Art. 86
Dossier législatif : projet de loi  de sécurité financière
Art. additionnel après l'art. 87

Article 87

M. le président. « Art. 87. - I. - L'article 13 de la loi n° 85-11 du 3 janvier 1985 susmentionnée est remplacé par les dispositions suivantes :

« Art. 13. - Les établissements publics de l'Etat dès lors qu'ils contrôlent une ou plusieurs personnes morales ou qu'ils exercent une influence notable dans les conditions prévues aux articles L. 233-16 et suivants du code de commerce sont tenus d'établir, conformément à ces articles, et de publier des comptes consolidés ainsi qu'un rapport sur la gestion du groupe.

« Toutefois, cette obligation ne s'impose pas lorsque l'ensemble constitué par l'établissement public et les personnes morales qu'il contrôle ne dépasse pas pendant deux exercices sur la base des derniers comptes annuels arrêtés, une taille déterminée par référence à deux des trois critères mentionnés à l'article L. 123-16 du code de commerce, selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat.

« II. - Le premier exercice d'application des dispositions du présent article aux établissements publics de l'Etat soumis aux règles de la comptabilité publique commence au plus tard le 1er janvier 2006. » - (Adopté.)

Art. 87
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Art. 88

Article additionnel après l'article 87

M. le président. L'amendement n° 357 rectifié, présenté par M. Oudin, est ainsi libellé :

« Après l'article 87, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« L'article L. 225-102-1 du code de commerce est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions des premier et deuxième alinéas ne sont pas applicables aux sociétés dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé et qui ne sont pas contrôlées au sens de l'article L. 233-16 par une société dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé. »

Cet amendement n'est pas soutenu.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Je le reprends.

M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 357 rectifié bis, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Notre excellent collègue Jacques Oudin est à l'origine de cet amendement qui, par souci de réalisme, tend à corriger une disposition manifestement excessive de la loi sur les nouvelles régulations économiques, en stricte conformité avec les positions que le Sénat avait prises en 2001, à l'occasion de l'examen de ladite loi.

C'est donc un vote de continuité auquel la commission des finances appelle la Haute Assemblée.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable, dans la mesure où la loi ne sera pas contournée, grâce à cette rédaction, par des filiales non cotées qui verseraient des rémunérations à des administrateurs de sociétés cotées.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 357 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 87.

TITRE IV

DISPOSITIONS RELATIVES À L'OUTRE-MER

Art. additionnel après l'art. 87
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 88

M. le président. « Art. 88. - Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre, par ordonnances, les mesures de nature législative permettant de rendre applicables, avec les adaptations nécessaires, les dispositions de la présente loi en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, au territoire des îles Wallis-et-Futuna. Il en est de même à Mayotte pour les dispositions autres que celles du code de commerce qui y sont applicables de plein droit en vertu de l'article 3-I de la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte.

« Les projets d'ordonnance sont soumis pour avis :

« 1° Lorsque leurs dispositions sont relatives à la Polynésie française, à la Nouvelle-Calédonie ou à Mayotte, aux institutions compétentes prévues respectivement par la loi organique n° 96-312 du 2 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, par la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie et par l'article L. 3551-2 du code général des collectivités territoriales ;

« 2° Lorsque leurs dispositions sont relatives au territoire des îles Wallis-et-Futuna, à l'assemblée territoriale des îles Wallis-et-Futuna.

« Les projets d'ordonnance comportant des dispositions relatives à la Polynésie française sont, en outre, soumis à l'assemblée de ce territoire.

« Les ordonnances seront prises, au plus tard, le dernier jour du douzième mois suivant la promulgation de la présente loi. Le projet de loi portant ratification de ces ordonnances sera déposé devant le Parlement, au plus tard, le dernier jour du dix-huitième mois suivant la promulgation de la présente loi. »

L'amendement n° 149, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

« Après les mots : "en Polynésie française," rédiger comme suit la fin du premier alinéa de cet article : "dans les îles Wallis-et-Futuna et à Mayotte". »

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous terminons l'examen de cette série de trois cent cinquante amendements environ...

