SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. BERNARD ANGELS
1. Procès-verbal (p. 1).
2. Questions orales (p. 2).
prévention et protection contre les inondations dans le bassin hydrographique de la Seine (p. 3)
Question de M. Serge Lagauche. - Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable ; M. Serge Lagauche.
calcul de l'impôt sur le revenu (p. 4)
Question de M. Claude Biwer. - MM. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur ; Claude Biwer.
fermeture des foyers de la poste
en ile-de-france et à paris (p. 5)
Question de Mme Nicole Borvo. - M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur ; Mme Nicole Borvo.
implantation des succursales de la banque de France (p. 6)
Question de M. Jean-François Picheral. - MM. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur ; Jean-François Picheral.
réglementation applicable
aux administrateurs de sociétés (p. 7)
Question de M. Nicolas About. - MM. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur ; Nicolas About.
travaux sur la rn 10
entre rambouillet-pont de la droue et ablis (p. 8)
Question de M. Gérard Larcher. - MM. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat au tourisme ; Gérard Larcher.
évolution des effectifs infirmiers (p. 9)
Question de M. Louis Souvet. - MM. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées ; Louis Souvet.
application de l'article 55 de la loi
sru dans les communes inondables (p. 10)
Question de M. Dominique Leclerc. - MM. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat au tourisme ; Dominique Leclerc.
réalisation du contrat de plan état-région 2002-2006 en haute-garonne (p. 11)
Question de M. Gérard Roujas. - MM. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat au tourisme ; Dominique Leclerc.
procédure de réorganisation-partage des services
de la dde des hautes-pyrénées (p. 12)
Question de M. François Fortassin. - MM. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat au tourisme ; François Fortassin.
réforme de la fiscalité locale (p. 13)
Question de Mme Valérie Létard. - M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales ; Mme Valérie Létard.
conditions de représentation des communes associées (p. 14)
Question de M. Philippe Richert. - MM. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales ; Francis Grignon, en remplacement de M. Philippe Richert.
application de la législation sur la réduction
du temps de travail dans les petites entreprises (p. 15)
Question de Mme Sylvie Desmarescaux. - Mmes Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle ; Sylvie Desmarescaux.
avenir des délégations et des centres d'information aux droits des femmes (p. 16)
Question de Mme Danièle Pourtaud. - Mmes Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle ; Danièle Pourtaud.
Suspension et reprise de la séance (p. 17)
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN
3. Conférence des présidents (p. 18).
4. Prévention des risques technologiques et naturels. - Discussion d'un projet de loi (p. 19).
Discussion générale : Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable ; MM. Yves Détraigne, rapporteur de la commission des affaires économiques ; André Lardeux, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales ; Yves Coquelle, Francis Grignon, Claude Biwer, Fernand Demilly, Daniel Raoul, Gérard Le Cam, Jean-Paul Alduy, Philippe Arnaud, Marc Massion, Henri Revol, Jean-Paul Amoudry, André Vantomme.
PRÉSIDENCE DE M. GUY FISCHER
MM. Philippe Leroy, Yves Dauge, Eric Doligé, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Christian Demuynck, Gérard Larcher, président de la commission des affaires économiques.
Mme la ministre.
Clôture de la discussion générale.
Renvoi de la suite de la discussion.
5. Dépôt d'une question orale avec débat (p. 20).
6. Dépôt d'une proposition de loi (p. 21).
7. Texte soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution (p. 22).
8. Renvois pour avis (p. 23).
9. Ordre du jour (p. 24).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. BERNARD ANGELS
vice-président
M. le président. La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à dix heures trente.)
PROCÈS-VERBAL
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
QUESTIONS ORALES
M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.
PRÉVENTION ET PROTECTION
CONTRE LES INONDATIONS
DANS LE BASSIN HYDROGRAPHIQUE DE LA SEINE
M. le président. La parole est à M. Serge Lagauche, auteur de la question n° 116, adressée à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
M. Serge Lagauche. Madame la ministre, la prévention des inondations en France fait l'objet, depuis les catastrophes survenues ces dernières années dans l'Aude, le Gard et la Somme, par exemple, d'une prise de conscience croissante de la part des pouvoirs publics et de la population.
Dans la région d'Ile-de-France, en particulier, les acteurs institutionnels et économiques multiplient depuis quelques mois les réunions pour partager les connaissances et améliorer les dispositifs d'alerte et les plans de secours.
Mais on ne peut en rester là. En effet, sur le bassin hydrographique de la Seine, les quatre barrages réservoirs situés en Seine Amont et la zone d'expansion à la Bassée en Seine-et-Marne sont, certes, de bons outils, mais ils n'auraient qu'un effet limité face à une crue exceptionnelle du type de celle de 1910, qui peut survenir dans quelques mois comme dans plusieurs années et dont les conséquences seraient particulièrement graves, tant pour les personnes que pour les biens, et paralyseraient pour plusieurs semaines de nombreux secteurs de l'économie.
Afin de réduire davantage le risque et la vulnérabilité des zones habitées sur l'ensemble du bassin de la Seine, il faut envisager de nouvelles actions de prévention et de protection, d'une part sur les moyen et long termes et, d'autre part, de façon globale, en prenant en compte tant l'amont que l'aval, ce qui implique de mettre en oeuvre une concertation régulière et efficace entre tous les acteurs : l'Etat, via le préfet coordonnateur, et la direction de l'environnement du bassin, l'agence de l'eau Seine-Normandie et les collectivités regroupées au sein d'une même structure de dialogue.
Le dialogue va se révéler d'autant plus essentiel, madame la ministre, que votre projet de loi sur la prévention des risques technologiques et naturels, dont nous allons commencer l'examen cet après-midi au Sénat, tente d'apporter une réponse à l'actuel éparpillement des responsabilités en accroissant de façon importante les compétences des collectivités en matière de prévention des inondations.
Or, si ce type de structure de concertation existe déjà sur une très grande majorité des bassins hydrographiques sous la forme d'établissements publics, le bassin de la Seine en est, lui, dépourvu. Leur utilité, pourtant, n'est plus à démontrer. L'exemple de l'Etablissement public Loire, l'EPL, montre bien que la dimension du bassin permet une meilleure concertation sur les dispositions à mettre en place progressivement, sur le moyen et le long termes, pour une prévention mieux coordonnée, plus efficace, permettant une meilleure utilisation de l'ensemble des crédits affectés aux différents organismes.
Le citoyen concerné pourra être régulièrement informé de l'évolution et des moyens mis en oeuvre par les pouvoirs publics sur l'ensemble du bassin, ce qui évitera les rumeurs populaires accusant telle ou telle administration de négligence, voire plus.
Madame la ministre, la création d'un établissement public Seine ne peut, je pense, que rencontrer votre assentiment. Est-il dans vos intentions de favoriser un tel projet, voire, compte tenu des enjeux, de le rendre obligatoire après concertation avec les collectivités territoriales ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le sénateur, votre proposition de favoriser la création d'un établissement public territorial de bassin, un EPTB, sur la Seine suscite tout mon intérêt.
L'enjeu principal du bassin de la Seine est celui de l'agglomération d'Ile-de-France. Environ sept cent mille personnes seraient directement touchées par une crue similaire à celle de 1910 en Ile-de-France, soit près du tiers de la population concernée par les inondations en France.
La cinétique de l'événement serait certes relativement lente, s'agissant d'une crue de plaine. Le risque porterait donc davantage sur les biens que sur les personnes, lesquelles pourraient être soustraites au danger à temps.
Le fonctionnement de l'ensemble des réseaux - voirie, SNCF, RATP, EDF, France Télécom, eau potable, assainissement, chauffage urbain... - serait très perturbé par une crue du calibre de celle de 1910, dont les dommages potentiels sont estimés entre 10 milliards et 15 milliards d'euros.
L'Etat serait amené à prendre le relais des assurances, qui ne pourraient faire face à l'indemnisation des biens assurés : l'Etat garantit en effet le régime d'assurance catastrophes naturelles en cas de sinistre majeur. La Bibliothèque de France, le musée du Louvre, le musée d'Orsay, l'Assemblée nationale, l'hôpital européen Georges-Pompidou seraient également affectés. Il faudrait probablement plusieurs mois avant que la situation redevienne normale, notamment pour ce qui concerne la RATP et la SNCF.
Cette vulnérabilité, vous l'avez utilement souligné, s'est accrue fortement depuis un siècle, malgré les actions engagées, du fait de l'absence de coordination non seulement entre les services de l'Etat, mais aussi entre les collectivités territoriales.
L'Etat a engagé récemment un travail pour améliorer l'efficacité de son action. Un décret du 4 juillet 2002 permet de désigner des préfets pour exercer des compétences interdépartementales et interrégionales dans le registre de la prévention des inondations, notamment. Ce décret vient d'être mis en oeuvre pour le bassin de la Loire, avec l'arrêté du 23 décembre 2002.
En Ile-de-France, l'action conjointe du préfet de police et du préfet de région coordonnateur de bassin a conduit à remettre à jour les programmes de mesures à prendre en cas de grande inondation. Les résultats de cette remise à jour ont été présentés aux maires concernés le 4 décembre 2002.
J'ajoute que le bassin de la Seine est éligible au plan de prévention des inondations que j'ai lancé en septembre 2002 et qui aura, notamment, pour objet de soutenir les initiatives des collectivités locales et de leurs groupements tendant à réguler le débit des rivières en créant ou en restaurant des zones d'expansion des crues. Le bassin de la Seine ne sera bien évidemment pas oublié et j'ai déjà pris connaissance d'initiatives prises par des élus fortement impliqués.
Parallèlement, la question de la coordination de l'action des collectivités territoriales se pose pour le bassin de la Seine. En effet, aucune organisation regroupant les collectivités territoriales n'a été mise en place, à l'exemple des regroupements constitués sur d'autres bassins tels que l'établissement public Loire, l'EPL, ou l'établissement public d'aménagement de la Meuse et de ses affluents, l'EPAMA.
En effet, l'Institution interdépartementale des barrages réservoirs du bassin de la Seine, l'IIBRBS, aussi nommée Les Grands Lacs de Seine, ne regroupe que Paris et les trois départements de la « petite couronne », même si son action au travers des quatre barrages que gère l'IIBRBS s'exerce à l'amont. Ces barrages sont construits sur l'Yonne, la Seine, l'Aube et la Marne. D'une capacité totale de 800 millions de mètres cubes, ils permettraient d'abaisser la ligne d'eau à Paris de 60 centimètres au maximum pour une crue centennale.
La mise en oeuvre d'un établissement public territorial de bassin ne saurait être réalisée qu'après concertation avec toutes les collectivités territoriales concernées. La question de la création d'un tel établissement pourrait ainsi être évoquée lors des débats prévus en 2003 autour de la réforme de la politique de l'eau. Votre proposition de donner à l'Etat les moyens d'éventuellement rendre obligatoire la création de tels établissements serait alors débattue. Mais la discussion du projet de loi relatif à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages nous permettra certainement d'aborder la question et peut-être de rendre officiels ces EPTB, qui n'ont pas de fondement législatif pour l'instant.
M. le président. La parole est à M. Serge Lagauche.
M. Serge Lagauche. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.
Il faut vraiment accélérer la concertation, d'autant que des villes comme Rouen et Le Havre, par exemple, sont également concernées par ce qui peut se passer à Paris, les problèmes d'ensablement, entre autres, ayant, on le sait, des répercussions sur l'ensemble du bassin.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Tout à fait !
CALCUL DE L'IMPÔT SUR LE REVENU
M. le président. La parole est à M. Claude Biwer, auteur de la question n° 111, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Claude Biwer. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que certaines voix de l'ancienne majorité s'étaient prononcées vigoureusement en faveur de l'instauration de la retenue à la source pour le paiement de l'impôt sur le revenu, l'actuel gouvernement a cru devoir, au contraire, renoncer provisoirement à l'application d'une telle réforme. Mais, parmi les arguments avancés, certains ne résistent pas à un examen sérieux, et encore moins à des comparaisons internationales.
« Les Français, dans leur majorité, ne sont pas favorables à l'introduction de la retenue à la source » : les résultats de l'enquête réalisée sur ce sujet, à la demande du conseil des impôts, nous apprennent, il est vrai, que 51 % de nos compatriotes déclarent préférer le système actuel du paiement par tiers provisionnels. Or, d'après la même étude, 54 % d'entre eux ont d'ores et déjà adhéré à la mensualisation !
Cette contradiction s'explique par le fait que, en réalité, les Français ne sont pas informés des avantages ou des inconvénients que présente la retenue à la source. Ainsi, 55 % d'entre eux croient que l'impôt demeurerait calculé sur les revenus de l'année précédente, ce qui est bien évidemment erroné.
D'après cette étude, « la retenue à la source pose des problèmes techniques et entraînera de nouvelles charges pour les banques et les entreprises. » C'est sans doute vrai, mais la plupart de nos voisins européens ont adopté - et pour certains depuis fort longtemps - la retenue à la source et, non seulement les problèmes techniques ont été surmontés, mais il n'a pas été porté à notre connaissance que leurs banques ou leurs entreprises aient périclité !
Dernier argument, certes non officiellement évoqué : « l'hostilité des syndicats de personnels du ministère de l'économie et des finances » : c'est, selon moi, l'argument le moins important. En effet, la politique consiste, non pas à défendre des intérêts catégoriels, mais à travailler en faveur de l'intérêt général.
Dans la mesure où le Gouvernement a cru devoir ne pas mettre en place la retenue à la source, je souhaite qu'il réserve au minimum une suite favorable à l'une des recommandations émises par le conseil des impôts, à savoir la suppression du décalage d'un an entre la perception des revenus et leur imposition, comme cela se pratique déjà pour l'impôt sur les sociétés.
Cette formule consisterait à prendre comme assiette le revenu de l'année courante et non plus celui de l'année précédente avec, bien sûr, une régularisation en fin d'année. Une telle formule aurait comme avantage de supprimer le décalage d'un an, qui est favorable, certes, aux contribuables dont les revenus augmentent, mais très défavorable lorsque ceux-ci viennent à diminuer.
Ce décalage peut même constituer une véritable gêne, voire empêcher l'acquittement normal de l'impôt lorsque les revenus courants supportant la charge fiscale subissent une diminution très forte, en cas de chômage ou de mise à la retraite par exemple.
Une telle réforme constituerait, selon moi, une étape importante en direction de la retenue à la source, tout en n'impliquant pas, dans un premier temps, les employeurs dans la collecte de l'impôt.
De plus, il me paraîtrait également normal de récompenser les contribuables qui acceptent de payer leur impôt sur le revenu par mensualités automatiquement prélevées : pourquoi ne pas leur consentir un abattement d'impôt, dont le montant pourrait être fixé en loi de finances ?
Par ailleurs, monsieur le ministre, nos compatriotes sont quelquefois étonnés d'apprendre, en se rendant à leur perception, qu'ils ne peuvent y obtenir de formulaires leur permettant de remplir leur déclaration de revenus. Même si cette réflexion est connexe au sujet que je souhaitais aborder aujourd'hui, elle démontre, s'il en était besoin, combien la réforme de l'Etat passe également par une profonde réforme du ministère de l'économie et des finances.
Il faut réconcilier les Français avec l'impôt sur le revenu. Cela passe, me semble-t-il, par une simplification du mode de calcul de cet impôt, en le faisant dorénavant asseoir sur les revenus de l'année en cours et en récompensant les contribuables qui font l'effort de se mensualiser.
J'ose espérer que le Gouvernement réservera, dès que possible, une suite favorable à ces réflexions.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur. Monsieur le sénateur, vous avez abordé la question du décalage entre la perception du revenu et le paiement de l'impôt sur le revenu, notamment pour les personnes qui constatent une baisse de leur revenu d'une année sur l'autre.
A l'instar de ce qui se pratique dans la plupart des pays de l'OCDE, une piste pourrait consister à prélever l'impôt à la source, c'est-à-dire dès le paiement du revenu. Cette solution a fait l'objet d'une étude approfondie, aux termes de laquelle il apparaît que cette réforme présenterait, certes, des avantages, mais également de nombreux inconvénients. En particulier, la retenue à la source ne dispenserait pas les contribuables de souscrire une déclaration annuelle ; elle se traduirait également par des charges supplémentaires pour les entreprises et poserait de sérieuses difficultés de mise en place, difficultés que vous avez vous-même évoquées.
Dès lors, un simple aménagement des modalités de recouvrement de l'impôt consistant à supprimer le décalage d'un an entre la déclaration et le paiement de l'impôt pourrait constituer une solution. Cette solution, que vous souhaitez voir retenue, est également suggérée par le conseil des impôts dans son vingtième rapport au Président de la République. Elle éviterait, notamment, le transfert aux entreprises de la charge administrative liée au paiement de l'impôt.
Nous avons demandé à nos services de lancer très rapidement une étude approfondie sur cette proposition, qui permettrait de rapprocher l'année de perception de l'impôt de celle de la perception des revenus. Il convient, en effet, de s'assurer de la faisabilité de cette mesure, de vérifier qu'elle ne génère pas des complexités excessives pour le contribuable et d'examiner comment résoudre le difficile problème de l'année de transition entre les deux systèmes.
Nous prenons note, bien sûr, de toutes vos propositions, mais je ne suis pas sûr que celle qui consiste à verser un bonus au contribuable soit conforme à la Constitution.
Sans préjuger la suite qui pourra être donnée à cette étude, nous avons décidé de privilégier dès maintenant deux axes d'amélioration du recouvrement de l'impôt sur le revenu qui sont réellement de nature à simplifier les formalités à la charge des contribuables et qui vont dans le sens que vous souhaitez, monsieur le sénateur. Le premier consistera à renforcer l'incitation au paiement mensuel de l'impôt : le processus de gestion de la mensualisation fait d'ores et déjà partie de ceux qui ont été retenus pour faire l'objet d'une démarche de réingénierie, qui a commencé en décembre dernier. Le second visera à mettre en oeuvre un système déclaratif simplifié au travers de l'instauration de la déclaration préremplie par l'administration. Notre objectif, en termes de calendrier pour la déclaration préremplie, est que celle-ci soit mise en oeuvre en 2005, au titre des revenus perçus en 2004.
Vous le constatez : des améliorations sont prévues. Le ministère des finances a bien compris qu'il était au coeur de la réforme de l'Etat.
M. le président. La parole est à M. Claude Biwer.
M. Claude Biwer. Monsieur le ministre, je prends note de l'orientation que vous souhaitez développer et qui va, me semble-t-il, dans le bon sens. En tant qu'élu frontalier, je constate que les pratiques sont très différentes d'un pays à l'autre et je souhaite voir se rapprocher certains principes.
FERMETURE DES FOYERS DE LA POSTE
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, auteur de la question n° 121, adressée à Mme la ministre déléguée à l'industrie.
Mme Nicole Borvo. Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur la situation des foyers de La Poste en Ile-de-France, et à Paris en particulier, ville que je représente.
Le projet de fermeture sur trois ans des deux tiers du parc actuel des places en foyers d'hébergement rencontre une forte résistance des personnels. En effet, si je suis bien informée, La Poste prévoit de supprimer la quasi-totalité des foyers en seconde couronne d'Ile-de-france et de diminuer des deux tiers le nombre de places en première couronne. A Paris, le nombre de places passerait de 1 206 à 670 places.
Pourtant, contrairement à ce qui est souvent affirmé, les provinciaux sont toujours nombreux à « monter à Paris », comme l'on dit, pour passer les concours : 70 % des reçus au concours de facteur en décembre 2001 sont issus de province.
Par ailleurs, les milliers d'agents contractuels ou fonctionnaires originaires d'Ile-de-France n'ont pas forcément envie de rester dans le cadre familial du reste, ils n'en ont pas toujours la possibilité. Ils ne trouveront donc plus de foyer en attendant un logement définitif.
Pourtant, il existe un réel besoin de recrutement de postiers en Ile-de-France. Or l'un des problèmes des postiers, notamment de ceux qui ont de très bas salaires, est de pouvoir se loger à proximité de leur travail.
Compte tenu de la mobilisation unitaire des personnels, la direction des ressources humaines de La Poste en Ile-de-France annonçait, le 11 juin dernier, qu'elle entendait suspendre la fermeture des foyers parisiens prévue à la fin du mois de juin et organiser des tables rondes sur la problématique suivante : foyers, hébergements, logements, débutants, logements de postiers.
Il est urgent que le dialogue social s'approfondisse réellement avec tous les acteurs concernés. Celui-ci se déroulera d'autant mieux qu'aucune menace de fermeture ne planera sur les foyers, comme cela a été malheureusement le cas dans les foyers des rues de Turgot et de Trévise, à Paris.
En tout état de cause, il serait contraire à la mission de service public de La Poste de brader le patrimoine public et d'en arriver, à Paris comme ailleurs, à des hébergements en hôtel, comme les ont connus les postiers il y a trente ou quarante ans, avant la création des foyers.
Je vous serais reconnaissante, monsieur le ministre, de m'indiquer ce que le Gouvernement compte faire pour approfondir le dialogue social, qui nous est cher, en vue d'orienter tous les efforts vers le maintien d'un nombre suffisant de foyers de La Poste par rapport aux besoins actuels.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur. Madame la sénatrice, les foyers constituent, en principe, des structures d'accueil temporaires. Il s'agit en ce sens de structures d'hébergement, et non de logements. Le 1er décembre dernier, leur taux d'occupation en Ile-de-France était inférieur à 50 %.
Pour comprendre ce phénomène, il faut appréhender plus largement l'évolution des standards d'autonomie et de confort aujourd'hui exigés par nos jeunes concitoyens en matière de logement. Leurs habitudes de vie et leurs exigences ne correspondent plus à celles qui prévalaient lors de la création des foyers, voilà cinquante ans. La Poste a donc pris en compte ces nouveaux besoins pour impulser une politique de logement social conforme à l'évolution de la société.
Le gel de la fermeture des foyers à Paris intra-muros a été décidé. Il s'agit maintenant de trouver la solution la plus adaptée à la situation personnelle de chaque agent. Je veux surtout confirmer, madame la sénatrice, que les tables rondes auxquelles vous avez fait allusion ont effectivement eu lieu à trois reprises : le 19 juin, le 25 juillet et le 12 septembre 2002. Le dialogue social, que nous appelons tous de nos voeux, est donc une réalité.
Au-delà, La Poste conduit trois actions complémentaires. Elle a d'abord lancé un programme de rénovation et de modernisation des foyers qui resteront dans le parc d'hébergement de La Poste : 1 300 places seront ainsi offertes, alors que seulement 1 100 places sont aujourd'hui occupées.
La Poste apporte ensuite des aides financières significatives individuelles à ses agents, sous forme de paiement de caution ou de garantie au regard du paiement des loyers.
Enfin, grâce notamment à la participation de La Poste à l'effort de construction, qui s'élève chaque année à 30 millions d'euros, La Poste oriente prioritairement ses actions sur la constitution d'un parc de logements sociaux en Ile-de-France, pour lesquels elle fait bénéficier ses agents soit de droits prioritaires, soit de droits exclusifs.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo.
Mme Nicole Borvo. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse.
Il est vrai que les places dans les foyers ne sont pas toutes occupées. Mais l'annonce des fermetures crée des problèmes. Bien entendu, les agents veulent être mieux logés et les foyers ne correspondent plus aux demandes qui étaient formulées voilà cinquante ans. Pour autant, il faut avoir conscience que les salaires des postiers sont toujours très bas. Je partage, bien évidemment, l'objectif de rénovation des foyers, mais je considère qu'il faut également s'intéresser aux situations temporaires, car les foyers sont des lieux d'hébergement temporaire destinés non seulement aux jeunes, mais également aux personnes qui connaissent une situation familiale particulière - séparation, divorce, problèmes sociaux.
Il faut aussi savoir qu'à Paris, notamment, le logement social est déficitaire pour tout le monde. S'agissant, par exemple, des étudiants, les mesures qui sont prises à l'heure actuelle par la municipalité auront du mal à répondre à la demande. Il faut tenir compte de tous ces éléments. Par conséquent, la solution ne consiste pas à fermer des places d'hébergement.
S'il doit y avoir une reconversion, celle-ci doit faire l'objet d'un partenariat, notamment, en ce qui concerne Paris, avec la mairie de Paris. Nous savons, les uns et les autres, qu'il faut intensifier la construction de logements sociaux qui correspondent aux besoins d'aujourd'hui.
Les efforts doivent être orientés non pas vers la restriction du nombre de logements, mais vers la possibilité de proposer aux jeunes agents qui sont embauchés par La Poste et qui n'ont pas les moyens de se loger à Paris ou en petite couronne une place en foyer ou en logement social. C'est dans cette voie qu'il faut absolument s'engager.
IMPLANTATION DES SUCCURSALES
M. le président. La parole est à M. Jean-François Picheral, auteur de la question n° 133, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Jean-François Picheral. Monsieur le ministre, je souhaite de nouveau attirer votre attention sur le projet de plan de restructuration des missions et d'implantation territoriale des succursales de la Banque de France, et ainsi me faire l'écho de l'inquiétude légitime des salariés et des clients quant aux probables suppressions de postes qui en découleraient.
Lors de la séance de questions orales du mardi 17 décembre dernier au Sénat, Mme Fontaine, ministre déléguée à l'industrie, déclarait, avant même que le résultat des travaux des deux missions confiées par M. Trichet ne soit connu : « Nos partenaires européens ont tous tiré, ces dernières années, les conséquences de ces mutations en procédant à des réformes de leur banque centrale. La France ne peut rester en retrait. (...) Le rôle de la Banque de France doit néanmoins être conçu dans un souci d'optimisation de sa gestion. »
Au moment où le Gouvernement prône - ce fut le cas lors du dernier comité interministériel - « un soutien actif à l'économie du monde rural », les élus locaux refusent justement de voir disparaître les succursales de la Banque de France, prélude à la fuite des services publics et à la désertification économique des bassins d'emploi.
De même, les associations de consommateurs demandent que les services rendus soient au plus proche du citoyen, en matière tant de surendettement, de consultation des fichiers nationaux, que d'accès au droit au compte bancaire ou d'information sur les pratiques bancaires.
A Aix-en-Provence, la ville dont je suis issu, vingt mille personnes ont eu recours aux services de la succursale depuis le début de l'année 2002, ce qui représente, entre autres, six cents dossiers de surendettement, trois mille demandes d'accès au fichier central des chèques, le FCC et mille cinq cents au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, le FICP.
Il ne s'agit pas, pour ces usagers ainsi que pour les huit cents clients fidèles, d'aller grossir le flot de l'axe autoroutier Aix-Marseille, axe le plus sinistré de France, et de subir ainsi des heures d'attente aux guichets marseillais.
Par ailleurs, la réduction du nombre de succursales, associée à l'externalisation du tri des billets, aurait des conséquences désastreuses sur la qualité de la circulation fiduciaire, avec un accroissement de la fausse monnaie et du nombre de billets en mauvais état. L'entretien de la monnaie, aujourd'hui gratuit pour les usagers, deviendra payant s'il est confié à des opérateurs privés ou s'il fait l'objet d'une simple délocalisation.
Les relations de proximité entretenues par la Banque de France avec les entreprises et les collectivités locales pour soutenir l'activité économique des bassins d'emploi disparaîtront assurément.
Pour conclure, je rappellerai que tous les services rendus par la Banque de France ont certes un coût, mais que celui-ci est supporté par son compte d'exploitation, qui a reversé ces vingt dernières années - il faut le souligner - 24 milliards d'euros à l'Etat. Ce dernier est le seul actionnaire, ce qui explique la faiblesse des fonds propres de l'établissement.
Peut-on, dès lors, reprocher à la Banque de France, et donc à son réseau, l'effort fourni dans ce secteur financier, puisqu'elle a contribué au développement de l'économie du pays tout entier en allégeant la pression fiscale de tous les contribuables ?
Pour toutes ces raisons, je vous demande, monsieur le ministre, si ce plan n'apparaît pas aujourd'hui comme une solution paradoxale, en tout cas incomprise et dangereuse pour la présence des services publics au niveau local, au moment même où la décentralisation est au coeur des débats de notre société.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur. Monsieur le sénateur, vous développez à merveille la question du rôle de la Banque de France en milieu rural.
Nous savons effectivement que le réseau des succursales de la Banque de France comprend 211 implantations - certains départements n'en ont qu'une, d'autres en ont plusieurs - dont l'organisation est héritée du xixe siècle et des deux premières décennies du xxe siècle. La Banque de France a aujourd'hui, comparée aux autres banques centrales européennes, le réseau le plus dense d'Europe.
