiel de développement trop limité et qui génère des nuisances sonores ressenties désagréablement par les riverains.
La révision du plan d'exposition au bruit, le PEB, nécessaire à la maîtrise de l'urbanisme aux alentours de l'aéroport, crée de fortes contraintes, fige l'évolution et le renouvellement des quartiers urbains importants.
Quant à la démarche, c'est une démarche de démocratie. Une réflexion est menée en commun avec les collectivités locales sur l'avenir de la desserte aéroportuaire de la région toulousaine et sur l'opportunité d'aménager une éventuelle nouvelle plate-forme dans cette région, dans le cadre du contrat de plan 2000-2007 entre l'Etat et la région.
Des études ont été conduites avec le souci de n'écarter aucune option. L'impact d'une liaison ferroviaire à grande vitesse, le développement des autres plates-formes aéroportuaires régionales ont ainsi fait l'objet d'une première analyse. L'étude a identifié huit sites possibles dans l'hypothèse où la construction d'un nouvel aéroport serait décidée. La réflexion se poursuit.
La démarche, c'est également une concertation, dans la plus grande transparence, avec tous les acteurs concernés. J'ai pris bonne note de l'initiative qu'ont prise les conseils généraux de la Haute-Garonne et de Tarn-et-Garonne de lancer des contre-expertises. Celles-ci constitueront des éléments complémentaires de cette réflexion en apportant de nouveaux éclairages.
Sachez que l'Etat ne prendra aucune décision sur l'aménagement d'une nouvelle plate-forme aéroportuaire dans la région toulousaine sans qu'un consensus ait été dégagé avec les collectivités territoriales concernées. Je vous confirme, en particulier, qu'aucun aéroport ne sera construit au coeur d'un territoire viticole faisant l'objet d'une appellation d'origine contrôlée.
Par ailleurs, le projet de prolongement de la ligne à grande vitesse Bordeaux-Toulouse semble, à bien des égards - on l'a relevé lors du débat sur le financement des infrastructures de transport -, particulièrement intéressant. Il s'agit maintenant de préciser ce qu'on en attend exactement, en termes tant de fonctionnalité que d'aménagement.
Un débat public pourrait être lancé en 2004 sur le fondement des études exploratoires conduites par Réseau ferré de France, en partenariat avec l'Etat et les principales collectivités locales concernées, et qui seront prochainement conclues. Ce débat, n'en doutons pas, constituera une étape décisive dans le lancement de ce projet.
M. le président. La parole est à M. Gérard Roujas.
M. Gérard Roujas. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse. Cela étant, nous regrettons que M. le secrétaire aux transports et à la mer ait laissé entendre que tel ou tel site ne serait pas concerné par l'étude préliminaire. Imaginez l'embarras des élus des autres sites ! En l'occurrence, M. le secrétaire d'Etat a commis une gaffe, et nous vous demandons, monsieur le ministre, de le comprendre.
PROJET DE CONSTRUCTION DE L'AUTOROUTE A 103
M. le président. La parole est à M. Christian Demuynck, auteur de la question n° 282, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
M. Christian Demuynck. Monsieur le ministre, vous avez récemment manifesté le souhait d'abroger le décret du 26 avril 2002 qui a ouvert une procédure de révision partielle du schéma directeur de la région d'Ile-de-France, en vue de tirer les conséquences de l'abandon par le précédent gouvernement de trois projets autoroutiers, dont celui de l'autoroute A 103.
Si je m'associe à votre condamnation de la méthode employée par votre prédécesseur, qui a signé un décret de cette importance alors qu'il était sur le départ, il n'en reste pas moins vrai que ce décret avait pour mérite de mettre un terme à un tracé très controversé.
Conçu il y a près de quarante ans, ce projet visait à relier l'A 3 du noeud autoroutier de Rosny-sous-Bois à l'A 4, deux autoroutes déjà quotidiennement surchargées par des embouteillages de plusieurs kilomètres.
Loin d'améliorer la circulation, cette jonction risquerait fort de subir le même sort et de devenir un véritable parking à ciel ouvert.
En outre, cet axe nuirait considérablement à l'équilibre environnemental des quatre villes concernées par le tracé, Neuilly-Plaisance, Neuilly-sur-Marne, Noisy-le-Grand et Gournay-sur-Marne, qui seraient ainsi totalement défigurées.
Les nuisances supportées par les habitants concernés seraient, de plus, considérables.
L'atteinte à l'environnement dans un département aussi urbanisé que la Seine-Saint-Denis serait irrémédiable ; je pense notamment au parc des Coteaux-d'Avron, d'une superficie de trente et un hectares, véritable poumon vert pour notre département - protégé, par ailleurs, par deux arrêtés de biotope -, qui serait alors totalement mutilé. Il en serait de même pour la ville de Neuilly-sur-Marne, qui subirait des nuisances insupportables à proximité d'un autre espace préservé, la Haute-Ile en bord de Marne.
Vous l'avez compris, monsieur le ministre, je suis totalement opposé à ce projet, comme le sont de nombreux habitants et associations de cette circonscription, qui, à mes côtés, se sont toujours élevés contre cet axe autoroutier.
C'est pourquoi l'abrogation de ce décret risque fort d'exacerber les oppositions et de nuire à votre légitime souci de trouver une solution au réel problème d'engorgement de ce secteur.
Il est indéniable qu'une large concertation préalable trouverait une issue plus consensuelle.
Monsieur le ministre, je voudrais donc vous poser deux questions. Tout d'abord, quels sont les projets du Gouvernement en la matière ? Ensuite, quelles mesures comptez-vous prendre pour que les élus et les habitants concernés soient consultés avant une éventuelle abrogation de ce décret ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur le sénateur, vous avez raison d'appeler mon attention sur le décret du 26 avril 2002, qui ouvre une procédure de révision partielle du schéma directeur de la région d'Ile-de-France en vue de tirer les conséquences de l'abandon par le précédent gouvernement de trois projets routiers, dont celui de l'autoroute A 103 entre Villemomble et l'A 4 à Champs-sur-Marne.
Ce décret a été pris de façon précipitée - le 26 avril 2002, je vous le rappelle ! - sans qu'aucune solution de rechange n'ait été proposée et alors même que les problèmes demeurent, comme le font apparaître les points de vue, d'ailleurs divergents, des élus de ce secteur.
Le président du conseil régional d'Ile-de-France n'a pas souhaité - vous le savez - mettre en oeuvre cette révision partielle et une révision générale du schéma directeur de la région d'Ile-de-France doit être engagée dès 2004.
L'abrogation de ce décret pourrait avoir le mérite de reposer plus clairement la question de ce projet dans le cadre de la révision générale du schéma directeur de la région d'Ile-de-France.
En tout état de cause, ce qui importe aujourd'hui, c'est d'engager sans attendre une vraie démarche de concertation avec les élus, mais aussi, bien entendu, avec les populations. Cette démarche apparaît la mieux à même de reposer la question du raccordement de l'A 103 à l'A 4 avec des solutions durables.
J'ai donc demandé au préfet et au directeur régional de l'équipement d'Ile-de-France de reprendre cette problématique et d'engager une telle concertation dans le courant de cette année 2003.
M. le président. La parole est à M. Christian Demuynck.
M. Christian Demuynck. Monsieur le ministre, j'accepte votre proposition de concertation car, s'agissant de l'autoroute A 103, elle n'a jamais eu lieu : on nous a toujours expliqué que les services de l'Etat avaient une solution, mais ni les élus ni la population n'y ont été associés.
Permettez-moi de revenir, monsieur le ministre, sur l'abrogation du décret Gayssot, décret tout à fait scandaleux qui a été pris - ce qui est absolument intolérable - entre les deux tours de l'élection présidentielle. On peut d'ailleurs se poser la question de savoir s'il ne faudra pas un jour que le législateur interdise de telles pratiques à l'avenir.
Quoi qu'il en soit, le fait d'abroger ce décret risque de focaliser une nouvelle fois chaque élu sur ses positions, alors que notre objectif commun est d'essayer de trouver une solution. Ne serait-il pas plutôt possible de ne rien changer, de mettre tout le monde autour d'une table et de ne décider qu'à l'issue des négociations ?
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Pastor, auteur de la question n° 280, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
M. Jean-Marc Pastor. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec près de 90 000 habitants et une forte densité de PME-PMI, l'agglomération de Castres-Mazamet se trouve être le premier pôle industriel et de recherche privée entre Toulouse, Montpellier et Barcelone.
Cette agglomération et les quelque 150 000 habitants de ce bassin d'emploi du sud-est du Tarn ne bénéficient d'aucune infrastructure routière, d'où la perte sèche de plus de 4 400 emplois industriels ces dernières années, contre une création de 3 300 emplois dans le tertiaire. Il est le seul bassin, en Midi-Pyrénées, à enregistrer ainsi un solde négatif.
L'élaboration, en 1998, sur l'initiative du comité de bassin, d'une charte pour l'avenir du sud du Tarn, confirmée en 2000 lors de la signature du contrat de plan Etat-région avec l'attribution de plus de 120 millions d'euros pour notre désenclavement routier, nous a permis de percevoir alors la preuve tangible de la volonté de l'Etat et de la région de nous accompagner.
Que reste-t-il de ce contrat trois ans après ? Vous nous avez rendu visite, monsieur le ministre, et je tiens à vous en remercier. Il n'empêche que l'on ressent aujourd'hui une démobilisation de l'Etat.
Depuis lors, vous affirmez dans vos courriers que toutes les études seront menées pour obtenir en 2006 les financements nécessaires à la réalisation de ce désenclavement. Cela signifie que, dans les trois ans à venir, nous parviendront les conclusions d'études qui étaient jusqu'à présent inexistantes ou qui étaient seulement amorcées alors qu'elles sont primordiales, que ce soit sur la liaison Saïx-Soual, la déviation de Cuq-Toulza, la liaison Cuq-Toulza-Verfeil, la liaison Mazamet-Castres-Albi, sans compter l'étude sur la déviation de Réalmont que vous venez d'annoncer par courrier. Toutes ces études d'un coup, cela fait beaucoup !
Ces études sont trop nombreuses pour que nous puissions accorder du crédit à de telles annonces puisque, dans le même temps, nous perdons, avec vos décisions, les financements qui avaient été obtenus pour tous les travaux non commencés, à savoir ceux de la liaison Saïx-Soual, des deux créneaux de dépassement entre Albi et Castres - outre celui de Venès -, de la déviation de PuyLaurens, des aménagements entre Mazamet et Béziers, et j'en oublie certainement.
En effet, les gels de 20 % des crédits en 2002, de 30 % en 2003 ainsi que les gels programmés pour 2004 sont là pour attester que ces travaux ne verront certainement pas le jour avant 2006, alors même que ces études sont bouclées ou presque. Bref, il y a déjà du retard dans l'application du contrat de plan.
Ma question est donc simple, monsieur le ministre.
Nous souhaiterions que vous engagiez votre ministère sur nos projets. Peut-être souhaitez-vous, au regard des objectifs que vous mentionnez dans vos courriers, nous accorder un plan exceptionnel de rattrapage ? Dans ce cas, ma sollicitation n'aurait plus lieu d'être. Mais, dans le cas contraire, comment comptez-vous vous y prendre pour faire en quelques années autant de réalisations ? Quelle est votre position sur la révision du contrat de plan, en 2003 notamment ?
Monsieur le ministre, en fait, comment, par quelles mesures et avec quels moyens financiers comptez-vous désenclaver notre territoire ?
Les collectivités - communes, départements, régions - ont déjà fait des efforts, elles sont prêtes à les renouveler et elles n'attendent plus que votre feu vert. Quand allez-vous le leur donner ?
Monsieur le ministre, cette nécessité de désenclaver ce territoire est primordiale, sauf à cautionner un désert.
Je vous remercie de votre réponse claire, objective et pragmatique.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur le sénateur, vous m'interrogez sur le désenclavement du département du Tarn. J'ai pu me rendre récemment dans ce département, que je connaissais déjà - pardonnez-moi cette remarque personnelle - depuis mon enfance.
Comme je vous l'ai indiqué à cette occasion, la route nationale 126 qui assure depuis Toulouse la liaison avec Castres-Mazamet a vocation à être aménagée à deux fois deux voies, avec des échanges dénivelés.
Pour traduire cette volonté en acte, il faut des financements, mais il est avant tout indispensable de disposer d'un projet parfaitement abouti avant de pouvoir engager les travaux.
J'ai donc relancé l'étude d'avant-projet sommaire - ou APS - de l'itinéraire, dans l'objectif d'obtenir une déclaration d'utilité publique - ou DUP - de l'ensemble de l'itinéraire dès 2006.
Sans attendre, dans le cadre de l'actuel contrat de plan entre l'Etat et la région, les études de projet de la déviation du Puylaurens sont en cours, ainsi que les procédures de remembrement et d'acquisitions foncières, menées en parallèle, afin de permettre un lancement des travaux aussi proche que possible - en tout cas à partir de 2004 - en fonction des disponibilités budgétaires.
Les études d'APS de la section urbaine de la liaison Castres-Soual sont sur le point d'aboutir. Toutefois, sur la partie non urbaine Saïx-Soual l'avancement, des études est moins rapide en raison des difficultés techniques et d'un manque de consensus sur le tracé à retenir : rappelons-nous le débat qui a eu lieu à ce sujet !
Les travaux de la déviation de Cuq-Toulza et plus généralement de la section Puylarens-Verfeil ne sont pas inscrits à l'actuel contrat de plan. Cependant, les études d'avant-projet de ces deux sections seront intégrées dans la démarche d'APS d'itinéraire, conduisant à la DUP en 2006.
Pour en revenir à la question des financements, la situation laissée par le gouvernement précédent - il faut tout de même en tenir compte ! - a imposé la mise en place d'un gel en 2002 pour maîtriser la dérive de nos finances publiques, suivi, cette année, d'une mise en réserve compte tenu des incertitudes pesant sur notre pays et d'une situation économique difficile.
Dans un tel contexte, il convient d'examiner attentivement l'ensemble des demandes de crédits afin, d'une part, de donner la priorité aux opérations déjà engagées et, d'autre part, de veiller à l'utilisation rapide des crédits, dans un souci d'efficacité économique. Cela ne se traduit cependant pas par un report de la totalité des opérations non engagées. Ainsi, en 2002, les crédits nécessaires au lancement de la déviation de Castres ont bien été mis en place.
Le débat sur les infrastructures nous a, en outre, rappelé que, si nous mettons en place pour 2004 une ressource pérenne - et si possible affectée, comme l'ont souhaité bon nombre de sénateurs -, alors nos contrats de plan pourront être respectés, et la signature de l'Etat aussi.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Pastor.
M. Jean-Marc Pastor. Je tiens tout d'abord à remercier M. le ministre de sa réponse.
Je précise que le contrat de plan qui concerne notre département avait prévu une enveloppe de 123 millions d'euros, soit un montant deux fois et demie supérieur à celui de toutes les enveloppes que nous avions prévues pour le désenclavement de cette partie sud du Tarn.
Toutefois, nous avons pu noter une restriction des crédits de 30 % sur l'exercice 2003 et, à cet égard, le débat qui a eu lieu à l'Assemblée nationale et au Sénat sur les infrastructures a malheureusement mis en lumière une certaine prudence eu égard aux futures enveloppes qui seraient mises en place.
Je regrette franchement que nous n'en sachions pas un petit peu plus sur la position du Gouvernement par rapport à la révision des contrats de plan prévue en 2003, afin que nous puissions rassurer l'ensemble des partenaires économiques de cette partie du département.
M. le président. La parole est à Mme Nelly Olin, auteur de la question n° 283, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
Mme Nelly Olin. Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur la situation extrêmement difficile du Val-d'Oise, particulièrement de l'est de ce département, en matière d'infrastructures routières et de transport.
Je précise qu'inscrit depuis des années aux différents contrats de plan, y compris dans le douzième contrat, le boulevard intercommunal du Parisis, dit « BIP », n'a toujours pas vu le jour, alors que sa réalisation est vitale pour le désenclavement de certaines villes du département ; je pense notamment à Sarcelles, Villiers-le-Bel ou Arnouville.
De même, concernant l'autoroute A16, dont 42 hectares sont figés sur Garges par l'Etat depuis 1965, le projet semblait définitivement abandonné depuis 1997. Or il semblerait aujourd'hui, à en croire certaines rumeurs, qu'une nouvelle remise en chantier serait envisagée.
Enfin, en matière de transports en commun, le Val-d'Oise est notoirement sous-développé. Je rappelle que nous n'avons aucun moyen de transport pour rejoindre l'aéroport de Roissy : seul Allo-Bus fait fonction de transport en commun.
Il apparaît donc essentiel de mettre en oeuvre un vaste programme de désenclavement. Je vous demande, en conséquence, de me faire part des projets gouvernementaux concernant le Val-d'Oise.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Madame la sénatrice, le boulevard intercommunal du Parisis, le BIP, présente en effet, à l'échelle du Val-d'Oise, une importance tout à fait particulière de désenclavement, mais aussi de structuration de l'espace entre l'A 86 et la Francilienne, et entre l'A 1 et l'A 15.
Le BIP Ouest, que j'ai inauguré le 25 janvier dernier, permet maintenant le rabattement vers l'A 15 des flux de circulation provenant des communes de Sannois, Saint-Gratien, Eaubonne ou Soisy-sous-Montmorency.
Le BIP Est vise, quant à lui, à établir un maillage en reliant les RN 1, 16 et 17. Au contrat de plan est inscrit une somme de près de 45 millions d'euros, qui va permettre d'envisager la réalisation de la sous-section comprise entre la RD 370 et la future déviation de la RD 84, sur le territoire des communes de Gonesse et de Bonneuil-en-France. Les études détaillées seront achevées dans le courant de cette année, ce qui devrait permettre d'envisager un début des travaux en 2004, sous réserve, évidemment, des disponibilités budgétaires qui nous seront attribuées à la fin de cette année.
Le BIP Centre, lui, a une vocation certainement plus locale. Il donne lieu à différentes variantes de tracé dont il convient de poursuivre les études.
S'agissant du prolongement de l'A 16, je vous confirme que l'objectif consiste, à terme, à raccorder cette autoroute au BIP. La poursuite vers les autoroutes A 1 et A 86 dans un milieu densément urbanisé paraît devoir, en revanche, être écartée définitivement, les mesures indispensables n'ayant pas été prises en leur temps.
Dans un premier temps, il s'agira d'assurer la connexion de l'A 16 sur la Francilienne. Les études d'avant-projet ont été reprises et mes services étudient les modalités d'inscription du prolongement de l'A 16 dans le cont rat de concession de la Société des autoroutes du nord et de l'est de la France, la SANEF.
Dans le domaine des transports collectifs, des programmes importants sont entrepris dans le Val-d'Oise. Ainsi, les travaux de création d'une liaison entre Ermont - Eaubonne et Paris-Saint-Lazare ont débuté en 2002. Il s'agit de la première grande opération de transports collectifs du contrat de plan à avoir été lancée en travaux, pour un montant de près de 200 millions d'euros.
D'autres opérations de transports collectifs intéressant le Val-d'Oise sont inscrites au contrat de plan. Elles ont fait l'objet de schémas de principe approuvés par le syndicat des transports d'Ile-de-France. Leurs avant-projets sont en cours d'élaboration.
Ces opérations sont le prolongement du trans-Val-de-Seine au pont de Bezons, du site propre sur la RN 1 et la RN 16 reliant Saint-Denis à Sarcelles, mais aussi et surtout du projet de tangentielle nord.
Enfin, les études du barreau de raccordement du RER B et du RER D ont été largement engagées par Réseau ferré de France et la SNCF.
M. le président. La parole est à Mme Nelly Olin.
Mme Nelly Olin. Je vous remercie, monsieur le ministre, de ces précisions importantes qui nous apporteront un certain apaisement et un peu d'espoir quant à la revitalisation économique de nos quartiers.
POLITIQUE DES TRANSPORTS EN CORRÈZE
M. le président. La parole est à M. Bernard Murat, auteur de la question n° 285, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
M. Bernard Murat. La politique en matière de transport et d'infrastructures en Corrèze est un enjeu capital pour le développement économique et social de ce département en voie de désenclavement. Or, monsieur le ministre, actuellement, la qualité de ces infrastructures est encore insuffisante pour pouvoir accueillir en toute sécurité dans les quinze ans à venir les volumes de transport de voyageurs et de marchandises.
Un territoire bien desservi permet, nous le savons tous, la création de richesses, et des infrastructures nouvelles sont un facteur d'espoir dans le domaine économique, en particulier dans le secteur de la logistique.
L'attractivité d'un territoire et sa capacité de développement dépendent de l'existence d'un schéma routier bien pensé - ce qui n'est pas le cas aujourd'hui en Corrèze du sud - comme de la présence d'une gare multimodale, d'un aéroport, d'un échangeur autoroutier, etc.
C'est la raison pour laquelle la plupart des élus du Limousin se sont récemment émus des conclusions de rapports officiels d'experts en la matière, car ils mettaient en cause la modernisation de la ligne SNCF entre Paris et Toulouse - via Brive-la-Gaillarde,je leprécise, car pour moi « POLT », c'est-à-dire Paris-Orléans-Limoges-Toulouse ne veut rien dire, puisque Brive est oubliée dans ce trajet.
Monsieur le ministre, vous avez plusieurs fois répondu à des interpellations sur ce dossier, improprement dénommé le POLT, mais je voudrais, que vous résumiez vos propos et, en tant que président de la communauté d'agglomération de Brive-la-Gaillarde, je souhaite que vous répondiez aux questions suivantes.
Depuis 1995, je milite avec d'autres pour que la ligne ferroviaire Toulouse-Paris via Brive-la-Gaillarde soit desservie par un train à grande vitesse, qui pourrait se raccorder au TGV Atlantique, à Poitiers par exemple. Avez-vous envisagé une telle desserte, monsieur le ministre, et, si oui, dans quels délais ce raccordement pourrait-il être mis en place ?
En attendant cette échéance, et dans le cadre de l'amélioration de la ligne Paris-Toulouse via Brive, la solution du train pendulaire est-elle toujours d'actualité et, si oui, dans quels délais ?
De 1960 à 1980, la ligne Paris-Toulouse a été desservie par le Capitole, qui était un des meilleurs trains du monde. Aujourd'hui, les usagers de cette ligne, laquelle est un axe majeur entre le nord et le sud de l'Europe, n'ont plus la qualité de transport et le service qu'ils sont en droit d'attendre.
Monsieur le ministre, en attendant l'arrivée d'un train à grande vitesse, envisagez-vous de nous permettre de disposer de trains dotés de voitures modernes, sûres, confortables, esthétiques, comme celles que j'ai pu admirer sur les Champs-Elysées, et qui seraient très bien en gare de Brive-la-Gaillarde ? (M. Roger Karoutchi rit.)
Les Corréziens pourraient ainsi voyager dans d'aussi bonnes conditions que les autres usagers de trains à grande vitesse. En outre, cette solution d'attente aurait des conséquences très positives sur l'équilibre des comptes de la SNCF, car cette ligne est très fréquentée. Enfin, après les années de galère que nous avons vécues, ce serait un début de réponse aux attentes des usagers de la ligne Paris-Toulouse.
En conclusion, j'insisterai sur l'importance que revêt aussi cette ligne pour le développement économique et touristique du Limousin. Quelles que soient les solutions techniques envisagées, il faut que nos lignes de transports ferroviaires soient raccordées aux gares qui accueilleront les voyageurs du nord de l'Europe et à celles qui s'ouvriront sur l'Espagne, via Toulouse, afin que ces derniers puissent, par un simple changement de quai, rejoindre directement la ligne Paris-Toulouse.
Telles sont, monsieur le ministre, les questions que je souhaitais de nouveau vous poser sur ce dossier au nom des usagers du Limousin, et plus particulièrement au nom de ceux du bassin de Brive-la-Gaillarde, qui attendent avec beaucoup d'intérêt vos réponses de ce matin.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur Murat, s'agissant de la desserte de la Corrèze, vous avez évoqué le POLT, appellation que vous n'aimez pas ; j'utiliserai celle de « POLBT », Paris-Orléans-Limoges-Brive-Toulouse, afin d'intégrer Brive !
Des incertitudes pèsent sur ce dossier, qui tiennent essentiellement au coût, lequel résulte non pas de l'infrastructure, mais, plutôt, du matériel, qui semble extrêmement onéreux. Néanmoins - il faut vraiment que vous reteniez ce point - le principe d'une amélioration des lignes ferroviaires Paris-Orléans-Brive-Toulouse n'est pas remis en cause : le dossier continue de progresser - vous pouvez le dire autour de vous -, car il est très important de gagner du temps sur cette ligne inconfortable. Quand je suis allé à Châteauroux, on me l'a dit et redit, et croyez que j'en suis bien conscient. Depuis, le comité de pilotage des études s'est réuni, le 14 mai, et a constaté un certain nombre d'accords, en particulier sur les dessertes. C'était important.
Par ailleurs, les études d'avant-projet détaillées ont été remises par la SNCF : c'est un progrès.
Je vous indique également que les procédures administratives relatives à la suppression de passages à niveau se poursuivent, et pourraient même être achevées prochainement dans le département de l'Indre.
Vous avez évoqué aussi la ligne ferroviaire Poitiers-Limoges. Cette ligne, empruntée par un nombre de voyageurs assez réduit, est aujourd'hui à voie unique. Très sinueuse, elle représente 115 ou 120 kilomètres, mais grâce à un tracé plus droit et à des travaux, elle pourrait être réduite de vingt kilomètres.
Un projet est actuellement inscrit au contrat de plan Etat-région, qui vise à rendre l'offre ferroviaire beaucoup plus attractive, en réduisant le temps de parcours, actuellement de deux heures ou de deux heures dix-neuf, à une heure trente, grâce à du matériel roulant moderne, plus performant, plus confortable. Cela permettra d'optimiser la desserte.
J'ai, de plus, demandé une étude « ligne à grande vitesse » sur cette liaison Poitiers-Limoges - elle sera réalisée un jour, pas demain matin - parce que mon prédécesseur s'y était engagé auprès d'une conseillère générale qui est peut-être la plus connue de France. Cette étude n'avait jamais été faite. Je voulais tenir les engagements de mon prédécesseur et ceux que j'ai pris à mon tour auprès de cette éminente conseillère générale de Corrèze.
M. le président. La parole est à M. Bernard Murat.
M. Bernard Murat. Monsieur le ministre, je transmettrai vos propos. Ce sujet suscite bien des débats en Limousin. Le soutien de l'éminente conseillère générale du canton de Corrèze, que je connais bien aussi, est important pour nous.
En conclusion, j'insisterai sur une mesure qui me paraît simple à concrétiser et qui détendrait l'atmosphère : ce serait que nous puissions, dans les mois qui viennent, disposer, sur la ligne visée, de voitures plus modernes. Cela ne changerait rien au temps de trajet ; mais nous permettrait de voyager au moins dans de bonnes conditions ; et les usagers et les élus que je représente vous en seraient excessivement reconnaissants.
BILAN DU CONTRAT DE PLAN
ÉTAT-RÉGION ÎLE-DE-FRANCE
EN MATIÈRE D'ÉQUIPEMENTS DE TRANSPORTS
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, auteur de la question n° 284 ; adressée à M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer.
M. Roger Karoutchi. Monsieur le ministre, les transports d'Ile-de-France, tant routiers que ferroviaires, frôlent depuis plusieurs mois l'asphyxie.
Le contrat de plan Etat-région 2000-2006 avait prévu de consacrer 4,7 milliards d'euros au volet transports. Aujourd'hui, à mi-parcours, la situation est complexe. En effet, alors que les opérations inscrites dans le secteur « Routes » du contrat de plan ont été exécutées pour moitié, les actions concernant les transports en commun sont très en retard, puisqu'elles n'ont été exécutées que pour un tiers.
Par ailleurs, beaucoup de problèmes subsistent. Je les ai évoqués à plusieurs reprises. Ils sont liés à la concertation, aux difficultés techniques et aux surcoûts.
J'ai entendu mes collègues d'Ile-de-France en d'énoncer un certain nombre, notamment l'enclavement du Val-d'Oise et les problèmes de la Seine-Saint-Denis. Mais on pourrait passer en revue les huit départements d'Ile-de-France !
Contrairement à une idée reçue - trop bien reçue, n'est-ce pas, monsieur le président ? - l'Ile-de-France est en retard en matière de transports parce que son expansion urbaine va peut-être trop vite ; parce que les transports publics et investissements d'infrastructures n'ont pas suivi pendant vingt ans.
Deux sujets nous inquiètent.
Le premier concerne les tangentielles. Si la tangentielle Nord va peut-être finir par être réalisée par étapes, comme la tangentielle Ouest, la tangentielle Sud nous laisse dans un abîme de perplexité. En effet, les propos des uns et des autres, y compris des responsables de l'Etat, semblent la repousser aux calendes grecques !
Le second sujet d'inquietude concerne le prolongement des lignes de métro, qui avance lentement.
Si nous disposerons peut-être des avant-projets en 2004 pour les lignes 4, 8 et 12, c'est le silence absolu, le reste, et je ne parle même pas des étapes de schémas de principe !
Aujourd'hui, nous sommes très en retard sur les plans tant financier que technique. Les rumeurs - du moins, j'espère que ce ne sont que des rumeurs - à propos de blocages, notamment en matière financière, de la part de l'Etat, nous laissent très perplexes, rumeurs dont nos opposants politiques se servent ! Je souhaite vivement que le Gouvernement réaffirme que l'engagement financier, pris en 2000, au début du contrat de plan, sera tenu pour les transports publics.
Monsieur le ministre, le Parlement, comme le Gouvernement, essaie d'alléger et de faciliter les procédures administratives. Nous avons un certain nombre de demandes concernant l'éventuelle suppression de la CIA. Je parle non pas des services secrets (Mme Nelly Olin sourit), mais de la procédure de concertation interadministrative, qui a fait perdre beaucoup de temps.
Vous seriez - nous dit-on - favorable à sa suppression ou, en tout cas, à sa transformation. Cela permettrait probablement de lancer les enquêtes publiques afférentes dès la fin de cette année. Seraient notamment concernées les opérations suivantes : site propre Plateau de Saclay-Massy, Croix-du-Sud, Châtillon-Viroflay, tramway Villejuif-Vélizy, T2 porte de Versailles et pôle Versailles-Chantiers.
Nous sommes, monsieur le ministre, très inquiets sur toutes ces opérations de transport public en Ile-de-France. Nous comprenons les difficultés techniques ; les problèmes financiers, nous les comprenons un peu moins si les engagements financiers de l'Etat et des collectivités de l'an 2000 sont maintenus, même si nous sommes tout à fait conscients qu'il faudra des réalignements liés aux surcoûts.
En tout état de cause, - et je conclurai par là. J'entendais parler tout à l'heure, pour une autre région, des problèmes de révision du contrat de plan Etat-région, j'imagine, monsieur le ministre, que des révisions sont prévues après les élections régionales qui auront lieu en mars 2004.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur Karoutchi, dans le domaine des transports collectifs, je vous rappelle que l'engagement de l'Etat au titre du contrat de plan Etat-région d'Ile-de-France est de 832 millions d'euros pour les infrastructures - c'est l'article 1er -, et de 152 millions d'euros pour l'amélioration de la qualité de service - c'est l'article 2. Cet engagement a été clairement confirmé en réunion interministérielle le 19 septembre 2002. Ce rappel est déjà de nature, je l'espère, à vous rassurer.
Le taux d'avancement du contrat de plan, vous avez raison, sera à la fin de l'année de 32,4 % pour l'article 1er et de 34,8 % pour l'article 2, soit environ un tiers. Cela correspond à un avancement que je qualifierai non pas de « normal », mais d'« habituel » dans les autres régions. Par conséquent, ne pensez pas que l'Ile-de-France est particulièrement en retard. Ce taux, même s'il n'est pas brillant, est à peu près le même qu'ailleurs, compte tenu du calendrier qu'impose la maturation technique des opérations et les longues procédures que vous avez évoquées tout à l'heure et sur lesquelles je vous répondrai.
Par ailleurs, 130 millions d'euros seront consacrés aux prolongements des lignes de métro n°s 12, 13, 4 et 8. L'Etat a d'ores et déjà engagé 47,655 millions d'euros pour prolonger la ligne 13 du métro à Gennevilliers, le Luth, et augmenter sa capacité. Le financement des études nécessaires à l'avancement des projets de tangentielles ferrées est également pris en compte. Le Gouvernement vient d'être autorisé à prendre par ordonnance des mesures pour simplifier les procédures de concertation relatives aux travaux d'aménagement de l'Etat, des collectivités territoriales ou d'établissements publics. Il s'agit bien d'alléger les procédures et de les déconcentrer.
En Ile-de-France, la déconcentration est déjà applicable aux projets de transport qui relèvent de la compétence du syndicat des transports parisiens de la région d'Ile-de-France, le STIF, et qui font l'objet d'une déclaration d'utilité publique préfectorale, c'est-à-dire actuellement hors du réseau ferré national. Leur instruction peut être diligentée sur le plan local.
Un avis récent du Conseil d'Etat vient de préciser qu'en l'absence de décret d'application de l'article 136 de la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité l'Etat ou ses établissements publics n'étaient pas tenus d'organiser une concertation supplémentaire avec les collectivités locales.
Les enquêtes publiques préalables à la DUP peuvent donc être valablement ouvertes en l'absence de cette concertation particulière ; cela permet déjà d'abréger significativement les délais.
Je tiens à vous assurer que le Gouvernement sera particulièrement vigilant au fait que les ordonnances de simplification des procédures interviennent dans un délai rapproché ; la fin de cette année constituerait un objectif tout à fait raisonnable, et je pense que là nous gagnerons du temps tous ensemble.
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi.
M. Roger Karoutchi. Monsieur le ministre, je vous remercie pour les simplifications administratives et je vous demande, dans le cadre de la décentralisation, l'Ile-de-France ayant parfois une image de région trop favorisée, ce qui n'est pas le cas, de bien vouloir veiller à ce que les équilibres financiers soient respectés.
NÉGOCIATIONS D'ACCORDS BILATÉRAUX
ENTRE L'UNION EUROPÉENNE ET LA SUISSE
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Amoudry, auteur de la question n° 248, adressée à Mme la ministre déléguée aux affaires européennes.
M. Jean-Paul Amoudry. Madame la ministre, des négociations sont, semble-t-il, actuellement en cours entre l'Union européenne et la Confédération helvétique en vue de conclure de nouveaux accords bilatéraux destinés à compléter ceux qui ont été signés le 11 décembre 1998 et qui sont entrés en vigueur le 1er juin 2002.
Or de nombreux responsables économiques du département de la Haute-Savoie s'en inquiètent, car les conséquences résultant de la mise en application des premiers accords bilatéraux ont un impact préoccupant sur la vie économique et sociale de ce département.
En effet, la Haute-Savoie connaît, de date ancienne, une insuffisance de main-d'oeuvre qualifiée dans de nombreux secteurs, en particulier l'artisanat et le bâtiment, mais aussi des services, qu'il s'agisse des infirmières ou des aides-soignantes. L'attractivité de la Suisse, due à une forte demande en personnel et au niveau élevé des salaires, en est la principale raison. Les accords bilatéraux, qui viennent d'entrer en application, amplifient et aggravent ce phénomène de pénurie de main-d'oeuvre en facilitant les conditions d'accès au marché suisse du travail pour l'ensemble des ressortissants européens.
Par ailleurs, on constate une très forte augmentation du coût du logement en Haute-Savoie, qui atteint un niveau de moins en moins accessible pour les salariés français du secteur public comme du secteur privé. Le phénomène rend d'ailleurs toujours plus difficile le recrutement des personnels nécessaires à la vie des entreprises et des services. Ainsi, alors que les jeunes générations engagées dans le monde du travail éprouvent de grandes difficultés à acquérir ou louer un logement, cette faculté semble réservée aux citoyens étrangers, suisses en particulier, à qui les accords bilatéraux ont donné la possibilité de fixer leur résidence principale en France.
Il faut également souligner la progression très inquiétante du prix des terrains sur la plus grande partie du territoire départemental, rendant plus problématique la constitution de réserves foncières par les collectivités et, par conséquent, la construction de logements sociaux. Cette progression favorise la spéculation et entraîne de graves déséquilibres entre les territoires et les différentes catégories sociales.
Enfin, la Haute-Savoie est confrontée à une saturation parfois paralysante des réseaux de transport routier, causée notamment par le développement des déplacements pendulaires entre l'agglomération genevoise et les villes et villages hauts-savoyards dans lesquels résident les travailleurs frontaliers.
En conclusion, il est important de prémunir aujourd'hui ce territoire haut-savoyard contre le risque de devenir un territoire en déclin, confronté à des dysfonctionnements graves de ses services publics et privés, au départ de ses entreprises industrielles et à l'évasion vers l'extérieur des générations nouvelles.
Par conséquent, il importe, comme le font nos voisins helvétiques, d'anticiper la mise en oeuvre du nouveau volet des accords bilatéraux.
C'est pourquoi je souhaiterais savoir, madame la ministre, si le Gouvernement a la volonté d'informer les responsables locaux sur le contenu des négociations en cours et de concevoir avec eux les mesures d'accompagnement nécessaires pour atténuer les effets dommageables que je viens d'évoquer.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes. Monsieur le sénateur, vous m'interrogez sur l'état des négociations en cours entre l'Union européenne et la Suisse et, plus particulièrement, sur les modalités de concertation entre l'Etat et les élus.
Ces négociations ont été ouvertes après le rejet par la Suisse de l'adhésion à l'Espace économique européen en 1992. Elles ont pour objet de faciliter les échanges et les contacts entre populations française et suisse, et par là, en principe, de faciliter la vie des transfrontaliers. Mais vous avez tout à fait raison, monsieur le sénateur : l'augmentation de ces échanges peut aussi entraîner certains inconvénients pour la vie économique et sociale des départements concernés, notamment les départements français, et également pour le trafic routier.
C'est dans ce contexte, dont je comprends qu'il vous préoccupe, que je suis en mesure de vous apporter les informations suivantes sur les négociations en question.
En premier lieu, les sept premiers accords conclus entre l'Union européenne et la Suisse sont entrés en vigueur en 2002. Ils concernent la libre circulation des personnes, le transport aérien, l'agriculture, les marchés publics, les obstacles techniques au commerce ainsi que la recherche. Toutes ces matières, en principe, n'ont pas d'impact direct sur les populations concernées, sauf, bien entendu, l'accord sur la libre circulation des personnes, dont la mise en oeuvre fait, pour cette raison, l'objet de réunions régulières de concertation entre le préfet de région et les élus des collectivités frontalières concernées. Une réunion s'est ainsi tenue le 28 avril dernier, à laquelle le ministère des affaires étrangères a très activement participé.
En outre, le comité régional franco-genevois, le CRFG, lieu de concertation entre représentants de l'Etat, élus locaux et partenaires suisses, a été invité à apporter des réponses concrètes aux difficultés qui, je l'admets parfaitement, résultent parfois d'une plus grande liberté de circulation entre la France et la Suisse. La concertation, qui va se poursuivre - c'est notre objectif -, devrait contribuer à résoudre les difficultés réelles que vous soulevez, monsieur le sénateur. Je me tiens d'ailleurs, avec les services du ministère des affaires étrangères, à votre entière disposition pour organiser toute autre réunion d'information et de concertation que vous jugeriez nécessaire.
En deuxième lieu, s'agissant de la négociation en cours de dix nouveaux accords, je souhaite vous rassurer. Les sujets abordés par ces accords ne sont pas, en principe, de nature à avoir, sur la vie quotidienne des populations frontalières, un effet direct. Ces accords visent en effet, pour l'essentiel, à faciliter la coopération au niveau des programmes communautaires, d'une part, et des programmes suisses, d'autre part, dans les domaines de l'éducation, de la formation professionnelle, de la jeunesse, des médias, ou encore de l'environnement. Parmi ces accords, l'un traite aussi de la question très importante et très sensible dans l'opinion de la fiscalité de l'épargne, mais le compromis qui se dégage actuellement est, chacun l'admet, dans l'intérêt de tous les Européens, en particulier des populations frontalières dont la situation vous préoccupe, monsieur le sénateur.
Ma conviction est que la négociation d'accords entre l'Union européenne et la Suisse doit apporter in fine une réponse appropriée aux problèmes spécifiques qui se posent aux populations frontalières, notamment à celles qui habitent dans les départements de l'Ain et de la Haute-Savoie.
Il reste, vous l'avez souligné, que des inconvénients peuvent découler de ces accords. C'est pourquoi l'avis des élus nous est précieux, à la fois pour mener à bien le travail de négociation - pour partie, il est en cours - et surtout, ce qui est le plus important, pour permettre une mise en oeuvre concrète de ces accords qui évite, autant que faire se peut, les difficultés pratiques sur la vie quotidienne des intéressés.
C'est la raison pour laquelle, encore une fois, nous nous tenons à votre entière disposition, monsieur le sénateur, pour poursuivre cette concertation.
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Amoudry.
M. Jean-Paul Amoudry. Tout d'abord, je remercie, Mme la ministre de ses informations précises. Ensuite, je suggère que les conclusions de la mission que M. le Premier ministre a bien voulu confier au délégué à l'aménagement du territoire pour évaluer l'effet des premiers accords bilatéraux puissent être, le moment venu, portées à la connaissance des élus locaux.
Enfin, il faudrait que, lors des concertations qui sont menées aujourd'hui sous l'égide du préfet de région, d'une part, dans le cadre du comité régional franco-genevois, le CRFG, d'autre part, soit pris en compte tout particulièrement l'aspect économique et social de ces mesures. En effet, les rencontres que nous pouvons avoir sur le terrain avec les milieux économiques font ressortir une difficulté spécifique s'agissant des mouvements de main-d'oeuvre. Je souhaiterais que nous puissions avancer sur cette question et dégager des solutions.
mise en oeuvre de la directive européenne
M. le président. La parole est à M. Michel Pelchat, auteur de la question n° 276 adressée à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.
M. Michel Pelchat. Madame la ministre, j'ai souhaité attirer à nouveau l'attention du Gouvernement sur les vives inquiétudes et interrogations que suscite toujours la directive européenne du 23 juin 2000 relative aux produits de cacao et de chocolat destinés à l'alimentation humaine et sa transposition en droit français.
En effet, cette directive autorise la dénomination de « chocolat » pour des produits qui n'en sont plus parce qu'ils contiennent, dans la limite de 5 % du poids total du produit, des graisses végétales autres que le beurre de cacao, alors que, depuis 1610, date d'introduction du chocolat dans notre pays, on n'a jamais fait du chocolat avec autre chose que du cacao et du sucre.
De plus, en l'état actuel des connaissances, il n'existe aucune méthode scientifique - les plus grands experts sont d'accord sur ce point - permettant de vérifier que la teneur en graisses végétales autres que le beurre de cacao n'excède pas la limite de 5 % du poids total.
Selon les scientifiques auditionnés par le groupe d'études sénatorial sur l'économie agricole et alimentaire section « chocolat », et notamment le professeur Henri Chaveron, qui fut, pendant vingt-cinq ans, le président de la commission des experts de l'Office international du cacao et du chocolat et qui, à ce titre, participa à toutes les réunions scientifiques européennes, il est pratiquement impossible de quantifier avec précision la présence des matières grasses végétales autres que le beurre de cacao.
Cette détection comporte une marge d'erreur de 20 % à 30 %, ce qui ne manquera pas d'entraîner des dépassements importants du taux de graisses autorisé. Cela permettra d'introduire jusqu'à 18 % de graisses végétales autres que du beurre de cacao dans une tablette de chocolat, laquelle contient en moyenne 35 % de matières grasses, sans qu'aucune juridiction ne puisse le condamner compte tenu de l'imprécision des mesures.
Par ailleurs, la directive de juin 2000 ne précise pas exhaustivement la nature des matières grasses végétales, les MGV, autorisées : les MGV génétiquement modifiées sont interdites, mais la question des matières grasses synthétiques n'est tout simplement pas abordée. Or l'on sait faire des matières grasses synthétiques proches de l'huile de palme, qui sont tout à fait comparables et très difficiles, voire impossibles à détecter avec les méthodes actuelles.
Aujourd'hui, deux pays, l'Espagne et l'Italie, méritent le soutien de la France, car ils se sont opposés à cette directive en imposant la mention obligatoire « succédané de chocolat » sur les emballages des produits à base de chocolat. Il s'agit là d'un exemple de courage en matière de défense d'un produit. Qui décide ? Les politiques ou Cadburry, Mars et autres grands groupes économiques ? La question mérite d'être posée !
Une telle mention permettrait de protéger le consommateur d'une éventuelle confusion des produits à base de cacao de différente qualité.
Cette « résistance » est d'autant plus nécessaire que ladite directive aura un effet économique et social considérable sur les pays producteurs de cacao, notamment la Côte d'Ivoire, pays ami qui vient de subir une crise, avec de graves conséquences sur son économie.
Une analyse de la Côte d'Ivoire, qui représente 40 % de la production mondiale de cacao - ce sera la première victime ! - permet de conclure à une perte à court terme de la demande de fèves de cacao d'environ 200 000 tonnes sur le marché communautaire.
Cette baisse de la demande entraînera une chute des cours du cacao d'environ 20 % pour la première année, soit une perte de 300 millions d'euros. La baisse annuelle des recettes d'exploitation des pays producteurs vers le marché européen atteindra 780 à 800 millions d'euros, avec le risque de voir cette norme européenne s'étendre aux Etats-Unis et à d'autres pays qui ne sont pas encore concernés aujourd'hui. Pour une fois, c'est l'Europe qui a eu l'initiative d'une norme de cette nature. Aux Etats-Unis, le chocolat ne contient pas d'huile végétale !
A l'heure où l'on parle de développement durable et de commerce équitable, notamment avec nos amis africains, à l'heure où les consommateurs sont de plus en plus exigeants sur l'information et la traçabilité des produits qu'ils consomment et alors que l'Europe signataire des conventions de Lomé devra compenser - vous le savez mieux que moi, madame la ministre - les fluctuations des exportations des pays africains producteurs de cacao - cela représente un coût de 1 million d'euros pour 1 000 tonnes de « manque à exporter » -, je souhaite que la France demande un moratoire - c'est le minimum ! - pour la mise en oeuvre de cette directive et que celle-ci soit réexaminée, y compris dans le cadre de la nouvelle convention, par le nouveau Parlement européen qui sera élu en 2004. Cela ne me paraît pas impossible ! Il n'y a pas urgence en la matière ! Tous ces produits chocolatés sont commercialisés depuis 1973, sans aucune restriction, mais ils ne doivent pas l'être sous l'appellation « chocolat ». Ce n'est plus du chocolat !
Je ne peux pas parler du chocolat sans rappeler le problème du taux de TVA : les produits chocolatés le sont à 5,5 % alors que les chocolats artisanaux le sont à 19,6 %. Les chocolatiers demandent, depuis de nombreuses années, à bénéficier du taux réduit de TVA. Une telle décision dépend non pas de Bruxelles, mais uniquement de la France pour ce qui est du chocolat.
Madame la ministre, si vous pouviez obtenir un moratoire au minimum d'une année, vous rendriez un grand service à la France et aussi à nos amis africains, qui attendent ce geste de notre pays.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes. Monsieur le sénateur, tout d'abord, je vous prie de bien vouloir excuser mon collègue Renaud Dutreil qui aurait dû répondre à votre question et qui, malheureusement, est actuellement retenu par d'impérieuses obligations.
Sachez que le Gouvernement est extrêmement sensible aux problèmes que vous avez soulevés. La qualité des produits alimentaires, notamment du chocolat, doit être une préoccupation européenne.
De plus, cette question revêt, vous l'avez à juste titre souligné, une forte dimension internationale.
Vous indiquez, monsieur le sénateur, qu'il n'existe pas d'instrument technique permettant, actuellement, de vérifier que la teneur en chocolat des graisses végétales autres que le cacao n'excède pas la limite fixée à 5 %. Vous souhaitez, en conséquence, que la France s'inspire des positions de l'Espagne et de l'Italie, par exemple, afin de garantir aux consommateurs une véritable qualité des produits de cacao.
Je puis toutefois vous indiquer que, d'ores et déjà, le laboratoire de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCR, qui est installée à Bordeaux, est en mesure d'identifier les six graisses végétales autorisées à être ajoutées dans le chocolat. Actuellement, la limite de détection de ces graisses végétales est de 0,4 %, ce qui atteste de la précision de la méthode d'identification.
En ce qui concerne le contrôle de la limite de 5 % de graisses végétales dans le produit fini, ce laboratoire peut aujourd'hui quantifier ces graisses dans une fourchette comprise entre 4 et 6 %. Bien entendu, il continue, selon votre souhait, d'affiner sa méthode de quantification pour éliminer cette approximation.
Outre les moyens analytiques mis en oeuvre pour détecter les fraudes en matière de composition des produits, les services de mon collègue Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat chargé de la consommation, veilleront, je puis vous l'assurer, au strict respect des règles d'étiquetage imposées par la nouvelle directive en vue d'informer correctement les consommateurs sur la nature réelle des différents produits.
Comme vous l'avez indiqué, l'information du consommateur constitue la clé de toutes les directives européennes. Cette exigence doit être appliquée plus particulièrement à ce domaine.
En premier lieu, l'étiquetage des produits de chocolat devra comporter une liste des ingrédients détaillée alors qu'auparavant ces produits en étaient totalement dispensés. Désormais, le consommateur aura connaissance des ingrédients constituant le produit : par exemple cacao, beurre de caco, matières grasses végétales, etc.
En second lieu, la mention « contient des matières grasses végétales en plus du beurre de cacao » devra figurer expressément sur l'étiquetage du produit en cas d'utilisation de graisses végétales. La nouvelle réglementation exige que cette mention soit clairement lisible, qu'elle apparaisse sur l'étiquetage dans le même champ visuel que la liste des ingrédients et de manière bien distincte par rapport à cette liste et, enfin - cette indication paraît superfétatoire mais elle est importante -, qu'elle figure en caractères gras au moins aussi grands que ceux de la dénomination de vente, à proximité de celle-ci, et ce afin d'éviter que le consommateur ne soit abusé.
La France a montré, dans la négociation européenne, qu'elle était très attachée à la qualité du chocolat. Les autorités françaises encouragent donc les partisans du « vrai » chocolat, comme vous-même, monsieur le sénateur, à faire savoir que les productions françaises sont de qualité. A cette fin, la loi française autorise les producteurs, voire les encourage, à utiliser la mention « chocolat pur beurre de cacao » ou « chocolat traditionnel », selon les termes de l'article L. 112-7 du code de la consommation.
L'ensemble des dispositions d'étiquetage prévues tant pour les produits contenant des graisses végétales que pour les produits élaborés avec le seul beurre de cacao permettra ainsi d'éviter tout risque de confusion pour le consommateur, en l'état actuel de la réglementation.
En ce qui concerne l'application du taux réduit de TVA aux produits de chocolat, que vous demandez au nom de l'équité entre l'artisanat français et les industriels étrangers, cette question relève, vous le savez, de la direction générale des impôts. Elle est actuellement à l'étude dans ce service, à la demande de mon collègue Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
En résumé, monsieur le sénateur, nous sommes tout à fait sensibles, nous, Français et producteurs de chocolat français, aux questions que vous soulevez et aux difficultés que vous avez mentionnées.
M. le président. La parole est à M. Michel Pelchat.
M. Michel Pelchat. Je comprends tout à fait que le Gouvernement de la France puisse être quelque peu embarrassé dans une affaire comme celle-là, surtout que nous sommes très proeuropéens. Il ne s'agit pas de remettre en cause l'Europe, mais certaines dispositions sont, avouez-le, inadaptées.
Ainsi, on ne peut pas, madame la ministre, appeler chocolat ce qui n'est plus du chocolat. J'ai également interrogé le laboratoire de Bordeaux et j'ai les mêmes chiffres que vous : 6 % de graisses végétales, alors que la limite est fixée à 5 %, cela représente une marge d'erreur de 20 %. Ne vous faites pas d'illusion : cette marge d'erreur sera toujours utilisée à la hausse. La quantité moyenne de matière grasse contenue dans une tablette de chocolat s'élève, je le rappelle, à 35 %. Avec cette marge d'erreur, vous arrivez à 18 % de matières grasses autres que du beurre de cacao. Sur 35 %, avouez que cela fait quand même beaucoup ! Je sais bien que, dans certains pays, des produits dits « chocolats » en contiennent jusqu'à 30 % ; il m'est arrivé d'en goûter pour les tester : il est vrai que c'est encore mangeable. Mais enfin, madame la ministre, pourquoi appeler chocolat un produit qui ne l'est pas ?
Par ailleurs, la deuxième raison pour laquelle la France serait tout à fait autorisée à demander non pas l'annulation de la directive, mais un moratoire, c'est l'imprécision de la rédaction : tous les scientifiques s'accordent à reconnaître que cette directive est mal rédigée. Cette imprécision risque d'entraîner quantité de fraudes qui ne seront absolument pas contrôlables.
Enfin, je souhaite évoquer la situation des pays africains, notamment la Côte d'Ivoire. La guerre aura des conséquences non pas sur le budget de cette année, mais sur celui de l'année prochaine. En effet, les pertes de culture de cacao subies se feront sentir sur la récolte de l'année 2004. Si l'on y ajoute les dispositions en cause, je ne sais pas combien de milliards d'euros il faudra débloquer en direction des pays africains. Avouez que l'Europe peut trouver d'autres façons plus intelligentes de dépenser son argent ! Vous le savez, les producteurs africains ne demandent pas autre chose que de vivre de leur production.