M. le président. Trois cent soixante-quatorze exactement !

M. Philippe Marini, rapporteur général. ... en passant par Mayotte.

M. Dominique Perben, garde des sceaux. C'est un beau pays !

M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est certainement un beau pays ; néanmoins, il n'est pas utile de faire référence ici au statut de Mayotte.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 149.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 88, modifié.

(L'article 88 est adopté.)

Vote sur l'ensemble

Art. 88
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Paul Loridant, pour explication de vote.

M. Paul Loridant. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au terme de la discussion de ce projet de loi, après l'examen d'un nombre important d'amendements - plus de trois cent soixante-dix -, pour partie justifiés par le caractère profondément technique de nombre de dispositions, nous pouvons tirer quelques conclusions de la discussion qui vient d'avoir lieu.

Le caractère technique du projet de loi est assez fortement marqué : nombre des articles de ce texte portent en effet sur l'organisation même des autorités de contrôle, qu'il s'agisse des activités de marché, du secteur de l'assurance, de la mutualité et de la prévoyance, ou encore des dispositions relatives à l'exercice de la profession de commissaire aux comptes.

Pour une part, le présent projet de loi a cependant une portée plus générale.

La discussion du chapitre relatif au démarchage financier aurait pu être l'occasion de faire le point sur la réalité des relations entre les établissements de crédit et leurs clients. Elle ne l'a pas été, et nous ne pouvons que le regretter.

Nous ne pouvons également que regretter que les efforts de développement de la transparence dans la gestion des entreprises n'aient pu permettre de mettre un terme aux dérives constatées dans le domaine des options de souscription d'actions, les stocks-options, et de favoriser ainsi une forme de retour à la normale en matière de rémunération des cadres dirigeants d'entreprise.

C'était là, pourtant, une porte qui aurait pu s'ouvrir et qui ne s'est finalement qu'entrouverte.

Sur la question de la controverse entre le texte du projet de loi et certaines des adaptations que voulait y introduire le rapporteur général, nous ne pouvons une fois encore que constater qu'elle ne traduit en fait que quelques légères différences culturelles sans trop de portée pour le plus grand nombre, et que ces adaptations ne sont que la marque d'un libéralisme plus ou moins tempéré, selon la sensibilité de chacun au sein de la majorité sénatoriale.

Sur le fond, on ne peut cependant s'empêcher de penser au contexte grave dans lequel ce texte est aujourd'hui débattu. Il s'agit concrètement d'apporter une réponse aux préoccupations nées dans le public quant à la confiance que l'on peut accorder à l'activité des marchés financiers, mais aussi à la compétence de certains dirigeants d'entreprise. Ce contexte est également marqué par la dégradation du marché de l'emploi, qui s'illustre chaque jour par des plans de licenciements.

Les garanties que le projet de loi prétend apporter seront-elles suffisantes pour atteindre cet objectif, permettront-elles à la place de Paris de rebondir, après plusieurs années de marasme et de chute des indices, et de devenir ainsi une place financière incontournable en Europe ? Nous le verrons avec le temps, mais nous ne sommes pas convaincus que ce texte permettra d'atteindre cet objectif.

En tout état de cause, nous ne voterons pas ce projet de loi tel qu'il ressort des travaux de la Haute Assemblée et nous espérons pouvoir revenir sur certaines de ses dispositions à l'occasion de la navette, (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Rodolphe Désiré.

M. Rodolphe Désiré. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici parvenus au terme de nos débats sur le projet de loi relatif à la sécurité financière.

Ce texte nous a été présenté par le Gouvernement comme une tentative de réponse, à la fois politique et technique, aux difficultés soulevées par la complexité croissante des marchés financiers.

En effet, la crise de confiance provoquée par un certain nombre de scandales outre-Atlantique ainsi que le manque de régulation nous ont conduits à poser les jalons d'une nouvelle éthique financière.

Certes, à elle seule, une loi ne peut pas résoudre tous les problèmes posés par l'ensemble des activités financières, surtout à l'heure de la mondialisation ; mais elle peut encourager le retour de la confiance sur les marchés financiers. C'est pourquoi les deux objectifs de transparence et de compétitivité ont largement marqué le déroulement de nos débats.

Nous tenons donc à saluer les efforts du Sénat et de ses rapporteurs dans l'amélioration du projet gouvernemental.