La Banque de France est engagée depuis plusieurs années dans un mouvement de modernisation de ses activités et d'adaptation de ses structures et de ses méthodes qui prend en compte les importantes mutations que connaissent les activités exercées dans ses comptoirs et au siège : concentration des opérations de numéraire avec la clientèle institutionnelle, modernisation de l'ensemble du traitement de la monnaie fiduciaire, rationalisation des circuits de recouvrement et d'échanges, dématérialisation des supports et automatisation de l'ensemble des opérations dans le domaine scriptural, progrès des échanges informatisés en matière d'information économique.
La poursuite de ce mouvement de modernisation et de baisse des coûts constitue une nécessité de gestion pour la Banque de France, alors que les taux d'intérêt sont très bas et que la circulation fiduciaire de l'euro est beaucoup moins importante que celle du franc.
Dans ce contexte, le gouverneur de la Banque de France a annoncé le 15 octobre 2002 le lancement d'une mission de réflexion sur l'évolution du réseau de succursales et sur l'avenir des opérations avec la clientèle particulière. Confiée au secrétaire général de la Banque de France, cette mission se traduira notamment par une concertation approfondie avec les partenaires sociaux ainsi qu'avec les élus locaux.
Comme tout organisme public, la Banque de France doit veiller à rendre à la collectivité nationale le meilleur service au meilleur coût, en prenant en compte à la fois l'ensemble des évolutions qui affectent ses métiers et les attentes légitimes du public en matière de qualité et d'efficacité du service rendu.
Vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur, nos partenaires européens ont tiré ces dernières années les conséquences de ces mutations en réformant leur banque centrale. La France n'a aucune raison de demeurer en retrait de cette évolution naturelle, qui est tout simplement liée à l'économie de l'activité de la Banque de France.
Cependant, l'Etat entend bien sûr conforter la Banque de France, qui doit pleinement jouer son rôle dans la vie économique locale, en gardant néanmoins le souci d'optimiser la gestion de cet établissement, qui est comptable de son action devant la nation.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Picheral.
M. Jean-François Picheral. Monsieur le ministre, je vous remercie de cette réponse, qui n'apporte cependant pas d'éléments nouveaux par rapport à celle que m'avait donnée Mme la ministre de l'industrie, le 17 décembre dernier.
Je souhaite que votre gouvernement prenne bien conscience des difficultés que cette réforme va entraîner pour des villes certes moyennes, mais qui sont le centre de pays de 350 000 habitants. Cela justifie que la commission Trichet nous consulte, nous, élus locaux, avant de prendre des décisions. Aujourd'hui, je le souligne, ce n'est absolument pas le cas.
C'est la raison pour laquelle j'aimerais que mon interpellation, la deuxième depuis le 17 décembre dernier, contribue à imposer cette concertation, que le Gouvernement semble souhaiter, et je compte sur vous, monsieur le ministre, pour transmettre ma demande.
RÉGLEMENTATION APPLICABLE
AUX ADMINISTRATEURS DE SOCIÉTÉS
M. le président. La parole est à M. Nicolas About, auteur de la question n° 128, adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Nicolas About. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le garde des sceaux.
Lorsqu'une société commerciale est créée, ses dirigeants sont tenus de l'inscrire au registre du commerce et des sociétés, le RCS. Ils fournissent à cette occasion un certain nombre d'informations qui seront réunies par la suite dans un document, appelé « extrait K bis », établi par le greffe du tribunal de commerce. Parmi ces informations figure notamment le nom des administrateurs de ladite société au moment de sa création.
Or, dans la vie d'une société, de nombreux changements peuvent intervenir, comme le décès ou la démission de certains administrateurs. En théorie, la société est alors tenue de remettre à jour son K bis, mais rien, dans la réalité, ne l'y oblige vraiment. Les conséquences de cette carence sont loin d'être négligeables sur le plan juridique.
Je citerai en exemple un cas que je connais bien. Dans la ville nouvelle de Saint-Quentin-en-Yvelines, des élus ont été nommés, voilà plus de dix ans, administrateurs d'une société d'économie mixte appelée SLECANSQCA et destinée à donner naissance à une chaîne de télévision locale, plus connue sous le nom de TVFIL 78. Or ces élus éprouvent aujourd'hui de grandes difficultés pour obtenir de cette société la modification de son K bis alors même qu'ils n'en sont plus membres depuis de nombreuses années et que certains n'ont même jamais participé à aucune assemblée générale. D'autres sont morts et continuent pourtant de figurer au K bis de cette société !
Mais il y a pis. Certains des élus qui ont prêté leur nom pour représenter leur commune découvrent, plusieurs années après, qu'en réalité ils figurent dans le K bis en nom propre. Leur responsabilité personnelle risque donc à tout moment d'être engagée si la société rencontre des difficultés financières. Bien entendu, il leur est toujours possible de faire un référé devant le tribunal de commerce. Mais, même s'ils devaient obtenir gain de cause auprès du tribunal, rien ne leur garantirait que la société effectue ces modifications. En effet, celle-ci a fait preuve d'une particulière négligence en omettant de réaliser toute mise à jour depuis une dizaine d'années et n'est plus aujourd'hui en mesure de reconstituer l'historique complet de ses administrateurs, faute d'avoir tenu des archives ou un simple registre de mouvements de titres !
Enfin, la situation devient parfaitement ubuesque si l'on songe aux risques qu'encourent les nouveaux administrateurs qui, eux, ne figurent pas dans ce fameux K bis et dont certains touchent des jetons de présence pour leur participation effective au conseil d'administration. Rien ne les empêche d'être un jour poursuivis pour prise illégale d'intérêts, dans la mesure où ils ne figurent pas légalement dans le K bis !
Les élus n'ont donc procéder à ce jour à aucun moyen légal de contraindre une société à effectuer une mise à jour de son K bis, ce qui les place dans une situation juridique et financière délicate.
Quelles mesures comptez-vous prendre, monsieur le ministre, pour imposer aux sociétés la mise à jour régulière de leur K bis ? Quels contrôles des autorités publiques - et, éventuellement, quelles sanctions - pensez-vous mettre en place pour éviter de telles aberrations ? Enfin - et c'est peut-être ma principale question -, peut-on envisager des mesures exceptionnelles pour permettre à des sociétés comme TVFIL 78, qui ont perdu ou qui ont négligé leurs archives depuis de trop longues années, d'effectuer cette mise à jour sans avoir à retracer l'historique complet de leurs administrateurs ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur. Monsieur le sénateur, vous avez posé une question à M. le garde des sceaux, et je vais essayer de vous apporter la meilleure réponse possible.
Comme vous le savez, les sociétés, et parmi elles les sociétés d'économie mixte, doivent déclarer au registre du commerce et des sociétés les modifications qui interviennent dans leurs statuts ou dans la composition de leur direction.
Il arrive malheureusement que certaines d'entre elles ne respectent pas cette obligation, et vous nous avez relaté une histoire regrettable. C'est pourquoi les textes applicables prévoient que la demande de modification de l'inscription au registre du commerce peut être faite par tout intéressé. En application de l'article 27 du décret du 30 mai 1984 relatif au registre du commerce et des sociétés, l'ancien administrateur d'une société qui constate qu'il apparaît toujours sur l'extrait du registre peut demander lui-même la modification nécessaire. Il n'est pas besoin pour cela qu'il saisisse le tribunal : un référé n'est pas indispensable, il lui suffit de s'adresser au greffier chargé de la tenue du registre.
Par ailleurs, en application de l'article L. 123-1 du code de commerce, le juge commis à la surveillance du registre peut, d'office ou sur requête du procureur de la République, enjoindre aux sociétés immatriculées de faire procéder aux mentions rectificatives.
M. Nicolas About. Encore faut-il qu'elles le fassent !
M. François Loos, ministre délégué. En conséquence, il est tout à fait possible pour les élus ou la commune intéressés de s'adresser au greffe chargé de la tenue du registre du commerce et des sociétés aux fins que soient rectifiées pour l'avenir les mentions concernant la composition des organes dirigeants ou la détention du capital social de la société TVFIL 78.
S'il existe des difficultés particulières pour cette société, elle pourra saisir le juge chargé de la surveillance du registre.
Il convient enfin de relever que les mentions portées au registre du commerce et des sociétés constituent des règles de preuve vis-à-vis des tiers, mais qu'il est possible d'apporter la preuve contraire si l'inscription est manifestement erronée et que l'intéressé n'en est pas fautif.
Tous ces éléments permettent donc de résoudre la situation des personnes qui s'inquiètent de figurer sur un K bis alors qu'ils n'ont plus lieu d'y être.
M. le président. La parole est à M. Nicolas About.
M. Nicolas About. Je tiens à remercier M. le ministre délégué des informations qu'il vient de me communiquer. Si j'ai bien compris, les personnes qui sont maintenues injustement ou illégalement au K bis ont les moyens de s'en faire rayer.
Le problème, en revanche, demeure pour celles qui n'y figurent pas et qui perçoivent des indemnités en tant que membres du conseil d'administration. Elles doivent obtenir ou bien que la société accepte de se mettre en conformité, ou bien qu'un juge ordonne la correction. Cette dernière procédure n'est pas simple, car, à ma connaissance, le juge ne peut que demander à la société de se mettre en conformité. En tous les cas, tous les élus qui perçoivent des jetons de présence sont susceptibles d'être poursuivis et doivent donc être très vigilants.
Pour ce qui est des personnes qui ne devraient plus figurer au K bis, j'ai bien compris la méthode, et je transmettrai vos indications, monsieur le ministre.
TRAVAUX SUR LA RN 10
ENTRE RAMBOUILLET-PONT DE LA DROUE ET ABLIS
M. le président. La parole est à M. Gérard Larcher, auteur de la question n° 124, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
M. Gérard Larcher. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question porte sur l'aménagement d'une grande infrastructure de circulation, aménagement sur lequel j'ai déjà eu l'occasion d'interroger les gouvernements successifs à deux reprises : en effet, le projet, dans sa configuration actuelle, date de dix ans, et l'avant-projet de trente ans.
Il s'agit tout simplement de la mise à deux fois deux voies de la RN 10 entre Rambouillet-pont de la Droue et Ablis, aux confins du département des Yvelines. Ce secteur est particulièrement criminogène, en termes d'accidentologie, puisque nous avons eu à y déplorer, au cours de l'année 1999, pas moins de onze morts, sur une section de douze kilomètres !
Le précédent contrat de plan prévoyait déjà cet aménagement, de même que le contrat de plan actuel. L'ensemble des collectivités locales et l'ensemble des propriétaires fonciers sont tous d'accord - ce n'est pas toujours le cas - sur le tracé, l'aménagement et la cession des terrains.
Alors que le remembrement foncier est en cours d'achèvement, que les concessionnaires de réseaux ont entamé leurs travaux, que le directeur départemental de l'équipement a présenté aux maires concernés, en septembre dernier, un calendrier qui prévoyait le premier coup de bulldozer pour la fin du premier semestre de 2003, des interrogations subsistent sur la date de l'engagement du chantier et sur les moyens financiers affectés à l'ensemble du projet, notamment aux voies de désenclavement. En effet, celles-ci sont nécessaires à la mise en oeuvre du remembrement, qui implique une prise de possession des terres - nous sommes en Petite Beauce ! - le 1er août, voire, au plus tard, le 15 août 2003, sauf à perdre encore une année pour l'engagement des travaux. Les conséquences d'un tel report porteraient sur une somme légèrement supérieure à 600 000 euros, qu'il faut rapporter à l'importance du projet.
Tout retard dans l'aménagement de cette section, qui a été le théâtre de tant de drames de l'insécurité, outre qu'il s'inscrirait en contrepoint de la grande cause nationale qu'est la sécurité routière en 2003, serait un manquement de l'Etat à la signature qu'il a apposée au bas du contrat de plan.
J'entends, monsieur le secrétaire d'Etat, que sur ce sujet l'on cesse de tergiverser et de ne point vouloir dégager les moyens : il y va de la sécurité routière, il y va de la crédibilité de la signature de l'Etat, et j'avoue que je ne comprendrais pas, s'agissant d'un projet sur lequel tout le monde est d'accord, qu'il ne soit pas pris de décision rapide, alors que le financement manquant s'élève à 300 000 euros.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat au tourisme. Monsieur le sénateur, l'opération de mise en route express de la RN 10 est d'ores et déjà lancée. En effet, les premiers travaux ont été réalisés. Ils ont consisté à modifier l'échangeur de la Droue, ce qui permet d'accueillir dans de meilleures conditions à la fois la route venant de la commune d'Orcemont et la voie de désenclavement latérale du côté ouest.
Malheureusement, à l'automne dernier, un appel d'offres du marché relatif aux terrassements, aux ouvrages d'art et à l'assainissement est resté infructueux, ce qui a empêché que les travaux se poursuivent au même rythme.
Néanmoins, en 2003, de gros efforts seront mis en oeuvre pour continuer ce chantier, et un nouvel appel d'offres sera lancé qui non seulement portera sur les mêmes postes, mais sera élargi aux chaussées. Ce marché concernera l'ensemble du linéaire en section courante et la réalisation de l'échangeur entre la RN 10 et la RD 176. En effet, les mouvements d'échange entre ces deux voies sont actuellement impossibles à ce carrefour, où un pont provisoire a été mis en place pour assurer la sécurité des mouvements directs tant sur la RN 10 que sur la RD 176. La durée prévisible du chantier sera d'environ dix-huit mois à compter de la transmission de l'ordre de service aux entreprises.
M. le président. La parole est à M. Gérard Larcher.
M. Gérard Larcher. Tout d'abord, je vous remercie de m'avoir répondu, monsieur le secrétaire d'Etat.
Je souhaiterais que vous transmettiez à M. de Robien les éléments suivants. D'une part, nous savons qu'un premier appel d'offres a été infructueux et, d'autre part, nous sommes confiants dans l'issue des démarches engagées ; toutefois, je me permets d'attirer l'attention du Gouvernement sur les voies de désenclavement agricole, qui sont la clef du démarrage du chantier. Or, si nous ne sommes pas en mesure, au cours du mois d'août, c'est-à-dire après les récoltes, de procéder aux échanges de terrains et aux aménagements, notamment à la rectification des chemins permettant l'exploitation agricole, eh bien, monsieur le secrétaire d'Etat, nous perdrons encore une année, et le coût pour l'Etat sera beaucoup plus élevé que les 300 000 euros que j'ai évoqués. Il y va de la crédibilité de l'Etat auprès des agriculteurs, qui ont tous donné leur accord - la chose n'est pas si fréquente, en matière de remembrement, pour qu'on ne le souligne point !
Si je me permets d'insister, c'est que nous sommes pris par le temps, car le délai entre l'enquête et la prise de possession des terres est de quatre mois et demi. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous demande donc de bien vouloir transmettre à Gilles de Robien l'inquiétude réelle des élus locaux et des exploitants agricoles de ce secteur.
M. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat. Je le ferai, monsieur le sénateur !
M. Gérard Larcher. Merci, monsieur le secrétaire d'Etat.
ÉVOLUTION DES EFFECTIFS INFIRMIERS
M. le président. La parole est à M. Louis Souvet, auteur de la question n° 126, adressée à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
M. Louis Souvet. Monsieur le ministre, je veux d'abord vous dire ma gratitude, car vous avez pris la peine de vous déplacer pour me répondre.
Le problème que j'évoque est national. A des degrés divers, il nous concerne tous par ses répercussions sur l'offre et la qualité des soins dispensés dans nos hôpitaux. Il influe sur le climat général et sur la santé du personnel soignant. Il intéresse tous les élus siégeant dans les conseils d'administration des hôpitaux, qui sont, en effet, confrontés à la pénurie de personnels infirmiers, à ses conséquences pour les malades, mais aussi au surmenage des personnels.
Nous devons gérer une pénurie chronique qui aboutit parfois à la fermeture de lits, voire, dans des cas malheureusement de plus en plus nombreux, de services entiers. Il convient de prendre conscience de l'ampleur de ce problème, d'en prendre la parfaite mesure et d'y porter remède très rapidement. Les régions frontalières sont, plus que d'autres encore, soumises à ces carences en effectifs du fait de l'attrait salarial lié au différentiel de change ou, tout simplement, à des taux de rémunération plus élevés pour la même fonction. Cela est d'autant plus vrai quand l'hôpital étranger en question forme peu ou ne forme pas d'infirmières et se contente d'attirer celles dont nous assumons les frais de formation pendant trois ans.
Qu'il me soit permis de suggérer, monsieur le ministre, mes chers collègues, quelques pistes de réflexion.
Il convient de fidéliser les personnels en formation avec un système que, un temps, l'éducation nationale avait mis au point avec les IPES, les instituts de préparation aux enseignements de second degré. Ce système permettait de salarier les étudiants, en contrepartie de quoi ces derniers s'engageaient, en cas de réussite au concours, à exercer comme enseignants pendant une durée contractuelle et étaient tenus, s'ils ne respectaient pas leur engagement, de rembourser le coût des études.
Le procédé aurait un premier avantage : il permettrait à des jeunes, issus de familles modestes, de faire des études utiles, c'est-à-dire débouchant sur des emplois véritables qui font cruellement défaut à la nation. La rémunération qui leur serait versée libérerait le budget familial du coût des études, en même temps que des frais d'internat ou de voyage, car les IFSI, les instituts de formation en soins infirmiers, en général proches des villes ou des hôpitaux, sont bien répartis.
La ville dont je suis le maire a mis au point une bourse pour soutenir les projets présentés par les jeunes créateurs. Deux jeunes filles de quartiers difficiles ont par ailleurs postulé pour faire des études d'infirmières, études que nous avons prises en charge financièrement. Dans les deux cas, ce fut un succès : ces deux jeunes filles n'auraient pu accéder à cet emploi sans l'aide de la ville, et l'hôpital se félicite de leur recrutement.
L'ampleur du problème dépasse cependant la compétence et les possibilités financières de nos villes.
A ce stade de mon propos, je souhaite, monsieur le ministre, signaler ce que je considère comme une incohérence de notre système.
Si nous manquons cruellement d'infirmières, nous sommes, au même titre, dépourvus de personnel soignant, personnel dont l'activité n'est pas moins utile au fonctionnement de nos hôpitaux, mais nous ne faisons rien pour encourager les vocations.
La formation des infirmières est gratuite et dure trois ans. Celle des aides-soignantes, qui ne dure qu'une année, coûte, elle, 3 516 euros ! Je n'ai pas besoin d'aller plus avant pour me faire comprendre, d'autant que les aides-soignantes sont souvent issues d'un milieu moins favorisé que les infirmières. Pourquoi ? Parce que les unes, même à quarante-cinq ans, ont le statut d'étudiante, alors que les autres ne l'ont pas. Je trouve cela très injuste !
Le problème que j'évoque est très grave. A terme, si rien n'est fait pour inverser la tendance, c'est le fonctionnement global des centres hospitaliers qui sera affecté, avec des fermetures de lits voire de services entiers à la clé, et les blocs opératoires pourront subir le même sort si la tension sur le marché du travail subsiste.
Pourquoi nier que, depuis l'apparition des 35 heures, c'est déjà le cas dans notre hôpital de Belfort-Montbéliard ? Dans certains services, le personnel infirmier ne récupère pas les heures supplémentaires et les congés légaux restent en partie à prendre parce que l'hôpital ne peut assurer les remplacements.
En amont, des campagnes de promotion devront être lancées par les pouvoirs publics afin de susciter des vocations pour ce métier, ô combien difficile, mais valorisant par le service qui est rendu chaque jour à tous les patients, tant en ville qu'en secteur hospitalier. Pourraient être à cette occasion mis en valeur le goût des responsabilités, les contacts avec les patients mais également la diversité des interventions, l'évolution des techniques et la beauté du geste. Qu'y a-t-il de plus noble, en effet, que de soigner son prochain, d'apaiser sa douleur physique ?
Je connais, et je salue, monsieur le ministre, les objectifs qui sont les vôtres, à savoir, notamment, le développement d'une véritable culture de la prévention, l'excellence des soins à l'hôpital et en ville.
Dès cette année, un train de mesures est prévu pour atteindre ces objectifs, train de mesures panachant actions de soutien et mesures d'économie.
Mon intervention, monsieur le ministre, s'inscrit davantage dans la logique des actions de soutien, mais je suis persuadé qu'à terme les moyens développés à l'échelon des personnels infirmiers engendreront des économies, via une réponse mieux adaptée aux besoins de la population.
Monsieur le ministre, je vous remercie par avance de m'apporter, ainsi qu'à tous mes collègues, puisque chacun de nous est confronté à des problèmes identiques, une réponse concrète tout autant que pratique.
J'ajoute, monsieur le ministre, que la Franche-Comté souffre cruellement de l'absence d'un directeur à la tête de l'agence régionale de l'hospitalisation. Bien évidemment, un cadre qualifié assure l'intérim, et ses qualités ne sont pas mises en cause, mais il convient de clarifier rapidement sa situation dans l'intérêt des hôpitaux de Franche-Comté, et notamment de celui dont je préside le conseil d'administration.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Monsieur le sénateur, vous abordez un des dossiers difficiles que le ministère de la santé doit traiter.
En effet, la démographie des personnels soignants, en particulier celle des infirmières, est d'ores et déjà déficitaire. De surcroît, les décisions prises aujourd'hui n'auront d'effet qu'au terme du délai de formation, soit trente mois pour les infirmières.
C'est pourquoi j'ai choisi de diversifier les actions en ce domaine.
Premièrement, le déficit déjà ressenti sera limité par le biais de l'assouplissement des modalités de mise en oeuvre des 35 heures, à travers la bonification du compte épargne-temps ou le paiement partiel des jours non pris et non épargnés.
Deuxièmement, afin d'inciter à la reprise d'emploi, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 prévoit la possibilité du cumul d'une pension et d'un salaire d'activité. Nous travaillons actuellement au décret d'application de l'article qui permettra d'inciter les jeunes retraités à reprendre un emploi.
Troisièmement, nous poursuivrons notre politique d'intégration des infirmières européennes. Depuis l'an dernier, le ministère conduit ainsi une politique d'intégration d'infirmières originaires de l'Union européenne, en collaboration avec les fédérations d'établissements, à savoir la Fédération hospitalière de France, la FHF, la fonction hospitalière publique, la FHP, la Fédération des établissements hospitaliers de l'assistance publique, la FEHAP, et la Fédération nationale des centres de lutte contre le cancer, la FNCLCC.
Quatrièmement, nous nous attachons à accélérer la mise en oeuvre de la validation des acquis et à conforter la promotion professionnelle. Ces deux actions visent à faciliter l'accès à la profession infirmière de professionnelles aguerries, mais aussi à raccourcir la durée des études en reconnaissant comme validée une partie du parcours de formation.
Cinquièmement, les quotas infirmiers sont relevés. Le relèvement des quotas à l'entrée des écoles d'infirmières est une nécessité. Ses effets n'interviendront cependant que dans trois ans. Ainsi, l'augmentation du quota décidée en 2000 se concrétisera cette année seulement. Dès l'an prochain, le nombre des étudiants sera porté à 30 000 environ. Nous étudions en ce moment à la fois la répartition géographique et les conséquences financières de cette augmentation, afin d'attribuer aux instituts de formation les moyens adaptés.
Enfin, monsieur le sénateur, vous évoquez la fuite des infirmières vers d'autres pays européens - la Suisse dans le cas de votre département - où les rémunérations sont plus élevées. La réponse à ce problème est complexe : la libre circulation des biens et des personnes au sein de l'espace européen devra s'accompagner d'une réflexion sur une adaptation de notre réglementation nationale, et c'est avec raison que vous évoquez la possibilité d'un contrat d'engagement à servir ou d'un rachat de contrat lorsqu'une aide aura été accordée au cours des études de manière à limiter les effets que vous dénoncez.
Enfin, j'entends vous rassurer : le directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation de Franche-Comté sera nommé lors d'un tout prochain conseil des ministres.
M. le président. La parole est à M. Louis Souvet.
M. Louis Souvet. Monsieur le ministre, les Francs-Comtois seront sensibles à l'excellente nouvelle que vous nous annoncez : nous aurons bientôt, nous aussi, un directeur de l'ARH, et j'en suis très satisfait.
Je formulerai trois observations et je reviendrai sur une question à laquelle vous n'avez pas répondu.
S'agissant de la mise en oeuvre des 35 heures, vous autorisez, et c'est fort bien, le paiement partiel des jours de congé non pris, mais la fatigue, mais l'énervement, mais la qualité des soins, tout cela disparaît ! Vous le savez bien, ce n'est pas en mettant de l'argent sur la table - même si, bien sûr, personne ne le refuse - que nous traiterons le problème !
Quant à la libre circulation des personnes et des biens, si la Suisse est en Europe, elle ne fait pas partie de l'Union européenne, ce qui rend le problème beaucoup plus difficile dans mon département qu'ailleurs.
Pour ce qui est de l'intégration d'infirmières européennes, un essai a déjà été réalisé et je crois, monsieur le ministre, que l'on peut parler de complet ratage. Je ne sais pas si nous arriverons un jour à un résultat, mais, en tout cas, les Espagnoles que nous avions fait venir à Nancy sont vite reparties chez elles ! Vous avez peut-être, comme moi, vu des reportages, et nous avons tous eu des contacts avec les nombreux responsables de l'expérience : force est de constater que ce fut un échec !
Enfin, je tiens beaucoup à savoir, et vous me pardonnerez d'insister, pourquoi les études d'auxiliaires de soins sont payantes alors que les études d'infirmières sont gratuites. C'est une anomalie.
Les auxiliaires de soins sont, elles aussi, indispensables. De surcroît, elles sont généralement issues de milieux plus défavorisés que les infirmières, et il est d'autant plus anormal qu'elles soient obligées de payer leurs études. Nous devons tous nous attacher à remédier à cette injustice que je vous serais reconnaissant, monsieur le ministre, de prendre en considération.
APPLICATION DE L'ARTICLE 55 DE LA LOI SRU
M. le président. La parole est à M. Dominique Leclerc, auteur de la question n° 125, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
M. Dominique Leclerc. Je souhaite attirer votre attention, monsieur le secrétaire d'Etat, sur les difficultés rencontrées par la commune dont je suis maire pour respecter les obligations imposées par la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains en matière de logements sociaux, difficultés que connaissent vraisemblablement nombre de communes.
Située en bord de Loire, plus exactement en contrebas d'une levée de la Loire, et à proximité de la gare de triage et des zones d'activités de Saint-Pierre-des-Corps, ma commune, la Ville-aux-Dames - je ne résiste pas au plaisir de la nommer -, est confrontée à trois types de risques majeurs.
D'abord, l'ensemble de son territoire a été classé en zone d'aléas fort et moyen au regard du risque d'inondation selon le plan de prévention des risques qui a été mis en place au cours des dernières années. Depuis 2001 notamment, de nombreux espaces, réservés à titre de zones d'expansion en cas de fortes crues, sont devenus inconstructibles.
Ensuite, les zones d'activités à proximité accueillent des entreprises comme Primagaz et différents dépôts pétroliers qui viennent tous d'être répertoriés en sites Seveso II par la préfecture. En conséquence, les périmètres de danger, qui sont synonymes d'interdiction de construire tout bâtiment qui entraînerait une aggravation du risque, ont été doublés.
Enfin, aux risques d'inondation et aux risques technologiques s'ajoute un troisième type de risques liés, eux, au transport de matières dangereuses à partir de la gare de triage de Saint-Pierre-des-Corps.
Du fait de l'existence de ces trois risques majeurs, ma commune est dans l'impossibilité de construire de nouveaux logements, qu'ils soient ou non sociaux, et ce n'est pas le projet de loi relatif à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages que nous allons étudier dans les heures qui viennent qui apportera des solutions à nos problèmes !
Quoi qu'il en soit, les pénalités prévues par la loi SRU en cas de non-respect de l'obligation d'atteindre le seuil de 20 % de logements sociaux nous sont appliquées de façon impitoyable, aucune disposition n'ayant été prévue afin de prendre en compte les réalités du terrain et les contraintes spécifiques de chaque commune.
C'est pourquoi, monsieur le secrétaire d'Etat, je me réjouis que le Gouvernement ait accepté, en novembre dernier, de débattre d'une proposition de loi émanant de nos rangs qui devrait, dans plusieurs cas, apporter des réponses efficaces et rapides.
