M. le président. « Art. 8. - Pour l'application de l'article L. 51 du code électoral, les panneaux d'affichage sont attribués à chacun des partis et groupements politiques habilités, par la commission de contrôle, par voie de tirage au sort. » - (Adopté.)
M. le président. « Art. 9. - Les partis et groupements politiques habilités disposent dans les programmes diffusés en Corse par France Régions 3 et par France Bleu Radio Corse Frequenza Mora d'une durée de deux heures d'émission radiodiffusée et de deux heures d'émission télévisée, sous réserve des dispositions du troisième alinéa du présent article.
« Cette durée est répartie par la commission de contrôle entre les partis et groupements politiques habilités proportionnellement au nombre d'élus ayant déclaré s'y rattacher.
« Le temps d'émission de chacun des partis et groupements politiques habilités est porté à cinq minutes d'émission radiodiffusée et cinq minutes d'émission télévisée lorsque l'application des règles définies ci-dessus conduirait à lui accorder une durée inférieure.
« Le Conseil supérieur de l'audiovisuel fixe les conditions de réalisation des émissions et, compte tenu de la durée totale d'émission attribuée à chaque parti ou groupement politique, le nombre, la date, les horaires et la durée des émissions. »
L'amendement n° 25, présenté par M. Alfonsi, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa de cet article, remplacer deux fois les mots : "deux heures" par les mots : "trois heures". »
La parole est à M. Nicolas Alfonsi.
M. Nicolas Alfonsi. Cet amendement de coordination n'a évidemment plus lieu d'être.
M. le président. L'amendement n° 25 n'a plus d'objet.
Je mets aux voix l'article 9.
(L'article 9 est adopté.)
M. le président. « Art. 10. - Les recours contre les décisions prises par la commission de contrôle et par le Conseil supérieur de l'audiovisuel en application des articles 7 et 9 sont portés dans les trois jours devant le Conseil d'Etat statuant en premier et dernier ressort. Ils sont déposés soit au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, soit auprès du représentant de l'Etat dans la collectivité territoriale.
« Lorsque les recours sont déposés auprès du représentant du Gouvernement, ils sont transmis par ce dernier sans délai au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat. »
L'amendement n° 14, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Compléter la seconde phrase du premier alinéa de cet article par les mots : "de Corse". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. C'est un amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 15, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Dans le second alinéa de cet article, remplacer les mots : "du Gouvernement" par les mots : "de l'Etat dans la collectivité territoriale de Corse". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. C'est également un amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 15.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 10, modifié.
(L'article 10 est adopté.)
M. le président. « Art. 11. - Les dispositions de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977 relative à la publication et à la diffusion de certains sondages d'opinion modifiée et les dispositions de l'article 16 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication sont applicables à la consultation. » - (Adopté.)
M. le président. « Art. 12. - Sans préjudice de l'envoi des bulletins de vote aux électeurs effectué en vertu de l'article 2, chacun des deux types de bulletins de vote est fourni par l'administration en nombre égal à celui des électeurs inscrits dans la commune. Ils sont expédiés en mairie au plus tard le premier mardi précédant le scrutin.
« Les bulletins de vote et les enveloppes électorales sont placés, dans chaque bureau de vote, à la disposition des électeurs, sous la responsabilité du président du bureau de vote. »
L'amendement n° 16, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du premier alinéa de cet article, remplacer les mots : "l'administration" par les mots : "les services des représentants de l'Etat". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. C'est un amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 16.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 17, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Compléter le second alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée : "Le jour du scrutin, les services des représentants de l'Etat peuvent compléter, en tant que de besoin, les quantités de bulletins déposés dans les bureaux de vote". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Il s'agit de permettre aux services des représentants de l'Etat en Corse-du-Sud et en Haute-Corse de compléter, en tant que de besoin, les quantités de bulletins déposés dans les bureaux de vote.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 17.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 12, modifié.
(L'article 12 est adopté.)