En premier lieu, la création de l'AMF présente un caractère particulier dans la mesure où cette nouvelle autorité sera responsable de ses actes, détiendra la personnalité morale et bénéficiera d'une autonomie budgétaire.

C'est un moment important pour nous, puisque son fonctionnement, moderne et efficace, son rôle incontournable, nous rapprochera de nos partenaires européens.

Son statut et son organisation interne devraient apporter les garanties nécessaires de sécurité juridique et d'indépendance.

En second lieu, le projet de loi de sécurité financière tend à améliorer le système de commissariat aux comptes. Grâce à des règles communes, il renforce l'unité de la profession en créant un Haut Commissariat aux comptes, en instaurant une stricte séparation entre la mission de contrôle des comptes et les autres prestations. Cette restriction s'étend aux réseaux de commissariat aux comptes afin de garantir la stricte indépendance de la profession.

Enfin, le projet de loi modifie le système actuel de gouvernement d'entreprise. En privilégiant une démarche pragmatique, il renforce la transparence des entreprises grâce à des obligations nouvelles d'information de l'assemblée générale des actionnaires sur les procédures de contrôle interne et les mesures concernant les associations d'investisseurs agréés.

Il s'agit, monsieur le ministre, de préserver la liberté d'organisation des entreprises sans porter atteinte à la confiance des actionnaires et des investisseurs.

Forte de ces constatations, la majorité des membres du groupe du RDSE sera favorable à ce projet de loi, tandis que certains de mes collègues et moi-même nous abstiendrons.

M. le président. Pour dissiper tout malentendu, je tiens à rappeler que l'AMF, qui a été citée à plusieurs reprises, est en l'occurrence l'Autorité des marchés financiers. (Sourires.)

M. Philippe Marini, rapporteur général. En effet, monsieur le président de l'AMF ! (Nouveaux sourires.)

M. le président. Evitons toute confusion avec tout autre sigle dont la création remonte déjà loin dans le temps !

La parole est à M. François Marc.

M. François Marc. Le débat qui s'achève a été intéressant. Le Gouvernement annonçait une ambition, et nous sommes d'accord avec lui pour considérer que la restauration de la confiance de l'ensemble des acteurs financiers et des épargnants était une ambition nécessaire.

Pour autant, la traduction de cette ambition dans le texte qui nous était proposé n'a pas entraîné de modifications législatives notables, et nombre d'observateurs ont dénoncé son caractère relativement modeste.

Face à ce constat, le Sénat avait manifesté quelques velléités. N'a-t-on pas récemment lu dans la presse, en particulier dans Les Echos, que le Sénat allait enrichir le texte, se pencher sur le livret A et son taux, sur les agences de notation ?

En définitive, ces velléités en sont restées au stade des velléités et un certain nombre de propositions ont dû être retirées.

Afin d'enrichir et d'améliorer le texte, le groupe socialiste a présenté un certain nombre d'amendements, qui lui semblaient utiles. Mais ils ont été généralement rejetés, ce que nous regrettons. En définitive, ce texte sur la sécurité financière ne comporte pas un mot sur la lutte contre le blanchiment des capitaux ni sur le champ des activités soumises au contrôle de l'AMF. Les agences de notation, contrairement à ce qu'avait suggéré à un moment donné la commission des finances du Sénat, ne sont pas non plus concernées.

En conséquence, les situations de conflits d'intérêts seront pérennisées et continueront à engendrer les dysfonctionnements que chacun connaît.

En ce qui concerne la transparence, nous aurions souhaité que l'on puisse conserver pendant dix ans les documents nécessaires chez les analystes financiers. Cette proposition a été rejetée.

En ce qui concerne les commissaires aux comptes, le Sénat n'a pas jugé opportun d'agréer les formations nécessaires, ce qui est regrettable. Il en est de même pour les nominations.

L'aspect le plus critiquable de ce débat est l'absence de toute avancée en matière de gouvernance d'entreprise. Nous proposions de revitaliser les conseils d'administration et les assemblées générales afin de protéger les petits actionnaires, mais nous nous sommes heurtés à un certain immobilisme de la droite sénatoriale et du Gouvernement.