Cependant, cette proposition n'est pas encore définitivement adoptée, et, dans cette attente, je me permets de plaider en faveur de ma commune, qui, cette année, sera à nouveau pénalisée financièrement, ce qui lui est très préjudiciable, faute de pouvoir atteindre le quota, dogmatiquement figé à 20 % par la loi SRU, de logements sociaux.
Actuellement, nous sommes à 6 % de ce seuil. Nous sommes dans l'incapacité physique d'aller au-delà. Le projet de développement de la commune a d'ailleurs dû être révisé dans son ensemble. Nous n'en sommes pas moins soumis à une pénalité.
C'est une conséquence du dogmatisme ridicule qui a présidé à la fixation de l'implacable seuil des 20 %, et, si comme l'immense majorité des maires je suis favorable à la mixité sociale et à la répartition équilibrée sur l'ensemble du territoire du logement social, je vous demande, monsieur le secrétaire d'Etat, de bien vouloir prendre en compte dans l'application de la loi la situation particulière de certaines communes, dont la mienne.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat au tourisme. Monsieur le sénateur, M. de Robien l'a déjà dit et répété au nom du Gouvernement l'objectif de diversité sociale et de répartition équilibrée de l'habitat locatif sur le territoire doit être maintenu. C'est, en effet, l'un des socles de la solidarité nationale. Mais nous sommes convaincus qu'en donnant notre confiance aux maires nous parviendrons beaucoup mieux que ne l'a fait la précédente majorité, avec son système de coercition et de sanction a priori, à atteindre cet objectif.
Le précédent gouvernement imposait 21 000 logements locatifs sociaux selon une règle uniforme et donc inapplicable. Nous, nous nous fixons l'objectif, partagé avec les élus, d'au moins 24 000 logements.
Monsieur le sénateur, vous avez raison, les communes de notre pays sont diverses, les possibilités de construire ou de réaliser des logements sociaux varient d'un territoire à un autre. Il faut en tenir compte. Il faut tenir compte de la réalité du terrain et des contraintes qui touchent les communes.
Il ne faut pas espérer leur imposer l'impossible. Ce serait du pur dogmatisme, comme vous venez de le dire.
Il faut que, dans le cadre d'une vraie relation de confiance, les communes prennent des engagements de production de logement social conformes à leur capacité. C'est ainsi qu'on bâtira une vraie diversité sociale dans les faits. Jeter l'anathème sur telle ou telle commune ne sert à rien !
Quant à la situation de votre propre commune, qui est une situation intermédiaire, je n'ai pas de réponse immédiate à vous apporter, mais soyez certain que je transmettrai vos préoccupations à M. Gilles de Robien.
M. le président. La parole est à M. Dominique Leclerc.
M. Dominique Leclerc. Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai bien compris votre réponse, et, cet objectif de mixité sociale et de répartition plus souple du logement social sur le territoire, nous le partageons tous. Je ne peux cependant admettre que ma commune doive subir des pénalités financières, alors qu'elle n'a que très peu de terrains constructibles, ce qui devrait d'ailleurs nous amener à trouver des solutions dans le cadre plus large, et, dirais-je, plus intelligent, de l'intercommunalité.
A l'échelle d'une petite commune, les pénalités sont très lourdes, voire insupportables. Je vous demande donc, monsieur le secrétaire d'Etat, de bien vouloir demander à M. de Robien de donner des consignes aux préfets pour que la situation très particulière de certaines communes, dont la mienne, soit prise en compte, afin de régler, dans un premier temps, l'aspect financier de la question.
Dans un deuxième temps, la construction de logements sociaux supplémentaires devra être envisagée, dans un cadre dépassant les limites communales.
RÉALISATION DU CONTRAT DE PLAN
ÉTAT-RÉGION 2002-2006 EN HAUTE-GARONNE
M. le président. La parole est à M. Gérard Roujas, auteur de la question n° 119, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
M. Gérard Roujas. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, j'ai déjà eu l'occasion d'évoquer ici le retard considérable pris par la région Midi-Pyrénées par rapport à Paris et sa région en matière d'équipements et, notamment, d'équipements routiers.
Le gouvernement de Lionel Jospin avait pris conscience de ce retard et, pour une fois, le volet routier du contrat de plan Etat-région 2000-2006 tendait à le rattraper.
Hélas ! notre optimisme a été refroidi en 2002 avec l'annonce par l'actuel gouvernement d'un gel des crédits de ce contrat de plan à hauteur de 20 %, gel reconduit en 2003.
Par ailleurs, tout porte à croire que les inévitables surcoûts des opérations concernées ne seront pas pris en charge par l'Etat.
Concernant le volet routier haut-garonnais, je voudrais rappeler qu'il ne s'agit nullement d'opérations de luxe, mais bien d'opérations urgentes et indispensables dans un département en pleine expansion démographique.
Je pense en particulier à la déviation de Léguevin, mais également à celles de Saint-Béat et de Fos, dont l'intérêt est majeur dans le cadre des échanges transfrontaliers avec l'Espagne.
Je pense également à la restructuration de la zone du Palays et à la mise en deux fois deux voies de la RN 20, enjeu primordial si l'on ne veut pas aboutir à l'asphyxie de l'agglomération toulousaine.
Monsieur le secrétaire d'Etat, j'attends de vous que vous confirmiez les engagements de l'Etat sur le volet routier, notamment en ce qui concerne la prise en charge des surcoûts, et sa volonté de tout mettre en oeuvre pour que les départements du sud de la France et la région Midi-Pyrénées ne soient pas les éternels oubliés en matière d'infrastructures.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat au tourisme. Monsieur le sénateur, il n'est pas dans l'intention de l'Etat de ne pas respecter les engagements pris lors de la signature en 2000 du contrat de plan entre l'Etat et la région Midi-Pyrénées concernant votre département et s'agissant, notamment, des opérations que vous venez de citer.
Il est vrai qu'à la fin de cette année le Gouvernement a été conduit à mettre en réserve une partie des crédits votés. Mais il ne s'agit là que d'une mesure destinée à contenir le déficit de l'Etat, directement liée au fait que les recettes de l'Etat n'ont pas été à la hauteur des prévisions annoncées lors du vote de la loi de finances pour 2002.
J'attire d'ailleurs votre attention sur le fait que la Haute-Garonne n'a pas été touchée par cette mise en réserve.
Enfin, les mandats de négociation que le Gouvernement a confiés aux préfets de région à l'issue du comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire du 13 décembre 2002 confirment l'engagement financier de l'Etat à la hauteur des montants qui ont été contractualisés en 2000.
M. le président. La parole est à M. Gérard Roujas.
M. Gérard Roujas. Monsieur le secrétaire d'Etat, vos propos ne m'ont pas convaincu. Si, comme vous venez de l'indiquer, les recettes de l'Etat n'ont pas été en 2002 celles que l'on espérait, je reste persuadé qu'il en ira de même en 2003.
Par conséquent, les travaux prévus ne pourront être réalisés et, encore une fois, la région Midi-Pyrénées subira un retard par rapport à d'autres régions françaises.
PROCÉDURE DE RÉORGANISATION - PARTAGE
DES SERVICES DE LA DDE DES HAUTES-PYRÉNÉES
M. le président. La parole est à M. François Fortassin, auteur de la question n° 104, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
M. François Fortassin. Monsieur le secrétaire d'Etat, le conseil général des Hautes-Pyrénées, dont j'assure la présidence, a engagé, à l'instar de nombreux autres exécutifs départementaux, une procédure de « réorganisation-partage » des services de la direction départementale de l'équipement, en application de l'article 7 de la loi du 2 décembre 1992.
L'avenant de 2002 à la convention relative à la mise à disposition du département des services déconcentrés du ministère de l'équipement détermine l'effectif des personnels chargés exclusivement de l'exercice des compétences départementales. En l'occurrence, cet effectif est de 273 agents.
Dans le cadre de la réorganisation, l'Etat nous demande de lui attribuer onze postes supplémentaires et souhaite disposer de onze cadres B techniques sur dix-neuf, considérant que les services départementaux seront des services d'exécution et non de conception. M. le préfet des Hautes-Pyrénées justifie l'attribution de trois de ces postes par le foisonnement qui résultera du partage des services, ce que nous ne contestons pas.
Les raisons conduisant l'Etat à exiger les huit autres postes sont moins évidentes, d'autant que cette demande aboutit à doter certaines subdivisions sur le territoire desquelles il n'existe pas un seul kilomètre de route nationale d'effectifs supérieurs à ceux qui étaient constatés antérieurement lorsque ces entités assumaient à la fois les missions de l'Etat et les missions départementales. Il s'agit d'une situation presque ubuesque !
L'argument du représentant de l'Etat selon lequel la convention signée chaque année avec le conseil général n'a qu'un caractère indicatif est peut-être fondé en droit, mais insuffisant aux yeux de l'ensemble des élus du conseil général.
Avec une générosité qui l'honore et après de longues négociations, M. le préfet des Hautes-Pyrénées consent aujourd'hui à ne demander que neuf agents supplémentaires ! C'est une proposition que, bien sûr, la collectivité territoriale que je préside ne saurait accepter.
Cette situation me conduit, monsieur le secrétaire d'Etat, à vous poser les questions suivantes.
Face à une attitude de blocage comme celle que nous constatons, comment obtenir un arbitrage impartial, sachant que la commission de conciliation prévue à l'article 9-1 de la loi de 1992 n'existe plus ?
Dans le cadre des expérimentations et des transferts de compétences que le Gouvernement envisage de mettre en oeuvre dans la phase nouvelle de décentralisation qu'il a décidée, quels dispositifs compte-t-on instaurer pour garantir aux collectivités des transferts de moyens correspondant réellement aux missions qui leur sont confiées ?
De plus, les processus de « réorganisation-partage » engagés ont-ils encore une raison d'être ? Les projets de loi que le Gouvernement prépare ne les rendent-ils pas caducs ? L'affectation aux collectivités territoriales de tout ou partie des routes nationales s'accompagnera-t-elle du transfert du personnel et de l'ouverture pour celui-ci du droit d'option, comme cela s'est déjà pratiqué pour la quasi-totalité des autres domaines transférés en 1982 ?
Je souhaite, pour ma part, que le ministère joue un rôle d'arbitre tout à fait impartial dans cette affaire. Nous acceptons bien évidemment par avance cet arbitrage, qui doit relever non pas d'une quelconque commission du ministère de l'équipement, mais du ministre lui-même.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat au tourisme. Monsieur le sénateur, la loi n° 92-1255 du 2 décembre 1992 définit les conditions de mise à la disposition des départements des services déconcentrés du ministère de l'équipement.
Elle prévoit, pour les départements qui le souhaitent, une procédure de réorganisation des directions départementales de l'équipement visant à identifier et à placer directement sous l'autorité fonctionnelle du président du conseil général des parties de services remplissant à titre exclusif des missions pour le compte de la collectivité départementale.
Cette procédure, dite parfois de « réorganisation-partage », n'a été mise en oeuvre que dans un tiers des départements.
Elle conserve aujourd'hui tout son intérêt. En effet, le cadre qu'elle impose apporte toutes les garanties de transparence et de concertation à l'égard tant des communes, obligatoirement consultées et qui peuvent s'assurer du maintien de l'accès à un service technique d'Etat de proximité, que des personnels, appelés à se prononcer au sein des instances paritaires. Elle permet, par ailleurs, que l'Etat dispose des moyens nécessaires à l'exercice de ses compétences au travers de la nouvelle organisation demandée par le département. C'est à ce titre que certains moyens, notamment en termes de personnels, doivent rester sous l'autorité de l'Etat.
Monsieur le sénateur, les perspectives tracées par le Gouvernement en matière de décentralisation ne devraient pas remettre en cause cette procédure. Elles devraient cependant permettre, à terme, un réel transfert, tout en préservant l'ensemble des droits des agents, notamment en ouvrant à ces derniers la possibilité d'opter pour l'une ou l'autre des fonctions publiques.
M. le président. La parole est à M. François Fortassin.
M. François Fortassin. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie des éléments de réponse que vous venez de m'apporter.
Toutefois, dans la mesure où, à l'avenir, les routes nationales relèveront probablement des conseils généraux, il me semble souhaitable que les futures lois de décentralisation renforcent encore la procédure que vous avez évoquée. Le statu quo ne suffit pas !
Par ailleurs, j'insiste sur la nécessité d'un arbitrage impartial. Certes, il est évident que, dans tous les départements, les relations entre le président du conseil général et le préfet sont excellentes ; mais il est non moins évident que l'excellence a parfois des degrés ! (Sourires.) Devant une situation de blocage, il est normal que, en tant que président de l'exécutif départemental, j'en appelle à l'arbitrage ministériel.
RÉFORME DE LA FISCALITÉ LOCALE
M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, auteur de la question n° 127, adressée à M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
Mme Valérie Létard. Le 3 décembre dernier, lors du débat sur les crédits de la décentralisation, le Gouvernement a reconnu l'insuffisance de la péréquation actuelle dans l'architecture des dotations de l'Etat aux collectivités locales. Comme cela a alors été rappelé, les trois quarts des communes de plus de 10 000 habitants bénéficient de la dotation de solidarité urbaine, la DSU. « Quel sens a encore la péréquation, disait M. le ministre, si la quasi-totalité des communes de notre pays sont jugées défavorisées à un titre ou un autre ? L'égalité "à la française" consiste à considérer que tout le monde est dans une situation inégalitaire, et dès lors, bien sûr, tout le monde doit faire l'objet de compensations... La réponse à cette remise en ordre n'est pas évidente mais elle est indispensable. » La péréquation constitue d'ailleurs l'une des trois composantes de la réforme des finances locales annoncée par le Gouvernement pour 2003.
La DSU a été créée initialement pour « contribuer à l'amélioration des conditions de vie dans les communes urbaines confrontées à une insuffisance de leurs ressources et supportant des charges élevées ». Il est urgent, me semble-t-il, de revenir à cet objectif premier. L'octroi de la DSU doit être rendu plus sélectif si l'on veut qu'il puisse être atteint.
Nous observons en effet que certaines communes membres d'une communauté d'agglomération ou d'une communauté de communes, parce qu'elles ne répondent pas aux critères de seuil de population, sont exclues du bénéfice de la DSU alors qu'elles sont confrontées aux mêmes problématiques urbaines que leurs voisines plus peuplées. Il y a là une incohérence au regard du développement de la rurbanité.
Dans mon département, des communes pauvres, éligibles aux grands projets de ville, n'ont pas accès à la DSU en raison de leur taille. Ces communes, dont le potentiel fiscal est faible, ne parviennent pas, faute de fonds propres, à mobiliser le préfinancement et la part communale incompressible qui sont nécessaires pour bénéficier des crédits alloués à la politique de la ville. Cette difficulté est similaire à celle que j'avais déjà exposée ici même s'agissant de l'utilisation des fonds structurels européens.
Ma question sera simple, monsieur le ministre : pouvez-vous, d'une part, m'assurer que la réforme en cours prendra réellement en compte la nécessité de garantir une véritable péréquation en faveur des communes les plus pauvres, qu'elles soient grandes, moyennes ou petites, afin qu'elles puissent disposer des fonds propres qui leur permettront de mobiliser des crédits auxquels elles finissent aujourd'hui souvent par renoncer, et, d'autre part, m'indiquer à quelle date cette réforme serait susceptible d'aboutir ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales. Madame la sénatrice, votre question est tout à fait judicieuse.
Prochainement, si le Congrès en décide ainsi, la péréquation deviendra un objectif à valeur constitutionnelle. Les lois portant sur ce thème seront donc soumises au contrôle du Conseil constitutionnel et nous serons dans l'obligation de respecter le principe de péréquation, qui pour l'heure n'est pas mis en oeuvre de façon efficace, j'en conviens volontiers.
La réforme des dotations de l'Etat aux collectivités locales est un chantier très important. Cette réforme, qui sera engagée cette année, devra prendre en compte plusieurs objectifs, mais aussi plusieurs contraintes.
S'agissant des objectifs, il paraît en premier lieu nécessaire de simplifier de manière drastique le dispositif actuel des dotations, dont les enchevêtrements et la complexité sont sources de confusion, de manque de lisibilité et de prévisibilité pour les élus locaux. L'opacité est telle que l'objectif démocratique n'est pas atteint : bien peu d'élus comprennent l'architecture de ce dispositif.
En second lieu, conformément à l'objet du projet de loi constitutionnelle, la réforme des dotations devra viser à renforcer significativement la place et l'efficacité des dispositifs de péréquation, de manière à assurer une répartition plus équitable des ressources entre les collectivités locales, ce qui, pour l'heure, vous l'avez dit, madame la sénatrice, n'est pas toujours le cas.
En ce qui concerne ce second volet, plusieurs axes d'amélioration sont envisageables et pourraient être explorés à échéance rapprochée.
Il paraît ainsi possible d'accroître les volumes financiers consacrés à la péréquation, en profitant notamment de l'effet de masse que permettra le regroupement, au sein de la dotation globale de fonctionnement, de plusieurs dotations actuellement autonomes. A ce titre, le basculement, d'ores et déjà prévu, de la compensation de la suppression de la part salaires de la taxe professionnelle vers la DGF, qui fera passer le montant de celle-ci de quelque 20 milliards d'euros à 30 milliards d'euros, fera bénéficier la péréquation des gains tirés de l'indexation annuelle d'une masse financière particulièrement importante.
Un autre axe de renforcement de la péréquation consisterait à améliorer les critères et les formules de répartition des dotations de péréquation, diverses possibilités étant actuellement à l'étude pour parvenir à mieux assurer la pertinence de l'utilisation de ces crédits.
La mise en oeuvre de l'ensemble de ces mesures suppose toutefois un consensus, car les enjeux financiers d'une telle réforme sont évidemment très importants, et les conservatismes sont très puissants, hélas !
A cet égard, le Gouvernement entend nouer avec les élus locaux une concertation étroite avant d'arrêter ses propositions en matière de réforme des dotations. Le comité des finances locales est bien sûr appelé à jouer un rôle majeur dans ce processus. Il pourrait constituer en son sein un groupe de travail sur cette question, comme vient de l'annoncer voilà quelques jours M. le Premier ministre.
Quoi qu'il en soit, madame Létard, il est bien évident que le système de péréquation doit être réformé dans les meilleurs délais, car il est actuellement très inégalitaire.
M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard.
Mme Valérie Létard. Monsieur le ministre délégué, je tiens tout d'abord à saluer l'effort consenti par le Gouvernement pour essayer de mettre en oeuvre une véritable péréquation, non seulement, vous l'avez souligné, en augmentant le volume financier qui sera affecté à celle-ci, mais aussi en modifiant les critères de répartition.
J'aimerais, à cet instant, évoquer la situation de quelques arrondissements du département du Nord, afin d'alimenter la réflexion sur le problème de la politique de la ville.
Dans le Valenciennois, par exemple, dix des vingt-sept communes éligibles au contrat de ville ne bénéficient pas de la DSU ; il en va de même pour six des dix-sept communes concernées par le contrat de ville du Douaisis, et pour six des treize communes adhérentes au contrat de ville Sambre-Avesnois.
Un nombre important de communes de moins de 10 000 habitants ne bénéficient donc pas de dotations de péréquation et rencontrent, par voie de conséquence, de très grandes difficultés pour mobiliser les crédits de la politique de la ville, qui ne sont affectés que pour une durée déterminée.
De la même manière, les problèmes liés à l'octroi des fonds structurels européens représentent un véritable drame pour ma région : si nous sommes aujourd'hui éligibles à l'objectif 1, c'est précisément en raison de la faiblesse de notre potentiel fiscal et des obstacles avérés auxquels nous nous heurtons pour relancer notre économie. La mobilisation de ces fonds structurels se révèle extrêmement complexe et ardue, le taux de consommation de l'enveloppe n'étant que de quelque 20 %. La première règle de dégagement d'office s'appliquera à la fin de 2003, et il est donc urgent de pratiquer une péréquation substantielle au profit des territoires concernés, qui pourront alors utiliser les crédits exceptionnels aujourd'hui à leur disposition et faire jouer l'effet de levier.
Mme Valérie Létard. Monsieur le ministre délégué, je tiens tout d'abord à saluer l'effort consenti par le Gouvernement pour essayer de mettre en oeuvre une véritable péréquation, non seulement, vous l'avez souligné, en augmentant le volume financier qui sera affecté à celle-ci, mais aussi en modifiant ls critères de répartition.
J'aimerais, à cet instant, évoquer la situation de quelques arrondissements du département du Nord, afin d'alimenter la réflexion sur le problème de la politique de la ville.
Dans le Valenciennois, par exemple, dix des vingt-sept communes éligibles au contrat de ville ne bénéficient par de la DSU ; il en va de même pour six des dix-sept communes concernés par le contrat de ville du Douaisis, et pour dix des treize communes adhérentes au contrat de ville Sambre-Avesnois.
Un nombre important de communes de moins de 10 000 habitants ne bénéficient donc pas des dotations de péréquation et rencontrent, par voie de conséquence, de très grandes difficultés pour mobiliser les crédits de la politique de la ville, qui ne sont affectés que pour une durée déterminée.
De la même manière, les problèmes liés à l'octroi des fonds structurels européens représentent un véritable drame pour la région : si nous sommes aujourd'hui éligibles à l'objectif 1, précisément en raison de la faiblesse de notre potentiel fiscal et des obstacles avérés auxquels nous nous heurtons pour relancer notre économie. La mobilisation de ces fonds structurels se révèle extrêmement complexe et ardue, le taux de consommation n'étant que de quelque 20 %. La première règle de dégagement d'office s'appliquera à la fin de 2003, et il est donc urgent de pratiquer une péréquation substantielle au profit des territoires concernés, qui pourront alors attirer les crédits exceptionnels aujourd'hui à leur disposition et faire jouer un effet de levier.
CONDITIONS DE REPRÉSENTATION
M. le président. La parole est à M. Francis Grignon, en remplacement de M. Philippe Richert, auteur de la question n° 112, adressée à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
M. Francis Grignon. M. Philippe Richert, retenu dans son département, m'a demandé de le remplacer ce matin.
La question qu'il souhaitait poser a trait à l'application de l'article L. 228 du code électoral s'agissant des communes associées.
Dans l'état actuel des textes, un électeur de la commune centre peut se présenter aux élections municipales dans la commune associée, être inscrit dans la section électorale correspondante, voire devenir maire délégué de cette commune associée, sans être propriétaire ni locataire d'un logement sis dans cette dernière au 1er janvier de l'année des élections.
A l'occasion de l'examen, ce printemps, des différents projets de loi tendant à modifier la loi électorale, serait-il possible d'inscrire une disposition prévoyant, en vue d'une meilleure représentation et d'un plus grand respect de la spécificité des communes associées, que l'on ne puisse être électeur, conseiller municipal ou maire délégué d'une telle commune que si l'on remplit les conditions de résidence figurant à l'article L. 228 du code électoral ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales. Monsieur le sénateur, votre question porte sur la possibilité offerte par la législation en vigueur d'élire au conseil municipal, dans une commune associée, une personne qui n'est pas électeur ou inscrite au rôle des contributions directes dans cette commune associée. Vous souhaitez que l'éligibilité soit restreinte dans ce cas de figure.
La représentation propre de la commune associée est déjà assurée par un conseil consultatif dans les communes issues d'une fusion regroupant plus de 100 000 habitants, et éventuellement par une commission consultative dans les communes issues d'une fusion regroupant une population inférieure ou égale à 100 000 habitants. C'est l'éligibilité à ces instances, et non au conseil municipal, qui est limitée aux personnes domiciliées ou inscrites au rôle des contributions directes dans cette commune associée.
Une évolution du statut des communes associées ne peut trouver sa place que dans le cadre de l'intercommunalité. Or, comme vous le savez, monsieur le sénateur, le Gouvernement a l'intention de réviser dès cette année la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, et c'est à cette occasion, me semble-t-il, qu'une telle évolution pourra être envisagée.
M. le président. La parole est à M. Francis Grignon.
M. Francis Grignon. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. Dans ma région, des problèmes étaient apparus en 2001, au moment des élections municipales, lorsque des résidants d'une commune centre s'étaient présentés dans les communes associées. Le réexamen de la loi du 12 juillet 1999 nous permettra donc d'aborder cette question.
APPLICATION DE LA LÉGISLATION SUR LA RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL DANS LES PETITES ENTREPRISES
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Desmarescaux, auteur de la question n° 129, adressée à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
Mme Sylvie Desmarescaux. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaiterais ici me faire l'écho du désarroi et de la perplexité des chefs d'entreprise confrontés à la mise en place des dispositions relatives à la réduction et à l'aménagement du temps de travail.
Si la mise en oeuvre de ces dispositions est effective pour la plupart des entreprises de plus de vingt salariés depuis le 1er janvier 2000, les petites structures ont, à défaut de moyens, pu bénéficier d'un laps de temps censé leur permettre d'intégrer ces données et de les adapter à leurs spécificités. Telles sont en tout cas les conditions d'entrée en vigueur de l'aménagement du temps de travail prévu par les lois Aubry.
Le Gouvernement a initié une démarche d'un autre type, plus souple, devant permettre de répondre aux attentes et aux contraintes des entreprises de vingt salariés et moins.
Cet assouplissement salutaire amène cependant plusieurs interrogations.
D'une part, les entreprises ayant adopté une réduction du temps de travail fondée sur la précédente législation se retrouvent aujourd'hui engagées dans un schéma qu'il est difficile de remettre en question. Les différents accords négociés avec les partenaires sociaux apparaissent - vous en conviendrez, madame la ministre - difficilement révisables.
Il en va de même pour d'autres dispositions. Ainsi, comment une entreprise qui a décidé de mettre en application un accord de branche Aubry peut-elle prétendre au bénéfice des nouvelles dispositions ? J'ai pu m'entretenir avec des responsables d'entreprise ayant conclu des accords avec modulation : ils se demandent s'ils peuvent bénéficier de l'augmentation du contingent d'heures supplémentaires.
D'autre part, je souhaite témoigner de la difficulté de compréhension, déjà effective avec les lois Aubry et aujourd'hui renforcée par l'arrivée de nouvelles dispositions. Des mesures d'information et d'accompagnement s'avéreraient judicieuses. En effet, les petites entreprises, par essence moins structurées, ne disposent pas en leur sein des mêmes moyens pour appréhender la complexité de cette législation. Les différences d'interprétation de ces textes entre les services censés être les interlocuteurs de l'entreprise sont, malheureusement, chose courante.
D'une manière plus générale, ne peut-on pas craindre que l'entrée en vigueur de nouvelles dispositions ne soit préjudiciable à l'attractivité des petites entreprises ne s'étant pas, à ce jour, engagées dans la réduction du temps de travail et pour lesquelles la pénurie de main-d'oeuvre est bien souvent une réalité ?
Enfin, une dernière incertitude pèse sur les dispositions transitoires de la loi Aubry relatives à l'imputation partielle des heures de la trente-sixième à la trente-neuvième heure sur le contingent d'heures supplémentaires.
J'aimerais aujourd'hui que vous sortiez ces chefs d'entreprise du flou juridique dans lequel ils se trouvent afin de leur donner les moyens d'exercer sereinement leurs activités.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de M. Fillon, retenu par les négociations sur les retraites qui se déroulent en ce moment même.
Je sais tout l'intérêt que vous portez à la compétitivité et aux conditions d'activité des entreprises. Je puis vous assurer qu'il s'agit, là aussi, d'une préoccupation du Gouvernement.
La loi du 17 janvier a considérablement assoupli la mise en oeuvre des 35 heures, tout particulièrement pour les PME. J'en rappelle les dispositions essentielles : la fixation par la négociation d'un niveau de contingent d'heures supplémentaires déclenchant le repos compensateur ; le relèvement du contingent d'heures supplémentaires ; la majoration des heures supplémentaires à 10 % jusqu'au 31 décembre 2005 ; l'allégement de charges fusionné en un dispositif unique s'appliquant indépendamment de la durée collective du travail. Les PME qui ne sont pas passées aux 35 heures bénéficieront, par conséquent, d'une extension significative de leurs allégements de cotisations.
M. le ministre des affaires sociales a souhaité - et je crois que cela rejoint tout à fait votre voeu - mettre en place plusieurs outils d'information. Une circulaire, qui figurera sur le site Internet du ministère, en précisera prochainement les modalités pratiques d'application, notamment en ce qui concerne l'articulation des dispositions de la loi et de celles des accords collectifs antérieurs que nous avons, bien sûr, souhaité respecter.
Par ailleurs, je vous informe qu'une campagne d'information est également prévue avec la distribution de nombreux dépliants de présentation à destination des PME, ce qui me paraît répondre à votre attente.