M. le président. « Art. 13. - Pour l'application des dispositions des articles L. 65, L. 67 et R. 44 à R. 47 du code électoral, et notamment pour la désignation de scrutateurs à laquelle peuvent procéder les partis et groupements politiques habilités à participer à la campagne, chaque parti ou groupement politique habilité désigne un mandataire unique pour les départements de Corse-du-Sud et de Haute-Corse. » - (Adopté.)
M. le président. « Art. 14. - Les bulletins de vote autres que ceux fournis par l'Etat, les bulletins trouvés dans l'urne sans enveloppe ou dans une enveloppe non réglementaire, les bulletins ou enveloppes portant des signes intérieurs ou extérieurs de reconnaissance, les bulletins ou enveloppes portant des mentions quelconques n'entrent pas en compte dans le résultat du dépouillement. Ils sont annexés au procès-verbal ainsi que les enveloppes non réglementaires et contresignés par les membres du bureau.
« Chacun des bulletins ou enveloppes annexés doit porter mention des causes de l'annexion. »
L'amendement n° 18, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Après les mots : "membres du bureau", compléter comme suit la dernière phrase du premier alinéa de cet article : "de vote". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. C'est un amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 18.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 19, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Dans le second alinéa de cet article, remplacer les mots : "doit porter" par le mot : "porte". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 19.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 14, modifié.
(L'article 14 est adopté.)
TITRE III
RECENSEMENT DES VOTES, PROCLAMATION
DES RÉSULTATS ET CONTENTIEUX
M. le président. « Art. 15. - Dans chacun des départements de Corse-du-Sud et de Haute-Corse, une commission de recensement, siégeant au chef-lieu, totalise, dès la clôture du scrutin et au fur et à mesure de l'arrivée des procès-verbaux, les résultats constatés dans chaque commune.
« La commission tranche les questions que peut poser, en dehors de toute réclamation, le décompte des bulletins et procède aux rectifications nécessaires, sous réserve du pouvoir d'appréciation de la commission de contrôle.
« La commission comprend trois magistrats, dont son président, désignés par le premier président de la cour d'appel de Bastia.
« Les travaux de la commission sont achevés au plus tard le lendemain du scrutin, à minuit.
« Le procès-verbal dressé par la commission de recensement est transmis à la commission de contrôle. Y sont joints, avec leurs annexes, les procès-verbaux des opérations de vote qui portent mention de réclamations. » - (Adopté.)
Article 16
M. le président. « Art. 16. - La commission de contrôle procède au recensement général des votes. Elle contrôle le décompte et les rectifications opérées par les commissions de recensement. Elle proclame publiquement les résultats. Un exemplaire du procès-verbal qu'elle établit est remis au représentant de l'Etat dans la collectivité territoriale de Corse. » - (Adopté.)
M. le président. « Art. 17. - Les résultats de la consultation peuvent être contestés devant le Conseil d'Etat statuant au contentieux par tout électeur admis à participer au scrutin et, en cas de non-respect des formes légales, par le représentant de l'Etat dans la collectivité territoriale de Corse. La contestation doit être formée dans les cinq jours suivant la proclamation des résultats. »
L'amendement n° 20, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase de cet article, supprimer les mots : ", en cas de non-respect des formes légales,". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer la disposition aux termes de laquelle le recours du représentant de l'Etat dans la collectivité territoriale de Corse ne pourrait être formé qu'en cas de non-respect des formes légales.
Outre le fait qu'elle n'était pas prévue dans les précédentes consultations, une telle restriction serait d'autant moins justifiée qu'elle est peu compréhensible.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 20.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 21, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Dans la seconde phrase de cet article, remplacer le chiffre : "cinq" par le chiffre : "dix". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement tend à porter à dix jours, au lieu de cinq, le délai de recours devant le Conseil d'Etat contre les résultats de la consultation des électeurs de Corse. Un délai de dix jours avait été retenu, je le rappelle, tant pour la consultation de la population de la Nouvelle-Calédonie en 1998 que pour celle de la population de Mayotte en 2000.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 21.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 17, modifié.