Le groupe socialiste a soutenu plusieurs amendements allant dans le sens d'un renforcement des contre-pouvoirs et des contrôles internes au sein des entreprises. Malheureusement, aucun de ces amendements n'a été adopté. Notre proposition de soumettre à l'appréciation de l'assemblée générale les emprunts bancaires très importants a été rejetée. Le Sénat a refusé de doter le conseil d'administration d'un règlement intérieur. Notre proposition d'interdire des pouvoirs en blanc au sein des assemblées générales a été rejetée.

Il s'agissait pourtant, dans la plupart des cas, de la simple reprise de propositions figurant dans plusieurs rapports réalisés par des membres éminents du patronat : les rapports Viénot I et II, le rapport Bouton, ou encore celui de l'Institut Montaigne.

En ce qui concerne la rémunération des dirigeants, vous avez rejeté nos propositions destinées à renforcer les obligations de transparence en la matière.

Par ailleurs, nous avons présenté plusieurs amendements afin d'encadrer et de moraliser la pratique des options de souscription d'actions - M. Hamel sera satisfait que j'utilise ce terme -, mais ils ont été rejetés en bloc.

Enfin, le silence le plus complet est toujours de mise, malgré nos propositions, sur les fonds spéculatifs, sur les normes comptables, sur le hors bilan et sur les procédures judiciaires.

Finalement, nous constatons que les insuffisances qui avaient été décelées au départ et qui auraient pu faire l'objet de corrections au Sénat demeurent. Nous ne pouvons nous satisfaire de cette idéologie, de ce « laisser-faire » en faveur des milieux économiques et financiers dont le texte est imprégné. Monsieur le ministre, le groupe socialiste ne peut être d'accord avec la formulation actuelle de ce projet. Il s'opposera donc à son adoption en l'état, tout en espérant que la navette permettra de l'améliorer.

M. le président. La parole est à M Joël Bourdin.

M. Joël Bourdin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, redonner confiance aux investisseurs et aux épargnants constitue aujourd'hui une nécessité économique et une urgence politique.

Le Gouvernement en a pris pleinement conscience en nous soumettant ce projet de loi de sécurité financière.

Le groupe de l'UMP soutient les mesures proposées en matière de renforcement des autorités de régulation, d'amélioration de la sécurité des épargnants et des assurés ou encore de modernisation des mécanismes de contrôle et de transparence des entreprises.

Au-delà des dispositions techniques, notre groupe tient à saluer la manière avec laquelle le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et le ministre de la justice ont abordé la question globale de la sécurité financière.

Leur démarche repose sur un bon équilibre entre volontarisme et pragmatisme.

Agir avec détermination dans le sens de la sécurité et de la transparence sans légiférer de manière excessive et contre-productive, tel est l'objectif de ce projet de loi. C'est aussi le sens des amendements que nous avons adoptés au cours de nos débats.

Nombre d'amendements sont techniques et peuvent paraître éloignés des préoccupations quotidiennes des Français, même s'ils sont essentiels pour restaurer la confiance.

Certains concernent néanmoins des questions très concrètes, comme le crédit à la consommation, le surendettement, les assurances obligatoires de dommages ou les petits actionnaires.

Nous nous félicitons en particulier que le Sénat ait adopté l'amendement du groupe de l'UMP tendant à étendre le bénéfice du fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages aux personnes victimes de faillites d'entreprises d'assurance dont la liquidation est en cours à la date de promulgation de la loi. Cette mesure apportera une réponse à certaines situations personnelles dramatiques sans mettre en péril l'équilibre financier du fonds. Elle est à la fois juste, pragmatique et raisonnable.

Une telle mesure constitue un bon exemple de la manière équilibrée avec laquelle le Gouvernement et le Sénat ont traité chacune des questions abordées dans le cadre de nos travaux.

Un autre bon exemple est celui du contrôle légal des comptes et de la transparence des entreprises.

Comme l'a souligné notre collègue Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis, il ne s'agit pas, ici, de mettre en doute l'indépendance de la profession des commissaires aux comptes, qui n'a pas démérité, mais de renforcer son unité et de favoriser une meilleure transparence.

De manière générale, nous devons tirer les leçons du passé et avoir conscience de nos faiblesses, mais sans céder à une tentation dangereuse qui consisterait à faire table rase du passé et à aligner systématiquement notre droit national sur des concepts anglo-saxons qui n'ont pas empêché certains scandales retentissants.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. Absolument !