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Desmarescaux.
Mme Sylvie Desmarescaux. Madame la ministre, je vous remercie pour cette réponse qui me satisfait et qui, je l'espère, donnera aussi satisfaction aux chefs d'entreprise, surtout au regard de leur manque d'information et de leurs inquiétudes.
AVENIR DES DÉLÉGATIONS ET DES CENTRES
D'INFORMATION AUX DROITS DES FEMMES
M. le président. La parole est à Mme Danièle Pourtaud, auteur de la question n° 122, adressée à Mme la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle.
Mme Danièle Pourtaud. Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur l'avenir des délégations régionales aux droits des femmes et des centres d'information sur les droits des femmes, ou CIDF.
De nombreux centres d'informations sur les droits des femmes et des délégations régionales connaissent des difficultés financières chroniques, voire insurmontables pour certains d'entre eux.
Je prendrai l'exemple du CIDF de Caen, qui était particulièrement dynamique et actif et avait été sélectionné pour mener des actions au niveau européen. Une trésorerie délicate et le retard du règlement de ses prestations par ses créanciers publics - mairie de Caen, fonds européens... - ont conduit le tribunal à le placer en liquidation judiciaire le 6 décembre dernier.
Comme vous le savez, ce problème est chronique pour de nombreux centres, même s'il n'a pas encore atteint la même gravité ailleurs.
Dans votre discours prononcé le 4 juillet dernier à Caen, vous rappeliez que « le Gouvernement est attaché à la politique de dialogue et de proximité, une politique tournée vers l'égalité dans la vie quotidienne et la prise en compte de la spécificité des territoires... ».
Ces paroles louables et les faibles augmentations des budgets des centres prévues par le ministère pour 2003 n'auront pas suffi à sauver ce CIDF, dont vous ne pouviez ignorer la situation, puisqu'il concerne, si je ne m'abuse, votre département.
Pouvez-vous me dire, madame la ministre, ce que vous comptez faire pour la pérennité de cette structure ?
Par ailleurs, les personnels des délégations et des CIDF ont les plus grandes incertitudes sur leur sort dans le cadre de la loi relative à l'organisation décentralisée de la République proposée par le Gouvernement.
Il semblerait que vous envisagiez un désengagement total de l'Etat, la formation et l'égalité professionnelle étant confiées aux conseils régionaux, la contraception et la lutte contre les violences faites aux femmes aux départements, et la vie quotidienne aux municipalités.
Si tel était le cas, madame la ministre, cela s'apparenterait inévitablement au démantèlement complet de la politique en faveur des droits des femmes.
J'ajoute que, d'ores et déjà, la plus grande incertitude règne sur le sort des personnels de ces centres. Certaines déléguées régionales et départementales aux droits des femmes ont ainsi vu leur contrat renouvelé pour un an seulement, alors que ce sont des professionnelles de catégorie A, dont le contrat est renouvelable en principe tous les trois ans.
Pouvez-vous nous dire, madame la ministre, ce qui justifie cette décision, qui s'apparente, selon moi, à une remise en cause du remarquable travail effectué par ces déléguées, dévouées à la cause des femmes et au service de l'Etat ?
Aujourd'hui, les Françaises ont pour première préoccupation l'égalité professionnelle et la lutte contre la précarité des femmes au travail. J'avoue que le signal que vous leur envoyez à travers la remise en cause des déléguées régionales et départementales à de quoi inquiéter nombre d'entre elles !
Je vous remercie donc, madame la ministre, de me dire ce que vous entendez faire pour préserver la politique menée au plus près du terrain par les CIDF et les délégations régionales, et pour éviter la précarité des personnels.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Madame la sénatrice, croyez bien que je suis très sensible à l'intérêt que vous portez aux moyens d'actions de mon ministère et aux modalités d'exercice des missions relatives aux droits des femmes, à l'égalité professionnelle et à la parité.
S'agissant des moyens financiers, vous avez exprimé vos inquiétudes au moment de la discussion du projet de loi de finances pour 2003. Vous connaissez d'ailleurs l'issue positive du vote de ce budget puisque, d'un commun accord, députés et sénateurs ont conclu que la réduction des crédits portait non pas sur les interventions en faveur des droits des femmes, mais sur une autre ligne de budget du travail, de la santé et de la solidarité. Je tiens à remercier les membres de la Haute Assemblée qui ont bien compris l'enjeu des politiques en faveur des droits des femmes et la nécessité de mener une action forte et déterminée en faveur de la parité et de l'égalité.
S'agissant des centres d'information sur les droits des femmes, j'attache une attention particulière à leur fonctionnement. Mais, vous avez raison, madame la sénatrice, nous avons trouvé ces centres dans un état de très grande vétusté financière. Un effort important doit être envisagé, car ils forment, avec le Centre national d'information sur les droits des femmes et des familles, un réseau éminemment précieux, proche du public, et dont la mission est très importante pour l'accueil, l'information et l'orientation des femmes dans les domaines juridique, professionnel, économique, social et familial. Ils sont les partenaires privilégiés de l'Etat et de ses délégués, les chargées de mission départementales aux droits des femmes et à l'égalité, pour la conduite de la politique gouvernementale.
C'est pourquoi un effort budgétaire important - plus de 40 % du budget dont je dispose - est consacré au financement de ce réseau, même si, j'en conviens, des difficultés subsistent encore.
Il convient que les actions de ces centres soient également soutenues par les collectivités locales.
J'en viens aux services déconcentrés de l'Etat, c'est-à-dire les délégations régionales et les chargées de mission départementales aux droits des femmes et à l'égalité. A cet égard, madame la sénatrice, je ne sais pas pourquoi vous avez employé les termes « remise en cause ». Telle n'était nullement mon intention. J'ai voulu au contraire qu'un débat soit ouvert et qu'une réflexion soit engagée à l'occasion de l'évaluation nécessaire de ces services et de l'évolution de la décentralisation, afin de nous interroger sur la façon dont nous pouvons redéfinir ces missions, pour ne pas dire les élargir, et renforcer leurs conditions d'exercice.
En outre, la politique de l'égalité entre les hommes et les femmes doit être consolidée. L'Etat, garant de la cohésion sociale, est porteur de la politique d'égalité, qui représente un enjeu essentiel puisqu'on juge du degré de démocratisation d'une nation à la place qu'elle réserve aux femmes dans la société.
L'approche globale de l'égalité ne peut se transférer ; elle doit se partager.
La mobilisation en faveur de l'égalité doit être étendue aux collectivités territoriales.
Tout d'abord, en matière d'égalité professionnelle, les régions ont un rôle privilégié à jouer, ce qu'elles font d'ailleurs déjà. Vous avez bien voulu citer le département du Calvados. J'évoquerai l'exemplarité de la région Basse-Normandie qui a déjà intégré, dans son contrat de plan, cette dimension de la place et du rôle des femmes.
Par ailleurs, en matière de lutte contre les violences faites aux femmes et l'exclusion dont elles sont victimes, c'est au niveau départemental que les partenariats doivent se renforcer.
Enfin, c'est sur le plan communal et intercommunal, dans une relation de proximité, que nous devons rechercher l'amélioration de l'adéquation des solutions aux problèmes qui se posent. C'est en effet souvent là que les problèmes se présentent avec le plus d'acuité.
Vous le voyez, madame la sénatrice, il n'y a pas de désengagement de l'Etat. Mais il nous faut rechercher un nouvel équilibre des responsabilités entre l'Etat, les collectivités territoriales et les associations, encourager un renforcement des réseaux et des partenariats - j'insiste en effet sur la nécessaire coordination des moyens - afin de permettre des avancées décisives sur la voie de l'égalité.
M. le président. La parole est à Mme Danièle Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Je vous remercie, madame la ministre, de toutes les indications que vous avez bien voulu me communiquer. Je remarque toutefois que vous n'avez pas apporté d'éléments susceptibles de rassurer les personnels du CIDF de Caen et les femmes du département du Calvados.
L'Etat, garant de la cohésion sociale, est porteur de la politique d'égalité entre les hommes et les femmes, avez-vous dit. Je partage totalement votre volonté à cet égard. La « marche des femmes », au départ de Vitry-sur-Seine, nous rappelle d'ailleurs à quel point le chemin est encore long : en effet, dans notre pays, si l'égalité des droits entre hommes et femmes est inscrite dans les textes, elle est loin d'être acquise dans les faits. Nous serons donc très vigilants sur la manière dont l'Etat saura préserver cette égalité sur l'ensemble du territoire, quel que soit l'avenir de la loi relative à l'organisation décentralisée de la République.
Par ailleurs, nous serons également extrêmement attentifs aux conséquences des projets de réforme des modes de scrutin régionaux, européens, voire sénatoriaux, sur l'égal accès des hommes et des femmes aux fonctions électives.
M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures quinze, est reprise à seize heures cinq, sous la présidence de M. Jean-Claude Gaudin.)
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS
M. le président. La conférence des présidents a établi comme suit l'ordre du jour des prochaines séances du Sénat :
Mercredi 5 février 2003 :
Ordre du jour prioritaire
A 15 h 15 et le soir :
Suite du projet de loi relatif à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages (n° 116, 2002-2003).
Jeudi 6 février 2003 :
Ordre du jour prioritaire
A 9 h 30 :
1° Suite du projet de loi relatif à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages.
A 11 h 30 :
2° Projet de loi relatif à la répression de l'activité de mercenaire (n° 287, 2001-2002).
(La conférence des présidents a décidé de fixer au mercredi 5 février 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.)
A 15 heures et le soir :
3° Suite du projet de loi relatif à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages.
Mardi 11 février 2003 :
Ordre du jour réservé
A 10 heures :
1° Conclusions de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi de M. Bernard Joly visant à restreindre la consommation de tabac chez les jeunes (n° 77, 2002-2003).
(La conférence des présidents a décidé de fixer au lundi 10 février 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.)
A 16 heures :
2° Question orale avec débat (n° 10) de M. Jean-Claude Carle à M. le ministre des sports sur la politique du sport.
(En application des premier et deuxième alinéas de l'article 82 du règlement, la conférence des présidents a fixé à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront dans le débat les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 10 février 2003.)
Mercredi 12 février 2003 :
A 15 heures et le soir :
1° Sous réserve de la transmission du texte et de la décision du Sénat, nomination des membres de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi pour l'initiative économique (AN, n° 507 rect.).
(Les candidatures à cette commission spéciale devront être déposées au secrétariat central du service des commissions au plus tard le mardi 11 février 2003, à 17 heures.)
Ordre du jour prioritaire
2° Projet de loi relatif aux entreprises de transport aérien et notamment à la société Air France (n° 108, 2002-2003).
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 11 février 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 11 février 2003.)
Jeudi 13 février 2003 :
A 9 h 30 :
Ordre du jour prioritaire
1° Suite du projet de loi relatif aux entreprises de transport aérien, et notamment à la société Air France.
A 15 heures et le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures.)
Ordre du jour prioritaire
3° Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi pour la sécurité intérieure.
4° Suite de l'ordre du jour du matin.
Le Sénat suspendra ses travaux en séance plénière du dimanche 16 au dimanche 23 février 2003.
Mardi 25 février 2003 :
A 9 h 30 :
1° Dix-huit questions orales (l'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement) :
- n° 117 de M. Bernard Piras à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales (Financement des opérations de gestion des déchets) ;
- n° 120 de Mme Marie-Claude Beaudeau à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire (Situation des agents de la fonction publique ayant été exposés à l'amiante) ;
- n° 123 de M. Jean-Claude Peyronnet à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire (Régime indemnitaire applicable aux agents d'entretien des collectivités territoriales) ;
- n° 130 de M. Jacques Peyrat à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire (Classification des communes et calcul de l'indemnité de résidence des fonctionnaires) ;
- n° 132 de M. Daniel Goulet à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire (Suivi du sommet de la Terre de Johannesburg) ;
- n° 134 de M. Francis Grignon à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité (Professionnalisation des métiers du domicile) ;
- n° 138 de M. Gérard Delfau à Mme la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées (Conditions d'accueil des personnes handicapées dans le département de l'Hérault) ;
- n° 141 de M. René-Pierre Signé à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer (Avenir du transport scolaire) ;
- n° 142 de M. François Marc à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité (Accidents du travail dans le secteur agroalimentaire) ;
- n° 143 de M. Philippe Madrelle à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité (Indemnisation des victimes de l'amiante) ;
- n° 145 de M. Jean-Pierre Demerliat à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire (Prise en charge du traitement et des charges sociales des agents communaux exerçant un mandat syndical) ;
- n° 147 de M. Simon Sutour à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer (Développement du centre météorologique du mont Aigoual) ;
- n° 148 de M. Bernard Dussaut à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales (Prorogation d'une communauté de communes en Gironde) ;
- n° 153 de Mme Danielle Bidard-Reydet à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche (Avenir de l'entreprise Aventis) ;
- n° 154 de M. Alain Gournac à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire (Prévention de l'échec scolaire des enfants précoces) ;
- n° 157 de M. Thierry Foucaud à M. le ministre délégué au commerce extérieur (Négociations de l'accord général sur le commerce et les services) ;
- n° 158 de M. Adrien Gouteyron à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales (Plan de maîtrise de pollutions agricoles) ;
- n° 165 de M. Jean-Léonce Dupont à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales (Conditions de classement d'une commune en station touristique autorisant l'ouverture d'un casino).
A 16 heures et, éventuellement, le soir :
Ordre du jour prioritaire
2° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions relatives à l'urbanisme, à l'habitat et à la construction (n° 160, 2002-2003).
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 24 février 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 24 février 2003.)
Mercredi 26 février 2003 :
Ordre du jour prioritaire
A 15 heures et le soir :
Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions relatives à l'urbanisme, à l'habitat et à la construction.
Jeudi 27 février 2003 :
A 9 h 30 :
Ordre du jour prioritaire
1° Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions relatives à l'urbanisme, à l'habitat et à la construction.
A 15 heures et, éventuellement, le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures.)
Ordre du jour prioritaire
3° Suite de l'ordre du jour du matin.
Mardi 4 mars 2003 :
A 9 h 30 :
Ordre du jour prioritaire
1° Projet de loi autorisant l'approbation de l'avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Sultanat d'Oman en vue d'éviter les doubles impositions (ensemble un protocole) (n° 94, 2002-2003).
2° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'avenant à la convention entre la République française et la République fédérale d'Allemagne en vue d'éviter les doubles impositions et d'établir des règles d'assistance administrative et juridique réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, ainsi qu'en matière de contributions des patentes et de contributions foncières, du 21 juillet 1959, modifiée par l'avenant du 9 juin 1969 et par l'avenant du 28 septembre 1989, signé à Paris le 20 décembre 2001 (n° 136, 2002-2003).
3° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Lettonie relatif au statut de l'immeuble de la légation de la République de Lettonie à Paris (n° 109, 2002-2003).
4° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Lituanie relatif au statut de l'immeuble de la légation de la République de Lituanie à Paris (n° 110, 2002-2003).
5° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Estonie relatif à l'indemnisation de la République d'Estonie pour l'immeuble de son ancienne légation à Paris (n° 111, 2002-2003).
(La conférence des présidents a décidé que ces trois projets de loi feraient l'objet d'une discussion générale commune.)
6° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de l'accord de stabilisation et d'association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et l'ancienne République yougoslave de Macédoine, d'autre part (ensemble sept annexes et cinq protocoles) (n° 134, 2002-2003).
7° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de l'accord de stabilisation et d'association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République de Croatie, d'autre part (ensemble huit annexes et six protocoles) (n° 135, 2002-2003).
8° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne relatif à la construction et l'entretien de ponts frontières sur le Rhin dont les Parties contractantes n'assurent pas la maîtrise d'ouvrage (n° 112, 2002-2003).
9° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation du protocole de Carthagène sur la prévention des risques biotechnologiques relatif à la convention sur la diversité biologique (n° 137, 2002-2003).
10° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Son Altesse Sérénissime le Prince de Monaco relatif à l'attribution et à l'utilisation par la société Télé Monte-Carlo de fréquences hertziennes terrestres pour la diffusion de son programme à partir d'installations d'émission implantées en territoire français (ensemble une annexe) (n° 113, 2002-2003).
11° Projet de loi autorisant l'approbation de la convention sur les effets transfrontières des accidents industriels (ensemble treize annexes) (n° 311, 2001-2002).
12° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de l'accord euro-méditerranéen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République arabe d'Egypte, d'autre part (n° 133, 2002-2003).
13° Projet de loi autorisant l'adhésion de la France au protocole de 1996 à la convention de 1972 sur la prévention de la pollution des mers résultant de l'immersion de déchets (n° 310, 2001-2002).
14° Projet de loi autorisant l'approbation de la convention sur les polluants organiques persistants (ensemble six annexes) (n° 395, 2001-2002).
15° Projet de loi autorisant l'approbation de la convention sur la procédure de consentement préalable en connaissance de cause applicable à certains produits chimiques et pesticides dangereux qui font l'objet d'un commerce international (ensemble cinq annexes) (n° 396, 2001-2002).
(La conférence des présidents a décidé que ces deux projets de loi feraient l'objet d'une discussion générale commune.)
16° Projet de loi autorisant l'approbation du protocole d'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Grand-Duché de Luxembourg relatif au raccordement du Grand-Duché de Luxembourg au TGV est-européen (ensemble trois annexes) (n° 130, 2002-2003).
A 16 heures et le soir :
17° Eloge funèbre de Robert Calmejane.
Ordre du jour prioritaire
18° Sous réserve de son dépôt sur le bureau du Sénat, projet de loi de sécurité financière.
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 3 mars 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 3 mars 2003.)
Mercredi 5 mars 2003 :
Ordre du jour prioritaire
A 15 heures et le soir :
Suite du projet de loi de sécurité financière.
Jeudi 6 mars 2003 :
A 9 h 30 :
Ordre du jour prioritaire
1° Suite du projet de loi de sécurité financière.
A 15 heures et, éventuellement, le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures.)
Ordre du jour prioritaire
3° Suite de l'ordre du jour du matin.
Mardi 11 mars 2003 :
A 9 h 30 :
1° Questions orales.
A 16 heures et le soir :
Ordre du jour prioritaire
2° Suite du projet de loi de sécurité financière.
Mercredi 12 mars 2003 :
Ordre du jour prioritaire
A 15 heures et le soir :
Suite du projet de loi de sécurité financière.
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances ?...
Y a t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents s'agissant de l'ordre du jour établi en application de l'article 48, troisième alinéa, de la Constitution ?...
Ces propositions sont adoptées.
PRÉVENTION DES RISQUES
TECHNOLOGIQUES ET NATURELS
Discussion d'un projet de loi
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 116, 2002-2003) relatif à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages. [Rapport n° 154 (2002-2003) et avis n° 143 (2002-2003).]
Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le Président de la République a souligné, lors de la présentation de ses voeux à la nation, que le Gouvernement s'était, avec succès, attaché en 2002 à rétablir dans l'esprit des Français et dans les faits l'autorité de l'Etat et à mieux garantir la sécurité de nos concitoyens.
Le projet de loi que j'ai l'honneur de vous présenter est indissociable de cet esprit nouveau et représente l'un des instruments que le Gouvernement entend déployer pour mieux garantir la sécurité de nos concitoyens.
On peut relier les dispositions de ce projet de loi à des événements marquants et souvent meurtriers de notre histoire nationale récente.
Le titre Ier, qui traite des risques industriels, tire ses caractéristiques de la catastrophe de Toulouse du 21 septembre 2001.
Le titre II, quant à lui, trouve son origine dans l'analyse des dernières catastrophes naturelles enregistrées en France : avalanches et coulées de lave torrentielles dans les départements alpins, mouvements de terrain en Seine-Maritime et, surtout, inondations du nord et de l'ouest de la France en 1995, inondations torrentielles de 1999 dans l'Aude ou de 2002 dans le Gard, l'Hérault et le Vaucluse.
Reviennent alors en mémoire le drame de Vaison-la-Romaine survenu en 1992 et celui de Nîmes, en 1988.
Pour autant, ce n'est pas un texte de circonstance. Ses dispositions ont été mûrement réfléchies et sont souvent le fruit d'années de réflexion. Elles sont également empreintes de pragmatisme. L'accident de Toulouse et les inondations du Gard ont peut-être créé une occasion ; ils n'ont pas créé le besoin.
Un texte législatif n'a d'intérêt que s'il donne des instruments à une volonté politique. Ce projet de loi confère de la force et de la perspective aux mesures techniques, méthodologiques et financières que j'ai arrêtées, dès mon arrivée, sur le double front des risques technologiques et naturels.
Il vient d'abord conforter le plan d'action global sur les risques industriels que j'ai engagé dès mon arrivée.
Dans le domaine des risques industriels, l'essentiel des progrès à réaliser n'est pas du domaine de la loi. C'est ainsi que la très grande majorité des propositions du rapport parlementaire Loos-Le Déaut ou du rapport de la mission Essig ne relèvent pas du domaine législatif. En particulier, les actions de réduction à la source du risque, primordiales pour éviter des accidents comme celui de Toulouse, sont du domaine du règlement voire, dans certains cas, de la simple bonne pratique.
Le plan d'action global que j'ai lancé comporte plusieurs volets.
Dans le domaine de la prévention des risques, je me suis attachée, par exemple, au réexamen complet des conditions de sécurité de l'ensemble des sites Seveso, dans le cadre de la directive Seveso II, qu'il s'agisse de la révision des études de dangers ou des programmes d'investissements pour réduire le risque à la source.
J'ai également veillé à l'harmonisation des méthodes d'évaluation des risques conduites à l'échelon régional. Je sais que vous y tenez, et à juste titre. Il ne saurait y avoir de différence dans la pratique des directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement, les DRIRE, selon que l'on se situe en Alsace ou en Bretagne.
M. Gérard Larcher, président de la commission des affaires économiques et du Plan. Très bien !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je me suis aussi attachée à introduire, à l'exemple de ce qui se fait dans la sûreté nucléaire, la notion de probabilité, alors que l'approche française était jusqu'à présent strictement déterministe.
Dans le domaine du contrôle des installations industrielles, le Gouvernement s'est engagé au renforcement pluriannuel de l'inspection des installations classées : en plus des 150 agents qui arriveront au cours de 2003, le Gouvernement a décidé de créer, dans les DRIRE, 400 postes budgétaires affectés au risque d'ici à 2007. Au total, les effectifs de l'inspection, qui étaient d'environ 800 au moment de l'explosion de l'usine AZF, passeront à plus de 1 400 à la fin de 2007.
J'en viens au volet information et transparence.
Plus de 80 commissions locales expérimentales ont été créées autour des sites Seveso, préfigurant ce que seront les CLIC, les commissions locales d'information et de concertation, prévues par le projet de loi.
Par ailleurs, j'ai demandé la publication sur Internet des arrêtés d'autorisation des usines Seveso et, à terme, des résultats des inspections qui y seront menées.
Enfin, j'ai pris l'initiative, avec mon collègue Gilles de Robien, de lancer une réflexion sur la sécurité des noeuds de transports, comme les ports ou les gares de triage, sur lesquels tous les rapports attiraient à juste titre notre attention sans que l'on se soit penché sérieusement sur ce sujet, pourtant primordial, jusqu'ici. Peut-être sera-t-il temps, dans une prochaine lecture de ce texte, d'intégrer des dispositions issues de ce travail si elles sont de nature législative ; je sais que vous le souhaitez.
Au total, j'ai la ferme intention de donner suite à la majorité des recommandations faites par les uns et par les autres à la suite de la catastrophe de Toulouse. C'est un chantier de très grande envergure, dont les dispositions législatives que nous allons discuter dans quelque temps sont l'un des aspects.
Dans le domaine des risques naturels, l'idée est de renforcer par la loi des actions déjà lancées.
En ce qui concerne les inondations, le projet de loi vise à renforcer la portée du plan de prévention que j'ai présenté au mois de septembre et qui comportait deux volets.
Le premier portait sur le financement, à hauteur de 130 millions d'euros, des initiatives locales tendant à réguler les débits des rivières ou des fleuves en amont des bassins versants.
Le second prévoyait la réforme du système de prévention des crues, à laquelle plusieurs d'entre vous sont attachés.
Ainsi, les missions des services seront redéfinies. Ceux-ci devront mieux connaître les caractéristiques des bassins versants dont ils auront la charge et ils seront regroupés en unités mieux dotées en agents capables de se spécialiser.
Le système français de prévision des crues sera renforcé par la création, dans quelques semaines, du centre hydro-météorologique de Toulouse, que j'ai chargé de la double mission d'harmoniser et de surveiller les méthodes des services de prévision des crues et de servir de « second rideau » aux services de prévision des crues dans les bassins à réaction rapide, exposés aux orages cévenols.
Je précise que ce centre, à vocation nationale, sera bien évidemment ouvert aux collectivités locales ou à leurs groupements qui souhaiteront développer des services de prévision des crues. Il leur apportera l'aide méthodologique nécessaire.
Les mesures techniques et législatives se renforcent mutuellement.
Alors que je mets en oeuvre une réforme en profondeur de la prévision des crues afin de diffuser la meilleure information dans la population en temps de crise, le projet de loi contient de nombreuses dispositions tendant à développer une meilleure prise de conscience du risque chez les populations exposées, de telle sorte qu'elles réagissent mieux aux informations qu'elles reçoivent en temps de crise.
Alors que je mets en oeuvre un plan de soutien aux initiatives locales de 130 millions d'euros tendant à réguler les débits en tête de bassin, en amont des zones urbanisées, par le développement de zones d'expansion des crues, le projet de loi contient des dispositions tendant, d'une part, à faciliter la construction d'ouvrages de régulation des débits, qui auront pour conséquence de créer des zones d'expansion des crues, et, d'autre part, à limiter l'érosion des sols en amont des bassins versants.
En effet, dans le domaine des inondations, le paradoxe est que les enjeux sont le plus souvent en aval alors que les solutions sont en amont, dès lors que l'on souhaite promouvoir les mesures qui ralentissent la crue avant qu'elle n'atteigne les zones urbanisées. Le projet de loi apporte des outils nouveaux aux pouvoirs publics dans ce registre.
J'en viens maintenant au coeur même du projet de loi.
Le titre Ier vise à donner une place plus importante aux représentants des salariés dans la politique de prévention des risques technologiques menée par chaque entreprise. En effet, les salariés - nous l'avons constaté à Toulouse - sont les principales victimes de ces accidents, alors qu'ils ne sont pas suffisamment associés à la gestion des risques. En leur donnant un rôle plus développé dans la réduction du risque, c'est aussi le risque d'accidents pouvant avoir des conséquences sur l'extérieur que l'on réduit. Le projet de loi inclut donc un volet social, préparé et négocié par François Fillon et moi-même avec les partenaires sociaux.
Il est prévu que le rôle du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, le CHSCT, soit renforcé dans le domaine des risques technologiques. Il pourra faire appel à un expert en risques technologiques. Il pourra alerter les inspecteurs des installations classées. Il sera mieux associé à la procédure d'autorisation par l'Etat. Il sera consulté sur les moyens de secours à mettre en place dans l'entreprise.
Le recours à la sous-traitance avait été fortement décrié après le sinistre de Toulouse car il peut occasionner des risques supplémentaires. Cependant, tout le monde reconnaît que la sous-traitance est nécessaire pour les spécialités que l'entreprise utilisatrice ne maîtrise pas.
Il ne s'agit pas de proposer une disposition qui pénalise les entreprises. Il faut être réaliste et introduire de la responsabilité dans le système, plutôt que de l'écraser sous les règles.
Le projet de loi prévoit donc des dispositions de bon sens visant à organiser le recours à la sous-traitance. Une liste des postes qui ne pourront être occupés par des salariés précaires, en CDD ou en intérim, ni gérés par des sous-traitants sera négociée avec le CHSCT.
L'entreprise utilisatrice et le sous-traitant devront définir ensemble, avant les interventions, les mesures de précaution et de sécurité à respecter. Si c'est, bien entendu, l'employeur du sous-traitant qui est responsable en première instance du comportement de ses employés, l'entreprise utilisatrice ne sera pas pour autant exonérée, puisqu'elle devra veiller au bon respect des règles ainsi définies.
Tous les salariés sous-traitants recevront une formation d'accueil, sur les risques spécifiques à une installation Seveso II.
Enfin, le CHSCT aura deux formations : l'une, dite d'établissement, identique à l'actuel CHSCT, et l'autre, dite de site, qui associera les principaux sous-traitants et les représentants de leurs salariés.