(L'article 17 est adopté.)
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Nicolas Alfonsi, pour explication de vote.
M. Nicolas Alfonsi. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la majorité du groupe du RDSE ne votera pas le texte qui nous est proposé.
Cette précision étant apportée, je souhaite brièvement revenir, monsieur le ministre, sur l'échange que nous avons eu hier. Cet échange fut passionné, mais nous sommes nous-mêmes des gens passionnés. Cela étant, nous nous efforçons tous deux de contenir nos passions, ne serait-ce qu'en vertu du respect mutuel que nous nous portons. Vous comprenez sûrement, monsieur le ministre, que d'autres mettent autant de force à soutenir leurs convictions que vous en mettez vous-même à défendre vos textes.
Je dois vous dire que, lorsque vous m'avez demandé avec une certaine véhémence : « Que proposez-vous ? », je me suis senti douloureusement seul. Il est vrai qu'il m'a été difficile en Corse, seul, de proposer quoi que ce soit.
Ainsi, en 1989, quand Michel Rocard, alors Premier ministre, a courageusement demandé à l'Assemblée de Corse d'assumer à sa place l'amnistie des prisonniers, nous n'avons été que deux ou trois conseillers sur cinquante et un à refuser cette amnistie. Ce n'était pas facile ! On est loin des passions misérables, des calculs et des arrière-pensées qu'on évoque en permanence lorsqu'on parle de la Corse !
De même, au moment des accords de Matignon, nous nous sommes retrouvés à deux pour exprimer notre hostilité.
Alors, monsieur le ministre, quand vous me dites : « Mais vous, les grands élus, qu'avez-vous fait en Corse pendant vingt ans ? », je vous réponds tranquillement que j'ai défendu l'Etat. Je mets au défi quiconque, en Corse ou ici, de trouver l'ombre d'une contradiction dans ce que j'ai pu déclarer au cours des vingt dernières années. Il vaut mieux se répéter que se contredire, disait quelqu'un de célèbre. Je préfère effectivement me répéter.
Vous affirmez que ce que je propose, c'est le statu quo. Mais, à examiner la gestion des collectivités locales, on constate que ce sont souvent les tenants de l'immobilisme qui gèrent le mieux. Au demeurant, ainsi que j'ai déjà eu à plusieurs reprises l'occasion de vous le dire, pour l'instant, le terrain n'est pas prêt : vous pouvez semer le grain que vous voulez, la terre ne produira rien !
En vérité, il y a deux stratégies possibles. On peut procéder à des réformes institutionnelles en faisant l'impasse sur la violence ; c'est un choix. On peut aussi considérer qu'il faut d'abord remettre de l'ordre dans la maison et se montrer généreux après ; c'est un autre choix, et c'est celui que j'ai toujours préconisé.
J'ai le sentiment, avec beaucoup d'amis, que nous avançons sur un terrain qui ne peut rien produire : la société corse est ce qu'elle est ! Le temps que nous allons perdre pour mettre en place cette collectivité unique serait sans doute mieux employé si nous déployions notre énergie avec les moyens - et ils sont importants - dont nous disposons pour moderniser la société corse, pour moderniser les comportements, pour refuser les accommodements et les astuces. C'est mon seul objectif !
Compte tenu de la connaissance que j'ai du terrain, je ne peux pas croire à votre projet, monsieur le ministre.
J'ajoute qu'une hypothèque pèse lourdement sur celui-ci : le vote nationaliste. J'ai rappelé hier à la tribune quels étaient les ambitions, les intentions, les projets des nationalistes : la souveraineté, l'indépendance nationale, etc. Qu'en sera-t-il demain si le « oui » recueille 51 % ou 55 % des suffrages ? Aurons-nous rendu service à l'Etat, à ses institutions ? Je ne le crois pas.
C'est la seule raison de notre vote contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Robert Bret.
M. Robert Bret. Je résumerai en quelques mots notre position, pour la clarté des débats d'aujourd'hui, mais aussi pour demain, lors de la consultation des électeurs de Corse.
