M. le président. « Art. 20. - Il est ajouté à la section 4 du chapitre II du titre VI du livre II du code de l'action sociale et des familles deux articles L. 262-38-1 et L. 262-38-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 262-38-1. - Des conventions passées entre le département et chacun des organismes chargés de l'emploi et de la formation professionnelle fixent les modalités de mise en oeuvre des actions mentionnées aux 1° et 2° de l'article L. 262-38 et déterminent la nature des informations nominatives échangées sur la situation des bénéficiaires.
« Art. L. 262-38-2. - Lorsqu'un allocataire bénéficie d'une mesure d'accès à l'emploi ou d'une prestation comportant un accompagnement personnalisé, l'employeur ou le prestataire concerné adresse tous les trois mois à la personne mentionnée au deuxième alinéa de l'article L. 262-37 un document attestant que cette action d'insertion est suivie.
« Ce document vaut contrat d'insertion au sens de l'article L. 262-37.
« Si ce document fait apparaître que l'action d'insertion n'est pas suivie, la personne mentionnée au deuxième alinéa de l'article L. 262-37 convoque l'allocataire. S'il est établi que le non-respect de l'action d'insertion lui est imputable, le versement de l'allocation peut être suspendu dans les conditions prévues à l'article L. 262-23. »
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 108, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le texte proposé par cet article pour l'article L. 262-38-2 du code de l'action sociale et des familles. »
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 11 est présenté par M. Seillier, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 70 est présenté par M. Chabroux, Mme Blandin, M. Cazeau et les membres du groupe socialiste et apparenté.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 262-38-2 du code de l'action sociale et des familles. »
L'amendement n° 12, présenté par M. Seillier, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Remplacer la seconde phrase du dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 262-38-2 du code de l'action sociale et des familles par deux alinéas ainsi rédigés :
« Après l'avoir mis en mesure de présenter ses observations, elle peut, si des motifs légitimes ont empêché le bénéficiaire de suivre l'action d'insertion, demander la révision du contrat d'insertion, dans les conditions prévues à l'article L. 262-23.
« S'il est établi que le non-respect de l'action d'insertion est imputable, sans motif légitime, au bénéficiaire, le versement de l'allocation peut être suspendu dans les conditions prévues à l'article L. 262-23. »
La parole est à M. Guy Fischer, pour défendre l'amendement n° 108.
M. Guy Fischer. Si nous pouvons a priori partager le souci de renforcer le contrôle des actions d'insertion suivies par les bénéficiaires du RMI, le présent article nous semble pourtant devoir être supprimé dans la mesure où la signature d'un contrat de travail ou de formation ne saurait tenir lieu de contrat d'insertion, sauf à appauvrir ces derniers et à changer leur nature, comme l'a d'ailleurs souligné M. le rapporteur.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 11.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Donner à l'attestation de suivi de l'action d'insertion valeur de contrat d'insertion pose, d'abord, un problème d'ordre juridique.
Dès lors que le contrat d'insertion doit être passé entre le président du conseil général et l'allocataire, on donnerait valeur de contrat d'insertion à un contrat de travail ou de formation dont les signataires seraient différents.
Mais, au-delà de cette question, accepter qu'une attestation vaille, à elle seule, contrat d'insertion modifie profondément, à notre sens, la nature de ce contrat. Sa portée est considérablement réduite puisqu'il ne porte plus que sur une action précise à caractère essentiellement professionnel. Il perd donc sa dimension de mobilisation des différents aspects d'une insertion réussie. Toute logique de parcours d'insertion disparaît. Il s'agit non plus d'effectuer des démarches diverses pour atteindre un objectif, mais d'exécuter une action précise, qui devient l'objet même du contrat.
L'engagement réciproque de la collectivité devient secondaire. Dès lors qu'il s'agit d'exécuter une action précise, toute la responsabilité de la réussite ou de l'échec de l'insertion repose finalement sur le seul allocataire. Dans la mesure où le contrat n'est plus signé entre l'allocataire et le département, mais entre l'allocataire et l'employeur ou l'accompagnateur, la responsabilité de la collectivité dans l'accompagnement et le soutien au retour à l'activité n'apparaît plus.