Telles sont les trois raisons pour lesquelles la France est autorisée à demander un moratoire d'au moins une année sur l'application de cette directive.
M. le président. Nous avons consacré dix minutes au chocolat, mais cela en valait la peine ! (Sourires.)
MESURES D'AIDES EN FAVEUR
M. le président. La parole est à M. Bernard Joly, auteur de la question n° 278 adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.
M. Bernard Joly. Monsieur le ministre, lors de la toute récente session de printemps de la chambre d'agriculture de la Haute-Saône, le président comme les participants n'ont pas caché leur pessimisme. Aux problèmes conjoncturels s'ajoutent des réformes difficiles. Celle de la PAC, en particulier, a une nouvelle fois été suspendue. Les négociations devraient reprendre demain. Plus précisément, les responsables des organisations professionnelles y voient la fin de toute politique d'installation, la diminution drastique de la population agricole et la perte de substance du milieu rural.
Le remplacement du fonds pour l'installation en agriculture, le FIA, par le fonds d'incitation et de communication pour l'installation en agriculture, le FICIA, n'est pas contesté en soi. Sa mise en place conditionne des actions comme celles qui sont conduites par le programme pour l'installation des jeunes en agriculture et le développement des initiatives locales, le PIDIL.
Cet outil est particulièrement efficace pour débloquer certaines installations difficiles grâce aux mesures d'incitations développées telles que les aides au partage des terres, à la cession des moyens de production, au diagnostic d'exploitation, à l'allégement des frais de stockage SAFER, au logement et à l'installation.
Le PIDIL a également permis de réaliser des installations nouvelles en créations d'exploitations qui n'auraient pu se faire sans ce dispositif, notamment en assurant des mesures d'accompagnement par l'aide transitoire à l'investissement, ainsi que celles au parrainage et au remplacement.
Chaque année en Haute-Saône, en moyenne, douze dossiers sont soutenus. Une dizaine sont actuellement en attente et certains projets sont bloqués.
Si la pérennité du PIDIL ne semble pas remise en cause, il apparaît que plusieurs mesures verraient leur montant baisser fortement. Plus grave encore, il est rapporté que le dispositif d'accompagnement des installations progressives risque, lui, de disparaître, privant mon département de projets innovants, à une période où le nombre des installations saônoises est en perte de vitesse : trente-sept installations en 2003 contre soixante-cinq en 1996.
Par ailleurs, l'aide exceptionnelle à l'installation est fortement réduite, alors qu'elle se révèle très utile au regard des investissements lourds qui grèvent les premières années.
La réalisation des projets de diversification est liée au dispositif d'accompagnement à hauteur de 11 % du renouvellement global des générations en agriculture, ce qui est loin d'être négligeable. En conséquence, je souhaiterais savoir, monsieur le ministre, si les mesures seront maintenues dans leur intégralité et dans leur état actuel, et quand le dispositif sera de nouveau effectif.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Monsieur Joly, vous avez raison d'insister sur l'importance de l'installation en agriculture, dont on sait bien qu'elle est le résultat d'un certain nombre de facteurs.
Le premier de ces facteurs tient aux perspectives que l'on peut donner à notre agriculture, française et européenne. C'est la raison pour laquelle nous déployons autant d'énergie et de conviction pour conduire à bien la très difficile mais néanmoins capitale négociation en cours actuellement à Luxembourg.
Le deuxième facteur tient aux conditions de vie des paysans, qui doivent être meilleures qu'elles n'ont été, et ce dans une société qui a beaucoup évolué. A cet égard, la question du service de remplacement est cruciale.
Je vois un troisième facteur, cette fois sur le plan économique, dans le fait de donner aux jeunes qui s'installent des perspectives viables, en leur attribuant, notamment, les droits à produire dont ils peuvent être dépositaires dans le cadre des productions qui font l'objet d'organisations communes de marché.
Enfin, il y a un quatrième facteur, constitué par tous les dispositifs d'aide à l'installation. Ce dossier, sur lequel nous travaillons en concertation avec les jeunes agriculteurs, a constitué l'une de mes priorités budgétaires pour 2003 et compte au nombre des axes majeurs de mon action gouvernementale.
S'agissant du FICIA, il a en effet été doté de 10 millions d'euros en 2003. Ce fonds est destiné à financer les programmes pour l'installation et le développement des initiatives locales, les PIDIL.
Ces programmes visent à accompagner financièrement l'installation des jeunes hors cadre familial et celle des jeunes qui, réalisant un projet sur des exploitations familiales, ont néanmoins besoin d'être confortées sur le plan économique. Ils visent également à encourager les propriétaires et les agriculteurs cessant leur activité à louer des terres, des bâtiments ou une maison d'habitation à de jeunes agriculteurs. Ces programmes visent encore à apporter un soutien technique aux jeunes agriculteurs au cours des cinq premières années de leur installation.
En outre, des actions de communication, d'animation et de repérage des exploitations devant se libérer pourront être mises en oeuvre dans les régions afin de faciliter la transmission aux candidats à l'installation.
Cette action, qui vise à permettre une intervention plus proche des spécificités locales, complétera le dispositif national d'aides à l'installation. L'agrément préalable de ce dispositif par la Commission européenne est nécessaire pour mettre en place ce nouveau fonds. La validation des PIDIL par les autorités communautaires est attendue dans les prochains jours.
A cet égard, je voudrais, monsieur le sénateur, vous faire part des sentiments exprimés par les jeunes agriculteurs que j'ai rencontrés tant au cours de mes déplacements que lors de leur congrès national, qui s'est tenu à Vannes, voilà quelques semaines.
Les jeunes agriculteurs sont excédés par les retards qu'a pris la mise en place du nouveau dispositif.
Je le redis ici solennellement, il n'y aura ni année blanche ni semestre blanc pour le FICIA. Les dotations budgétaires sont bel et bien là et seront affectées à l'installation des jeunes agriculteurs. Toutefois, nous devons notifier les dispositifs d'aide à l'installation à Bruxelles, sous peine, sinon, de devoir ensuite payer des pénalités et des amendes.
Il est vrai que les lenteurs de la bureaucratie ont entraîné environ un semestre de retard par rapport à ce que je souhaitais, puisque les fonds étaient disponibles depuis le 1er janvier 2003, mais ce contretemps ne sera plus qu'un mauvais souvenir dans les tout prochains jours.
Sachez, en outre, que les dossiers qui n'ont pu être ni instruits, ni honorés le seront bien évidemment rétroactivement.
Sans attendre l'accord formel de la Commission européenne, j'ai d'ores et déjà donné instruction aux directeurs régionaux de l'agriculture et de la forêt de prendre contact avec les représentants des jeunes agriculteurs pour préparer concrètement le contenu des programmes régionaux.
Par ailleurs, des dispositions seront prévues dans la circulaire d'application pour assurer la transition avec les programmes précédents. Cette circulaire et les enveloppes financières seront diffusées auprès des régions dès la réception de l'agrément de la Commission européenne.
Tels sont les quelques éléments de réponse que je tenais à livrer à votre réflexion, monsieur le sénateur. Nous avions un système qui était tout à fait satisfaisant, mais que nous devions améliorer encore. Or, pour l'améliorer, nous devions notifier à Bruxelles ; Bruxelles a pris un peu de retard mais, dans quelques jours, tous ces atermoiements seront oubliés. Mon souhait est que nous nous dotions d'une politique active de l'installation, ce qui ne se résume pas au seul FICIA.
M. le président. La parole est à M. Bernard Joly.
M. Bernard Joly. Je remercie M. le ministre de la précision de ses réponses et des engagements qu'il a pris, et ce au nom des jeunes agriculteurs de mon département, et, au-delà, de toute la France. Sa connaissance du terrain est parfaite, gràce à ses nombreux déplacements : son intervention nous en fournit encore une nouvelle preuve.
M. le président. La parole est à M. Jacques Pelletier, auteur de la question n° 287, adresssée à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.
M. Jacques Pelletier. En tant qu'élu d'une circonscription très rurale de l'Aisne, je suis inquiet et je m'interroge sur la politique de l'eau que souhaite mener le Gouvernement.
Mon département a signé en 2001 une convention avec l'Etat portant sur la période 2001-2005 relative aux aides accordées aux communes rurales et à leurs groupements au titre du Fonds national pour le développement des adductions d'eau, le FNDAE, en matière d'eau potable et d'assainissement.
Or, pour l'année 2003, la dotation définitive du département de l'Aisne a subi une diminution de 62,61 % par rapport à l'année 2002 due à la suppression des recettes du Pari mutuel urbain, représentant la moitié de l'enveloppe du FNDAE.
Or je n'ai pas entendu dire que les recettes du PMU étaient en diminution. Où sont passées les sommes qui étaient consacrées au Fonds national pour le développement des adductions d'eau ? Monsieur le ministre, comment comptez-vous faire pour remédier à cet état de fait ?
Par ailleurs, le Premier ministre, à Rouen, le 28 février 2003, avait suggéré que la politique de l'eau soit décentralisée à l'échelon des départements et que les fonds du FNDAE soient départementalisés. Que pensez-vous faire en la matière ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Monsieur Pelletier, les motivations qui, en 1954, ont conduit à la création du Fonds national pour le développement des adductions d'eau, le FNDAE, outil de redistribution et de péréquation, conservent toute leur pertinence.
Alimenté par une contribution payée sur le mètre cube consommé, ce fonds a permis de financer l'adduction d'eau potable dans toutes les zones rurales. Cinquante ans après sa création, on pourrait penser que l'objectif du FNDA est pratiquement atteint. Toutefois, la nécessité de renouveler les réseaux et de mettre en place de nouveaux systèmes d'assainissement justifie sa prolongation.
Au moment où une étape nouvelle de la décentralisation se prépare, il a paru pertinent au Gouvernement de renforcer les prérogatives des conseils généraux sur ce dossier de l'eau. Le département semble, en effet, un échelon pertinent pour l'action de proximité et la redistribution des ressources. C'est également le bon niveau pour inciter à une gestion plus solidaire de l'eau, sur les plans quantitatif et qualitatif, car l'eau restera durablement un élément clé de l'avenir de nos territoires.
Lors de la synthèse des Assises des libertés locales, à Rouen, comme peut en témoigner M. le ministre délégué aux libertés locales, qui est présent à mes côtés, le Premier ministre a annoncé le transfert des moyens du FNDAE aux départements. Pour avoir été également président de conseil général, je suis bien conscient des difficultés d'équipement des collectivités rurales et de l'apport précieux que représente le FNDAE pour aider à la réalisation de travaux d'alimentation en eau potable et d'assainissement.
Diverses options concernant le transfert des moyens du FNDAE sont examinées lors des réunions interministérielles qui se déroulent sur la décentralisation. Toutefois, les dernières réflexions sur le sujet ont conduit à considérer que les projets de loi en cours de rédaction, sur la décentralisation et sur les affaires rurales, ne constituent pas le cadre adéquat d'un tel transfert.
A plus brève échéance, le Parlement a souhaité, comme vous le savez, réorienter la dotation du Pari mutuel urbain dans le cadre de la loi de finances pour 2003, au moment où les besoins pour protéger la qualité de l'eau vont croissant et pour être dès cette année en conformité avec les règles communautaires.
De plus, une enquête menée auprès des départements a mis en évidence que 28 % des crédits de paiement non dépensés correspondaient à des autorisations de programme non engagées sur les dotations départementales « eau et assainissement », avec, d'ailleurs, une très forte variabilité selon les départements. J'ai bien compris, monsieur Pelletier, que ce n'était pas le cas du département de l'Aisne.
Des informations qui remontent aujourd'hui des départements, il semble que, dans quelques cas, ces crédits avaient toutefois fait l'objet d'une délibération d'affectation de la part des conseils généraux.
Sachez, monsieur le sénateur, que l'ensemble des dotations budgétaires dont je dispose ont été ventilées aux départements, pour l'assainissement, et aux régions, pour le plan de maîtrise des pollutions d'origine agricole.
Nous sommes en quelque sorte - mais je ne veux pas abuser de la métaphore - « au milieu du gué », puisque, comme je l'ai rappelé, un certain nombre de décisions ont été prises dans le cadre de la loi de finances pour 2003. Il ne nous semble pas que cette question doive être traitée ni dans le cadre de la loi sur la décentralisation ni dans le cadre de la loi relative aux affaires rurales.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin a lancé un grand débat national sur l'eau de manière à préparer une nouvelle loi sur l'eau l'année prochaine, en partant sur des bases nouvelles, sans reprendre les moutures successives du texte qui avaient été abandonné à la fin de la précédente législature.
Monsieur le sénateur, pour terminer, sur ce sujet, nous devons mener encore de nombreuses concertations pour prendre les meilleures décisions possibles dans les prochains mois et définir le cadre juridique et les moyens budgétaires d'une politique ambitieuse de l'eau.
Voilà ce que je suis en mesure de vous dire aujourd'hui. Sachez que, bien que n'étant pas chargé à titre principal de la politique de l'eau, puisque c'est une responsabilité qui relève de la ministre de l'écologie et du développement durable, je suis très mobilisé sur ce dossier.
M. le président. La parole est à M. Jacques Pelletier.
M. Jacques Pelletier. Monsieur le ministre, je vous remercie de ces intéressantes précisions.
Il est vrai que nous allons avoir besoin de sommes très importantes pour le renouvellement des systèmes d'assainissement, notamment, d'autant plus que la directive européenne sur le plomb doit nous obliger à revoir, d'ici à 2015, la plupart des installations.
Monsieur le ministre, je suis élu d'un département qui a terriblement souffert de la guerre de 1914-1918. De nombreux villages ayant été complètement rasés, des facilités ont été accordées entre les deux guerres pour construire de nouveaux réseaux, lesquels ont, aujourd'hui, parfois quatre-vingts ans, et sont à bout de souffle.
Monsieur le ministre, cela représente plusieurs milliards d'euros. Il faut absolument que, dans les années qui viennent, les crédits suivent. Je pense notamment à la dotation prévue par la convention signée entre l'Etat et le département de l'Aisne. Si nous prenons encore du retard, nous allons nous mettre un peu plus en contradiction avec la directive européenne, ce qui serait très mauvais pour tout le monde.
Mais, monsieur le ministre, je vous remercie encore des précisions que vous nous avez apportées.
STATUT DES ÉLUS LOCAUX
M. le président. La parole est à M. Yves Coquelle, auteur de la question n° 286, adressée à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
M. Yves Coquelle. Monsieur le ministre, je voudrais attirer votre attention sur la situation particulièrement délicate de nombreux élus locaux, maires ou adjoints, privés de leur emploi. Ils sont parfois contraints d'abandonner soit leur RMI, soit leur indemnité de fonction, les deux n'étant pas cumulables en vertu de l'article L. 262-10 du code de l'action sociale et des familles définissant, dans sa partie législative, les dispositions applicables au RMI.
Monsieur le ministre, si nous ne voulons pas courir le risque d'écarter des responsabilités municipales une catégorie importante de la population que sont malheureusement les demandeurs d'emploi ou les bénéficiaires du RMI, nous devrions considérer que les indemnités de fonction qui sont versées aux élus locaux n'ont pas le caractère de salaire ou de traitement, et ne constituent aucunement une quelconque rémunération. Ces indemnités ne devraient être prises en compte ni pour l'attribution des prestations sociales - notamment celles qui sont soumises à un plafond de ressources - ni pour l'attribution du RMI. En effet, ces indemnités ont pour objet de dédommager les élus des frais occasionnés par leur mandat électif et, à ce titre, ne devraient pas être considérées comme un revenu.
Or, s'agissant de l'allocation RMI, l'article 9 de la loi du 1er décembre 1988 modifiée dispose : « L'ensemble des ressouces des personnes retenues pour la détermination du montant du revenu minimum d'insertion est pris en compte pour le calcul de l'allocation. » Cette situation ambiguë pose, au-delà des problèmes sociaux que rencontrent certains élus, un véritable problème de démocratie. En effet, les questions de la participation des personnes privées d'emploi à la vie municipale et de la possibilité pour elles d'accéder à des responsabilités de maire ou d'adjoint sont posées.
En outre, un véritable statut de l'élu local devrait être défini. Ce débat existe depuis des années. Monsieur le ministre, avez-vous l'intention d'apporter enfin les réponses qu'attendent de nombreux élus de notre pays ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales. Monsieur le sénateur, aux termes de l'article L. 2123-17 du code général des collectivités territoriales, « les fonctions de maire, d'adjoint et de conseiller municipal sont gratuites ». Dès lors, les indemnités de fonction allouées aux élus locaux ne peuvent pas être considérées comme des salaires et traitements. Elles constituent cependant des ressources venant compenser, en principe, les frais engagés, et forfaitisés, par les élus ainsi que les différentes charges liées à l'exercice effectif des mandats.
L'article L. 262-10 du code de l'action sociale et des familles dispose que « l'ensemble des ressources des personnes retenues pour la détermination du montant du revenu minimum d'insertion est pris en compte pour le calcul de l'allocation ». C'est donc à juste titre que les indemnités de fonction sont actuellement prises en compte dans le calcul du montant du RMI pour les élus locaux bénéficiant de cette prestation : il est en effet indiscutable que les indemnités de fonction constituent une ressource.
En définitive, monsieur le sénateur, vous proposez que le cumul du RMI et des indemnités de fonction soit possible. Or, une éventuelle évolution de la législation dans ce domaine devrait être précédée de l'évaluation précise du nombre des élus qui, tout à la fois, sont allocataires du RMI et perçoivent des indemnités de fonction dont le montant justifierait le cumul. Il faut tout de même prendre la mesure de l'impact !
Par ailleurs, une réflexion est certainement nécessaire pour établir si le cumul de l'allocation du RMI et des indemnités de fonction ne constituerait pas une désincitation à l'exercice d'une activité professionnelle, auquel cas, évidemment, la fonction d'insertion du RMI perdrait de sa pertinence.
M. le président. La parole est à M. Yves Coquelle.
M. Yves Coquelle. Je remercie M. le ministre de sa réponse. Je comprends bien que le problème est délicat, mais je connais un certain nombre de cas où les élus ont le choix entre abandonner leur allocation de RMI et leur couverture sociale ou renoncer à leurs fonctions d'élus. Ils sont alors contraints d'abandonner leur mandat électif, qui ne donne droit à aucune couverture sociale. C'est là la vraie question, monsieur le ministre ! Certes, les cas ne se comptent pas par centaines de milliers en France, mais je connais, dans mon département, un nombre important de gens qui, arrivés à un certain âge, n'ont plus d'emploi, malheureusement, mais s'intéressent à la vie locale.
Vous redoutiez, monsieur le ministre, que la possibilité de cumuler l'allocation du RMI et l'indemnité de fonction n'incite les gens à ne plus travailler. Que les demandeurs d'emploi s'investissent dans une collectivité locale et accèdent à un poste de responsabilité, comme adjoint ou autre, constitue, selon moi, une bonne insertion, qui mériterait d'être encouragée.
SITUATION DES FORCES DE SÉCURITÉ
M. le président. La parole est à M. Gérard Larcher, auteur de la question n° 251, adressée à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
M. Gérard Larcher. La sécurité des personnes et des biens est une priorité de l'action gouvernementale. Avec ténacité, méthode et courage, le ministre de l'intérieur et vous-même, monsieur le ministre délégué, vous êtes attachés à reconquérir le terrain perdu pour ce qui est essentiel à l'exercice des libertés publiques, la sécurité.
Pour MM. Alain Gournac, Dominique Braye et moi-même, tous trois parlementaires du département des Yvelines, c'est bien une priorité dans la relation que nous entretenons avec les collectivités locales. Dans ce département, depuis plusieurs années, la croissance des taux de délinquance est préoccupante. Outre la grande délinquance, on constate une insécurité rampante dans un certain nombre de quartiers, la progression de l'insécurité en direction de la zone rurale, l'absence de contrôle réel de phénomènes délictueux collectifs, par exemple ceux qui sont observés - et vous les connaissez - sur le plateau de Verneuil-sur-Seine, Vernouillet, Chapet.
Pourtant, la loi de la République doit être appliquée sans discrimination ni faiblesse. Pour cela, trois conditions nous paraissent devoir être remplies.
Il faut tout d'abord maintenir un niveau d'effectifs suffisant dans un département à la fois très urbain mais aussi rural, avec 162 communes rurales qui connaissent en fait les phénomènes d'insécurité liés à la ville.
Il faut, ensuite, renforcer la présence territoriale de la police et de la gendarmerie.
Enfin, un accompagnement dans cette lutte par un parquet qui collabore à cette volonté collective est essentiel.
Dans le département des Yvelines, ces conditions nous paraissent devoir être réunies.
Monsieur le ministre, je souhaiterais connaître les plans d'ajustement d'effectifs. En l'état actuel de mes informations, au 1er juin, cinquante et un postes budgétaires ne sont pas pourvus dans la gendarmerie nationale. Hormis le corps de maîtrise et d'application, les effectifs de la police nationale sont même en légère baisse.
Par ailleurs - et c'est ma deuxième interrogation -, quels sont les projets immobiliers de rénovation et de construction envisagés ? Nous pensons aux commissariats de Plaisir, de Fontenay-le-Fleury. Qu'en est-il du programme concernant le commissariat de Houilles ? Où en sont les études à Elancourt, à Conflans-Sainte-Honorine à Verneuil, à Vernouillet et à Triel-sur-Seine ?
Ma troisième préoccupation concerne la coordination entre la police et la gendarmerie dans ce secteur périurbain et rural.
Telles sont, monsieur le ministre, les préoccupations dont je souhaitais vous faire part, qui sont représentatives des interrogations, des attentes, mais aussi des espérances de nos concitoyens.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales. Monsieur le sénateur, M. Nicolas Sarkosy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, a arrêté, vous le savez, un programme immobilier de grande envergure en faveur du département des Yvelines.
Ce programme, d'un montant de 19 millions d'euros présente un triple aspect.
Le premier aspect concerne les projets neufs en cours d'étude de maîtrise d'oeuvre. Il s'agit des commissariats de Plaisir, pour un montant de 7 millions d'euros, livrable en 2005, de Fontenay-le-Fleury - Saint-Cyr-l'Ecole, pour un montant de 4 millions d'euros environ, livrable également en 2005, et du commissariat de Houilles, pour un montant de 4 millions d'euros environ, livrable en 2006.
Le deuxième aspect a trait à quatre projets de réhabilitation actuellement à l'étude ou en cours de réalisation. Il s'agit de la réhabilitation de l'hôtel de police de Versailles - rénovation des installations électriques, pour un montant d'un million d'euros - dont les travaux seront achevés en fin d'année ; du centre d'information et de commandement, le CIC, des Yvelines - travaux d'un montant de 200 000 euros dont la livraison est programmée pour octobre 2003 - ; du bureau de police du Val-Fourré, à Mantes-la-Jolie - la livraison de l'équipement, d'un montant de 250 000 euros est programmée pour le début du second semestre de cette année - ; enfin, de la réhabilitation du commissariat de police de Poissy, dont le montant est estimé à 800 000 euros et qui sera proposée sur l'exercice 2004.
Le troisième volet comporte six projets, actuellement examinés dans le cadre des études de faisabilité. Il s'agit des projets d'extension de l'hôtel de police de Versailles ; du relogement des commissariats de Conflans-Sainte-Honorine, de Vélizy, d'Elancourt et de Saint-Germain-en-Laye ; de la création d'un commissariat de plein exercice pour faire suite à la décision de création d'une circonscription de sécurité publique ayant son siège à Vernouillet et compétente sur les communes de Vernouillet, de Triel-sur-Seine, de Verneuil et de Vaux-sur-Seine, prises sur les circonscriptions de Poissy et des Mureaux.
J'ajoute, par ailleurs, que le groupe d'intervention et de recherche, le GIR, des Yvelines, provisoirement installé sur le site du Chesnay, devrait être relogé dans un bâtiment communal mis à la disposition de l'Etat par la municipalité.
Les effectifs de sécurité publique, tous grades confondus, se sont professionnalisés. Ils sont passés de 2 280 titulaires au 1er janvier 2002 à 2 344 au 1er avril 2003, pendant que le nombre d'adjoints de sécurité, compte tenu des difficultés de recrutement, a légèrement baissé.
Les mutations donneront évidemment lieu à des départs qui doivent être compensés lors des sorties d'école des gardiens de la paix du second semestre.
A terme, la logique opérationnelle entre la gendarmerie et la police se trouvera renforcée par une répartition plus rationnelle des compétences de la police nationale et de la gendarmerie.
Dans le département des Yvelines, les transferts de compétence territoriale ont été annoncés par lettre aux élus concernés, au nombre desquels naturellement vous figurez, monsieur le sénateur.
Le ministre de l'intérieur, Nicolas Sarkozy, vous a ainsi fait connaître qu'il a décidé de procéder à deux opérations qui prendront effet au 1er janvier 2004.
D'une part, les communes de Bailly et de Saint-Rémy-l'Honoré seront placées en zone gendarmerie et dépendront respectivement des brigades territoriales de Noisy-le-Roy et Montfort-l'Amaury.
Ces transferts en zone gendarmerie permettront d'assurer un meilleur suivi judiciaire des dossiers et de donner une plus grande cohérence aux actions de sécurité menées sur le territoire de ces communes.
D'autre part, seront transférées en zone police les communes de Tessancourt-sur-Aubette, Gaillon-sur-Montcient et Evecquemont, qui dépendront du commissariat de police des Mureaux, ainsi que la commune de Maurecourt, qui dépendra du commissariat de Conflans-Sainte-Honorine.
Cette opération concerne des communes qui constituaient, jusqu'à présent, des enclaves de la gendarmerie nationale en zone police. Ces transferts dans une zone police, continue et homogène, permettront à la population de bénéficier d'une meilleure capacité d'intervention et de renforts plus facilement mobilisables.
M. Nicolas Sarkozy a donné des instructions pour que le plus grand soin soit apporté à l'amélioration de services assurés antérieurement. Il demandera également au préfet de procéder, en concertation avec les élus, après un délai d'un an, à l'évaluation de ce transfert, et veillera à la réalisation des ajustements nécessaires.
M. le président. La parole est à M. Gérard Larcher.
M. Gérard Larcher. Tout d'abord, monsieur le ministre, je vous remercie de cette réponse circonstanciée et précise qui porte à la fois sur les effectifs, les investissements immobiliers et les ajustements proposés qui ont entraîné l'adhésion des communes à l'exception de deux d'entre elles. La méthode retenue par le ministre de l'intérieur est concrète et elle permettra d'obtenir un redéploiement des effectifs de la police et de la gendarmerie.
Je note avec satisfaction que M. Sarkozy nous invite à une évaluation. Nous y serons particulièrement attentifs et la conduirons ensemble sur le terrain, comme vous nous le proposez.
En tout cas, je prend note de votre suggestion, qui constituera pour l'ensemble des élus de ce département un point tout à fait essentiel.
LUTTE CONTRE LA POLLUTION SONORE
M. le président. La parole est à M. Alain Gournac, auteur de la question n° 274 adressée à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
M. Alain Gournac. Madame la ministre, je souhaite vous faire part de l'exaspération de nos concitoyens concernant le bruit en général. Comme je le disais à l'instant à mon collègue des Hauts-de-Seine, Denis Badré, les Yvelines n'ont pas eu de chance parce qu'à la suite de la réorganisation des couloirs aériens, tous les avions passent au-dessus des Yvelines, ce qui n'est pas très agréable pour celui qui est dans son jardin ou sur sa terrasse par beau temps.
Mais aujourd'hui, madame la ministre, je vous parlerai des véhicules à deux roues, des Mobylettes entre autres.
M. Gérard Larcher. Et de certaines motos !
M. Alain Gournac. En effet !
Si je vous interpelle aujourd'hui, madame la ministre, c'est parce que la nuisance sonore devient pénible, en particulier la nuit, quand nous dormons après une longue journée de travail.
Nos concitoyens sont extrêmement sensibles à la différence de niveau sonore entre la journée et la nuit. Lorsqu'il y a moins de bruits de fond, ils se sentent davantage agressés par la pollution sonore occasionnée par les deux-roues.
Il s'agit en particulier de Mobylettes qui ont été trafiquées par des jeunes avec des kits, même si la vente en est interdite par la loi. La nuit dernière, au Pecq, on les a entendus à une heure du matin !
Nous, législateurs qui avons voté des textes - celui du 23 janvier 1995 qui venait s'ajouter à ceux de 1981 et 1991 -, nous ne voyons pas les choses évoluer.
Je sais que mon ami Gérard Larcher a obtenu des résultats tout à fait exceptionnels à Rambouillet, mais je ne constate rien de similaire dans l'ensemble du département des Yvelines ou donc celui des Hauts-de-Seine, cher ami Denis Badré !
M. Gérard Larcher. On a encore des problèmes !
M. Alain Gournac. Madame la ministre, je sais que les préfets ont reçu des instructions mais je souhaiterais que vous puissiez me dire si des contrôles ont effectivement lieu dans les entrepôts où sont stockés les kits. Je n'en suis pas sûr.
Dans les Yvelines, sept jeunes ont été arrêtés. J'accompagnais, à cette occasion, le commissaire divisionnaire M. François Léger. La police fait du bon travail dans les Yvelines. Il m'a d'ailleurs invité à discuter avec les jeunes, qui m'ont dit que c'était très facile de se procurer un kit. Ils m'ont indiqué où l'on pouvait en trouver et qu'il ne fallait qu'une heure pour l'installer. Mais quels dégâts, ensuite, madame la ministre, quand ils circulent dans nos villes ou dans nos campagnes, car les communes rurales des Yvelines ne sont pas épargnées !
C'est pourquoi tous les maires que j'ai rencontrés, quand ils ont su que j'allais vous poser cette question ce matin, madame la ministre, m'ont demandé d'insister fortement. En effet, nous devons essayer de trouver des solutions pour répondre aux sollicitations des riverains qui s'étonnent du fait que les textes que nous votons ne soient pas appliqués et que les jeunes puissent continuer à modifier leurs motos.
Je souhaiterais donc, madame la ministre, que vous puissiez nous dire ce que nous pouvons faire de façon que nos administrés, à travers nos questions, sentent que nous cherchons à combattre les nuisances sonores, en particulier celles qui sont provoquées par les véhicules à deux roues.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur Gournac, comme vous avez raison de dire que le bruit constitue, pour nos concitoyens, la principale atteinte à l'environnement !
MM. Gérard Larcher et André Trillard. Exact !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Et l'on comprend l'exaspération des Français, malgré une armature législative et réglementaire qui n'est pas inexistante.
D'ailleurs, cette question nous interpelle tous : la protection de l'environnement ne relève pas seulement de textes de politique publique ; elle implique aussi une vraie prise de responsabilité de nos concitoyens, puisque ces nuisances sonores résultent le plus souvent d'un comportement incivique - vitesse inadaptée - ou de l'utilisation d'un véhicule muni d'un dispositif d'échappement défectueux ou non homologué.
Je tiens à préciser que l'article 3 du décret n° 95-79 du 23 janvier 1995 fixant les prescriptions prévues par l'article L. 571-2 du code de l'environnement relatif aux niveaux sonores des objets prévoit que les objets et dispositifs bruyants doivent être soumis à une procédure d'homologation.
Cette disposition applicable aux silencieux et dispositifs d'engins et véhicules, qui fait actuellement double emploi avec la procédure d'homologation prévue pour les silencieux et dispositifs d'échappement des véhicules réceptionnés au titre du code de la route, constitue un obstacle à son application.
Une modification, en cours de signature, du décret de 1995 permettra de garder, pour les dispositifs d'échappement, l'homologation prévue par le code de la route tout en conservant le système de contrôle et sanctions, notamment par la saisie et la destruction des matériels non conformes.
S'agissant des contrôles entrepris, sur les lieux de ventes ou de stockage, afin d'éviter la vente de dispositifs d'échappement non homologués, il est précisé que la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie a été alertée sur la vente de pots d'échappement non homologués. Cette affaire relève donc non de ma responsabilité, mais de celle de mon collègue Francis Mer.
Ses services ont réalisé une enquête au cours du premier trimestre 2001. Vingt-huit directions départementales y ont participé. Elles ont contrôlé plus de deux cents établissements, aussi bien fabricants grossistes que revendeurs.
Ces investigations ont permis de recenser et de contrôler plus de quarante marques de dispositifs d'échappement. L'absence des justificatifs attestant l'homologation des pots d'échappement et des dérogations autorisant la fabrication de pots destinés à la compétition a fait l'objet de procès-verbaux d'infraction.
Seize procédures contentieuses ont ainsi été engagées, dont cinq pour commercialisation de kits de surpuissance en infraction avec les dispositions du décret n° 92-987 du 10 septembre 1992.
Dès la publication du texte modifiant le décret n° 95-79 du 23 janvier 1995, une campagne de communication sera lancée sur le thème de la moto civique. Elle sera accompagnée, afin de sensibiliser les utilisateurs de deux-roues, de campagnes de contrôle, de saisie et de destruction des pots non conformes.
M. Gérard Larcher. Cela, c'est important !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Au-delà, dans quelques semaines, et pour répondre à l'interpellation globale que vous avez adressée au Gouvernement, j'aurai l'occasion de lancer un vigoureux et ambitieux plan antibruit.
M. Gérard Larcher. Merci !
M. José Balarello. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Alain Gournac.
M. Alain Gournac. Je remercie Mme la ministre, qui a parfaitement répondu à la question que je lui ai posée. Cela ne m'étonne pas : c'est un ministre que j'aime beaucoup. (Sourires.) De temps en temps, il faut le dire, car nos ministres sont assez critiqués ! (Nouveaux sourires.)
Madame la ministre, je vous approuve sur un premier point : avant la répression, il faut passer par la communication, et ce que vous venez de dire à propos de la communication est important. Je ne dis pas que cela va tout régler, mais, au moins, parler du problème permet de faire savoir à nos concitoyens que nous luttons contre les nuisances sonores.
La modification du décret de 1995, qui était malaisé à mettre en oeuvre, est une bonne chose. Il faut aller jusqu'à la saisie à fin de destruction, mais il faut aussi faire savoir que l'on y procède. Il faut faire connaître le nombre de pots d'échappement non conformes que nous avons trouvés et détruits, y compris en compétition.
Vous avez raison de vouloir communiquer sur le thème de la moto civique, puisque les motocyclistes se plaisent à jouer les « écolos » ! Se rapprocher de la nature, c'est une mode formidable. Et, quand on veut se rapprocher de la nature, on essaie d'abord de ne pas la détruire et de ne pas ennuyer tout le monde ! Je suis derrière vous pour prôner la moto civique.
Certes, vous l'avez dit, la question ne relève pas tout à fait de votre ministère, mais c'est à vous que j'ai voulu la poser. J'aurais très bien pu m'adresser au ministre de l'intérieur, mais je pense, madame la ministre, qu'il s'agit d'une question de qualité de vie. (Mme la ministre opine.)
Il faut continuer les contrôles sur les lieux de vente. Régulièrement, les préfets doivent les relancer. Et peut-être aussi pourrait-on essayer de savoir auprès des jeunes eux-mêmes comment ils font pour acheter des kits surpuissants. Certains nous le disent, madame la ministre.
En tout état de cause, je vous remercie de votre réponse, que je vais transmettre dans le département des Yvelines, et je suis certain que mon ami Denis Badré fera de même dans le département des Hauts-de-Seine.
M. Denis Badré. Tout à fait !
M. José Balarello. C'est un problème dans toute la France !
M. Alain Gournac. Ainsi, on saura que nous avons un Gouvernement efficace dans la lutte contre les nuisances !
RÉGLEMENTATION SUR LA PÊCHE
DANS LA GRANDE BRIÈRE MOTTIÈRE
M. le président. La parole est à M. André Trillard, auteur de la question n° 279 transmise à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
M. André Trillard. Madame la ministre, en vertu d'un acte qui remonte à 1461 le marais de la Brière est la propriété indivise des habitants des vingt et une communes riveraines. Depuis cette date, tous les régimes successifs ont reconnu et respecté le statut particulier de ce territoire géré depuis 1838 par la commission syndicale de la Grande Brière Mottière, qui, entre autres compétences, y réglemente la pêche.
Ainsi, les Briérons n'adhèrent pas à une association agréée de pêche et ne paient pas le timbre piscicole, mais ils s'acquittent de leur carte auprès de la commission syndicale, à un tarif d'ailleurs plus élevé, pour ne pêcher qu'en Brière, principalement le week-end, et en se soumettant à une réglementation par certains aspects plus restrictive que ne l'est la réglementation nationale.
Ce système a toujours fonctionné de façon satisfaisante jusqu'à ce qu'en juillet dernier, sans concertation ni avertissement préalable, des gardes-pêche nationaux viennent contrôler des pêcheurs parfaitement en règle au regard de la réglementation du marais et, s'appuyant sur la réglementation nationale, les sanctionnent pour défaut de présentation de carte de pêche.
L'émoi très vif provoqué en Brière par cette affaire est symbolique de l'attachement viscéral des Briérons à leur marais, dont je veux rappeler que les activités - chasse, pêche, élevage, coupe du roseau, récolte de la tourbe - ont nourri des générations. Même si, aujourd'hui, la connotation de loisir est plus manifeste que celle de survie, ce sont les activités humaines qui ont façonné un milieu dont l'intérêt écologique exceptionnel est unanimement reconnu.
A travers cet épisode, ce sont donc un territoire et une communauté, avec leur histoire et leurs coutumes, qui se sentent menacés dans leur identité.
Sur un plan plus concret, je m'interroge, madame la ministre, sur l'intérêt de la remise en question d'une spécificité admise de tout temps qui ne lèse personne et n'engendre pas de privation de ressources alors que, dans le même temps, les adhésions perçues par la commission syndicale de la Brière permettent d'assurer l'alevinage, la protection et l'entretien du marais, de concourir à la protection environnementale et au façonnage du marais, ainsi qu'à la sauvegarde de la faune et de la flore.
Madame la ministre, pour attachés qu'ils soient à leurs traditions, les habitants du marais ne sont ni passéistes ni arc-boutés sur leurs prérogatives. J'ai toutes les raisons de penser que, sur ce sujet comme sur bien d'autres, leurs représentants ont à coeur de développer avec les pouvoirs publics une véritable coopération pour mieux articuler les rôles respectifs de chacun, pour autant que soit réaffirmée la reconnaissance des us et coutumes locaux ainsi que celle du rôle de la commission syndicale.
Puis-je, dès lors, vous demander, madame la ministre, de donner, dans un geste d'apaisement localement très attendu, les instructions nécessaires pour que soient levées les sanctions prises à l'endroit des dix pêcheurs concernés et pour que, dans l'attente éventuelle d'une solution acceptable par tous, le système antérieur, vieux de plus de six cents ans, continue de s'appliquer ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le président du conseil général de la Loire-Atlantique, je vous remercie de me poser cette question sur notre chère Brière ! Ce n'est d'ailleurs pas seulement la ministre de l'écologie et du développement durable qui va vous répondre, mais aussi la présidente de la commission aménagement du territoire et environnement du conseil régional des Pays de la Loire.
Vous le rappelez avec raison, le droit de pêche spécifique qui régit la Brière est hérité de l'histoire.
En 1461, le duc de Bretagne, François II, a reconnu par lettre patente le droit de jouissance exclusive aux quatorze paroisses du marais. Puis, le roi Louis XVI a confirmé l'exploitation indivise du marais et reconnu aux Briérons un droit de propriété. Enfin, Louis-Philippe a créé par ordonnance, en 1838, la commission syndicale chargée de la gestion du marais.
Le droit de pêche est attaché au droit de propriété. Il n'est pas contesté par la République que les Briérons sont bien titulaires du droit de pêche du marais.
Indépendamment de l'exercice de ce droit, le versement d'une taxe piscicole et l'adhésion à une association agréée de pêche et de protection du milieu aquatique sont obligatoires en application de l'article L. 236-1 du code rural lorsque la pêche est pratiquée dans les « eaux libres », c'est-à-dire celles qui communiquent avec un cours d'eau.
Or, le marais de la Grande Brière est bien une « eau libre », ce qui explique les poursuites exercées en 2002 à l'encontre des personnes n'ayant ni acquitté la taxe piscicole, ni adhéré à une association agréée.
Cet événement - la « payse » que je suis le comprend - n'a fait qu'accroître une incompréhension qui s'est développée depuis la promulgation de la loi sur la pêche, voilà vingt ans. Je souhaite donc que la situation évolue et trouve une issue positive.
J'ai demandé à mes services de recevoir les représentants de la Grande Brière afin d'étudier avec eux la question, pour que nous puissions, monsieur Trillard, trouver rapidement une solution qui nous convienne à tous les deux et, surtout, qui convienne aux pêcheurs briérons.
M. le président. La parole est à M. André Trillard.
M. André Trillard. Madame la ministre, vous connaissez parfaitement le sujet, et je m'en félicite, car la résolution du problème que j'évoque contribuera à préserver ce caractère paisible de la Brière auquel nous sommes l'un et l'autre si attachés. Je vous remercie donc de votre réponse.
NÉGOCIATIONS SUR LA PÉRENNISATION
DU SYSTÈME DE TVA RÉDUITE
SUR LES TRAVAUX D'ENTRETIEN DES LOGEMENTS
M. le président. La parole est à M. Denis Badré, auteur de la question n° 277 transmise à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.
M. Denis Badré. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma question concerne le taux de TVA applicable aux travaux dans le bâtiment, et s'adresse bien sûr, au premier chef, aux ministres chargés de la consommation et de l'artisanat, des finances ou encore des affaires européennes, mais aussi, en définitive, à tout le Gouvernement, car il est clair que, sur un tel sujet, la solidarité gouvernementale ne peut que s'exercer.
J'en parlais avec M. Gournac à l'instant, dans sa commune du Pecq-sur-Seine, dans mon département, dans tout le pays, les entreprises du bâtiment s'inquiètent de savoir à quelle sauce elles seront mangées dans les semaines ou dans les mois qui viennent.
Marché unique oblige, la TVA est un impôt à régime communautaire. Ce régime est défini par la directive du 16 décembre 1991, bien connue de tous les spécialistes, et assortie de l'annexe H, elle aussi bien connue. L'article 29 fixe les conditions dans lesquelles les Etats peuvent mettre en oeuvre un taux réduit de TVA.
Pour le moment, les marges de manoeuvre à l'intérieur de ce cadre sont très faibles parce que, depuis les origines, la Commission de Bruxelles souhaite que l'Union européenne adopte un régime commun de TVA et veut donc toujours aller plus loin dans la voie de l'intégration en la matière.
Nous nous y opposons.
Vous vous en souvenez, monsieur le président, j'ai signé un rapport sur le système commun de TVA en Europe dans lequel j'écrivais que le passage à un tel système serait prématuré. La mise en oeuvre trop rapide d'un régime de TVA trop européen se retournerait en effet contre l'Europe, car les disparités sont encore trop fortes : les consommateurs comme les Etats se révolteraient contre ce lui leur serait imposé, ce qui ferait régresser la cause européenne.
Pour l'heure, la Commission prend, en quelque sorte, en « otages » toutes les demandes de passage à taux réduit en refusant tant que les Etats n'accepteront pas le régime commun de toucher à quoi que ce soit et en tout cas à l'annexe H, qui définit la liste des biens et services susceptibles d'être taxés au taux réduit.
On en voit l'illustration avec les cédéroms éducatifs, chers au Président de la République, qui s'est exprimé à plusieurs reprises sur ce sujet en relevant à juste titre qu'il n'était pas normal que ceux-ci soient taxés au taux plein alors que les livres éducatifs étaient taxés au taux réduit. En 1991, les cédéroms éducatifs n'existaient pas, mais la Commission est arc-boutée sur sa position.
On ne touche donc à rien, sauf à utiliser l'article 29 de la directive de 1991, qui prévoit qu'à titre dérogatoire et temporaire on peut, dans certaines conditions, passer au taux réduit, à titre expérimental par exemple. Cela a été fait pour la floriculture en 1997. Surtout, c'est sur cet article 29 qu'est fondée l'expérimentation sur trois ans lancée en octobre 1999 pour certains services à haute intensité de main-d'oeuvre afin de faire apparaître si le passage au taux réduit encourage ou non l'activité.
Chaque Etat a eu le droit de proposer trois services pour tenir lieu de support à cette expérimentation. Je l'ai dit à plusieurs reprises dans cet hémicycle, je déplore que le gouvernement de l'époque n'ait pas retenu la restauration au titre de ces services, ce qui nous aurait évité bien des ennuis par la suite !
M. Alain Gournac. Ah oui !
M. Denis Badré. Cela dit, le gouvernement de l'époque a, comme nous l'y avions pressé, retenu les travaux dans le bâtiment, et il a eu raison.
Il était prévu qu'au bout de trois ans un bilan des effets du passage au taux réduit, notamment en termes de relance de l'activité, serait dressé. L'échéance aurait normalement dû être le mois d'octobre 2002, mais la Commission n'est pas du tout pressée de tirer le bilan puisqu'elle devra ensuite rouvrir l'annexe H.
La conclusion logique, si le bilan s'avérait positif, serait en effet l'élargissement de l'annexe H à tous les services pour lesquels les bienfaits du taux réduit seraient apparus. A nous dès lors de rappeler à la Commission que l'Europe, c'est aussi nous ! Demandons-lui donc de faire le bilan de l'expérimentation lancée il y a trois ans afin que nous sachions quelle appréciation elle porte sur celle-ci.
Pour les travaux dans le bâtiment, nous pensons, nous, que le bilan est positif : il apparaît en effet que, grâce au passage au taux réduit de la TVA, 50 000 emplois environ ont été créés par an dans le secteur du bâtiment, qui joue, à travers ses PME, un rôle très important dans la vie locale.
Par ailleurs, nous avons pu constater que des travaux représentant près de un milliard d'euros par an qui étaient effectués « au noir » le sont maintenant dans des conditions transparentes. C'est bon pour les recettes de TVA et c'est bon du point de vue de l'éthique à laquelle nous sommes tous attachés.
Il faut donc que la France fasse son propre bilan et qu'elle le fasse connaître à Bruxelles, comme il faut que Bruxelles fasse le bilan de l'expérimentation sur trois ans du passage au taux réduit de TVA sur divers services à haute intensité de main-d'oeuvre.
Madame la ministre, je souhaite en somme que vous leviez l'incertitude qui pèse sur les entreprises de travaux dans le bâtiment en confirmant que le bilan est positif et que le système du taux réduit sera donc pérennisé. Il faut répondre à l'attente légitime des entreprises du secteur mais aussi des consommateurs, qui se demandent s'il vaut mieux se lancer très vite dans des travaux qui seront peut-être mal faits, ou attendre et prendre le risque de perdre le bénéfice du taux réduit.
On ne sait pas où l'on va, et c'est la pire des choses. Madame la ministre, aidez-nous à sortir de cette incertitude, aidez-nous à mieux nous faire entendre à Bruxelles pour que le bilan soit enfin fait et que, sur la base de ce bilan, des décisions fortes soient prises : des décisions fortes pour l'emploi, fortes pour l'activité et fortes pour notre tissu local !
MM. José Balarello et Alain Gournac. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur Badré, je réponds certes en lieu et place de M. Renaud Dutreil, mais, si les mesures que vous attendez seront fortes pour l'économie et pour l'emploi, elles le seront aussi pour l'environnement.
MM. Denis Badré et Alain Gournac. Absolument !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Des travaux d'isolation phonique et thermique ont pu être exécutés dans les logements grâce au taux réduit de TVA : c'est aussi extrêmement important, pour se protéger contre le bruit, monsieur Gournac, comme pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, particulièrement importantes lorsque les installations de chauffage sont mal faites ou les appartements mal isolés.
Comme l'a indiqué M. Badré, l'expérimentation de la TVA à taux réduit dans le secteur du bâtiment était prévue jusqu'au 31 décembre 2003.
La France a présenté un rapport circonstancié sur l'impact de la baisse de la TVA dans ce secteur riche en emplois : plus de 1 milliard d'euros de hausse de chiffre d'affaires par an et création de 40 000 emplois. La baisse de taux, qui de surcroît a été très largement répercutée au consommateur final, a ainsi permis de redynamiser le secteur et entraîné de nombreuses créations d'emplois.
La Commission a rendu public, le 2 juin dernier, un rapport d'évaluation sur cette expérimentation mise en oeuvre par neuf Etats membres.
Ce rapport, inexplicablement, n'est guère favorable à une pérennisation de l'application du taux réduit de TVA. En effet, la Commission considère que, pour être pleinement efficaces, les baisses de TVA auraient dû être intégralement répercutées sur les prix payés par les consommateurs, ce qui, selon elle, n'a pas été le cas.
De plus, la Commission a rencontré des difficultés pour isoler les effets spécifiques de cette mesure, dans le contexte de la reprise intervenue à la fin des années quatre-vingt-dix, contexte qui était en lui-même favorable aux créations d'emplois, notamment dans les services. Par ailleurs, les effets attendus de réduction de la sphère de l'économie souterraine sont, là encore selon elle, très difficilement mesurables.
Le commissaire Frits Bolkestein, en charge de la fiscalité, a toutefois assuré à M. Renaud Dutreil, lorsqu'il l'a rencontré le 2 juin dernier, qu'il proposerait à la Commission d'autoriser les Etats membres à opter pour la TVA à taux réduit dans le secteur du bâtiment, et ce à titre définitif.
Cette question doit être examinée début juillet par la Commission européenne. La négociation se poursuivra au Conseil européen, qui doit se prononcer sur ce sujet à l'unanimité. Son résultat n'est donc pas acquis à l'avance.
M. Renaud Dutreil a donc prévu de rencontrer plusieurs partenaires européens dès la rentrée pour les convaincre de l'intérêt de cette proposition de directive, dont l'objectif de « moderniser, simplifier et appliquer de façon plus uniforme le système commun de TVA » n'est, vous l'avouerez, guère contestable.
M. le président. La parole est à M. Denis Badré.
M. Denis Badré. Mme la ministre a démontré qu'elle connaissait le sujet aussi bien que ses collègues plus directement concernés, et j'en suis très heureux, car ce sujet doit être connu de l'ensemble des membres du Gouvernement, du nôtre, mais aussi des gouvernements des autres Etats de l'Union européenne.
Vous disiez, madame la ministre, que la position de la Commission était inexplicable. J'ai essayé, au cours de mon intervention, de démontrer que, si la Commission se refuse à toucher au régime actuel, c'est pour forcer les Etats membres à passer au régime commun, ce qui serait, certes, très européen mais aussi très prématuré.
Il nous faut donc parvenir à gérer le calendrier et à faire en sorte que, dès maintenant, nos entreprises puissent exercer leur activité dans un contexte qui leur permette de le faire normalement.
Il faut donc réfuter l'analyse de la Commission et démontrer que les conditions dans lesquelles le passage au taux réduit s'est fait ont été très satisfaisantes.
Il faut rappeler que la TVA est un impôt à la consommation : c'est le consommateur qui doit intégralement bénéficier de la modification du taux. Parce qu'il paye moins cher, le consommateur va consommer plus et permettre à l'activité économique de se développer. A travers une augmentation de la consommation, on obtient donc une augmentation de l'activité, et cela dans tous les domaines.
C'est pourquoi il faut réfuter l'argument de Bruxelles et faire connaître le bilan. Je suis heureux de voir que vous avez confirmé les chiffres que j'avançais sur l'augmentation du chiffre d'affaires et sur la réduction du travail au noir. Il faut faire connaître ces chiffres. M. Dutreil saura, j'en suis sûr, convaincre ses collègues que, sur un sujet comme celui-là, qui est un sujet politique, il faut que le gouvernement français se fasse le porteur de l'anxiété et des préoccupations d'un secteur qui est vital pour notre économie et arrive à rendre cette anxiété contagieuse afin que les gouvernements des autres pays de l'Union, où le problème se pose d'ailleurs exactement dans les mêmes termes, se joignent à nous.
La pression doit être suffisamment forte pour que le Conseil, sur proposition de la Commission, prenne une décision. Il faut donc la convaincre au départ.
Il convient de rappeler inlassablement que l'Europe, c'est nous, et non pas la Commission. C'est parce que nous exprimons nos besoins, nos attentes, nos problèmes, que l'Europe avancera.
Le problème doit être résolu : il faut pérenniser le régime du taux réduit de TVA. C'est légitime, juste, équitable ; c'est nécessaire pour notre économie et pour notre pays. J'ajoute incidemment que nous devrions, dans les mêmes conditions, faire avancer le dossier de la restauration, qui se pose exactement dans les mêmes termes.
M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à midi, est reprise à seize heures, sous la présidence de M. Daniel Hoeffel.)
PRÉSIDENCE DE M. DANIEL HOEFFEL
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS
M. le président. La conférence des présidents a établi comme suit l'ordre du jour des prochaines séances du Sénat :
Mercredi 25 juin 2003 :
Ordre du jour prioritaire
A 15 heures et le soir :
1° Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de programme pour l'outre-mer (n° 360, 2002-2003) ;
2° Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, pour la confiance dans l'économie numérique (n° 195, 2002-2003).
Jeudi 26 juin 2003 :
A 9 h 30 :
Ordre du jour prioritaire
1° Eventuellement, suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, pour la confiance dans l'économie numérique.