Je sais que ce dispositif a suscité des interrogations au sein de la commission des affaires sociales. Je souhaite vous dire, à ce stade, qu'il a été longuement discuté avec les partenaires sociaux de manière que soient atteints les objectifs d'association des sous-traitants à la gestion du risque sans que, pour autant, une charge trop lourde pèse sur les entreprises.
Le titre II, lui aussi, s'attaque à la racine du problème en donnant des instruments nouveaux aux pouvoirs publics pour travailler sur les terrains qui engendrent le risque et non plus seulement sur les terrains exposés aux risques, c'est-à-dire les zones urbanisées.
La tradition française, en matière de prévention des catastrophes naturelles, est d'aménager les terrains exposés aux risques. Ce projet de loi complète d'ailleurs l'arsenal dont nous disposons à cet égard ; nous en reparlerons. L'un de ses apports fondamentaux est, cependant, de donner aussi aux pouvoirs publics les instruments pour travailler sur les terrains qui engendrent le risque ou qui sont susceptibles d'apporter des solutions pour le réduire. Au lieu de ne travailler qu'en aval, on préviendra donc également le risque en amont.
C'est ainsi que la construction d'ouvrages de régulation des débits trouve un cadre juridique. Le plan de prévention des inondations que j'ai présenté prévoit le financement de la construction de petits ouvrages de régulation des débits en tête de bassin : neutres quand le débit est faible, ils retiennent l'eau dans les zones d'expansion des crues lorsque le débit est anormal. Il s'agit de briser la crue, de réduire sa valeur extrême, de ralentir le rythme d'écoulement des eaux en amont des zones urbanisées.
Le projet de loi, pour résoudre les conflits liés au foncier nécessaire à la mise en oeuvre de ces ouvrages, prévoit que les collectivités maîtres d'ouvrage pourront instituer une servitude de sur-inondation sur des terrains d'expansion des crues. Le projet de loi tend donc à faciliter la construction et le fonctionnement des ouvrages prévus dans le plan de prévention des inondations que j'ai présenté.
Le Gouvernement a négocié avec le monde agricole le principe et les modalités d'une indemnisation de cette servitude. Il est en effet indispensable d'inciter les propriétaires et les exploitants situés en amont à intervenir pour préserver les habitants situés en aval et d'indemniser les pertes éventuelles de culture occasionnées par la sur-inondation.
L'intention du Gouvernement, sur ce point, est sans ambiguïté : l'indemnisation des propriétaires devra se faire en une fois et celle des exploitants uniquement en fonction de la réalisation du risque, mais selon le barème des indemnités de pertes de culture du régime des calamités agricoles.
Deux débats ont été ouverts en commission concernant la servitude de sur-inondation.
Le premier débat concerne le délai d'exécution du droit de délaissement, qui permet au propriétaire d'une parcelle grevée d'une servitude de sur-inondation de mettre en demeure la collectivité qui a institué la servitude d'acheter le terrain. Le Gouvernement avait d'abord opté pour un délai de trois ans. Puis, dans le cadre des négociations avec les représentants de la profession agricole, il a fixé ce délai à cinq ans. Je ne veux pas empiéter sur nos prochains débats, mais je suis, sur ce point, comptable d'un équilibre et je ne souhaite pas que les finances des collectivités locales maîtres d'ouvrage restent trop longtemps dans l'incertitude.
Le second débat concerne la dérogation au droit de fermage instituée par le projet de loi. Le Gouvernement souhaite, là encore, conférer aux collectivités locales un droit qui soit en rapport avec leur degré d'implication financière.
La combinaison d'un délai trop long pour l'exécution du droit de délaissement et de l'absence de dérogation au droit de fermage en cas d'achat par une collectivité publique conduira les collectivités locales ou leurs groupements à hésiter avant de se lancer dans la mise en oeuvre de servitudes, au détriment de la sécurité de nos concitoyens. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est intéressé par la proposition qu'a exprimée le rapporteur de la commission des affaires économiques, dont je salue ici le travail tout à fait remarquable. Cette proposition consiste à étendre le délai jusqu'à dix ans, mais à autoriser une dérogation - toutefois limitée - au droit de fermage.
Le projet de loi s'attache aussi à rétablir le caractère naturel du lit des cours d'eau. Les aménagements qui calibrent trop le cours d'eau et qui empêchent la rivière ou le fleuve de se répandre sur les terres riveraines provoquent en effet une élévation du niveau de l'eau en même temps qu'une augmentation de sa vitesse d'écoulement. C'est la raison pour laquelle le projet de loi tend à les limiter, voire à les faire disparaître sur les endroits stratégiques du cours d'eau.
Les dispositions législatives ainsi prévues sont respectueuses des milieux naturels et constituent les instruments d'une régulation des débits par les méthodes les plus douces, mais efficaces, c'est-à-dire les méthodes les plus durables.
Le titre II contient également une disposition tendant à lutter efficacement contre l'érosion des sols. En effet, celle-ci accélère les ruissellements, favorise les avalanches et les mouvements de terrain. Or plusieurs pratiques agricoles sont susceptibles de la ralentir ou de la limiter. Ces « bonnes pratiques » sont différentes selon les régions.
Dans l'ouest de la France, par exemple, il peut s'agir de maintenir la couverture végétale des sols afin que l'eau de pluie pénètre mieux dans la terre, au lieu de s'écouler en surface. Il peut aussi s'agir d'empêcher l'arrachage des haies et l'érosion mécanique des talus, les deux étant des « barrages naturels ». En zone montagneuse ou semi-montagneuse - en ce cas, les crues comme les laves torrentielles et les avalanches sont concernées -, il s'agira d'éviter la disparition des murets ou d'autres barrières naturelles. Partout en France, sur les coteaux, il s'agira de labourer les terres dans le sens perpendiculaire à la pente afin de limiter les phénomènes de ruissellement.
Le respect de ces pratiques doit être obtenu par la voie de la concertation, mais il peut être nécessaire de donner aux représentants de l'Etat dans le département le pouvoir de les imposer lorsque la voie partenariale, après un certain temps, n'aura pas porté ses fruits.
Il est clair, à mes yeux, qu'il faudra limiter le nombre des zones d'érosion et leur périmètre à ce qui est nécessaire à la prévention des risques naturels. Mais, à l'intérieur de ces zones, les bonnes pratiques devront être respectées.
Cette disposition profondément innovante a été négociée avec les représentants du monde agricole. Elle constitue une rupture dans la politique de prévention des risques naturels. Elle permet de conjuguer préservation des milieux naturels et prévention des risques.
Le projet de loi que j'ai l'honneur de vous présenter s'attache aussi à développer la conscience du risque dans l'esprit des décideurs publics et des citoyens les plus exposés aux risques.
Le risque ne sera jamais supprimé, quels que soient les efforts déployés pour le réduire. Il faut donc développer l'information préventive et la conscience du risque. Des comportements préventifs en découleront. La meilleure prévision des crues, les services de secours les plus entraînés et réactifs ne suffiront jamais : la population doit être cogestionnaire du risque. Pour cela, elle doit en connaître les caractéristiques et être informée sur la conduite à tenir afin de s'en préserver.
En développant la transparence autour du risque, on milite aussi pour son acceptabilité. Le projet de loi constitue une rupture en ce qu'il responsabilise les décideurs publics et les citoyens, de plus en plus victimes de l'illusion du « risque zéro ».
Plusieurs dispositions sont prévues à cet égard.
Je vous propose d'abord, pour l'ensemble des risques, naturels et technologiques, de rendre obligatoire la mention d'un tel risque lorsqu'une transaction - location ou vente - est effectuée sur un immeuble situé dans une zone soumise à ce risque. Les retours d'expérience des grandes crues torrentielles de l'Aude en 1999 ou du Gard en 2002 nous enseignent que les nouvelles populations qui s'installent en zone rurale après avoir longtemps habité en zone urbaine ne connaissent pas toujours très bien les milieux naturels et n'ont pas suffisamment conscience des risques auxquels elles sont éventuellement exposées.
La mention obligatoire du risque, lorsqu'une transaction immobilière est effectuée dans une zone identifiée comme dangereuse, contribuera au développement de comportements préventifs. Ne pas donner cette information à nos concitoyens les plus exposés aux risques poserait un grave problème de responsabilité et de conscience.
M. Roland Courteau. Evidemment !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Concernant maintenant les seuls risques naturels, le projet de loi contient une disposition rendant obligatoire la pose de repères de crues sur les édifices publics. Cette disposition sera à la charge des maires, sur le fondement d'informations fournies par les services de l'Etat. Elle a pour objet de perpétuer, dans la population, la mémoire du risque.
L'obligation d'informer les populations des communes les plus exposées aux risques naturels est aussi prévue par la loi. Tous les deux ans, dans les communes où un plan de prévention des risques a été prescrit ou approuvé, le maire devra assurer, avec l'assistance des services de l'Etat et des représentants du monde des assurances, une information des habitants. Le maire sera libre du moyen de cette information : réunion publique ou information écrite, par le biais du bulletin municipal, par exemple.
Cette disposition est protectrice pour les maires. Il ne faut pas oublier que l'article 2212 du code général des collectivités territoriales leur confère une grande responsabilité en cas de catastrophe naturelle, comme nous l'avons vu récemment. Tout ce qui permettra de diffuser dans la population une meilleure connaissance du risque la rendra plus réceptive et plus réactive aux injonctions que le maire peut éventuellement donner au titre de son rôle préventif. Ainsi, en cas de crise, il interviendra sur un terrain mieux préparé.
S'agissant des risques technologiques, j'observe qu'il faut porter l'information sur le risque vers le citoyen de manière active, sans attendre qu'il la cherche. Deux dispositions vont dans ce sens.
La première est la création de comités locaux d'information et de concertation, ou CLIC, autour de chaque site à risque, sur le modèle de ce qui existe dans le domaine du nucléaire ou dans celui des déchets. Ces comités disposeront de budgets et de capacités d'expertise, pour justifier le « c » de concertation, auquel j'attache la plus grande importance, contrairement aux commissions locales d'information et de surveillance, les CLIS, en matière de déchets, par exemple. Partant du principe que la concertation ne se décrète pas, que j'ai souhaité, à ce stade, ne fermer aucune porte, ni sur la composition des comités, ni sur leur présidence, ni sur leur articulation, qui sera pourtant nécessaire, avec les structures qui ont d'ores et déjà été créées à cet effet dans certaines régions très industrielles.
La seconde disposition est l'obligation d'organiser une réunion publique lors de l'enquête publique des usines Seveso, afin de rendre exploitables et claires pour le public des données techniques souvent volumineuses et complexes.
Le projet de loi s'attache enfin à traiter la question de l'urbanisme hérité du passé.
Pour ce qui concerne le titre Ier, il s'agit de répondre à deux questions : comment empêcher les situations de s'aggraver ? Comment remédier aux situations déjà graves ?
Un premier principe est posé : celui de l'indemnisation par l'industriel de la servitude créée par toute augmentation du risque qui est de son fait ; il s'agit du cas de l'extension d'une usine Seveso. Jusqu'à présent, ces servitudes n'étaient pas indemnisées.
Dans le domaine de la maîtrise de l'urbanisation, des plans de prévention des risques technologiques, ou PPRT, seront mis en place au voisinage des usines Seveso. Ces plans détermineront, en fonction du danger, les zones inconstructibles et celles dans lesquelles il est possible d'imposer des travaux de bon sens aux riverains.
Ces plans pourront, et c'est là une nouveauté majeure par rapport aux dispositions du projet du gouvernement précédent, utiliser les outils de l'expropriation et du délaissement. Dans ce dernier cas, le propriétaire d'un bien en zone de délaissement se voit offrir la possibilité de quitter sa maison, et d'être indemnisé, ou de rester. Il s'agit de se donner les moyens de reconquérir petit à petit les zones soumises à un risque important. Les frais occasionnés par le délaissement et l'expropriation seront partagés entre les collectivités locales, les industriels et l'Etat.
Cette démarche est tout à fait novatrice. En règle générale, on se contentait de ne pas aggraver les situations. Pour la première fois, on se donne les moyens de ne pas les laisser évoluer. Cette politique ne pourra être que progressive et s'étendra sur plusieurs décennies. Elle sera menée conjointement par les collectivités locales et l'Etat.
Pour ce qui concerne le titre II, le projet de loi s'attache à donner aux pouvoirs publics des moyens nouveaux de prévention dans les zones urbaines. Les dispositions prévues constituent une rupture dans la tradition de la prévention des risques naturels.
Elles conduiront, d'une part, à revenir progressivement sur les situations héritées du passé en matière d'urbanisme. Trop souvent, le reproche a été fait au plan de prévention des risques, même s'il résolvait bien la question de l'urbanisme à venir en le limitant, de ne pas apporter de réponse pour l'urbanisme hérité du passé. Le projet de loi permet de résoudre progressivement la question des habitations construites avant la mise en oeuvre du PPR.
Elles visent, d'autre part, à faire financer des dépenses de prévention par des fonds d'origine assurantielle, donc non budgétaire.
Le fonds de prévention des risques naturels majeurs est alimenté par un prélèvement sur les flux financiers induits par des contrats d'assurance : prélèvement de 2,5 % sur les surprimes « catastrophes naturelles » adossées aux contrats d'assurance « dommages aux biens ». Ses ressources annuelles sont d'environ 20 millions d'euros et il dispose de réserves de plus de 80 millions d'euros, « manne » sur laquelle le présent projet de loi s'appuie.
Nous avons en effet constaté que, dans la Somme comme dans l'Aude ou le Gard, les indemnisations versées par les assurances ne suffisaient pas pour reconstruire des biens fortement endommagés ailleurs que sur leur emplacement initial. Elles ne permettent même pas d'acquérir le terrain nécessaire au transfert hors de la zone dangereuse.
M. Roland Courteau. C'est bien évident !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Le projet de loi prévoit donc que le fonds de prévention des risques naturels majeurs pourra intervenir en complément des indemnisations versées par les assureurs, afin de contribuer au financement de l'achat d'un terrain hors de la zone dangereuse par les propriétaires des habitations ou immeubles d'exploitation de petites entreprises détruites ou endommagées à plus de 50 % de leur valeur.
Il s'agit ainsi de soustraire au danger les personnes et les biens exposés à une avalanche ou à une crue torrentielle, par exemple.
Le projet de loi précise aussi que le fonds financera les travaux de prévention dans les habitations prévus par les PPR approuvés. Il peut s'agir de travaux mettant les installations électriques au-dessus du niveau des plus hautes eaux, scellant les cuves à fioul au sol, créant des batardeaux devant les entrées, des escaliers intérieurs et, sur les toits, des exutoires permettant d'être hélitreuillé en cas de crue torrentielle.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi que j'ai l'honneur de vous présenter place l'homme au coeur de la prévention du risque. Il le responsabilise lorsqu'il est exposé aux risques. Mais il s'attache aussi - et nous avons travaillé en ce sens, le ministre chargé de l'économie et moi-même - à mieux l'indemniser lorsqu'il a été victime d'un accident industriel.
Dans le cas de Toulouse, l'entreprise à l'origine de l'accident était solvable, et elle a contribué à raccourcir les délais d'indemnisation. Pourtant, celle-ci a été globalement ressentie comme trop lente. Qu'en aurait-il été en cas d'insolvabilité, ou tout simplement face à une entreprise moins coopérative ?
Le projet de loi vise, en cas de catastrophe industrielle constatée par l'administration, à ouvrir le droit à réparation, sans franchise, et dans des délais encadrés par la loi. Cette disposition est inspirée des propositions de Philippe Douste-Blazy, maire de Toulouse. Ce système permettra un remboursement rapide et garantira les assurés contre une éventuelle défaillance de l'industriel à l'origine de l'accident.
Enfin, comment parler de réparation sans penser à ce qu'il est maintenant courant d'appeler l'« affaire Metaleurop », dans laquelle un industriel sans scrupule a organisé sa disparition et son insolvabilité, laissant derrière lui un champ de ruines sociales et environnementales ?
Ce comportement n'est heureusement pas représentatif de la façon de faire de l'immense majorité des entreprises. Il n'est pas question, parce qu'un industriel a eu un comportement inadmissible, de construire un système tendant à tous les considérer comme fautifs.
Pour autant, la politique française de gestion des sites et sols pollués a des faiblesses, que beaucoup d'entre vous ont sans doute eu l'occasion d'identifier sans qu'il soit besoin d'invoquer le cas de Metaleurop.
En particulier, le fait que les capacités financières d'une entreprise ne soient évaluées qu'au début de son activité, alors que le sol n'est pas pollué, et à la fin, quand il est souvent trop tard, est une faiblesse du dispositif. De même, le fait pour le préfet de ne pas pouvoir demander des travaux de dépollution des sols en cours d'exploitation rend les situations encore plus critiques à la fermeture.
Je vous proposerai donc par voie d'amendement d'insérer des dispositions - la plupart avaient fait l'objet de propositions dans des rapports d'inspection antérieurs - tendant globalement à mieux prendre en compte les questions de sols pollués au cours de la vie des entreprises. Comme le reste du projet, ces dispositions visent l'efficacité au moindre coût.
Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, ce projet a la particularité d'être à la fois ambitieux et réaliste. Il est ambitieux parce qu'il s'attaque à des questions laissées en suspens depuis de nombreuses années, en proposant des évolutions en profondeur. Il en est ainsi de la résorption de l'urbanisme autour des usines à risque, à travers l'expropriation et le délaissement, comme de la modification des pratiques agricoles pour limiter l'érosion en amont.
Il est réaliste parce que, dans chaque domaine, sont recherchées les solutions les moins dogmatiques, les mieux adaptées aux réalités du terrain et les plus susceptibles d'être acceptées par les entreprises. Surtout, il prend en compte le temps et ne cherche pas à dénouer en quelques mois des situations qui ont mis des dizaines d'années à se sédimenter. Il se place à l'échelle de la génération.
Ce projet de loi, préparé en concertation avec des parlementaires, des industriels, des organisations syndicales, la profession agricole, et grâce à un partenariat étroit avec chacun des ministres concernés, est attendu. Il marquera une avancée significative dans le registre de la prévention des risques. Il a pour objet la sécurité de nos concitoyens. En cela, il est au coeur des engagements du Président de la République. (Applaudissements dans les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que dans certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur. M. Yves Détraigne, rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le texte dont nous commençons aujourd'hui l'examen tend à renforcer les modalités de prévention des risques technologiques et naturels et à améliorer l'indemnisation des victimes de catastrophes technologiques. Il était fortement attendu depuis l'explosion de l'usine AZF à Toulouse, le 21 septembre 2001, et les inondations répétitives qui ont meurtri un grand nombre de régions de France ces dernières années : je pense aux départements de l'Aude, de la Somme ou du Gard.
M. Roland Courteau. Eh oui !
M. Yves Détraigne, rapporteur. Ces catastrophes ont profondément marqué nos concitoyens et ont montré les limites des dispositions actuelles en matière de prévention et d'indemnisation. Elles ont également mis en évidence l'insuffisante prise de conscience de l'existence du risque à tous les niveaux de la société et du fait que le risque zéro n'existe pas. Il était donc nécessaire d'en tirer les conséquences et d'instaurer des mesures qui responsabilisent nos concitoyens par rapport aux risques.
Madame la ministre, ce texte répond à ces aspirations et recueille donc l'assentiment de la commission des affaires économiques. Dans le même temps, il est redouté par certains de nos collègues.
Alors que se pose avec acuité la question de l'attractivité et de la compétitivité de notre pays, il convient de ne pas multiplier les contraintes et les fardeaux qui pèsent sur les entreprises.
M. Roland Courteau. Et voilà !
M. Yves Détraigne, rapporteur. A défaut, nous nous exposerions au danger de voir des pans entiers de notre industrie nous échapper et les délocalisations s'amplifier.
M. Roland Courteau. C'est ça !
M. Yves Détraigne, rapporteur. Il ne faudrait pas que la prévention du risque technologique devienne elle-même source de risques pour notre économie et pour l'emploi.
Il nous appartient donc d'élaborer un texte qui soit suffisamment équilibré pour améliorer, là où c'est nécessaire, les mesures de prévention existantes, sans pour autant aller à l'encontre du développement de nos industries.
Par ailleurs, ce projet de loi consacre la notion d'état de catastrophe technologique, sur le modèle de ce qui existe déjà pour les catastrophes naturelles. Lorsque l'état de catastrophe technologique sera reconnu, les particuliers dont l'habitation est couverte par un contrat d'assurance bénéficieront d'une garantie leur assurant une indemnisation rapide - moins de trois mois - des dommages dont ils auraient pu être victimes. Les personnes non assurées - et on a pu constater, après la catastrophe de Toulouse, que 10 % des propriétaires étaient concernés - seront indemnisées, dans la limite d'un plafond, par un fonds de garantie au titre de la solidarité.
S'agissant du renforcement de la lutte contre les risques naturels, le dispositif du titre II du projet de loi s'inspire des rapports parlementaires relatifs à la prévention des inondations, notamment de celui de notre collègue M. Marcel Deneux, rédigé après les inondations de la Somme en 2001.
Il reprend aussi des propositions formulées à la suite des analyses réalisées après la survenue de diverses catastrophes. Il tend à permettre une meilleure maîtrise du risque grâce à un travail en amont des zones urbanisées, là où l'on peut le plus aisément intervenir à titre préventif. Ainsi seraient créées une servitude de sur-inondation sur les terrains d'expansions des crues, ce qui faciliterait la construction de petits ouvrages de régulation des débits en tête de bassin, et une servitude dans les zones de mobilité des cours d'eau.
De plus, s'il est indispensable que les collectivités locales concernées - et leurs élus - participent activement à la définition et à l'application des mesures proposées, il nous faut veiller à ce que les responsabilités de chacun soient bien définies et à ce que les moyens mis en oeuvre, notamment les moyens financiers, soient à la hauteur des ambitions. A défaut, ce projet de loi risquerait de faire naître de nombreux espoirs qui seraient vite déçus.
Madame la ministre, l'approche innovante de ce projet de loi doit être saluée. Ce texte récuse en effet l'idée, certes réconfortante, mais totalement irréaliste, du risque zéro au profit du développement de ce que l'on pourrait appeler une culture du risque.
Même si l'on doit chercher à réduire le plus possible le risque, il serait utopique de laisser croire au risque zéro. Loin d'interdire toute décision, le fameux principe de précaution - que l'on a si souvent associé ces dernières années à ce mythe - doit au contraire, être compris comme une obligation d'adapter nos décisions et nos actions aux risques identifiés.
La commission des affaires économiques et du Plan s'est donc saisie du projet de loi sans a priori et dans un esprit constructif, soucieuse de trouver un équilibre satisfaisant entre ces objectifs parfois contradictoires.
Un grand nombre de dispositions du projet de loi vont dans le bon sens.
S'agissant des risques technologiques, le texte vise notamment à créer les comités locaux d'information et de concertation, les CLIC, autour des sites industriels à risques. Ces instances, à l'image de celles qui existent déjà autour des sites nucléaires et des usines de traitement de déchets, permettront aux acteurs concernés - les riverains, les industriels, les représentants du personnel, les collectivités, l'administration - d'engager un dialogue, de dédramatiser les enjeux et d'apaiser les craintes qui peuvent être liées à la présence de ces industries.
En outre, ce projet de loi permet de mettre en oeuvre une stratégie innovante de maîtrise et de reconquête de l'urbanisation autour des sites à risques. En effet, l'urbanisation s'est bien souvent réalisée progressivement autour des établissements concernés, multipliant les cas d'exposition aux risques. Avec la mise en place de plans de prévention des risques technologiques, les PPRT, des périmètres d'exposition aux risques seront définis autour des industries qui présentent les risques les plus élevés, c'est-à-dire les 670 usines classées Seveso « seuil haut ». Sur la base de ces périmètres, une palette de mesures pourra être mise en oeuvre en fonction de la gravité du risque, allant de l'interdiction de la construction ou de l'expropriation dans les zones les plus dangereuses à la possibilité, pour les propriétaires, de faire usage du droit de délaissement de leurs biens au profit de la collectivité locale.
Dans le même ordre d'idées, il est prévu de recenser, en concertation avec la profession agricole, les « bonnes pratiques » consistant à limiter l'écoulement des eaux et à réduire l'érosion des sols. La généralisation de ces « bonnes pratiques » pourra donner lieu à contrepartie si ces dernières entraînent une diminution du revenu agricole.
Le projet de loi vise également à développer la conscience du risque chez les populations les plus exposées, en entretenant la mémoire des inondations passées par la pose de repères de crues, en rendant obligatoires l'information des populations dans les communes les plus exposées et la mention du risque lors d'une transaction, qu'il s'agisse d'une location ou d'une vente.
Enfin, le texte a pour objet de faciliter la mise en oeuvre des mesures de sauvegarde des personnes et des biens situés dans les zones urbaines à risque par la mobilisation du fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit « fonds Barnier ». Ce fonds pourra contribuer au financement des travaux de prévention prescrits dans un plan de prévention des risques naturels ou, en complément des indemnisations versées par les assureurs, faciliter la réinstallation sur un terrain hors zone à risque des propriétaires d'habitation ou de petite entreprise sinistrée à plus de 50 % de sa valeur.
Telles sont, brossées à grands traits, les principales innovations apportées par ce texte. Je précise que la commission des affaires économiques a délégué à la commission des affaires sociales l'examen au fond des dispositions qui tendent, entre autres, à mieux sensibiliser les personnels des industries à risques à la sécurité et à encadrer davantage la sous-traitance. L'approche de la commission des affaires sociales est d'ailleurs en parfaite cohérence avec celle de la commission des affaires économiques.
Au travers, notamment, des dispositions qui viennent d'être évoquées, ce projet de loi marque de nombreuses avancées positives, dont certaines méritent néanmoins quelques éclaircissements. Pour ces raisons, je vous proposerai, au nom de la commission des affaires économiques, un certain nombre d'amendements destinés à lever les incertitudes et à parvenir à un texte équilibré.
En premier lieu, et par rapport aux risques technologiques, ce projet de loi va, à plus d'un titre, entraîner un surcroît d'activité important pour les personnels des directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement, les DRIRE, notamment pour les inspecteurs des installations classées, tant pour animer les comités locaux d'information et de concertation que pour élaborer les plans de prévention des risques technologiques.
Le Gouvernement a prévu la mise en place d'un plan de renforcement des effectifs de ces inspecteurs de l'ordre de 400, sur la période 2003 - 2007. Vous venez de vous en faire l'écho, madame la ministre. Toutefois, la Cour des comptes a noté qu'à missions constantes les effectifs étaient déjà insuffisants. Dans cette perspective, cette hausse des effectifs sera-t-elle suffisante pour une mise en application rapide de la loi ? Il conviendra d'y veiller !
Si cette stratégie de reconquête de l'urbanisation autour des sites à risques offre des perspectives intéressantes pour les personnes concernées, il convient toutefois d'en clarifier le financement. En effet, l'annonce de ces mesures va susciter des attentes fortes qu'il s'agit de ne pas décevoir. Cela risquerait pourtant d'être le cas si les collectivités territoriales devaient se retrouver seules à financer une telle stratégie de reconquête des espaces à risques.
M. Charles Revet. C'est vrai !
M. Yves Détraigne, rapporteur. Chacun des acteurs concernés par les situations d'exposition aux risques a sa part de responsabilité et doit être associé à un tel financement : les collectivités territoriales certes, mais aussi l'Etat et les industriels. C'est pourquoi nous proposerons un amendement tendant à associer systématiquement ces trois partenaires.
Les mesures concernant les entreprises ont également suscité de longs débats en commission, notamment les dispositions de l'article 14, qui oblige les exploitants à évaluer la probabilité d'occurrence des accidents ainsi que le montant des dommages éventuels qu'ils causeraient, et à rendre publique cette évaluation. Comme je l'ai déjà souligné en introduction, afin de ne pas alourdir les contraintes et les obligations qui pèsent sur notre industrie, la commission proposera la suppression de cet article. Il nous semble en effet que la réalisation d'une telle étude ne doit pas incomber aux industriels. Elle pourrait être réalisée plus opportunément au sein des comités locaux d'information et de concertation.
Je note enfin que le problème des populations exposées aux risques miniers a été soulevé lors de nos débats. En particulier a été posée la question de l'extension du bénéfice du droit de délaissement à ces personnes, ainsi que celle des procédures d'indemnisation en cas de sinistre.