Par conséquent, la commission des affaires sociales estime que la simplification envisagée - puisque c'est ainsi que cette mesure est présentée - est une fausse bonne idée, qui comporte des effets pervers redoutables. C'est la raison pour laquelle elle vous propose de supprimer cette disposition.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Chabroux, pour défendre l'amendement n° 70.
M. Gilbert Chabroux. Je fais miens les arguments qui ont été développés par M. Seillier et, dans un souci d'ouverture, je retire cet amendement au profit de celui de la commission.
M. le président. L'amendement n° 70 est retiré.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 12 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 108.
M. Bernard Seillier, rapporteur. La rédaction qui est proposée dans cet article accentue considérablement le rôle de contrôleur du référent, car la seule mesure qui semble susceptible d'être prise en cas de non-respect de l'action d'insertion est la suspension de l'allocation, même si celle-ci n'est pas automatique. Il paraît nécessaire de donner un rôle plus positif au référent pour prévenir une suspension de l'allocation.
L'amendement n° 12 vise donc à préciser qu'au vu des motifs du non-respect de l'action d'insertion le référent peut également demander une révision du contrat d'insertion, afin de l'adapter aux besoins et aux capacités de la personne.
En ce qui concerne l'amendement n° 108, la commission y est défavorable, puisqu'il tend à supprimer les moyens, pour le référent, de suivre la démarche d'insertion de l'allocataire.
J'ai déjà eu l'occasion de souligner que le fait de donner à une attestation la valeur d'un contrat d'insertion peut être inutilement dangereux. Faut-il pour autant supprimer tout moyen pour le référent de suivre l'insertion du bénéficiaire ? Ce suivi n'est d'ailleurs pas uniquement négatif : le référent peut également demander une révision du contrat afin de l'adapter le plus en continu possible aux besoins de l'allocataire. Or, cet amendement a une portée plus large que les amendements identiques présentés par M. Chabroux et par la commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. S'agissant de l'amendement n° 108, je ne suis pas sûr que ses auteurs aient totalement mesuré la portée de la suppression qu'ils proposent : en réalité, cette disposition est favorable à l'intéressé. En effet, elle vise à alléger la procédure de contractualisation quand les actions d'insertion consistent en des mesures d'accès à l'emploi ou en des prestations d'accompagnement personnalisé.
Il s'agit donc non pas de réduire le contrat d'insertion à l'insertion professionnelle, mais de simplifier les circuits d'information dans l'intérêt des allocataires et des services chargés de leur suivi.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 108.
En ce qui concerne l'amendement n° 11, présenté par la commission, le Gouvernement ne considère pas qu'il traite d'un sujet fondamental et il est donc ouvert à toutes les suggestions du Sénat. Cependant, je voudrais quand même que vous réfléchissiez : hier, nombre d'orateurs ont souligné que le texte était trop rigide et qu'il fallait essayer de simplifier les choses, de donner plus de souplesse, plus de liberté. Or, en remplaçant l'attestation d'activité par la conclusion d'un contrat d'insertion, on réintroduit de la rigidité dans le système.
La possibilité d'utiliser l'attestation d'activité pour valider le contrat d'insertion constitue vraiment une mesure de simplification des formalités, tant pour le bénéficiaire que pour la structure qui est chargée du suivi.
Vous avez tous souligné à quel point ces structures chargées du suivi étaient aujourd'hui engorgées et n'arrivaient pas à consacrer suffisamment de temps à l'accompagnement personnalisé. Cette disposition permet d'alléger un peu les procédures sans nuire en rien au dispositif. En effet, si la situation du bénéficiaire nécessite des actions d'insertion complémentaires, un contrat d'insertion peut toujours être conclu. Je souhaiterais que le Sénat veuille bien entendre mes arguments sur ce point.
Quant à l'amendement n° 12, le Gouvernement y est favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 108.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 20, modifié.
(L'article 20 est adopté.)
Article additionnel avant l'article 21
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 90 rectifié, présenté par Mme Blandin, est ainsi libellé :
« Avant l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Après le premier alinéa de l'article L. 262-39 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le recours est suspensif de la décision. »
L'amendement n° 109, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le premier alinéa de l'article L. 262-39 du code de l'action sociale et des familles est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le recours est suspensif de la décision de suspension du paiement du revenu minimum d'insertion. »
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour présenter l'amendement n° 90 rectifié.