A 15 heures et, éventuellement, le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement ;
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures.)
Ordre du jour prioritaire
3° Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat d'orientation budgétaire.
(La conférence des présidents a fixé à :
- quarante-cinq minutes le temps réservé au président et au rapporteur général de la commission des finances ;
- dix minutes le temps réservé à chacun des présidents des autres commissions permanentes intéressées ;
- quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 25 juin 2003.)
Dans l'hypothèse où une session extraordinaire serait décidée, la conférence des présidents a laissé au président du Sénat le soin de convoquer le Sénat, s'il y a lieu, le mardi 1er juillet 2003, à seize heures et, éventuellement, le soir.
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances ?
Mme Michelle Demessine. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je regrette que la conférence des présidents n'ait pas décidé l'inscription à l'ordre du jour de nos travaux de la proposition de loi n° 365 instaurant une amnistie sociale, déposée par les sénateurs communistes.
Cette proposition de loi vise à porter un coup d'arrêt aux mesures attentatoires aux libertés syndicales et associatives prises par le Gouvernement et par le patronat.
Notre proposition de loi est bien entendu d'actualité, puisque chacun a pu assister, sinon avec colère, du moins avec une grande surprise, à l'arrestation musclée et inacceptable de José Bové.
Ce fait confirme pleinement l'idée qu'il existe une justice à deux vitesses. La criminalisation de l'action revendicative se généralise. Le mouvement social relatif aux retraites a été marqué par de nombreux exemples de cet ordre.
Dans mon département, le Nord, entre 6 heures et 7 heures ce matin, Dominique Vandeveld, militant syndical, et quatre autres salariés de l'entreprise SCIA de La Chapelle-d'Armentières ont ainsi été interpellés par les forces de l'ordre et placés en garde à vue au commissariat de Béthune. Cette interpellation ferait suite à une manifestation des salariés, à la fin de l'année 2001 ou au début de l'année 2002, contre leur ancien employeur, M. Léonce Deprez, dans la commune de Ruitz, dans le Pas-de-Calais.
Mme Hélène Luc et M. Guy Fischer. C'est scandaleux !
Mme Michelle Demessine. Ces salariés ont mené avec leurs collègues, pendant près de six mois, une longue lutte pour empêcher la fermeture de leur entreprise et la vente de leur outil de travail et pour maintenir l'activité sur le site. Grâce à leur mobilisation, soutenue par les élus, quatre-vingts emplois ont été sauvés. L'entreprise rouvrait ses portes voilà exactement un an, le 15 juin 2002.
L'interpellation de ces salariés, qui ont été placés en garde à vue comme des bandits de grand chemin, est une honte ! Ils auraient pu être entendus par la justice sur simple convocation, comme cela s'est déjà produit. Avec cette opération musclée, le choix a été fait de les intimider et de criminaliser leur action en les interpellant chez eux et en les plaçant en garde à vue, comme s'il s'agissait du démantèlement d'un trafic de drogue ou d'un réseau de prostitution. Dans le même temps, des dirigeants d'entreprises, par exemple ceux de Metaleurop, dénoncés comme des patrons voyous par le Premier ministre lui-même, ou encore ceux de SIE Energies ou de Lever, responsables de la fermeture de leurs entreprises, ne sont jamais inquiétés.
M. Yves Coquelle. Absolument !
Mme Michelle Demessine. Je demande au Gouvernement d'intervenir pour la libération immédiate des salariés de l'ex-entreprise SCIA.
Plus généralement, je souhaite, monsieur le président, que le Sénat accepte un débat sur la nécessaire amnistie sociale. Comment en effet ne pas constater le décalage existant entre le discours d'« apaisement social » du Président de la République Jacques Chirac et celui du Premier ministre Jean-Pierre Raffarin ?
Je demande, monsieur le président, une suspension de séance de quinze minutes, en raison de l'émotion que suscite aujourd'hui la violence antisociale. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. Je prends acte de votre déclaration, madame Demessine.
Cependant, l'ordre du jour de cet après-midi étant suffisamment chargé, il ne me semble pas opportun de suspendre la séance.
Mme Hélène Luc. Ce n'est pas une raison !
M. le président. Cela n'atténue en rien la teneur de vos propos, dont il sera donné connaissance en tous lieux où cela apparaîtra nécessaire. (Protestations sur les travées du groupe CRC.)
Mme Hélène Luc. Mme la ministre pourrait nous dire ce qu'elle en pense, en tant que membre du Gouvernement ! On ne peut pas laisser faire cela ! Ce n'est pas possible !
M. le président. En ma qualité de président de séance, je puis vous dire qu'il a été pris bonne note des propos de Mme Demessine. Ils seront transmis à qui de droit. (Très bien ! sur les travées de l'UMP. - Nouvelles protestations sur les travées du groupe CRC.) Je ne suis pas en mesure d'entrer dans d'autres considérations.
M. Roland Muzeau. C'est scandaleux !
M. le président. Y a-t-il d'autres observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances ?...
(Ces propositions sont adoptées.)
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Je souhaiterais indiquer à Mme Demessine que je n'ai bien sûr pas une connaissance précise des faits survenus ce matin dans le Nord. Cela étant, si les circonstances étaient bien telles qu'elle les a décrites - je ne mets naturellement pas en cause sa bonne foi -, ces faits seraient inacceptables. Toutefois, il est possible, madame Demessine, que vous ayez été mal informée...
M. Pierre Hérisson, rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan. Comme pour Air Lib !
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Je puis vous assurer, madame Demessine, que, avec mes collègues du Gouvernement plus particulièrement concernés, j'examinerai d'une façon extrêmement rigoureuse quel a été le déroulement des faits.
Mme Michelle Demessine. Agissez pour que ces salariés soient libérés !
CONFIANCE DANS L'ÉCONOMIE NUMÉRIQUE
Discussion d'un projet de loi
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 195, 2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, pour la confiance dans l'économie numérique. [Rapport n° 345 (2002-2003) ; avis n°s 342 et 351 (2002-2003).]
Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre déléguée. (M. Louis de Broissia applaudit.)
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires économiques et du Plan, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, l'examen du projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique est une occasion, pour le Gouvernement, de témoigner de l'importance qu'il attache aux nouvelles technologies et à leurs usages. Le Premier ministre a présenté, en novembre 2002, le plan RESO 2007, décrivant notre politique pour en favoriser le développement.
On peut dire qu'une véritable révolution est en train de se produire, et nous n'en sommes qu'au début. L'explosion de la « bulle » financière de l'Internet et des télécommunications ne doit pas occulter le développement fulgurant des usages réels de ceux-ci, qui s'impose comme un phénomène mondial majeur.
Or la France est en retard. Durant les dernières années, elle a certes progressé, mais elle n'a pas encore comblé son retard. Selon un classement établi en décembre 2002 par l'Union internationale des télécommunications, notre pays figurait à la vingt et unième place parmi les pays les plus avancés sur le plan de la diffusion et de l'utilisation des technologies de l'information et de la communication.
Ce retard est bien sûr un handicap pour notre croissance, et donc pour l'emploi. Rien ne le justifie, ni des raisons culturelles, ni la qualité de nos industriels, ni l'état de nos réseaux de communication. C'est ainsi que, à l'automne 2002, Francis Mer et moi-même avons largement eu l'occasion d'exprimer notre volonté politique de le rattraper et de donner une forte impulsion à plusieurs domaines de l'économie numérique. La fin de l'année 2002 et le début de l'année 2003 ont confirmé le dynamisme de ce secteur.
En matière de commerce électronique, le montant des transactions sur Internet aura connu un développement à hauteur de 61 % en 2002. Cette tendance s'est maintenue au rythme de 50 % pour le premier trimestre de 2003. Des secteurs entiers voient leur activité transformée. Ainsi, dans la vente à distance, plus de 10 % des commandes se font aujourd'hui par Internet. Dans le secteur des voyages, ce taux atteint près de 15 % ; d'ailleurs, pour certaines compagnies aériennes, notamment celles à bas coût, la réservation n'est pratiquement possible que par Internet. Pour la seule SNCF, c'est 6 % du chiffre d'affaires qui est réalisé aujourd'hui par le biais d'Internet.
A cet égard, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie n'est pas en reste, puisque, en 2003, plus de 600 000 personnes auront établi leur déclaration de revenus via Internet, alors que seulement 120 000 télédéclarations avaient été effectuées en 2002. L'objectif que nous nous étions fixé est donc largement atteint.
Peu de secteurs économiques peuvent se prévaloir de telles performances ! Pour autant, si certains secteurs ont particulièrement su tirer parti du commerce électronique, d'autres sont encore en attente d'une plus grande réussite. Le présent projet de loi confortera le cadre juridique de leur développement, renfonçant la confiance dans ces nouveaux canaux de distribution, et donc la croissance.
Toutefois, développer l'économie numérique suppose aussi d'accroître considérablement le nombre d'agents économiques, entreprises et ménages, pouvant y accéder dans des conditions optimales de confort d'utilisation et de coût.
S'agissant de l'équipement des ménages en micro-informatique, j'ai fait réaliser tout récemment par nos services une étude visant à identifier les principaux freins. Ses résultats nous montrent que le taux d'équipement des ménages en ordinateurs atteint 42 %. La barre des 10 millions de ménages équipés a été franchie au cours du premier trimestre de 2003. C'est un chiffre encourageant, même s'il nous place encore derrière certains de nos partenaires européens.
Je me félicite aussi du fait qu'une majorité de Français aient désormais une attitude plus positive envers le micro-ordinateur, manifestant de l'intérêt pour cette technologie. Ce progrès dans la perception de son utilité effective résulte, à n'en point douter, de l'émergence de services attrayants tels que les accès à Internet à haut débit.
En matière précisément d'accès au haut débit, j'ai décidé, au cours de l'été 2002, une baisse des tarifs de revente en gros de l'ADSL. Cela a marqué un tournant majeur dans le développement du marché français, grâce à la baisse des tarifs et à l'émergence d'une offre grand public, sous forme d'un abonnement mensuel illimité au prix de 30 euros environ. Le résultat en est que la France rattrape rapidement le retard qu'elle avait pris dans ce domaine et connaît une croissance « fulgurante », la plus forte d'Europe. Avec plus de deux millions d'abonnés - ils seront probablement trois millions à la fin de l'année 2003 - la France est désormais le deuxième pays européen en termes de pénétration du haut débit.
Nous sommes donc en route vers notre objectif de dix millions d'abonnés à l'Internet à haut débit d'ici à cinq ans. Cet objectif est certes ambitieux, mais il est réalisable. La croissance du nombre des abonnés crée un cercle vertueux pour l'ensemble de l'économie numérique. Grâce à ce fort potentiel de clients, les investissements lourds et coûteux de ce secteur seront largement amortis et de nouveaux services et usages pourront émerger. Le développement du haut débit ouvre aussi à nos concitoyens l'accès à de nouveaux usages de l'Internet, dans des domaines tels que la santé, l'éducation ou les divertissements.
Dans le secteur des technologies de l'information et de la communication et de l'économie numérique, le Gouvernement a choisi de sortir de la logique des « grands plans », qui créent plus d'attentes qu'ils ne règlent de problèmes, et des « grandes lois », qui mettent tellement de temps à être votées qu'elles sont déjà en décalage avec les technologies et les pratiques quand elles entrent en vigueur.
Pour autant, je voudrais rappeler que le projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique est le premier texte français d'ensemble relatif à la société de l'information.
J'aurai bientôt l'honneur de vous présenter un autre texte législatif visant à transposer les directives sur les communications électroniques, ce que l'on appelle, dans le jargon communautaire, le « paquet télécoms », dans lequel des réponses seront apportées à plusieurs questions d'actualité importantes concernant les infrastructures de réseaux et les autorités de régulation. Les deux textes seront donc complémentaires. L'Assemblée nationale a d'ailleurs intégré au projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique plusieurs dispositions relatives aux télécommunications.
L'adoption du texte est indispensable pour créer un climat de confiance, résultant de la fixation de règles du jeu claires pour les fournisseurs et d'une protection efficace des utilisateurs. En effet, la législation actuelle ne répond pas aux problèmes nouveaux surgis au cours d'une période très courte. Il devient urgent d'en combler les vides actuels, pour assurer la sécurité juridique sans laquelle les énergies ne pourront se développer dans ce secteur particulièrement porteur.
Dans ce domaine, la France accuse, une fois de plus, un retard dommageable dans la transposition des directives européennes. Ainsi, la directive du 8 juin 2000 sur le commerce électronique aurait dû être transposée avant le 17 janvier 2002. Le projet de loi que je vous présente aujourd'hui permettra donc de combler un retard pour lequel la France a reçu un avis motivé de la Commission européenne. S'agissant du sujet particulier de la publicité par voie électronique, le projet de loi tend à transposer dès maintenant l'article 13 de la directive du 12 juillet 2002 sur les données personnelles, qui fait partie des directives du « paquet télécoms ».
Avant de détailler le contenu du projet de loi que nous vous soumettons, je souhaiterais souligner la qualité des échanges qui ont eu lieu au cours des travaux préparatoires entre les commissions du Sénat et le Gouvernement. Mes remerciements iront ainsi tout particulièrement aux rapporteurs, M. Alex Turk pour la commission des lois, M. Louis de Broissia pour la commission des affaires culturelles et MM. Bruno Sido et Pierre Hérisson au nom de la commission des affaires économiques. Le caractère très complet de leurs rapports et les nombreux amendements qu'ils vous proposent témoignent de leur investissement sur ce projet de loi.
Conformément aux orientations du Conseil d'Etat dans son rapport de 1998 sur Internet, le projet de loi ne cherche pas à créer de toutes pièces un droit spécifique pour l'économie numérique, mais prévoit de l'insérer dans les textes existants en les adaptant. C'est ainsi qu'il vous est proposé de modifier de nombreux codes, qu'il s'agisse de la communication, de la consommation, du commerce, du droit civil, du droit pénal, des postes et télécommunications.
Les dispositions du projet de loi initial s'articulaient autour de quatre grands thèmes : le cadre d'exercice de la liberté de la communication en ligne ; le commerce électronique et la publicité ; la sécurité, en particulier la cryptologie et la cybercriminalité ; enfin, les systèmes satellitaires.
Lors du débat à l'Assemblée nationale qui a eu lieu les 25 et 26 février derniers, le Gouvernement a aussi complété le texte par un amendement visant à permettre aux collectivités territoriales d'intervenir désormais dans le secteur des télécommunications. Je suis certaine qu'au cours de notre débat nous aurons l'occasion de revenir sur cette question, qui, je le sais, revêt une importance particulière pour chacun d'entre vous.
Le premier thème, c'est la définition et la régulation de la communication publique en ligne.
Le projet de loi définit pour la première fois la communication publique en ligne. Cette notion était utilisée mais non définie dans la loi du 1er août 2000 relative à la liberté de communication. Les dispositions la concernant s'inséraient dans les chapitres relatifs à l'audiovisuel, ce qui rendait de fait le Conseil supérieur de l'audiovisuel, le CSA, compétent en matière d'Internet.
Le Gouvernement, guidé par la philosophie de ne pas bouleverser l'architecture légale actuelle, a choisi, au cours des travaux interministériels, de conserver ce rattachement à la communication audiovisuelle en en précisant les limites et les spécificités. Ce sujet a, vous le savez, fait l'objet de nombreux débats à l'Assemblée nationale, et je me dois de vous faire part des réflexions intervenues depuis lors au sein du Gouvernement.
Aujourd'hui, la solution légale que nous envisageons consiste à conserver en l'état la définition de la communication publique en ligne, tout en limitant les pouvoirs de régulation du CSA au champ des services de radio et de télévision. Cette limitation, faite en plein accord avec le CSA, est ainsi inscrite dans le projet de loi sur les « communications électroniques » et a fait l'objet d'amendements parlementaires.
Les conditions de la responsabilité des acteurs - hébergeurs de sites, fournisseurs d'accès et opérateurs de télécommunications - sont précisées dans le présent projet de loi.
Depuis la sanction partielle par le Conseil constitutionnel de la loi du 1er août 2000, une incertitude juridique demeurait en ce domaine. Par ailleurs, la directive sur le commerce électronique intègre aussi des dispositions sur leur régime de responsabilité. Il convenait de proposer une solution conforme à la fois aux exigences de la directive et, bien évidemment, à la décision du Conseil constitutionnel.
Ainsi, le projet de loi pose un principe général de limitation des responsabilités civile et pénale des prestataires de l'économie numérique du fait des contenus qu'ils hébergent, stockent ou transmettent.
S'agissant des prestataires d'hébergement et de stockage, la mise en cause de leur responsabilité est limitée au seul cas où, ayant effectivement connaissance d'activités ou d'informations illicites hébergées, ils n'auraient pas agi promptement pour rendre impossible l'accès aux informations.
Le dispositif retenu est conforme au code pénal, qui renvoie la responsabilité du contenu sur celui qui le crée et qui doit en assumer les conséquences. Mais les intermédiaires hébergeant ou transmettant un contenu ne peuvent pas, de leur côté, être complices de la diffusion d'un contenu illicite ; leur responsabilité serait aussi engagée, le cas échéant.
S'agissant des adresses françaises sur Internet, c'est-à-dire toutes les adresses dont la syntaxe se décline en « www.nom.fr », il était nécessaire d'en définir légalement les règles de gestion et d'attribution.
La délégation de cette gestion à des organismes par le Gouvernement garantira un cadre clair de développement à ces adresses, qui, je le précise, sont au nombre de 160 000 aujourd'hui.
Le deuxième thème autour duquel s'articule le projet de loi concerne la confiance dans le commerce électronique.
Le commerce électronique ne pourra se développer massivement que si les consommateurs ont une entière confiance dans les procédures électroniques associées. Pour créer cette confiance, en transposant la directive européenne, le projet de loi définit le cadre juridique applicable aux commerçants électroniques.
La « mécanique européenne » de la directive du 8 juin 2000 harmonise les points qui sont déterminants pour le développement d'un commerce électronique sécurisé sur l'ensemble de l'Union européenne, tels que les informations à fournir à l'attention des consommateurs ou les modes de conclusion des contrats par voie électronique.
L'harmonisation de ces différents « points clés » permet de considérer que les législations des différents Etats membres dans ce domaine seront désormais globalement équivalentes, même si elles ne sont pas identiques dans le détail. Une entreprise opérant à partir d'un Etat membre respectera les exigences des autres Etats membres, et n'aura que peu d'obligations complémentaires à satisfaire. Il s'agit d'un progrès majeur vers un espace européen de liberté pour le commerce électronique.
Parmi les dispositions prévues, le projet de loi renforce la protection des consommateurs, qui doivent être largement et complètement renseignés sur l'identité des marchands électroniques. Les informations - nom, adresse, capital social - devront être accessibles facilement et en permanence au cours des transactions.
Parmi les problèmes épineux auxquels sont confrontés les internautes, il y a celui qui est appelé communément le « spam », c'est-à-dire ces millions, voire ces milliards, de courriers électroniques publicitaires non sollicités. Il s'agit d'un phénomène de grande ampleur, qui génère de nombreuses plaintes auprès de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, la CNIL. N'oublions pas, de plus, que l'utilisateur internaute supporte des frais pour sa connexion. Je ne pense pas qu'il souhaite qu'elle soit engorgée inutilement.
Des règles de transparence et de protection des consommateurs sont donc instaurées. L'envoi de courriers électroniques ayant pour but la prospection commerciale directe est interdit sans l'accord préalable des consommateurs. De plus, lorsque ces derniers reçoivent ces courriers électroniques à caractère publicitaire, ils doivent pouvoir en identifier facilement l'émetteur et avoir la faculté, à tout moment, de s'opposer à tout envoi ultérieur.
L'Assemblée nationale, à la suite d'une lecture stricte de la directive européenne, a souhaité autoriser la publicité électronique sans consentement préalable, à l'exception de celle qui est faite par fax, quand elle est destinée aux entreprises inscrites au registre du commerce et des sociétés. Le Gouvernement avait émis un avis favorable sur cette proposition.
La reconnaissance de la valeur juridique des échanges électroniques a déjà fait l'objet de plusieurs textes, notamment de la loi du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l'information et relative à la signature électronique.
Le projet de loi ira plus loin dans l'adaptation de notre droit, avec une innovation majeure introduite dans le code civil et permettant à tous les contrats - sauf, bien sûr, ceux qui concernent les droits sur des biens immobiliers, ceux qui requièrent l'intervention de tribunaux ou d'autorités publiques, ou ceux qui sont relatifs au droit de la famille - d'être réalisés sous forme électronique.
Dans le cadre d'un contrat de commerce par voie électronique, afin de protéger le consommateur contre les fausses manipulations, toute acceptation d'une offre doit prendre la forme d'un « double clic », c'est-à-dire qu'après avoir passé sa commande l'utilisateur doit vérifier et confirmer son acceptation au vu des informations récapitulatives qui lui sont présentées par le marchand.
Le troisième thème concerne la libéralisation de l'utilisation des moyens de chiffrement.
Pour accroître la confiance des consommateurs, les transactions et les contrats de commerce électronique utilisent des outils cryptographiques de signature électronique et de confidentialité des échanges. L'émergence des services de la société de l'information en a développé de très nombreux usages civils, alors qu'auparavant la cryptographie était assimilée à une arme de guerre. Du fait de ces usages civils, une nécessité de libéralisation est apparue au cours des années quatre-vingt-dix.
La réglementation relative aux moyens et aux prestations de cryptologie a toujours été très encadrée. Elle avait été modifiée par la loi sur la réglementation des télécommunications de 1990 et révisée par la loi de 1996. Une première étape de libéralisation avait consisté à élever en 1998 à 40 bits, puis en 1999 à 128 bits les longueurs des clés au-dessus desquelles une autorisation est nécessaire pour les utilisateurs.
Le projet de loi rend désormais complètement libre l'utilisation de tout moyen de cryptologie. Il rend libre également la fourniture, l'importation et l'exportation des moyens de cryptologie n'assurant que des fonctions de signature. La fourniture et l'importation de moyens de cryptologie assurant des fonctions de confidentialité sont maintenant soumises à simple déclaration. L'exportation des moyens de cryptologie assurant des fonctions de confidentialité est soumise à autorisation, conformément au règlement européen du Conseil de juin 2002.
Un des grands freins identifiés dans le développement du commerce électronique est, bien sûr, la sécurité des paiements par carte bancaire. Dans le cas d'une vente à distance, ce qui est le cas sur Internet, la loi sur la sécurité quotidienne, LSQ, du 18 novembre 2001 a apporté une réponse positive en accroissant de manière très sensible la protection des consommateurs, qui peuvent faire opposition en cas de fraude à distance, alors qu'auparavant cela n'était possible qu'en cas de vol ou de perte de la carte bancaire.
Le cadre législatif ayant été adapté, nous n'avons pas jugé utile d'inclure des dispositions spécifiques dans le projet de loi que je vous soumets. Néanmoins, je ferai observer que la libéralisation de l'usage de la cryptologie autorise la mise en place de systèmes de chiffrement plus performants que ceux qui existent aujourd'hui et qui sont utilisés fréquemment dans les transactions de commerce électronique.
Le développement de l'économie numérique va évidemment de pair avec la nécessaire garantie donnée à nos concitoyens concernant leur sécurité. C'est pourquoi les moyens des pouvoirs publics pour lutter contre la cybercriminalité sont renforcés. Ainsi, les sanctions pénales en cas d'accès frauduleux à un système informatique ou de modification de ses données sont doublées. De plus, un délit est instauré en cas de diffusion intentionnelle de virus informatiques.
Le dernier thème autour duquel s'articule le projet de loi concerne la réglementation des systèmes satellitaires.
Les systèmes satellitaires ont plusieurs rôles majeurs à jouer, parmi lesquels celui de permettre à l'avenir l'accès à Internet haut débit dans les zones mal desservies. Pour en conforter le rôle, le projet de loi prévoit des dispositions de nature technique qui n'appellent pas de commentaires particuliers.
En conclusion, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, ce projet de loi contribuera à dynamiser l'économie numérique. Il constitue un pas supplémentaire pour renforcer la sécurité des acteurs et des consommateurs, ainsi que pour clarifier les règles du jeu pour les entreprises fournissant des prestations par voie électronique.
Je sais l'intérêt que vous portez à plusieurs questions complémentaires importantes. Elles ont fait l'objet de discussion, en particulier la réforme du financement du service universel ou encore la couverture du territoire en téléphonie mobile. Nous aurons l'occasion d'approfondir ensemble ces sujets. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Hérisson, rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur de la commision des affaires économiques et du Plan. « Les technologies de l'information et de la communication sont porteuses de promesses dans tous les domaines. Leur vertu est de mettre de la rapidité dans ce qui est lent, de la fluidité dans ce qui est lourd, de l'ouverture dans ce qui est fermé. » Ces mots du Premier ministre, M. Jean-Pierre Raffarin, lors de la présentation du plan RESO 2007 à l'automne dernier, sont la preuve que le Gouvernement n'a pas tardé à prendre la mesure de l'enjeu numérique pour la France. Je m'en félicite et je vous en remercie, madame la ministre.
Les technologies de l'information et de la communication recèlent, pour toutes les entreprises, de très importants potentiels de gains de productivité et de réactivité. Mes chers collègues, il est de la responsabilité des pouvoirs publics de saisir cette chance pour la France et de conforter ces gains potentiels pour soutenir la croissance et l'innovation. Il était donc impératif, et le Gouvernement l'a fait sans délai, de tracer la perspective d'une république numérique à l'horizon 2007.
Ce texte constitue le premier volet du plan « pour une république numérique dans la société de l'information » : il ouvre la marche de ce plan de bataille concret qui a pour objet d'amener sans réserve tous les Français sans exception à bénéficier des apports d'Internet.
Le texte qui est soumis aujourd'hui au Sénat est très riche, car il répond à de nombreuses attentes. Ces attentes ont été largement éprouvées, puisque l'« ancêtre » de ce texte, le projet de « loi sur la société de l'information », avait été déposé en 2001 sur le bureau du Parlement par le précédent gouvernement mais, malgré les annonces au tambour, ne fut finalement jamais discuté.
Je me félicite donc vivement du dépôt, par le Gouvernement, de ce projet de loi. Ce texte soutiendra le développement des secteurs d'activité de l'économie numérique, en leur offrant un cadre juridique stable et clair, permettant de promouvoir la confiance de tous les acteurs pour leur permettre d'investir leur énergie et leurs ressources dans ces nouveaux champs cruciaux d'avancée économique pour notre pays.
Même s'il vise des objectifs de clarté normative, voire de pédagogie, ce texte n'en est pas moins d'une certaine complexité. Celle-ci tient en partie à la forte influence du droit communautaire sur le projet de loi, puisque celui-ci transpose des dispositions extraites de plusieurs directives : la directive « commerce électronique » de 2000, la directive « vie privée et communication électronique » de 2002, la directive « droits d'auteur et droits voisins » de 2001 et la directive « signatures électroniques » de 1999. La difficulté tient à la fois à la diversité des sources et à leur nature, dans la mesure où certains éléments de ces directives apparaissent insuffisamment définis, voire incompréhensibles. Cet aspect nous est bien connu, mes chers collègues, et il n'est pas spécifique à ce texte.
S'ajoute également une difficulté tenant à la technicité du sujet : cet élément est particulièrement net concernant les dispositions du titre III du projet de loi, relatives à la cryptologie.
Enfin, et de façon plus fondamentale, ce texte est animé par deux tensions : l'une juridique, l'autre politique.
La tension juridique naît de la rencontre entre la nouveauté de la matière examinée, qui met souvent au défi notre règle de droit, et le souci de préserver notre héritage juridique et économique, lequel fait souvent la preuve de son adaptabilité à cette nouvelle matière.
Le législateur est appelé à se pencher sur des domaines relativement nouveaux, qui n'ont été qu'imparfaitement encadrés par les lois du 13 mars 2000 et du 1er août 2000, d'autant plus que le Conseil constitutionnel avait alors remis en cause une large part du travail législatif. Le texte adopté par l'Assemblée nationale a, de ce point de vue, le mérite de donner un certain nombre de définitions, comme la définition du commerce électronique, la définition du courrier électronique, la définition du consentement à recevoir de la publicité, la définition des prestations et moyens de cryptologie ou la définition des systèmes satellitaires.
Dans le même temps, comme l'avaient indiqué le rapporteur de la commission des affaires économiques et le rapporteur pour avis de la commission des lois de l'Assemblée nationale, le développement de l'économie numérique ne doit pas amener à bouleverser de manière inconsidérée l'état actuel de notre droit, et ce d'autant moins que celui-ci trouve souvent à s'appliquer à ces activités, au prix de quelques aménagements.
Je crois donc, madame la ministre, mes chers collègues, qu'il nous faut concilier l'attention aux spécificités des nouvelles activités et le souci de ne pas remplacer un cadre juridique connu et appliqué par un ensemble de règles inédites dont la portée juridique serait incertaine.
En second lieu, ce texte est parcouru par une question politique de fond, celle de l'encadrement de la liberté pour des raisons d'intérêt général, qui constitue un fil conducteur du projet de loi. Il nous faut articuler la réalité d'un monde en perpétuel renouvellement technologique, dans lequel la liberté est une valeur fondatrice et sacrée, et les exigences politiques et morales de notre société. L'encadrement ou la limitation de la liberté par l'affirmation de la responsabilité civile ou pénale est une chose grave. Je rappellerai le vieux principe démocratique qui a guidé le droit de notre pays : « La liberté est la règle, la restriction de police l'exception. » C'est au Parlement de définir le champ précis de cette restriction de la liberté.
Notre débat devrait être, de ce point de vue, particulièrement fructueux. Je prendrai l'exemple des contenus pédopornographiques, qui illustre selon moi la complexité des questions que nous abordons aujourd'hui. Nous sommes tous d'accord sur la nécessité de lutter contre la diffusion de ces contenus, qui portent atteinte à ceux qui en sont l'objet comme à ceux qui les reçoivent. Cela étant, comment allons-nous atteindre concrètement cet objectif ? Quelles sont les modalités techniques de ce long combat ? Qui verra sa responsabilité engagée ? Ce texte ne se limite pas à la définition de grands principes, il est également l'occasion d'aborder ces aspects concrets et quotidiens.
Au demeurant, ces questions dépassent sur bien des points les clivages partisans, pour faire profondément appel à la conception que se fait chacun d'entre nous de la liberté individuelle.
Je souhaite enfin resituer le projet de loi dans le calendrier parlementaire, pour le moins dense : ce texte n'est qu'une première étape, qui devra être complétée, notamment par la transposition des directives qui forment ce qu'il est convenu d'appeler le « paquet télécom », auquel vous avez fait allusion, madame la ministre. C'est une motivation plus forte pour tâcher de légiférer dans un sens mesuré, qui laisse ouverts les champs du développement technologique à venir.
C'est pourquoi mes collègues rapporteurs et moi-même avons abordé ce texte avec pragmatisme, loin de toute idée préconçue, dans un domaine qui est lui-même en constante et rapide évolution.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Pour l'anecdote, je dirai que la révolution que nous connaîtrons dans les quinze ans à venir avec l'économie numérique et les télécommunications est de même nature que celle que nous avons vécue pour l'imprimerie depuis Gutenberg à nos jours, soit quatre cent cinquante ans ! (M. Jean-François Le Grand s'exclame.)
Je voudrais dire enfin que je partage pleinement le souci de pédagogie du Gouvernement. Malgré les aspects parfois très techniques du texte, il nous faut conserver en permanence le souci d'être intelligibles et lisibles par nos concitoyens. Du reste, mes chers collègues, c'est aussi une réforme pragmatique.
Je vous remercie, madame la ministre, de l'esprit d'ouverture dont vous avez fait preuve en inaugurant la discussion générale de ce texte d'importance. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, rapporteur.
M. Bruno Sido, rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le texte qui nous est soumis aujourd'hui est très complet, car il répond à de nombreuses attentes.
Je ne reviendrai pas sur sa genèse ni sur son ancêtre, le projet de loi sur la société de l'information, déposé sur le bureau du Parlement par le précédent gouvernement, maintes fois annoncé, mais qui finalement ne fut jamais discuté.
J'interviens, au nom de la commission des affaires économiques, comme rapporteur du titre Ier du projet de loi, dont l'objet est de poser le principe de la liberté de communication en ligne et d'encadrer cette liberté en définissant les responsabilités des intervenants sur l'Internet, conformément à la thématique générale qu'a indiquée Pierre Hérisson. J'insisterai pour ma part sur un aspect particulier de la liberté de communication : la possibilité concrète d'accéder aux moyens de communication les plus modernes.
La fracture numérique qui sépare ceux qui ont accès aux technologies de l'information et de la communication et ceux qui en sont largement ou totalement exclus pourrait porter un coup terrible à notre cohésion sociale si nous n'attaquons pas le mal sans plus attendre. Nous avons parfois été en retard sur certains aspects du développement de ces technologies, mais nous avons aussi été en avance sur d'autres : il n'est que de songer à la réussite extraordinaire qu'a constituée le Minitel ou au degré d'équipement des particuliers en téléphonie mobile.
C'est donc bien le travail du législateur que de s'assurer que les libertés posées en droit sont bien exercées dans les faits.
Je ne m'attarderai pas sur l'article 1er A, qui fait l'objet de toute l'attention de nos collègues. Je me contenterai d'indiquer, en tant que président du conseil général d'un département où les opérateurs ne se bousculent pas, que je me félicite de la grande avancée que permet cet article, même s'il doit être précisé en certains points. Je crois en effet qu'un équilibre doit être trouvé entre l'élan public local et le marché des télécommunications, qui est fondamentalement en développement, notamment pour ce qui est du haut débit ; nous y reviendrons lors de l'examen de l'article.
Vous me permettrez, madame la ministre, mes chers collègues, d'insister plus longuement sur l'article 1er B, qui, vous le savez, m'est particulièrement cher. Il me semble que la couverture du territoire en téléphonie mobile de seconde génération est un élément concret qui va dans le sens de la réduction des inégalités devant les technologies de l'information et de la communication.
La rapidité avec laquelle le téléphone mobile a pris son essor a permis de mettre ces inégalités en évidence. Ne pas pouvoir accéder à ces services, ce n'est pas seulement une gêne dont certains veulent croire qu'elle est surtout d'ordre symbolique. En réalité, les outils modernes de télécommunication sont une composante essentielle du dynamisme économique et social. En être privé, ce n'est donc pas seulement souffrir d'un retard, c'est être rejeté de façon croissante. Le sous-équipement de larges portions du territoire a un effet pervers, c'est pourquoi il est urgent de briser au plus vite la spirale.
J'ai bon espoir que ce qui est en passe d'être accompli aujourd'hui en matière de téléphone mobile pourra être étendu demain aux nouveaux développements technologiques. Certains imaginent ainsi que les zones à faible densité de population pourraient être les réservoirs de développement privilégiés de la technologie Wireless Fidelity, dite Wi-Fi.
Je crois donc que l'examen de ce texte doit être placé sous le sceau de l'optimisme. Les retards peuvent être comblés et les outils technologiques de pointe être mis au service de tous. Le choix du Gouvernement de déposer un projet de loi de « confiance » est donc, selon moi, particulièrement heureux.
Il me semble en effet que nous pouvons avoir confiance en notre capacité à maîtriser et à intégrer dans nos comportements les meilleurs outils des technologies de la communication et de l'information. Le temps où l'on se lamentait à plaisir sur le retard fatal de la France dans ces domaines est révolu. Nous n'avons pas à susciter ces activités, qui apparaissent d'elles-mêmes, mais tout simplement à permettre leur développement, dans un environnement juridique et économique stable.
Enfin, dans mon esprit, un tel horizon implique nécessairement l'affirmation d'une volonté des pouvoirs publics. De ce point de vue, je me réjouis vivement de l'annonce du plan RESO 2007, faite par le Premier ministre, qu'a si justement évoquée Pierre Hérisson.
Je citerai un autre exemple de l'affirmation de la volonté politique dans ces domaines : la question du filtrage. Celle-ci revient fréquemment dans les débats sur l'Internet et sur la liberté qui y règne. En effet, la maîtrise des connexions arrivant en un point ou partant vers un point pourrait constituer la solution à bien des difficultés morales et sociales que pose le développement du réseau mondial. Toutefois, nous savons tous à quelles difficultés techniques se heurte le filtrage.
Je suis pour ma part convaincu, mais nous y reviendrons plus tard, que, si ces difficultés ne doivent pas être ignorées, elles ne doivent pas non plus conduire le législateur au renoncement. Le filtrage est une solution technique dont la fiabilité n'est pas totale mais qui mérite d'être approfondie. Je formule le souhait que ce projet de loi y contribue.
Tout comme M. Pierre Hérisson, je crois que nous pouvons aborder ce texte complexe dans un climat serein et constructif, car je sais qu'il existe au Sénat de nombreux points d'accord sur ces questions. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis.
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. C'est avec une grande satisfaction, vous l'avez compris, madame la ministre, que le Sénat examine - enfin ! - un projet de loi comportant des dispositions relatives à l'encadrement législatif des services en ligne.
En effet, depuis la loi du 1er août 2000 évoquée par Mme le ministre, qui constitue la première mouture du régime de responsabilité des prestataires techniques opérant sur le réseau, nous commencions à désespérer de voir inscrit à l'ordre du jour un texte suffisamment ambitieux pour répondre aux attentes des professionnels comme à celles des simples amateurs que nous sommes tous, mes chers collègues, ou que nous sommes appelés à devenir.
Le projet de loi sur la société de l'information, la mythique « LSI », préparée par la précédente équipe gouvernementale,...
M. Daniel Reiner. Excellent travail !
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis. ... je n'évoque que les lois réelles, et non les lois virtuelles - aurait pu nous donner l'occasion de débattre d'un sujet complexe. Malheureusement, comme vous le savez sans doute, ce projet n'a jamais été inscrit à l'ordre du jour parlementaire,...
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Eh oui !
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis. ... maintenant notre pays dans un flou juridique pénalisant tant pour les acteurs économiques de ce secteur - je pense bien sûr aux éditeurs, aux hébergeurs, aux fournisseurs d'accès - que pour les consommateurs que nous sommes ou que nous sommes appelés à devenir, qui s'attendaient sans doute à l'adoption rapide de dispositions législatives garantissant leurs intérêts légitimes.
Au titre de la commission des affaires culturelles, je me soucierai des intérêts des industries de la communication et de la culture. De surcroît - et mes collègues rapporteurs ne l'avaient pas relevé -, cet abandon a mis la France dans une position très délicate vis-à-vis de Bruxelles. La transposition dans notre droit de la directive sur le commerce électronique aurait dû être effective avant le 17 janvier 2002 ; je rappellerai pour mémoire et pour tout commentaire que nous sommes aujourd'hui le 24 juin 2003.
Le projet de loi qui nous est soumis vient donc combler des lacunes regrettables et réparer un manquement à la réglementation européenne à laquelle, madame la ministre, je sais que vous êtes particulièrement sensible. Il correspond aussi à la volonté exprimée par le Premier ministre de donner « un nouvel élan au chantier de la société de l'information ». Il a souhaité sortir de la logique des grandes lois dont l'élaboration est tellement lente qu'elles sont déjà en décalage avec les technologies et les pratiques lorsqu'elles entrent en vigueur. Je pensais que M. Hérisson en ferait la remarque. (Sourires.)
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Absolument !
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis. Le Gouvernement a sagement abandonné l'idée de proposer un projet de loi unique et définitif ayant pour ambition de régler l'ensemble des problèmes que pose l'émergence des nouvelles technologies. Il a choisi bien au contraire - et je ne suis pas le premier, ni probablement le dernier, à le dire -...
M. Jean-François Le Grand. Absolument !
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis. ... une approche pragmatique et réaliste. Soyez-en remerciée, madame la ministre.
J'aimerais insister sur deux des principaux points du projet de loi qui entrent dans le champ de compétence réglementaire de la commission des affaires culturelles, ce qui explique qu'elle soit saisie pour avis. Nous attendons tous avec impatience l'intervention du brillant rapporteur de la commission des lois, qui conclura les présentations des différents rapporteurs.
Le premier point est lié à la définition de la communication en ligne. Dans la loi du 1er août 2000 que nous avons citée, le législateur avait préféré s'en tenir à une définition « en creux » des services en ligne, maintenant une certaine ambiguïté quant à leur appartenance à la communication audiovisuelle. En revanche, l'article 1er du présent projet de loi a défini la communication publique en ligne comme un sous-ensemble de la communication audiovisuelle. Madame la ministre, d'autres choix étaient possibles.
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Tout à fait !
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis. Soit ! Les similitudes entre la communication audiovisuelle et la communication publique en ligne ont été considérées comme prédominantes.
M. Henri Weber. A tort !
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis. J'essaie d'expliquer le choix qui a été fait. En l'occurrence, ce n'est pas à tort puisque, de fait, la communication audiovisuelle et la commmunication publique en ligne consistent toutes deux en la mise à disposition du public ou de catégories de public d'un procédé de télécommunication, de signes, de signaux, d'écrits, d'images, de sons, ou de messages de toute nature, qui n'ont pas le caractère d'une correspondance privée. C'est leur caractéristique commune.
La communication publique en ligne, mes chers collègues, se signale néanmoins par une spécificité qui suffit à justifier son traitement individualisé au sein de la communication audiovisuelle. A la différence des services de radio et de télévision, dont la réception se fait sur décision de l'émetteur, la transmission des services de communication publique en ligne est assurée sur demande individuelle.
Après trois ans d'hésitation qui, sur ce point précis, ont donc été mis à profit par le Gouvernement, le texte qui nous est proposé définit la communication publique en ligne. Il donne également au juge - et c'est un deuxième point positif pour notre commission - les moyens de protéger efficacement la propriété intellectuelle sur Internet en transposant, à la grande satisfaction des créateurs et de leurs ayants droit, l'article 8 de la directive sur les droits d'auteur et les droits voisins. C'est, pour nous, un point capital.
Le projet de loi donne enfin aux autorités judiciaires les moyens propres à faire cesser dans les plus brefs délais les dommages occasionnés par les cybercontrefacteurs, en étendant la procédure de saisie de contrefaçon aux violations des droits d'auteur et des droits voisins sur les services de communication en ligne. Je le répète, ce point est capital pour que la communication en ligne ne devienne pas un repaire de contrebandiers et demeure un lieu de contenu accessible et riche.
L'Assemblée nationale, qui a examiné le projet de loi les 25 et 26 février dernier, a tenu, par rapport au texte initial du Gouvernement, à apporter quelques modifications intéressantes.
Elle a d'abord décidé - ce dont il faut se féliciter - d'instaurer un droit de réponse sur Internet. Est ainsi ouvert par le texte de l'Assemblée nationale, que nous veillerons à améliorer - comme c'est l'usage du Sénat - un droit de réponse à toute personne nommée ou désignée dans un service de communication publique en ligne qui utilise un mode écrit de diffusion de la pensée, c'est-à-dire les sites de presse en ligne, et eux seuls.
Si l'article réduit le champ de sites concernés par l'exercice du droit de réponse, en contrepartie, il n'impose aucune restriction quant à la nature des imputations justifiant l'utilisation de ce droit. Il se rapproche ainsi de la philosophie de la loi de 1881 sur la presse, qui reconnaît un droit de réponse à toute personne mise en cause, fût-ce en termes élogieux - puisque tel le veut le droit de réponse et écarte, de ce fait, les restrictions imposées par la loi du 29 juillet 1982 en matière audiovisuelle, qui n'ouvre, ce droit qu'en cas d'imputation portant atteinte à l'honneur ou à la réputation de la personne considérée.
L'Assemblée nationale a aussi souhaité - c'est un point important - adapter et préciser les pouvoirs de sanction dont dispose le CSA à l'égard des éditeurs et des distributeurs de services. A cet égard, nos collègues ont bien travaillé.
En effet, les articles 5 bis et 5 quater autorisent le CSA à prononcer des sanctions pécuniaires à l'encontre des éditeurs et des distributeurs de services de radio et de télévision dont le manquement constaté est constitutif d'une infraction pénale.
Ces deux articles répondent efficacement, aux yeux de la commission, à la requête présentée depuis de longs mois par le président de l'Autorité de régulation pour améliorer l'efficacité du pouvoir de sanction de l'institution.
L'article 5 ter, quant à lui, élargit à l'ensemble des éditeurs des services de radio et de télévision privés le pouvoir, dont dispose le CSA, d'ordonner l'insertion à l'antenne d'un communiqué. C'est un point dont les commissions des affaires culturelles demandaient l'examen depuis de nombreuses années. Il en fixe les termes et les conditions de diffusion et met en place une procédure simplifiée rompant avec le formalisme de la procédure prévue à l'article 42-7 pour la mise en oeuvre de ce pouvoir de sanction.
Si la commission des affaires culturelles a approuvé les orientations générales de ce texte et les orientations nouvelles qu'ont tracées nos collègues de l'Assemblée nationale, elle a néanmoins souhaité faire des propositions destinées à en améliorer l'économie générale.
En premier lieu, la commission souhaite limiter les pouvoirs du CSA à la régulation des services de radio et de télévision sur tous les supports et à en aménager les conditions techniques.
En effet, en faisant de la communication publique en ligne un sous-ensemble de la communication audiovisuelle, le projet de loi fait explicitement du CSA l'instance de régulation de l'ensemble des services disponibles sur Internet.
Or toutes les personnes que nous avons auditionnées, comme M. Baudis ou M. Beck, sont d'accord sur ce point : le CSA n'a ni les moyens ni l'envie de contrôler le contenu des dizaines, des centaines de millions de pages personnelles mises en ligne sur le réseau.
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Tout à fait !
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis. Cela n'a aucun intérêt. Ce n'est pas de son domaine. Le CSA souhaite voir sa compétence limitée à la régulation des services de radio et de télévision disponibles sur tous les supports, y compris Internet.
C'est pourquoi il nous semble nécessaire de cantonner les pouvoirs de l'autorité de régulation aux services de radio et de télévision, que je propose, par ailleurs, de définir, sur tous les supports sur lesquels ceux-ci sont diffusés, évitant ainsi au CSA de se disperser en essayant vainement de contrôler le contenu des « pages jaunes », par exemple. (Sourires.)
S'agissant des pouvoirs du CSA, sujet qui intéresse fortement la commission des affaires culturelles,...
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission des affaires économiques aussi.
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis. ... il me semble que ce projet de loi est l'occasion de corriger certaines lacunes nées des lois du 30 septembre 1986 et du 1er août 2000. J'allais même dire que c'est le rôle du parlementaire responsable que de se saisir de toutes ces belles occasions pour légiférer, et c'est ce que nous faisons.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Très bien !
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis. Je pense notamment aux sanctions que peut prendre le CSA à l'égard des éditeurs et des distributeurs de services qui ne respecteraient pas leurs obligations législatives, réglementaires ou conventionnelles.
En effet, si la loi du 1er août 2000 a bien apporté une modification pour préciser que ces sanctions s'appliquent à l'ensemble des éditeurs de chaînes et des distributeurs de services, elle n'a pas corrigé l'intitulé même des sanctions, lesquelles font toujours référence aux seuls services autorisés, c'est-à-dire aux chaînes hertziennes.
Concrètement, à l'heure actuelle, les chaînes et les distributeurs de services du câble et du satellite, qui sont des services conventionnés ou déclaratifs et non des services autorisés, échappent donc en grande partie au pouvoir de régulation du CSA. C'est le moment pour nous de corriger cette lacune.
Par ailleurs, madame la ministre, pour qualifier les services de radio, notre législation se réfère encore au terme de « radiodiffusion sonore ». Ce terme est ambigu et est même contraire au principe de neutralité technologique. En effet, il se réfère non seulement aux services diffusés mais également à un mode de diffusion particulier, les ondes hertziennes, alors même qu'il existe d'autres supports comme Internet ; nos enfants le savent bien.
Il serait donc opportun, en plein accord avec le CSA, de rectifier ces erreurs quasi matérielles, en modifiant l'intitulé des sanctions pouvant être prononcées par le CSA, pour y inclure définitivement l'ensemble des services et en remplacant le terme de « radiodiffusion sonore » par celui de « radio ».
Enfin, madame la ministre, et c'est un point moral auquel, je le sais, vous serez sensible, il nous semble opportun de faire figurer la protection de l'enfance et de l'adolescence parmi les principes essentiels qui justifient la mise en place de limites à l'exercice de la liberté de communication.
Si l'on fait figurer ce principe en tête de la loi l'on évitera des attendus législatifs abscons.
Alors que la violence et, de plus en plus souvent, la pornographie envahissent les écrans de télévision à des heures que l'on peut difficilement qualifier de tardives, la commission des affaire culturelles vous propose de donner au CSA le pouvoir de mettre en demeure, sous peine de sanction, les services de radio et de télévision qui ne respecteraient pas l'obligation, non seulement éthique mais aussi juridique, de rendre inaccessibles au jeune public des programmes réservés à un public averti. Je proposerai un amendement visant à rectifier la loi de 1986 en ce sens.
Pour finir, je reviens brièvement sur le dispositif introduit par l'Assemblée nationale, dispositif perfectible, qui permet d'assurer un droit de réponse aux personnes mentionnées sur un service de presse en ligne.
Si les dispositions adoptées par l'Assemblée nationale obéissent à une logique fort compréhensible et sont donc, à ce titre, satisfaisantes dans le principe, elles risquent de l'être beaucoup moins dans leur mise en oeuvre. En effet, il semble difficile de justifier pourquoi les personnes morales ou physiques mentionnées sur une page personnelle, par exemple, se verraient privées de droit de réponse.
Il paraît donc indispensable, selon nous, d'élargir le droit de réponse sur Internet à l'ensemble des services qui y sont diffusés et de préciser, afin d'éviter toute ambiguïté - c'est l'objet même du projet de loi que vous défendez, madame la ministre -, le destinataire du droit de réponse qui se trouve être, comme pour la presse et les services de communication audiovisuelle, le directeur de la publication.
Telles sont, madame la ministre, mes chers collègues, les préoccupations qui ont motivé le dépôt des amendements que je présenterai, au nom de la commission des affaires culturelles. Ainsi viendra la confiance dans la communication numérique, voie d'excellence de l'économie numérique ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Alex Turk, rapporteur pour avis.
M. Alex Türk, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il m'appartient de formuler un avis au nom de la commission des lois, mais tout a été excellemment dit avant moi, les grands principes ont été évoqués, et les points de détail seront examinés lors de l'examen des articles.
Je me bornerai donc à évoquer une préoccupation essentielle dont nous a fait part tout à l'heure M. Hérisson, quand il a évoqué la tension juridique qui pèse sur ce texte.
Au nom de la commission des lois, je vais essayer d'indiquer de quelle façon il paraît possible de faire face à cette tension juridique.
Premier élément de tension : l'accélération constante. Incontestablement, il s'agit de matières de haute technilogie qui bougent extrêmement rapidement et qui sont sévèrement encadrées par le droit européen.
Tout à l'heure, l'un des rapporteurs a dit que nous avions déjà du retard dans la transposition de ce texte. Je vous rappelle que, voilà quelques semaines, nous avons examiné un projet de loi modifiant la loi Informatique et libertés qui devait être adopté en 1998 pour satisfaire aux exigences de la directive de 1995. Nous avons déjà cinq ans de retard.
Un jour ou l'autre, nous serons bien obligés de réfléchir en tant que législateurs à la manière de réagir à ces phénomènes d'accélération, car nous ne pourrons pas continuer à courir après les directives et à essayer de nous adapter systématiquement à une législation imposée par des phénomènes techniques.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Absolument !
M. Alex Türk, rapporteur pour avis. Une réflexion de fond extrêmement importante pour l'avenir doit être menée.
Deuxième élément de tension juridique : l'interconnexion qui gouverne l'ensemble de ce texte.
Nous traitons d'un domaine dans lequel, par un biais ou par un autre, interviennent l'Autorité de régulation des télécommunications, le Conseil supérieur de l'audiovisuel, mais aussi la Commission nationale de l'informatique et des libertés et, d'une certaine façon, le Forum des droits sur l'Internet. Un véritable défi se dresse devant nous.
Je ne suis pas du tout certain qu'il soit nécessaire d'instituer une autorité supplémentaire. Je ne crois pas, et M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles l'a excellemment dit, qu'il faille tout regrouper sous l'égide de l'une des autorités existantes. Au demeurant, un système dans lequel peuvent exister des failles, des chevauchements entre les différents organismes ne pourra pas perdurer. Il faut donc réfléchir à une forme de coordination souple.
Troisième élément de tension juridique : le problème de la régulation.
En 1997, M. Hérisson et moi avons remis un rapport, dans le cadre d'une commission présidée par M. Laffitte, sur les préoccupations liées au développement de l'Internet. A l'époque, nous avions osé dire devant la commission des lois que l'on pouvait abandonner en partie, dans un secteur déterminé, le concept de réglementation au profit de celui de régulation, totalement étranger au droit français.
Dans les années qui ont suivi, dans le milieu internautes beaucoup ont compris que la régulation pourrait être un piège mortel. En réalité, l'enjeu de ce genre de régulation, de réglementation est toujours le même : il s'agit d'un problème de proportionnalité.
Devons-nous laisser une totale liberté à l'hébergeur, sans aucun contrôle, au détriment de la liberté et, en l'occurence, du respect de l'intérêt général et de l'ordre public ? Ou bien devons-nous contraindre l'hébergeur de manière telle qu'il ne soit plus en mesure d'exercer son activité ? Dans ce dernier cas, il s'agirait d'une censure et d'une violation d'une autre forme de liberté, la liberté d'expression.