Le Gouvernement utilise la spécificité de la Corse, qui est réelle, pour enclencher au plus vite une réforme institutionnelle qui, selon nous, dépasse la seule île, et vous ne nous avez pas apporté de démenti sur ce point, monsieur le ministre.
Votre priorité n'est pas la Corse : votre priorité, c'est la remise en cause de l'architecture républicaine de nos institutions. Vous prenez date en proposant la suppression des départements, en engageant un processus d'autonomisation d'une collectivité territoriale, dans un flou dangereux pour la démocratie française, qui est fondée sur la solidarité nationale.
Autant nous avons toujours soutenu l'idée d'une consultation des Corses sur leur avenir - et nous continuerons à le faire - autant nous ne pouvons soutenir une tentative de plébiscite qui desservira rapidement les Corses et, demain, l'ensemble de nos compatriotes.
Monsieur le ministre, les Corses attendent autre chose que cette énième péripétie institutionnelle. Ils attendent, dans leur immense majorité, l'élaboration d'un véritable projet de développement pour l'île, dans le cadre de nos institutions républicaines.
Pour toutes ces raisons, les sénatrices et sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen voteront contre ce projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat.
M. Bernard Frimat. Je disais hier, lors de la discussion générale, qu'il était de la responsabilité commune des sénateurs, demain des députés, de doter la Corse des institutions et des compétences qui lui permettraient, dans l'unité de la République, d'assumer sa spécificité et de réaliser son développement économique, culturel et social.
Le Sénat en a débattu, mais nous savons que le sujet reviendra devant le Parlement à l'automne. C'est à ce moment-là que nous aurons à nous prononcer dans le détail sur les institutions.
Aujourd'hui, nous sommes appelés à définir des orientations.
A en juger par la réponse que vous m'avez apportée hier, monsieur le ministre, j'ai dû mal me faire comprendre lorsque j'ai employé les termes « laborieux » et « ambigu ». Ces adjectifs s'appliqueraient non pas à votre démarche, mais à la manière dont la majorité sénatoriale avait qualifié le processus de Matignon.
Si vous optez pour une certaine continuité en prolongeant ce processus sur le plan économique, si vous poursuivez, avec les conceptions qui sont les vôtres, la recherche de solutions, nous n'y voyons rien à redire.
Certes, vous apportez des éléments qui sont intéressants et vous pratiquez des ouvertures. Mais, vous vous en doutez bien, la position que nous avons adoptée sur l'annexe, qui constitue le coeur du projet, préjugeait celle que nous allons prendre au moment du vote final.
Dans le débat futur, nous devrons bien distinguer ce qui fait la spécificité de la Corse, et qui explique que la construction institutionnelle que vous nous proposez peut rencontrer notre adhésion, sans être toutefois selon nous, immédiatement transposable sur le continent.
Sachant que le débat va donc se poursuivre et parce que nous ne voulons pas que le retour à la paix civile soit un préalable - sinon, ce serait en quelque sorte donner aux auteurs de violences un droit de veto sur l'évolution des institutions de la Corse -, nous nous abstiendrons sur l'ensemble du projet de loi.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Paul Natali.
M. Paul Natali. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant de passer au vote sur ce texte qui organise la consultation des électeurs de Corse, je souhaite d'abord remercier notre commission des lois, en particulier son président, M. René Garrec, et son rapporteur, M. Jean-Patrick Courtois, de la qualité du travail effectué.
Surtout, je voudrais rendre un hommage appuyé à Nicolas Sarkozy pour l'énergie et la passion qu'il a mises dans la recherche d'une solution aux difficultés de la Corse.
Aujourd'hui, nous sommes, grâce à l'action du Gouvernement, sur la bonne voie, la voie du rétablissement de l'ordre républicain, cet ordre qui a été durement mis à mal par l'action d'un certain préfet dont Nicolas Sarkozy a parlé hier.