S'agissant de la prévention des risques naturels, la commission vous proposera des amendements tendant à mieux définir les responsabilités des différentes autorités publiques intervenant en matière de prévision des crues, et notamment à confirmer le rôle majeur qui revient à l'Etat dans ce domaine.
Par un article additionnel, elle vous proposera également de préciser les modalités d'association de l'ensemble des parties intéressées, et notamment des collectivités locales, à l'élaboration des plans de prévention des risques naturels, afin de garantir une définition pertinente des périmètres.
La commission vous proposera aussi de mieux définir les obligations d'information mises à la charge d'un vendeur ou d'un bailleur en matière de risques naturels ou technologiques, afin que le dispositif soit effectivement applicable, en s'inspirant des mesures existantes en matière d'information sur le risque d'exposition à l'amiante, par exemple.
Elle souhaite par ailleurs voir préciser le champ d'application de certaines dispositions, afin de conforter les droits des propriétaires et des exploitants sur les terrains grevés de servitudes.
La commission des affaires sociales a souhaité restreindre le périmètre d'application des dispositions faisant échapper certains terrains au statut du fermage et s'est interrogée sur leur mise en oeuvre, notamment pour les baux ruraux en cours. Madame la ministre, au cours de votre intervention, j'ai noté que vous aviez pris note de ces propositions.
Enfin, et au regard de l'actualité récente, la commission vous proposera des mesures visant à faciliter la réalisation de travaux de prévention par les collectivités territoriales, notamment au cours des années qui suivent une inondation.
Telles sont, madame la ministre, mes chers collègues, les grandes orientations que la commission des affaires économiques a retenues au cours de ses réflexions.
Je tiens enfin à souligner l'importance et la qualité de la contribution de notre collègue M. Joseph Kerguéris, à qui j'ai succédé en tant que rapporteur.
Ce projet de loi constitue une étape importante dans le développement d'une nécessaire culture du risque. Il est en effet indispensable de garantir la sécurité des populations exposées aux risques, en se fondant sur une véritable responsabilité de tous les acteurs, y compris de nos concitoyens.
Sous les réserves que j'ai indiquées, la commission vous propose donc d'adopter ce projet de loi. (Applaudissements dans les travées de l'Union centriste et de l'UMP, ainsi que dans certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. André Lardeux, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la commission des affaires sociales a souhaité se saisir pour avis du chapitre de ce projet de loi relatif à la sécurité du personnel, car le risque industriel est avant tout un risque au travail. La catastrophe de Toulouse nous l'a rappelé avec force : sur les trente personnes qui ont trouvé la mort, vingt-deux étaient des salariés occupés sur le site de l'usine Grande Paroisse. Aussi est-ce à raison que ce texte comporte un volet substantiel sur l'amélioration de la sécurité au travail dans les établissements à risques.
Les événements récents, quelles que soient leur gravité et l'émotion qu'ils ont pu susciter, ne doivent cependant pas masquer les progrès réalisés ces dernières années en matière de sécurité au travail. Le risque professionnel tend, en effet, à être mieux pris en compte et mieux maîtrisé.
Le nombre global d'accidents du travail a connu une forte diminution - de l'ordre d'un tiers - au cours des trente dernières années. Le nombre d'accidents graves, voire mortels, a connu une diminution plus forte encore, leur nombre ayant été respectivement divisé par 2,4 et 3 entre 1970 et 1999. Certes, cette tendance s'est infléchie ces dernières années, mais la hausse constatée depuis 1997 demeure inférieure à la progression de l'emploi salarié.
Ces progrès relatifs sont intervenus en même temps qu'un renforcement progressif et significatif de la réglementation applicable en matière de sécurité au travail, notamment sous l'influence croissante de la législation communautaire. Parallèlement, le droit de l'environnement complète la réglementation du droit commun sur la sécurité au travail par une réglementation spécifique sur la sécurité des installations classées, largement issues de la loi du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement, qui n'est pas sans effet sur la sécurité au travail. A cet égard, en devenant chaque année plus précise et plus ciblée, la réglementation apparaît de plus en plus complexe.
Mais les partenaires sociaux tendent également à mieux s'impliquer en matière de sécurité au travail, laquelle tend à redevenir un sujet central du dialogue social. Ainsi, le 13 septembre 2000 a été signé l'accord national interprofessionnel sur la santé au travail. Surtout, dans les branches, notamment celles qui sont les plus exposées au risque industriel, plusieurs accords importants ont été conclus ou sont en cours de négociation.
Pour autant, ces progrès ne peuvent conduire au risque zéro en matière de sécurité industrielle, ce risque zéro dont l'excellent rapporteur de la commission des affaires économiques vient de souligner le caractère irréaliste. En témoigne la catastrophe de Toulouse, qui est l'accident professionnel le plus grave survenu en France depuis cinquante ans. Il semble pourtant - sous toutes réserves puisque l'enquête judiciaire est en cours - que la réglementation sur la sécurité au travail ait été, pour l'essentiel, respectée.
En 2001, ce sont ainsi près de mille six accidents ou incidents industriels qui ont pu être recensés. Ils ont fait soixante et onze morts et plus de trois mille blessés. On estime généralement que près de la moitié des accidents majeurs sont imputables à des erreurs humaines.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. C'est vrai !
M. André Lardeux, rapporteur pour avis. Or, jusqu'à présent, dans notre réglementation, l'accent est principalement mis sur la sécurité des installations à risques, le facteur humain ou celui qui est lié à l'organisation du travail étant quelque peu négligé.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Tout à fait !
M. André Lardeux, rapporteur pour avis. Dans ce contexte, le présent projet de loi, pour son volet social, marque une approche innovante de la sécurité industrielle en visant à inculquer une nouvelle culture commune de la sécurité au travail dans les établissements les plus dangereux. Il repose principalement sur le souci de garantir une participation active de l'ensemble des acteurs de l'entreprise, notamment des salariés et des sous-traitants, à la gestion du risque. Cette dimension est apparue fondamentale dès les premiers travaux qui ont suivi la catastrophe de Toulouse.
Parallèlement au lancement d'un débat national sur la prévention du risque industriel et à la constitution d'une commission d'enquête à l'Assemblée nationale, le précédent gouvernement avait mis en place un groupe de travail réunissant les partenaires sociaux. Présidé par M. Michel Roux, président honoraire de la section sociale du Conseil d'Etat, ce groupe de travail avait pour mission d'engager une première réflexion sur les voies et moyens d'un renforcement de la prévention des risques industriels dans le domaine de la sécurité au travail. Ses travaux ont, à cet égard, permis de mettre en lumière une triple insuffisance de notre politique de prévention.
Tout d'abord, notre législation prend insuffisamment en compte les conséquences de l'externalisation et du recours croissant à la sous-traitance. L'externalisation peut, en effet, constituer un facteur aggravant, non par elle-même, car elle peut conduire à une maîtrise des risques grâce au recours à des professionnels très qualifiés, mais par les interférences que peut générer l'intervention de plusieurs entreprises sur un même site et par la méconnaissance qu'ont les intervenants extérieurs des risques spécifiques à l'établissement. Comment, en effet, garantir une réelle sécurité lorsque jusqu'à huit cents entreprises différentes peuvent intervenir simultanément sur un même site ? Et les salariés des entreprises extérieures sont directement exposés au risque propre à un site : à Toulouse, treize des vingt-deux salariés morts dans l'enceinte de l'usine AZF étaient des salariés d'entreprises sous-traitantes.
Ensuite, l'association des salariés et de leurs représentants à la maîtrise des risques n'est sans doute pas optimale. A cet égard, les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, les CHSCT, constituent des instruments reconnus et utiles, mais leur fonctionnement concret demeure encore très inégal et, surtout, leur capacité à appréhender le risque industriel dans les établissements les plus dangereux reste limitée.
Ainsi, dans le cas de Toulouse, il semble que le CHSCT de l'usine AZF fonctionnait correctement au regard du droit actuel. Mais cela n'a pas empêché la catastrophe.
Enfin, la coordination des services de l'Etat compétents en matière de prévention des risques indutriels - en l'espèce, principalement l'inspection du travail et l'inspection des installations classées - demeure insuffisante compte tenu du cloisonnement relatif de leurs interventions respectives.
Le projet de loi qui nous est soumis s'inspire largement de ces analyses. Il tend donc à apporter quelques réponses concrètes aux insuffisances mises en évidence. Vous aurez observé, bien sûr, que ce texte reprend, pour l'essentiel, dans son volet social, la trame, le champ d'application et les principales dispositions du projet de loi déposé par le précédent gouvernement en février dernier. Il marque néanmoins une inflexion importante dans sa philosophie. Sur le volet social, le changement essentiel réside dans un recours accru au dialogue social, et ce conformément aux principes généraux qui guident l'action du Gouvernement dans le domaine des relations du travail. D'ailleurs, cette orientation se justifie pleinement en matière de sécurité au travail, sans doute plus encore que dans d'autres domaines.
De fait, lors des réunions du groupe de travail présidé par M. Michel Roux, les partenaires étaient largement convenus que, face à la diversité des situations, un certains nombre de règles pouvaient difficilement être fixées de manière uniforme par la loi ou le décret. Aussi est-il souhaitable de privilégier les accords collectifs pour mieux responsabiliser les partenaires sociaux et pour garantir une meilleure adaptation aux spécificités des branches et des entreprises. Les auditions que j'ai menées ont d'ailleurs conforté cette analyse.
Ce volet social, en cohérence avec les autres dispositions du texte, vise les 672 établissements classés Seveso « seuil haut », parmi les quelque 1 250 établissements de type Seveso. On estime que ces établissements emploient directement environ 150 000 salariés. Ils relèvent principalement de quelques branches : la chimie, le pétrole, la métallurgie et, dans une moindre mesure, l'agroalimentaire. Il s'agit, notamment, de raffineries, de sites pétrochimiques, d'usines chimiques, de dépôts pétroliers et de dépôts d'explosifs. Mais ce peut être également des établissements de plus petite taille : stockage de gaz, stockage d'ammonitrate, certains silos à usage agricole... Ces établissements apparaissent à la fois comme les plus dangereux et comme ceux dans lesquels le risque est le plus probable.
Pour ces établissements qui présentent donc le risque le plus important, le projet de loi vise à la fois à mieux prévenir les conséquences de l'externalisation, à améliorer la capacité d'intervention des représentants du personnel et à garantir une meilleure formation aux risques.
Ces dispositions constituent le coeur des articles 5 à 11, articles que la commission des affaires sociales a étudiés plus particulièrement, en plein accord avec la commission des affaires économiques.
L'article 5 tend à attribuer une maîtrise globale du risque industriel à l'entreprise donneuse d'ordre dans les sites industriels à risques recourant à la sous-traitance.
L'article 6 a pour objet d'imposer au chef de l'entreprise donneuse d'ordre la mise en place d'une « formation d'accueil » au bénéfice des salariés des entreprises extérieures dont l'intervention est susceptible d'entraîner des risques particuliers.
L'article 7 introduit une obligation d'information des services d'inspection et de prévention par le chef d'entreprise, dès lors qu'un membre du CHSCT met en oeuvre son droit d'alerte en signalant un danger grave et imminent.
L'article 8 prévoit la mise en place, dans les établissements à hauts risques, de moyens permanents de prévention, de lutte contre l'incendie et de secours distincts des moyens publics.
Les articles 9, 10 et 11 concernent le CHSCT.
La principale innovation tient dans la création d'une double formation pour cette instance. La formation dite « d'établissement » correspond à l'actuelle composition du comité, tandis que la formation dite « de site » inclut également des représentants des chefs d'entreprises extérieures intervenant sur le site et de leurs salariés.
Mais ces articles tendent également à renforcer le rôle de la formation d'établissement. Ainsi, celle-ci sera consultée sur toute nouvelle décision de sous-traitance d'une activité. Elle pourra également recourir à un expert en risques technologiques avant d'émettre un avis sur une demande d'autorisation d'exploitation d'une installation classée, voire en cas de danger grave. Elle sera associée à la définition des postes relevant de fonctions de sécurité.
La commission des affaires sociales a très largement souscrit aux orientations générales de ce volet social. Elles lui ont semblé répondre de manière équilibrée au souci de renforcer la sécurité des personnes dans les établissements à risques, sans pour autant multiplier des contraintes inutiles et coûteuses pour les entreprises.
La commission a, en effet, considéré que tout renforcement de la législation en matière de prévention des risques industriels ne pourra, en pratique, produire des résultats concrets que s'il répond à une triple exigence : favoriser le développement des partenariats, notamment par le dialogue social, dans une logique de responsabilisation de l'ensemble des acteurs ; tendre à une plus grande simplicité, dans le souci de garantir une mise en oeuvre effective des mesures ; aller vers l'équité, dans le respect des spécificités.
Le volet social de ce projet de loi répond, pour l'essentiel, à cette triple exigence, même si la commission des affaires sociales a cru souhaitable de le modifier ou de le compléter sur certains points.
En ce qui concerne la première exigence - favoriser le développement du partenariat -, je considère qu'un renforcement effectif de la sécurité au travail passe, d'abord, par un approfondissement des échanges entre l'ensemble des acteurs présents sur le site à risques. C'est un préalable indispensable à la responsabilisation de chacun.
Sur ce point, le projet de loi comporte indéniablement des mesures fortes et innovantes.
Ainsi, il encourage la concertation entre les entreprises donneuses d'ordre et les entreprises sous-traitantes, notamment par une évaluation conjointe des risques et une définition commune des mesures de prévention ou par la mise en place d'une formation d'accueil aux risques pour les salariés des entreprises sous-traitantes.
De même, il permet de développer l'implication des salariés dans le domaine de la sécurité, en renforçant le rôle de l'institution représentative du personnel central en la matière, le CHSCT, pour en faire un acteur de la sécurité industrielle à part entière. Mais l'implication des salariés passe également par une meilleure connaissance des risques. En cela, la mise en place d'une formation spécifique des membres du CHSCT sur les risques liés à l'activité de l'entreprise leur permettra de remplir leurs missions dans de meilleures conditions.
Il reste qu'il semble possible de favoriser davantage les partenariats. A cette fin, la commission des affaires sociales a formulé deux propositions très concrètes : l'une a pour objet de mieux associer le CHSCT et l'inspection des installations classées ; l'autre tend à renforcer le rôle du CHSCT en cas d'incident qui aurait pu entraîner des conséquences graves, et à développer ainsi le « retour sur expérience ».
La deuxième exigence est de tendre vers la plus grande simplicité possible. En effet, la réglementation en matière de sécurité au travail doit, avant tout, viser la simplicité afin d'être directement applicable et de prévenir ainsi efficacement les risques.
Le projet de loi apporte d'ores et déjà quelques éléments de clarification. Ainsi, il confirme le rôle de « chef de file » que doit jouer l'entreprise donneuse d'ordre. En revanche, il comporte des éléments d'une grande complexité : je pense, notamment, à la double formation du CHSCT. Sur ce point, la commission des affaires sociales exprime la crainte que celle-ci ne se transforme rapidement en une superposition d'instances, qui ne serait pas forcément gage d'efficacité. Aussi suggère-t-elle, sans revenir sur le nécessaire principe de l'élargissement du CHSCT à des représentants des entreprises extérieures, de simplifier sensiblement le dispositif proposé en renvoyant plus largement encore aux accords de branche.
M. Nicolas About. C'est très sage !
M. André Lardeux, rapporteur pour avis. Mais la simplicité passe également par la levée de certaines contraintes posées par le droit existant. Celui-ci n'autorise pas l'élargissement du CHSCT à des représentants d'entreprises extérieures et le projet de loi ne l'impose que pour les établissements classés Seveso « seuil haut ».
Aussi la commission des affaires sociales a-t-elle cru nécessaire de permettre un tel élargissement à tous les établissements comportant une installation soumise à autorisation - notamment les établissements Seveso « seuil bas » - dès lors, bien sûr, que les partenaires sociaux de la branche l'estiment souhaitable. D'ailleurs, des accords de branche le prévoient déjà, alors qu'ils ne sont pourtant pas habilités à le faire.
La troisième exigence est d'aller vers l'équité. L'exigence de sécurité au travail s'accommode mal d'une quelconque inégalité de traitement. Si l'on conçoit volontiers qu'il faille prendre en considération les spécificités des risques propres à l'activité de l'entreprise - c'est pourquoi le renvoi à des accords de branche me paraît primordial -, il faut pouvoir s'affranchir au maximum de certaines distinctions posées traditionnellement par le code du travail, je pense, notamment, à celles qui sont fondées sur la taille de l'entreprise ou sur le statut du travailleur.
C'est le cas, en particulier, pour la prévention des risques les plus graves, dont le risque industriel. Dans ce cadre, la politique de prévention doit avant tout être fonction du risque, et non d'un quelconque critère plus « institutionnel ». A ce titre, la commission des affaires sociales vous propose de prendre en considération non seulement la situation des salariés des entreprises extérieures, mais aussi celle des entrepreneurs individuels et des chefs d'entreprise non salariés, qui sont également directement exposés et parties prenantes au risque. Il nous a notamment semblé souhaitable de leur permettre de bénéficier de la « formation d'accueil ».
La commission des affaires sociales suggère également de rechercher cette plus grande équité quelle que soit la taille de l'établissement. Le projet de loi renforce le rôle des CHSCT en matière de prévention des risques industriels. Mais ces comités ne sont obligatoires que dans les établissements de plus de cinquante salariés, et ils ne sont d'ailleurs pas toujours constitués. Or, parmi les établissements classés Seveso « seuil haut », et malgré les risques encourus, un nombre non négligeable d'établissements ne comportent que peu de salariés et ne disposent pas toujours d'un CHSCT. Il nous est donc apparu nécessaire de favoriser l'implantation des CHSCT dans les « petits » établissements à risques, comme le législateur a déjà pu le faire au début des années 1990 dans un autre secteur à risque, le BTP.
Sous le bénéfice de ces observations, la commission des affaires sociales a émis un avis favorable à l'adoption des articles 5 à 11 du projet de loi, assortis des amendements qu'elle vous proposera. (Applaudissements dans les travées de l'UMP.)
M. Nicolas About. Pourvu que vous soyez entendu !
M. Roland Muzeau. Pas totalement !
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe Union pour un mouvement populaire, 98 minutes ;
Groupe socialiste, 51 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 20 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 18 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 15 minutes.
Dans la suite de la discusion générale, la parole est à M. Yves Coquelle.
M. Yves Coquelle. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, après la catastrophe meurtrière de l'usine AZF de Toulouse, qui a provoqué la mort de trente personnes dont vingt-deux salariés de l'usine, et qui a dévasté vingt-cinq mille appartements et maisons, il était urgent de renforcer les normes de prévention afin d'éviter que de tels drames ne se reproduisent.
La commission d'enquête a formulé de nombreuses propositions, qui constituent de réels progrès s'agissant de la protection des salariés et d'une meilleure implication des populations en matière de prévention.
Associant l'ensemble des acteurs - syndicalistes, industriels, associations, représentants des collectivités territoriales -, elle a aussi favorisé incontestablement un réel débat démocratique.
Ce projet de loi intègre certaines de ces propositions, et c'est une très bonne chose. Pour autant, nous regrettons qu'il n'aille pas plus loin ; il reste en deçà du domaine des améliorations possibles qui ont été proposées.
Ce texte demeure encore largement insuffisant sur l'implication des représentants du personnel et des intervenants extérieurs dans l'information, la consultation, la formation et l'évaluation des risques. Sur ce plan, les dispositions suggérées vont dans le sens d'un élargissement des missions du CHSCT, mais elles restent à mi-chemin des leçons de l'accidentologie des trente dernières années.
Il faut aller plus loin en sensibilisant et en formant tous les salariés des sites à risque, en inscrivant le suivi des moyens humains et financiers de prévention internes à l'établissement dans la durée et sous le contrôle du comité d'entreprise, et pas seulement du CHSCT.
Il convient également de limiter le rôle et les fonctions de la sous-traitance, de l'intérim, de la précarité, et de donner des moyens garantis par la réglementation du travail aux délégués du CHSCT, ainsi que des droits d'expression aux salariés.
Nous proposerons donc une série d'amendements en ce sens.
Il est révélateur que les coopérations entre les services de l'inspection du travail et ceux des installations classées pour la protection de l'environnement ne soient pas réellement organisées.
Quelle est la pratique tirée des témoignages de ces inspecteurs mais aussi des magistrats et des salariés ?
Le directeur de l'établissement et le cabinet du préfet s'entendent sur le report des délais.
L'« économiquement faisable » n'est pas discuté par les acteurs, alors que les enjeux de réduction du risque en amont concernent toute la collectivité.
Le chef d'établissement connaît les services de l'inspection du travail et l'inspecteur des installations classées, mais il ne les voit pas ensemble... Il connaît le cabinet du préfet, qui connaît les uns et les autres. Ce cloisonnement et ce secret ne sont plus supportables ! Ils constituent d'ailleurs un danger réel et une prise de risque supplémentaire.
Les salariés défendent leur emploi coûte que coûte, au risque d'y laisser leur vie et celle de leurs familles qui sont riveraines. Tout les invite à se taire.
Le chef d'établissement doit rendre des comptes de profitabilité à l'entreprise et à ses actionnaires. Il ne peut rien garantir au-delà du très court terme.
Les élus locaux seraient dépassés par les enjeux, écartelés entre la défense de l'emploi et la délivrance de permis de construire dans les zones à risques.
Les services de l'inspection des installations classées et ceux de l'inspection du travail manquent, les uns comme les autres, de moyens et sont débordés. Par ailleurs, leur parole et leur action sont étroitement contrôlées à tout niveau hiérarchique. Ils ne sont pas libres. Où en sommes-nous, madame la ministre, des créations de postes d'inspecteurs promises aux DRIRE ? Je note également la trop grande faiblesse des effectifs des inspecteurs du travail.
En cas de contentieux, les magistrats sont débordés et peu spécialisés.
En cas d'accident, les expertises succédent aux contre-expertises, alors que les victimes attendent la réparation des dommages subis. Ils ont besoin de comprendre ce qui s'est passé pour pouvoir aller de l'avant.
Le groupe communiste républicain et citoyen insiste sur deux aspects majeurs de la catastrophe de l'usine AZF de Toulouse, qui ont été passés sous silence. Tout d'abord, le stockage de produits non conformes dans le hangar 221, lieu de l'explosion, n'a fait l'objet ni d'un scénario d'accident ni d'une étude approfondie. C'est une faute majeure, car ces produits ne répondaient pas précisément aux exigences de qualité définies pour réduire les risques.
Il est également étonnant que seule l'hypothèse d'une « exploitation normale » du stockage dangereux ait été retenue. Il n'y aurait donc pas eu lieu de se préoccuper de l'hypothèse de l'exploitation anormale du stockage des produits, ne respectant pas les normes de qualité.
Le second enseignement que nous tirons de cette catastrophe est l'absence de liens entre, d'une part, l'étude de dangers et de risques prévus par les textes Seveso et, d'autre part, les travaux d'évaluation et de prévention des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs imposés aux chefs d'entreprise par les articles L. 230-1 et R. 230-2 du code du travail. Pourtant, il y aurait eu un intérêt à rapprocher ces deux évaluations pour analyser leur intérêt mutuel et leurs limites s'agissant du tronc commun des dangers d'exposition aux produits et des risques d'accidents. Surtout, le manquement à cette obligation, qui est prévue par la directive de 1989 sur la santé et la sécurité au travail, n'est sanctionné pénalement en France que depuis le décret du 5 novembre 2001.
Le développement de la conscience du risque et du débat nécessaire avec tous les acteurs concernés constitue également un axe de progrès : réunion publique obligatoire lors de la consultation sur les demandes d'autorisation complémentaires ; mise en place de comités locaux d'information et de concertation, les CLIC, pouvant faire appel à des experts et dotés de moyens par l'Etat.
Nous suggérons la tenue d'une réunion publique annuelle permettant de rendre compte de l'évolution de la situation, afin d'inscrire la conscience du risque dans la durée et de soumettre au débat les éléments nouveaux intervenus ou attendus d'une année sur l'autre.
Le troisième axe de progrès concerne la maîtrise de l'urbanisation autour des établissements à risque, avec l'instauration des PPRT, qui doivent permettre la résorption progressive des situations d'exposition aux risques.
Prescription de constructions ou interdictions, prescriptions de travaux afin de limiter l'exposition aux risques : toutes ces dispositions vont dans le bon sens.
De même, le droit de préemption urbain, le droit de délaissement, le droit d'expropriation constituent des mécanismes utiles.
Mais les questions qui se posent sont bien celles de savoir qui va payer, et combien ? Tout à l'heure, madame la ministre, vous avez évoqué l'Etat, les collectivités locales et les entreprises. Mais quelle sera l'importance de leur contribution ?
A ce sujet, l'article L. 515-19 du code de l'environnement se borne à renvoyer à la possibilité de conclure des conventions entre l'Etat, les exploitants des installations à l'origine du risque les collectivités territoriales et leurs groupements pour préciser leurs contributions respectives au financement des mesures.
L'expérience de Metaleurop, outre le fait que les patrons ont jeté à la rue des milliers de salariés et qu'ils laissent à la collectivité des friches polluées par plus de cent années d'exploitation, doit nous servir d'exemple. Si, en effet, lors de l'exploitation, nous n'assurons pas le respect de l'exigence d'internalisation des coûts sur l'entreprise à l'origine du risque, nous ouvrons toute grande la porte à des situations inacceptables !
Socialisation des pertes, privatisation des profits : cela suffit ! Pour limiter les dangers d'exposition aux risques, nous demandons que les travaux réalisés à l'extérieur de l'usine sur des établissements voisins ou des constructions riveraines soient mis à la seule charge des exploitants des installations à l'origine du risque, voire des autres exploitants d'installations classées dans lesquelles ces travaux sont réalisés.
S'agissant des conventions de l'article L. 515- 19 pour le financement des mesures de délaissement ou d'expropriation prévues, nous suggérons que les exploitants d'installations à l'origine du risque apportent une contribution égale à 50 % au moins du financement, le reste pouvant être financé à parts égales par l'Etat et par la région.
Le quatrième axe vise l'amélioration nécessaire des dispositifs d'indemnisation des victimes avec l'institution d'un délai maximum de trois mois et il précise le rôle du fonds de garantie, ce sont les articles 12 et 13 du projet de loi.
Nous nous interrogeons davantage sur la portée de l'article 16, qui complète le code de commerce en prévoyant l'insertion, dans le rapport annuel, de l'information relative à la capacité de la société à couvrir sa responsabilité civile vis-à-vis des biens et des personnes ainsi qu'à assurer la gestion de l'indemnisation.
Il s'agit d'une information aux actionnaires. Mais n'y a-t-il pas une erreur d'articulation avec l'article L. 516-1 du code de l'environnement ? Je le rappelle, cet article prévoit de subordonner la poursuite de l'activité à la constitution de garanties financières pour la surveillance du site, le maintien en sécurité, les interventions éventuelles en cas d'accident avant ou après fermeture, et les travaux de remise en état après fermeture.
Ces garanties imposées par le préfet selon un décret ne couvrent pas les indemnisations dues par l'exploitant aux tiers du fait de pollutions ou d'accidents causés par l'installation.
Nos amendements, madame la ministre, porteront donc sur l'ensemble de ces questions. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Francis Grignon.
M. Francis Grignon. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, mon intervention portera sur la première partie du projet de loi, celle qui est relative aux risques technologiques.
Après Seveso, en 1976, Bhopal, en 1984, avec ses milliers de morts, Mexico et ses centaines de morts la même année, Toulouse, plus proche de nous, nous rappelle que la sécurité n'est jamais acquise. Les technologies évoluent ; les hommes sont faillibles et les accidents, par définition, sont le résultat de la conjonction d'erreurs humaine, qui convergent en un même temps et en un même lieu.
C'est la raison pour laquelle je me réjouis de la prise en compte, dans ce texte, d'un véritable droit à l'information et d'une véritable responsabilisation de l'ensemble des intervenants. En matière industrielle, c'est l'homme qui est à l'origine des accidents : la nature n'a pas demandé à être polymérisée, fusionnée ou catalysée. C'est donc à l'homme de prendre conscience, à tous les niveaux, des risques qu'il court, des conséquences de ses actes et de la vigilance extrême qu'il doit avoir. Et si, malgré tout, l'accident arrive, après la compassion qui s'impose, c'est encore à l'homme de prendre conscience de la solidarité nécessaire et des enseignements à tirer pour l'avenir. Ce texte va bien dans ce sens, et je vous en remercie, madame la ministre.