Il me semble que ce problème de proportionnalité est dans une large mesure, mieux traité sous la forme d'une réglementation élaborée sous l'égide du Parlement, qui a une véritable représentativité, que dans des systèmes parapublics ou issus du secteur privé.
Cela ne signifie pas qu'il faille renoncer totalement à l'idée de régulation, mais il faut prendre garde au fait que la régulation n'est pas forcément la meilleure méthode pour arbitrer entre des intérêts généraux.
Sur ce point, je pense que notre droit présente un certain nombre de caractéristiques, notamment de créativité et de réactivité, qui doivent nous rendre optimistes pour l'avenir. Le droit français gère depuis très longtemps des problèmes de proportionnalité grâce à la jurisprudence du Conseil d'Etat et à la législation. Le droit français connaît en outre parfaitement les problèmes de coordination en matière de science administrative. Reste le problème de l'accélération, qui ne dépendra que de notre propre mobilisation en tant que Parlement. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe Union pour un mouvement populaire, 52 minutes ;
Groupe socialiste, 28 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 13 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 11 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, contrairement à ce que nous venons d'entendre sur les bancs des ministres et des commissions et loin de l'unanimité affichée, le projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique n'est pas le texte consensuel et moderne que l'on nous vante.
Au regard des inquiétudes qui se sont manifestées dans le monde de l'informatique autour du projet de loi, on peut être sceptique sur le fait de savoir si son objectif - rétablir la confiance dans l'économie numérique - sera réellement atteint. A moins que cet objectif ne soit en fait que de rassurer une partie des acteurs de l'informatique : moins le consommateur que le « cybermarchand », moins le citoyen-internaute que les multinationales et les majors.
C'est certainement là que se situe la clé de la divergence d'appréciation que nous portons sur ce projet de loi et, plus globalement, sur le projet numérique du Gouvernement, à savoir un Internet marchand sous contrôle des puissances économiques et de l'Etat, là où nous souhaiterions qu'Internet soit un bien commun à la disposition de tous.
En effet, la loi relative à la sécurité quotidienne et la loi pour la sécurité intérieure ont prévu des dispositions sur le contrôle des flux de données, sur le contrôle de l'informatique via le protocole TCPA ; en passant par le filtrage des contenus d'Internet, le parti pris est affiché : minorer la vocation démocratique de l'outil Internet pour se focaliser sur sa dimension commerciale.
Pour nous, Internet n'est pas seulement la marchandisation des biens et des idées, c'est aussi et avant tout un formidable outil de communication, d'expression et de création. La vocation d'Internet était de s'imposer comme une pratique populaire et comme un média de masse : toucher le plus grand nombre, le plus rapidement possible, en tous lieux possibles ; c'est là que se situe véritablement la révolution Internet, qui a bouleversé les notions traditionnelles de distance et de temps propres aux médias traditionnels.
Au rythme de leur développement, dès 2008, soit seulement quinze ans après leur apparition dans le grand public, les réseaux numériques feront partager à un sixième de l'humanité un espace socialisé de diffusion et d'élaboration de l'information. On comprend bien les enjeux qui se profilent derrière ce chiffre et la nécessité de poser les bons objectif, pour qu'Internet ne devienne pas, à l'image des « radios libres », un espace normalisé et conventionnel, loin de sa vocation initiale.
La « République numérique » promise par Jean-Pierre Raffarin est, nous le rappelle Yves Lafargue dans l'édition d'hier du journal Les Echos, une promesse dangereuse : « Personne ne conteste qu'Internet et les nouvelles technologies sont des outils d'une grande utilité, mais leur séduction est source d'illusions. La bulle boursière a eu des conséquences dramatiques sur les salariés, en général limitées au secteur des technologies, du multimédia, et des télécommunications. La bulle sociale, si nous ne la dégonflons pas en dénonçant les promesses qui ne peuvent être tenues, aura des conséquences encore plus négatives car elles toucheront tous les secteurs d'activité. »
Comme le dirait mon ami Jack Ralite, veillons à ce que l'« utopie technicienne » ne se substitue pas à l'« utopie sociale », car la réalité d'Internet, c'est également la persistance des inégalités.
Malgré les chiffres très positifs que vous avez cités, madame la ministre, l'accès de tous au numérique souhaité par le Président de la République est loin d'être garanti, alors que les opérateurs privés refusent de s'implanter dans les zones non rentables.
C'est d'ailleurs ce qui a motivé l'insertion des articles 1er A et 1er B dans le projet de loi, afin de contourner l'inertie des opérateurs privés. Mais la solution retenue reflète en réalité le projet de société libérale dans toute sa logique. Ce que le texte appelle « l'insuffisance d'initiatives privées » comme condition d'autorisation interdit aux collectivités d'intervenir là où sont les opérateurs. De fait, on ne crée pas d'émulation entre les opérateurs et on les dédouane de s'implanter là où ils ne veulent pas : la collectivité paiera !
C'est donc bien une conception de l'Etat au service du marché qui est consacrée ici et non une vision de l'Etat au service du bien commun. Ce n'est guère de nature à nous étonner dans un contexte de privatisation de France Télécom et, plus généralement, de privatisation des services publics. Vous comprendrez que nous ne puissions adhérer à une telle vision de la société.
L'inégalité de l'accès à l'Internet, c'est aussi, concrètement, le sous-équipement patent en milieu scolaire et son déficit de prise en compte dans la formation : malgré les engagements réguliers des différents gouvernements, l'obstacle de l'implication financière de l'Etat n'a jamais été franchi.
Par ailleurs, comme en matière de directives européennes, nous déplorons que la dimension commerciale reste au coeur du projet gouvernemental dans un contexte où la liberté de la concurrence est largement illusoire : l'exemple de Microsoft nous le rappelle à l'envi. Cette conception justifie la mise sous contrôle de l'Etat et des opérateurs privés plutôt que le développement d'une réglementation destinée à renforcer les droits et la protection des internautes.
J'en donnerai quelques exemples. Concernant la responsabilité des intermédiaires techniques, qui concentre encore l'essentiel des interrogations, tant il est vrai que le texte, dans la mouture issue des travaux de l'Assemblée nationale, s'apparente à bien des égards à une « censure par précaution ».
En effet, au détour de l'article 2, l'Assemblée nationale a réintroduit de façon implicite l'exigence de « diligences appropriées » à l'égard des hébergeurs, principe qui avait pourtant encouru la censure du Conseil constitutionnel. La contradiction de cet article avec la directive sur l'économie numérique n'a d'ailleurs pas échappé à nos rapporteurs, qui en sont, fort heureusement, revenus à une lecture plus modérée.
L'hébergeur, il faut le redire, n'a pas vocation à se substituer au juge : tel est le sens des amendements que nous avons déposé sur l'article 2.
Le commerce électronique trouve, dans le présent texte, un cadre qui a vocation à s'intégrer dans le droit commun des contrats, et il faut s'en réjouir. Néanmoins, il est tout à fait symptomatique de constater la difficulté de la majorité parlementaire à réduire les effets néfastes de la prospection commerciale : alors que le projet de loi initial interdisait par principe aux marchands du Net de démarcher ou « spammer » les visiteurs sans leur accord, selon le système du opt in, l'Assemblée nationale a introduit une dérogation de taille en rétablissant l'opt out - c'est-à-dire l'accord de principe du visiteur, qui ne bénéficie alors que d'un droit d'opposition - pour les personnes inscrites au registre du commerce et de l'industrie.
La majorité sénatoriale va même plus loin en ne limitant plus la prospection directe par courrier électronique à l'offre de produits analogues : autant dire que tout acheteur sur Internet ne bénéficiera plus du libre choix qu'on prétendait lui offrir.
Enfin, la « libéralisation » de la cryptologie, que l'on nous présente ici avec enthousiasme, est d'apparence puisqu'elle ne vise que l'usage et non la fourniture de logiciels de cryptage - soumis à un régime de déclaration -, dont on ne sait pas si elle concerne également la diffusion gratuite de ces logiciels. C'est aussi un contrôle en direction de la recherche fondamentale sur le numérique, qui, dans le présent texte, devient soumise à un régime de déclaration préalable.
Sur tous ces points, différentes associations d'internautes et de droits de l'homme nous ont alertés ; nous regrettons particulièrement que les commissions n'aient pas souhaité les auditionner publiquement. Comme si le débat autour de ces questions dérangeait...
Pour notre part, nous restons sur une position plus que réservée à l'égard du présent texte, même si nous considérons en effet nécessaire de donner un cadre juridique à l'Internet plutôt que de le laisser se développer hors cadre et si nous prenons acte des améliorations proposées par nos commissions.
C'est pourquoi, madame la ministre, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen s'abstiendront sur ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. René Trégouët.
M. René Trégouët. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, jamais depuis l'origine de l'humanité notre monde n'a changé aussi rapidement. Et pourtant, souvent, nous n'en avons pas conscience : un peu comme le passager d'un TGV ne réalise pas qu'il se déplace à plus de 300 kilomètres à l'heure, alors que son aïeul utilisant les diligences était « cassé » dès que les chevaux le tiraient à plus de 10 kilomètres à l'heure sur les fondrières des chaussées de l'époque.
Avons-nous bien conscience que, dans les dix ans qui viennent, l'humanité va globalement acquérir autant de connaissances nouvelles qu'elle en a acquis depuis l'origine ? Dix années vont suffire à l'homme pour parcourir, dans le domaine de la connaissance, autant de chemin que celui qui a été parcouru par nos aïeux depuis la nuit des temps. Cela semble inimaginable, et c'est bien vrai !
Toutes les bibliothèques, qui sont maintenant devenues virtuelles, vont doubler de volume dans les dix ans qui viennent. Cette situation résulte d'un phénomène majeur : notre planète est en train de se mettre en réseau ; 500 millions d'êtres humains sont déjà, à ce jour, reliés les uns aux autres par Internet ; dans cinq ans, ils devraient être un milliard.
Cette mutation profonde, qui accompagne un développement extraordinaire de l'informatique, nous permet déjà de définir de façon générique les métiers de demain. Pour être dans l'économie du futur, chacun d'entre nous devra avoir la capacité d'ajouter du savoir à un signal. Pour exercer les métiers d'un futur maintenant très proche, il faudra non seulement acquérir des savoirs, mais aussi, quel que soit son lieu de résidence, disposer d'un signal de qualité accessible au meilleur coût.
Dans moins de dix ans, toute entreprise, qu'elle soit petite ou d'importance, devra obligatoirement être connectée à un réseau haut débit pour être reliée au monde entier. Cela lui sera aussi nécessaire que peut l'être aujourd'hui son raccordement au réseau électrique ou téléphonique.
En outre, les habitudes de vie de millions et de millions de Français changeront profondément dans les dix ans qui viennent. Tous ceux que Robert Reich, dans l'Economie mondialisée, appelle les « enrichisseurs de signes » vont constater qu'il n'est plus nécessaire de rejoindre chaque matin son bureau pour être efficace. Ils peuvent l'être plus encore, puisqu'ils ne perdront plus de temps en de stériles embouteillages, à partir de leur domicile, à condition que celui-ci soit, lui aussi, puissamment relié au réseau mondial.
Or, quand nous abordons ce problème fondamental du haut débit, qui est aussi important dans notre encore jeune vie d'internautes que l'a été pour nos grands-parents l'arrivée de l'eau potable sur l'évier après avoir dû la tirer du puits avec un seau, il nous faut avoir bien conscience que, à l'encontre de ce que nous avons connu pour l'électricité ou le téléphone, notre définition du haut débit va évoluer très rapidement.
Là où nous nous contentons aujourd'hui d'un simple filet continu de signaux, nous allons exiger très rapidement, car les produits virtuels que nous transporterons seront de plus en plus lourds, un flux beaucoup plus puissant.
Les observateurs les plus avertis affirment que la loi Moore, qui éclaire depuis trente ans l'avenir de la micro-informatique en prévoyant que la capacité des ordinateurs double tous les dix-huit mois, sans changement de prix, va dorénavant s'appliquer au haut débit. Cela signifie que, si nous nous satisfaisons aujourd'hui, en haut débit, de 512 kilobits, sur ADSL ou sur le câble, dans une dizaine d'années à peine, chacun d'entre nous exigera de disposer de 100 mégabits, soit vingt fois plus.
Or tous les scientifiques sont unanimes : à ce niveau-là, il aura fallu quitter le domaine de l'électron pour entrer dans celui du photon. Cela signifie que le cuivre et donc l'ADSL ne pourront plus suivre et que le vecteur naturel sera devenu le verre, qui a seul la capacité de transporter ces photons. Les réseaux optiques prendront alors toute leur réelle dimension.
Or, dix ans, c'est court ! Même si nous commencions le travail dès demain matin, ce serait une véritable prouesse d'équiper toute la France en réseaux optiques dans les dix ans à venir.
Surtout, ne pensez pas, madame le ministre, mes chers collègues, que je sois original en proposant d'équiper ainsi l'ensemble de notre pays en réseaux optiques : la Corée l'a déjà fait et la plupart des autres pays avancés du monde, en tête desquels les Etats-Unis, le Japon, l'Allemagne, la Suède, sont en train de le faire.
De tous les principaux pays de l'OCDE, nous sommes celui qui accuse le plus grand retard dans la mise en place d'un réseau alternatif face à celui qu'a mis en place, dans le temps, l'opérateur historique. Ainsi, pour ne parler que de nos voisins, il faut savoir que plus de 90 % des Belges et 80 % des Allemands disposent du câble en plus de leur ligne téléphonique.
A nous être égarés pendant plus de vingt ans dans des procédures et technologies alternatives liées au génie singulier de nos responsables politiques et de nos ingénieurs, qui ont préféré la télévision payante par satellite, le satellite de télédiffusion directe - TDF 1 et TDF 2 -, nous avons oublié l'importance de la construction systématique d'un réseau câblé alternatif.
Cela nous amène logiquement à une autre erreur, que nous nous apprêtons à commettre : nous pensons que l'ADSL, qui utilise notre ligne téléphonique pour nous apporter, sans génie civil supplémentaire, le haut débit à notre domicile sera suffisant pour répondre à nos attentes de haut débit dans le futur.
S'il est vrai que l'ADSL pourra semer l'illusion pendant les cinq ou sept ans qui viennent, comme les superbes locomotives à vapeur avaient su le faire en leur temps face aux locomotives électriques, il faut bien avoir conscience dès maintenant que le cuivre ne pourra pas suivre et devra laisser la place au verre.
Les ingénieurs de France Télécom, face à cet argument, me rétorqueraient immédiatement qu'ils vont eux-mêmes construire un immense réseau optique puisqu'ils ont l'ambition de relier, à terme, la plupart de leurs digital subscriber line access multiplexers, les DSLAM, c'est-à-dire les serveurs distribuant l'ADSL, par de la fibre optique.
Mais cette réponse n'est pas la bonne, car, dans l'établissement d'un réseau, les coûts essentiels sont induits non par la construction des artères, mais bien par le « chevelu » optique ou coaxial qui devra desservir chaque utilisateur dans les dix ans à venir.
Or même France Télécom n'aura pas les moyens de construire ce chevelu au cours de la prochaine décennie. Seule une synergie entre la volonté politique de l'Etat et des collectivités territoriales et l'initiative privée des principaux acteurs permettra de relever à temps ce défi. (MM. Jean-François Le Grand et Louis de Broissia, rapporteur pour avis, applaudissent.)
Une telle démarche devra seulement, mais nécessairement, permettre à la collectivité de rester propriétaire des réseaux ainsi construits, avec des financements croisés des secteurs publics et privés, afin qu'une réelle concurrence puisse ainsi s'exercer sur ces réseaux du futur.
Le deuxième grand sujet qui sera abordé dans cette discussion est celui de la responsabilité de chacun sur Internet. Je note, avec regret, je dois le dire, que ce sont de plus en plus les acteurs privés d'Internet qui sont amenés à s'infliger les uns aux autres les sanctions potentielles, sans recours à un juge. Or un internaute ayant publié un contenu sur Internet ne doit pas être jugé et censuré par un groupe privé.
Mme Danièle Pourtaud. Absolument !
M. René Trégouët. Si le juge ne peut intervenir dans tous les cas, et je le comprends bien - il faut être réaliste ! -, que ce rôle de censeur, sinon de juge, soit au moins accordé par la loi à une nouvelle structure représentative de toute la communauté Internet.
C'est pourquoi je vous proposerai, lors de l'examen des articles, la création d'un comité national d'éthique de l'Internet. En effet, si vous n'y prenez pas garde, les Etats se dégageront de plus en plus de leurs responsabilités et laisseront les grands groupes privés spécialisés dans le hardware et dans les logiciels les prendre à leur place.
Vous-même, madame la ministre, comme M. le Premier ministre, utilisez très souvent le mot « confiance » lorsque vous parlez de la société de l'information ou de l'économie numérique. Ce même mot figure d'ailleurs dans l'intitulé du projet de loi. Je n'oserai pas dire que celui qui a choisi ce titre l'a fait par ironie, mais il se trouve que l'un des projets essentiels actuellement développés par Intel, le premier fondeur de microprocesseurs au monde, s'appelle TCPA, trusted computing plaftorm alliance, ce qui veut dire en français : alliance pour une informatique de confiance.
Chacun utilise donc volontiers ce terme de confiance, qu'il juge positif pour conquérir le coeur des internautes. Mais attention ! Il y a tout un monde entre le sens que nous donnons, nous, à ce terme et celui que lui accordent les majors américains. Ils lui accordent le même sens que celui que nous avions prétendu lui prêter il y a quelques années en voulant créer le tiers de confiance qui aurait eu pour mission de conserver une copie de nos clefs de déchiffrement. Mais nous savions bien qu'en cas de réquisition ce tiers de confiance n'était qu'un tiers qui avait la capacité de violer notre sécurité.
Ainsi, si ce projet TCPA est mené par Intel jusqu'à son terme - ce qui nous semble malheureusement maintenant inexorable -, cela signifie que les puces qui seront dans quelques courts mois au coeur de nos ordinateurs personnels renfermeront un mouchard prénommé Fritz - du prénom du sénateur américain Hollings, qui se bat actuellement pour généraliser l'usage de ce mouchard -, qui surveillera tous les usages que les internautes pourront faire de leur machine.
Ainsi, si vous-même utilisez des logiciels que vous n'avez pas personnellement acquis - prêtés par un ami, par exemple - ou si vos enfants chargent sur Internet une musique MP 3 dont les droits n'auraient pas été préalablement acquis, votre ordinateur sera totalement bloqué et n'acceptera pas de redémarrer tant que vous n'aurez pas régularisé votre situation.
Les grands éditeurs de musique ou de cinéma vont être très satisfaits de ces espions, qui devraient faire diminuer de façon sensible les piratages qui permettaient de copier sans bourse délier des films ou des airs à la mode.
Cependant, lorsque ce système TCPA viendra s'ajouter à Passport, Palladium et autres DRM, digital rights management, logiciel de gestion numérique des droits proposé par Microsoft, l'ensemble pourrait avoir de fortes incidences sur la vie de chacun d'entre nous puisque les puces fabriquées par Intel et les systèmes d'exploitation, les OS, mis sur le marché par Microsoft contrôlent plus de 95 % des micro-ordinateurs PC fabriqués dans le monde.
Si les raisons actuellement invoquées par les grands groupes informatiques pour justifier la mise en place de tels moyens de vigilence semblent a priori correctes, il ne faut pas se leurrer, madame la ministre, sur les réelles capacités de ces systèmes de surveillance.
Après les tentatives de l'Union soviétique, voilà quelques décennies, pour référencer et contrôler toutes les machines à écrire et les fax, les systèmes mis en place par Intel et Microsoft tentent de référencer et contrôler tous les ordinateurs.
Les conséquences que ces démarches pourraient impliquer, en termes de liberté, de démocratie ou de justice, ne peuvent qu'inquiéter. Aussi, je ne puis qu'inciter les pouvoirs publics à se montrer particulièrement vigilants.
Pour conclure, permettez-moi, madame la ministre, de vous féliciter pour la présentation de ce texte, même s'il est encore perfectible, comme toute oeuvre humaine.
En effet, le précédent gouvernement nous avait annoncé, à voix haute et à plusieurs reprises, la discussion devant le Parlement d'une grande loi sur la société de l'information. Nous l'avons attendue pendant plusieurs années et rien n'est venu !
Vous avez eu la volonté et le courage de tenir sans retard les engagements pris envers la communauté Internet lors de la dernière campagne électorale. Bravo !
Mes chers collègues, nous allons maintenant commencer l'examen de ce projet de loi sur l'économie numérique. Pendant toute cette discussion, il faut que nous ayons l'humilité de comprendre que notre loi ne serait pas efficace si elle ne prenait pas en considération la planète Internet mondiale telle qu'elle est. Quel respect pourraient avoir pour notre travail nos concitoyens si nous prenions sciemment des décisions qui ne seraient pas appliquées puisqu'il suffirait de déplacer les contenus incriminés sur un autre serveur placé à l'étranger et sur lequel la loi française n'a aucune autorité ?
A cet égard, la discussion qui va s'ouvrir est particulièrement intéressante. La loi devra efficacement répondre aux légitimes attentes nationales tout en se gardant de préconiser des mesures qu'il serait impossible de faire respecter sur le plan international. C'est là que se trouve le défi essentiel du texte qui nous est soumis aujourd'hui. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Christian Gaudin.
M. Christian Gaudin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dans l'excellent rapport qu'ils ont rédigé au nom de la commission des affaires économiques, MM. Bruno Sido et Pierre Hérisson associent Internet et nouvelle économie à la notion de liberté. C'est tout à fait exact : Internet, c'est la liberté, la fluidité, la rapidité d'aller d'un site à l'autre. Ce sont des quantités d'informations, de services et de transactions à la portée d'un clic.
Ces dernières années, nous avons assisté à un développement considérable des nouvelles technologies de l'information et de la communication. Si cet essor s'appuie sur l'équipement des entreprises et des particuliers, il dépend avant tout de la confiance que tout utilisateur est en droit d'attendre de ces nouvelles technologies.
Ce texte est donc aussi important qu'attendu.
Il est important, car la nouveauté du secteur des nouvelles technologies comportait encore trop de flou et d'imprécision. Ce texte offre enfin un cadre juridique à la fois clair et pragmatique. Il adapte les règles juridiques en vigueur et permet ainsi d'établir, avec transparence, les responsabilités des prestataires. En opérant la libéralisation partielle de la cryptologie, il vise en outre à assurer la sécurité des opérations effectuées dans le cadre de l'économie numérique, afin de permettre à tous les échanges, commandes et règlements de s'effectuer sans crainte et en toute transparence.
Ce projet de loi était également très attendu puisqu'il a notamment pour objet de transposer une directive européenne dont la date butoir de transposition était fixée, rappelons-le, au 17 janvier 2002.
Il était aussi attendu par les collectivités territoriales, soucieuses d'apporter à nos concitoyens ce même service sur l'ensemble du territoire. Les élus locaux savent que seuls les territoires qui en seront équipés seront attractifs, tant pour les entreprises que pour les particuliers. Il y va tout simplement de leur avenir économique.
Un premier constat s'impose : cette liberté de communiquer, de s'informer, de se cultiver, de commercer et de consommer, pour s'exercer dans de bonnes conditions et sans restriction, implique le haut et le moyen débit. Cette technologie, en apportant l'atout de la vitesse à laquelle s'échangent les données, est encore plus nécessaire pour l'image, le son et la vidéo.
Deuxième constat : l'arrivée d'Internet a bien constitué une révolution, qui a eu des conséquences inattendues. On attendait principalement l'effet Internet dans les entreprises en espérant des gains de productivité et, en ce qui concerne les particuliers, un accès facilité à de nombreux services privés ou publics. Or la véritable explosion d'Internet est née du désir soudain des individus de communiquer, d'échanger. Les Français, qui ne s'écrivaient plus, communiquent de plus en plus. Ils créent également, par exemple, 3,5 millions de pages personnelles, ils rédigent, échangent des textes, des photos, des dessins, des vidéos.
De nombreux Français, parmi lesquels la quasi-totalité de la génération des quinze - vingt-cinq ans, ont déjà pris l'habitude de passer plusieurs heures devant leur écran. Ils peuvent, par exemple, choisir de réserver leurs lieux de vacances ou imprimer directement, à présent, leurs billets SNCF. Bref, ils commercent déjà par Internet.
Il est donc primordial que cette nouvelle liberté et cette facilité que permet le haut débit soient proposées à tous et sur tout le territoire. Car il existe bien une fracture numérique. Celle-ci est double. Elle est sans doute sociale, mais, plus encore, elle est géographique.
Malgré une progression rapide au cours des dernières années, il est apparu très vite à un certain nombre d'élus que de nombreux territoires ne seront desservis par aucune infrastructure. Les zones trop peu peuplées n'intéressent pas les opérateurs, car elles ne sont pas assez rentables. Malheureusement, ces zones représentent 80 % du territoire et 20 % de la population.
C'est au nom du principe d'égalité que ce nouvel usage, auquel sont tout particulièrement bien préparées les tranches jeunes de la population, doit être proposé sur l'ensemble du territoire, et à des prix abordables.
Les récents débats sur l'aménagement du territoire ont fait écho à la volonté, également nouvelle, des familles qui, choisissant la qualité de vie en zone rurale, quittent les villes. Ce n'est plus un phénomène marginal, et de jeunes entrepreneurs ont d'ailleurs le même désir. Les nouvelles techniques de l'information et de la communication leur offrent l'opportunité de relocaliser ou de créer leur entreprise parfois loin des zones urbaines, mais dans des bassins d'emplois prêt à les recevoir. Toutefois, pour rester attractifs, ces territoires doivent l'être également sur le plan économique et technologique.
Par rapport au reste de l'Europe, la France possèdeune caractéristique unique, celle de compter 36 000 communes. Allons-nous accepter que nos 32 000 communes de moins de 2 000 habitants soient exclues de l'accès aux nouvelles technologies ?
Une dynamique s'est créée. Près de 130 projets haut débit ont déjà été déposés par des collectivités locales. Mon département de Maine-et-Loire comme ceux de l'Allier, de la Manche, de l'Oise, sont actuellement à la pointe du mouvement. Mais si, en France, le haut débit progresse en suivant la moyenne européenne, nous sommes cependant loin des pays leaders comme la Corée, le Canada ou même la Belgique.
Ce projet de loi ainsi que les deux projets à venir sont l'occasion de dépasser les effets d'annonce en clarifiant, enfin, le rôle des collectivités locales dans le domaine des télécommunications.
Si nous parlons bien d'un service indispensable, tant aux entreprises qu'aux particuliers, notamment dans le cadre d'une économie numérique, ce service doit-il être public ? Et ce service public doit-il être local ? Les collectivités doivent-elles être simplement gestionnaires des infrastructures, être opérateurs d'opérateurs ou choisir d'être elles-mêmes opérateurs et offrir ainsi des services de télécommunications ?
L'article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales permettait uniquement aux collectivités territoriales d'investir en infrastructures destinées à supporter des réseaux de télécommunications. Ces dispositions seront remplacées par l'article L. 1425-1 du même code, créé à l'article 1er A du présent projet de loi, qui permet aux collectivités de prendre en charge les deux types d'activité.
Désormais, les collectivités territoriales n'auront pas à distinguer les réseaux actifs des réseaux passifs et pourront offrir aux opérateurs désireux de s'implanter sur leur territoire tout un ensemble d'installations techniques en offrant un choix plus large de technologies différentes, comme le réseau satellitaire, le câble, le wi-fi, etc. C'est une décision judicieuse qui permettra de choisir la technologie la plus adaptée, afin d'assurer une meilleure concurrence entre les opérateurs.
Jusqu'à présent, seule la construction d'infrastructures non préexistantes était autorisée. L'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, en utilisant le terme « établissement », permet d'utiliser, d'acheter des infrastructures déjà existantes.
La nouvelle rédaction de cet article vise à rétablir l'exigence de carence de l'initiative privée, mais seulement pour conditionner la possibilité pour les collectivités territoriales d'être opérateurs de services.
Ce changement est très important puisqu'il consacre la légitimité pour les collectivités territoriales d'établir et d'exploiter des réseaux de télécommunications. Le débat est par conséquent clarifié : ces deux activités constituent bien un service public. D'ailleurs, cette qualification se retrouve dans la place même du nouvel article au sein du livre IV du code précité, relatif aux services publics locaux.
De nombreuses collectivités territoriales ont commencé à recenser les besoins des populations et des entreprises. Les conséquences sont importantes. Le décret à venir devra régler précisément les modalités de la consultation et du constat de carence, sans remettre toutefois en question le travail déjà entrepris et les données déjà acquises, afin d'éviter tout retard.
L'amendement n° 11 présenté par la commission des affaires économiques vise d'ailleurs à supprimer la procédure de consultation, en la remplaçant par la procédure d'information publique.
Il est vrai que, par le passé, la procédure de consultation n'a pas donné de résultats convaincants. Toutefois, et c'était son principal intérêt, elle avait le mérite de faire prendre conscience aux collectivités territoriales des véritables besoins exprimés par la population, les entreprises et les opérateurs. A cet égard, l'outil du questionnaire est intéressant dans la mesure où il permet d'appréhender ces besoins ainsi que les carences d'un territoire.
Il me semble que nous touchons là au noeud du problème. Les TIC sont un domaine complexe, sur le plan tant technique que financier.
C'est un secteur appelé à évoluer, avec des charges importantes. Si les besoins sont indiscutables, est-ce aux collectivités territoriales de prendre en charge cette nouvelle compétence, d'autant que ce sont les collectivités territoriales les moins riches, celles des départements de zones rurales, qui devront le plus investir ?
Nous avons déjà parlé de liberté, puis d'égalité ; il me paraît important d'évoquer à présent la solidarité.
Je conclurai en me félicitant de la nouvelle clé de répartition des contributions au fonds de financement du service universel des télécommunications prévue à l'article 37 bis. Je souhaite que cette mesure, qui paraît plus équitable, permette également aux fournisseurs d'accès à Internet de proposer prochainement des forfaits tout particulièrement intéressants.
Ces opérateurs aimeraient, par ailleurs, savoir à partir de quelle évaluation cette nouvelle clé de répartition s'appliquerait : puisqu'il y a deux années de latence, une évaluation définitive pour 2002 n'interviendrait qu'en 2004.
Les nouvelles technologies doivent permettre très vite l'essor de ce commerce numérique, facteur de croissance et, donc, d'emplois. Toutefois, elles ne doivent pas creuser les inégalités qui existent déjà sur nos territoires. Au contraire, grâce à une réelle volonté politique, elles peuvent gommer ces écarts et participer à un véritable aménagement équilibré nécessaire à notre pays.
Madame la ministre, le groupe de l'Union centriste votera, bien sûr, ce texte. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la contribution des technologies de l'information et de la communication au développement économique et à l'emploi est désormais reconnue par tous comme étant déterminante.
Ces technologies constituent un puissant facteur de diffusion de l'innovation, elles possèdent un potentiel de gains de productivité, de compétitivité, qu'il faut prendre d'autant plus en considération lorsqu'il s'agit, comme aujourd'hui, de stimuler la croissance, de créer des emplois.
Ces technologies jouent aussi un rôle stratégique dans des secteurs clés de notre existence : éducation, formation, culture, santé, loisirs, notamment.
Enfin - et le débat qui a récemment eu lieu ici même autour de l'avenir des services publics l'a mis en évidence -, ces technologies peuvent et doivent jouer un rôle majeur dans l'établissement de relations nouvelles entre les administrations et les usagers.
Dans un domaine en évolution rapide, quelques indicateurs permettent de dégager deux grandes tendances pour notre pays : une dynamique certaine, des comparaisons stimulantes.
Les abonnements payants à Internet sont passés de 540 000 en janvier 1998 à 7 940 000 en juin 2002, et à 9 297 000 en mars 2003 ; 25 % des Français sont connectés à l'Internet à domicile.
Le développement d'Internet haut débit est très rapide. La France a franchi, début mars 2003, le seuil de 1,7 million de lignes haut débit, dont 1,4 million d'abonnés à l'ADSL et près de 30 000 accès par câble.
On observe, en Europe, des disparités significatives, et trois groupes de pays se dégagent : les pays scandinaves et les Pays-Bas ; avec une forte proportion de foyers connectés l'Allemagne, le Royaume-Uni et la Belgique ; puis la France, l'Italie et l'Espagne.
La France reste pénalisée par un taux plus faible de pénétration des ordinateurs dans les ménages : 35,7 % de ménages sont équipés en France, 44,7 % en Allemagne, 46 % au Royaume-Uni, 65 % au Etats-Unis.
Pour la grande majorité des internautes, Internet est d'abord un moyen de communication, un outil d'information et de renseignement, un moyen de se former.
En 2002, plus de 35 % des internautes européens déclaraient avoir acheté pour eux-mêmes des produits ou des services en ligne. En France, un internaute sur cinq déclare avoir acheté sur la Toile des livres, des disques, des jeux ou des jouets ; un sur cinq a procédé à des réservations de voyages ou de spectacles ; 8 % des internautes ont commandé des produits alimentaires.
Cependant - et nous voilà en plein coeur du présent projet de loi - de nombreux internautes déclarent avoir rencontré des problèmes lors de leurs achats et « ne pas avoir confiance, n'être pas disposés à acheter sur Internet ».
La France est bien entrée dans la société de l'information. Elle prend conscience des vastes perspectives que celle-ci ouvre, de ses enjeux considérables : place de l'industrie du multimédia ; bataille de l'intelligence avec le rôle clé de la recherche ; levier possible pour les équipementiers aujourd'hui en difficulté ; accès au savoir et à la culture ; nécessaire adaptation de notre droit ; exercice des libertés ; risque de fracture sociale, générationnelle, territoriale.
Toutes ces évolutions, cette nouvelle donne économique et sociale, représentent un défi politique majeur qui interroge, bien entendu, Gouvernement et Parlement.
Jean-Pierre Raffarin a présenté, le 12 novembre 2002, la plan RE/SO 2007 « pour une République numérique dans la société de l'information », définissant orientations et stratégie afin d'« ancrer fermement la France dans l'Internet et pour assurer à notre pays une position de leader européen dans la société de l'information ».
Nous sommes tout disposés à partager les ambitions affirmées par le Premier ministre. Mais, dans le même temps, j'entends et je lis que cette volonté affirmée viendrait combler de grands retards dus à une inaction dans ce domaine du gouvernement dirigé par Lionel Jospin.
J'aimerais que nous soyons capables de dépasser les approches politiciennes, chacun, après tout, pouvant facilement choisir sa période historique de référence : Internet - les chiffres cités à l'instant l'ont démontré - n'est pas né en France en mai 2002 !
A la suite d'un discours véritablement fondateur, prononcé à Hourtin en 1997, Lionel Jospin avait su donner l'impulsion, entraînant une forte mobilisation de l'Etat au travers du programme d'action gouvernementale pour la société de l'information, le PAGSI, lancé en janvier 1998.
Ce programme, fondé sur quelques priorités qui ont mobilisé 9 milliards de francs en quatre ans, a donné des résultats incontestables. Permettez-moi de rappeler très rapidement quelques exemples tout à fait significatifs : l'équipement, la formation, la connexion du milieu éducatif, ce qui prouve que la bataille de l'intelligence commence bien à l'école ; le développement de l'innovation, avec des moyens renforcés pour la recherche et le développement publics et des mesures d'incitation pour les entreprises ; la naissance et la croissance en France de l'administration en ligne, avec l'apparition de nouveaux services pour les citoyens et les entreprises : en quatre ans, 3 500 sites publics ont été ouverts ;...
M. Henri Weber. Très juste !
M. Pierre-Yvon Trémel. ... l'essor rapide de l'usage du multimédia et du commerce électronique : le montant des transactions sur Internet entre consommateurs et entreprises a été multiplié par dix entre 1998 et 2000 ; la réduction du fossé numérique, avec une multiplication des accès et des espaces publics numériques et les décisions prises au CIADT, le comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire, qui s'est tenu à Limoges en juillet 2001 ; enfin, l'adaptation de mesures législatives favorables au développement de l'Internet et du commerce électronique : il s'agissait des textes sur la signature électronique, les ventes aux enchères en ligne, le dégroupage de la boucle locale, la protection des données personnelles.
Incontestablement, il y a eu un engagement du gouvernement de Lionel Jospin, mais il a manqué un maillon,...
M. Bruno Sido, rapporteur. Ah !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Toujours un maillon faible ! Sacré maillon ! (Sourires.)
M. Pierre-Yvon Trémel. ... un cadre législatif global, adapté, qui devait être fixé par l'adoption du projet de loi sur la société de l'information.
Ce projet de loi, auquel votre prédécesseur, Christian Pierret, tenait beaucoup, madame la ministre...
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Absolument !
M. Pierre-Yvon Trémel. ... a été adopté en conseil des ministres le 13 juin 2001. Il n'a pu être présenté devant le Parlement...
MM. Henri Weber et Pierre Hérisson, rapporteur. Hélas ! (Sourires.)
M. Pierre-Yvon Trémel. ... et cela a exacerbé, à juste titre, les attentes du régulateur, des industriels, des professionnels du secteur, des consommateurs, du monde du droit...
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Eh oui !
M. Pierre-Yvon Trémel. ... et, si j'en juge par les propos que j'ai entendus cet après-midi, des parlementaires.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Ah, quand même !
M. Pierre-Yvon Trémel. Vous aviez la possibilité, madame la ministre, de reprendre ce texte complet, cohérent,...
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis. Il était déjà dépassé !
M. Pierre-Yvon Trémel. ... en y introduisant les dispositions liées à la transposition des directives européennes et en le complétant.
Le Gouvernement, au nom - dit-il - du pragmatisme, a fait un autre choix : celui de proposer au Parlement de légiférer sur les règles du jeu dans la société de l'information, en annonçant trois textes : deux présentés par vous-même, le présent projet de loi et un texte connu sous l'appellation « paquet télécom », et un troisième texte, portant sur les questions de l'administration électronique, de la diffusion et de l'appropriation des nouvelles technologies, qui sera présenté par Mme la ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies.
Tout choix conduit à faire la balance des avantages et des inconvénients et il nous paraît clair, aujourd'hui, au vu du débat qui s'est déroulé à l'Assemblée nationale et des difficultés rencontrées ici, au Sénat, que la méthode retenue pose des problèmes.
Comme l'a dit, de manière prémonitoire et dans sa grande sagesse, le président de la commission supérieure du service public des postes et télécommunications, M. Pierre Hérisson : « Une telle présentation de trois lois espacées dans le temps ne permet pas d'avoir une vue globale de l'ensemble des règles du jeu. »
M. Michel Teston. Bien vu !
M. Pierre-Yvon Trémel. La bonne lisibilité nécessaire dans un domaine aussi complexe ne peut en effet être atteinte.
Certaines questions traitées dans un texte sont appelées à l'être également dans un autre et l'on voit poindre les risques de doublon et d'incohérence. Nous en avons évoqués deux exemples en commission : la définition de la communication en ligne et la réforme du financement du service universel.
On peut légitimement s'interroger sur la qualité du travail effectué dans de telles conditions. Improviser en matière législative est toujours dangereux, nous le savons tous.
La modification de l'article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales - qui est très attendue par les élus locaux - est tout à fait probante : rien dans le texte initial du Gouvernement, un amendement parlementaire, puis un amendement du Gouvernement à l'Assemblée nationale et une autre mouture au Sénat.
Certaines questions importantes et urgentes sont passées sous silence dans ce projet de loi : l'accès aux données et aux archives publiques, les logiciels libres, les codes-sources.
En tout état de cause, votre choix implique que nous ayions connaissance de la suite du programme du Gouvernement dans ce domaine. Pouvez-vous, madame la ministre, nous annoncer un calendrier prévisionnel de l'inscription des nouveaux textes à l'ordre du jour du Parlement ?
Le projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique se donne pour objet « d'adapter notre droit aux exigences de l'économie numérique ». Il répond à un réel besoin.
Avec ce projet de loi, le législateur aborde une terre inconnue qui reste à défricher. Il s'engage sur un chemin sinon sablonneux, du moins malaisé en s'attaquant à un chantier qui mérite d'être conduit à terme, car, pour parvenir à une société de l'information créative, solidaire, républicaine, il nous faut des textes et des modes de régulation bien adaptés sans lequels il n'y a ni confiance, ni initiative possible, ni liberté, ni égalité.
Sur le fond, je souhaite présenter quelques observations sur les points qui ont principalement retenu l'attention du groupe socialiste.
Les articles 1er A et 1er B élargissent les compétences des collectivités locales dans le domaine des télécommunications.
L'accès au haut débit pour tous, la couverture complète du territoire en téléphonie mobile sont des objectifs que nous partageons. Il n'y a pas d'avenir pour les collectivités locales qui seront victimes de la fracture numérique même s'il convient de ne pas céder à un certain mythe du haut débit.
Pour atteindre ces objectifs, deux verrous doivent sauter : les obstacles juridiques et l'inégalité des moyens financiers.
Le débat qui s'est déroulé à l'Assemblée nationale conduit à la création d'une nouvelle catégorie de services publics locaux. Deux questions lourdes sont dès lors posées.
Première question : les collectivités locales doivent-elles devenir fournisseurs des services de télécommunication ?
La fourniture de ces services suppose un savoir-faire jusque-là réservé au secteur marchand. Celles qui feront le choix d'exercer cette compétence devront être prêtes à assumer toutes les nouvelles responsabilités juridiques instaurées par le projet de loi - par exemple pour les fournisseurs d'accès à l'Internet - voire à contribuer au financement du service universel des télécommunications.
Cette compétence difficile à exercer ne sera-t-elle pas réservée de facto aux collectivités qui sont boudées par les opérateurs de télécommunications, puisqu'elle ne peut s'exercer que si l'initiative privée est insuffisante ? Ne risquons-nous pas d'aller vers la situation où les collectivités les moins riches et les moins peuplées seront celles qui auront à la fois à prendre des risques et à payer le plus.
Deuxième question : que vaut une liberté sans les moyens de l'exercer ?
M. Henri Weber. Pas grand-chose !
M. Pierre-Yvon Trémel. Vous répondez fort bien à cette question dans votre rapport, messieurs les rapporteurs : « Les collectivités locales les plus fragiles ne peuvent être laissées seules devant le vide numérique. »
Le problème est que, pour l'instant, ni le Gouvernement, ni vous-même ne faites des propositions pour les sortir de cet isolement financier.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Vous allez le faire ! (Sourires.)
M. Pierre-Yvon Trémel. Pour ce qui concerne la couverture du territoire en téléphonie mobile, nous sommes en attente de l'application concrète de l'accord du 24 septembre 2002.
Nous espérons à l'occasion de ce débat avoir des éléments d'information techniques, financiers, calendaires sur les questions en suspens. M. Michel Teston interviendra à ce sujet, au nom du groupe socialiste.
Sur les articles 1er et 2, les débats ont été particulièrement riches à l'Assemblée nationale. Henri Weber interviendra au nom de notre groupe, car de nombreuses questions méritent que nous tentions d'améliorer le texte transmis par l'Assemblée nationale.
Sur l'article 6, la définition du commerce électronique doit concerner à la fois la commande effective et les activités qui proposent la consultation en ligne.
Enfin, l'article 37 bis traduit une autre initiative du rapporteur au fond de l'Assemblée nationale.
Fallait-il traiter le problème réel du financement du service universel des télécommunications dans le présent texte ?
Une concertation plus poussée avec les opérateurs, dont, nous l'avons vu, les intérêts divergent, aurait eu, en tout cas, toute sa place.
Trois enjeux se détachent clairement : la démocratisation de l'accès à Internet, les critères de calcul de la contribution des opérateurs et l'évolution du contenu du service universel, point sur lequel nous souhaiterions connaître votre position, madame la ministre.
Transposer dans notre droit la directive e-commerce, adapter nos règles de droit à l'économie numérique afin de renforcer la confiance dans l'utilisation des technologies de l'information et de la communication et permettre un aménagement numérique équilibré du territoire, telles sont les ambitions de ce projet de loi, autour desquelles nous pouvons nous retrouver.
Notre groupe, très sensibilisé aux enjeux du présent texte, participera à la discussion avec la volonté de susciter des éclairages sur des sujets complexes, de proposer des améliorations et d'ouvrir des perspectives. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. - MM. les rapporteurs applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Jean-François Le Grand.
M. Jean-François Le Grand. Tout d'abord, je joindrai ma voix à celle des précédents orateurs pour vous remercier, madame la ministre, d'avoir enfin présenté devant le Parlement un projet de loi sur l'économie numérique et je vous félicite de l'avoir intitulé « Confiance dans l'économie numérique. »
L'étymologie latine du mot « confiance » signifie « foi ensemble », foi partagée. Il en est de cette foi comme de l'ensemble des projets : un bon projet, c'est un projet partagé. N'ayez pas de frilosité pour l'ouverture des possibilités laissées aux collectivités locales.
Je féliciterai également les rapporteurs pour la qualité de leur travail. Ce n'était pas simple, malgré des avis différents, d'aboutir à des propositions convergentes sur un sujet aussi évolutif. Ils ont su synthétiser les aspirations des élus locaux.
Je veux dire aussi à M. René Trégouët que nous avons été sous le charme de son intervention qui a posé le débat à l'échelle planétaire, comme il doit l'être. Il n'est tombé ni dans la flagornerie ni dans le rêve utopiste, et a essayé de rester en contact avec le concret, le quotidien.
Je n'aurai pas l'outrecuidance de revenir sur ces sujets ! Quelles que soient nos philosophies, quels que soient nos sentiments, nous ne pouvons qu'adhérer à sa vision des choses.
Je présenterai maintenant deux observations et, reprenant l'image de M. René Trégouët, je déplacerai le curseur sur la règle pour intervenir seulement en termes d'aménagement du territoire ou d'enjeux d'opérateurs.
Première observation : les technologies de l'information et de la communication sont le dernier enjeu de différenciation des territoires, ce qui veut dire qu'il faut laisser toute leur liberté à ces derniers, qu'il s'agisse des régions, des départements ou des communes.
La différenciation se fait en fonction de trois considérations.
Le premier enjeu, c'est l'existence même du service : peut-on avoir un haut débit sur un territoire donné ?
Ce n'est pas parce que le haut débit existera que le développement économique suivra automatiquement. A l'inverse, l'absence du haut débit condamne irrémédiablement le développement économique, tout le monde l'a rappelé.
Monsieur Trémel, selon vous, il ne faut céder ni à la phobie ni à l'utopie du haut débit. C'est pourtant, mon cher collègue, un enjeu aussi important que le téléphone, l'electricité, je ne suis pas le premier à le souligner, et, aujourd'hui, ne pas l'avoir, c'est condamner un territoire. (M. Pierre-Yvon Trémel approuve.) L'avoir, c'est lui permettre peut-être de se développer. C'est une condition nécessaire mais non suffisante.
Il faut abandonner cette vision selon laquelle le haut débit serait un enjeu de luxe pour les territoires qui en ont les moyens. Non ! C'est un enjeu sociétal de tous les instants. C'est un enjeu que l'on ne peut occulter.
Dans l'optique qu'a excellemment rappelée tout à l'heure M. René Trégouët, le haut débit est un enjeu national, bien évidemment, mais aussi un enjeu en termes de différenciation de notre pays par rapport aux autres. C'est dans cet esprit, je crois, qu'il convient de l'aborder. L'existence du service constitue donc en soi un objectif.
Le deuxième enjeu, c'est le coût.
Lorsqu'il existe des différences extraordinaires - de un à cinq - entre un territoire et un autre, le territoire le plus pénalisé n'a aucune chance d'attirer des entreprises performantes qui utiliseront ce véhicule, qu'il s'agisse des entreprises spécialisées en info-gérance ou de grandes entreprises de cette nature. Il est évident qu'une différenciation du coût induit une différenciation territoriale. Elle condamne pour longtemps certaines collectivités locales trop éloignées à l'immobilisme. Il est donc nécessaire de disposer de moyens de régulation ou de capacités d'action. Cela relève des collectivités locales et pas seulement de l'Etat, du Gouvernement.
Le troisième enjeu est le niveau de service. Entre quelques kilobits et une centaine de mégabits, l'écart est tellement grand que c'est là aussi que se joue la vraie différenciation.
Permettez-moi, madame la ministre, de citer simplement un exemple que nous connaissons, que M. le président du Sénat connaît bien, celui de Milan. Cette ville a proposé à ses habitants un forfait de services comprenant visioconférence, service téléphonique et services Internet pour seulement 400 à 500 francs par mois.
Un tel atout rend un territoire attractif. L'enjeu est là. L'enjeu n'est pas l'intervenant, mais le service offert. Tel est pour nous, convenons-en ensemble, le véritable enjeu de notre responsabilité à la tête de nos collectivités locales.
Je reviendrai sur ces sujets lors de l'examen des amendements que j'aurai l'honneur de défendre tout à l'heure, madame la ministre, et dont je suis sûr que vous en comprendrez l'intérêt mais dont je suis moins sûr que vous les accepterez. (Rires.)
Deuxième observation : on ne peut pas tout attendre des opérateurs privés, notamment qu'ils aménagent notre territoire.
Vous savez bien, madame la ministre, mes chers collègues, que la balle est, pour l'essentiel, dans le camp des collectivités.
Si l'on se fonde sur la courbe de croissance des équipements réalisés, il faudra de nombreuses années pour atteindre le niveau déjà atteint par d'autres pays.
Chaque fois que l'on a décentralisé, cela a été pour avoir une meilleure réactivité, apporter une meilleure réponse aux besoins, une meilleure adaptabilité ; faisons-le ici.
Nous sommes tous nés ensemble au monde des technologies nouvelles. Cela veut dire que les différences ne peuvent être dues qu'à des retards ou à une absence de compréhension, mais certainement pas à des problèmes techniques.
L'article L. 1425 traduit la volonté de permettre aux collectivités de réaliser l'aménagement numérique de leur territoire. M. René Trégouët a rappelé que, selon la loi de Moore, la puissance des processeurs double tous les dix-huit mois, sans que leur prix augmente. C'est vrai aussi de la fibre optique et des infrastructures de même nature.
Le savoir, c'est bien, mais ne pas réagir en le sachant, ce serait grave, ce serait une pénalité que l'on s'imposerait à soi-même. Il convient donc d'ouvrir quelque peu le système. C'est possible avec l'article L. 1425. J'espère cependant, madame la ministre, que vous saurez comprendre l'intérêt de l'article additionnel que j'ai déposé.
J'espère que vous ne saurez pas résister aux arguments pertinents que nous essaierons de développer (Sourires). Si vous ne les recevez pas, c'est qu'ils n'auront pas été pertinents ! (Nouveaux sourires.)
Ne soyons pas frileux ! Le danger majeur de cette loi serait de limiter l'action des uns et des autres.
Nous devons relever un défi majeur en prenant un engagement politique. La participation, c'est aussi cela !
Je pense que l'informatique a un caractère très gaullien en ce sens qu'elle permet de passer des « pyramides du savoir aux réseaux de la connaissance », pour citer encore M. René Trégouët. C'est l'enjeu extraordinaire de la participation. Nous étions sur des systèmes pyramidaux. La connaissance et la décision étaient au sommet. Aujourd'hui, les responsabilités ont été transversalisées et le système des réseaux permet à chacun, où qu'il soit, d'inclure sa petite parcelle d'intelligence dans l'ensemble.
Si cela vaut pour l'individu, cela vaut aussi pour les collectivités. Chacune d'entre elles est porteuse de quelque chose ; chacune d'entre elles peut contribuer à l'harmonie de l'ensemble, à tous les équilibres, notamment à l'écosystème. Alors donnez aussi aux collectivités la possibilité de s'engager dans cette action de participation.
Je reviendrai tout à l'heure sur les deux sous-amendements que je présenterai aux amendements n°s 11 et 13.
S'agissant de la neutralité technologique, elle a été nécessaire et bonne à un moment donné de notre histoire numérique. Mais, aujourd'hui, nous enfermer dans ce principe serait à la fois une atteinte à la concurrence et un risque d'enfermement. Comment pourrions-nous courir avec des semelles de plomb ?
La neutralité technologique ne tend pas à interdire, elle permet de choisir une technologie. Pour un fond de vallée, pour un département presqu'île comme le mien, pour un territoire enclavé, vous avez l'obligation de passer par certaines technologies et d'en éliminer d'autres qui ne sont pas adaptées ou qui sont trop onéreuses.
Autrement dit, le choix d'une technologie ne vise pas à choisir un seul opérateur. Puisqu'il existe aujourd'hui de nombreux opérateurs pour chacune des technologies, l'ouverture à la concurrence est maintenue. Il s'agit simplement de choisir a priori une technique d'aménagement numérique du territoire en laissant la concurrence se développer en aval.
Il ne s'agit nullement de faire un choix en contournant le dispositif de l'appel d'offre de marché public. Je reviendrai sur ce point tout à l'heure lorsque nous discuterons de l'article additionnel que je vous propose après l'article L. 1425.
En conclusion, je formulerai deux observations brèves.
Premièrement, nous sommes au coeur d'un acte de décentralisation. Chacun sait combien la décentralisation a été bénéfique à notre pays, combien elle a permis sa modernisation, sa réactivité, son adaptabilité. Aujourd'hui, c'est encore plus vrai avec l'économie numérique.