Ledit préfet n'a en effet eu de cesse de chercher à s'en prendre aux élus corses les plus républicains, et je suis malheureusement bien placé pour le savoir ! Par son attitude, il a contribué à renforcer les groupuscules nationalistes et il a fait un mal considérable tant à la Corse qu'à la crédibilité de la force publique.
C'est dire combien la tâche vous était rendue difficile, monsieur le ministre. Vous avez cependant fait preuve d'un grand volontarisme et d'un grand sens de l'Etat dans la gestion du dossier corse.
Au cours de ce débat, j'ai souhaité obtenir de votre part un certain nombre de précisions et, d'ores et déjà, attirer votre attention sur des points qui me semblent importants. Nous aurons l'occasion d'y revenir ici même lorsque, après la consultation, nous serons amenés à discuter un projet de loi relatif à l'organisation institutionnelle.
Vous vous êtes montré réceptif à mes préoccupations, et je vous en remercie.
Vous nous ouvrez aujourd'hui des perspectives d'avenir plus radieux. C'est pourquoi, avec beaucoup d'espoir, je soutiens fermement et sans état d'âme votre démarche. Je voterai donc ce texte. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - M. Louis Moinard applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. François Fortassin.
M. François Fortassin. Hier, monsieur le ministre, dans un discours tonique, avec une gestuelle vigoureuse et énormément de brio, vous avez tenté de nous convaincre de la pertinence de vos arguments. Et il en est, je dois le dire, d'excellents. Mais il y a quand même des points sur lesquels, en tant que simple citoyen de la République, il m'est bien difficile de vous suivre.
S'il suffisait de modifier les institutions pour faire une relance économique, cela se saurait ! Lorsque vous dites que supprimer les deux départements peut provoquer cette relance économique, je vous donne acte de la force de votre conviction mais je vous laisse la responsabilité de vos propos. En tout cas, il me semble que, comme on dit familièrement dans mon Sud-Ouest, « vous lancez le bouchon un peu loin » !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Cela dépend pour qui !
M. François Fortassin. Vous nous avez dit qu'il n'était pas question de poser le problème de l'appartenance à la République puisque la Corse ne doit pas sortir de la République. Bien entendu, sur une telle intention, nous ne pouvons qu'être d'accord.
M. Nicolas Sarkozy, ministre. C'est déjà ça !
M. François Fortassin. Cependant, dès lors que les élus territoriaux corses ne sont plus les représentants d'un territoire particulier, auquel, je le crois, l'immense majorité de l'opinion publique est très attachée, on est toujours dans la République, mais ce n'est plus tout à fait la même.
Même si j'ai en Corse un certain nombre d'amis, je ne puis prétendre être un spécialiste de la Corse. Je la connais toutefois suffisamment pour dire qu'il y a effectivement une spécificité corse. Monsieur le ministre, êtes-vous sûr qu'une semblable spécificité ne s'exprimera pas demain, de manière différente mais avec autant de conviction, en Bretagne ou au Pays basque ?
M. Robert Bret. Ou en Alsace !
M. François Fortassin. Ou en Alsace, effectivement !
J'éprouve, en ce qui me concerne, quelques craintes à ce sujet. En même temps, ma conviction est qu'il nous faut, bien entendu, sortir de la situation actuelle. Mais pourra-t-on y parvenir en engageant une réflexion trop rapide, à marche forcée ?
Si j'étais certain que ce texte soit susceptible de ne connaître d'autres débordements, je le voterais sans état d'âme. Mais ma perplexité est très grande et les risques de contagion me semblent importants. Je ne le voterai donc pas. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe CRC.)
M. Henri de Raincourt. Tout ça pour ça ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d'abord à remercier chacun de l'utilité et de la dignité de ces débats qui nous ont occupés durant quelque vingt-quatre heures. M. Nicolas Alfonsi et moi-même nous sommes exprimés avec passion, mais la Corse ne le mérite-t-elle pas ? Qui aurait pu envisager que l'on parle de la Corse sans y insuffler un peu de passion et sans s'engager complètement ? Je me félicite, d'ailleurs, que l'on soit encore capable de se passionner sur ce dossier qui fait parler de lui depuis tant d'années et de façon si dramatique.