M. Joël Bourdin. La confiance ne se décrète pas. Elle se construit, ou plutôt se reconstruit, sans effets d'annonce ni excès, grâce à des mesures fortes, claires et pragmatiques.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. Certes.

M. Joël Bourdin. C'est le sens de la démarche du Gouvernement et des améliorations proposées par nos rapporteurs, MM. Philippe Marini et Jean-Jacques Hyest, dont nous tenons à saluer l'excellent travail.

C'est donc sans difficulté et sans drame de conscience que le groupe de l'UMP votera le texte tel qu'il résulte de nos travaux.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici au terme de l'examen du projet de loi de sécurité financière. Nous devons remercier le Gouvernement d'en avoir pris l'initiative pour tenter de répondre aux attentes des investisseurs et des acteurs de marché.

Nous sortons d'une époque particulièrement éprouvante, qui a été marquée par l'exubérance des marchés.

Il y a eu une sorte d'hallucination collective. On croyait que la croissance était réelle. La croissance mondiale était de l'ordre de 2 % par an. Les marchés progressaient de 20 %, 30 %, 40 %. On croyait que les arbres monteraient jusqu'au ciel. (Sourires.)

Les uns et les autres s'abandonnaient à de jolies histoires, parfois encouragés par de subtils plans d'options d'achat d'actions qui ont eu des conséquences extrêmement pernicieuses.

Ces plans ont été peut-être pour certains le moyen d'échapper aux charges sociales trop élevées dans notre législation française ou l'occasion de faire progresser les niveaux de cotation et quelques-uns se sont enrichis dans des conditions contestables.

Nous ne sommes pas là pour faire la morale, mais tous ceux qui croient en l'entreprise et en l'économie de marché ont vécu des moments douloureux, surtout lorsque la vérité s'est manifestée et qu'ont éclaté aux yeux de l'opinion publique des scandales aussi graves que ceux d'Enron ou d'autres qui ont été rappelés ici même pendant cette discussion.

Nous devons donc féliciter le Gouvernement d'avoir pris l'initiative de ce projet de loi et nous réjouir des conditions dans lesquelles nous avons discuté ce texte : vingt heures de débat public, 375 amendements déposés, 200 adoptés, dont 138 émanant de la commission des finances et 34 de la commission des lois. C'est dire si le Sénat y a apporté sa marque.

Le Sénat a d'ailleurs vécu l'examen de ce projet de loi comme une reconnaissance de ses qualités et de sa contribution.

Le Sénat a été saisi en premier de ce projet de loi, il se devait de l'examiner avec tout le soin requis.

Je tiens également à saluer nos deux rapporteurs, Philippe Marini et Jean-Jacques Hyest, les ministres, Francis Mer et Dominique Perben, grâce à qui nous avons eu un échange de qualité.

Comment ne pas se réjouir de l'unanimité qui s'est manifestée sur l'ensemble des travées lorsque nous avons eu à débattre de dispositions concernant la vie quotidienne de nos concitoyens ? Je pense au droit de la consommation, au surendettement, au rassemblement des petits actionnaires dans des associations pour faire reconnaître leurs droits, au fonds de garantie des assurances.

Ce qui nous a constamment guidés dans nos choix, dans nos options, c'est l'attachement à des principes élémentaires de transparence, de sincérité de l'information et de responsabilité. Tout ce qui va dans le sens d'un renforcement de la responsabilité civile doit primer sur le sanction pénale, surtout lorsqu'elle confine au dérisoire, comme on l'a vu dans certains cas.

Trop souvent, le législateur croit accomplir son devoir en assortissant les obligations d'une sanction pénale, que les tribunaux ne prononcent pas. Donc, sortons de cette vanité.

Nous avons considérablement amélioré le texte.

Au titre Ier, qui concerne la modernisation des autorités de contrôle, nous avons été heureux de voter, pour la troisième fois, la fusion de la Commission des opérations de bourse et du Conseil des marchés financiers ! Nous avons également eu le souci de donner des gages à l'autonomie financière. Nous avons voulu créer une meilleure articulation entre la sanction administrative de l'AMF et la procédure pénale. Nous avons également tenté de réglementer la profession d'analyste financier, mais aussi oeuvré en faveur de la reconnaissance de l'autorité de la Commission de contôle des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance en conférant la personnalité morale à cette nouvelle instance à laquelle nous avons voulu donner des gages de ressources financières.