Mme Marie-Christine Blandin. En cas de recours consécutif à une décision de radiation, l'allocataire doit pouvoir continuer à subvenir à ses besoins dans l'attente de la décision du conseil départemental d'aide sociale.
Monsieur le ministre, votre projet de loi suscite une inquiétude : l'acceptation d'un travail de vingt heures lié à un RMA ne risque-t-elle pas de devenir la condition pour conserver le droit au RMI ? Cette inquiétude a été rapportée ici par les sénateurs de l'opposition. Dans votre discours introductif, comme dans vos réponses aux orateurs, vous avez laissé entendre que tel n'était pas l'esprit des rédacteurs du texte.
L'émotion que provoqueraient d'éventuelles radiations liées à des appréciations unilatérales de bonne ou de mauvaise volonté à se réinsérer serait, me semble-t-il, apaisée par l'effet suspensif du recours en attendant l'arbitrage des instances mandatées pour apprécier la situation. Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour défendre l'amendement n° 109.
M. Guy Fischer. Nous venons de le voir, le président du conseil général détient entre ses mains l'ensemble des pouvoirs en matière de décisions individuelles concernant le RMI.
Il est à craindre que, devenu trop conditionnel, le RMI ne soit pas accordé à une personne qui aurait formulé un premier refus ou qui ne signerait pas pour diverses raisons, tenant, par exemple, à son incapacité à formaliser un projet personnel.
Il est à craindre que le RMI ne soit suspendu si la personne qui a contractualisé ne parvient pas à honorer le contrat d'insertion initial, parce qu'il est trop exigeant, par exemple.
Lorsque l'on sait les conséquences, immédiatement dramatiques, que peuvent avoir de telles décisions sur des familles dont la seule ressource est cette allocation, on peut se demander s'il ne convient pas de poser le principe du caractère suspensif du recours contentieux en ces matières.
Tel est l'objet du présent amendement, qui me donne également l'occasion d'interroger M. le ministre sur ses intentions concernant les instances de recours contentieux existantes. Commission départementale d'aide sociale ou commission centrale d'aide sociale, ces institutions fonctionnent mal et statuent souvent après des délais trop longs.
Les associations demandent que soit créée une instance de recours non contentieux compétente pour les décisions portant sur l'allocation et le contrat d'insertion. Quel est votre sentiment sur cette proposition, monsieur le ministre ?
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. L'amendement n° 90 rectifié, tend à rendre suspensifs les recours formés à l'encontre des décisions relatives à l'allocation : ce serait totalement dérogatoire par rapport au droit commun, non seulement de l'aide sociale en particulier, mais du droit au recours en général.
Permettez-moi quelques observations.
Toute suspension de l'allocation est précédée d'un avis de la commission locale d'insertion, ce qui prémunit d'ores et déjà l'allocataire contre des décisions hâtives.
La radiation intervient soit à l'issue d'une suspension - on se trouve alors dans la situation précitée -, soit parce que l'allocataire ne remplit plus les conditions objectives pour bénéficier de l'allocation, notamment la condition de ressource. Là encore, le caractère suspensif du recours paraît injustifié.
Par ailleurs, l'amendement n° 90 rectifié a un champ d'application très large dans la mesure où le droit au recours n'est pas ouvert au seul bénéficiaire de l'allocation et qu'il n'est pas précisé, non plus, que le recours est suspensif au seul profit du bénéficiaire. Rien n'empêcherait alors un tiers intéressé d'attaquer la décision de renouveler le droit à l'allocation. Le versement serait alors suspendu et l'allocataire serait privé de son allocation.
Le risque d'effets pervers n'est donc pas négligeable.
Pour ces raisons, la commission des affaires sociale est défavorable à l'amendement n° 90 rectifié.
Les mêmes arguments valent en ce qui concerne l'amendement n° 109, puisqu'il est analogue au précédent.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement partage l'avis du rapporteur en ce qui concerne la mise en place d'un recours suspensif. Les effets pervers d'un tel dispositif pourraient, en effet, se révéler beaucoup plus importants que les bénéfices que l'on pourrait espérer en retirer.