J'ai été également très sensible à la présence dans les tribunes d'un certain nombre de députés, qu'il s'agisse du futur rapporteur de ce texte à l'Assemblée nationale, M. Geoffroy, de M. Camille de Rocca Serra, qui était présent hier soir, ou encore de M. Le Roux, député socialiste qui sera, j'ai cru le comprendre, le principal orateur socialiste à l'Assemblée nationale sur ce projet de loi. Ce doit être une satisfaction pour la Haute Assemblée que de voir ainsi des députés venir à assister à ses débats.
M. Robert Bret. Vous oubliez Emile Zuccarelli, qui était également présent !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Monsieur Bret, merci de prendre la défense d'Emile Zuccarelli : j'allais y venir, mais, dans votre impatience à le soutenir, vous m'avez devancé. (Sourires.)
Il n'est pas si fréquent, en tout cas, que des députés aient le souci d'assister aux débats de la Haute Assemblée pour savoir comment ils s'y déroulent et comment en assurer le prolongement au Palais-Bourbon. Cela me semble un signe très positif.
A la fin de ce débat, ai-je des certitudes ? Non, absolument pas !
Vous me dites, monsieur Fortassin, que vous êtes perplexe. Vous n'êtes pas le seul ! Toutefois, la perplexité peut vous permettre de continuer à réfléchir, car vous êtes parlementaire. Mais, lorsque vous devez gérer un pays, vous devez agir et pas simplement vous interroger et doctement peser le pour et le contre pour ne rien décider !
Cela fait bientôt treize mois que le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin est en place. Le Président de la République l'a qualifié de « gouvernement de mission ». Or, si l'une de nos missions consiste à essayer d'apporter la paix, le développement et la stabilité à la Corse, comment, mesdames, messieurs les sénateurs, le faire en n'agissant pas ?
Vous êtes unanimes, sur toutes ces travées, pour dire que cela ne va pas en Corse. Je retiens ce point commun entre vous, et j'en tire la conclusion que, si cela ne va pas depuis si longtemps, c'est qu'il ne faut pas rester dans le même cadre !
Est-ce pour autant, monsieur le sénateur, que ce que propose le Gouvernement est la réussite absolue, assurée ? Qui pourrait le dire ? Qui aurait la prétention, l'outrecuidance de l'affirmer ? Je n'entends absolument pas vous apporter cette réponse ! Mais, en regardant ce qu'ont fait les autres pays, on se rend compte qu'une solution est possible : tous nos voisins, sans exception, ont donné aux îles de la Méditerranée un statut adapté. Tous sont parvenus à résoudre le problème. Même les Italiens, avec le problème sicilien, qui était si complexe. Y en a-t-il un seul qui ait voulu gérer ces îles comme on gère le continent ? Aucun !
N'est-il pas enfin venu le temps de regarder un peu ce qu'ont fait les autres pays, qui étaient parfois confrontés à des problèmes plus complexes encore ?
Qu'il me soit permis de dire encore une fois avec force que la question est de savoir si nous sommes capables d'avoir de l'espoir et de l'ambition pour la Corse. Le Gouvernement ne se résigne pas, il espère qu'il a une solution et une ambition pour la Corse.
Certains m'objecteront qu'il n'y a aucun rapport entre les institutions et le développement. C'est faux ! La France s'est développée lorsqu'elle s'est dotée d'institutions stables. Qui peut penser que le cadre institutionnel n'a aucun rapport avec la capacité des opérateurs privés de se développer?
Monsieur Alfonsi, avec tout le respect que j'ai pour vous, laissez-moi vous dire ceci : vous prétendez que nous faisons l'impasse sur la violence. C'est faux ! Je ne peux accepter que l'on m'accuse de cela ! Mais le problème corse ne sera pas résolu grâce au nombre de policiers et de gendarmes présents sur le terrain. Quand le comprendra-t-on enfin ?