Au titre II, relatif à la sécurité des épargnants et des assurés, nous avons procédé à un meilleur encadrement du démarchage financier, dont le champ a été bien délimité, les obligations déontologiques ont été précisées, y compris pour les conseillers en investissements financiers et le crédit à la consommation a fait l'objet d'un large débat.

Je ne sais pas si nos votes seront retenus par l'Assemblée nationale, mais nous avons bien entendu l'engagement du Gouvernement d'introduire dans la législation en vigueur des dispositions tendant à prévenir les comportements douteux, que l'on pourrait qualifier de compulsifs, de certains prêteurs à l'égard de débiteurs modestes qui se trouvent confrontés à des situations bien pénibles. Certains organismes de crédit ont tendance à considérer que l'aide sociale est le gage du remboursement du crédit à la consommation. Il faut mettre un terme à ces pratiques et entrer dans une logique de responsabilité.

Nous avons renforcé les pouvoirs des commissions de surendettement et introduit la saisine du juge pour prononcer d'office la déchéance des intérêts. C'est une sanction majeure en cas de crédits consentis soit à la légère, soit sur des fondements manifestement abusifs.

Nous avons voulu moderniser le régime des sociétés de crédit foncier et nous avons prévu l'obligation pour les gérants de capitaux d'exercer leur droit de vote lors des assemblées générales et, en toutes circonstances, d'expliquer leur abstention.

Le Sénat a complété le titre III pour améliorer la transparence et le contrôle légal des comptes, revoir les règles de séparation de l'audit et du conseil pour les réseaux de commissaires aux comptes en prenant en compte les groupes de sociétés.

Compte tenu de certaines réserves qui semblent avoir été exprimées par des membres de ces réseaux, il faudra laisser la navette faire son oeuvre pour trouver le positionnement judicieux.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. Tout à fait !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Quelle que soit son issue, le principe a été posé de séparer très clairement les honoraires versés pour accomplir les missions d'audit qui sont essentielles pour exprimer en toute indépendance une opinion sur la sincérité et la régularité des comptes sociaux des entreprises. L'exigence de ne pas mélanger les genres, de ne pas confondre ces honoraires avec ceux concernant d'autres prestations, a été soulignée et, si elle s'applique à une société, cela reste vrai pour un groupe faisant l'objet de consolidations.

Nous avons eu également des débats tout à fait intéressants sur le co-commissariat en recherchant un meilleur équilibre entre les deux commissaires chargés de certifier ensemble avec des moyens comparables, au terme de diligences identiques, d'émettre une opinion sur les états financiers.

Enfin, nous venons d'avoir un débat sur les associations d'actionnaires. C'est une manière de donner du pouvoir aux petits actionnaires.

Le Sénat a marqué de son empreinte ce texte et c'est bien.

Cependant, le législateur doit aussi être réaliste et donc modeste, car son autonomie est réduite. Cela tient au poids du droit communautaire, des normes prudentielles. On a rappelé à cet égard le ratio Cook qui n'a jamais fait l'objet d'une délibération d'aucun parlement.

De même, notre législation vieillit rapidement. Dès lors, à nous de réfléchir d'ores et déjà aux prochaines évolutions : unification des autorités prudentielles et des autorités de marché, enjeux des directives sur les investissements. Bref, nous aurons d'autres occasions pour faire évoluer notre législation.

Il est aussi nécessaire de nous extraire de nos considérations franco-françaises pour investir les instances où se préparent les décisions. Cela est vrai au plan européen comme au plan international. Cette exigence s'impose tant aux politiques que nous sommes, à vous, monsieur le ministre, membre de l'exécutif, mais aussi à nous, membres du Parlement. C'est vrai aussi pour les acteurs professionnels qui doivent être présents dans ces institutions internationales avant que des normes internationales viennent consacrer des principes et des méthodes.