En revanche, M. Fischer a raison de dire que les commissions départementales ne fonctionnent pas de la meilleure façon possible. Il nous faut donc chercher à en améliorer le fonctionnement. Cependant, le Gouvernement ne se propose pas, par ce texte, de changer les règles en matière de recours contentieux.
Donc, je souhaite que ces deux amendements soient repoussés, mais je prends l'engagement devant le Sénat de considérer les solutions susceptibles d'améliorer le fonctionnement du système actuel.
M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, contre l'amendement n° 90 rectifié.
M. Michel Mercier. Je suis hostile à ces deux amendements, qui révèlent une ignorance complète du fonctionnement du système.
Les présidents de conseils généraux, contrairement à ce qui est sous-entendu ici, ne prendront pas à la légère une décision de suspension ou de radiation, et ce pour une raison toute simple : toute suspension ou radiation, s'agissant de personnes qui n'ont d'autres ressources que le RMI, se traduit immédiatement, pour le département, par une prise en charge au titre de l'aide sociale générale, c'est-à-dire par une augmentation de la charge et non par une économie. La décision sera bien pesée avant d'être prise, mes chers collègues !
Les présidents de conseils généraux sont des élus comme nous tous, aussi légitimes, aussi responsables que nous, et ils ne vont pas faire n'importe quoi pour le plaisir de faire n'importe quoi, contrairement à ce que j'entends dire ici depuis un certain temps.
M. Guy Fischer. Mais non !
M. Michel Mercier. On voudrait prévoir dans la loi que les personnes seront vues au moins deux fois par an ; on a oublié de nous donner le jour et l'heure ! Je ne désespère pas : encore quelques efforts, et l'on va y parvenir ! (Sourires.)
Très sincèrement, le moment est venu de savoir si l'on pense vraiment qu'il est plus efficace de confier la gestion du RMI et du RMA aux départements ou si les présidents de conseils généraux sont tellement mauvais qu'ils vont saborder le dispositif. Dans ce cas, il ne faut pas décentraliser ! Il n'y a aucune obligation à décentraliser !
M. Roland Muzeau. C'est ce que nous vous disons depuis le début !
M. Michel Mercier. Mais on ne peut pas continuer ainsi à nourrir la suspicion contre des présidents de conseils généraux dont on voudrait nous faire croire qu'ils feront n'importe quoi pour torpiller la situation de gens qui sont déjà dans le malheur.
M. Guy Fischer. Ce n'est pas ce que nous disons !
M. Michel Mercier. C'est insupportable et cela ne correspond pas à la réalité.
Par ailleurs, si le Gouvernement a pensé devoir confier la gestion du RMI et du RMA aux départements, c'est justement parce que ceux-ci, depuis 1982, se sont révélés être de bons gestionnaires et de bons organisateurs de l'aide sociale.
C'est la raison pour laquelle je suis tout à fait contre ces deux amendements, contre leur lettre et contre l'esprit qui les anime. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 90 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 109.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. « Art. 21. - A l'article L. 262-39 du code de l'action sociale et des familles, le deuxième alinéa est abrogé. » - (Adopté.)
M. le président. « Art. 22. - Le deuxième alinéa de l'article L. 262-43 du code de l'action sociale et des familles est remplacé par les dispositions suivantes :
« Le recouvrement est fait dans les conditions prévues à l'article L. 132-11. »
L'amendement n° 71, présenté par M. Chabroux, Mme Blandin, M. Cazeau et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
La parole est à M. Gilbert Chabroux.
M. Gilbert Chabroux. Nous demandons la suppression de l'article 22. La nature particulière de l'allocation implique des modalités de recouvrement distinctes en cas de décès du bénéficiaire ou de cession de son actif.
Cet article ne laisse pas de nous inquiéter en raison du contexte familial et social dans lequel évoluent nombre de bénéficiaires du RMI.
C'est pourquoi il nous paraît préférable de maintenir la rédaction actuelle, élaborée, à l'époque, pour tenir compte de cette difficulté particulière.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Il est défavorable, car cet amendement tend à maintenir le droit actuellement en vigueur concernant les modalités particulières de recouvrement sur la succession ou sur la cession de l'actif du bénéficiaire applicables aux RMIstes.