Certaines activités sont nécessaires à notre développement économique. Il faut donc savoir les maîtriser tout en sachant qu'il n'existe pas de solution unique pour renforcer la sécurité des sites à risque.
C'est pourquoi j'adhère à la démarche de prévention que vous nous proposez selon les trois grands axes suivants : le droit à l'information, la maîtrise de l'urbanisation autour des établissements industriels à risque et, enfin, une plus grande implication des représentants du personnel et des entreprises extérieures dans la prévention et la gestion des risques.
L'information préventive du public, par le biais des comités locaux d'information et de concertation sur les risques technologiques, est un facteur de prévention à part entière.
La maîtrise de l'urbanisation, qui réduira incontestablement le nombre des personnes pouvant être exposées à un accident, est essentielle.
Les mesures de reconquête des terrains dans les zones les plus exposées aux risques sont rendues possibles par préemption, par délaissement ou par expropriation.
Le financement de ces mesures a été imaginé par répartition entre les exploitants des installations classées Seveso, les collectivités locales et l'Etat. Cette répartition devrait s'effectuer sur des bases volontaires et par convention. J'imagine que la répartition se fera à égalité entre les trois parties ! Pourriez-vous nous donner des précisions sur ce sujet, madame le ministre, ainsi que sur ce qui arriverait en cas de désaccord entre les parties ?
Le financement de ces mesures ne risque-t-il pas de susciter des charges supplémentaires pour les collectivités locales et les industriels ? A-t-on fait des simulations ? Qu'arriverait-il si la demande de délaissement s'accélérait ? Ne va-t-on pas décevoir les populations par manque de réactivité ?
Autant de questions qui demandent, madame la ministre, quelques éclaircissements.
La maîtrise du risque passe aussi par un renforcement de la participation des salariés, qui sont les premiers à être exposés. Sur les trente personnes qui ont perdu la vie le 21 septembre 2001, vingt-deux étaient des salariés d'AZF.
Cette participation est rendue possible par l'existence au sein des établissements classés Seveso, de comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, les CHSCT. Ces comités pourront désormais mandater un expert indépendant et saisir les inspecteurs des installations classées au sujet d'éventuels manquements. C'est parfait, car ces mesures, justes et nécessaires, prennent bien en compte la dimension humaine qui est au coeur de l'entreprise.
La dilution des responsabilités et l'accroissement des risques lié à l'usage grandissant de la sous-traitance obligent à une clarification de cette pratique. Je vous remercie d'apporter enfin une réponse efficace à ce problème par une formation ad hoc des sous-traitants aux pratiques de l'entreprise dans laquelle ils opèrent.
Ce projet de loi vise à diminuer le nombre des personnes pouvant être exposées aux risques d'accidents. Or la maîtrise de l'urbanisation passe aussi par une conception des bâtiments et des installations permettant une meilleure protection des personnes.
A ce titre, je souhaite mettre l'accent sur le fait qu'il faudrait une démarche beaucoup plus structurée en amont pour détecter tout ce qui est susceptible d'arriver. Les statistiques établies à partir de moyennes faites sur dix ans font apparaître qu'aujourd'hui on peut craindre trois accidents par an pour mille installations classées. C'est beaucoup !
Pour réduire les risques, nombre de procédures existent déjà, non seulement des études d'impact, obligatoires pour les installations soumises à autorisation, mais aussi des études de dangers. Cependant, un tel régime d'autorisation, une telle culture de l'autorisation même, fait que l'Etat est responsable dès lors que toutes les contraintes assortissant l'autorisation sont respectées et que l'industriel ne se sent plus responsable au-delà.
A mon sens, cette approche n'est plus suffisante. La démarche que je propose se veut plus dynamique et évolutive. Il s'agirait de mettre en place un diagnostic préalable complet relatif aux risques. Outre ce diagnostic, un carnet sur les risques, que l'on pourrait assimiler à une sorte de « carnet de santé » du site, obligerait à un suivi régulier - j'insiste sur ce point, ce suivi doit être « régulier » -, en fonction, bien sûr, des évolutions technologiques de production et de protection.
Un tel carnet permettrait de prendre en compte chaque situation locale en amont, de façon techniquement transversale, et de juger des problèmes en bloc. En somme, je propose une meilleure maîtrise du risque à la source. C'est en suivant cette démarche que l'on pourra fixer un objectif politique de réduction des risques.
Comme pour la route, on pourrait proposer, dans un premier temps, de passer par exemple de trois accidents pour mille à deux pour mille, voire mieux ; et l'on pourrait vérifier et publier les résultats, pour rassurer les populations en usant d'un langage direct et compréhensible par tous. Cela me paraît d'autant plus indispensable que, contrairement à ce qui se passait auparavant, les populations riveraines ne sont plus composées uniquement de personnes travaillant sur le site, et elles comprennent en conséquence moins bien les problèmes que leurs prédécesseurs.
Cette façon de faire en direction des populations me paraît désormais nécessaire si l'on veut permettre notre développement industriel - impératif, quelle que soit l'époque -, mais en toute transparence et de façon responsable vis-à-vis de populations.
Ce carnet de santé des sites devrait, bien sûr, être élaboré à partir de référents mis à disposition par des spécialistes tels que les collaborateurs de l'INERIS, l'Institut national de l'environnement industriel et des risques, ou ceux des DRIRE, par exemple.
Outre cet objectif de sécurité, le carnet de santé du site et du bâtiment pourrait intégrer en parallèle l'objectif de développement durable qui va souvent de pair avec le traitement des risques.
Ce carnet de santé permettrait, en outre - c'est très important -, une meilleure connaissance du site en cas de transformation, voire d'abandon. J'ai déposé un amendement en ce sens.
Même s'il est difficile de mettre en place une telle pratique au moyen d'un texte législatif, je suis persuadé qu'il faut profiter de l'occasion de l'examen de ce projet de loi pour envoyer un signe concret dans cette direction.
Je souhaite vraiment, madame la ministre, que ce texte permette aux entreprises, aux élus, à l'Etat et aux citoyens une prise de conscience de leurs responsabilités partagées. Je souhaite que ce texte soit le catalyseur d'une évolution culturelle du traitement du risque qui aura des effets bénéfiques pour tous, non seulement pour les risques industriels proprement dits, mais aussi pour tous ceux que nous devons maîtriser pour vivre intelligemment en société, que ce soit dans les entreprises, dans les zones à risques naturels, sur mer ou, tout simplement, au quotidien, sur la route ou dans nos foyers. (Applaudissements dans les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que dans certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Claude Biwer.
M. Claude Biwer. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, chacun d'entre nous a encore en mémoire les terribles images de l'explosion de l'usine AZF de Toulouse ainsi que des inondations qui ont touché plusieurs départements du sud-est de la France et d'autres régions encore, notamment la Picardie ou les Ardennes. Aux conséquences matérielles souvent importantes s'ajoutent la détresse morale et psychologique et un sentiment d'impuissance, voire de résignation lorsque, s'agissant des inondations, ces événements se répètent de façon de plus en plus rapprochée. Le Gouvernement a raison de saisir à bras-le-corps ces problèmes.
Je ne peux que souscrire aux objectifs de ce projet de loi, à savoir : une plus grande maîtrise de l'urbanisation à proximité des sites industriels dangereux, une lutte plus efficace contre les catastrophes naturelles, notamment les crues, l'amélioration de l'information du public et une meilleure réparation des dommages subis par la population.
S'agissant des risques technologiques, force est de reconnaître que l'on a trop longtemps fermé les yeux sur les risques évidents induits par la présence d'entreprises dangereuses : l'Etat, les élus, et même très souvent la population privilégiaient la préservation de l'emploi au détriment de la prise en compte du risque, voire de la santé publique.
Cependant, on le sent bien, l'échelle des valeurs est en train d'évoluer et, de ce point de vue, le moment me semble bien choisi pour faire également évoluer notre législation.
Vous proposez, madame la ministre, d'assurer un meilleur contrôle de l'urbanisation par l'instauration des plans de prévention des risques technologiques, les PPRT, qui devraient déterminer autour des sites classés Seveso les zones inconstructibles et celles où seront imposés des travaux de protection.
Je crois pouvoir affirmer qu'il est grand temps de se préoccuper de ce problème, mais je me demande si, dans certains cas, il n'est pas déjà « minuit moins cinq » !
Ainsi, j'ai été surpris d'apprendre par un reportage télévisé que, à l'origine, l'usine AZF avait été construite à la campagne et que, comme l'a fort opportunément rappelé notre collègue Henri Revol en commission, là comme ailleurs, l'urbanisation s'est petit à petit développée, de sorte que ce sont les populations qui se sont rapprochées, et non l'inverse. Or les demandeurs sont également des citoyens responsables.
Or, sans vouloir rechercher de façon hasardeuse des responsabilités ou exonérer les élus locaux, il faut tout de même rappeler que, pendant des décennies, les autorisations de construire ont été délivrées au nom de l'Etat.
Dans ces conditions, je trouve tout de même un peu curieuse la clé de répartition proposée pour le financement des procédures d'expropriation et de délaissement au voisinage immédiat des usines les plus dangereuses, procédures qui devraient permettre à ceux des propriétaires riverains les plus exposés qui le souhaitent de quitter la zone en étant indemnisés. En effet, le coût du rachat de leurs biens serait partagé entre les collectivités locales, l'industriel concerné et l'Etat.
Les collectivités locales peuvent, éventuellement, être tenues pour responsables de l'urbanisation la plus récente, mais qui n'est certainement pas la plus significative. L'industriel est, bien sûr, responsable de la dangerosité de son entreprise, mais n'est pour rien dans l'urbanisation. Quant à l'Etat, il devrait assumer, me semble-t-il, la plus grande partie de cette indemnisation, étant très certainement le principal responsable du coupable laisser-faire urbanistique.
A l'avenir, chaque cas devra être analysé, afin d'éviter une règle négative absolue qui pourrait pénaliser toute action économique.
S'agissant des risques naturels, notamment des crues, on ne peut que se féliciter des dispositions envisagées visant à ralentir les crues et à lutter contre l'érosion des sols.
Cependant, ainsi que l'ont souligné le président de la commission des affaires économiques et notre excellent rapporteur, il y a lieu de s'inquiéter du surcroît de responsabilités qui en résultera pour les maires dans le domaine des risques naturels, notamment de celles qui sont liées aux obligations d'information, à la surveillance des crues et aux travaux à mener sur les cours d'eau.
Quelle n'a pas été mon indignation, là encore, quand j'ai entendu, à l'occasion d'un reportage télévisé consacré aux inondations du Gard, que certaines familles sinistrées, dont on peu aisément comprendre la détresse, accusaient le maire de leur commune d'avoir failli à ses responsabilités non seulement, disaient-elles, du fait de lacunes constatées dans l'information préalable, mais aussi en raison de l'insuffisance des moyens mis en oeuvre pour prévenir les crues et lutter contre leurs conséquences !
Les pouvoirs publics, l'Etat, ne sauraient se satisfaire d'une information dispensée par téléphone, au moyen d'un message enregistré, et se considérer comme dégagés de toute responsabilité sans autre forme de communication : la santé, la vie même de nos concitoyens exigent mieux que cela.
Nous sommes bien placés pour savoir qu'il est de plus en plus difficile d'assumer les responsabilités de maire : je crains qu'avec ce projet de loi cette tâche ne soit guère facilitée.
Ainsi, nos collègues qui administrent des communes situées en amont des zones urbanisées et inondables pourront instituer une « servitude de sur-inondation » sur des terrains d'expansion des crues afin de faciliter la construction d'ouvrages de régulation des débits des cours d'eau jusqu'alors insuffisamment maîtrisés. En d'autres termes, on leur fait partager la responsabilité des conséquences de crues qui, en aval, dans les communes sinistrées, sont essentiellement dues à l'impéritie de l'Etat lors de la délivrance des permis de construire. Il est vrai qu'il s'agissait quelquefois, à l'époque, de lutter contre des effets de mitage, ce qui a conduit l'Etat à faciliter des constructions dans des vallées inondables où se sont installés - c'est vrai - nos villages actuels, sans que l'on se préoccupe le moins du monde des risques que nous évoquons aujourd'hui.
J'ajoute que ces « servitudes de sur - inondation » vont entraîner une diminution importante de la valeur des terrains en cause, dont seront victimes non seulement les exploitants agricoles et les propriétaires, même avec une adaptation du statut du fermage, mais aussi, dans certains cas, les communes, qui verront leurs revenus diminuer, la vocation de leurs terrains étant tout autre que préalablement.
Vous avez affirmé, madame le ministre, que la mise en place de cette servitude ferait l'objet d'une indemnisation. Pourriez-vous me préciser quelle forme elle revêtira et, surtout, qui la prendra en charge ?
Je souhaite, pour ma part, que les collectivités locales restent partie prenante de ces réflexions comme de ces orientations, voire de ces investissements futurs. Cela évitera très certainement des demandes abusives, sans pour autant empêcher certaines de ces communes d'être indemnisées quand leurs terrains perdront leur vocation initiale.
S'agissant du curage des cours d'eau, il est certain que sa réalisation périodique permettrait non pas, sans doute, d'éviter les inondations, mais d'en amoindrir les effets : là encore, vous mettez en avant la responsabilité des maires en affirmant que ces travaux doivent être effectués régulièrement grâce aux contributions des collectivités locales et des propriétaires privés. Mais force est de reconnaître que le curage des cours d'eau peut être ralenti du fait de l'opposition de certaines associations qui se préoccupent de la préservation de l'environnement, voire de certaines administrations qui arguent du passage de ces cours d'eau à travers des terrains domaniaux !
Les maires sont prêts à assumer leurs responsabilités ; encore faudrait-il qu'on leur en donne les moyens !
S'agissant de l'information du public, vous proposez, madame la ministre, que le maire d'une commune à risques assure l'information des habitants, par exemple sous forme de conférences communales. Il ne pourrait évidemment s'agir là que d'une information préventive : dans les situations de crise, on peut raisonnablement se demander si le maire est bien la personne la plus adéquate pour diffuser l'information en temps et en heure.
M. le président. De toute manière, c'est toujours lui le responsable !
M. Claude Biwer. Nous ne le savons que trop !
Cela pose un problème de fond - et cela ne vise pas nos sapeurs-pompiers, dont nous sommes très fiers. Certains de nos voisins européens disposent d'un service de sécurité civile autrement développé et équipé que le nôtre qui, il faut bien le reconnaître, nous fait cruellement défaut dans certaines situations de crise. Je n'ose imaginer, par exemple, ce qui pourrait se produire en cas d'incident très grave dans une de nos centrales nucléaires !
Madame la ministre, comme vous avez pu le constater, je partage en tous points les objectifs que traduit votre projet de loi, mais je crains que, une fois de plus, devant l'impécuniosité récurrente de l'Etat, ses conséquences financières ne soient supportées pour l'essentiel par les collectivités territoriales et que les maires ne se retrouvent en première ligne et sans atout pour mettre en application des mesures souvent impopulaires et assumer des responsabilités qui, en principe, ne devraient pas être les leurs.
J'ose espérer que la discussion de ce texte et les modifications qui lui seront apportées, notamment sur la proposition de notre rapporteur - et je le félicite de la très grande qualité de son travail -, seront de nature à apaiser mes craintes. Je pourrai ainsi, avec mes collègues du groupe de l'Union centriste, voter le présent projet de loi.
J'espère également que des amendements tendant à arrêter des mesures nouvelles viendront compléter ce texte, notamment dans le domaine du statut du fermage ou de la jouissance des terres nécessaires à la réalisation de travaux comme l'aménagement et la création de zones bétonnées ou de terres macadamisées, si utiles à nos entreprises, dont la compétitivité aussi a besoin d'être protégée.
Dans le coeur de chacun d'entre nous sommeille un défenseur de l'écologie. (Sourires.)
M. Daniel Raoul. Qu'il se réveille !
M. Claude Biwer. Chacun est soucieux de protéger la nature, c'est-à-dire notre avenir. Il nous appartient de prendre ensemble les bonnes mesures qui s'imposent, après un ajustement par voie d'amendements, et de décider les actions utiles pour l'avenir. (Applaudissements dans les travées de l'Union centriste et de l'UMP, ainsi que dans certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Fernand Demilly.
M. Fernand Demilly. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, ceux qui ont suivi les événements catastrophiques survenus ces dernières années dans le département de la Somme ne s'étonneront pas de ma participation à ce débat.
Nous connaissons malheureusement trop bien les conséquences des inondations : maisons endommagées, écoles, entreprises et zones agricoles dévastées, routes coupées... La liste est loin d'être exhaustive. C'est dire, madame le ministre, si votre projet de loi arrive à point, et nous nous en félicitons.
Le texte est d'autant plus intéressant qu'il vise à prévenir deux types de risques particulièrement dangereux pour nos populations : les risques technologiques et ceux qui sont liés aux caprices de la nature.
Si je tiens à saluer l'effort du Gouvernement en matière de prévention des risques technologiques, mon propos portera exclusivement sur l'appréhension des risques naturels.
Le projet de loi comporte, en son titre II, de nombreuses dispositions novatrices et tout à fait pertinentes pour la prévention des risques naturels, et il s'attache particulièrement aux risques d'inondations par débordement de rivières, dont le nombre et la gravité n'ont cessé d'augmenter au cours des dernières années.
La Somme, qui fut durement touchée par les inondations du printemps 2001 et qui vit toujours sous la menace de leur répétition, compte tenu de précipitations très supérieures à la moyenne depuis l'automne dernier, se réjouit de ces dispositions visant à développer la conscience du risque, à réduire la vulnérabilité des biens situés en zone inondable et à assurer une solidarité entre les zones urbanisées et leurs bassins versants.
Le syndicat mixte d'aménagement hydraulique du bassin versant de la Somme, qui vient d'être créé avec la participation du département, de 119 communes, de 5 communautés de communes, de 5 syndicats de rivière et de 10 associations syndicales autorisées, contribuera à l'information de la population sur le risque hydrologique et à la mise en cohérence des aménagements de protection. Soucieux de restaurer des zones d'expansion de crues en amont d'Amiens et d'Abbeville, il répondra naturellement à l'appel à projets lancé par votre ministère, madame le ministre.
Mais la Somme est également concernée par un autre risque naturel face auquel le présent projet de loi ne prévoit aucune disposition spécifique : il s'agit du risque lié à l'érosion marine, le recul du trait de côte - falaises ou estrans de sable et galets - pouvant, selon les cas, menacer des fronts de mer bâtis ou entraîner l'inondation, lors de fortes tempêtes, de zones submersibles.
Depuis les terribles tempêtes de février 1990, qui avaient provoqué la submersion de 3 000 hectares au sud de la baie de Somme et l'inondation de la ville de Mers-les-Bains, nous avons pu mesurer les difficultés qu'entraîne l'absence de compétence définie en matière de protection du littoral.
Ces difficultés, on les rencontre tout d'abord lors de la constitution d'une maîtrise d'ouvrage : les riverains étant évidemment dans l'incapacité d'agir, ce sont les communes qui se trouvent en première ligne et doivent ou bien se regrouper en syndicats intercommunaux, pour effacer des frontières artificielles, ou bien recourir à un syndicat mixte existant, comme ce fut le cas dans la Somme.
On rencontre ensuite des difficultés lors de l'élaboration du projet de protection. Le morcellement des maîtrises d'ouvrage conduit en effet à privilégier des solutions « égoïstes » par lesquelles chaque secteur s'efforce à l'autonomie, contribuant à « piéger » le transit littoral au détriment des secteurs situés, d'un point de vue sédimentologique, en aval : ainsi, le recours à des épis majeurs, s'il assure une bonne protection des plages de galets situées en amont, provoque en contrepartie une érosion accélérée à l'aval.
Enfin, on rencontre des difficultés lors du montage du plan de financement. Selon les régions, les contrats de plan prévoient des dispositifs financiers variés faisant appel, pour l'Etat, à des lignes budgétaires de plusieurs ministères - équipement, environnement, agriculture -, si bien que la mobilisation effective des crédits relève du parcours du combattant.
Le cas des communes du Tréport et de Mers-les-Bains me paraît illuster les limites de l'exercice : le projet de protection qui les concerne porte en effet sur un secteur littoral qui est traversé par la limite entre deux communes, Le Tréport et Mers-les-Bains, mais aussi entre deux départements, la Somme et la Seine-Maritime, et entre deux régions, la Picardie et la Haute-Normandie.
Bien entendu, et fort légitimement, chacun de ces acteurs a défini ses propres politiques en matière de protection du littoral, politiques qui ont été contractualisées avec l'Etat dans plusieurs contrats de plan et reprises dans les différents documents uniques de programmation, dits DOCUP, et dans l'objectif 2 pour le fonds européen de développement régional, le FEDER. La mise en oeuvre d'un projet de protection suppose donc que l'on parvienne à mobiliser simultanément les fonds inscrits dans deux contrats de plan Etat-régions, ceux qui sont ouverts au titre du FEDER par deux DOCUP, enfin, les crédits prévus par deux conseils généraux...
Pourtant, ces différents projets de protection du littoral concernent une même entité géosédimentaire qui va du cap d'Antifer, en Haute-Normandie, à la baie de Somme, en Picardie. Ils sont tous établis sur le domaine public maritime, qui relève de la responsabilité de l'Etat.
Dans ces conditions, il me semble qu'il serait à la fois parfaitement logique et éminemment souhaitable que l'Etat se voie reconnaître par la loi le rôle de maître d'ouvrage des travaux de protection du littoral. Cela lui permettrait en effet d'assurer la cohérence des projets développés pour une même entité géosédimentaire plurirégionale et de fixer - comme en matière de routes nationales, par exemple - des clefs de financement applicables sur tout le territoire national, sans que cela entraîne de transferts de charge à son détriment.
Madame le ministre, la France, jusqu'à présent, n'a pas mis à profit les débats parlementaires relatifs à la prévention de ces risques pour se doter des mesures législatives qu'avait pourtant déjà proposées l'un de nos illustres prédécesseurs, Victor Hugo. Le 27 juin 1846 celui-ci déclarait dans cette même assemblée : « L'objet de cette grande loi dont je déplore l'absence, le voici : maintenir, consolider et améliorer la configuration du littoral de la France... Chaque fois que cette question du littoral se présente à l'esprit, voici ce qu'elle offre de grave et d'inquiétant : la dégradation de nos dunes et de nos falaises, la ruine des populations riveraines, notre côte de France nue et désarmée... Vous le sentez, cette question a de la grandeur : elle est digne d'occuper au plus haut point cette noble assemblée. »
En conclusion, madame le ministre, je propose que cette mesure de clarification des compétences dans le domaine de la protection du littoral contre les risques liés à l'érosion marine, qui est de nature à simplifier et à rationaliser l'action des pouvoirs publics, vienne compléter le titre II du présent projet de loi, et j'ai déposé un amendement en ce sens. (Applaudissements dans les travées du RDSE, de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi qui nous est soumis comporte deux titres : le premier concerne la prévention des risques technologiques, le second la prévention des risques naturels ; il comprend également un volet assurantiel.
Après le temps de l'émotion et du recul nécessaire pour tirer les conséquences des événements qu'ont constitués l'accident de l'usine AZF de Toulouse - trente morts, dont vingt-deux dans l'entreprise - et les inondations qui se sont produites ces dernières années dans l'Aude, la Somme, le Gard, l'Hérault, le Vaucluse, les Bouches-du-Rhône, la Drôme et la Bretagne, est venu le temps de l'action.
Le volet législatif n'est qu'une partie d'un plan d'action plus large qui a pu être élaboré grâce à différents rapports, en particulier ceux de M. Jean-Yves Le Déaut et de la mission Essig, et il s'inscrit, pour les risques industriels, dans le cadre tracé par la directive Seveso II. S'agissant des risques naturels, des rapports parlementaires ou des propositions telles que celles de l'Association française de prévention des catastrophes naturelles, animée par M. Kert et par notre collègue Yves Dauge, ont alimenté ce texte. Le terrain a aussi été préparé, bien entendu, par un débat national et par des projets de loi portant sur les risques technologiques et sur l'eau.
Les réflexions sur l'accident de Toulouse ont conduit à quatre constats : le public n'est pas assez informé ; la proximité de zones à forte urbanisation a amplifié les dégâts : on a parlé de vingt-cinq mille logements touchés ; les salariés de l'usine et, a fortiori, les salariés des sous-traitants ne participent pas à la cogestion des risques ; enfin, notons que, dix-huit mois après l'accident, les indemnisations ne sont pas encore définitivement réglées.
En ce qui concerne les risques naturels, le projet de loi vise trois objectifs : réduire le danger en travaillant en amont ; réduire la vulnérabilité des personnes et des biens ; enfin, et ce n'est pas la moindre des choses, développer la conscience du risque.
La perception et la gestion du risque se heurtent dans notre société à un problème culturel, car elles sont marquées d'un mélange de fatalité et d'indifférence. Il faut les faire évoluer dans le sens d'une culture responsable et participative, ce qui nécessite une information de l'ensemble des populations concernées - qu'il s'agisse des salariés, bien entendu, mais aussi des riverains et des élus locaux - et suppose de leur part une prise de conscience du risque potentiel.
Le principe de précaution, qui est si souvent évoqué - et quelquefois galvaudé -, n'est qu'une version édulcorée du principe de prudence d'Aristote et ne saurait se réduire à l'objectif irréaliste du « risque zéro ». De plus, sa mise en oeuvre a un coût et peut lui-même présenter des risques importants, comme le drame de Toulouse l'a montré. C'est un principe d'action qui doit être utilisé face à un risque prévisible et quantifié.
Le problème culturel que je viens d'évoquer est lié au fait que le risque et la sécurité constituent une science à part entière : la cyndinique - tel est son nom - devrait être enseignée à l'université et les recherches dans ce domaine soutenues. Il faudrait d'ailleurs mettre en place une telle démarche dès l'école afin de développer l'apprentissage du risque au lieu de chercher - quelquefois jusqu'à l'absurde, et les exemples sont nombreux - à éviter tout risque à l'enfant, qui, par voie de conséquence, ne sait plus l'appréhender, le mesurer ni le gérer.
Mon collègue Marc Massion et moi-même cantonnerons nos propos au titre Ier, qui concerne les risques technologiques. Mes collègues Yves Dauge et Roland Courteau interviendront sur le titre II, relatif aux risques naturels. Enfin, André Vantomme abordera la question du rôle fondamental des salariés dans l'entreprise, et Marie-Christine Blandin celle de la pollution diffuse.
Les dispositions proposées s'appliquent aux 672 installations dites « Seveso seuil haut », alors que 1 245 installations sont classées Seveso, sur 63 000 installations classées soumises à autorisation.
Le projet de loi reprend parfois dans le texte - en tout cas dans l'esprit - le projet de loi présenté par MM. Jospin et Cochet et déposé au Sénat tendant à renforcer la maîtrise des risques technologiques, qu'il a complété par un volet concernant le droit des assurances en vue d'améliorer l'indemnisation des particuliers. Il s'inspire également du rapport Le Déaut.
Quelles sont les principales dispositions du titre Ier ?
La première concerne l'information du public sur les risques technologiques, qui sera renforcée, en particulier, par l'obligation faite aux commissaires-enquêteurs d'organiser une réunion publique ; de plus, les CLIC, autrement dit les comités locaux d'information et de concertation, recevront une base législative, et leur création sera généralisée à l'échelon des bassins industriels ; enfin, l'information sur les risques technologiques sera obligatoire en cas de transaction immobilière, qu'il s'agisse de location ou de vente.
La deuxième disposition vise à régler les problèmes d'urbanisme autour des sites Seveso existants. Il est proposé de résorber les situations héritées du passé, lorsqu'on laissait se développer l'urbanisation autour de ces sites - comme d'ailleurs autour des aérodromes. Dans l'article 4 est prévue l'élaboration par l'Etat d'un plan de prévention des risques technologiques, un PPRT, au plus tard cinq ans après la promulgation de la loi, ce plan déterminant un zonage en fonction du type des risques et de leur gravité. De plus, des règles d'inconstructibilité pourront être édictées et des travaux visant à renforcer la résistance aux risques imposés, et les collectivités locales pourront - et je reviendrai sur ce terme - faire jouer le droit de préemption urbain et le droit de délaissement, ou encore recourir à l'expropriation. Enfin, les industriels pourront se voir imposer des servitudes, dont ils assumeront la charge, lors de l'installation d'un nouvel établissement ou d'une modification engendrant des risques supplémentaires.