Ce texte est au service de la confiance retrouvée. Il doit être aussi au service de l'attractivité du territoire national. J'espère que, lorsque la loi sera promulguée, nous pourrons constater avec satisfaction qu'elle encouragera les investisseurs du monde entier à venir en France parce qu'ils y trouveront la sécurité. J'espère que les professionnels des marchés - tous ceux qui participent à la préparation, à la certification, à la diffusion de l'information - et les entreprises elles-mêmes se concentreront sur le territoire national parce que nous aurons eu la sagesse de leur proposer les dispositions les plus appropriées à l'exercice de leur activité. Il me reste à souhaiter que la navette soit constructive.

Je veux me réjouir, encore une fois, de la qualité des travaux qui ont été conduits devant le Sénat. J'en remercie tout autant le Gouvernement que nos rapporteurs et tous les sénateurs qui ont participé à nos débats. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, je voudrais, à l'issue de nos débats, m'associer aux propos du président de la commission des finances, M. Jean Arthuis, qui a dressé une synthèse très précise du travail effectué dans cet hémicycle.

Qu'il me suffise de remercier à mon tour les collaborateurs des commissions, en particulier ceux de la commission des finances, mais aussi ceux de la commission des lois. (M. Emmanuel Hamel applaudit.)

En effet, les débats en séance publique sont l'aboutissement d'un travail tout à fait considérable réalisé en amont, spécialement sur des sujets comme celui-ci, sur lesquels il faut à la fois veiller aux principes et entrer dans le détail. Il est donc indispensable de disposer - et c'est heureusement le cas au Sénat - d'équipes extrêmement actives, pugnaces, solidaires, qui nous permettent de tenir toute notre place dans le processus institutionnel.

Monsieur le garde des sceaux, je voudrais remercier également vos collaborateurs et ceux de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, ainsi que ceux des cabinets et des services, car ce travail en amont a largement été accompli avec leur appui.

Sur bien des points, nous sommes donc parvenus, par le débat, grâce à l'intervention des ministres, mais aussi, je le répète, grâce à un partage de réflexions avec les services, à ajuster nos positions respectives, et ce parfois même en séance. J'espère que le tout a permis à ce texte d'évoluer très significativement.

M. Emmanuel Hamel. C'est un hommage mérité !

M. Philippe Marini rapporteur général. Il faut être réaliste et savoir considérer que, à ce stade, bien des choses sont encore perfectibles, y compris dans nos propres rédactions. Nous attendons d'ailleurs beaucoup de la navette, de nos collègues de l'Assemblée nationale, de leur réflexion et de la maturation de certains sujets d'ici à la deuxième lecture du projet de loi au Palais du Luxembourg.

Nous avons donc participé, monsieur le garde des sceaux, à une oeuvre de législation qui était nécessaire. La commission des finances vous a apporté, à vous et à Francis Mer, un concours actif.

Ainsi, par nos délibérations, grâce aux collègues des différents groupes qui s'y sont associés, grâce à la présidence, qui a, comme toujours, veillé à la parfaite organisation et à la parfaite correction de nos échanges, nous avons tenu notre rôle. Nous l'avons fait de façon volontariste quand nous le pouvions, de façon réaliste ou modeste lorsque la nature des choses nous y conduisait, et je vous remercie, mes chers collègues, de votre aide et de votre participation à ce difficile travail de législation.

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Je remercierai d'abord, en mon nom comme au nom de Francis Mer, l'ensemble des sénateurs qui ont participé à ce débat extrêmement productif et intéressant, car ils ont, je peux l'avouer sans fausse modestie, amélioré le texte que Francis Mer et moi-même leur avions proposé.

Je remercie tout spécialement le rapporteur général et le rapporteur pour avis, ainsi que leurs collaborateurs, car ils ont accompli un énorme travail.

Je remercie également le président de la commission des finances. Je fais mienne, monsieur Arthuis, la synthèse que vous venez de nous livrer.

Le travail que nous avons réalisé ensemble pendant cette vingtaine d'heures est de grande qualité. Certes, la navette va suivre son cours, mais cette première lecture par le Sénat augure bien de la qualité de la rdaction finale de ce projet de loi, qui est un texte tout à la fois de modernisation et de sécurité financière. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

M. Paul Loridant. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.

(Le projet de loi est adopté.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
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