M. Nicolas Alfonsi. On le sait !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Il suffit pour s'en convaincre de se souvenir de la caricature d'action policière que nous avons connue avec le préfet Bonnet, dont M. Natali a parlé. A quoi a-t-elle abouti ? A une castatrophe, chacun le sait bien, parce que l'excès en tout est mauvais. Voilà la situation dans laquelles nous nous trouvons. Essayons de donner ambition et espoir à la Corse !
Enfin, cher Nicolas Alfonsi, comment dire - et qui le croira en Corse ? - qu'on renforcera la République en proposant de voter contre le projet du gouvernement de ladite République ? Qui peut penser une seconde que le Président de la République, le Premier ministre et, accessoirement, moi-même, ayons quoi que ce soit à voir avec ceux qui prônent l'indépendance pour la Corse ? Y a-t-il un seul Corse qui puisse imaginer cela ? Que chacun ait à l'esprit l'engagement politique du Président de la République depuis le début de sa vie politique, celui du Premier ministre et du Gouvernement !
Enfin, les Corses attachés à la République française doivent-ils faire confiance au Gouvernement de la République française, qui essaie de leur tendre la main, ou estiment-ils qu'ils vont renforcer leur attachement à la nation en appelant à refuser le projet qu'il leur présente ?
Enfin, notre projet de loi ne serait pas bon, parce que les nationalistes s'apprêtent à le ratifier. La belle affaire ! Cet argument, le Front national l'a avancé pendant des années, ce qui nous a amenés à refuser de parler des problèmes des Français, à laisser un certain nombre d'extrémistes devenir propriétaires d'idées et de mots que nous n'avions plus le courage de prononcer, sous le prétexte qu'un autre, qui n'avait pas nos valeurs, les avait prononcés avant nous.
Donner le sentiment aux Corses de bonne volonté et de bonne foi que nous avons peur de prononcer certains mots est le meilleur service que nous puissions rendre aux nationalistes et aux indépendantistes ! Il en est allé ainsi à propos de la langue corse. Il est des Corses qui, à la maison et dans leur village, parlent le corse et sont pourtant très attachés à la République française ! En donnant le sentiment que nous étions frileux à reconnaître la défense de la langue corse, qui fait partie de la tradition, nous avons rendu service aux indépendantistes, nous ne les avons pas combattus.
De même, lorsque vous reconnaîtrez la spécificité des handicaps et des atouts de la Corse, vous renforcerez la République et vous affaiblirez les indépendantistes, parce que - et c'est le coeur de mes convictions - c'est la rigidité de nos structures qui porte en germe la question de l'unité nationale.
Tous les grands pays qui ont su se développer et s'adapter sont ceux qui ont compris que la souplesse d'organisation est la garantie de l'unité nationale. De même que, dans sa propre famille, on s'élève pas tous ses enfants exactement de la même façon parce qu'ils n'ont pas la même personnalité, les mêmes atouts, les mêmes difficultés, on doit reconnaître que nos territoires sont divers, multiples. C'est leur richesse ! Pour qu'ils aient la même chance, on doit donc leur donner des atouts différenciés. C'est justement parce qu'il croit à la force de la République française que le Gouvernement vous propose un projet de loi adapté pour la Corse. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le groupe socialiste s'abstient.
(Le projet de loi est adopté.)
NOMINATION DE MEMBRES
DE COMMISSIONS
M. le président. Je rappelle au Sénat que le groupe Union pour un Mouvement Populaire a présenté une candidature pour la commission des affaires économiques et du Plan et une candidature pour la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
Le délai prévu par l'article 8 du règlement est expiré.
La présidence n'a reçu aucune opposition.
En conséquence, je déclare ces candidatures ratifiées et je proclame :
M. André Ferrand, membre de la commission des affaires économiques et du Plan, en remplacement de M. Serge Mathieu, démissionnaire ;
M. Serge Mathieu, membre de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, en remplacement de M. André Ferrand, démissionnaire.