J'observe que l'article 22 ne vise que les modalités pratiques de recouvrement et tire simplement la conséquence, pour ces modalités, de la décentralisation. Ce recouvrement se fera désormais au profit des départements, comme pour les autres prestations d'aide sociale légales, et non plus de l'Etat.
La suppression proposée est donc incompatible avec le principe de la décentralisation, sur lequel la commission s'est déjà prononcée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement partage l'avis défavorable de la commission.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 71.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 22.
(L'article 22 est adopté.)
M. le président. « Art. 23. - Au quatrième alinéa de l'article L. 262-44 du code de l'action sociale et des familles, les mots : "après avis de la commission locale d'insertion et" sont supprimés. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 72 est présenté par M. Chabroux, Mme Blandin, M. Cazeau et les membres du groupe socialiste et apparenté.
L'amendement n° 110 est présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés : « Supprimer cet article. »
La parole est à M. Gilbert Chabroux, pour présenter l'amendement n° 72.
M. Gilbert Chabroux. L'avis de la commission locale d'insertion apparaît particulièrement opportun en cas de versement de l'allocation à un organisme tiers et de reversement fractionné à l'allocataire, puisque cette procédure témoigne de l'existence d'un problème important du bénéficiaire.
Nous ne manifestons ici aucune suspicion à l'égard des présidents de conseils généraux. Simplement, dans l'hypothèse du quatrième alinéa de l'article L. 262-44 du code de l'action sociale et des familles, c'est-à-dire celle du versement du RMI, avec l'accord de la personne, à un organisme agréé et, en général, sous forme fractionnée, on est en présence d'une personne en grande difficulté pour des raisons souvent psychologiques ou de dépendance. L'avis de la commission locale d'insertion n'est donc pas superflu. Il nous semble même pour le moins nécessaire que les représentants des institutions sociales et des associations, qui ont souvent une bonne connaissance de la personne et de son environnement, puissent émettre un avis.
D'un point de vue général, mais surtout dans le cas présent, cette volonté de prendre les décisions relatives au RMI sans aucune concertation avec les praticiens témoigne, de la part des rédacteurs du projet de loi, tout à la fois d'une absence de considération pour les personnes, que l'on réduit à des numéros de dossier, et d'une totale méconnaissance des réalités sociales. Par conséquent, nous demandons la suppression de l'article 23.
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour présenter l'amendement n° 110.
M. Roland Muzeau. J'ai déjà eu l'occasion de m'expliquer assez longuement sur le sujet et de regretter la réduction des compétences des CLI au profit exclusif des présidents de conseils généraux. Je serai donc bref.
En l'espèce, c'est-à-dire lorsque le RMI est versé non pas directement à l'allocataire mais à un organisme tiers en raison des difficultés particulières rencontrées par la personne, il n'est pas du tout opportun de supprimer l'avis de la CLI. C'est pourquoi nous avons déposé cet amendement de suppression de l'article 23.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. En tout état de cause, le président du conseil général ne peut prendre seul une décision de mandatement de l'allocation puisque celle-ci est subordonnée à l'accord de l'allocataire lui-même. Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le texte qui est soumis à l'examen du Sénat est sous-tendu par une préoccupation de simplification. Dans cette perspective, il est proposé que les missions des commissions locales d'insertion soient recentrées sur le pilotage. Ce n'est que dans le cas où il est envisagé de suspendre l'allocation que la CLI sera amenée à donner un avis sur une situation individuelle, dans un souci d'éclairer la décision ultérieure.
M. Mercier, s'exprimant sur la responsabilité du conseil général qui, désormais, pilote ce dispositif, a été tout à fait éloquent ; je me contenterai donc de demander que le Sénat repousse ces deux amendements identiques de suppression.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 72 et 110.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 23.
(L'article 23 est adopté.)