Il faut que vous nous donniez les moyens de refuser les fatalités territoriales, celles des départements presqu'îles que j'évoquais, qui sont à l'écart des grandes voies de communication, non par la volonté des hommes, mais simplement parce que la nature, la géographie nous ont amenés à rester à l'écart. Aujourd'hui, nous avons réellement la possibilité de refuser cette fatalité. Alors, donnez-nous les moyens d'agir pour que nous ne soyons plus exclus, ni du développement, ni de la société, ni des grands courants qui peuvent apporter ici ou là du bien-être. Donnez-nous cette possibilité : telle est la philosophie qui sous-tend la plupart des amendements que nous avons eu l'honneur de déposer.
Enfin, M. René Trégouët, si j'ai bien compris, a proposé tout à l'heure la création d'un comité national de l'éthique d'Internet. Il me semble en effet que c'est indispensable, car l'on peut connaître, dans ce domaine-là comme dans d'autres, beaucoup de dérives.
Mais permettez-moi de conclure sur une proposition complémentaire : nous débattons d'un sujet qui, loin d'être figé, est au contraire terriblement évolutif. Au moment où l'on parle, on sait que, d'ores et déjà, des recherches ont lieu dont nous allons prochainement connaître les résultats. Aussi je me demande si nous ne pourrions pas convenir de la mise en place d'une sorte de cellule de veille législative - Gouvernement, Parlement, il vous appartiendra d'en choisir les modalités - qui nous permettrait d'adapter la loi en permanence.
N'attendons pas le bon vouloir d'un Gouvernement. Même si, vous le savez, on peut avoir confiance dans celui-ci, une grande confiance n'exclut jamais tout à fait une toute petite méfiance. Ne pourrait-on, par conséquent, avoir ensemble l'humilité de nous demander si cette loi, qui est bonne aujourd'hui, le sera encore demain ? Voilà pourquoi il serait souhaitable qu'une cellule de veille législative ou sociétale nous permette de continuer d'adapter la loi à la réalité. Nous ne pouvons manquer tous ces rendez-vous !
M. le président. La parole est à M. Henri Weber.
M. Henri Weber. Madame la ministre, le texte que vous nous soumettez aujourd'hui reprend, parfois dans les mêmes termes, le projet de loi du précédent gouvernement sur la société de l'information, projet qui n'avait pu être débattu ni voté. Notre collègue Pierre-Yvon Trémel nous a dit à quel point ce gouvernement avait été actif et même performant dans ce domaine.
Toutefois, alors que le projet de loi sur la société de l'information abordait toutes les questions liées à la révolution numérique, votre texte ignore les aspects non marchands d'Internet. On n'y trouve rien sur l'accès aux documents administratifs, rien sur les logiciels libres, rien sur d'autres questions rappelées également par notre collègue Trémel. Ces sujets seront, dites-vous, abordés plus tard... Mais en saucissonnant ainsi les textes de lois, en parcellisant le débat, vous nous privez de la possibilité d'une discussion à la hauteur des défis qui nous assaillent.
Ce texte, vous l'avez qualifié de « première grande loi sur Internet ». Pour ma part, je regrette que ce premier texte, ce premier débat législatif sur le numérique concerne essentiellement le commerce électronique.
Mon intervention portera sur le cadre de régulation que vous avez échafaudé. Il me semble singulièrement manquer de cohérence. En effet, d'un côté, vous décidez de faire de la communication publique en ligne un sous-ensemble de communication audiovisuelle, ce qui fait du Conseil supérieur de l'audiovisuel, ipso facto, l'autorité de tutelle d'Internet. Notre collègue Louis de Broissa l'a souligné.
De l'autre, concernant la responsabilité civile des fournisseurs d'accès, vous optez pour l'autorégulation. Il reviendra aux prestataires techniques de juger eux-mêmes de la légalité des informations qu'ils transportent ! Cadre de régulation fort et inopérant avec le CSA, d'un côté, autorégulation aux conséquences néfastes, de l'autre, c'est incohérent !
Avec l'article 1er, vous avez voulu, madame la ministre, contre l'avis pertinent du rapporteur de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, M. Jean Dionis du Séjour, que la communication publique en ligne soit rattachée à la loi de 1986 relative à la liberté de communication. Autant je suis favorable au principe de neutralité technologique, qui a sous-tendu l'élaboration de ce texte, autant je pense - ce point fait manifestement l'unanimité de tous les acteurs concernés hormis votre Gouvernement - que cette insertion dans la loi de 1986, si elle n'est pas mieux cadrée, relève d'une erreur d'appréciation majeure.
C'est un non-sens lourd de conséquences, car il fait, de facto, et contre son avis, du Conseil supérieur de l'audiovisuel, l'autorité de régulation d'Internet. Or la législation applicable au secteur de la communication audiovisuelle a été conçue pour un cadre radicalement différent de celui d'Internet, en fonction des supports et non pas des services. Le CSA a été institué pour réguler des ressources rares, les fréquences hertziennes, et, étant donné la rareté de ce bien, en assurer le pluralisme. Or rien n'est plus étranger à l'économie générale d'Internet que la rareté !
Ce choix de tutelle traduit également une méconnaissance des contenus du réseau. Certes, on peut y écouter la radio, visionner une émission, mais on peut également discuter sur des forums, créer et diffuser des pages personnelles, confectionner un album photos et, bientôt sans doute, apparaîtront de nombreuses nouvelles applications qui seront encore plus allergiques au cadre de régulation que vous défendez. Ce sont des services bien différents de ceux qui relèvent de l'audiovisuel traditionnel.
Le dispositif actuel revient, comme l'a souligné mon collègue Christian Paul à l'Assemblée nationale, à construire une ligne Maginot. Les quelque cent articles de la loi de 1986 ne peuvent s'appliquer à la communication publique en ligne. J'en veux pour preuve le fait que cette ligne Maginot a mis non pas dix ans à montrer son inefficacité, mais quelques minutes, car, à l'article 17, en dépit de l'avis défavorable du Gouvernement, la majorité a adopté à l'Assemblée nationale un amendement, proposé par la commission des lois, qui vise à prévoir de ne pas appliquer aux services de communication publique en ligne les compétences spécifiques du CSA en matière de concurrence !
Nous avons donc déposé un amendement qui tend à reprendre les définitions relatives aux services télévisuels et radiophoniques qui ont été proposées par le CSA et par l'ART. En énonçant cette définition, qui limite le champ de régulation du CSA aux seuls programmes audiovisuels, y compris les programmes à contenu interactif, le principe de neutralité technologique est respecté.
Pour autant, il ne faut pas soustraire les millions d'autres sites à la régulation. C'est ainsi - je le rappelle amicalement à mon collègue René Trégouët, dont je salue, moi aussi, la hauteur de vues et l'intervention de qualité qu'il a faite, même si je ne partage pas toutes ses conclusions - que fut créé le forum des droits sur Internet. Cette instance de médiation et de régulation, qui fonctionne depuis plus d'un an, n'a plus à prouver son utilité et sa légitimité, et a été confortée dans sa mission.
C'est d'ailleurs toujours en raison des dangers que représente l'autorégulation que je ne suis pas favorable au nouveau régime juridique relatif à la responsabilité civile des hébergeurs de sites dont vous avez dessiné les contours.
Ce régime soulève la question de la détermination de contrôle des contenus lorsque ceux-ci sont illicites : à qui revient le rôle de juger de la licéité d'un contenu, d'un texte, d'une image ?
Dans notre droit traditionnel, ce rôle est dévolu au juge, garant de nos libertés publiques. Or, dans le projet actuel, l'article 43-8 pose le principe selon lequel il revient à l'hébergeur de sites de juger de la licéité des contenus d'un site. L'ajout de l'adverbe « manifestement » illicite ne change finalement rien à la donne. Je ne crois pas qu'il revienne aux hébergeurs de contenus, à savoir à Wanadoo, à Yahoo ! ou à d'autres de se prononcer sur cette question.
Est-ce le rôle de Yahoo ! de dire si tel site malmène le droit d'auteur ou si tel autre véhicule des accusations calomnieuses ? La réponse n'est pas toujours simple. Certes, l'Assemblée nationale a considérablement amélioré le texte en adoptant deux amendements qui définissent, l'un une procédure de notification des faits litigieux et, l'autre, des sanctions pour plaintes abusives, ce qui permettra de restreindre les mouvements d'humeur.
Vous l'avez dénoncé vous-même, monsieur Türk : « On ne saurait attendre du fournisseur d'hébergement qu'il se comporte en juge. » C'est pourquoi nous avons déposé sur ce chapitre plusieurs amendements qui visent, d'une part, à rendre cette notification obligatoire et, d'autre part, à réduire considérablement la marge d'interprétation des hébergeurs de sites. Ainsi, seule l'inaction de l'hébergeur qui a été saisi par une autorité judiciaire ou par un tiers, suivant la procédure de notification, pourra donner lieu à un engagement de sa responsabilité.
Cet amendement est, par ailleurs, tout à fait conforme à l'article 14 de la directive européenne sur le commerce électronique, qui laisse ouverte, sur cette question, la possibilité de l'intervention du juge.
Les amendements que nous avons déposés sur ce texte ont été guidés par le souci de concilier trois objectifs : favoriser le développement et la généralisation d'Internet dans notre pays, assurer le respect de la vie privée et des droits des auteurs et des créateurs, garantir, dans le respect de ces droits, la liberté d'expression.
C'est pourquoi je forme le voeu, madame la ministre, que, rompant avec la pratique du vote conforme qui semble s'être instituée avec ce Gouvernement, vous acceptiez ces amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme la « révolution industrielle » avait, en son temps, profondément bouleversé le rythme et la sphère de nos échanges, la montée en puissance des nouvelles technologies de l'information a créé une véritable « révolution numérique ».
Au cours des dix dernières années, cet élan a accompagné l'évolution d'une société de plus en plus ouverte à la communication, au sens large. Ces « courants rapides » qui traversent notre société de part en part ont emporté, dans leur mouvement, un développement fulgurant des nouvelles technologies.
Ce contexte éminemment porteur de libertés nouvelles est aussi porteur, comme toutes les grandes innovations, de nouvelles interrogations auxquelles le législateur doit s'attacher à répondre dans un cadre juridique clarifié.
La mise en place d'une législation relative à Internet exige donc de trouver le juste équilibre entre liberté d'initiative et protection des intérêts privés. De plus, la France a un rôle éminent à jouer en tant qu'exemple pour la communauté internationale.
Il est donc apparu indispensable d'adapter le cadre législatif dans une double perspective : d'une part, favoriser le développement de la diffusion des nouvelles technologies de l'information et de la communication, génératrices de richesses et de croissance, et, d'autre part, garantir un espace de droit aux usagers et aux acteurs de cette nouvelle économie. Ce cadre se doit d'être à la fois stimulant et régulateur pour répondre aux attentes de l'ensemble des acteurs.
Le projet de loi s'inscrit dans une ligne pragmatique visant à créer chez nos concitoyens, de manière stable et durable, les conditions de la confiance dans les technologies de l'information.
Après les mesures concernant les contrats, une seconde série de mesures marque, à mon sens, fortement ce texte : celles qui concernent la lutte contre la cybercriminalité. Il fallait tout mettre en oeuvre pour éviter que les nouvelles technologies de l'information et de la communication ne constituent un outil supplémentaire pour les délinquants.
En effet, comme toute innovation, les technologies de l'information ont induit de nouveaux types de comportements délictueux, susceptibles d'altérer la confiance des acteurs dans la sécurité des réseaux. Dans ce texte le choix fait a été de libérer l'usage de la cryptologie. Cet outil de sécurisation des échanges de données en ligne peut aussi devenir l'arme des cyberdélinquants. Il était donc indispensable de prévoir des mesures très fermes contre les utilisateurs malintentionnés.
Aussi, le texte prévoit une série de dispositions à forte teneur dissuasive qui permettront de sanctionner lourdement les délinquants utilisant la cryptologie à des fins criminelles. En outre, il vise à instaurer un renforcement de l'arsenal juridique dans la lutte contre la cybercriminalité. Ce texte, qui va donner un nouveau cadre juridique au domaine de l'économie numérique, a donc le grand mérite d'accompagner le mouvement de notre société dans le respect de tous les acteurs concernés par ces innovations. Il permettra aussi à notre pays, qui avait accumulé un retard considérable dans ce domaine, de rappeler qu'il possède désormais les moyens d'une ambition digne des légitimes attentes suscitées par ces technologies nouvelles.
C'est tout à l'honneur de la volonté gouvernementale de présenter des textes qui engagent durablement notre pays sur la voie de la modernité.
Enfin, s'agissant de l'aménagement numérique des territoires, sujet majeur, nous nous félicitons de l'initiative prise par le Gouvernement lors de la première lecture de ce projet de loi à l'Assemblée nationale, le 25 février dernier. En effet, les orientations proposées par le Gouvernement lors du CIADT de décembre dernier se trouvent déjà concrétisées dans ce texte. Ces orientations ont donc pris corps et nous nous en réjouissons, puisqu'il s'agit de lutter contre la fracture numérique des territoires et de relancer par ailleurs le secteur des télécommunications.
L'intervention des collectivités territoriales dans le secteur des télécommunications est limitée aujourd'hui aux infrastructures passives et elles ne peuvent pas être opérateur de télécommunications. Ainsi, mal desservies par les réseaux haut débit, nos régions sont fortement handicapées dans la compétition européenne pour attirer les investisseurs économiques. Le Gouvernement a donc proposé par amendement de modifier l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales pour permettre aux collectivités d'établir des réseaux et d'exercer, sous certaines conditions, l'activité d'opérateur de télécommunications.
Nous sommes bien conscients que le dispositif actuel est insuffisant ou inadapté pour attirer les opérateurs en dehors des grandes agglomérations urbaines, et nous sommes aussi conscients que l'accès au haut débit est un enjeu majeur pour le développement rural.
Au printemps 2002, la France accusait un retard par rapport à certains de ses partenaires européens avec 800 000 abonnés, contre plus de 2 millions en Allemagne, par exemple. A cette date, seuls 2,6 % des Français avaient accès au haut débit, contre 12 % des Suédois, 20 % des Canadiens et 42 % des Coréens du Sud. Ce retard est loin d'être comblé aujourd'hui, ce qui constitue un véritable handicap pour notre pays, pour notre croissance et donc pour nos emplois. Il est indéniable que le projet de loi va donner une véritable impulsion à plusieurs domaines de l'économie numérique, ce qui va nous permettre de rattraper ce retard.
L'accès aux réseaux de communication à haut débit se trouve au coeur des enjeux de développement de nos territoires, et nombre de nos communes rurales et de nos territoires attendent la possibilité de bénéficier de cet accès.
Les télécommunications sont, avec le haut débit, des outils de développement du territoire indispensables, voire prioritaires. Toute politique des territoires ruraux doit s'appuyer sur un développement durable de l'activité économique. Il passe par les entreprises, quels que soient les secteurs - agriculture, agroalimentaire, artisanat, commerce, industrie, services - dont il faut assurer la pérennité, afin de créer de la richesse et de l'emploi sur ces territoires et donc d'y maintenir les hommes.
De telles orientations exigent des choix volontaristes de la part des pouvoirs publics en termes de solidarité et de péréquation entre les territoires, d'équité, de qualité des services offerts aux populations et, bien évidemment, d'accessibilité, notamment grâce aux infrastructures de transport et aux technologies de l'information et de la communication qui, seules, peuvent décider les entreprises à s'implanter dans les territoires ruraux.
Je conclurai en disant qu'il n'y a pas de développement rural sans le haut débit. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. Louis de Broissia. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Michel Teston.
M. Michel Teston. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'évolution proposée par les articles 1er A et 1er B de ce projet de loi s'inscrit dans la droite ligne des textes adoptés sous le gouvernement précédent. Il faut rappeler, ici, la loi du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire qui a reconnu, pour la première fois, le principe de l'intervention des collectivités territoriales en matière de télécommunications, au titre de leur mission d'aménageur. De même, la loi du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel a assoupli certaines contraintes du texte précédent et a élargi le champ d'intervention des collectivités territoriales à la création de tout type d'infrastructures passives et à la mise à disposition de celles-ci à tout type d'utilisateur.
Il convient de rappeler aussi que les dispositions que nous examinons s'inscrivent dans l'objectif de l'achèvement de la couverture en téléphonie mobile qui a été arrêté lors de la réunion du CIADT du 9 juillet 2001, qui s'est tenue à Limoges.
En insérant les articles 1er A et 1er B dans ce projet de loi, nos collègues députés ont souhaité lutter contre la fracture numérique en élargissant les compétences des collectivités territoriales dans le domaine des télécommunications et en créant, sans le reconnaître expressément, un service public local de fourniture d'infrastructures de télécommunication. Ainsi, les collectivités territoriales auront désormais la possibilité d'être opérateurs d'un réseau de télécommunications ouvert au public, c'est-à-dire qu'elles pourront établir des réseaux, les exploiter et fournir des services commerciaux aux opérateurs de téléphonie mobile.
Certes, cette évolution est souhaitable, mais elle ne correspond qu'en partie à l'attente des collectivités territoriales non encore desservies, c'est-à-dire les moins peuplées et, souvent, les plus pauvres.
En outre, nous ne pouvons nous satisfaire de cette évolution législative qui, dans sa mise en oeuvre, s'apparente à une décentralisation sans moyens. En effet, le désengagement de l'Etat d'une partie de ses missions d'aménagement du territoire, dans un domaine aussi stratégique que le désenclavement numérique, s'effectue sans accroissement significatif des moyens pour les collectivités territoriales. Il n'est envisagé aucun mécanisme de péréquation en faveur des territoires les plus fragiles.
Pourtant, les inégalités territoriales sont criantes en matière de téléphonie mobile. Les collectivités rurales devront prendre en charge la réalisation des équipements passifs ou l'acquisition des droits d'usage sur des équipements existants, alors que les autres collectivités n'ont pas eu à intervenir.
Ainsi, dans le département de l'Ardèche, que je représente au Sénat, actuellement, cent onze des trois cent trente-neuf communes ne sont pas couvertes, ce qui exigera la création de soixante-dix stations, alors que, par exemple dans le Rhône, seulement treize communes ne sont pas couvertes, quatorze dans les Alpes-Maritimes et huit dans le Bas-Rhin.
L'intervention de certaines collectivités des territoires ruraux dans la mise en oeuvre des infrastructures passives de téléphonie mobile a déjà permis de mesurer les nouvelles contraintes et les charges qu'elles devront supporter.
Tout d'abord, la charge d'investissement sera très lourde en valeur absolue, mais encore plus habitant. Il apparaît par ailleurs que ces investissements ne seraient pas éligibles au fonds de compensation pour la TVA, le FCTVA, car ils sont réalisés pour être mis à la disposition des opérateurs.
Ensuite, le texte reste flou sur la prise en charge des frais de maintenance de ces sites. La collectivité maître d'ouvrage devra-t-elle les financer seule, à raison d'une moyenne de 3 000 euros par an et par site ? Devra-t-elle aussi financer seule des droits d'usage en cas d'utilisation de sites existants ? Et tous ces frais ne pourront probablement pas être répercutés sur les opérateurs.
Enfin, l'Etat a inscrit un montant modeste de 44 millions d'euros pour la première phase de déploiement, soit par mutualisation, soit par itinérance locale, des 1 250 sites de téléphonie mobile qui couvriraient 1 850 communes, et n'envisage pas de nouveaux crédits pour la phase suivante qui concernera plus de 1 500 communes. Sachant que les opérateurs ne veulent plus s'impliquer financièrement au-delà de la phase 1, les collectivités concernées par la phase 2, c'est-à-dire les plus pauvres, devront-elles intégralement financer non seulement les infrastructures passives, mais aussi les infrastructures actives, et prendre en charge les frais de fonctionnement pour achever la couverture territoriale ?
Par ailleurs, en dépit des engagements pris par le Gouvernement dans le cadre du plan RE/SO 2007, l'Etat ne sera pas aménageur numérique. Aucune mobilisation de nouveaux crédits d'Etat ou de nouveaux financements dans le cadre des contrats de plan Etat-région n'est prévue. Le déploiement des réseaux à haut débit entraînera donc les mêmes inégalités territoriales tant pour l'investissement que pour le fonctionnement, avec l'obligation pour les collectivités rurales d'activer elles-mêmes les réseaux et d'en assurer l'exploitation.
De telles disparités dans le coût de services considérés à juste titre comme d'intérêt public par la population, de même que l'importance de la prise de risques par les collectivités territoriales les moins peuplées, exigent que joue la solidarité nationale.
Pour cela, deux formules peuvent être mises en oeuvre : une extension du service public des télécommunications à la téléphonie mobile, voire aux réseaux internet à haut débit, ce qui répondrait aux aspirations de la population et impliquerait un financement de base pour tous par les opérateurs ; la création d'un fonds de soutien qui pourrait être alimenté par les opérateurs et l'Etat et qui serait réservé aux collectivités maîtres d'ouvrage des phases 1 et 2 du plan de développement du réseau de téléphonie mobile et pour l'accès au haut débit.
En conclusion, madame la ministre, ce projet de loi ne sera une véritable avancée législative que si le transfert de charges sur les collectivités territoriales ne se traduit pas par un affaiblissement supplémentaire des collectivités les plus fragiles. Pour cela, ce texte doit intégrer un mécanisme de péréquation, sans lequel il n'y aura pas de véritable égalité dans la couverture de tout le territoire national. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Mesdames, messieurs les sénateurs, je veux tout d'abord vous remercier très sincèrement de la très haute tenue du débat que nous venons d'avoir. Toutes vos interventions ont permis de resituer la discussion à la hauteur où elle devait se tenir, compte tenu des énormes défis que nous avons à relever ensemble.
Je tiens également à remercier les sénateurs qui m'ont encouragée et qui ont apporté leur soutien à ce projet de loi.
Monsieur Hérisson, vous avez souligné, à juste titre, la complexité du texte, qui est due à la diversité et à la nature des sources de l'économie numérique. Je partage votre réflexion sur ce point, ainsi que sur la nécessité de concilier la préservation de notre arsenal juridique, tout en l'adaptant aux spécificités des nouvelles activités et, bien entendu, aux exigences morales et éthiques.
Je souhaite vous remercier, monsieur le rapporteur, ainsi que les membres de la commission des affaires économiques, de ce que vous avez appelé vous-même votre « approche pragmatique. »
Monsieur Sido, vous avez bien voulu rappeler que ce projet de loi répondait à de nombreuses attentes, ce qui correspond, en effet, à la réalité des choses. Vous avez également insisté sur la fracture numérique, qui, selon vous, porterait un coup à la cohésion sociale. Je partage tout à fait cette réflexion.
Nous aurons l'occasion, dans quelques instants, d'examiner l'article 1er A, qui représentent une avancée, et l'article 1er B, qui concerne la couverture du territoire en téléphonie mobile. Là aussi, le Gouvernement partage votre objectif, et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle il a introduit la possibilité d'itinérance locale.
Enfin, monsieur Sido, vous avez insisté sur l'exclusion et sur la nécessité d'en briser la spirale. Ce texte, modestement, tend à y contribuer.
S'agissant de la nécessité d'élargir le droit de réponse à l'ensemble des sites sur Internet, je devrais être en mesure de vous apporter une réponse positive.
M. de Broissia a insisté sur le flou juridique actuel et sur la situation dommageable dans laquelle nous nous trouvions eu égard à Bruxelles.
Il a fort bien expliqué les motifs pour lesquels, s'agissant de la définition de la communication en ligne, nous avons été conduits à retenir la solution d'arbitrage que vous connaissez.
Je puis vous assurer, monsieur de Broissia, que le Gouvernement partage votre souci de protéger la propriété intellectuelle et artistique. Comme vous le savez, j'ai été appelée, tout récemment, à m'exprimer très clairement sur ce sujet : j'ai expliqué que la lutte que nous devons mener contre la contrefaçon intègre, bien évidemment, les aspects de la propriété intellectuelle et artistique, et que ces deux aspects sont indissociables.
Vous avez également évoqué la limitation des compétences du CSA aux services de radio et télévision - nous aurons l'occasion de revenir sur ces aspects lorsque nous aborderons la question des sanctions prononcées par le CSA à l'égard des éditeurs et des distributeurs de services - et à la protection de l'enfance. Je vous rejoins également sur ce point et je pense que nous pourrons avancer d'une façon positive.
Monsieur Türk, vous avez insisté sur le retard que nous avons pris et sur les tensions juridiques qui pèsent sur ce texte, lesquelles seraient dues aux directives européennes. Vous avez également engagé une réflexion sur les formules de régulation. C'est ainsi que vous avez soulevé le problème de l'interconnexion des autorités de régulation.
Pour ma part, je pense que les autorités de régulation répondent à certains besoins très spécifiques : tout d'abord, l'ouverture de secteurs sous monopole à la concurrence, afin de réguler les acteurs en position de monopole - c'est ainsi que l'ART est née de la libéralisation des télécommunications ; ensuite, la gestion des ressources rares, telles que les fréquences - c'est ainsi que le CSA a pour mission d'allouer les fréquences de radio-télévision.
De ce fait, l'émergence d'autorités administratives indépendantes doit être pensée en fonction d'objectifs précis et de missions bien définies pour ne pas créer des droits sectoriels et des droits spécifiques. A défaut, il faudrait privilégier les régulateurs de droit commun judiciaire ou législatif. C'est pourquoi le projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique s'insère dans le droit en vigueur.
Madame Terrade, sincèrement, je n'ai pas le sentiment que ce texte ait mis en émoi les milieux de l'économie numérique, comme vous l'avez dit. Tout au plus y-a-t-il eu un débat de fond extrêmement important, notamment autour de la définition de la communication en ligne, mais ce débat était tout à fait souhaitable.
Vous avez dit que l'économie numérique était un outil de communication et non pas seulement un instrument commercial, et je vous rejoins tout à fait dans cette approche.
Vous avez également mis en garde contre les risques d'inégalités et de persistance de ces inégalités. Effectivement, ces nouvelles économies doivent être des vecteurs à la fois d'égalité d'accès à l'information, de réactivité et de croissance, et nul ne doit en être exclu. J'ai d'ailleurs noté une convergence de vues très profonde sur ce point.
Le Gouvernement a consulté la commission des droits de l'homme, bien évidemment, et il a été extrêmement attentif aux avis qu'elle a exprimés.
La seule chose qui nous sépare réellement, madame Terrade, c'est que nous sommes pour la régulation de l'Internet marchand et non pas pour son interdiction.
M. Trégouët a dressé un vaste panorama, très prospectif, qui a été apprécié par un certain nombre d'intervenants comme par moi-même, je peux le dire, sur les mutations profondes engendrées par l'informatique et sur l'émergence de métiers futurs. Je l'en remercie. J'ai également été très impressionnée par le vibrant plaidoyer qu'il a fait en faveur de la fibre optique, y compris chez le particulier, qui permettra le très très haut débit.
Votre description est peut-être juste, monsieur Trégouët, mais, aujourd'hui, les services concernés n'existent pas. Avant d'en arriver aux situations que vous avez décrites, je crois que, plus modestement, il nous faut réussir le bas et le haut débit en France. Tel est l'objet de ce texte, dont vous reconnaissez comme moi qu'il constitue un pas dans la bonne direction.
J'ai également beaucoup appris de votre description des puces de type TCPA, qui contrôleront les ordinateurs de demain avec des logiciels verrouillés. Pour l'instant, nous souhaitons, là encore, modestement, réguler, protéger la liberté. J'ajouterai que j'ai confiance dans l'évolution de nos sociétés. Je crois qu'elles n'accepteront pas de réduire la liberté, comme vous le craignez. Je suis moins pessimiste que vous à cet égard, mais on n'est jamais assez vigilant, je le concède. Je dirai simplement que notre texte permet de faire face aux premières nécessités de protection de la liberté.
Dans votre intervention, monsieur Christian Gaudin, vous avez souligné l'explosion de l'usage d'Internet, sur laquelle j'avais insisté dans mon exposé introductif. Vous avez manifesté, vous aussi, très fortement votre préoccupation s'agissant de la fracture numérique. Nous nous trouvons tous face à une véritable responsabilité. Le Gouvernement partage cette préoccupation. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle il a autorisé les collectivités locales à exploiter les réseaux. Celles-ci sont en effet bien placées pour appréhender les besoins de leurs populations. Nous poursuivrons cette discussion lors de l'examen des articles.
Vous avez également abordé la question du juste dimensionnement du service public local. Il s'agit d'une question très complexe ! Le Gouvernement est favorable à un débat en la matière, dès lors, bien sûr, que les règles de transparence et de concurrence sont respectées et les besoins de la population clairement exprimés.
Par ailleurs, je partage l'opinion exprimée par M. Trémel : à l'évidence, Internet va modifier les relations entre l'administration et les usagers. J'ai du reste rappelé le succès de la télédéclaration d'impôt que nous avons mis en place en 2003.
Je constate, monsieur le sénateur, qu'un certain nombre de convergences nous réunissent. J'ai apprécié vos propos favorables aux orientations présentées par M. le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin et je comprends, naturellement, que vous ayez souhaité défendre les intentions que le gouvernement précédent avait exprimées dans ce domaine.
Le fait que le Gouvernement présente plusieurs textes sur la société de l'information est tout simplement une marque de pragmatisme, ce pragmatisme que M. Hérisson évoquait. En effet, mon prédécesseur avait voulu faire une seule grande loi. C'était son choix ! La rigueur du calendrier parlementaire ne lui a pas permis de mener sa grande oeuvre à son terme, et nous le regrettons tous.
Nous, nous avons choisi le pragmatisme. Notre calendrier est précis et serré ; vous m'avez interrogée à ce sujet. Vous débattez aujourd'hui de la première loi. En ce moment même, le Conseil d'Etat rend son avis sur le deuxième projet de loi ; je le présenterait au conseil des ministres le 31 juillet prochain. La troisième loi attendra évidemment que les nouvelles directives soient votées à Bruxelles pour être transposées ensuite en droit français.
Enfin, les questions que nous m'avez posées, monsieur le sénateur, trouveront leur réponse au cours du débat. Ce sera le cas en ce qui concerne l'intervention des collectivités locales et le financement du service universel.
Monsieur Le Grand, vous avez insisté sur la confiance, qui constitue le vecteur essentiel de la politique économique du Gouvernement. Comme vous, je me félicite, bien sûr, du développement du rôle des collectivités locales en matière de télécommunications permis par le projet de loi, notamment en ce qui concerne le haut débit.
Vous ouvrez le débat sur l'établissement des réseaux, leur exploitation et la fourniture des services au public. Le Gouvernement partage votre analyse et il fera connaître sa position lors de l'examen de vos amendements. Monsieur Le Grand, je crois que vous aurez de bonnes surprises ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-François Le Grand. Ah ! Je vous remercie, madame la ministre !
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. S'agissant du facteur prix, vous avez cité la ville de Milan et ses réseaux, tout à fait exemplaires, en effet. Il s'agit d'une réalisation effectivement exceptionnelle, puisque la ville est complètement câblée en fibre optique. Je tiens cependant à préciser que l'opérateur privé qui exploite le réseau a bénéficié de la conjonction de deux paramètres particulièrement positifs : d'une part, il a pu réutiliser le réseau électrique, donc en réduisant les coûts ; d'autre part, il a levé des fonds très importants sur les marchés au plus haut de la bulle Internet. Je donne ces précisions non pas pour diminuer les mérites des réalisations de cette ville, mais pour permettre de bien comprendre les conditions générales qui ont présidé à leur financement.
Monsieur Weber, vous avez soulevé la question des documents publics. Nous avons choisi de différer le traitement de ce dossier, parce qu'une directive européenne est en cours d'élaboration sur le sujet.
Sur la régulation de l'Internet par le CSA, je rappelle qu'elle est effective depuis l'entrée en vigueur de la loi du 1er août 2000 - loi qui a été présentée par le gouvernement précédent - sans que cela ait eu d'impact sur le développement de l'Internet. Cela étant, le Gouvernement s'apprête à limiter les pouvoirs du CSA à la radio et à la télévision, comme il est prévu dans le projet de loi sur le « paquet télécom » actuellement soumis à l'examen du Conseil d'Etat.
Le régime de responsabilité provient d'une directive européenne. Il s'agit néanmoins d'un régime de responsabilité limitée. Nous débattrons bien sûr de tous ces aspects lors de la discussion des articles.
Je remercie M. Jean-Louis Lorrain de son intervention et de la dimension tant juridique que politique qu'il a introduite dans ce débat. La lutte contre la cybercriminalité occupe une place importante dans le présent projet de loi, et je me félicite avec M. Lorrain que nous ayons pu alourdir les peines en cas d'usage délictueux des nouvelles technologies.
Je partage avec M. Lorrain la volonté de renforcer l'attractivité du territoire en général et son attractivité numérique en particulier. Vous l'avez bien compris, cette démarche s'inscrit dans une entreprise plus large qui consiste à renforcer l'attractivité du site « France ».
Enfin, je suis heureuse de vous préciser que les chiffres sur la pénétration du haut débit datent du début de l'année 2002. Nous avons connu une progression significative et nous oeuvrons pour maintenir cette dynamique.
Monsieur Teston, vous avez évoqué un certain nombre de points tout à fait pertinents sur lesquels cependant je ne m'étendrai pas, tout d'abord parce qu'ils rejoignent des préoccupations qui ont été évoquées par les autres intervenants, mais aussi parce que nous y reviendrons lors de la discussion des articles.
Ce projet de loi s'inscrirait, selon vos propres termes, en droite ligne dans la continuité de l'action du gouvernement précédent et de l'objectif d'achèvement de la couverture du territoire en téléphonie mobile : dans votre bouche, c'est le plus beau des compliments ! (Sourires.) Sachez que je l'apprécie à sa juste valeur. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'Union centriste et sur certaines travées du RDSE et du groupe socialiste.)
M. Daniel Raoul. N'en faites pas trop, madame la ministre déléguée !
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
TITRE Ier
DE LA LIBERTÉ DE COMMUNICATION EN LIGNE
Chapitre Ier A
Les réseaux
Article additionnel avant l'article 1er A
M. le président. L'amendement n° 165, présenté par MM. Trémel, Raoul et Teston, Mme Pourtaud, M. Weber et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Avant l'article 1er A, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Il est institué un fonds de soutien à l'aménagement numérique du territoire dans les conditions prévues par la loi de finances.
« Ce fonds contribue au financement des projets des collectivités territoriales et de leurs groupements en matière de télécommunications, tels que définis à l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales. Il est constitué par des dotations de l'Etat.
« II. - La perte de recettes résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Avec les articles 1er A et 1er B, nous entamons un débat important sur le rôle des collectivités locales dans le domaine des télécommunications.
Jusqu'où les collectivités locales peuvent-elles intervenir dans un secteur économique qui était jusque-là essentiellement régi par les règles relatives à la liberté du commerce ? Doivent-elles simplement construire des réseaux ? Peuvent-elles exploiter ces réseaux ? Peuvent-elles fournir des services de télécommunications ? Toutes ces questions sont essentielles.
Cependant, il en est une, quelles que soient les solutions que nous allons retenir, qui, pour être tout aussi essentielle, n'a pourtant pas été abordée dans le projet de loi, je veux parler du financement de ces nouvelles compétences. L'amendement n° 165 est l'occasion pour nous d'aborder cette question.
Cet amendement vise à créer, sur le modèle des différents fonds d'aménagement du territoire, un fonds de soutien à l'aménagement numérique du territoire destiné à accompagner financièrement les projets portés par les collectivités locales en matière de télécommunications, et ce dans le cadre du nouvel article L. 1425-1 que l'article 1er A introduit dans le code général des collectivités territoriales.
Nous proposons que ce fonds soit alimenté par des dotations de l'Etat. Certes, je n'ignore pas qu'il est possible de nous opposer un certain article, néanmoins, je souhaite ouvrir ici, au sein de la Haute Assemblée, un débat de fond afin que le Gouvernement puisse nous donner clairement sa position.
La desserte des territoires par des réseaux de télécommunications est un enjeu d'aménagement du territoire. Les collectivités territoriales ne cessent de le répéter et l'Etat ne dit pas autre chose, en témoignent les divers comités interministériels pour l'aménagement et le développement du territoire qui ont traité de cette question.
Les gouvernements successifs reconnaissent pleinement leur responsabilité dans ce domaine. Cette responsabilité consiste, pour l'Etat, à veiller, au nom de l'égalité des territoires, à ce que chaque territoire puisse avoir accès aux services proposés par ces réseaux en vue de permettre leur développement par la création de richesses.
Il faut rappeler à ce propos les déclarations de M. le Premier ministre lors du congrès des maires de France, le 19 novembre dernier.
M. le Premier ministre s'indignait que certaines collectivités aient à payer pour avoir la téléphonie mobile ou le haut débit, alors que d'autres y avaient accès gratuitement. Il ajoutait : « Je vois beaucoup de territoires ruraux aujourd'hui pénalisés par une République qui n'a pas toujours su traiter ses territoires par l'égalité ». Et il annonçait : « Le projet qui est le mien, c'est de faire en sorte que la République assume ses devoirs d'équité territoriale ».
Nous prenons le Premier ministre au mot ! L'Etat doit assumer ses devoirs de solidarité et le Gouvernement ne peut prendre prétexte de la demande des collectivités locales pour plus de liberté dans le domaine des télécommunications pour se décharger sur elles de ce qui lui incombe au premier chef : être garant de la solidarité en tant que responsable des choix stratégiques de la politique d'aménagement du territoire.
Ne nous y trompons pas : si l'article 1er A s'adresse en droit à l'ensemble des collectivités locales, il est avant tout conçu pour être mis en oeuvre par les collectivités que les opérateurs traditionnels de télécommunications refusent de desservir parce qu'elles ne seraient pas rentables, c'est-à-dire les territoires les moins densément peuplés, les moins bien irrigués par les entreprises. En un mot, ce sont bien les collectivités les moins riches qui devront mobiliser le plus de moyens et prendre le plus de risques pour avoir ce que d'autres obtiennent gratuitement.
Pour ce qui nous concerne, nous ne voulons pas d'un aménagement du territoire qui se contenterait de décliner l'adage : « A chacun selon ses moyens. »
La lecture du rapport écrit de MM. Sido et Hérisson montre que nos collègues ont bien perçu ce risque. Je pourrais citer également certains passages d'un rapport sur l'application de la loi de réglementation des télécommunications ou encore les commentaires des décisions prises lors du CIADT de Limoges de juillet 2001. M. Pierre Hérisson écrivait alors : « Le Gouvernement y a soudain vu une aubaine budgétaire : celle du transfert aux collectivités locales de la charge financière croissante de l'aménagement numérique du territoire qui devrait, en toute logique, lui incomber. »
M. Jean-François Le Grand. M. Hérisson a dit cela ?
M. Daniel Raoul. Que n'a-t-il pas dit ! (Rires.)
M. Pierre-Yvon Trémel. Que dire aujourd'hui, alors que, aux termes de l'article 1er A, les collectivités vont devenir opérateurs de télécommunications, qu'elles auront à procéder à de lourds investissements de nature capitalistique et à la rentabilité très incertaine, et qu'elles auront, dans certains cas, à financer le service universel des télécommunications ?
Que dire, alors que le Gouvernement n'a pas pour l'instant mobilisé un centime de plus que ce qui avait été décidé lors du CIADT de Limoges pour aider les collectivités locales à s'équiper dans le domaine des télécommunications ?
Madame la ministre, que comptez-vous faire, au-delà de la mobilisation des fonds structurels européens, pour aider les collectivités locales à mettre sur pied ce qui serait désormais un service public local ? Avez-vous prévu une disposition en la matière dans le projet de loi de finances pour 2004 ? Etes-vous prête à identifier plus clairement dans la loi de finances les dotations mobilisées pour l'aménagement numérique du territoire ?
La création du fonds que nous vous proposons est une mesure de transparence. Ce fonds permettrait de s'assurer que l'aménagement numérique du territoire est bien une priorité du Gouvernement. Nous sommes prêts à profiter de la navette pour améliorer notre rédaction, mais je suis persuadé que, chacun dans cette assemblée sachant combien les fonds d'aménagement du territoire ont leur utilité, tous sont prêts à adopter cet amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bruno Sido, rapporteur. Monsieur Trémel, la commission ne nie pas la pertinence de votre constat en matière d'aménagement du territoire, ni l'utilité du haut débit pour l'installation des entreprises.
Il est clair, en effet, que ce sont encore les collectivités les plus petites, les moins riches, qui seront exposées à devenir opérateurs et, donc, à dépenser le plus d'argent. Le constat est bien posé, et j'en prends acte.
Cela étant dit, la question se pose de savoir dans quelle mesure les collectivités les moins fortunées pourront se substituer à l'initiative privée. Je note que l'amendement est lui-même quelque peu imprécis quant au fonctionnement et au financement d'un tel fonds d'aménagement numérique du territoire.
Un accord pourrait être trouvé entre les opérateurs, le Gouvernement, le collectivités locales, du type de celui qui a été trouvé pour la téléphonie mobile, c'est-à-dire en réservant le dispositif aux zones « noires », en l'occurrence pour le haut débit.
Par conséquent, sur cet amendement, la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Monsieur le sénateur, le Gouvernement partage votre préoccupation : le développement numérique du territoire est absolument indispensable et nous devons tout faire pour réduire la fracture numérique.
Malheureusement, comme vous en avez exprimé vous-même la crainte, cet amendement tombe en effet sous le coup d'un « certain article » pour reprendre votre expression. Appelons un chat un chat : il s'agit de l'article 40 de la Constitution. Cet amendement n'est donc pas recevable.
Néanmoins, pour vous montrer que nous avons bien les mêmes ambitions, et puisque vous m'avez demandé ce que faisait le Gouvernement, je tiens à vous préciser que nous avons agi dès 2003. Ainsi dans quelques jours, mes collègues M. Jean-Paul Delevoye et M. Patrick Devedjian et moi-même allons signer une convention avec les opérateurs et la DATAR pour utiliser le mieux possible les 44 millions d'euros que nous avons dégagés aux fins d'aider, justement, les collectivités locales à couvrir le territoire en téléphonie mobile.
Je vous l'accorde, la somme est modeste, mais il ne s'agit là que d'une première étape et nous espérons bien pouvoir poursuivre en 2004.
M. le président. Monsieur Trémel, votre amendement est-il maintenu ?
M. Pierre-Yvon Trémel. Je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. Madame la ministre déléguée, évoquez-vous ou invoquez-vous l'article 40 de la Constitution ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Monsieur le président, je pensais avoir été très claire. J'ai indiqué que cet amendement n'était pas recevable en raison de l'article 40 de la Constitution. J'ai donc bien invoqué ledit article.
M. le président. Monsieur Bourdin, l'article 40 de la Constitution est-il applicable ?
M. Joël Bourdin, au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Il l'est, monsieur le président.
M. le président. L'article 40 étant applicable, l'amendement n° 165 n'est pas recevable.
M. Pierre-Yvon Trémel. Hélas ! Mais nous en reparlerons.
M. le président. « Art. 1er A. - I. - L'article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales est abrogé.
« II. - Le titre II du livre IV de la première partie du même code est complété par un chapitre V intitulé : "Réseaux et services locaux de télécommunications" et comprenant un article L. 1425-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 1425-1. - I. - Les collectivités territoriales, ou les établissements publics de coopération locale ayant bénéficié d'un transfert de compétence à cet effet, peuvent, après avoir réalisé une consultation publique destinée à recenser les projets et les besoins des opérateurs, des entreprises et de la population, ainsi que les infrastructures et acteurs présents sur leurs territoires, établir et exploiter des réseaux de télécommunications ouverts au public au sens du 3° et du 15 de l'article L. 32 du code des postes et télécommunications, et acquérir des droits d'usage sur de tels réseaux. L'intervention des collectivités doit encourager des investissements économiquement efficaces et promouvoir l'utilisation partagée des infrastructures.
« Les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération locale ne peuvent fournir des services de télécommunications au public qu'après avoir procédé à une consultation révélant une insuffisance d'initiatives privées propres à satisfaire les besoins des populations et des entreprises.
« Les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération locale ayant l'intention d'exercer les activités visées aux deux alinéas précédents sont tenus de transmettre à l'Autorité de régulation des télécommunications la description de leurs projets ainsi que de leurs modalités d'exécution. L'Autorité de régulation des télécommunications peut, dans un délai d'un mois après réception de ces éléments, émettre un avis public sur le projet et ses modalités, notamment au regard de l'exercice d'une concurrence saine et loyale sur le marché local des télécommunications.
« II. - Dans le cadre de l'exercice de leurs activités d'opérateurs de télécommunications, au sens du 15° de l'article L. 32 du code des postes et télécommunications, les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération locale sont soumis à l'ensemble des droits et obligations régissant l'activité d'opérateurs de télécommunications, en application dudit code.
« L'établissement et l'exploitation des réseaux de télécommunications au titre du présent article devront faire l'objet d'une comptabilité distincte retraçant les dépenses et les recettes afférentes à ces activités. Une séparation juridique effective entre ces activités et la fonction responsable de l'octroi des droits de passage destinés à permettre l'établissement de réseaux de télécommunications ouverts au public devra être garantie.
« III. - Les collectivités territoriales, les établissements publics de coopération locale concernés ou les exploitants des réseaux établis ou acquis en application du présent article peuvent saisir, dans les conditions fixées à l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications, l'Autorité de régulation des télécommunications des différends relatifs aux conditions techniques et tarifaires d'établissement, de mise à disposition et de partage des infrastructures mentionnées au premier alinéa du I.
« Les collectivités locales, les établissements publics de coopération locale ou les exploitants de réseaux établis ou acquis en vertu du présent article sont tenus de transmettre à l'Autorité de régulation des télécommunications, sur sa demande, les conditions techniques et tarifaires mentionnées à l'alinéa précédent ainsi que la comptabilité retraçant les dépenses et recettes afférentes aux activités qu'ils exercent en vertu du présent article.
« IV. - Les infrastructures de réseau destinées, dans les zones desservies par aucun opérateur de téléphonie mobile, à assurer une couverture conforme à un plan géographique approuvé par l'Autorité de régulation des télécommunications sont mises à disposition des opérateurs titulaires d'une autorisation d'exploitation selon des conditions techniques et tarifaires fixées par décret en Conseil d'Etat.
« V. - Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux services de communication audiovisuelle et aux services de télécommunications offerts au public sur des réseaux établis ou exploités en application de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. »
La parole est à M. Daniel Raoul, sur l'article.
M. Daniel Raoul. Les amendements déposés sur le texte initial du Gouvernement et adoptés par l'Assemblée nationale ne font que constater ce que l'on sait depuis plusieurs années en matière de téléphonie mobile, à savoir qu'en termes de couverture du territoire le marché ne suffit pas et que l'intervention publique est nécessaire.
Mais l'Etat doit être le garant de la cohérence et de l'égalité d'accès, ce qui suppose une solidarité entre les territoires. Nous avions imaginé la création d'un fonds qui aurait pu organiser cette solidarité. Cela sera encore bien plus vrai, au-delà de la téléphonie mobile, pour l'accès au haut débit qui, quelle que soit la technologie retenue - satellites, wi-fi, fibre optique, point à point -, nécessitera des investissements bien plus lourds.
Les articles 1er A et 1er B ont pour conséquence implicite d'étendre le service public national des télécommunications via un service public local.
Madame la ministre, il serait important que le Gouvernement nous livre sa conception précise du service universel. Au-delà des annonces d'égal accès au haut débit pour tous, quel est le calendrier retenu ? Quelles sont les exigences de service public ? Quel sera le financement de l'Etat, au-delà de l'éligibilité au FCTVA des investissements d'infrastructures, ce qui serait le minimum et constituerait une opération blanche pour le ministère des finances ?
Je rejoindrai nos collègues MM. Le Grand et Trégouët sur la nécessité d'installer la fibre optique sur tout le territoire et pas simplement sur les grandes dorsales, pour qu'on ne joue pas sur la notion de « haut débit ». En fait, on sait très bien que les ADSL, WDSL et autres ne seront que des palliatifs qui ne permettront pas à des petites entreprises situées dans des départements actuellement en « zones noires » d'avoir accès à du 100 mégabits. Or, quant il s'agira de valoriser la matière grise sur notre territoire, par exemple pour la conception de certaines pièces mécaniques, il nous faudra disposer de ces accès à des débits beaucoup plus important que ceux auxquels donnent accès les technologies via le cuivre.
On évoque bien sûr les fonds structurels européens, mais tout le monde sait qu'ils n'interviendront que si l'Etat et les collectivités participent également.
L'amendement de la commission comme le texte voté à l'Assemblée nationale présentent les mêmes défauts : ce sont en fait des cavaliers législatifs. Aucune étude d'impact n'a été fournie, notamment en ce qui concerne leurs conséquences sur les budgets des collectivités locales. Ces textes étendent les compétences de ces dernières dans le champ économique, sans adjoindre les moyens nécessaires. Enfin, ces textes arrivent à un moment où nous devrions être en train de discuter d'un projet de loi transposant dans notre droit ce qu'on appelle « le paquet télécom ».
Bref, nous légiférons pour quelques mois. Disant cela, je pense tout spécialement à ce qui relève des réseaux câblés. Ce n'est sans doute pas une bonne méthode, même si vous plaidez le pragmatisme.
Néanmoins, la demande des collectivités locales est forte. Il faut y répondre. Peut-être aurions nous pu garder le cadre législatif actuel, le Gouvernement publiant simplement le décret sur le dispositif d'aides qui n'est jamais sorti ?
Permettre aux collectivités de combler le vide numérique créé par le marché est une nécessité non seulement pour le monde économique, mais aussi en termes de formation de la population et de santé publique.
Ainsi, un industriel suédois que j'ai rencontré la semaine dernière m'a dit : « Le réseau d'électricité, je pouvais m'en passer, mais le réseau à haut débit avec au moins 100 mégabits, j'en ai absolument besoin. Que pouvez-vous faire ? »
Nous avons maintenant deux textes en concurrence, celui du Gouvernement et celui de la commission des affaires économiques. Les deux textes partent du principe que les collectivités peuvent être opérateurs de télécommunications à part entière. Elles le demandent ou, plus exactement, les associations d'élus le demandent. Pourquoi aller contre leur volonté ? Laissons-les faire, faisons leur confiance. Néanmoins, je crois que c'est notre devoir de législateur de veiller à ce que le haut débit ne soit pas un miroir aux alouettes, ou, plus exactement, que les lendemains heureux qu'on nous promet avec le haut débit ne se transforment pas en cauchemars pour les collectivités.
En effet, il ne faut pas sous-estimer les risques tant juridiques que financiers auxquels les collectivités risquent d'être confrontées. Exploiter un réseau de télécommunications, fournir des services de télécommunications, ce sont de vrais métiers, qui exigent des vraies compétences, et un vrai savoir-faire. Or les collectivités ne les ont pas.
Seront-elles capables d'assurer toutes les nouvelles responsabilités juridiques instaurées par le projet de loi si elles décident, par exemple, d'être fournisseurs d'accès à Internet ? Si elles décident de devenir opérateurs à part entière, elles devront s'organiser pour mettre en place les équipements nécessaires, en assurer la maintenance et l'exploitation, fournir les services réseaux, mettre en oeuvre les services courants de l'Internet - sécurité, messagerie -, garantir la qualité du service, etc. Elles ne pourront pas, dans la plupart des cas, assurer directement ces services. Elles devront les déléguer et, donc, organiser cette délégation, ce qui n'est déjà pas une mince affaire.
Beaucoup d'opérateurs se sont, permettez-moi l'expression, « cassé les dents », alors que c'est leur métier. Il nous faut donc, comme l'indiquait le ministre chargé de l'aménagement du territoire, lors d'un colloque sur le haut débit organisé au Sénat le 12 novembre dernier, « savoir protéger les collectivités contre elles-mêmes ».
Nous allons donc proposer un certain nombre de sous-amendements, pour tenter d'améliorer un texte qui, en l'état, ne nous satisfait pas. Nous souhaitons donner plus d'initiatives aux collectivités locales, mais dans la solidarité que l'Etat doit organiser. (M. Michel Teston applaudit.)
M. le président. Je suis saisi de douze amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune. Mais, pour la clarté du débat, je les appellerai successivement.
L'amendement n° 148, présenté par Mme Terrade, MM. Bret, Ralite et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. L'article 1er A, dont nous proposons ici la suppression, ne figurait pas dans le projet de loi initial et résulte d'un amendement déposé par le Gouvernement sans que la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale ait eu à l'examiner.
Outre sa qualité rédactionnelle très discutable, ce cavalier législatif ne nous semble pas à sa place dans ce projet. Il est curieux que cet article soit présenté dans le projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique, alors que le troisième volet du numérique, relatif au « paquet télécom », nous a été annoncé pour l'automne.
On ne peut repousser le vote de cet article, nous dites-vous, alors que certaines communes attendent toujours des équipements qui ne viennent pas. Certes, mais du point de vue de la cohérence, cette anticipation est particulièrement malvenue alors qu'elle soulève des questions aussi fondamentales que la définition des opérateurs de télécommunications et les conditions d'exercice de cette responsabilité.