M. le président. « Art. 24. - L'article L. 263-1 du code de l'action sociale et des familles est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 263-1. - Le président du conseil général conduit l'action d'insertion sociale et professionnelle des bénéficiaires du revenu minimum d'insertion. Il bénéficie à cette fin du concours de l'Etat, des autres collectivités territoriales et des autres personnes morales de droit public ou privé, notamment les associations, concourant à l'insertion sociale et professionnelle. »
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 111, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 93, présenté par M. Vasselle, est ainsi libellé :
« Dans la seconde phrase du texte proposé par cet article pour l'article L. 263-1 du code de l'action sociale et des familles, après les mots : "de l'Etat," insérer les mots : "éventuellement, en tant que de besoin,". »
L'amendement n° 13, présenté par M. Seillier, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Après les mots : "collectivités territoriales", rédiger comme suit la fin de la seconde phrase du texte proposé par cet article pour l'article L. 263-1 du code de l'action sociale et des familles : ", des organismes chargés de l'emploi et de la formation professionnelle et des autres personnes morales de droit public ou privé, notamment des associations, oeuvrant dans le domaine de l'insertion et de la lutte contre la pauvreté et l'exclusion". »
L'amendement n° 73, présenté par M. Chabroux, Mme Blandin, M. Cazeau et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Compléter in fine le texte proposé par cet article pour l'article L. 263-1 du code de l'action sociale et des familles par les mots : "et à la lutte contre la pauvreté et l'exclusion". »
La parole est à M. Roland Muzeau, pour présenter l'amendement n° 111.
M. Roland Muzeau. Nous souhaitons la suppression de l'article 24 parce qu'il tend à mettre fin au copilotage en matière d'insertion. Il concentre entre les mains du président du conseil général, la responsabilité de la conduite des actions d'insertion sociale et professionnelle des bénéficiaires du RMI, alors qu'en ce domaine il convient de dynamiser les relations entre l'ensemble des acteurs, service public de l'emploi et associations, notamment.
M. le président. L'amendement n° 93 n'est pas soutenu.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 13.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Cet amendement a deux objets : d'une part, faire apparaître le nécessaire concours du service public de l'emploi aux actions d'insertion sociale et professionnelle en faveur des bénéficiaires du RMI et, d'autre part, reconnaître le rôle essentiel des associations de lutte contre la pauvreté et l'exclusion, en reprenant la qualification adoptée par la loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions pour les désigner.
La commission a bien conscience que la décentralisation ne saurait s'accompagner de prescriptions tatillonnes enjoignant le département de travailler avec tel ou tel. Il semble pourtant que, dans cet article de principe, il soit possible de souligner davantage le rôle de ces deux acteurs.
S'agissant des associations, dont chacun s'accorde à reconnaître l'action irremplaçable, il me semble notamment que la référence à la qualification adoptée par la loi relative à la lutte contre les exclusions serait un geste, certes symbolique, mais important à leurs yeux, ainsi qu'une reconnaissance de leur expérience.
Il ne s'agit donc pas de manifester une quelconque défiance à l'égard des départements mais, au contraire, de reconnaître, par une marque de confiance, l'efficacité des associations qui, depuis des années, oeuvrent dans ce secteur, ce qui n'enlève rien à la responsabilité des départements.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Chabroux, pour présenter l'amendement n° 73.
M. Gilbert Chabroux. Il s'agit d'un amendement de précision.
Nous voudrions que soit réinsérée dans le texte la disposition actuelle, qui prévoit le concours des associations de lutte contre la pauvreté et l'exclusion.
Nous ne comprenons pas que ces associations ne soient plus citées. Certaines, nous le savons bien, mènent une action importante, dont l'efficacité est reconnue. Je pense, par exemple, au Secours catholique, au Secours populaire et aux Restos du coeur, qui ne sont pas, contrairement à ce qui a été dit au cours du débat, un « salmigondis ».
Pour autant, ces associations n'oeuvrent pas directement à l'insertion sociale et professionnelle des personnes auxquelles elles viennent en aide. Il serait dommage qu'une rédaction imprécise ou tronquée puisse amener certains départements à se priver de leur concours.
Il ne s'agit pas, là non plus, de suspicion à l'égard des conseils généraux, mais cela va mieux en le disant ! C'est d'autant plus important que les départements supporteront la charge totale du RMI. Nous souhaitons donc que ces associations soient réintégrées dans le texte.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. La commission des affaires sociales émet un avis défavorable sur l'amendement de suppression n° 111, qui vise, en fait, à maintenir le statu quo.