Sur le fond, les membres du groupe communiste républicain et citoyen s'opposent également au système proposé. Le constat que nous faisons est certes le même : l'inégalité des citoyens devant les équipements informatiques en raison du sous-équipement de certaines régions françaises. Pourtant, la solution proposée - je l'ai dit dans mon intervention liminaire est en total décalage avec notre conception de l'Internet pour tous ! En effet, la solution à la fracture numérique qui est proposée dans cet article - et qui n'est pas remise en cause par les amendements adoptés tant en commission des lois qu'en commission des affaires économiques - vise à permettre aux collectivités territoriales d'être opérateurs de télécommunications à condition de ne pas gêner les opérateurs privés.
Outre le fait que cette disposition ne sera pas de nature à inciter Bouygues Télécom, Vivendi, ou même France Télécom, à investir dans ces zones non rentables, ou sinon sur un plan qualitatif moindre, elle traduit les errements de la politique du Gouvernement dans le domaine des services publics.
En effet, rappelons-nous qu'il existait historiquement un opérateur public de télécommunication qui s'intégrait parfaitement dans une politique d'aménagement du territoire. La privatisation de France Télécom a créé un vide dès lors que l'ensemble des opérateurs privés ne veulent pas investir ni s'investir dans les zones non rentables. Ce déficit ne peut être comblé que par les collectivités locales, chargées de suppléer les carences de l'initiative privée, faisant ainsi peser sur le contribuable local les frais d'installation des infrastructures.
Plus encore, le texte adopté par l'Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement ne permet pas l'application du principe de péréquation puisque les collectivités locales ne pourront pas compenser les pertes liées à des investissements coûteux en s'investissant dans des secteurs rentables, qui leur seront interdits, sous peine d'être suspectées de fausser la concurrence.
Vous prétendez encourager le développement du haut débit sur l'ensemble du territoire, mais, avec ce texte, l'équipement des collectivités locales dépendra de leur richesse. C'est ainsi l'inégalité des citoyens devant l'Internet, l'inégalité des territoires, de leur attractivité économique qui seront instituées.
Vous comprendrez, dans ces conditions, que les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen vous demandent de supprimer cet article en votant leur amendement. Si tel n'était pas le cas, comme nous sommes évidemment en mesure de le craindre, nous souhaiterions, à tout le moins, et en toute logique, que le pouvoir de péréquation puisse jouer à plein et permettre aux collectivités locales de s'investir, y compris en concurrence avec les opérateurs privés. C'est d'ailleurs ce que nous aurions dû pouvoir réaliser avec le maintien d'un opérateur public qui aurait pu assurer cette péréquation à l'échelon national.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 11 est présenté par MM. Hérisson et Sido, au nom de la commission des affaires économiques.
L'amendement n° 47 est présenté par M. Türk, au nom de la commission des lois.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Rédiger comme suit le texte proposé par le II de cet article pour insérer un article L. 1425-1 dans le code général des collectivités territoriales :
« Art. L. 1425-1. - I. - Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent, deux mois au moins après la publication de leur projet dans un journal d'annonces légales et sa transmission à l'Autorité de régulation des télécommunications, établir des réseaux de télécommunications ouverts au public au sens du 3° de l'article L. 32 du code des postes et télécommunications, acquérir des droits d'usage à cette fin ou acheter des réseaux existants, à condition de veiller à la cohérence des réseaux présents sur leur territoire, de garantir l'utilisation partagée des infrastructures et de ne pas entraver le développement de la concurrence.
« Dans les mêmes conditions qu'à l'alinéa précédent, les collectivités territoriales et leurs groupements ne peuvent exercer une activité d'opérateur de télécommunications au sens du 15° de l'article L. 32 du code des postes et télécommunications qu'après avoir constaté une insuffisance d'initiatives privées propres à satisfaire les besoins des utilisateurs et en avoir informé l'Autorité de régulation des télécommunications.
« II. - Lorsqu'ils exercent une activité d'opérateur de télécommunications, les collectivités territoriales et leurs groupements sont soumis à l'ensemble des droits et obligations régissant cette activité.
« Une même personne morale ne peut à la fois exercer une activité d'opérateur de télécommunications et être chargée de l'octroi des droits de passage destinés à permettre l'établissement de réseaux de télécommunications ouverts au public.
« Les dépenses et les recettes afférentes à l'établissement de réseaux de télécommunications ouverts au public et à l'exercice d'une activité d'opérateur de télécommunications par les collectivités territoriales et leurs groupements sont retracées au sein d'une comptabilité distincte.
« III. - L'Autorité de régulation des télécommunications est saisie, dans les conditions définies à l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications, de tout différend relatif aux conditions techniques et tarifaires d'exercice d'une activité d'opérateur de télécommunications ou d'établissement, de mise à disposition ou de partage des réseaux et infrastructures de télécommunications visés au I.
« Les collectivités territoriales, leurs groupements et les opérateurs de télécommunications concernés lui fournissent, à sa demande, les conditions techniques et tarifaires faisant l'objet du différend, ainsi que la comptabilité retraçant les dépenses et les recettes afférentes aux activités exercées en application du présent article.
« IV. - Quand les conditions économiques ne permettent pas la rentabilité de l'établissement de réseaux de télécommunications ouverts au public ou d'une activité d'opérateur de télécommunications, les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent mettre leurs infrastructures ou réseaux de télécommunications à disposition des opérateurs à un prix inférieur au coût de revient, selon des modalités transparentes et non discriminatoires, ou compenser des obligations de service public par des subventions accordées dans le cadre d'une délégation de service public ou d'un marché public.
« V. - Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas à l'établissement et à l'exploitation des réseaux mentionnés à l'article 34 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.
« Sur de tels réseaux, les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent fournir tout type de services de télécommunications dans les conditions définies aux articles L. 34-1, L. 34-2 et L. 34-4 du code des postes et télécommunications. »
L'amendement n° 11 est assorti de six sous-amendements.
Les deux premiers sont identiques.
Le sous-amendement n° 128 rectifié est présenté par M. Nogrix.
Le sous-amendement n° 198 est présenté par MM. Le Grand, Pépin, du Luart, Puech, Vasselle et Fouché.
Ces sous-amendements sont ainsi libellés :
« I. - Après le mot : "établir", rédiger comme suit la fin du premier alinéa du I du texte proposé par l'amendement n° 11 pour l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales : "et exploiter des réseaux de télécommunications ouverts au public au sens du 3° et du 15° de l'article L. 32 du code des postes et télécommunications, acquérir des droits d'usage à cette fin ou acheter des réseaux existants. L'intervention des collectivités doit veiller, dans l'intérêt général, à la cohérence des réseaux d'initiative publique sur leur territoire, garantir l'utilisation partagée des infrastructures établies ou acquises en application du présent article et ne pas entraver le développement de la concurrence".
« II. - Au deuxième alinéa du même texte, remplacer les mots : "exercer une activité d'opérateur de télécommunications au sens du 15° de l'article L. 32 du code des postes et télécommunications" par les mots : "fournir des services de télécommunications au public". »
Le sous-amendement n° 213, présenté par MM. P. Blanc et Alduy, est ainsi libellé :
« I. - Dans le premier alinéa du I du texte proposé par l'amendement n° 11 pour l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, après les mots : "ou acheter des réseaux existants," insérer les mots : "et exercer une activité d'opérateur de télécommunication au sens du 15° de l'article L. 32 du code des postes et télécommunications".
« II. - En conséquence, supprimer le second alinéa du I du texte proposé par l'amendement n° 11 pour l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales. »
Le sous-amendement n° 214, présenté par MM. P. Blanc et Alduy, est ainsi libellé :
« Dans le second alinéa du I du texte proposé par l'amendement n° 11 pour l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, remplacer les mots : "les besoins des utilisateurs" par les mots : "leurs projets". »
Le sous-amendement n° 166, présenté par MM. Trémel, Raoul et Teston, Mme Pourtaud, M. Weber et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Dans le second alinéa du I du texte proposé par l'amendement n° 11 pour l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, après les mots : "les besoins des utilisateurs", insérer les mots : "à un coût proche des coûts moyens du marché". »
Le sous-amendement n° 167 rectifié, présenté par MM. Trémel, Raoul et Teston, Mme Pourtaud, M. Weber et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Compléter in fine le IV du texte proposé par l'amendement n° 11 pour l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales par une phrase ainsi rédigée : "Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application de cetalinéa". »
La parole est à M. Bruno Sido, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 11.
M. Bruno Sido, rapporteur. L'article 1er A adopté par l'Assemblée nationale sur l'initiative du Gouvernement se fait l'écho d'une large demande des collectivités locales d'être autorisées à intervenir dans le secteur des télécommunications, notamment dans les zones où aucune offre d'accès à l'Internet à haut débit n'est disponible à brève échéance.
Ce texte autorise les collectivités territoriales à établir ou à acquérir des réseaux de télécommunications, mais aussi à devenir « opérateurs de télécommunications » et à exploiter ces réseaux sous la seule condition d'une consultation publique préalable.
Le même dispositif leur accorde la possibilité d'être opérateur de télécommunications proposant la fourniture de services au public, sous la condition d'une consultation préalable révélant une insuffisance d'initiatives privées propres à satisfaire les besoins des populations et des entreprises.
La commission des affaires économiques approuve bien entendu le volet du dispositif instituant une liberté d'établissement de réseaux de télécommunications pour les collectivités locales. La commission avait demandé l'instauration d'une telle liberté dès 1999. Elle ne peut donc que se féliciter de sa mise en oeuvre.
La commission est également favorable à la limitation apportée à l'offre de services de télécommunications par les collectivités locales. Dans le cadre de la libéralisation du secteur engagée sur les plans européen et national, il ne serait pas cohérent d'encourager les interventions publiques locales quand l'initiative privée est à même de satisfaire les besoins exprimés sur un territoire donné.
L'unique réserve de fond que formule la commission des affaires économiques à l'égard du dispositif retenu par l'Assemblée nationale concerne le droit à exploiter des réseaux même si l'initiative privée est à même de satisfaire ce besoin.
En effet, ce dispositif entraîne de facto l'attribution aux collectivités locales concernées du statut d'opérateur de télécommunications, alors même que la situation du marché ne le nécessite pas.
Or, si le statut d'opérateur emporte des droits, il impose aussi des devoirs.
Parmi ces devoirs, on peut citer : l'obligation de faire droit aux demandes d'interconnexion ; la soumission à la régulation de l'ART, rupture juridique non négligeable puisqu'elle soumet des collectivités publiques au droit privé ; l'obligation de contribuer au fonds de service universel des télécommunications ; enfin, ne l'oublions pas, l'engagement de dépenses de fonctionnement pouvant être considérable pendant de nombreuses années. J'ai d'autres arguments en réserve.
Au vu de tels effets, peut-on oublier l'impasse à laquelle a mené le plan câble ? Est-ce vraiment servir l'aménagement du territoire que d'inviter les collectivités à payer « l'accès au haut débit pour tous » quand le marché peut y pourvoir ? N'est-ce pas prendre le risque de perturber ce marché dans les zones les plus prospères déjà couvertes par l'initiative privée ? N'est-ce pas favoriser un cumul de charges dans les zones les moins riches, à l'inverse de la logique péréquatrice de l'aménagement du territoire ? N'est-ce pas également favoriser une forme de cartellisation du secteur des télécomnications comme on en connaît dans d'autres domaines, par exemple l'eau ou les ordures ménagères ?
Aussi, dans un esprit de prudence dicté par ces questions, la commission des affaires économiques vous propose d'attribuer une grande marge de manoeuvre aux collectivités locales dans l'établissement des réseaux, tout en les protégeant mieux dans l'exercice des fonctions d'opérateur, que celles-ci concernent l'exploitation de réseau ou la fourniture de services.
L'économie générale de l'amendement n° 11 repose sur la distinction entre l'établissement du réseau et l'activité d'opérateur proprement dite.
Le dispositif s'articule de la façon suivante : toute collectivité locale est libre d'établir un réseau de communication ou d'acheter un réseau existant si elle a publié le projet adopté par son organe délibérant dans un journal d'annonces légales pendant deux mois. Elle doit simplement veiller à la cohérence des réseaux présents sur son territoire, garantir l'utilisation partagée des infrastructures et ne pas entraver le développement de la concurrence ; en revanche, pour exercer une activité d'opérateur, exploiter un réseau ou fournir des services, selon la définition du code des postes et télécommunications, la collectivité locale doit respecter les mêmes conditions de forme et de fond que celles qui sont nécessaires pour établir un réseau.
Mais elle doit en plus avoir constaté une insuffisance des initiatives privées propres à satisfaire les besoins des utilisateurs et en avoir informé l'ART. Ce rétablissement du constat de carence - encore que le mot soit quelque peu tabou -, uniquement pour l'exploitation et la fourniture de services vise à protéger, d'une part, les collectivités locales d'investissements excessifs - risque économique - et, d'autre part, l'équilibre du marché des télécommunications. Ce constat pourra, par exemple, être rétabli après un appel d'offres infructueux.
Tel est l'essentiel du dispositif que la commission des affaires économiques vous demande d'adopter.
M. le président. La parole est à M. Pierre Hérisson, rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Je crois qu'il m'appartient, pour avoir un peu plus d'ancienneté dans cette enceinte que notre jeune et brillant collègue Bruno Sido, de rappeler le rôle du Sénat dans le travail législatif permettant d'assurer une protection aux collectivités locales et territoriales.
Je me souviens avoir été de ceux avec Gérard Larcher à avoir souligné haut et fort les limites de l'UMTS.
M. Gérard Larcher. Nous n'avons pas été entendus !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Constatez, aujourd'hui, ce qui s'est passé ! Ce que nous avons dit pour l'UMTS, nous le redisons : il faut savoir raison garder. Il suffit de regarder la situation des opérateurs selon qu'ils sont allés à l'UMTS d'une manière volontariste ou un peu contraints et forcés et, sans le nommer, de rappeler que l'un des opérateurs alternatifs n'a pas cru devoir s'engager dans l'UMTS. Quelle est aujourd'hui sa situation financière ?
Cet amendement contient donc les moyens de protéger les collectivités locales, et certains diront « contre elles-mêmes ». Mais le Sénat, qui est très largement engagé depuis le vote de la loi sur les télécommunications en 1996, entend rappeler que, si la loi offre aux collectivités locales des possibilités pour pallier les insuffisances, pour assurer la cohérence et la solidarité sur le plan de l'aménagement du territoire, celles-ci n'ont pas vocation à devenir des opérateurs de télécommunications.
Qui plus est, si elles deviennent des opérateurs de télécommunications, ces collectivités seront amenées à utiliser l'argent public pour contribuer au fonctionnement du service universel. Il faut le dire.
M. Pierre-Yvon Trémel. Très bien !
M. le président. Le sous-amendement n° 128 réctifié n'est pas soutenu.
La parole est à M. Jean-François Le Grand, pour présenter le sous-amendement n° 198.
M. Jean-François Le Grand. J'ai écouté avec un grand intérêt les interventions très convaincantes et très argumentées des deux rapporteurs. J'abonde tout à fait dans leur sens, mais j'avais l'impression que, en arrière-plan, se dessinait déjà mon sous-amendement n° 198, et qu'ils anticipaient en quelque sorte leur réponse, ayant une certaine réticence à accepter un sous-amendement à l'amendement n° 11. Ils n'ont peut-être pas lu attentivement mon sous-amendement parce que, s'ils l'avaient fait, ils continueraient de penser que j'ai raison.
Je détaillerai le sous-amendement n° 198 sur trois points.
Premier point ; il vise à remplacer les mots « établir des réseaux » par l'expression « établir et exploiter des réseaux ». « Etablir », c'est créer, c'est acheter, c'est louer. « Exploiter », c'est maintenir ou commercialiser des réseaux. Ce n'est absolument pas se transformer en opérateur et devenir le concurrent d'un grand opérateur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Il faut réfléchir autrement !
M. Jean-François Le Grand. Non, monsieur Hérisson. La signification des termes doit être claire.
Deuxième point, mon sous-amendement précise que « l'intervention des collectivités doit veiller, dans l'intérêt général, à la cohérence des réseaux d'initiative publique sur leur territoire... » L'ensemble des cosignataires de ce sous-amendement, qui sont pour la plupart, cela ne vous aura pas échappé, des présidents de conseils généraux, et qui sont donc confrontés à ce type de difficultés, ont en effet préféré cette formulation à celle de l'amendement n° 11, selon lequel « Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent (...) établir des réseaux de télécommunications (...), à condition de veiller à la cohérence des réseaux présents sur leurs territoire (...) ».
Là aussi se situe un enjeu majeur. Si l'on retenait la formulation de l'amendement n° 11, cela signifierait qu'on ne serait contraint de financer ou d'améliorer que des réseaux déjà existants, et, dès lors, on écarterait toute possibilité de concurrence.
Je rappelle que, lorsque France Télécom, pour ne citer que lui, intervient, il s'agit de la bande passante. Il ne s'agit pas du tout d'aller au-delà. Or, si l'on s'en tient à cet esprit de concurrence et si l'on essaie d'améliorer ce seul point, on se trompe puisqu'on entre dans un système à passage obligé. Il n'y a donc pas de concurrence, auquel cas, effectivement, les prix ne peuvent être compétitifs.
Je suis intervenu lors de la discussion générale sur la notion de coût, qui est aussi un élément de différenciation territoriale. J'ai entendu cette réflexion, que nous avons tous entendue, à maintes reprises : « Mais pourquoi déployez-vous des infrastructures alors que nous sommes là ? » Comme je viens de vous le dire, les opérateurs sont là, mais ils ne louent que de la bande passante et non pas de la fibre noire. Cela signifie qu'ils maîtrisent le marché. Ils ont donc une absolue maîtrise du prix.
C'est un problème fondamental. Il ne s'agit pas du tout de concurrencer France Télécom, Télécom Développement ou d'autres opérateurs ; il s'agit simplement de favoriser la mise en concurrence dans les meilleures conditions, de manière que le facteur coût ne soit plus un élément de discrimination territoriale, mais qu'il participe de cet enjeu de différenciation territoriale que j'évoquais tout à l'heure.
Troisième point, mon sous-amendement vise, au deuxième alinéa de l'amendement n° 11, à remplacer les mots : « exercer une activité d'opérateur de télécommunications au sens du 15° de l'article L. 32 du code des postes et télécommunications » par les mots : « fournir des services de télécommunications au public ». Lorsqu'il y a une carence totale, il est tout de même nécessaire que nous intervenions !
Je prendrai l'exemple d'un département voisin du mien, le Calvados, qui vient de procéder exactement de cette manière : il y avait carence, il a fourni des services de télécommunications et a donc associé cohérence et concurrence.
Je me réserve la possibilité de revenir sur ce point en explication de vote dans la mesure où je n'aurais pas été suffisamment convaincant.
En conclusion, je voudrais tout de même rappeler que, lorsque nous faisons jouer la concurrence, nous entraînons une amélioration réelle des niveaux de service et une baisse des coûts. Cependant cette amélioration réelle des niveaux de service est aussi un enjeu de différenciation territoriale ! Nous ne devons pas être condamnés à n'avoir qu'un seul niveau !
M. Paul Blanc. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Paul Blanc, pour présenter les sous-amendements n°s 213 et 214.
M. Paul Blanc. Mon sous-amendement n° 213 va tout à fait dans le sens de celui que vient de présenter Jean-François Le Grand, voire un peu plus loin. Il a pour objet de permettre aux collectivités territoriales et à leurs groupements d'exercer une activité d'opérateur de télécommunications sans fausser la concurrence, mais sans avoir à justifier d'une insuffisance d'initiatives privées.
Une telle obligation, déjà supprimée par le Sénat en 1999 et en 2001 au motif que sa portée juridique était incertaine, serait en effet source de contentieux innombrables et paralyserait l'action des collectivités territoriales.
Il importe, dans le droit fil des conclusions des comités interministériels pour l'aménagement et le développement du territoire de juillet 2001 et de décembre 2002, de donner enfin aux collectivités territoriales les moyens de réduire la fracture numérique dont souffre le territoire national. Ce rôle incombe au premier chef à l'Etat ; il revenait également à l'opérateur historique, France Télécom. Force est de constater qu'il reste mal exercé. Une fois de plus, les collectivités territoriales sont sollicitées pour permettre aux populations, mais également aux entreprises, d'avoir accès au haut débit. Elles sont prêtes à assumer cette lourde charge financière, encore faut-il leur en donner les moyens juridiques. En effet, mes chers collègues, il ne servirait à rien de permettre aux collectivités territoriales d'investir dans des réseaux si, ensuite, il n'y avait pas d'exploitation possible !
En outre, je m'étonne que l'on puisse affirmer que l'Etat se désengage totalement. Cela est faux, puisque des fonds sont disponibles, en particulier par le biais du Fonds national d'aménagement et de développement du territoire, le FNADT.
Par ailleurs, comme nous l'avons constaté à l'occasion de la modification du document public concernant la région Languedoc-Roussillon, l'Europe accepte aujourd'hui, au titre de l'objectif 2, que les collectivités locales investissent dans le haut débit.
C'est pourquoi je ne comprendrais pas que l'on n'autorise pas les collectivités locales, qui sont gérées par des gens responsables, à s'engager dans cette voie. Il ne s'agit pas d'investir des sommes considérables. L'un de nos collègues indiquait tout à l'heure qu'il convenait d'avoir une vision très élargie des technologies. Il existe effectivement, à l'heure actuelle, de nombreux moyens, tels que la fibre optique, le wi-fi ou le satellite, permettant aux collectivités territoriales de taille modeste d'accéder au haut débit. Ne pas leur accorder l'autorisation d'exploiter reviendrait à leur couper les ailes.
En ce qui me concerne, je représente un territoire qui, par malchance, comporte une zone noire en matière de haut débit et une zone blanche en matière de téléphonie mobile ! Si les collectivités locales ne peuvent intervenir, nous resterons totalement dans l'ombre !
A cet égard, je rappelle que si les collectivités territoriales n'avaient pas contribué aux investissements dans le domaine de la télévision analogique, des zones d'ombre subsisteraient. Il en existe d'ailleurs encore dans mon département pour La Cinq et pour M 6, car nous n'avons pu aboutir à un accord avec les chaînes privées sur un financement permettant de couvrir l'ensemble de notre territoire.
S'agissant de la comparaison avec les réseaux câblés, la grande erreur des responsables de ceux-ci a été, à mon avis, de lancer le plan câble tout en diffusant par satellite, dans le même temps, une chaîne codée, à savoir Canal Plus. Cela revenait à saper le plan câble à la base. Il ne faut donc pas comparer ce qui n'est pas comparable. C'est la raison pour laquelle j'ai déposé le sous-amendement n° 213, mais je voterai, bien entendu, le sous-amendement n° 198 de notre collègue Jean-François Le Grand. Si le Sénat l'adopte, je serai satisfait. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
En ce qui concerne le sous-amendement n° 214, il s'agit d'une proposition de repli.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour défendre le sous-amendement n° 166.
M. Daniel Raoul. La commission des affaires économiques prévoit que, pour pouvoir exercer une activité d'opérateur, les collectivités locales devront avoir constaté une insuffisance de l'initiative privée propre à satisfaire les besoins des utilisateurs. Cependant, le problème est de savoir comment l'on qualifie ou l'on justifie l'insuffisance de l'initiative privée.
Le sous-amendement n° 166 a précisément pour objet de qualifier cette insuffisance. La rédaction proposée par la commission sera à mon sens source d'une grande insécurité juridique, et l'on pourrait aussi établir une définition de l'insuffisance au regard de la qualité.
Nous posons la question suivante à Mme la ministre : quelle différence exacte fait-elle, dans son interprétation, entre insuffisance et carence de l'initiative privée ?
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel, pour défendre le sous-amendement n° 167 rectifié.
M. Pierre-Yvon Trémel. Le IV de l'amendement n° 11 de la commission des affaires économiques tend à réintroduire des possibilités, pour les collectivités locales, d'accorder des subventions sous certaines conditions.
Or il nous paraît nécessaire de renvoyer à un décret en Conseil d'Etat la définition des conditions d'application de cette disposition, dans le respect du droit actuel, afin que les collectivités territoriales qui s'engageront dans une telle démarche le fassent avec la plus grande sécurité juridique possible.
En effet, les subventions et les tarifs minorés s'apparentent à des aides directes ou indirectes aux entreprises. Seront-ils acceptés au regard de la législation européenne ? N'y a-t-il pas des risques de contentieux ? Les opérateurs, par exemple, ne contesteront-ils pas devant les tribunaux l'octroi de tels subventions ou tarifs ?
En outre, nous voulons rappeler ici que les collectivités locales n'ont pas, pour l'heure, usé de cette faculté qui leur était déjà ouverte par le droit, parce qu'elles attendaient la parution d'un décret d'application qui n'est pas intervenue. Les associations d'élus ont fortement insisté pour que ce décret soit publié, et il nous semble que les responsables des collectivités territoriales ont en effet besoin de savoir comment est calculé un prix inférieur au coût de revient, dans quelles zones et dans quels cas ils pourront faire jouer les aides prévues. Nous croyons donc indispensable qu'un tel décret soit pris en Conseil d'Etat.
M. le président. La parole est à M. Alex Türk, rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 47.
M. Alex Türk, rapporteur pour avis. Cet amendement est identique à l'amendement n° 11.
M. le président. L'amendement n° 101 rectifié, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le texte proposé par le II de cet article pour insérer un article L. 1425-1 dans le code général des collectivités territoriales :
« Art. L. 1425-1. - I. - Les collectivités territoriales, ou leurs groupements ayant bénéficié d'un transfert de compétence à cet effet, peuvent établir, acheter et acquérir les droits d'usage des réseaux de télécommunications ouverts au public au sens du 3° et du 15° de l'article L. 32 du code des postes et télécommunications. Pour exploiter ces réseaux, les collectivités territoriales et leurs groupements doivent avoir procédé à une consultation destinée à identifier les offres existantes et avoir constaté une insuffisance des initiatives privées propres à satisfaire les besoins des utilisateurs.
« II. - Dans le cadre de l'exercice de leurs activités d'opérateurs de télécommunications, au sens du 15° de l'article L. 32 du code des postes et télécommunications, les collectivités locales et leurs groupements sont soumis à l'ensemble des droits et obligations régissant cette activité.
« L'établissement et l'exploitation des réseaux de télécommunications prévus au I de cet article font l'objet d'une comptabilité distincte retraçant les dépenses et les recettes afférentes à ces activités.
« Une séparation effective entre ces activités et la fonction de responsable de l'octroi des droits de passage destinés à permettre l'établissement de réseaux et de télécommunications doit être garantie.
« III. - L'Autorité de régulation des télécommunications peut être saisie par les collectivités locales, leurs groupements, ou l'exploitant choisi dans les conditions fixées par l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications, des différends relatifs aux conditions techniques et paritaires de mise à disposition. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 132, présenté par M. Trégouët, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le texte proposé par le II de cet article pour insérer un article L. 1425-1 dans le code général des collectivités territoriales :
« Art. L. 1425-1. - I. - Après avoir réalisé une information publique d'une durée minimale de deux mois, consistant au minimum en une publication dans un journal d'annonces légales et destinée à expliciter la réponse apportée par le projet aux besoins des acteurs présents sur le territoire de la collectivité concernée, les collectivités territoriales, ou leurs groupements, peuvent établir et exploiter des réseaux de télécommunications ouverts au public au sens du 3° et du 15° de l'article L. 32 du code des postes et télécommunications, acquérir des droits d'usage pour la constitution de tels réseaux, ou acheter des réseaux existants dès lors qu'ils contribuent à la réalisation de leurs projets. L'intervention des collectivités doit promouvoir la concurrence et l'utilisation partagée des infrastructures établies ou acquises en application du présent article.
« Les collectivités territoriales et leurs groupements ne peuvent fournir des services de télécommunications aux utilisateurs finals qu'après avoir procédé à une consultation révélant une insuffisance d'initiatives privées propres à satisfaire les besoins des acteurs présents sur le territoire de la collectivité.
« Le représentant de l'Etat ou les collectivités territoriales ou leurs groupements ayant l'intention d'exercer les activités visées aux deux alinéas précédents peuvent saisir l'Autorité de régulation des télécommunications qui émettra, dans un délai d'un mois après réception des informations qu'elle aura le cas échéant sollicitées de la part des collectivités territoriales, ou de leurs groupements, maître d'ouvrage, un avis sur le projet et ses modalités d'exécution, notamment au regard de l'exercice d'une concurrence saine et loyale sur le marché local des télécommunications.
« II. - Dans le cadre de l'exercice de leurs activités d'opérateurs de télécommunications, les collectivités territoriales et leurs groupements sont soumis à l'ensemble des droits et obligations régissant l'activité d'opérateurs de télécommunications, en application dudit code.
« L'établissement et l'exploitation des réseaux de télécommunications au titre du présent article devront faire l'objet d'une comptabilité distincte retraçant les dépenses et les recettes afférentes à ces activités. Une séparation structurelle effective entre ces activités et la fonction responsable de l'octroi des autorisations d'occupation de leurs domaines publics ou privés destinées à permettre l'établissement de réseaux de télécommunications ouverts au public est instituée.
« III. - Les collectivités territoriales ou leurs groupements, ainsi que tout opérateur concerné, peuvent saisir, dans les conditions fixées à l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications, l'Autorité de régulation des télécommunications des différends relatifs aux conditions techniques et tarifaires d'établissement, de mise à disposition et de partage des infrastructures mentionnées au premier alinéa du I.
« Les collectivités locales, leurs groupements, ou les exploitants de réseaux établis ou acquis en vertu du présent article sont tenus de transmettre à l'Autorité de régulation des télécommunications, sur sa demande, les conditions techniques et tarifaires mentionnées à l'alinéa précédent, ainsi que la comptabilité retraçant les dépenses et recettes afférentes aux activités qu'elles exercent en vertu du présent article.
« IV. - Quand les conditions économiques ne permettent pas la rentabilité de l'établissement de réseaux de télécommunications ouverts au public ou d'une activité d'opérateur de télécommunications, les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent mettre leurs infrastructures ou réseaux de télécommunications à disposition des opérateurs à un prix inférieur au coût de revient, selon des modalités transparentes et non discriminatoires, ou compenser des obligations de service public par des subventions accordées dans le cadre d'une délégation de service public ou d'un marché public.
« V. - Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux réseaux établis ou exploités, par des collectivités locales ou leurs groupements, en application de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.
« Sur de tels réseaux, les collectivités locales ou leurs groupements peuvent fournir tout type de service de télécommunications, dans les conditions définies par les articles L. 34-1 et L. 34-2 du code des postes et télécommunications.
« VI. - Les collectivités territoriales et leurs groupements ayant pris la décision de créer une infrastructure destinée à supporter des réseaux de télécommunications en application de l'article L. 1511-6, antérieurement à la prise d'effet du présent article, peuvent décider, sans nouvelle mesure de publicité, de bénéficier des dispositions du premier alinéa du I. »
La parole est à M. René Trégouët.
M. René Trégouët. Je me rallie tout à fait à l'argumentation qu'a développée voilà quelques minutes notre collègue Jean-François Le Grand, et je retire donc mon amendement. Je crois qu'il faut en effet en laisser l'initiative aux collectivités territoriales.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 132 est retiré.
L'amendement n° 12, présenté par MM. Hérisson et Sido, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
« Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... L'article L. 4424-6-1 du code général des collectivités territoriales est abrogé. »
La parole est à M. Bruno Sido, rapporteur.
M. Bruno Sido, rapporteur. Cet amendement vise à tirer la conséquence de l'abrogation de l'article L. 1511-6 pour l'article L. 4424-6-1 du code général des collectivités territoriales. Celui-ci disposait que le territoire de la collectivité territoriale de Corse était inclus dans les zones géographiques pour lesquelles l'article 1511-6 ouvrait la possibilité d'octroyer des subventions publiques venant en déduction des loyers de mise à disposition des opérateurs des infrastructures de télécommunications.
L'abrogation de l'article 1511-6 du code général des collectivités territoriales et l'absence de référence à tout « zonage » à l'article L. 1425-1 imposent donc de supprimer l'article L. 4424-6-1 du même code.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 13 est présenté par MM. Hérisson et Sido, au nom de la commission des affaires économiques.
L'amendement n° 48 est présenté par M. Türk, au nom de la commission des lois.
Tous deux sont ainsi libellés :
« Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... Les infrastructures destinées à supporter des réseaux de télécommunications créées par les collectivités territoriales en application de l'article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales sont réputées avoir été créées dans les conditions prévues à l'article L. 1425-1 du même code. »
L'amendement n° 13 est assorti de deux sous-amendements.
Le sous-amendement n° 199, présenté par MM. Le Grand, Pépin, du Luart, Puech, Vasselle et Fouché, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par l'amendement n° 13 pour compléter l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, remplacer les mots : "Les infrastructures destinées à supporter des réseaux de télécommunications créées par les collectivités territoriales en application de l'article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales sont réputées avoir été créées" par les mots : "Les infrastructures destinées à supporter des réseaux de télécommunications que les collectivités territoriales ou leurs groupements ont pris la décision de créer en application de l'article L. 1511-6 sont réputées établies". »
Le sous-amendement n° 142 rectifié, présenté par M. C. Gaudin et les membres du groupe de l'Union centriste, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par l'amendement n° 13, après les mots : "article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales", insérer les mots : ", ainsi que les projets de construction de telles infrastructures dont la consultation publique est achevée à la date d'entrée en vigueur de l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales,". »
La parole est à M. Bruno Sido, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 13.
M. Bruno Sido, rapporteur. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Le Grand, pour présenter le sous-amendement n° 199.
M. Jean-François Le Grand. Il s'agit de réparer un oubli en visant les collectivités et leurs groupements. C'est une demande émanant de l'Association des départements de France.
M. le président. La parole est à M. Christian Gaudin, pour présenter le sous-amendement n° 142 rectifié.
M. Christian Gaudin. Ce sous-amendement a pour objet de lever une contrainte que la rédaction actuelle du texte fait peser sur les collectivités. Celles-ci seraient en effet obligées, si le texte restait en l'état, de relancer une nouvelle procédure de consultation publique alors même qu'elles auraient déjà, dans certains cas, passé les marchés publics de travaux nécessaires à la construction de l'équipement, ce qui les exposerait à des contentieux problématiques.
M. le président. La parole est à M. Alex Turk, rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 48.
M. Alex Turk, rapporteur pour avis. Cet amendement est identique à l'amendement n° 13.
M. le président. L'amendement n° 102, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
« Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... Les infrastructures destinées à supporter des réseaux de télécommunications créées par les collectivités territoriales, en application de l'article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales, ou dont la création a été décidée par elles en application de cet article, avant l'entrée en vigueur de l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, sont réputées avoir été créées dans les conditions prévues à l'article L. 1425-1 du même code. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 14, présenté par MM. Hérisson et Sido, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
« Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... Le II de l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° Les conditions techniques et tarifaires d'exercice d'une activité d'opérateur de télécommunications ou d'établissement, de mise à disposition ou de partage des réseaux et infrastructures de télécommunications visés à l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales. »
La parole est à M. Bruno Sido, rapporteur.
M. Bruno Sido, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination, qui vise à compléter l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications, lequel définit le périmètre des différends dont le règlement relève de l'ART. Il s'agit d'inscrire à cet article les conditions techniques et tarifaires d'exercice d'une activité d'opérateur de télécommunications visées à l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales.
M. le président. L'amendement n° 49, présenté par M. Türk, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... Le II de l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° Les conditions techniques et tarifaires d'établissement, d'exploitation, de mise à disposition et de partage des réseaux et infrastructures de télécommunications visés à l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales. »
La parole est à M. Alex Türk, rapporteur pour avis.
M. Alex Turk, rapporteur pour avis. Cet amendement est quasiment identique à l'amendement n° 14.
M. le président. L'amendement n° 98, présenté par M. Le Grand, est ainsi libellé :
« Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... Après l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Dans le cadre de commandes publiques, les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération locale concernés peuvent introduire des critères d'aménagement du territoire et de développement économique parmi les critères de choix des candidats. Dès lors, les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération locale peuvent manifester explicitement leur préférence pour la technologie la plus adéquate au regard de ces critères. »
La parole est à M. Jean-François Le Grand.
M. Jean-François Le Grand. De la même manière qu'une collectivité fait un choix technologique quand elle établit et exploite un réseau de télécommunications ou quand, dans certains cas, elle devient opératrice, une collectivité doit pouvoir intégrer dans une commande publique correspondant à ses besoins propres la prise en compte d'un objectif d'aménagement du territoire. Par conséquent, elle doit pouvoir définir les technologies qui répondent le mieux, d'une part, à ses besoins propres et, d'autre part, à l'établissement d'offres de services haut débit sur le territoire concerné.
Lors de la discussion générale, j'ai expliqué ce qu'était le problème de la neutralité technologique. A cet égard, les choses ont évolué, et il serait bon, à mon sens, que la Haute Assemblée adopte un tel amendement, de manière à simplifier la situation. Cela n'aboutirait pas à une restriction en matière d'appel d'offres ni au regard des opérateurs pouvant intervenir ultérieurement.
Dès lors que le choix des technologies est fait uniquement en considération d'objectifs d'aménagement du territoire, on obtiendra un certain nombre de réponses, qui permettront le jeu de la concurrence. La situation n'est plus du tout la même qu'à l'époque où, dans un secteur en pleine évolution, les opérateurs étaient très peu nombreux pour chaque technologie.
M. Paul Blanc. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Paul Blanc.
M. Paul Blanc. Je tiens à revenir sur mon sous-amendement n° 214.
Quel était son objet ?
La commission des affaires économiques et la commission des lois proposant de subordonner l'exercice d'une activité d'opérateur de télécommunications par une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales au constat d'une insuffisance de l'initiative privée, je voulais préciser, par ce sous-amendement, par qui et comment ce constat de carence devait être établi. Il faudrait pour le moins qu'il le soit en fonction d'un projet présenté par la collectivité territoriale concernée. Sinon, il le sera en fonction des propositions que formulera tel ou tel opérateur et qui, en réalité, ne relèvent pas du haut débit, ni même du moyen débit.
M. le président. Quel est l'avis de la commission.
M. Bruno Sido, rapporteur. La discussion a été très riche ; je comprends très bien les arguments avancés par nos collègues, mais il convient de remettre les choses à plat, sans aucune schizophrénie. (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.)
L'amendement n° 148 de Mme Terrade va à l'encontre de la position de la commission des affaires économiques, qui souhaite que les conditions d'intervention des collectivités territoriales dans le secteur des télécommunications soient fixées sans tarder. Il n'est donc pas possible de repousser l'examen du futur projet de loi sur le « paquet télécoms » à l'établissement de ce régime, qui est attendu par beaucoup d'acteurs.
S'agissant du sous-amendement n° 198, si M. Le Grand s'est montré tout à fait convaincant, il a peu parlé d'exploitation de réseaux. Il s'agit d'un problème de position du curseur. M. le président de la commission des affaires économiques a même évoqué un « Rubicon juridique ».
Cela étant, aux termes de la loi, on devient opérateur à partir du moment où l'on va au-delà de l'installation d'une infrastructure. Un tout début d'exploitation suffit. Nous n'interdisons nullement aux collectivités territoriales de devenir des opérateurs. Nous ne prévoyons même pas, par l'amendement n° 11, qu'un constat de carence sera nécessaire : il suffira d'un appel d'offres infructueux, l'insuffisance de l'offre pouvant être d'ordre technologique ou tenir aux niveaux de prix proposés. Certes, on m'objectera que la carence est une notion plus juridique que l'insuffisance, mais une jurisprudence s'établira certainement sur ce point.
Quoi qu'il en soit, notre objectif n'est pas du tout d'empêcher les collectivités de devenir opérateurs ; il est simplement de les inciter à la prudence. M. Le Grand nous a indiqué que le sous-amendement n° 198 était soutenu par un certain nombre de présidents de conseil général, mais je lui ferai remarquer qu'un nombre au moins aussi important de présidents d'exécutif départemental ne souhaitent à aucun prix devenir opérateurs de télécommunications.
M. Paul Blanc. Ils seront libres de ne pas le vouloir !
M. Bruno Sido, rapporteur. Il s'agit non pas d'interdire à une collectivité de devenir opérateur, mais de l'engager à prendre les précautions nécessaires.
En conclusion, la commission émet un avis défavorable sur le sous-amendement n° 198.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 213, M. Paul Blanc voudrait, en quelque sorte, comparer la téléphonie mobile et le haut débit. (M. Paul Blanc s'exclame.)
Vous avez évoqué à cet égard les zones blanches et les zones noires, mon cher collègue.
Cependant, la téléphonie mobile est un marché mature, comme l'indique le rapport de la commission. Par conséquent, l'intervention des collectivités territoriales ne risque pas d'y brouiller le jeu de la nécessaire concurrence, laquelle engendre des innovations technologiques.
En revanche, le haut débit est un marché en devenir. De notre point de vue, il importe, sauf insuffisance constatée de l'offre, de ne pas interférer dans le jeu de la concurrence, non seulement entre secteur public et secteur privé, mais aussi entre opérateurs. En effet, en cas de délégation de service public, la concurrence entre ces derniers serait faussée.
La commission demande donc le retrait du sous-amendement n° 213 ; si M. Paul Blanc ne suivait pas sa préconisation, elle émettrait un avis défavorable.
La commission est également défavorable au sous-amendement n° 214.
Quant au sous-amendement n° 166, défendu par M. Trémel, il tend à préciser les modalités d'appréciation de l'insuffisance des initiatives privées à même de justifier l'exercice par les collectivités territoriales des activités d'opérateur. Il prévoit que cette insuffisance à répondre aux besoins des utilisateurs s'appréciera au regard du coût, et que ce dernier doit être proche des coûts moyens du marché. Sur le plan des principes, la précision n'apparaît pas inutile. Cependant, on peut s'interroger sur la possibilité de mettre en oeuvre aisément cette idée. Les collectivités locales disposent-elles des moyens de mener cette expertise ? Par ailleurs, les coûts moyens du marché sont-ils établis ? C'est pourquoi la commission souhaite connaître l'avis du Gouvernement.
Le sous-amendement n° 167 rectifié va dans le sens du souci de votre commission d'assurer la plus grande sécurité juridique aux collectivités locales ayant décidé d'intervenir dans le secteur des télécommunications. Il introduit une précision utile dans l'alinéa IV de l'amendement n° 11. Aussi, la commission émet un avis favorable sur ce sous-amendement.
Par ailleurs, la commission est bien sûr favorable à l'amendement n° 47.
Le sous-amendement n° 199, présenté par M. Le Grand, vise, dans l'amendement n° 13, à remplacer les mots « réputées avoir été créées » par les mots « réputées établies ». Il exprime, comme votre commission, la préoccupation d'assurer la plus grande sécurité juridique aux infrastructures de télécommunications déjà créées par les collectivités locales. Cependant, le changement de terminologie n'apporte pas une nette amélioration sur le plan juridique. Aussi, la commission demande le retrait de ce sous-amendement, sinon elle émettra un avis défavorable.
La commission est bien sûr favorable à l'amendement n° 48.
Elle est également favorable au sous-amendement n° 142 rectifié et à l'amendement n° 49.
L'amendement n° 98, présenté par M. Le Grand, apparaît anticiper les mesures devant être portées par la réforme du code des marchés publics, actuellement étudiée par le Gouvernement. Il semble, de ce fait, prématuré. La commission souhaite connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. En ce qui concerne l'amendement n° 148, le Gouvernement émet un avis défavorable. En effet, comme l'ont très bien dit MM. les rapporteurs, une clarification des compétences des collectivités est nécessaire. D'ailleurs, le débat a bien montré, si besoin était, que cette clarification est indispensable et que l'on ne peut se permettre d'attendre la transposition du « paquet télécoms ». L'article 1er A est très important. Il s'agit d'un enjeu majeur : autoriser les collectivités territoriales à intervenir dans le secteur des télécommunications.
C'est d'ailleurs pour cette raison, et parce qu'il considère que le fait de développer le haut débit est un objectif stratégique, que le Gouvernement est favorable aux amendements identiques n°s 11 et 47, sous réserve de l'adoption du sous-amendement n° 198. (M. Jean-François Le Grand exprime sa satisfaction.) Vous le constatez, monsieur Le Grand, cela commence bien. Je vous avais prévenu ! (Sourires.)
M. Adrien Gouteyron. C'est une bonne surprise !
M. Bruno Sido, rapporteur. C'est la bonne nouvelle !
M. Jean-François Le Grand. C'est une décision intelligente, madame la ministre ! Bravo !
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Merci !
Le sous-amendement n° 198 permettra aux collectivités locales d'exploiter les réseaux de télécommunications sans avoir à effectuer une consultation visant à prouver l'insuffisance d'initiative privée. A ce sujet, je voudrais d'ailleurs rappeler un point intéressant. A l'heure actuelle, il existe de nombreux projets sur le haut débit : 163 projets ont été identifiés, représentant des investissements de 2,5 milliards d'euros, et 35 projets sont d'ores et déjà opérationnels. La montée en puissance est donc intéressante.
S'agissant du sous-amendement n° 166, le Gouvernement émet un avis défavorable. M. Trémel m'a demandé quelle différence je faisais entre « carence » et « insuffisance » de l'initiative privée. La carence, c'est l'absence absolue d'offre privée, ce qui est d'ailleurs rarement le cas. L'insuffisance de l'initiative privée recouvre un concept plus large : l'offre privée peut exister, mais elle ne peut pas satisfaire les besoins. La rédaction actuelle nous offre plus de possibilités que la loi Voynet.
J'en viens au sous-amendement n° 167 rectifié. Selon le Gouvernement, un décret n'est pas nécessaire. En tout cas, ce décret - et c'est très important - ne doit pas retarder la procédure, alors que nous voulons la simplifier et l'accélérer. Néanmoins, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
S'agissant des sous-amendements n°s 213 et 214 le Gouvernement émet un avis défavorable. En revanche, il est favorable aux amendements n°s 12 et 13.
En ce qui concerne les sous-amendements n°s 199 et 142 rectifié, il s'en remet à la sagesse du Sénat.
Par ailleurs, il est favorable aux amendements n°s 48, 14 et 49.
Enfin, il émet sur avis défavorable sur l'amendement n° 98.
M. Gérard Larcher, président de la commission des affaires économiques et du Plan. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Gérard Larcher, président de la commission des affaires économiques et du Plan. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'article 1er est essentiel, en dehors d'autres aspects qui relèvent plutôt de la commission des affaires culturelles ou de la commission des lois.
Dans cet hémicycle, nul ne doute de l'attachement que la commission des affaires économiques porte à l'aménagement et au développement du territoire, notamment à l'aménagement et au développement numérique du territoire. J'ai évoqué ce point dernièrement lors du débat sur les services publics. Je suis sûr que la commission des lois veille, avec la même vigilance, sur l'exercice des libertés locales.
Nul ne peut douter de la volonté du Sénat de développer l'aménagement numérique du territoire. Dès 1999, sur l'initiative de la commission des affaires économiques, nous nous sommes prononcés en faveur de la liberté pour les collectivités locales de construire des infrastructures de télécommunications, celles que M. Jean-François Le Grand évoquait dans son intervention. L'an dernier, sur l'initiative de M. Bruno Sido, la couverture des zones blanches du territoire par la téléphonie mobile a été au coeur de nos débats.
Aussi, j'estime que, sur la question centrale posée par l'article 1er A, les commissions, le Gouvernement et les auteurs de l'amendements n° 11 et du sous-amendement n° 128 rectifié, mais aussi de l'amendement n° 132, manifestent la même volonté de favoriser l'équipement numérique du territoire.
La seule divergence d'appréciation - MM. Bruno Sido, Pierre Hérisson et Alex Türk viennent de le rappeler - porte en définitive sur un point important : si l'initiative privée peut satisfaire les besoins des utilisateurs, les collectivités locales peuvent-elles devenir opérateurs de télécommunications ?
Le texte transmis par l'Assemblée nationale répond à cette question par l'affirmative. Le sous-amendement déposé par M. Jean-François Le Grand et par quatre de nos collègues qui sont par ailleurs présidents de conseils généraux, et l'amendement de notre collègue M. René Trégouët, qui s'est rallié à la position des auteurs de ce sous-amendement, vont dans le même sens.
La commission des affaires économiques, soutenue par la commission des lois, propose, quant à elle, que les collectivités territoriales puissent devenir opérateurs de télécommunications en exploitant un réseau uniquement s'il y a insuffisance de l'initiative privée. Le fait de devenir opérateurs de télécommunications sous-entend, je le précise, exploitants et prestataires de service. Gardons bien à l'esprit ces deux aspects. Le président Gouteyron semble avoir des réflexions proches des préoccupations des deux commissions.
La différence entre ces deux positions pourrait sembler minime, mais à mes yeux, elle est importante. Elle constitue une sorte de Rubicon juridique, et avant de le franchir nous devons bien réfléchir et peser l'ensemble du problème.
En effet, si nous avons tous la volonté de développer l'aménagement numérique du territoire, devons-nous le faire à n'importe quel prix, et au risque de perturber des grands équilibres économiques et certains budgets locaux ? Souvenons-nous que ces équilibres économiques ont nourri la chronique en novembre, et ne soyons pas oublieux en juin des réalités de l'automne.
La position de vos commissions découle en effet d'un quadruple souci.
Le premier souci est d'assurer la cohérence de la politique suivie en matière de télécommunications. Peut-on à la fois conduire une libéralisation du secteur sur le plan européen et sur le plan national et favoriser, en quelque sorte, une nouvelle forme de collectivisation sur le plan local ? Voilà une vraie interrogation ! Nous estimons que non, dès lors que le marché serait à même de répondre aux besoins.
Le deuxième souci est de veiller à l'équilibre du marché des télécommunications et à la santé financière de nos opérateurs de télécommunications. En effet, si l'on autorise des collectivités locales prospères à devenir en l'absence d'insuffisance du marché opérateurs de télécommunications et à concurrencer les opérateurs privés, on rique, qu'on le veuille ou non, d'ébranler ce marché et - pourquoi ne pas le dire ? - de menacer le redressement de France Télécom, et de perturber l'équilibre d'un certain nombre d'opérateurs privés qui connaissent encore une situation difficile. Peut-on à la fois accepter que des collectivités entrent en compétition avec des opérateurs privés sur leurs marchés les plus rentables et exiger des mêmes opérateurs qu'ils investissent dans les zones les moins favorisées ? Ce parallélisme mérite réflexion. En effet, si nous voulons être exigeants vis-à-vis de ces opérateurs, nous devons nous imposer également un certain nombre de règles d'équilibre.
Le troisième souci est la protection des collectivités locales. J'ai bien entendu notre collègue et ami M. Paul Blanc évoquer le sens des responsabilités. Mais qui connaît les techniques qui auront cours dans dix ans ? Qui sait si, dans dix ans, on ne passera pas sur des réseaux existants appartenant à un grand réseau de transport d'électricité ? Comme rapporteur de la loi portant transformation du secteur des télécommunications, je suis assez bien placé pour savoir que personne, ni dans cette enceinte ni nulle part ailleurs, n'avait imaginé par exemple la réalité de l'explosion des téléphones portables ou l'apparition de certaines techniques.
Si les collectivités locales peuvent librement exploiter des réseaux, les plus démunies d'entre elles pourraient être tentées, même en cas d'initiative privée suffisante, de développer leur offre propre et, de ce fait, de glisser dans une spirale financière qui pourrait être dangereuse. Car, il ne faut pas l'oublier, s'il ouvre des droits, le statut d'opérateur emporte aussi des devoirs, dont l'obligation pour les plus pauvres - et ce serait paradoxal - de contribuer au fonds de service universel !
M. Adrien Gouteyron. Eh oui !
M. Gérard Larcher, président de la commission des affaires économiques. Telle est la réalité des opérateurs.
Madame la ministre, vous avez cité 163 opérations qui seraient « dans les tuyaux » - pardonnez-moi cette comparaison, mais les contenants et les contenus, dans ce secteur, sont importants. Je crois que peu nombreux sont ceux qui seraient gênés par la proposition de notre commission, car, s'il y a réellement déficit, ces opérations trouveront naturellement leur place.
En fait, je crois que ce débat a été utile et je voudrais remercier les auteurs de ces amendements et de ces sous-amendements. De toute façon, nous avons le temps de dialoguer et d'approfondir cette question, car nous bénéficions sur ce texte de l'ensemble des navettes.
En tous les cas, manifestement, le souhait qu'exprime la commission à une très large majorité dépasse les clivages. MM. Pierre-Yvon Trémel et Daniel Raoul l'ont montré. Nous devons faire attention. Sur ce sujet, nous devons être à la fois très ambitieux pour l'économie numérique et pour son développement sur le territoire, tout en mesurant les conséquences d'un certain nombre de décisions.
Voilà pourquoi, mes chers collègues, je souhaiterais que vous retiriez vos amendements ou vos sous-amendements, comme vous y invitent MM. les rapporteurs. J'ai d'ailleurs demandé un scrutin public, car je ne voudrais pas que, dans quelques années, nous ayons ici à débattre de difficultés que rencontreraient un certain nombre de collectivités sur ce sujet. L'aménagement numérique de notre territoire nécessite d'autres moyens que ceux que nous avons évoqués. (MM. Adrien Gouteyron, Joël Bourdin et Christian Gaudin applaudissent.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 148.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures vingt, est reprise à vingt-deux heures trente, sous la présidence de M. Guy Fischer.)
PRÉSIDENCE DE M. GUY FISCHER
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, pour la confiance dans l'économie numérique.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 1er A.