L'amendement n° 73 est très similaire à l'amendement n° 13 de la commission. Toutefois, je souhaiterais que les auteurs de l'amendement n° 73 le retirent en faveur de celui de la commission, car ce dernier est plus complet.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement est, sans surprise, défavorable à l'amendement n° 111, puisqu'il s'agit de revenir sur une disposition importante du texte que le Gouvernement a élaborée pour clarifier les responsabilités.
Sur l'amendement n° 13, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat. Dans la rédaction actuelle, la liberté des départements pour le choix de leurs partenaires locaux est très grande. Je ne suis pas sûr qu'il soit parfaitement nécessaire de préciser dans le texte les associations qui pourraient être les partenaires du département. De toute façon, cela n'aura aucune valeur contraignante pour les départements. Cependant, si le Sénat estime que cette rédaction est meilleure, le Gouvernement s'y range bien volontiers.
M. le président. La parole est à M. André Lardeux, pour explication de vote sur l'amendement n° 111.
M. André Lardeux. Je ne peux pas approuver l'amendement n° 111, qui est tout à fait contraire à l'esprit du projet de loi.
L'article 23 est une disposition essentielle de ce texte en ce qu'il vise à mettre fin à ce qui fut, dès le départ, l'un des défauts majeurs du système. Quelle que soit la qualité des relations entre les personnes ou entre les institutions, le système était d'une lourdeur incroyable et faisait perdre énormément de temps avec ce jeu d'allers et retours entre les appréciations des services de l'Etat et celles des services du département.
Par ailleurs, je rappelle que les fonds en matière d'insertion sont gérés par le département. Pourquoi instituer une tutelle, en dehors du contrôle de légalité que le préfet exerce normalement ? Cette proposition du Gouvernement est la bienvenue, raison pour laquelle je m'oppose à l'amendement défendu par mon collègue Roland Muzeau.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 111.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je suis le premier à observer, m'intéressant à l'épistémologie juridique et à l'évolution de la formulation de notre législation, que certaines dispositions introduites dans les textes législatifs au fil des ans ne sont pas strictement indispensables.
Nous vivons dans un monde qui attache beaucoup d'attention, relayée par les médias, à l'écriture symbolique de certains textes. Je suis obligé d'admettre qu'il est nécessaire de donner certains signes sans porter atteinte à la finalité de l'opération, en l'occurrence la liberté des départements de s'organiser.
Ce texte constitue un signe à l'égard tant du service public de l'emploi que des associations qui oeuvrent dans ce secteur, auxquelles il faut véritablement montrer qu'elles n'ont rien à craindre de la part des départements. Comme M. Fourcade l'a dit tout à l'heure, il faut conduire une action pédagogique en direction de tous les acteurs, parce que le président ou les vice-présidents du conseil général ne pourront pas s'occuper personnellement de la mise en oeuvre de ce texte. Les débats au Parlement pourront d'ailleurs être récapitulés dans une petite brochure pour montrer aux responsables qui seront recrutés dans les années à venir comment l'esprit et la mise en oeuvre de cette loi ont été imaginés par le législateur.
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote sur l'amendement n° 13.
M. Roland Muzeau. Nous voterons cet amendement, mais je donne raison à notre collègue André Lardeux quand il souligne que nous ne sommes pas d'accord. Nous expliquons en effet depuis le début de nos travaux la philosophie qui nous oppose ; nous présentons des avis très argumentés. Depuis hier, nous exprimons notre position sur certains chapitres concernant l'ossature du texte.
Si nous ne sommes pas d'accord, nous ne sommes pas prêts pour autant à nous satisfaire du simple rejet de tel ou tel amendement. Lorsqu'un amendement vise à corriger un projet de loi qui n'offre aucune garantie concernant la présence d'associations, qui jouent pourtant un rôle essentiel dans le fonctionnement du dispositif d'insertion, nous le votons, qu'il émane de la commission ou d'un groupe politique, en l'occurrence du groupe socialiste.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 13.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 73 n'a plus d'objet.
Je mets aux voix l'article 24, modifié.
(L'article 24 est adopté.)