Tous les amendements et sous-amendements ont été présentés et ont reçu l'avis de la commission et du Gouvernement. En outre, l'amendement n° 148 n'a pas été adopté.
La parole est à M. Jean-François Le Grand, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 198.
M. Jean-François Le Grand. Je ne reviendrai pas sur le débat que nous avons eu tout à l'heure tant nous avons entendu de points de vue à propos de l'amendement n° 11 et du sous-amendement que j'ai eu le plaisir de défendre. Les cosignataires de ce sous-amendement sont, pour la plupart d'entre eux, vous le savez, présidents de conseils généraux, ils agissent au nom de leurs collègues conseillers généraux ; dans l'intérêt des collectivités dont ils ont la charge et en fonction d'une certaine vision de l'aménagement du territoire et de l'égalité des chances.
Certains ont évoqué - je le dis pour apporter une touche d'humour dans ce débat - le franchissement du Rubicon. Or, chacun sait que le Rubicon, qui a, certes, engagé César dans de grandes aventures, n'était qu'un tout petit ruisseau. En l'occurrence, tenons-nous en à l'aspect physique du Rubicon dont nous sommes beaucoup plus proches que de l'épopée de César !
L'audace n'a jamais manqué au Sénat dès lors que l'intérêt général était en jeu. La pertinence des jugements, des analyses - et j'en appelle à votre sagacité, mes chers collègues - l'a toujours emporté sur les considérations ne relevant pas de l'intérêt général, si légitimes fussent-elles.
J'ai également entendu parler de « collectivisation locale ». Permettez-moi simplement de relever que nous ne devrions pas laisser nos propos dépasser notre pensée.
Mes chers collègues, je voudrais attirer solennellement votre attention sur un éclaircissement nécessaire qui permettra, ici, de soigner une certaine schizophrénie, là, de préciser un point important de sémantique, ou encore, de se référer aux textes.
J'ai profité de la suspension de séance pour me renseigner sur le site Internet du Sénat et pour joindre, par téléphone, un membre de l'ART, afin de définir les différents niveaux d'activité dans le domaine des télécommunications.
J'ai donc consulté le rapport de la commission des lois, dans lequel on peut lire que l'Autorité de régulation des télécommunications distingue cinq niveaux d'activités dans le domaine qui l'intéresse.
Le premier niveau, c'est l'installation d'équipements passifs, les fourreaux, ou bien la fibre non activée, résumé sous le mot « établir » dans le sous-amendement n° 198.
Le deuxième niveau, c'est l'installation d'équipements actifs, c'est-à-dire l'établissement du réseau. C'est ce que recouvre le terme « établir ».
Le troisième niveau concerne l'exploitation technique du réseau, la maintenance, comme le remplacement d'une fibre cassée et la vérification du réseau.
Le quatrième niveau - et vous avez eu raison, à cet égard, d'interpeller les auteurs du sous-amendement - recèle des ambiguïtés dans l'interprétation que j'espère lever.
C'est l'exploitation commerciale à destination d'opérateurs, tels que France Télécom, LD Com. Ce sont les personnes qui possèdent le réseau de fibre optique, mais qui ne sont pas opérateurs, ne fournissant pas le service. Ils sont donc en quelque sorte opérateurs d'opérateurs. Le verbe « exploiter » fait référence à ce quatrième niveau.
Je suis donc prêt à rectifier mon sous-amendement de manière qu'il y apparaisse clairement que le verbe « exploiter » renvoie à l'exploitation commerciale à destination d'opérateurs.
Quant au cinquième niveau, c'est celui de l'exploitation commerciale à destination d'utilisateurs finals, c'est-à-dire la fourniture de services au public. Que les choses soient bien claires : cela ne concerne les collectivités que si est mis en jeu le II de mon sous-amendement, aux termes duquel les collectivités territoriales et leurs groupements ne peuvent fournir des services de télécommunications au public qu'après avoir procédé à une consultation révélant une insuffisance d'initiatives privées propres à satisfaire les besoins des utilisateurs et en avoir informé l'Autorité de régulation des télécommunications ou - là, il peut y avoir débat - après avoir recueilli son avis favorable. Le membre du collège que j'ai interrogé m'a indiqué qu'il ne souhaitait pas que cette dernière solution soit retenue dans la mesure où elle pourrait susciter un certain nombre de contentieux.
Je remercie le Gouvernement d'avoir compris ma démarche : en effet, vous avez dit, madame le ministre, être favorable à l'amendement n° 11 sous réserve qu'il soit assorti de mon sous-amendement.
Si d'aventure ce sous-amendement est adopté, la rédaction de l'article sera équilibrée et nous mettra à l'abri de ces dérives qui ont été signalées tout à l'heure. Le souci de les éviter est parfaitement légitime, mais il faut bien préciser qu'il s'agit de l'exploitation commerciale à destination d'opérateurs.
Nous réintégrerons ainsi les collectivités dans leur rôle d'aménageur, de développeur ; il leur revient de mettre en place des infrastructures, dès lors que les infrastructures relevant de l'initiative privée sont insuffisantes.
J'espère avoir contribué à éclaircir ce point majeur. Je regrette amèrement de ne pas l'avoir fait avant la suspension de séance, car mon texte pouvait effectivement se prêter à diverses interprétations. La suspension m'a finalement permis de préciser ma position après avoir consulté un site Internet que personne ne conteste, le site du Sénat. (Sourires et applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'Union centriste.)
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 198 rectifié, présenté par MM. Le Grand, Pépin, du Luart, Puech, Vasselle et Fouché, et qui est ainsi libellé :
« I. - Après le mot : "établir", rédiger comme suit la fin du premier alinéa du I du texte proposé par l'amendement n° 11 pour l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales : "et exploiter (exploitation commerciale à destination d'opérateurs) des réseaux de télécommunications ouverts au public au sens du 3° et du 15° de l'article L. 32 du code des postes et télécommunications, acquérir des droits d'usage à cette fin ou acheter des réseaux existants. L'intervention des collectivités doit veiller, dans l'intérêt général, à la cohérence des réseaux d'initiative publique sur leur territoire, garantir l'utilisation partagée des infrastructures établies ou acquises en application du présent article et ne pas entraver le développement de la concurrence".
« II. - Au deuxième alinéa du même texte, remplacer les mots : "exercer une activité d'opérateur de télécommunications au sens du 15° de l'article L. 32 du code des postes et télécommunications" par les mots : "fournir des services de télécommunications au public". »
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bruno Sido, rapporteur. On peut remarquer qu'à partir du troisième des niveaux qu'a évoqués M. Le Grand, les activités décrites sont celles d'un opérateur.
Cela étant, il ne faut pas dramatiser la situation. Nous n'en sommes qu'à la première lecture au Sénat, et il y aura une deuxième lecture. Il convient que, d'ici à la deuxième lecture, un accord se dégage sur la sémantique entre le Gouvernement, les parlementaires et l'ART. Je regrette seulement qu'on en soit à ce stade aujourd'hui. Sous le bénéfice de ces remarques, l'avis de la commission reste défavorable.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Gérard Larcher, président de la commission des affaires économiques. Je me réjouis que ce débat ait pu s'ouvrir et je voudrais simplement préciser à mon collègue et ami Jean-François Le Grand que la commission des affaires économiques n'est mue par rien d'autre que par le souci de l'intérêt général.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Très bien !
M. Gérard Larcher, président de la commission des affaires économiques. Il n'y a pas, derrière la position de la commission, l'influence de je ne sais quel lobby ou puissance. Notre position est le fruit d'une réflexion menée à partir d'un certain nombre d'expériences. Sur ces sujets, j'ai d'ailleurs moi-même un point de vue assez indépendant, mais l'ensemble des membres de la commission ont, en l'espèce, manifesté de l'indépendance. J'ai entendu s'exprimer des points de vue divers, qui nous ont rendus attentifs, qui nous ont éclairés, mais qui nous conduisent à maintenir la position que vient de réaffirmer le rapporteur.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 198 rectifié.
M. Daniel Raoul. Nous sommes favorables à la première partie du sous-amendement n° 198 rectifié. Cependant, vu le débat qui s'est instauré à la fois sur la sémantique et sur le rôle exact des collectivités en tant qu'opérateurs, il nous apparaît qu'une ambiguïté subsiste qui doit être levée. J'ai déjà demandé des explications sur le constat de carence. Que faut-il entendre exactement par « satisfaire les besoins » ? Comment apprécie-t-on leur niveau, à la fois en quantité et en prix ? Je souhaite que la navette permette d'apporter les précisions nécessaires.
En attendant, cher collègue Jean-François Le Grand, bien que favorables à la première partie de votre sous-amendement, nous voterons contre celui-ci.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 198 rectifié.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires économiques.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin
n° 172
:
Nombre de votants | 318 |
Nombre de suffrages exprimés | 316 |
Majorité absolue des suffrages | 159 |
Pour | 19 |
Contre | 297 |
Les sous-amendements n°s 213 et 214 sont-ils maintenus, monsieur Blanc ?
M. Paul Blanc. Mme la ministre ayant indiqué tout à l'heure que le Gouvernement était favorable à l'amendement n° 11 sous réserve de l'adoption du sous-amendement n° 198 rectifié, qui vient d'être rejeté, j'aurais souhaité savoir quelle était maintenant la position du Gouvernement.
Quoi qu'il en soit, je retire le sous-amendement n° 213, car il est vain de poursuivre le débat sur ce point. Il est des combats désespérés et il faut savoir arrêter une guerre ! (Sourires.)
S'agissant du sous-amendement n° 214, j'aurais souhaité que, en cas de désistement, un cahier des charges soit établi par les collectivités locales. Mais, je n'insiste pas et je retire également ce sous-amendement.
M. le président. Les amendements n°s 213 et 214 sont retirés.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 166.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 167 rectifié.
(Le sous-amendement est adopté à l'unanimité.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 11 et 47 modifiés.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires économiques.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin
n° 173
:
Nombre de votants | 318 |
Nombre de suffrages exprimés | 234 |
Majorité absolue des suffrages | 118 |
Pour | 205 |
Contre | 29 |
Je mets aux voix l'amendement n° 12.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Jean-François Le Grand, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 199.
M. Jean-François Le Grand. Il me paraît nécessaire de revenir sur ce qui s'est passé dans nos communes. Un certain nombre de collectivités ont engagé la création d'infrastructures sous le régime de l'article L. 1511-6 du code général des collectivités territoriales, qui instaure notamment la procédure de consultation publique préalable. Or, après la réalisation de cette procédure, de nombreuses collectivités locales ont pris une décision, sans pour autant créer d'infrastructures. Faut-il demander à ces collectivités de tout reprendre à zéro ?
L'adoption du sous-amendement n° 199 permettrait la poursuite du travail engagé sans engendrer un long retard dans les réalisations.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 199.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 142 rectifié.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements n°s 13 et 48, modifiés.
(Ces amendements sont adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 49 n'a plus d'objet.
L'amendement n° 98 est-il maintenu, monsieur Le Grand ?
M. Jean-François Le Grand. Je le retire, monsieur le président, après avoir entendu Mme la ministre.
M. le président. L'amendement n° 98 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement 1er A, modifié.
(L'article 1er A est adopté.)
Articles additionnels après l'article 1er A
M. le président. L'amendement n° 168, présenté par MM. Trémel, Raoul et Teston, Mme Pourtaud, M. Weber et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Après l'article 1er A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un nouvel article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Pour permettre aux collectivités territoriales et à leurs groupements d'exercer les compétences mentionnées à l'article L. 1425-1, les propriétaires de réseaux de télécommunications sont tenus de leur communiquer le plan de leur réseau, dès lors qu'il est situé sur le territoire des collectivités concernées, à l'exception des réseaux couverts par le secret de la défense nationale. »
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Actuellement, les collectivités locales ont beaucoup de mal à avoir une connaissance précise des réseaux de télécommunication établis sur leur territoire. Ainsi, les antennes de téléphonie mobile sont plus ou moins déclarées par les opérateurs. Certaines d'entre elles ne sont même pas soumises à autorisation, si bien que les maires ne connaissent par le parc d'antennes implantées sur leur territoire.
Pour éviter qu'une telle situation se reproduise avec différents réseaux et pour que les collectivités et leurs groupements puissent exercer les compétences mentionnées à l'article L. 1425-1, les propriétaires de réseaux de télécommunications doivent être tenus de communiquer le plan desdits réseaux dès lors qu'ils sont situés sur le territoire des communes concernées, à l'exception, bien sûr, des réseaux couverts par le secret défense.
Certes, l'article 1er A prévoit une consultation permettant de recenser les infrastructures existantes. Cependant, la rédaction retenue nous semble peu précise, car elle ne fait pas référence à la localisation des infrastructures, ni même au plan du réseau. Par ailleurs, elle ne garantit pas que tous les projets seront recensés. En effet, à l'heure actuelle, les opérateurs ne sont pas tenus de le faire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bruno Sido, rapporteur. Cet amendement est loin d'être inintéressant, mais il paraît un peu trop systématique. Il conviendrait, en particulier, de recueillir l'avis de l'ART sur cette proposition, ce qui pourrait être fait d'ici à la deuxième lecture. Il nous reste beaucoup de travail à faire au cours de la navette !
En outre, cet amendement n'a pas sa place dans le code général des collectivités territoriales.
L'avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Le Gouvernement est favorable à l'établissement d'un cadastre fiable des réseaux de télécommunications, et il réfléchit actuellement aux mesures qui pourraient être prises en ce sens. J'ai d'ailleurs noté avec intérêt ce que vient de dire M. le rapporteur à propos du travail qui pourrait être accompli entre les différentes lectures de ce texte.
Toutefois, l'amendement n° 168 soulève des difficultés. Il manque de précision, notamment s'agissant de la confidentialité des informations, et il nous paraît par ailleurs trop ambitieux puisqu'il vise tous les réseaux, y compris les réseaux privés. De ce fait, il pose un problème de respect du secret des affaires.
Enfin, il pourrait poser problème vis-à-vis du droit de la concurrence, puisqu'il permettrait aux collectivités qui exerceraient des activités d'opérateur de disposer d'informations privilégiées sur les opérateurs privés concurrents.
M. le président. Monsieur Raoul, l'amendement est-il maintenu ?
M. Daniel Raoul. Compte tenu de la réponse de M. le rapporteur, je retire mon amendement. Mais j'ai bien entendu la promesse qui nous a été faite : le travail sera poursuivi au cours de la navette !
M. le président. L'amendement n° 168 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 99 rectifié bis est présenté par MM. Pépin, Lorrain et Le Grand.
L'amendement n° 130 est présenté par M. Amoudry et les membres du groupe de l'Union centriste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Après l'article 1er A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 2224-34 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. .... - Tout opérateur de télécommunications, autorisé par une collectivité territoriale ou un établissement public de coopération compétent pour la distribution publique d'électricité à installer un ouvrage aérien sur un support de ligne aérienne d'un réseau public de distribution d'électricité, procède, en cas de remplacement de cette ligne aérienne par une ligne souterraine à l'initiative de la collectivité ou de l'établissement précité, au remplacement, à ses frais, de cet ouvrage par un ouvrage souterrain. »
La parole est à M. Jean-François Le Grand, pour présenter l'amendement n° 99 rectifié.
M. Jean-François Le Grand. Il est nécessaire de préciser que, lorsqu'un opérateur de télécommunications bénéficie de l'autorisation d'utiliser un support d'un réseau public de distribution d'énergie électrique, il en assume l'ensemble des coûts correspondants, comprenant notamment le coût de la mise en souterrain de l'ouvrage de télécommunications si l'enfouissement de l'ouvrage de distribution d'électricité conduit à la suppression de ce support.
En fait, peu d'opérateurs sont concernés par cet amendement, sauf lorsque des contrats ont été passés avec RTE, le gestionnaire du réseau de transport d'électricité, notamment pour enrouler de la fibre optique le long des fils électriques.
M. le président. La parole est à M. Christian Gaudin, pour présenter l'amendement n° 130.
M. Christian Gaudin. Cet amendement a le même objet que celui qui vient de présenter notre collègue M. Le Grand. Il s'agit de préciser que, lorsqu'un opérateur de télécommunications bénéficie de l'autorisation d'utiliser un support, en cas d'évolution de ce support, notamment dans le cadre d'une mise en souterrain de son appareillage, les frais restent à la charge de l'opérateur de télécommunications.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bruno Sido, rapporteur. On pourrait craindre que, en l'état actuel, une telle disposition ne s'applique surtout à France Télécom.
Cela étant, cette idée n'est pas inintéressante, bien au contraire, mais il convient de recueillir l'avis du Gouvernement, en particulier depuis l'intervention du ministre de l'économie devant le Sénat le 22 mai dernier. En effet, ce dernier avait indiqué que l'examen du présent projet de loi permettrait de clarifier la situation.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Le caractère systématique de l'obligation d'enfouissement nous paraît discutable. En effet, cela reviendrait à faire supporter par les opérateurs de télécommunications les conséquences financières de décisions qui, en réalité, sont prises en dehors de toute coordination. De plus, rien ne justifie d'imposer à l'opérateur de supporter la totalité des coûts de l'opération alors que les travaux de mise en souterrain des réseaux d'électricité sont pris en charge par les syndicats d'électrification, qui disposent de financements à cette fin.
Au demeurant, la charge que représentent les travaux d'enfouissement peut être diminuée par un partage des coûts entre les divers intervenants. Cette question doit donc être réglée localement et non, me semble-t-il, par la loi.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement n'est pas favorable à ces amendements.
M. le président. Quel est, dans ces conditions, l'avis de la commission ?
M. Bruno Sido, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 99 rectifié bis et 130.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas les amendements.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 100 est présenté par M. Pintat.
L'amendement n° 129 est présenté par M. Amoudry et les membres du groupe de l'Union centriste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Après l'article 1er A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Au titre de leurs compétences relevant de la voirie ou d'un service public par réseau, les collectivités territoriales et leurs établissements publics de coopération peuvent être maîtres d'ouvrages d'installations de génie civil susceptibles d'être utilisées pour des équipements de télécommunications. Ces collectivités et établissements peuvent financer ces installations, en totalité ou en partie, par le produit de leur location à des opérateurs de télécommunications. Ces opérateurs s'acquittent du versement des redevances d'occupation du domaine public auprès des gestionnaires de la voirie dans les conditions prévues par la loi. »
L'amendement n° 100 n'est pas soutenu.
La parole est à M. Christian Gaudin, pour défendre l'amendement n° 129.
M. Christian Gaudin. En dehors des compétences relatives aux télécommunications prévues par le nouvel article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, il peut être utile d'autoriser des collectivités, agissant en dehors de cette compétence, à réaliser des installations de génie civil susceptibles d'intéresser des équipements de télécommunications en même temps que des travaux de voirie, d'eau ou d'électricité, par exemple.
Cette disposition aurait pour objet de faciliter, en en réduisant le coût, l'enfouissement des lignes téléphoniques, par exemple dans un but d'amélioration des paysages urbains et ruraux.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bruno Sido, rapporteur. La rédaction de l'amendement n° 129 paraît assez floue et va au-delà du sujet qui nous occupe ce soir. La commission est donc relativement réservée et sollicite l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement. En effet, dans la mesure où l'opérateur occupe un ouvrage de génie civil qui appartient à la collectivité, on peut considérer qu'il s'acquitte déjà de la redevance de location dudit ouvrage de génie civil. Etant donné qu'il n'occupe pas directement le domaine public, il nous semble qu'il n'a pas a priori à payer une redevance supplémentaire d'occupation du domaine public.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 129.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 133, présenté par M. Trégouët, est ainsi libellé :
« Après l'article 1er A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 33-2 du code des postes et télécommunications est ainsi rédigé :
« Art. L. 33-2. - Sont établis et exploités librement :
« 1° Les réseaux indépendants ;
« 2° Les installations radioélectriques n'utilisant pas de fréquences spécifiquement assignées à leur utilisateur ;
« 3° Les installations radioélectriques permettant de rendre inopérants dans l'enceinte des établissements pénitentiaires, tant pour l'émission que pour la réception, les appareils de télécommunications mobiles de tous types. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
M. le président. « Art. 1er B. - I. - L'article L. 32 du code des postes et télécommunications est complété par un 17° ainsi rédigé :
« 17° Itinérance locale.
« On entend par prestation d'itinérance locale celle qui est fournie par un opérateur de radiocommunications mobiles à un autre opérateur de radiocommunications mobiles en vue de permettre, sur une zone qui n'est couverte par aucun opérateur de téléphonie mobile de seconde génération, l'accueil, sur le réseau du premier, des clients du second. »
« II. - Le huitième alinéa (e) du I de l'article L. 33-1 du même code est complété par les mots : "ou d'itinérance locale". »
« III. - Lorsque les collectivités territoriales font application de l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales en matière de radiocommunications mobiles de deuxième génération, les zones, incluant des centres-bourgs ou des axes de transport prioritaires, qu'elles ont identifiées comme n'étant couvertes par aucun opérateur de radiocommunications mobiles, sont couvertes en téléphonie mobile de deuxième génération par l'un de ces opérateurs chargé d'assurer une prestation d'itinérance locale.
« Ces zones sont identifiées au terme d'une campagne de mesures menée par les départements, conformément à la méthodologie définie par l'Autorité de régulation des télécommunications. Elles font l'objet d'une cartographie assortie du nombre de sites relais à financer et de leur positionnement prévisionnel, qui est transmise par les préfets de région à l'Autorité de régulation des télécommunications dans les trois mois suivant la promulgation de la présente loi.
« L'Autorité de régulation des télécommunications, après consultation des opérateurs et des collectivités territoriales, répartit entre les opérateurs les zones visées à l'alinéa précédent, dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires. Elle dresse le calendrier prévisionnel de déploiement des pylônes et d'installation des équipements électroniques de radiocommunication sur la base des plans départementaux qui lui sont soumis. L'Autorité de régulation des télécommunications publie les montants des engagements financiers des opérateurs. Elle transmet cette répartition et ce calendrier au ministre chargé des télécommunications et au ministre chargé de l'aménagement du territoire, dans les six mois suivant la promulgation de la présente loi. L'ensemble du déploiement est achevé deux ans après la réception du calendrier prévisionnel par les ministres concernés.
« Par dérogation à la règle posée au premier alinéa, la couverture en téléphonie mobile de deuxième génération dans certaines des zones visées est assurée, si tous les opérateurs de radiocommunications mobiles en conviennent, par le partage des infrastructures destinées à supporter des réseaux de télécommunications, créées par les collectivités territoriales en application de l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales.
« IV. - L'opérateur de radiocommunications mobiles auquel l'Autorité de régulation des télécommunications attribue la fourniture de la prestation d'itinérance locale dans une zone visée au III conclut des accords d'itinérance locale avec tous les autres opérateurs et des conventions de mise à disposition des infrastructures destinées à supporter des réseaux de télécommunications avec les collectivités territoriales qui en sont propriétaires.
« V. - Une convention de mise à disposition des infrastructures destinées à supporter des réseaux de télécommunications visées au III est conclue sur la base du droit privé entre l'opérateur exploitant ces infrastructures et la collectivité territoriale qui en est propriétaire, dans le respect des dispositions de l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales.
« Cette convention détermine notamment les conditions de maintenance et d'entretien de ces infrastructures.
« En cas de litige, l'Autorité de régulation des télécommunications est saisie dans les conditions prévues à l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications.
« VI. - Après l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications, il est inséré un article L. 34-8-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 34-8-1. - La prestation d'itinérance locale est assurée dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires.
« Cette prestation fait l'objet d'une convention de droit privé entre opérateurs de radiocommunications mobiles de deuxième génération. Celle-ci détermine les conditions techniques et financières de fourniture de la prestation d'itinérance locale. Elle est communiquée à l'Autorité de régulation des télécommunications.
« Pour garantir l'égalité des conditions de concurrence ou l'interopérabilité des services, l'Autorité de régulation des télécommunications peut, après avis du Conseil de la concurrence, demander la modification des accords d'itinérance locale déjà conclus.
« Les différends relatifs à la conclusion ou à l'exécution de la convention d'itinérance locale sont soumis à l'Autorité de régulation des télécommunications, conformément à l'article L. 36-8. »
« VII. - Le troisième alinéa (2°) de l'article L. 36-6 du même code est complété par les mots : ", et aux conditions techniques et financières de l'itinérance locale, conformément à l'article L. 34-8-1". »
« VIII. - Après le 2° du II de l'article L. 36-8 du même code, il est inséré un 2° bis ainsi rédigé :
« 2° bis La conclusion ou l'exécution de la convention d'itinérance locale prévue à l'article L. 34-8-1 et de la convention de mise à disposition des infrastructures destinées à supporter des réseaux de télécommunications, conclue entre l'opérateur et la collectivité territoriale propriétaire en application de l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales ; ».
« IX. - Dans la zone où il assure une prestation d'itinérance locale, l'opérateur de radiocommunications mobiles fournit au moins les services suivants : émission et réception d'appels téléphoniques, appels d'urgence, accès à la messagerie vocale, émission et réception de messages alphanumériques courts. »
Sur cet article, je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 149, présenté par Mme Terrade, MM. Bret, Ralite et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article ».
L'amendement n° 15, présenté par M. Sido, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit cet article :
« I. _ L'article L. 32 du code des postes et télécommunications est complété par un 17° ainsi rédigé :
« 17° Itinérance locale.
« On entend par prestation d'itinérance locale celle qui est fournie par un opérateur de radiocommunications mobiles à un autre opérateur de radiocommunications mobiles en vue de permettre, sur une zone qui n'est couverte, à l'origine, par aucun opérateur de radiocommunications mobiles de seconde génération, l'accueil, sur le réseau du premier, des clients du second. »
« II. _ Le huitième alinéa (e) du I de l'article L. 33-1 du même code est complété par les mots : "ou d'itinérance locale".
« III. _ Lorsque les collectivités territoriales font application de l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales en matière de radiocommunications mobiles de deuxième génération, les zones, incluant des centres-bourgs ou des axes de transport prioritaires, qu'elles ont identifiées comme n'étant couvertes par aucun opérateur de radiocommunications mobiles, sont couvertes en téléphonie mobile de deuxième génération par l'un de ces opérateurs chargé d'assurer une prestation d'itinérance locale.
« Par dérogation à la règle posée à l'alinéa ci-dessus, la couverture en téléphonie mobile de deuxième génération dans certaines des zones visées est assurée, si tous les opérateurs de radiocommunications mobiles en conviennent, par le partage des infrastructures mises à disposition des opérateurs par les collectivités territoriales en application de l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales.
« Les zones mentionnées au premier alinéa sont identifiées par les préfets de région en concertation avec les départements et les opérateurs. En cas de différend sur l'identification de ces zones dans un département, les zones concernées seront identifiées au terme d'une campagne de mesures menée par le département, conformément à une méthodologie validée par l'Autorité de régulation des télécommunications. Elles font l'objet d'une cartographie qui est transmise par les préfets de région au ministre chargé de l'aménagement du territoire au plus tard dans les trois mois suivant la promulgation de la présente loi. Le ministre chargé de l'aménagement du territoire adresse la liste nationale des zones ainsi identifiées au ministre chargé des télécommunications, à l'Autorité de régulation des télécommunications et aux opérateurs de téléphonie mobile de seconde génération.
« Sur la base de la liste nationale définie à l'alinéa ci-dessus, et dans les deux mois suivant sa transmission aux opérateurs par le ministre chargé de l'aménagement du territoire, les opérateurs adressent au ministre chargé des télécommunications, au ministre chargé de l'aménagement du territoire et à l'Autorité de régulation des télécommunications, un projet de répartition entre les zones qui seront couvertes selon le schéma de l'itinérance locale et celles qui seront couvertes selon le schéma du partage d'infrastructures, un projet de répartition des zones d'itinérance locale entre les opérateurs, ainsi qu'un projet de calendrier prévisionnel de déploiement des pylônes et d'installation des équipements électroniques de radiocommunication. Le ministre chargé des télécommunications et le ministre chargé de l'aménagement du territoire approuvent ce calendrier prévisionnel dans le mois suivant sa transmission par les opérateurs. L'Autorité de régulation des télécommunications se prononce sur les répartitions proposées, qui ne devront pas perturber l'équilibre concurrentiel entre opérateurs de téléphonie mobile, dans le mois suivant leur transmission par les opérateurs. L'ensemble du déploiement est achevé dans les trois ans suivant la promulgation de la présente loi.
« Le ministre chargé de l'aménagement du territoire fait rapport annuellement au Parlement sur la progression de ce déploiement.
« IV. _ Les conditions financières, dans lesquelles les opérateurs couvrent en téléphonie mobile de deuxième génération les zones visées au III du présent article, sont définies par le ministre chargé des télécommunications et le ministre chargé de l'aménagement du territoire en concertation avec les collectivités territoriales concernées, l'Autorité de régulation des télécommunications et les opérateurs.
« V. _ L'opérateur de radiocommunications qui assure la couverture selon le schéma de l'itinérance locale dans une zone visée au III, conclut des accords d'itinérance locale avec les autres opérateurs de radiocommunications mobiles et des conventions de mise à disposition des infrastructures et/ou des équipements avec les collectivités territoriales.
« VI. _ Une convention de mise à disposition des infrastructures et/ou des équipements est conclue sur la base du droit privé entre l'opérateur exploitant ces infrastructures et/ou équipements et la collectivité territoriale, dans le respect des dispositions de l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales.
« Cette convention détermine notamment les conditions de maintenance et d'entretien de ces infrastructures.
« VII. _ Après l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications, il est inséré un article L. 34-8-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 34-8-1. _ La prestation d'itinérance locale est assurée dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires.
« Cette prestation fait l'objet d'une convention de droit privé entre opérateurs de radiocommunications mobiles de deuxième génération. Celle-ci détermine les conditions techniques et financières de fourniture de la prestation d'itinérance locale. Elle est communiquée à l'Autorité de régulation des télécommunications.
« Pour garantir l'égalité des conditions de concurrence ou l'interopérabilité des services, l'Autorité de régulation des télécommunications peut, après avis du Conseil de la concurrence, demander la modification des accords d'itinérance locale déjà conclus.
« Les différends relatifs à la conclusion ou à l'exécution de la convention d'itinérance locale sont soumis à l'Autorité de régulation des télécommunications, conformément à l'article L. 36-8. »
« VIII. _ Le troisième alinéa (2°) de l'article L. 36-6 du même code est complété par les mots : ", et aux conditions techniques et financières de l'itinérance locale, conformément à l'article L. 34-8-1".
« IX. _ Après le 2° du II de l'article L. 36-8 du même code, il est inséré un 2° bis ainsi rédigé :
« 2° bis La conclusion ou l'exécution de la convention d'itinérance locale prévue à l'article L. 34-8-1. »
« X. _ Dans la zone où il assure une prestation d'itinérance locale, l'opérateur de radiocommunications mobiles fournit au moins les services suivants : émission et réception d'appels téléphoniques, appels d'urgence, accès à la messagerie vocale, émission et réception de messages alphanumériques courts. »
Cet amendement est assorti de quatre sous-amendements.
Le sous-amendement n° 169, présenté par MM. Trémel, Raoul et Teston, Mme Pourtaud, M. Weber et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Compléter in fine le premier alinéa du III du texte proposé par l'amendement n° 15 par une phrase ainsi rédigée : "La couverture de ces zones est assurée par une prestation d'itinérance locale". »
Le sous-amendement n° 170, présenté par MM. Trémel, Raoul et Teston, Mme Pourtaud, M. Weber et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Après les mots : "du code général des collectivités territoriales, compléter in fine le deuxième alinéa du III du texte proposé par l'amendement n° 15 par les mots suivants : ", à condition que cette solution soit moins coûteuse pour ces dernières". »
Le sous-amendement n° 201, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« I. - Rédiger ainsi le IV de l'amendement n° 15 :
« IV. _ Les infrastructures de réseau établies par les collectivités territoriales en application du III du présent article sont mises à disposition des opérateurs autorisés selon des conditions techniques et tarifaires fixées par décret en Conseil d'Etat. »
« II. - Dans le VI du même amendement, supprimer les mots : "et/ou des équipements" et les mots : "et/ou équipements". »
Le sous-amendement n° 171, présenté par MM. Trémel, Raoul et Teston, Mme Pourtaud, M. Weber et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le IV du texte proposé par l'amendement n° 15 :
« IV. - A. _ Le financement de la couverture en téléphonie mobile de deuxième génération des zones visées au III du présent article est assurée par l'Etat, les opérateurs de radiotélécommunications mobiles de seconde génération et le cas échéant les collectivités territoriales. Les conditions financières dans lesquelles les opérateurs couvrent ces zones sont définies par le ministre chargé des télécommunications et le ministre chargé de l'aménagement du territoire en concertation avec les collectivités territoriales concernées, l'Autorité de régulation des télécommunications et les opérateurs.
« B. - La perte de recettes résultant du A ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° 2 rectifié, présenté par M. Nogrix, est ainsi libellé :
« Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« En contrepartie des engagements de couverture souscrits par les opérateurs de radiocommunications mobiles dans le cadre de l'aménagement du territoire, ces derniers sont exemptés à due concurrence des investissements dans l'extension de la couverture du financement des coûts nets des obligations du service universel. »
La parole est à Mme Odette Terrade, pour présenter l'amendement n° 149.
Mme Odette Terrade. Dans la logique du précédent amendement, nous vous proposons de renvoyer la question d'itinérance locale au paquet Télécom prévu pour l'automne. On pourra alors notamment se poser de façon complète la question fondamentale du service universel.
Il n'est vraiment pas de bonne méthode législative de morceler ainsi la réflexion sur les télécommunications. Si notre amendement était adopté, nous redonnerions une nécessaire cohérence à l'ensemble de ce volet du projet de loi. Notre proposition d'amendement rejoint le premier amendement de suppression que nous avions déposé.
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 15.
M. Bruno Sido, rapporteur. L'amendement n° 15 vise, pour une large part, à rapprocher le texte de la proposition de loi sénatoriale reprise par l'Assemblée nationale en première lecture du présent projet de loi du nouveau contexte législatif ouvert par l'article 1425-1 du code général des collectivités territoriales ainsi que de l'approche contractuelle en cours entre le Gouvernement, l'Autorité de régulation des télécommunications, les associations d'élus et les opérateurs.
Le projet d'article 1er B ne précise pas les modalités financières associées au processus. Seule existe une référence à l'article L. 1425-1. Afin de prendre en compte la concertation menée actuellement pour aboutir à la convention qui devrait être prochainement signée avec les opérateurs, il est proposé d'introduire un paragraphe relatif à la question du financement, qui renvoie à une concertation entre le Gouvernement, les collectivités territoriales, l'ART et les opérateurs.
S'agissant de la succession des étapes du programme et du rôle de l'ART, le texte initial prévoyait un calendrier global pour l'ensemble du processus.
Il semble aujourd'hui que le calendrier initialement proposé était très contraignant et que le rôle qui avait été confié à l'Autorité était considérable. Ce scénario ne semble pas pleinement compatible avec la démarche contractuelle engagée, avec la participation de l'Autorité, entre le Gouvernement et les opérateurs. De plus, il semble, en pratique, difficilement réalisable en l'état.
C'est pourquoi une mise à jour de cette procédure est proposée, visant à la faire correspondre à la démarche contractuelle engagée. Le fait qu'ait déjà été réalisée l'étape de transmission des besoins de couverture régionaux par les préfets de région au comité de pilotage national peut être pris en compte a posteriori dans la loi, au prix de modifications rédactionnelles limitées : introduction des mots « au plus tard » dans l'échéance de la première étape de remontée des cartographies réalisées au niveau régional ; mention que la réalisation d'une campagne de mesure sur le terrain n'est nécessaire qu'en cas de différend sur la définition des zones.
La limite contraignante de deux ans pour la réalisation du déploiement paraît, à l'expérience, trop sévère, puisqu'en l'état actuel du projet de convention, le déploiement de la phase 2 ne devrait intervenir qu'en 2005-2006. Toutefois, cet encadrement calendaire paraît indispensable. Il est donc proposé de prévoir trois ans pour réaliser le déploiement à partir de la promulgation de la loi. En contrepartie, il est proposé que le ministre de l'aménagement du territoire fasse un rapport au Parlement chaque année sur la progression du plan de déploiement dans les zones blanches.
Concernant le rôle confié à l'ART, si l'Autorité doit rester un point de référence quant aux aspects techniques et concurrentiels du projet, il ne lui appartient pas d'effectuer seule des choix stratégiques en termes d'aménagement du territoire. L'amendement confie, en conséquence, au Gouvernement un rôle de validation du dispositif, dans le cadre du comité de pilotage national prévu par le projet de convention.
J'en viens aux différends relatifs aux conventions de mise à disposition des infrastructures.
Il est proposé que l'Autorité ne soit pas rendue compétente pour le règlement de différends relatifs aux conventions de mise à disposition des infrastructures, dans le cadre de cet article. En effet, les dispositions générales prévues à l'article L. 1425-1 s'appliqueront naturellement à ces conventions. La compétence de règlement des différends relatifs aux conventions de mise à disposition des infrastructures par les collectivités territoriales confiée à l'Autorité paraît donc superflue et sa suppression est proposée.
M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour défendre les sous-amendements n°s 169, 170 et 171.
M. Michel Teston. S'agissant du sous-amendement n° 169, les rapporteurs de la commission des affaires économiques ont très clairement indiqué que la couverture en téléphonie mobile devait se réaliser selon la technique de l'itinérance locale, la mutualisation des sites n'étant que dérogatoire. La dérogation ne devant pas devenir la règle, et par un souci de clarté rédactionnelle, ce sous-amendement pose le principe que la couverture en mobiles doit être réalisée par la prestation d'itinérance locale.
Certes, je sais bien que les opérateurs ne sont pas très favorables à cette proposition. D'ailleurs l'accord du 24 septembre est clair, puisqu'il y est fait état de deux approches en parallèle et qu'il y est même précisé que la mise en oeuvre d'une couverture en itinérance locale est réservée aux zones qui justifient cette solution.
Il faut cependant que nous nous posions la question de savoir si le Parlement doit se contenter d'être une chambre d'enregistrement des desiderata des opérateurs.
Sur ce sujet, je considère, je le dis clairement, que tel ne doit pas être le cas.
Dans son rapport d'octobre dernier, notre rapporteur a vanté les mérites de l'itinérance locale, tant sur le plan financier que sur celui du service rendu. Il a estimé « , au nom de l'intérêt général, que le partage des sites ne devrait pas l'emporter sur l'itinérance ». Notre sous-amendement a pour objet d'affirmer clairement que la couverture en mobiles est assuré par l'itinérance locale, la mutualisation ne devant être utilisée que subsidiairement et dans des cas précis.
Cela m'amène à présenter le sous-amendement n° 170, qui vise à préciser que les opérateurs de mobiles ne pourront avoir recours à la technique du partage des sites que lorsque celle-ci est moins coûteuse pour les collectivités locales.
J'en viens au sous-amendement n° 171. Je rappelle que, dans l'article 1er B - je l'ai indiqué à l'occasion de la discussion générale -, il n'est nullement fait mention de la question du financement de la couverture en mobiles des zones blanches.
L'amendement de la commission renvoie cette question - ou plus précisément la participation des opérateurs - à une décision des ministres respectivement en charge des télécommunications et de l'aménagement du territoire, prise en concertation avec les acteurs : Gouvernement, opérateurs, collectivités territoriales, autorité de régulation des télécommunications.
La couverture du territoire étant une mission d'intérêt général et d'aménagement du territoire, l'Etat ne peut donc pas se désengager et ne pas participer à son financement. Il ne peut en faire porter la charge aux seules collectivités. C'est pourquoi ce sous-amendement, sans remettre en cause la concertation proposée par la commission, pose le principe que le financement de la couverture en téléphonie mobile de deuxième génération est assurée avant tout par l'Etat et les opérateurs de radio-télécommunications mobiles de seconde génération, la participation des collectivités territoriales ne devant être que secondaire.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée, pour présenter le sous-amendement n° 201.
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Ce sous-amendement a pour objet de rapprocher le dispositif mis en place par cet article avec la pratique qui découle des négociations mises en place entre l'Etat, les collectivités territoriales et les opérateurs de téléphonie mobile de seconde génération, et dont l'architecture globale - je tiens bien à le préciser - a été présentée à la Commission européenne et a recueilli son accord de principe.
M. le président. La parole est à M. Philippe Nogrix, pour présenter l'amendement n° 2 rectifié.
M. Philippe Nogrix. Cet amendement a pour objet de proposer une compensation aux opérateurs de téléphonie mobile qui sont tenus, sur des zones non rentables au titre du CIADT 2002 et de cet article 1er, de faire ces efforts d'investissements à la fois imposés et importants pour les opérateurs.
Dans le rapport de M. Bruno Sido, il est rappelé que l'ART proposait, dans son avis du 19 juin 2001, d'accorder aux opérateurs de téléphonie mobile l'exemption de tout ou partie de leur contribution au fonds de service universel, en contrepartie d'un engagement de réinvestissement des sommes économisées au titre du service universel dans la couverture des réseaux mobiles.
Cet amendement reprend ce principe de bon sens et réaffirme celui qui est posé par l'article 8 de la loi n° 96-659 du 26 juillet 1996, qui prévoit, pour les opérateurs mobiles, une exemption de la rémunération additionnelle correspondant au déséquilibre de la structure courante des tarifs téléphoniques, en contrepartie de leur effort de déploiement du réseau.
On ne peut, dans le même temps, demander aux opérateurs mobiles d'investir dans leur propre réseau de téléphonie mobile sur des zones peu, voire non rentables, et doubler, à l'article 37 bis, leur contribution au financement du réseau fixe de France Télécom.
Le service universel sert à financer la couverture du seul réseau fixe. Aujourd'hui, le nombre de lignes mobiles dépasse le nombre de lignes fixes et les opérateurs mobiles utilisent donc leur propre réseau en passant de moins en moins par le réseau fixe de France Télécom.
Il y a donc une incohérence à vouloir aujourd'hui doubler la contribution des opérateurs mobiles à un réseau fixe qu'ils utilisent de moins en moins alors que cet article les conduit à développer dans les mêmes temps leur propre réseau, afin de contribuer à l'aménagement du territoire.
Avec cet amendement, mon objectif est de faire comprendre que nous avons besoin des investissements sur le réseau mobile. Or, pour que les efforts d'investissements soient maximaux dans les zones lacunaires, il faut donner aux opérateurs les moyens d'y investir et, donc, les exonérer de financer le réseau fixe de France Télécom.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bruno Sido, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 149. Je me souviens que, le 24 octobre 2002 - nous étions certes peu nombreux, madame la ministre, mais ceux qui étaient présents s'en souviennent aussi - , la proposition de loi d'origine sénatoriale avait été adoptée à l'unanimité, et même ceux qui s'étaient abstenus appelaient de leurs voeux son application la plus rapide possible.
Madame Terrade, vous demandez la suppression de cet article 1er B, au motif qu'il résulte de l'adoption d'un amendement cavalier. C'est votre argumentation, n'est-ce pas ?
Mme Odette Terrade. Absolument !
M. Bruno Sido, rapporteur. Je pense au contraire, avec la commission, que l'intérêt de cet article 1er B est tel qu'il faut le retenir, même s'il s'agit d'un amendement cavalier ! D'ailleurs, il n'est pas si cavalier que cela, dans la mesure où nous en avons déjà largement discuté dans cet hémicycle.
La commission est également défavorable aux sous-amendements n°s 169 et 170, qui portent une attention trop prégnante à l'itinérance et au partage d'infrastructures. Je signale que l'itinérance n'est pas le roaming. C'est assez compliqué. Les programmes informatiques ne sont pas complètement écrits. Ils seront prêts, nous dit-on, au mois de septembre et, en attendant, le partage d'infrastructures peut être une solution.
Effectivement, il est entendu que l'itinérance est la règle générale et le partage d'infrastructures l'exception. Cela ressort non seulement de cet article 1er B, donc de la proposition de loi votée ici, modifiée et adaptée à la donne actuelle, mais aussi de ce qui a été décidé lors du comité national de suivi dans le cadre de l'accord du 24 septembre 2002 entre le Gouvernement et les opérateurs.
Toutefois, il serait dommage, de mon point de vue, d'abandonner cette possibilité de partage dans la mesure où les trois opérateurs sont d'accord pour des cas particuliers, des cas techniques que l'on ne connaît pas. Si je comprends parfaitement l'esprit qui sous-tend ces sous-amendements, je ne le partage donc pas.
Le sous-amendement n° 171 s'inscrit dans la même ligne que l'amendement n° 165 des mêmes auteurs. Mon opinion est donc semblable.
Sans méconnaître l'importance de l'expression de solidarité nationale ou de la péréquation pour la couverture du territoire en téléphonie mobile, je ne suis pas réellement convaincu que cet amendement apporte une réponse satisfaisante à de telles questions.
Ce qui se discute actuellement, grâce à l'accord entre le Gouvernement et les opérateurs, constitue déjà une belle avancée, puisque les opérateurs financent, au moins dans la phase 1, c'est-à-dire pour la moitié des communes non couvertes et pour l'implantation de la moitié des pylônes et des infrastructures, la partie active des pylônes.
M. Pierre-Yvon Trémel. Ce n'est pas parfait !
M. Bruno Sido, rapporteur. Il aurait mieux valu, effectivement, que le territoire soit complètement couvert à la charge totale des opérateurs, nous sommes bien d'accord. Avec cet article 1er B, nous essayons naturellement de trouver une solution qui ne satisfera jamais personne, mais qui aura au moins le mérite, si toutefois il est voté, d'encourager la couverture totale du territoire, tout au moins des bourgs-centres et des voies de communication, par les téléphones mobiles. La fin justifie les moyens. J'en parle d'autant plus facilement que mon département - j'ai l'honneur de présider le conseil général de la Haute-Marne - est le plus mal couvert de France !
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis. Avec celui de la Côte-d'Or !
M. Bruno Sido, rapporteur. Avec la Côte-d'Or, qui est juste à côté.
Ce n'est pas pour rien que j'avais fait cette proposition de loi, nous ferons cet effort, c'est une nécessité prégnante, mais on ne peut demander aux opérateurs plus qu'ils ne peuvent donner.
La commission est favorable au sous-amendement n° 201 du Gouvernement, qui précise les modalités de définition des conditions financières de couverture du territoire en téléphonie mobile. Nous sommes donc d'accord pour ce décret, dont je crois savoir que le texte est déjà déposé au Conseil d'Etat ; par conséquent, il n'y aura pas de temps de perdu.
Enfin, s'agissant de l'amendement n° 2 rectifié, chat échaudé craint l'eau froide, monsieur Nogrix ! Si les prix des licences UMTS ont été baissés, c'était effectivement pour inciter les opérateurs à couvrir intégralement le territoire en téléphonie de deuxième génération. Tel n'a pas été le cas puisqu'on en discute encore actuellement. Par conséquent, ce que vous proposez apporte effectivement une solution dans le cadre, éventuellement, mais c'est à rediscuter, de la phase 2 du plan gouvernemental au cours de laquelle l'Etat n'intervient plus.
Seule l'Europe continue à le faire, en zones transitoires et en zones objectif 2, avec les fonds du FEDER, dans des conditions financièrement neutres pour les opérateurs. En d'autres termes, en phase 2, le financement n'est pas encore bouclé. Préférant conserver une corde à notre arc, nous demandons à M. Nogrix de retirer son amendement. A défaut, la commission des affaires économiques y serait défavorable. Il s'agit certes d'une vraie question, mais l'affaire de l'UMTS nous rend prudents !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n° 149 ; Mme Terrade n'en sera pas surprise car il y a une cohérence avec le premier amendement qu'elle avait présenté. L'amélioration de la couverture du territoire en téléphonie mobile étant une priorité, il n'y a pas lieu de reporter l'entrée en vigueur des dispositions de l'article 1er B.
Le Gouvernement est favorable, sur le fond, à l'amendement n° 15, sous réserve de l'adoption de son propre sous-amendement, sur lequel je viens d'entendre avec plaisir M. le rapporteur émettre un avis favorable.
Bien que le texte de l'amendement n° 15 me semble suffisamment précis en matière d'itinérance, je m'en remets à la sagesse du Sénat sur le sous-amendement n° 169.
En revanche, le Gouvernement n'est pas favorable au sous-amendement n° 170 dans la mesure où il semble interdire la mutualisation. L'important est de couvrir le territoire. Dès lors, on ne peut se priver d'aucune possibilité d'atteindre l'objectif commun que nous nous sommes fixé.
Le sous-amendement n° 171 n'aura plus d'objet si le sous-amendement n° 201 du Gouvernement est adopté.
Enfin, je ne suis pas favorable à l'amendement n° 2 rectifié pour les raisons que vient d'exposer M. le rapporteur. Nous émettons en effet des réserves sur cet amendement, même si nous en comprenons l'esprit.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 149.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 169.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 170.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 201.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 171.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Monsieur Nogrix, l'amendement n° 2 rectifié est-il maintenu ?
M. Philippe Nogrix. Comment voulez-vous que le bon sens puisse résister aux arguments techniques ?
M. Jean-François Le Grand. Il y a bien résisté tout à l'heure ! (Sourires.)
M. Philippe Nogrix. La seule chose que je sais, c'est que prudence ne vaut pas assurance et je ne pense pas que le fait de retarder la discussion changera les choses. On aurait très bien pu prendre la décision aujourd'hui ! Mais puisque Mme la ministre et M. le rapporteur me demandent de retirer cet amendement pour avoir les coudées franches dans les négociations à venir, comment leur refuser cette possibilité ? Je vais donc, la mort dans l'âme, retirer cet amendement. (Nouveaux sourires.)
M. le président. L'amendement n° 2 rectifié est retiré.
La parole est à M. Michel Teston, pour explication de vote sur l'amendement n° 15.
M. Michel Teston. Nous nous abstiendrons sur cet amendement.
Le sous-amendement n° 201 prévoit une nouvelle rédaction du IV de l'amendement n° 15. Or ce sous-amendement est restrictif par rapport à l'amendement qui avait été retenu par la commission, à savoir que les conditions financières de la couverture en téléphonie mobile par les opérateurs faisaient l'objet d'une concertation avec les différents acteurs, dont les collectivités territoriales concernées. Le nouveau texte ne fait plus référence à la concertation, puisque c'est un décret qui définira les modalités, notamment tarifaires, de la couverture. Il s'agit donc d'une régression par rapport à ce qu'avait initialement prévu la commission.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 15, modifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 1er B est ainsi rédigé.
Articles additionnels après l'article 1er B
M. le président. L'amendement n° 172, présenté par MM. Trémel, Raoul et Teston, Mme Pourtaud, M. Weber et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Après l'article 1er B, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 4 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« c) Par voie électronique et gratuitement lorsque le document est conservé sous forme numérique et qu'il ne contient pas d'information relevant de l'énumération du II de l'article 6. »
La parole est à M. Henri Weber.
M. Henri Weber. Monsieur le président, si vous le permettez, je présenterai également l'amendement n° 173.
M. le président. J'appelle donc également en discussion l'amendement n° 173, présenté par MM. Trémel, Raoul et Teston, Mme Pourtaud, M. Weber et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, et qui est ainsi libellé :
« Après l'article 1er B, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article 13 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal, il est inséré un titre, intitulé : "De la diffusion des données publiques numérisées", comprenant trois articles ainsi rédigés :
« Art. ... - A l'exception de celles qui ne sont pas communicables en application de l'article L. 124-1 du code de l'environnement, les données numérisées, collectées ou produites, dans l'exercice de leur mission de service public, par les personnes publiques ainsi que par les personnes privées chargées d'une telle mission, sont mises à la disposition de toute personne qui en fait la demande.
« L'utilisation de ces données est libre, à condition qu'elles ne subissent pas d'altération et que leur source soit mentionnée, et sous réserve, le cas échéant, du respect des droits de la propriété intellectuelle. Leur mise à disposition peut donner lieu à la perception d'une redevance qui inclut une participation forfaitaire aux dépenses de création, de maintenance et de mise à jour nécessaires à leur collecte et à leur traitement.
« Lorsque la mise à disposition des données mentionnées au premier alinéa est demandée à des fins commerciales, elle est subordonnée à la conclusion d'une convention entre l'autorité qui détient les données et le demandeur. Cette convention peut prévoir, outre la redevance mentionnée à l'alinéa précédent, une rémunération qui tient compte des ressources tirées de l'exploitation commerciale.
« Les contestations auxquelles peut donner lieu l'élaboration ou l'application de la convention, notamment en ce qui concerne son contenu financier, sont portées devant le président de la commission d'accès aux documents administratifs ou devant un membre de la commission qu'il désigne.
« Art. ... - I. - Constituent des données essentielles au sens du présent article :
« 1° L'ensemble des actes et décisions, pris par l'Etat ou un de ses établissements publics administratifs, qui sont soumis à une obligation de publication en vertu de dispositions législatives ou réglementaires, ainsi que les documents qui leur sont annexés ;
« 2° Les informations sur l'organisation et le fonctionnement des services publics de nature à faciliter les démarches des usagers ;
« 3° Les rapports et études sur les missions, l'organisation et le fonctionnement des services publics qui sont communicables à toute personne en application du titre Ier de la présente loi.
« Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, détermine ceux des actes et décisions mentionnés au 1° qui ne sont pas soumis aux dispositions du présent article en raison des atteintes à la vie privée que pourrait entraîner leur utilisation par des tiers.
« Un décret en Conseil d'Etat précise les catégories de données regardées comme essentielles en application des dispositions ci-dessus. Ce décret peut en outre qualifier d'essentielles d'autres catégories de données détenues par l'Etat ou ses établissements publics administratifs.
« II. - Les services et établissements publics administratifs de l'Etat mettent gratuitement à la disposition du public, sur des sites accessibles en ligne, les données essentielles qui les concernent.
« Ces données peuvent être gratuitement utilisées et rediffusées, y compris à des fins commerciales, à condition qu'elles ne subissent pas d'altération et que leur source soit mentionnée. Toutefois, les données essentielles qui présentent un caractère personnel ne peuvent faire l'objet d'un traitement informatisé que dans le respect des règles posées par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.
« Art. ... - Un décret détermine les normes que doivent respecter les personnes publiques qui diffusent des données numérisées pour que ces données soient accessibles aux personnes atteintes d'un handicap visuel. Une personne qualifiée, désignée par le président de la commission d'accès aux documents administratifs, peut être saisie par toute personne qui ne parvient pas, en raison de son handicap visuel, à accéder aux données publiques mises en ligne. »
Veuillez poursuivre, monsieur Weber.
M. Henri Weber. La législation relative à la diffusion des données publiques est limitée. Hormis la loi du 17 juillet 1978, dite loi CADA, qui pose un principe d'accessibilité pour certains documents publics, et la circulaire Balladur de 1994, qui délimite le champ d'intervention de l'autorité publique, aucune disposition plus précise ne vient créer un réel encadrement normatif de la diffusion des données publiques, à l'exception des données juridiques.
Les amendements n°s 172 et 173 prévoient donc d'inscrire, dans des dipositions législatives, les principes qui régissent la diffusion des données publiques. Ils tendent à modifier la loi du 17 juillet 1978 relative à l'accès aux documents administratifs, en y intégrant un chapitre consacré à la diffusion des données publiques numérisées.
Trois mesures distinctes sont proposées par ces textes. Tout d'abord, ces amendements imposent aux personnes publiques et aux personnes privées chargées d'une mission de service public une obligation de mise à disposition des données publiques diffusables. La rediffusion reste libre, sous condition de ne pas altérer la source des données et de la préciser.
Dès lors, il est prévu que la rediffusion s'opère dans un cadre commercial et que la mise à disposition par l'autorité publique soit conditionnée à la conclusion d'une convention entre l'autorité qui détient les données et le demandeur prévoyant le tarif pratiqué. Ce tarif pourra inclure une participation aux dépenses de création, de maintenance et de mise à jour des données, voire être proportionnelle aux revenus. Le président ou un membre de la commission d'accès aux documents administratifs, la CADA, est compétent pour statuer en cas de litige sur l'application ou l'élaboration de la licence de rediffusion.
Une deuxième disposition aménage ces principes en intégrant et en définissant la notion de données publiques essentielles, à savoir les données nécessaires à une personne physique pour l'exercice de ses droits. L'amendement n° 173 prévoit que cette liste peut évoluer au travers de l'adoption de décrets en Conseil d'Etat qui qualifieraient d'« essentielles » d'autres catégories de données détenues par l'Etat ou ses établissements publics. L'une des conséquences principales d'une telle qualification est l'obligation pour les personnes publiques de mettre les données gratuitement à la disposition du public sur l'Internet. Le texte prévoit, en outre, une possibilité de rediffusion de ces données.
Enfin, la dernière disposition intégrée dans l'amendement n° 173 prévoit qu'un texte réglementaire interviendra pour définir les normes que les personnes publiques se doivent de respecter en matière d'accessibilité pour les personnes atteintes d'un handicap visuel.
Un amendement identique a été examiné à l'Assemblée nationale et il a été rejeté. Nous le reprenons volontiers aujourd'hui, car il traduit l'approche différente qui nous oppose sur la question de la société de l'information.
Il nous paraît opportun de prévoir, parallèlement au développement du commerce électronique, la mise en place d'un Internet public et citoyen accessible gratuitement, dans la plupart des cas, afin de développer un Internet qui ne soit pas réduit à un espace marchand.
Un premier pas avait déjà été accompli dans cette direction lors de l'adoption de la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, qui a prévu que les actes des collectivités territoriales pouvaient faire l'objet d'une publication ou d'un affichage à titre complémentaire et non exclusif sur un support numérique.
Enfin, dernier élément non négligeable : Internet, qui représente un support moderne et quasi incontournable aujourd'hui de la diffusion de l'information à destination du public, est aussi un outil permettant de réduire les coûts de publication des données publiques.
Pour finir, il est très important de prendre en compte le cas du handicap visuel.
Vous le savez, le Président de la République a déclaré prioritaire l'intégration des personnes handicapées dans la société française, et l'année 2003 est l'année européenne des personnes handicapées. C'est dans ce contexte que cet amendement prévoit une action volontaire en posant le principe de la non-discrimination et le principe de l'accessibilité pour les personnes qui sont atteintes d'une déficience visuelle. Il est normal que la collectivité nationale garantisse les conditions de l'égalité des droits et des chances des personnes handicapées, quelle que soit la nature du handicap.
Compte tenu de tous ces éléments, nous vous proposons, mes chers collègues, d'adopter ces amendements.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bruno Sido, rapporteur. Cet amendement pose un problème pratique de mise en oeuvre dans la mesure où il entraînerait des frais énormes pour les collectivités publiques. On peut remarquer, à ce titre, qu'il n'est assorti d'aucune réserve, alors même que les deux premiers alinéas de l'article 4 de la loi visée en comprennent, de façon pragmatique.
Outre cet aspect, l'amendement pose aussi un problème de fond en distinguant les documents numérisés des autres documents administratifs. Cela n'est-il pas contraire à l'objectif de banalisation du monde numérique ? Cette exception numérique pourrait se révéler tout à fait contre-productive.
Enfin, cette disposition ne se rattache que de façon lointaine au coeur du sujet que nous examinons.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Sur le fond, je suis assez largement d'accord avec ce que vient de dire M. Weber. Mais, comme j'ai eu l'occasion de le préciser tout à l'heure dans mon exposé introductif, une directive portant précisément sur ce sujet de la diffusion des données publiques est actuellement en cours de négociation. Je pense préférable d'attendre que les discussions aient abouti et de ne pas préjuger les résultats de ces discussions.
En conséquence, je ne suis pas favorable à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 172.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 173 ?
M. Bruno Sido, rapporteur. Cet amendement appelle les mêmes remarques que le précédent.
J'ai exposé les raisons de la réticence de la commission et je voudrais revenir, une fois encore, sur les conséquences financières immédiates extrêmement lourdes qu'aurait une telle disposition. En tant que président d'un exécutif départemental, je ne peux cacher mon inquiétude devant une telle mesure.
Pour atteindre l'objectif visé, il faudrait se donner le temps d'organiser sainement la transmission nécessaire et de procéder à des évaluations au cours du processus et à un lissage des investissements dans la durée.
Quant au dernier paragraphe de cet amendement qui concerne les handicapés, il est vrai que c'est un aspect très intéressant, mais, là encore, il faut donner du temps au temps pour étudier la question.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 173.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 174, présenté par MM. Sutour, Raoul, Teston et Trémel, Mme Pourtaud, M. Weber et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Après l'article 1er B, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le cadre des opérations de dissimulation des réseaux, les opérateurs de télécommunication participent à la prise en charge de :
« - l'ouverture et la fermeture des tranchées ;
« - la construction des chambres de tirage ;
« - la fourniture et la pose de fourreaux.
« Une convention détermine les conditions de leur participation. »
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Aucune disposition juridique ne prévoit les rôles respectifs des collectivités locales et des opérateurs de téléphonie en matière de dissimulation des réseaux fixes.
Des conventions locales, le plus souvent départementales, avaient tant bien que mal permis de fixer des objectifs pour l'enfouissement des réseaux.
A l'heure actuelle, France Télécom dénonce ces partenariats. Cette situation préoccupe les élus locaux des communes concernées qui, le plus souvent, sont des communes rurales ne disposant pas d'une assise financière suffisante pour payer de tels travaux.
Cet amendement vise simplement à définir un cadre juridique clarifiant, dans un souci d'équité, les droits et les devoirs des différents opérateurs concernant l'enfouissement des réseaux dont ils sont propriétaires.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bruno Sido, rapporteur. Cet amendement en rejoint plusieurs autres, notamment l'amendement n° 211 de la commission, qui soulève directement ou indirectement la question de l'enfouissement des réseaux et des lignes téléphoniques.
Il s'agit là d'un débat important auquel votre commission est tout à fait sensible. C'est une réalité qui est vécue sur le terrain.
A la suite des déclarations de M. le ministre de l'économie, le 22 mai dernier, devant le Sénat, la commission souhaiterait recueillir l'avis du Gouvernement sur cette thématique, que les amendements n°s 99 rectifié, 130, 100 et 129 abordent également.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Le Gouvernement est favorable à la poursuite de l'effort d'enfouissement des lignes téléphoniques disgracieuses. Je prends l'engagement que nous ferons tout ce que nous pourrons pour que France Télécom honore les engagements qui ont été pris dans ce domaine.
Pour autant, le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement, qui lui paraît trop flou puisqu'il ne précise pas les conditions dans lesquelles devrait s'effectuer cet enfouissement et qu'il renvoie, pour l'essentiel, à des conventions.
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Bruno Sido, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 174.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 211, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
« Après l'article 1er B, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 1615-7 du code général des collectivités territoriales est complété par l'alinéa suivant :
« Par dérogation, les collectivités territoriales et leurs groupements bénéficient des attributions du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée au titre des dépenses exposées pour l'enfouissement des réseaux de télécommunications remis à France Télécom. »
La parole est à M. Pierre Hérisson, rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Monsieur le président, si vous me le permettez, je présenterai également l'amendement n° 212.
M. le président. J'appelle donc également en discussion l'amendement n° 212, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission des affaires économiques, et qui est ainsi libellé :
« Après l'article 1er B, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 1615-7 du code général des collectivités territoriales est complété par l'alinéa suivant :
« Par dérogation, les collectivités territoriales et leurs groupements bénéficient des attributions du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée au titre des dépenses exposées pour la construction des infrastructures, destinées à supporter des réseaux de télécommunications, dont elles sont propriétaires et qu'elles mettent à disposition d'opérateurs de radiocommunications mobiles. »
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Ces amendements portent sur un sujet que nous abordons régulièrement, à savoir la réalisation d'infrastructures d'intérêt général par les collectivités territoriales et leurs groupements, réalisation qui pose des problèmes en termes d'aménagement du territoire, de taux de TVA applicable à la réalisation de ces infrastructures et d'éligibilité au fonds de compensation pour la TVA, le FCTVA.
L'article L. 1615-7 du code général des collectivités territoriales fixe la liste des infrastructures et des équipements réalisés par les collectivités qui, par dérogation, sont éligibles au fonds de compensation pour la TVA.
Ces deux amendements ont pour objet d'ajouter à cette liste les dépenses engagées par les collectivités locales pour l'enfouissement des réseaux de télécommunication qui sont ensuite utilisés par un opérateur tiers, réseaux dont elles sont propriétaires et qu'elles mettent à la disposition d'opérateurs de radiocommunication mobile.
Les pylônes que les collectivités territoriales vont devoir construire pour la couverture des « zones blanches » feront l'objet d'aides financières, que vous vous êtes engagée à leur apporter madame la ministre, à hauteur de 44 millions d'euros.
Les collectivités territoriales ont vocation à participer à l'aménagement du territoire, mais nous retrouverons, comme d'habitude, le problème de l'égibilité au FCTVA des collectivités territoriales qui ne sont pas aujourd'hui assujetties à la TVA.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Je formulerai la même observation que M. le rapporteur - il n'en sera pas surpris ! - sur ces deux amendements.
Les règles d'éligibilité au fonds de compensation pour la TVA impliquent, pour l'Etat, la prise en charge de dépenses nouvelles. Je me dois donc d'invoquer l'article 40 de la Constitution.
M. le président. L'article 40 de la Constitution est-il applicable, monsieur Adnot ?
M. Philippe Adnot, au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. A son grand regret, la commission des finances estime que l'article 40 est applicable.
M. le président. L'article 40 étant applicable, les amendements n°s 211 et 212 ne sont pas recevables.
Chapitre Ier
La communication publique en ligne
M. le président. « Art. 1er. - L'article 2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« On entend par communication publique en ligne toute communication audiovisuelle transmise sur demande individuelle formulée par un procédé de télécommunication. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 16 est présenté par M. Sido, au nom de la commission des affaires économiques :
L'amendement n° 85 est présenté par M. de Broissia, au nom de la commission des affaires culturelles.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Rédiger comme suit cet article :
« I. - Les trois derniers alinéas de l'article 1er de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication sont supprimés.
« II. - L'article 2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« On entend par communication publique en ligne toute communication audiovisuelle transmise sur demande individuelle formulée par un procédé de télécommunication.
« Est nécessairement considéré comme un service de télévision tout service de communication audiovisuelle accessible en temps réel et de manière simultanée pour l'ensemble du public ou d'une catégorie de public et dont le programme principal est composé d'une suite ordonnée d'émissions comportant des images et des sons, à l'exception des images consistant essentiellement en des lettres, des chiffres ou des images fixes.
« Est nécessairement considéré comme un service de radiodiffusion sonore tout service de communication audiovisuelle accessible en temps réel et de manière simultanée pour l'ensemble du public ou d'une catégorie de public et dont le programme principal est composé d'une suite ordonnée d'émissions comportant des sons.
« III. - L'article 4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée est modifié comme suit :
« 1° Avant le premier alinéa sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« I. _ Le Conseil supérieur de l'audiovisuel, autorité indépendante, garantit l'exercice de la liberté de communication audiovisuelle en matière de radio et de télévision par tout procédé de télécommunication, dans les conditions définies par la présente loi. Il assure l'égalité de traitement ; il garantit l'indépendance et l'impartialité du secteur public de la radiodiffusion sonore et de la télévision ; il veille à favoriser la libre concurrence et l'établissement de relations non discriminatoires entre éditeurs et distributeurs de services ; il veille à la qualité et à la diversité des programmes, au développement de la production et de la création audiovisuelles nationales ainsi qu'à la défense et à l'illustration de la langue et de la culture françaises. Il peut formuler des propositions sur l'amélioration de la qualité des programmes.
« Il peut adresser aux éditeurs et distributeurs de services de radiodiffusion sonore et de télévision des recommandations relatives au respect des principes énoncés dans la présente loi. Ces recommandations sont publiées au Journal officiel de la République française.
« 2° Le premier alinéa est précédé de la mention : "II." ».
L'amendement n° 16 est assorti d'un sous-amendement n° 143 rectifié, présenté par MM. Barraux, Lorrain et Le Grand et Mme Luypaert, et ainsi libellé :
« I. - Supprimer les deux derniers alinéas du II de l'amendement n° 16.
« II. - En conséquence, dans le II de cet amendement, remplacer les mots : "trois alinéas ainsi rédigés" par les mots : "un alinéa ainsi rédigé". »
L'amendement n° 175, présenté par Mme Pourtaud, MM. Weber, Trémel, Raoul, Teston et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit cet article :
« I. - Les trois derniers alinéas de l'article 1er de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication sont supprimés.
« II. - L'article 2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« On entend par communication publique en ligne toute communication audiovisuelle transmise sur demande individuelle formulée par un procédé de télécommunication.
« Est nécessairement considéré comme un service de télévision tout service de communication audiovisuelle accessible en temps réel et de manière simultanée pour l'ensemble du public ou d'une catégorie de public et dont le programme principal est composé d'une suite ordonnée d'émissions comportant des images et des sons, à l'exception des images consistant essentiellement en des lettres, des chiffres ou des images fixes. »
« Est nécessairement considéré comme un service de radio tout service de communication audiovisuelle accessible en temps réel et de manière simultanée pour l'ensemble du public ou d'une catégorie de public dont le programme principal est composé d'une suite ordonnée d'émissions comportant des sons.
« III. - L'article 4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée est ainsi modifié :
« 1° Avant le premier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« I. - Le Conseil supérieur de l'audiovisuel, autorité indépendante, garantit l'exercice de la liberté de communication audiovisuelle en matière de radio et de télévision, par tout procédé de télécommunication, dans les conditions définies par la présente loi. Il assure l'égalité de traitement ; il garantit l'indépendance et l'impartialité du secteur public de la radio et de la télévision ; il veille à favoriser la libre concurrence et l'établissement de relations non discriminatoires entre éditeurs et distributeurs de services ; il veille à la qualité et à la diversité des programmes, au développement de la production et de la création audiovisuelles nationales ainsi qu'à la défense et à l'illustration de la langue et de la culture françaises. Il peut formuler des propositions sur l'amélioration de la qualité des programmes. Il peut adresser aux éditeurs et distributeurs de services de radio et de télévision des recommandations relatives au respect des principes énoncés dans la présente loi. Ces recommandations sont publiées au Journal officiel de la République française. »
« 2° En conséquence, le premier alinéa est précédé de la mention : "II". »
« IV. - Le premier alinéa de l'article 33 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée est complété par les mots suivants : "ainsi que pour les services de même nature comportant une part de contenus interactifs, dès lors que le Conseil supérieur de l'audiovisuel estimerait que ces services sont assimilables à des services de radio ou de télévision". »
La parole est à M. Bruno Sido, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 16.
M. Bruno Sido, rapporteur. Cet amendement tend à définir, et ce pour la première fois dans notre législation, les services de radio et de télévision.
Au moment de délimiter le champ de compétence du Conseil supérieur de l'audiovisuel, en le cantonnant à ces deux catégories de services, il paraît en effet indispensable de clarifier le droit et de lever une incertitude juridique qui serait préjudiciable aux différents acteurs du paysage audiovisuel français.
Cet amendement tend aussi à soustraire de l'article 1er de la loi de 1986 la mention de la régulation par le CSA de l'ensemble de la communication audiovisuelle.
L'article 1er de la loi de 1986 comprendra désormais la seule affirmation du principe de la liberté de communication audiovisuelle et des limites opposables à ce principe. La délimitation du champ de compétence du CSA est donc renvoyée à l'article 4 de la loi de 1986, qui ouvre le titre Ier relatif au CSA.
Cet amendement tend également à mieux délimiter le champ de compétence du CSA.
En effet, le Conseil n'a ni la légitimité, ni les moyens, ni d'ailleurs l'envie de réguler l'ensemble du secteur de la communication audiovisuelle, secteur extrêmement vaste puisque, en vertu de la définition de la communication en ligne retenue dans le présent article, il comprend, outre les services de radio et de télévision, l'ensemble des services de communication en ligne.
Il paraît donc souhaitable de cantonner le pouvoir du CSA au coeur de sa compétence, à savoir les services de télévision et de radio sur tout support technologique, y compris, bien entendu, l'Internet.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Le Grand, pour présenter le sous-amendement n° 143 rectifié.
M. Jean-François Le Grand. Pour arriver à un complet accord sur l'amendement n° 16, nous proposons de supprimer les deux derniers alinéas de son II. Il n'est en effet pas opportun de chercher à définir les services de radio et de télévision au moment même où des négociations internationales sont en cours aussi bien à l'échelon communautaire, notamment dans le cadre de la directive européenne Télévision sans frontières, qu'au sein de l'Organisation mondiale du commerce.
Une telle définition, aujourd'hui, risquerait de nous limiter, de nous piéger en quelque sorte. D'ailleurs, la loi doit-elle définir ce que sont ces services de télévision et de radio ? Les auteurs du sous-amendement ont répondu par la négative, raison pour laquelle ils proposent cette suppression d'alinéas.
M. le président. La parole est à M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 85.
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis. L'amendement n° 85 est au coeur des préoccupations de la commission des affaires culturelles et justifie pleinement sa saisine sur ce texte.
Madame la ministre, le Gouvernement a choisi de considérer la communication en ligne comme un sous-ensemble de la communication audiovisuelle. Nous n'avons pas voulu perturber votre logique et votre cohérence. C'est en sens que nous avons proposé une définition de ce qu'était la radio et de la télévision.
Je signale, d'ailleurs, monsieur le président, qu'il faut lire, dans notre amendement, non pas « radiodiffusion sonore », mais tout simplement « radio ».
M. le président. Je suis donc saisi par M. de Broissia, au nom de la commission des affaires culturelles, d'un amendement n° 85 rectifié ainsi libellé :
« Rédiger comme suit cet article :
« I. - Les trois derniers alinéas de l'article 1er de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication sont supprimés.
« II. - L'article 2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« On entend par communication publique en ligne toute communication audiovisuelle transmise sur demande individuelle formulée par un procédé de télécommunication.
« Est nécessairement considéré comme un service de télévision tout service de communication audiovisuelle accessible en temps réel et de manière simultanée pour l'ensemble du public ou d'une catégorie de public et dont le programme principal est composé d'une suite ordonnée d'émissions comportant des images et des sons, à l'exception des images consistant essentiellement en des lettres, des chiffres ou des images fixes.
« Est nécessairement considéré comme un service de radio tout service de communication audiovisuelle accessible en temps réel et de manière simultanée pour l'ensemble du public ou d'une catégorie de public et dont le programme principal est composé d'une suite ordonnée d'émissions comportant des sons. »
« III. - L'article 4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée est ainsi modifié :
« 1° Avant le premier alinéa sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« I. - Le Conseil supérieur de l'audiovisuel, autorité indépendante, garantit l'exercice de la liberté de communication audiovisuelle en matière de radio et de télévision par tout procédé de télécommunication, dans les conditions définies par la présente loi. Il assure l'égalité de traitement ; il garantit l'indépendance et l'impartialité du secteur public de la radio et de la télévision ; il veille à favoriser la libre concurrence et l'établissement de relations non discriminatoires entre éditeurs et distributeurs de services ; il veille à la qualité et à la diversité des programmes, au développement de la production et de la création audiovisuelle nationale ainsi qu'à la défense et à l'illustration de la langue et de la culture française. Il peut formuler des propositions sur l'amélioration de la qualité des programmes.
« Il peut adresser aux éditeurs et distributeurs de services de radio et de télévision des recommandations relatives au respect des principes énoncés dans la présente loi. Ces recommandations sont publiées au Journal officiel de la République française. » ;
« 2° Le premier alinéa est précédé de la mention : "II". »
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur pour avis.
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis. La communication en ligne, c'est la communication par la radio, par la télévision, par la presse écrite. Nous le savons tous, c'est par la communication en ligne en tant que vecteur du développement de l'économie numérique que le commerce électronique viendra. C'est un texte qui a été inspiré par la directive Commerce électronique, mais la communication reste au coeur des préoccupations du Gouvernement et du Sénat.
C'est la raison pour laquelle nous avons pensé que, dans cette logique stricte, il fallait faire en sorte que les prérogatives du CSA soient bien situées s'agissant de la radio et de la télévision. Nous avons d'ailleurs trouvé une rédaction rigoureusement conforme à ce que le CSA souhaite, un petit peu plus éloignée, cependant, de ce que l'ART souhaite.
Animée de ce souci de pure logique, la commission des affaires culturelles, à l'unanimité, s'est prononcée en faveur de cet amendement. J'ajoute qu'elle n'a pas pu examiner celui que notre collègue Danièle Pourtaud va défendre.
Le moment est donc venu de définir de façon précise le champ de compétence du CSA ; l'ensemble de l'économie numérique en sera clarifié.
M. le président. La parole est à Mme Danièle Pourtaud, pour défendre l'amendement n° 175.
Mme Danièle Pourtaud. Cet amendement tend à donner au CSA le pouvoir de réguler la communication publique en ligne, mais pour ce qui a trait au seul secteur de la communication audiovisuelle. Il tend également à préciser la compétence du CSA sur l'ensemble des services de communication audiovisuelle, quel que soit leur mode de transmission, c'est-à-dire sur tout support et tout réseau.
Il répond en cela à une demande conjointe du CSA, dans son avis du 17 décembre 2002 sur ce projet de loi, et du Forum des droits sur Internet, et rejoint également les préoccupations exprimées par l'ART, dans son avis du 3 décembre 2002.
La législation et la réglementation applicables à l'audiovisuel public ont été élaborées en fonction du support et non du service. Ce choix, datant d'une vingtaine d'années, était compatible avec la rareté des ressources de ce secteur et tenait compte de la limitation des supports audiovisuels. Les quelque trois cent cinquante services de radio et de télévision sont, par ailleurs, tous facilement identifiables, contrairement aux 38 millions de sites Internet recensés.
Il nous semble aujourd'hui opportun de maintenir la compétence du CSA pour tout ce qui a trait à la communication audiovisuelle - télévision et radio -, qu'elle passe par un support traditionnel ou qu'elle soit accessible en ligne.
Mais il convient désormais de proposer une définition précise des services de communication audiovisuelle, définition qui n'existe pas actuellement aux termes de la loi du 30 septembre 1986.
Notre amendement vise donc à insérer dans l'article 2 de la loi de 1986 une définition des services de télévision et des services de radio. Comme les rapporteurs de la commission des affaires économiques et de la commission des affaires culturelles, nous avons repris la définition préconisée par le CSA, dans son avis n° 2003-4 du 27 mai 2003 sur le projet de loi sur les communications électroniques et, pour l'heure, non suivie d'effets.
Par souci de cohérence avec l'insertion de ces deux définitions, nous avons souhaité - toujours comme les deux rapporteurs - modifier l'article 4 de la loi de 1986 afin de préciser le champ de la régulation de Conseil sur les services de radio et de télévision, en reprenant, pour ce faire, le texte prévu pour être intégré dans le projet de loi sur les communications électroniques, mais qui semble trouver toute sa place dans le projet de loi que nous examinons aujourd'hui.
Nous avons enfin souhaité suivre le CSA dans son souci de tenir compte des évolutions des services de communication audiovisuelle et de soumettre les services à contenu interactif aux mêmes obligations réglementaires que celles qui sont prévues pour les services de radio et de télévision distribués par câble ou diffusés par satellite, obligation découlant de l'article 33 de la loi de 1986.
Sur ce point, notre amendement va au-delà de ce que proposent les rapporteurs des deux commissions. Si l'on veut bien tenir compte des impératifs de la communication publique en ligne, notamment, il est impossible de ne pas appréhender les services à contenu interactif, et il convient de prévoir de quelle façon précise la régulation du CSA s'effectuera sur ces services.
Nous souhaitons donc que le Sénat adopte l'amendement n° 175 qui va dans le même sens que les amendements n°s 16 et 85 des commissions, mais qui présente, de notre point de vue, l'avantage d'être plus complet et de mieux saisir l'évolution actuelle de la communication audiovisuelle.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bruno Sido, rapporteur. La commission des affaires économiques ne méconnaît pas la pertinence de l'argumentation développée par les auteurs du sous-amendement n° 143 rectifié. Toutefois, nous avions estimé, en présentant l'amendement n° 16, que les définitions en question étaient absolument nécessaires au maintien d'un équilibre satisfaisant du champ de compétence du CSA. J'avoue être partagé sur ce sujet et je m'en remets à la sagesse du Sénat.
L'amendement n° 175, quant à lui, créerait une situation tout à fait inédite, puisqu'une autorité administrative indépendante déciderait elle-même de l'extension de son propre champ de compétence. Outre le fait qu'une telle disposition me paraît source de risques juridiques importants, je note que le CSA lui-même n'est pas demandeur d'une extension de ses compétences. La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. J'ai indiqué clairement, dans la discussion générale, que le Gouvernement s'apprêtait à limiter les pouvoirs de régulation du Conseil supérieur de l'audiovisuel aux seuls services de radio et de télévision, et ce en plein accord avec ce dernier. Le texte du projet de loi sur les communications électroniques est actuellement examiné par le Conseil.
S'agissant d'une modification législative dont chacun a bien conscience qu'elle est susceptible d'avoir des répercussions législatives non seulement sur d'autres articles de ce projet de loi mais aussi sur d'autres textes - je pense, notamment, au code de la propriété intellectuelle - ainsi qu'au plan international, au moment où s'engagent d'importantes négociations multilatérales - OMC, renégociation de la directive Télévision sans frontière - il me paraît souhaitable que nous nous entourions de toutes les précautions juridiques nécessaires, en particulier que nous puissions bénéficier de l'expertise du Conseil.
C'est pourquoi nous ne pouvons, aujourd'hui, nous prononcer sur une rédaction précise sans prendre certains risques. Plusieurs autres articles de la loi du 30 septembre 1986 devront également être modifiés. Il y a d'autant moins urgence à se prononcer que le Conseil supérieur de l'audiovisuel n'a jamais utilisé ses pouvoirs à l'encontre de services en ligne et ne revendique pas cette compétence.
Le Gouvernement devrait adopter le projet de loi sur les communications électroniques à la fin du mois de juillet en conseil des ministres et le présenter au Parlement à la rentrée. Néanmoins, il s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur les amendements n°s 16 et 85 rectifié.
J'en viens au sous-amendement n° 143 rectifié. Le Gouvernement est favorable à la suppression de la définition des services de radio et de télévision, conformément à l'arbitrage rendu lors de la préparation du projet de loi sur les communications électroniques.
Enfin, le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n° 175.
M. le président. La parole est à M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis.
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis. Je m'exprimerai ici contre un sous-amendement - que mon collègue et ami M. Le Grand n'y voie là aucune marque d'inimitié personnelle - qui va à l'encontre de la construction logique et cohérente que nous souhaitons conserver tout au long de nos débats sur la communication audiovisuelle.
Madame la ministre, je comprends très bien que vous invoquiez le « paquet télécom », mais j'ai attendu pendant trois ans la loi LSI ! Je ne sais pas comment se fait le calendrier gouvernemental, il y a sans doute des urgences. Mais, fort de mon expérience, désormais, quand je tiens un texte, je m'inscris dans ce texte ! C'est d'ailleurs une vieille pratique parlementaire.
M. Pierre-Yvon Trémel. Vous avez raison !
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis. Ensuite, s'agissant du Conseil d'Etat, le Gouvernement a tout à fait raison de s'y référer. Mais ce sont les élus de la République, que nous sommes, qui décident. Le Conseil d'Etat passe après, je le dis avec tout le respect que j'ai pour lui.
Quant aux négociations que vous menez très légitimement avec l'Organisation mondiale du commerce, je pense qu'on peut défendre alternativement la thèse et l'antithèse, à savoir qu'il est urgent de ne rien faire avant ou qu'il est urgent d'agir avant.
Je me rallie beaucoup plus à la logique des amendements n°s 16 et 85 rectifié tels qu'ils ont été défendus respectivement par les deux commissions.
M. le président. La parole est à M. Michel Pelchat, pour explication de vote.
M. Michel Pelchat. Je tiens à m'exprimer de manière générale sur l'ensemble des amendements, qui me paraissent un peu prématurés et incomplets, notamment par rapport au nombre d'articles qu'il faudrait modifier dans la loi de 1986 : cela en ferait bien d'autres et, croyez-moi, mes chers collègues, pour avoir été, alors député, un des rapporteurs de la loi de 1986, j'en connais les défauts. A l'époque, nous avions légiféré dans un certain esprit, mais il est vrai qu'aujourd'hui on voit bien qu'il y a un décalage et qu'il faudra revoir tout le dispositif.
Pour l'heure, attendons le « paquet télécom », et alors il sera possible effectivement d'approfondir la réflexion sur une éventuelle augmentation des moyens de contrôle du CSA et leur extension à l'ensemble des services audiovisuels, qui ne sont peut-être pas tous compris ici. Cela nous aura donné le temps nécessaire pour étudier au préalable l'ensemble des modifications qui devront être apportées à la loi de 1986, ce qui n'a été fait ni en 1989 ni en 2000.
Tout cela nécessite du recul et un peu de sagesse, comme l'a dit Mme la ministre. Je ne sais pas ce que feront mes collègues, mais la sagesse, pour moi, serait de retenir aujourd'hui de cette discussion qu'il y a une volonté politique ici, au Sénat, de voir élargis les pouvoirs du CSA aux différents domaines nouveaux de la communication audiovisuelle et radiophonique, mais que nous pourrons en débattre largement et plus profondément lorsque nous examinerons le « paquet télécom ».
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 143 rectifié.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Jean-François Le Grand, pour explication de vote sur l'amendement n° 16.
M. Jean-François Le Grand. Madame la ministre, comme vous le voyez, tous mes amendements sont repoussés, mais, de défaite en défaite, je le vis avec l'assurance qu'un jour, soyez-en certaine, nous serons majoritaires (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, rapporteur.
M. Bruno Sido, rapporteur. Nous rectifions notre amendement n° 16 afin qu'il soit identique à l'amendement n° 85 rectifié de M. de Broissia.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 16 rectifié, présenté par M. Sido, au nom de la commission des affaires économiques, et ainsi libellé :
« Rédiger comme suit cet article :
« I. - Les trois derniers alinéas de l'article 1er de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication sont supprimés.
« II. - L'article 2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« On entend par communication publique en ligne toute communication audiovisuelle transmise sur demande individuelle formulée par un procédé de télécommunication.
« Est nécessairement considéré comme un service de télévision tout service de communication audiovisuelle accessible en temps réel et de manière simultanée pour l'ensemble du public ou d'une catégorie de public et dont le programme principal est composé d'une suite ordonnée d'émissions comportant des images et des sons, à l'exception des images consistant essentiellement en des lettres, des chiffres ou des images fixes.
« Est nécessairement considéré comme un service de radio tout service de communication audiovisuelle accessible en temps réel et de manière simultanée pour l'ensemble du public ou d'une catégorie de public et dont le programme principal est composé d'une suite ordonnée d'émissions comportant des sons. »
« III. - L'article 4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée est ainsi modifié :
« 1° Avant le premier alinéa sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« I. - Le Conseil supérieur de l'audiovisuel, autorité indépendante, garantit l'exercice de la liberté de communication audiovisuelle en matière de radio et de télévision par tout procédé de télécommunication, dans les conditions définies par la présente loi. Il assure l'égalité de traitement ; il garantit l'indépendance et l'impartialité du secteur public de la radio et de la télévision ; il veille à favoriser la libre concurrence et l'établissement de relations non discriminatoires entre éditeurs et distributeurs de services ; il veille à la qualité et à la diversité des programmes, au développement de la production et de la création audiovisuelles nationales ainsi qu'à la défense et à l'illustration de la langue et de la culture françaises. Il peut formuler des propositions sur l'amélioration de la qualité des programmes.
« Il peut adresser aux éditeurs et distributeurs de services de radio et de télévision des recommandations relatives au respect des principes énoncés dans la présente loi. Ces recommandations sont publiées au Journal officiel de la République française. »
« 2° Le premier alinéa est précédé de la mention : "II". »
La parole est à Mme Danièle Pourtaud, pour explication de vote.
Mme Danièle Pourtaud. Monsieur Sido, vous avez dit que notre amendement n° 175 vise à donner au CSA des pouvoirs qu'il ne demande pas. Vous l'avez lu un peu rapidement.
Notre amendement ne diffère des amendements n°s 85 rectifié et 16 rectifié diffère que par son paragraphe IV qui n'a toutefois pas de quoi effaroucher, me semble-t-il, la commission des affaires économiques. En effet, il ne s'agit que de prendre acte de la régulation du CSA. Si un service de communication audiovisuelle ou de radio est de la compétence du CSA, quel que soit le support, il est assez logique de dire que cette compétence s'étend aussi aux services audiovisuels lorsqu'ils ont des contenus interactifs. Aujourd'hui, toute transmission audiovisuelle par satellite peut comporter des contenus interactifs. Il est un peu dommage de s'arrêter en si bon chemin.
Monsieur Sido, contrairement à ce que vous semblez croire, le CSA a lui-même, dans l'avis que j'ai cité tout à l'heure, fait état de cette précision qui est indispensable pour que l'effort de définition que nous faisons aujourd'hui ne soit pas en deçà de la réalité de la communication audiovisuelle. Il ne s'agit absolument pas d'étendre la compétence du CSA à l'ensemble du champ de l'Internet ; il s'agit simplement de bien définir l'ensemble des services de communication audiovisuelle.
J'aurais préféré que le Sénat se prononce d'abord sur cet amendement n° 175 qui est plus complet que les amendements des deux commissions.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 16 rectifié et 85 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 1er est ainsi rédigé.
L'amendement n° 175 n'a plus d'objet.
Articles additionnels après l'article 1er
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 17 est présenté par M. Sido, au nom de la commission des affaires économiques.
L'amendement n° 86 est présenté par M. de Broissia, au nom de la commission des affaires culturelles.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans l'ensemble des dispositions législatives et réglementaires en vigueur, les mots : "radiodiffusion sonore" sont remplacés par le mot : "radio". »
La parole est à M. Sido, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 17.
M. Bruno Sido, rapporteur. Afin de respecter le principe de neutralité technologique, l'amendement tend à substituer dans l'ensemble de notre législation le terme de « radio » à celui de « radiodiffusion sonore ».
En effet, le terme de « radiodiffusion sonore » est ambigu, car il se réfère non seulement au service diffusé mais également à un mode de diffusion particulier, celui des ondes hertziennes, qui n'est plus le seul utilisé, notamment du fait du développement d'Internet.
M. le président. La parole est à M. Louis de Broissia, pour présenter l'amendement n° 86.
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis. L'amendement n° 86 vise à remplacer, dans l'ensemble des dispositions législatives et réglementaires, par souci de neutralité technologique, l'expression un peu désuète, qui sent sa vieille époque, de « radiodiffusion sonore » par le terme de « radio ». Les termes « radiodiffusion sonore » sont, je le répète, ambigus : ils se réfèrent aux ondes hertziennes ; or le numérique permet aujourd'hui, sans ondes hertziennes, de recevoir la radio, la télévision et toute forme d'expression.
Il s'agit donc d'une rectification sémantique, qui a son importance.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 17 et 86.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 1er.
COMMUNICATION RELATIVE
À UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE
M. le président. J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour l'initiative économique est parvenue à l'adoption d'un texte commun.
DÉPÔT D'UN RAPPORT DU GOUVERNEMENT
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre, en application de l'article 48, premier alinéa, de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, le rapport sur l'évolution de l'économie nationale et des finances publiques.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI
ORGANIQUE
M. le président. J'ai reçu de M. Hubert Haenel une proposition de loi organique visant à garantir le respect de la laïcité et de la neutralité du service public de la justice.
La proposition de loi organique sera imprimée sous le n° 364, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administation générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI
M. le président. J'ai reçu de M. Jean-Louis Masson une proposition de loi remédiant à l'obligation pour les collectivités territoriales de garantir l'assurance chômage de leurs agents titulaires.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 363, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de Mme Nicole Borvo, MM. Roland Muzeau, Guy Fischer, Mme Michelle Demessine, MM. Robert Bret, Gérard Le Cam, Mmes Marie-Claude Beaudeau, Marie-France Beaufils, Danielle Bidard-Reydet, M. Yves Coquelle, Mmes Annie David, Evelyne Didier, M. Thierry Foucaud, Mmes Hélène Luc, Josiane Mathon, MM. Jack Ralite, Ivan Renar, Mme Odette Terrade, M. Paul Vergès une proposition de loi instaurant une amnistie sociale.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 365, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de M. Daniel Hoeffel une proposition de loi tendant au dépôt de candidatures au sein des communes de moins de 3 500 habitants pour les élections municipales.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 366, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
TEXTES SOUMIS AU SÉNAT
EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4
DE LA CONSTITUTION
M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre les textes suivants, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution.
- Action commune 2003/423/PESC du Conseil du 5 juin 2003 relative à l'opération militaire de l'Union européenne en République démocratique du Congo.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-2317 et distribué.
- Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant un programme d'action communautaire pour la promotion des organismes actifs au niveau européen dans le domaine de la jeunesse.
Ce texte sera imprimé sour le n° E-2318 et distribué.
- Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant un programme d'action communautaire pour la promotion des organismes actifs au niveau européen et le soutien d'activités ponctuelles dans le domaine de l'éducation et de la formation.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-2319 et distribué.
- Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant un programme d'action communautaire pour la promotion des organisations actives au niveau européen dans le domaine de l'égalité entre les hommes et les femmes.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-2320 et distribué.
DÉPÔT D'UN RAPPORT
M. le président. J'ai reçu de M. Roland du Luart, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion sur le projet de loi de programme pour l'outre-mer.
Le rapport sera imprimé sous le numéro 360 et distribué.
DÉPÔT DE RAPPORTS D'INFORMATION
M. le président. J'ai reçu de M. Jacques Legendre un rapport d'information fait au nom des délégués élus par le Sénat à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe sur la protection des biens culturels africains, adressé à M. le président du Sénat en application de l'article 108 du règlement.
Actes du colloque
« La protection des biens culturels africains »
organisé au Sénat - Paris - 28 mars 2003
Le rapport d'information sera imprimé sous le numéro 361 et distribué.
J'ai reçu de M. Jean-Pierre Masseret un rapport d'information fait au nom des délégués élus par le Sénat sur les travaux de la délégation française à l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe au cours de la deuxième partie de la session ordinaire de 2003 de cette assemblée, adressé à M. le président du Sénat, en application de l'article 108 du règlement.
Le rapport d'information sera imprimé sous le numéro 362 et distribué.
ORDRE DU JOUR
M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, mercredi 25 juin 2003, à quinze heures et le soir :
1. Discussion des conclusions du rapport (n° 360, 2002-2003) de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de programme pour l'outre-mer ;
M. Roland du Luart, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire.
2. Suite de la discussion du projet de loi (n° 195, 2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, pour la confiance dans l'économie numérique ;
Rapport (n° 345, 2002-2003) de MM. Pierre Hérisson et Bruno Sido, rapporteurs de la commission des affaires économiques et du Plan ;
Avis (n° 342, 2002-2003) de M. Louis de Broissia, fait au nom de la commission des affaires culturelles ;
Avis (n° 351, 2002-2003) de M. Alex Türk, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
Délai limite pour les inscriptions de parole
Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat d'orientation budgétaire.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mercredi 25 juin 2003, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée, le mercredi 25 juin 2003, à zéro heure trente.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD
ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES DU SÉNAT
établi par le Sénat dans sa séance du mardi 24 juin 2003
à la suite des conclusions de la conférence des présidents
Mercredi 25 juin 2003 :
Ordre du jour prioritaire
A 15 heures et le soir :
1° Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de programme pour l'outre-mer (n° 360, 2002-2003) ;
2° Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, pour la confiance dans l'économie numérique (n° 195, 2002-2003).
Jeudi 26 juin 2003 :
A 9 h 30 :
Ordre du jour prioritaire
1° Eventuellement, suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, pour la confiance dans l'économie numérique.
A 15 heures et, éventuellement, le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures.)
Ordre du jour prioritaire
3° Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat d'orientation budgétaire.
(La conférence des présidents a fixé à :
- quarante-cinq minutes le temps réservé au président et au rapporteur général de la commission des finances ;
- dix minutes le temps réservé à chacun des présidents des autres commissions permanentes intéressées ;
- quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 25 juin 2003.)
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON
ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du mardi 24 juin 2003
SCRUTIN (n° 172)
sur le sous-amendement n° 198 rectifié à l'amendement n° 11, présenté par M. Jean-François Le Grand et plusieurs de ses collègues, du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, pour la confiance en l'économie numérique.
Nombre de votants : 318
Nombre de suffrages
exprimés : 316
Pour : 19
Contre : 297
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :
Contre : 22.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Guy Fischer, qui présidait la séance.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (27) :
Pour : 2. _ MM. Michel Mercier et Philippe Nogrix.
Contre : 25.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (17) :
Pour : 9.
Contre : 6. _ MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard Delfau, François Fortassin et Dominique Larifla.
Abstentions : 2. _ MM. Nicolas Alfonsi et Rodolphe Désiré.
GROUPE SOCIALISTE (83) :
Contre : 83.
GROUPE UNION POUR UN MOUVEMENT POPULAIRE (166) :
Pour : 8. _ MM. Paul Blanc, Alain Fouché, Jean-François Le Grand, Roland du Luart, Jean Pépin, Jean Puech, René Trégouët et Alain Vasselle.
Contre : 156.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Emmanuel Hamel.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (5) :
Contre : 5.
Ont voté pour
Gilbert Barbier
Paul Blanc
Ernest Cartigny
Fernand Demilly
Alain Fouché
Bernard Joly
Pierre Laffitte
Jean-François Le Grand
Roland du Luart
Michel Mercier
Aymeri de Montesquiou
Philippe Nogrix
Georges Othily
Jacques Pelletier
Jean Pépin
Jean Puech
René Trégouët
André Vallet
Alain Vasselle
Ont voté contre
Nicolas About
Philippe Adnot
Jean-Paul Alduy
Jean-Paul Amoudry
Michèle André
Pierre André
Bernard Angels
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Denis Badré
Gérard Bailly
José Balarello
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Marie-France Beaufils
Michel Bécot
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Claude Belot
Maryse Bergé-Lavigne
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jean Besson
Laurent Béteille
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Joël Billard
Claude Biwer
Jean Bizet
Jacques Blanc
Marie-Christine Blandin
Maurice Blin
Annick Bocandé
Didier Borotra
Nicole Borvo
Didier Boulaud
Joël Bourdin
Brigitte Bout
André Boyer
Jean Boyer
Yolande Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Robert Bret
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Claire-Lise Campion
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Jean-Louis Carrère
Auguste Cazalet
Bernard Cazeau
Charles Ceccaldi-Raynaud
Monique Cerisier-ben Guiga
Gérard César
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Christian Cointat
Yvon Collin
Gérard Collomb
Yves Coquelle
Gérard Cornu
Raymond Courrière
Roland Courteau
Jean-Patrick Courtois
Philippe Darniche
Yves Dauge
Annie David
Marcel Debarge
Robert Del Picchia
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Dériot
Sylvie Desmarescaux
Yves Detraigne
Evelyne Didier
Eric Doligé
Claude Domeizel
Jacques Dominati
Michel Doublet
Michel Dreyfus-Schmidt
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Louis Duvernois
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Claude Estier
Jean-Claude Etienne
Pierre Fauchon
Jean Faure
Françoise Férat
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
François Fortassin
Thierry Foucaud
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Jean-Claude Frécon
Yves Fréville
Bernard Frimat
Yann Gaillard
René Garrec
Christian Gaudin
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Charles Gautier
Gisèle Gautier
Patrice Gélard
André Geoffroy
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Jean-Pierre Godefroy
Daniel Goulet
Jacqueline Gourault
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Charles Guené
Jean-Noël Guérini
Michel Guerry
Hubert Haenel
Claude Haut
Françoise Henneron
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Odette Herviaux
Daniel Hoeffel
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Alain Journet
Jean-Marc Juilhard
Roger Karoutchi
Joseph Kergueris
Yves Krattinger
Christian de La Malène
André Labarrère
Philippe Labeyrie
Jean-Philippe Lachenaud
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
André Lardeux
Dominique Larifla
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
René-Georges Laurin
Gérard Le Cam
Jean-René Lecerf
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
André Lejeune
Serge Lepeltier
Louis Le Pensec
Philippe Leroy
Marcel Lesbros
Valérie Létard
Claude Lise
Gérard Longuet
Paul Loridant
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Hélène Luc
Brigitte Luypaert
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Max Marest
Philippe Marini
Pierre Martin
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Jean-Louis Masson
Serge Mathieu
Josiane Mathon
Pierre Mauroy
Louis Mermaz
Lucette Michaux-Chevry
Gérard Miquel
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Michel Moreigne
Dominique Mortemousque
Georges Mouly
Bernard Murat
Roland Muzeau
Philippe Nachbar
Paul Natali
Nelly Olin
Joseph Ostermann
Jacques Oudin
Monique Papon
Jean-Marc Pastor
Anne-Marie Payet
Michel Pelchat
Guy Penne
Daniel Percheron
Jacques Peyrat
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Xavier Pintat
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Henri de Raincourt
Jack Ralite
Daniel Raoul
Paul Raoult
Daniel Reiner
Ivan Renar
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Roger Rinchet
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Roger Romani
Gérard Roujas
André Rouvière
Janine Rozier
Michèle San Vicente
Bernard Saugey
Claude Saunier
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Michel Sergent
Bruno Sido
René-Pierre Signé
Daniel Soulage
Louis Souvet
Jean-Pierre Sueur
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Michel Thiollière
Jean-Marc Todeschini
Henri Torre
Pierre-Yvon Tremel
André Trillard
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
Jean-Marie Vanlerenberghe
André Vantomme
Paul Vergès
André Vezinhet
Jean-Pierre Vial
Marcel Vidal
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Jean-Paul Virapoullé
Henri Weber
François Zocchetto
Abstentions
Nicolas Alfonsi, Rodolphe Désiré.
N'a pas pris part au vote
Emmanuel Hamel.
N'ont pas pris part au vote
Christian Poncelet, président du Sénat, et Guy Fischer, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 319
Nombre de suffrages
exprimés : 317
Majorité absolue des suffrages exprimés : 159
Pour :
19
Contre : 298
Mais, après vérification, ces nombres ont été
rectifiés conformément à la liste ci-dessus.
SCRUTIN (n° 173)
sur l'amendement n° 11, déposé par la commission des affaires économiques, à l'article 1 A du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, pour la confiance en l'économie numérique, sous-amendé par le sous-amendement n° 167 rectifié.
Nombre de votants : 318
Nombre de suffrages
exprimés : 234
Pour : 205
Contre : 29
Le Sénat a adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :
Contre : 22.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Guy Fischer, qui présidait la séance.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (27) :
Pour : 27.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (17) :
Pour : 9.
Contre : 7. _ MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard Delfau, Rodolphe Désiré, François Fortassin et Dominique Larifla.
Abstention : 1. _ M. Nicolas Alfonsi.
GROUPE SOCIALISTE (83) :
Abstention : 83.
GROUPE DE L'UNION POUR UN MOUVEMENT POPULAIRE (166) :
Pour : 164.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ M. Christian Poncelet, président du Sénat, et Emmanuel Hamel.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (5) :
Pour : 5.
Ont voté pour
Nicolas About
Philippe Adnot
Jean-Paul Alduy
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
Gérard Bailly
José Balarello
Gilbert Barbier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Joël Billard
Claude Biwer
Jean Bizet
Jacques Blanc
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
Didier Borotra
Joël Bourdin
Brigitte Bout
Jean Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Ernest Cartigny
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Christian Cointat
Gérard Cornu
Jean-Patrick Courtois
Philippe Darniche
Robert Del Picchia
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Dériot
Sylvie Desmarescaux
Yves Detraigne
Eric Doligé
Jacques Dominati
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Louis Duvernois
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Jean-Claude Etienne
Pierre Fauchon
Jean Faure
Françoise Férat
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Alain Fouché
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Christian Gaudin
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Gisèle Gautier
Patrice Gélard
André Geoffroy
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Jacqueline Gourault
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Charles Guené
Michel Guerry
Hubert Haenel
Françoise Henneron
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Daniel Hoeffel
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Bernard Joly
Jean-Marc Juilhard
Roger Karoutchi
Joseph Kergueris
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
André Lardeux
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
René-Georges Laurin
Jean-René Lecerf
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Jean-François Le Grand
Serge Lepeltier
Philippe Leroy
Marcel Lesbros
Valérie Létard
Gérard Longuet
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Brigitte Luypaert
Max Marest
Philippe Marini
Pierre Martin
Jean-Louis Masson
Serge Mathieu
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Dominique Mortemousque
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Monique Papon
Anne-Marie Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Roger Romani
Janine Rozier
Bernard Saugey
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Bruno Sido
Daniel Soulage
Louis Souvet
Michel Thiollière
Henri Torre
René Trégouët
André Trillard
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Jean-Marie Vanlerenberghe
Alain Vasselle
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Jean-Paul Virapoullé
François Zocchetto
Ont voté contre
François Autain
Jean-Yves Autexier
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Marie-France Beaufils
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Nicole Borvo
André Boyer
Robert Bret
Yvon Collin
Yves Coquelle
Annie David
Gérard Delfau
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Evelyne Didier
François Fortassin
Thierry Foucaud
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
Paul Loridant
Hélène Luc
Josiane Mathon
Roland Muzeau
Jack Ralite
Ivan Renar
Odette Terrade
Paul Vergès
Abstentions
Nicolas Alfonsi
Michèle André
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
Robert Badinter
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Marie-Christine Blandin
Didier Boulaud
Yolande Boyer
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Gérard Collomb
Raymond Courrière
Roland Courteau
Yves Dauge
Marcel Debarge
Jean-Pierre Demerliat
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Jean-Claude Frécon
Bernard Frimat
Charles Gautier
Jean-Pierre Godefroy
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Odette Herviaux
Alain Journet
Yves Krattinger
André Labarrère
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
André Lejeune
Louis Le Pensec
Claude Lise
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Louis Mermaz
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Daniel Raoul
Paul Raoult
Daniel Reiner
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Michèle San Vicente
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Jean-Pierre Sueur
Simon Sutour
Michel Teston
Jean-Marc Todeschini
Pierre-Yvon Tremel
André Vantomme
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
N'a pas pris part au vote
Emmanuel Hamel.
N'ont pas pris part au vote
Christian Poncelet, président du Sénat, et Guy Fischer, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 319
Nombre de suffrages
exprimés : 237
Majorité absolue des suffrages exprimés : 118
Pour :
205
Contre : 32
Mais, après vérification, ces nombres ont été
rectifiés conformément à la liste ci-dessus.