Madame la ministre, ces dispositions suscitent néanmoins un certain nombre de questions.
Concernant l'article 1er, quid du contenu et des intervenants lors des réunions publiques ? Par ailleurs, qui sera chargé de la publicité donnée à celles-ci ?
S'agissant de l'article 2, la composition et les conditions de fonctionnement des CLIC sont renvoyées à un décret en Conseil d'Etat, et vous avez affirmé, madame la ministre, que vous étiez ouverte à toute proposition sur ce sujet. De quels moyens l'Etat dotera-t-il ces comités ?
En outre, les CLIC ne doivent pas faire double emploi avec les secrétariats permanents pour la prévention des pollutions industrielles, les SPPPI existants, dont le champ géographique et l'objet sont différents. Il serait utile d'organiser un système d'échanges entre ces deux instances et d'en préciser les articulations. Nous proposons d'ailleurs un amendement en ce sens.
Enfin, le projet de loi est muet sur le financement des mesures les plus lourdes, et plus particulièrement sur la participation de l'Etat, qui instruit les autorisations et qui a délivré jusqu'en 1982 les permis de construire. Ce financement est renvoyé à des conventions facultatives entre l'Etat, les collectivités locales et les industriels ainsi qu'à un projet de loi qui sera examiné dans les dix-huit prochains mois. C'est, à mon avis, le talon d'Achille du projet de loi.
Les collectivités locales sont au coeur du dispositif de reconquête urbaine. Auront-elles les moyens d'assumer le coût des mesures foncières que sont la préemption, le délaissement et l'expropriation ?
Les actions visant à réduire les risques à la source ne sont pas évoquées. Elles constituaient pourtant un important volet du rapport sur la sûreté des installations industrielles : perfectionnement des études de danger, redéfinition des processus industriels, amélioration du retour d'expérience, etc. Nous vous proposerons donc un amendement visant à renforcer l'efficacité et la cohérence des études de danger.
Enfin, si le ministère de l'écologie a augmenté les dotations de l'INERIS de 6,8 % en dépenses ordinaires, il se contente de reconduire les autorisations de programme, ce qui pourrait à terme poser des problèmes. L'inspection des installations classées n'a pas bénéficié de créations de postes en 2003. Le Gouvernement s'est seulement engagé à créer 400 postes d'ici à 2007, ce qui portera, en principe, l'effectif à 1 400 pour 450 000 installations.
De plus, on doit se demander - vous le faites, madame la ministre - pourquoi l'article 11-1 de la directive Seveso II n'a pas encore été transposé. Cet article prévoit en effet un dispositif permettant de tester tous les trois ans les plans internes et externes, et, si nécessaire, de les réviser et de les mettre à jour.
Le groupe socialiste approuve les objectifs du titre Ier, mais attend des précisions, madame la ministre, sur l'implication, notamment financière, de l'Etat. Il veillera donc à ce que le texte ne soit pas édulcoré ou dénaturé lors de l'examen des amendements, nos propres amendements visant seulement à l'améliorer. (Applaudissements dans les travées du groupe socialiste et sur celles du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, après l'intervention de mon ami Yves Coquelle sur les risques industriels, je concentrerai plus particulièrement la mienne sur les risques naturels, c'est-à-dire sur le titre II.
Tout d'abord, sachez, madame la ministre, que nous regrettons l'assemblage dans un même projet de loi de deux grands domaines qui nécessitent des améliorations législatives essentielles et dont les problématiques nous semblent bien différentes.
M. Roland Muzeau. Oui !
M. Gérard Le Cam. Nous aurions, pour notre part, souhaité qu'un texte de loi soit entièrement consacré aux risques naturels.
Je crains en effet que nous ne disposions pas du temps nécessaire pour mener un véritable débat de fond sur les risques naturels, notamment sur les inondations, et, avant d'aller plus loin, je précise que notre réflexion portera essentiellement sur les risques liés à ces dernières parce qu'elles ont constitué, au cours des dix dernières années en tout cas, le phénomène le plus fréquent, le plus meurtrier et le plus coûteux. Cependant, nous ne devons pas oublier que d'autres phénomènes sont concernés, les affaissements de terrain par exemple.
Je suis, pour tout dire, assez réticent à une notion comme la « culture du risque », qui suppose que nous nous adaptions avec une certaine fatalité à la récurrence des catastrophes. Je substituerais volontiers à cette notion celle de « culture de la sécurité », qui témoignerait davantage de notre refus catégorique de nous habituer aux drames à répétition que nous avons connus ces dernières années, drames qui dévastent des départements entiers alors même que les causes ont été identifiées et que des remèdes sont connus.
Nous pouvons, en effet, lutter efficacement contre la récurrence de ces événements par le biais de la prévention. Dès 1995, notre groupe déposait d'ailleurs une proposition de loi en ce sens. A cette occasion, nous avions fait remarquer que le caractère répétitif des inondations tragiques excluait la fatalité.
Si, de ce point de vue, le présent texte apporte quelques réponses positives, il est néanmoins largement insuffisant et reste en deçà des exigences actuelles.
Bien sûr, l'organisation de réunions publiques d'information, la mise en place de schémas d'organisation de la prévision des crues au niveau de chaque bassin comme le travail sur la mémoire du risque constituent autant d'instruments de prévention utiles et nécessaires.
Bien sûr, la modification des pratiques agricoles inappropriées dans les zones sensibles d'érosion, l'incitation à l'implantation de haies et, surtout, la mise en place de zones de rétention et d'expansion des crues sont autant de mesures positives qui permettent de réduire les facteurs aggravants des crues, bien que, dans le Gard par exemple, les experts fassent observer que de nombreuses zones d'expansion possible de crues sont déjà occupées par la voirie ou par des constructions.
Mais c'est la mise en application de ces mesures qui risque de poser de réels problèmes si, comme le sous-entend le texte, l'Etat n'est pas prêt à aider financièrement les communes à faire face aux lourdes dépenses induites.
Dans bien des cas, les collectivités locales - auxquelles, de surcroît, n'est en général imputable qu'une faible part des responsabilités -, n'auront pas les moyens financiers de racheter, d'aménager et de valoriser les zones d'expansion possible.
Le maire de Nîmes exprimait ainsi ses doutes : « Il faudrait 90 millions d'euros pour terminer le plan de protection contre les inondations de Nîmes, pour un total de 160 millions d'euros. »
Or ce texte fait très nettement apparaître un désengagement financier de l'Etat et un report des dépenses sur les collectivités locales, placées devant des obligations qu'elles ne pourront pas assumer.
En effet, comment les communes pourraient-elles prendre financièrement en charge l'entretien des cours d'eau et des berges ? Pourtant, on sait pertinemment que le manque d'entretien du milieu naturel peut contribuer à accentuer le risque d'inondation.
Les ruptures de digues, également dues au manque d'entretien, constituent un facteur aggravant. Il serait nécessaire de procéder à l'étude de chaque cours d'eau pour évaluer l'état des digues et des berges.
Pour cela, n'en déplaise à certains, il faut des moyens humains et matériels. Malheureusement, la tendance n'est pas au développement de l'emploi dans les administrations départementales de l'équipement.
Au fond, ce projet de loi fait l'impasse sur les obligations de l'Etat en matière d'aménagement du territoire ou, pour le dire autrement, il confirme le désengagement de l'Etat face à ses responsabilités.
Les indemnités liées aux servitudes d'utilité publique prévues par la loi pourront-elles être financées par les collectivités locales ?
M. François Trucy. C'est le même contribuable !
M. Gérard Le Cam. Comment les petites communes, qui ne sont guère aisées, pourront-elles financer le droit de délaissement inscrit dans le projet de loi lorsqu'elles auront déterminé les zones de prévention ?
A la lueur de l'expérience de ces dernières années, il est impensable que l'Etat n'apporte par une importante contribution au financement de toutes ces mesures.
Par ailleurs, des efforts doivent être engagés dans d'autres domaines et, là aussi, l'Etat doit donner l'impulsion. Je pense, par exemple, à la recherche sur les matériaux et les techniques de construction des habitations.
En matière de revêtement des routes, certains types de goudronnage, plus poreux, facilitent l'évacuation des eaux.
M. Hilaire Flandre. Et la formation du verglas !
M. Gérard Le Cam. Ils sont plus onéreux, mais, dans le long terme, le gain pour la collectivité est assuré.
Dans le même ordre d'idées, il faut aider ceux qui entreprennent des travaux de prévention afin de diminuer la vulnérabilité de leurs bien, et ce en mobilisant tous les acteurs, y compris les compagnies d'assurance. Tel sera le sens de l'un de nos amendements.
Enfin, comment ne pas souligner la faiblesse du concours de l'Etat à l'indemnisation des victimes, qu'il s'agisse des particuliers, des collectivités territoriales ou des entreprises ?
A la suite des inondations dans le Gard, de nombreuses communes se sont lourdement endettées pour faire face aux besoins de reconstruction et de remise en état des immeubles afin d'assurer, dans les meilleures conditions possibles, le relogement des victimes.
Quant aux familles sinistrées, dans la Somme ou ailleurs, les plus modestes d'entre elles se sont retrouvées dans des situations d'extrême précarité du fait des retards et de l'insuffisance des indemnisations.
Nous pensons que la réparation des préjudices et des dommages subis lors de catastrophes naturelles de ce type doit, pour être la plus juste possible, reposer sur la solidarité nationale. En plus d'une aide financière directe, l'Etat doit prendre des mesures exceptionnelles pour alléger le poids financier de la réhabilitation et de la reconstruction des biens d'habitation endommagés. Telle sera l'objet de plusieurs de nos amendements.
Enfin, permettez-moi de souligner la faiblesse des dispositions relatives à la planification de la gestion des crises. Le rapport de la commission d'enquête sur les inondations dans la Somme avançait quelques propositions, comme l'élaboration par les communes de plans de secours en collaboration avec le préfet. Nous regrettons qu'un tel projet de loi ne consacre pas un chapitre à cette question.
Nous proposons, dans cette optique, que, lors du déclenchement d'une catastrophe naturelle, le préfet puisse immédiatement réquisitionner tous les logements, locaux d'habitation et de service du département afin d'assurer le relogement des sinistrés.
Nous considérons donc que ce projet de loi manque d'ambition. Au fond, il s'inscrit dans la problématique générale de la décentralisation engagée par le Gouvernement, laquelle contribue à l'étranglement financier des collectivités territoriales. Il est révélateur de l'absence de moyens consacrés à nos services publics dans le cadre de l'aménagement de notre territoire.
Autant le dire, l'insuffisance principale de ce texte est d'entériner une réelle absence de l'Etat alors qu'une loi de programmation, de prévention et de reconstruction des zones inondables serait nécessaire.
Cela supposerait plus de volontarisme politique et des mesures fondées sur la solidarité nationale pour gérer à la fois les situations de crise, la reconstruction après les inondations et des mesures de prévention s'inscrivant dans le moyen et le long terme.
Les solutions apportées aux problèmes soulevés par les risques naturels ne sont pas à la hauteur de la difficulté. Elles ne respectent pas l'autonomie financière et décisionnelle des collectivités locales. Elles garantissent insuffisamment les personnes et les biens concernés. Nous risquons donc fort de nous acheminer vers un vote négatif ! (Applaudissements dans les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Alduy.
M. Jean-Paul Alduy. Madame la ministre, nous engageons le débat sur un sujet majeur qui est au coeur des préoccupations, et même des angoisses, de la société française ; nous avons donc la responsabilité de construire ensemble, à partir de votre projet, une loi majeure, qui fera date, non seulement parce qu'elle doit compléter l'arsenal législatif existant - il y avait de vraies lacunes en matière de prévention des risques industriels -, mais aussi et surtout parce qu'elle doit marquer une rupture de doctrine. Il s'agit de changer la culture collective, celle des administrations, celle des élus, celle des organisations professionnelles, des entreprises et, finalement, des citoyens.
Cette loi fera date parce qu'au-delà de ses dispositions techniques, qu'il nous appartiendra au cours du débat d'amender, de corriger, voire de supprimer - c'est le rôle du Parlement -, au-delà de l'aspect législatif, c'est à un véritable changement culturel, en rupture avec les pratiques actuelles, qu'elle nous exhorte.
Là où il y avait face aux risques, en général mal analysés, une réglementation rigide, aveugle, inexpliquée et incomprise, là où il y avait une information souvent réduite aux commentaires à chaud des drames sur nos écrans, là où il y avait l'angoisse devant les fatalités d'une société industrielle et urbaine livrée à elle-même, vous proposez, madame la ministre, la « mise en conscience » de la société face aux risques par une information large, débattue, régulière, présente même au coin de la rue avec les repères de crues !
Vous proposez la solidarité avec la mise en place de moyens renforcés pour la réparation des sinistres, mais aussi et surtout pour corriger les erreurs du passé. Vous proposez une démarche de responsabilisation pour que chaque acteur de l'aménagement du territoire, jusqu'au citoyen de base, devienne « cogestionnaire du risque » et « producteur de sécurité ».
En quelque sorte, il s'agit de responsabiliser la société entière pour qu'elle accepte de regarder le risque en face et s'engage, sans doute sur plusieurs décennies, à corriger les erreurs des générations qui nous précèdent, car il faut affirmer ce constat : nous avons depuis deux ou trois générations, et plus particulièrement à partir des années soixante, construit une société à risques.
C'est l'urbanisation non maîtrisée de nos agglomérations qui, la plupart du temps, a rattrapé les industries à risques ; c'est la fermeture des mines qui a laissé des friches dangereuses ; ce sont les nouvelles formes de cultures à haut rendement qui ont détruit les haies et accéléré les ruissellements ; ce sont encore les techniques d'endiguement systématique des cours d'eau ou de canalisation des crues qui ont accéléré la vitesse et la concentration des crues sur les sites fragiles.
Ce sont les plans d'urbanisme, aveugles quant aux risques naturels et incapables de protéger l'agriculture périurbaine contre les pressions des promoteurs privés et publics, qui ont conduit des millions d'habitants à vivre dans des secteurs à risques, que les risques soient technologiques ou naturels.
Le paysage d'hier était le résultat d'une intervention de l'homme cohérente avec son expérience des dangers : villages sur les points hauts, maraîchages dans les terres d'expansion des crues, haies et canaux pour organiser le parcellaire. Ainsi, une trame foncière servait de fil conducteur pour les évolutions de nos bourgs et de nos campagnes, une trame qui imposait une cohérence naturelle avec les lois de la nature.
C'est l'explosion urbaine, la croissance accélérée du phénomène de la mobilité, les restructurations rapides de l'appareil de production qui ont abouti à la société à risques d'aujourd'hui.
Nos lois et nos documents d'urbanisme ont eu pour effet de faciliter l'expansion urbaine et l'accessibilité des zones d'habitat comme des zones d'activité plus que d'assurer la « durabilité » des transformations des territoires.
Ce n'est que très récemment, et très progressivement, que la notion de « développement durable » s'est imposée dans nos documents de planification.
Et encore, force est de constater que le nouveau dogme a été appliqué de façon autoritaire, rigide, et donc sans responsabiliser les acteurs de la transformation de nos territoires.
Chacun ici, madame la ministre, pourrait vous donner des exemples à la fois risibles et lamentables de la façon dont les PPR ont été élaborés - que dis-je, imposés ! - sans pédagogie, sans information réelle, sans concertation autre que formelle avec les maires, les associations ou encore les organisations professionnelles.
Votre projet de loi, madame la ministre, doit marquer une rupture avec les pratiques des administrations d'un Etat donneur de leçons qui laisse aux maires non seulement le poids de l'impopularité politique de toutes les interdictions de faire qu'il édicte sans jamais les expliquer, mais aussi la charge financière des mesures de prévention.
Au-delà du détail des articles - et certains méritent que l'on s'y attarde, car il faut éviter que les intentions, que j'approuve chaleureusement, ne soient contredites par une réglementation définissant des obligations financièrement inacceptables par les collectivités locales ou ayant pour effet d'accélérer les délocalisations industrielles, et donc de favoriser le chômage -, c'est l'architecture et l'esprit du projet de loi qui méritent notre approbation unanime.
Il s'agit tout d'abord d'informer pour gérer nos peurs et pour mobiliser les intelligences individuelles et collectives. L'organisation de réunions publiques dans le cadre des enquêtes publiques sur l'implantation d'une installation classée Seveso « seuil haut », la création d'un comité local d'information et de concertation autour de chaque bassin, l'information assurée tous les deux ans par les maires sur les conséquences de la mise en oeuvre - et sur l'état d'avancement de celle-ci - des mesures prévues dans les plans de prévention des risques, la pose de repères de crues ou encore la mention obligatoire du risque dans toutes les transactions doivent contribuer à développer des comportements préventifs.
Mais il s'agit aussi de combler un vide en adaptant aux risques technologiques les procédures des plans de prévention des risques naturels et en les étendant. A cette occasion, il nous faudra d'ailleurs revisiter les décrets et les circulaires relatifs à ces PPR et, sans doute, engager l'adaptation de nombreux plans déjà opérationnels.
Il s'agit aussi, et c'est la partie la plus novatrice du projet de loi, de s'engager à réduire la vulnérabilité des personnes et des biens dans les zones urbanisées.
D'une part, il s'agit de renforcer l'action des pouvoirs publics en amont des zones urbanisées : la construction d'ouvrages de régulation des débits permettra de réduire la valeur extrême des crues, de ralentir le rythme d'écoulement des eaux et même, lorsque c'est possible, d'accepter des terrains d'expansion des crues.
D'autre part, il s'agit d'instituer des mécanismes juridiques et financiers pour réduire la densité de la population dans les zones à risques.
Force est de vous en donner acte, le projet de loi que vous présentez est ambitieux et courageux, madame la ministre. Ambitieux et courageux,... et donc coûteux ! (Sourires.)
C'est là, madame la ministre, que le projet de loi inquiète.
Il inquiète les industriels, encore que le récent exemple de Metaleurop nous incite justement à modifier nos lois pour imposer la remise en état des sites industriels, et on pourrait dire la même chose à propos des risques propres aux sites miniers abandonnés !
Il inquiète nos concitoyens, encore que l'intervention du « fonds Barnier » pour financer l'achat de terrains hors des zones dangereuses ouvre des perspectives. A ce propos, un autre mécanisme, celui du crédit d'impôt - M. le rapporteur l'a évoqué - mériterait d'être exploré, car son efficacité n'est plus à démontrer en matière d'amélioration de l'habitat.
Il inquiète enfin les collectivités locales - les communes et les départements principalement - qui, déjà, n'arrivent plus à faire face à la croissance trop rapide des dépenses de sécurité - je pense évidemment aux SDIS - et qui vont, aux termes de la nouvelle loi, devoir assumer l'essentiel des coûts des travaux lourds, des expropriations et des droits de délaissement.
Madame la ministre, le Gouvernement devait, dans ce domaine comme dans tant d'autres, répondre rapidement à la demande de protection exprimée par nos concitoyens, par ceux qui ont été directement ou indirectement meurtris par les catastrophes récentes, mais aussi, plus généralement, par ceux - ils sont des millions ! - qui savent aujourd'hui qu'ils habitent ou travaillent dans des zones dangereuses. Vous y avez apporté une réponse rapide, en quelques mois à peine, et on vous reprochera sans doute d'être allée vite là où d'autres auraient multiplié les rapports d'experts, les commissions et les comités.
Vous avez agi politiquement, c'est-à-dire en montrant un chemin nouveau, en rupture avec les cultures et les pratiques précédentes, pour créer les conditions d'une mobilisation de notre intelligence collective, pour accepter les risques, mais en explorant toutes les pistes pour les réduire, pour engager la réparation des erreurs de l'urbanisation inconsciente, pour ouvrir la réflexion sur les nouveaux moyens de financement de la réorganisation des territoires et des habitats.
Votre projet de loi marque un tournant majeur dans la prise de conscience des contraintes du développement durable. Mais le chemin sera encore long et, sur ce chemin, nous avancerons d'autant plus vite que les collectivités locales, les communes, les EPCI compétents, les conseils généraux et les régions auront été réellement associés à l'élaboration des plans de prévention des risques, ce qui n'a pas été toujours le cas dans le passé, et que, surtout, l'Etat saura construire avec ces collectivités locales les partenariats financiers à la mesure des objectifs affichés par un texte dont je tenais à saluer ici l'ambition. (Applaudissements dans les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Arnaud.
M. Philippe Arnaud. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à la suite des récentes catastrophes, qu'elles soient naturelles ou industrielles, il nous fallait réagir pour renforcer les moyens de prévention et de protection des biens et des personnes et assurer une meilleure information du public. C'est l'objet fort louable, madame la ministre, de votre projet de loi.
Evidemment, l'Etat a le devoir de veiller à la sécurité des biens et des personnes. En conséquence, le Gouvernement et le Parlement doivent organiser cette sécurité et prévenir les risques afin de les réduire.
C'est ainsi que des règles, des normes sont définies pour conditionner l'exercice d'une activité. Oui, tout doit être fait pour prévenir le risque, mais peut-on prévoir et prévenir l'imprévisible ? Quand la norme, établie grâce aux leçons tirées de l'expérience et d'une meilleure connaissance des sources de risques, a été respectée, ne peut-on considérer que la prévention du risque a été assurée ?
Certes, il est nécessaire, de faire évoluer la norme en fonction de l'évolution des connaissances. Ainsi, on peut et on doit exiger du tailleur - pardonnez-moi, mes chers collègues, d'avoir choisi cette image pour illustrer mon propos ! - que le pantalon confectionné par ses soins tienne bien à la taille, et la prudence peut conduire à adjoindre à celui-ci une ceinture ou des bretelles ; mais est-il raisonnable d'ajouter des bretelles et une ceinture à un pantalon qui tient ? (Sourires.)
M. Eric Doligé. Là est la question !
M. Jean Chérioux. On peut maigrir !
M. Philippe Arnaud. Ainsi, alors même que les établissements classés doivent impérativement satisfaire aux normes, l'article 14 du projet de loi indique que « tout exploitant d'un établissement comportant au moins une installation figurant sur la liste prévue au IV de l'article L. 515-8 du code de l'environnement est tenu de faire procéder à une évaluation de la probabilité d'occurrence et du coût des dommages matériels aux tiers en cas d'accident ». C'est bien prévoir l'imprévisible, et ce de façon tellement aléatoire que la méthode ne peut être scientifique et que les conclusions seront donc peu fiables !
Nous sortons là du domaine du réel pour entrer dans celui du virtuel, nous quittons l'analyse des faits objectifs pour imaginer des hypothèses de risques, lesquels, s'ils étaient connus et identifiés, devraient nécessairement être supprimés.
Le flou artistique qui entoure l'article 14 me préoccupe également. Si cet article devait être maintenu, n'importe quel fonctionnaire zélé ou soucieux de se protéger disposerait, de même que les tribunaux, d'un vaste champ d'analyse et d'interprétation. Cela ouvrirait une voie royale aux intégristes, et c'est pourquoi nous proposons la suppression pure et simple de l'article 14.
Risques naturels, risques industriels et risques ménagers requièrent de notre part une attention particulière et constante. C'est un combat pour la vie que nous devons mener, un combat sans fin, dans lequel la victoire ne sera jamais totale ; mais le risque zéro n'existe pas. N'ajoutons donc pas des règles aux règles, des normes aux normes, ne mettons pas en place des procédures parfois inutiles et si complexes qu'elles portent en elles les germes de la paralysie de l'activité humaine, voire de la stérilité. Veillons en outre à ne pas porter atteinte à l'attractivité de notre territoire.
Par ailleurs, de vraies questions ne trouvent pas de réponses dans le texte, s'agissant notamment des moyens financiers qui permettront de faire face, par exemple, aux servitudes nouvellement créées ou aux indemnisations. Ce texte dégage quelques relents dogmatiques et doctrinaires, fussent-ils atténués, alors que nous devons aborder le domaine de la prévention et de la protection de l'environnement avec réalisme et pragmatisme.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, M. Yves Détraigne a conduit avec pragmatisme et avec une rigueur objective son difficile travail de correction de ce texte, qu'il a amendé de façon à le rendre plus réaliste. Afin que ne soit pas perdu le bénéfice de cet effort, je voterai le projet de loi, sous réserve de l'adoption des amendements de la commission, notamment de celui qui vise à la suppression de l'article 14. (Applaudissements dans les travées de l'Union centriste et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Marc Massion.
M. Marc Massion. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, bien qu'un projet de loi soit, par nature, de portée nationale, il est difficile de ne pas le rapporter à une situation locale lorsque cette dernière correspond exactement à son objet.
Sur le territoire de la commune du Grand-Quevilly, dont je suis le maire, est implantée une usine AZF - Grande-Paroisse, de deux à trois fois plus importante que celle de Toulouse et qui fabrique les mêmes produits. A proximité se trouvent quatre autres établissements de type Seveso, dont trois sites de stockage de carburant. Connaître cette situation locale particulière me permet peut-être de mieux mesurer les insuffisances du texte et, surtout, les difficultés que rencontrera son application.
Je livrerai maintenant quelques observations et formulerai des questions pratiques.
Au cours du débat, en particulier en écoutant les interventions de Mme la ministre et de M. le rapporteur, si j'ai beaucoup entendu évoquer la nécessité de responsabiliser les salariés des entreprises et les populations, je n'ai pas entendu parler de la responsabilité de l'industriel. Pourtant, c'est d'abord à lui qu'il revient d'assurer la sécurité au sein et autour de l'entreprise, et je regrette que ce principe ne soit pas affirmé.
A titre d'exemple, je ne trouve pas normal qu'un industriel ne consente à effectuer des travaux de sécurité dans son entreprise que parce qu'il est mis en demeure de le faire par le préfet, sous peine de fermeture ou de cessation d'activité. Auparavant, il avait reçu des avertissements, des observations, ce qui signifie que, au fil des mois, le risque s'est aggravé.
Pourtant, bien qu'il n'ait pas respecté les règles de sécurité, l'industriel ne sera pas inquiété, et il n'agira que sous la menace de fermeture.
Un tel comportement est-il dicté par un souci d'économie ? Pour ma part, je pense que, en définitive, il se révèle plus coûteux de réaliser les travaux avec retard. Cela étant, la responsabilité de l'industriel aurait-elle été seule engagée si un incident était survenu ? Celle de l'Etat, qui n'a pas été en mesure de faire respecter les règles de sécurité, n'aurait-elle pas été elle aussi en cause ?
Quoi qu'il en soit, le terme « responsabilité », absent du projet de loi, devrait y figurer, avec l'affirmation de la responsabilité de l'industriel.
Au regard de la description que j'en ai faite, madame la ministre, on aurait pu imaginer que la situation locale à laquelle je me réfère était figée. Or il n'en est rien ! Actuellement est instruit un dossier en vue de l'extension de l'un des sites de stockage de carburant que j'évoquais tout à l'heure. Les différentes communes concernées, dont la mienne, ont émis un avis défavorable. Le préfet peut passer outre et imposer l'extension, certes, mais je peux refuser le permis de construire. Qui tranchera, madame la ministre, dans un tel cas de litige entre l'industriel, l'administration et les collectivités locales ? Votre texte n'apporte aucune réponse.
Par ailleurs, trouvez-vous normal que les services de l'administration souhaitent constituer un stockage de produits très faiblement radioactifs sur le site AZF Grande-Paroisse ? Les scientifiques affirment que cela ne crée pas de risque nouveau, sauf à ce que, comme le disait tout à l'heure l'un de mes collègues, l'imprévisible se produise... Comment annoncer à la population que, là où existe déjà un risque majeur, on va stocker des produits très faiblement radioactifs ? Madame la ministre, j'ignore qui prend actuellement les décisions dans ce genre de situation, mais le projet de loi que vous nous présentez ne m'apporte aucun éclaircissement à cet égard et ne définit pas les responsabilités. Je souhaiterais, pour ma part, que l'avis des collectivités locales, qui représentent les populations, soit pris en compte de façon prioritaire.
S'agissant de l'information et de l'urbanisation, des dispositions s'appliquent déjà. Elles sont insuffisantes et incomplètes, et j'approuve certaines mesures du texte visant à combler ces lacunes.
En ce qui concerne tout d'abord l'information, nous avons diffusé en décembre 2001 - non pas à cause de l'explosion de l'usine AZF de Toulouse en septembre de la même année, mais parce qu'il s'agissait d'une actualisation normale - un document communal de synthèse, un document d'information communal sur les risques majeurs et un document général de la préfecture auprès des 11 000 foyers que compte ma ville, et cela aux frais, bien entendu, de cette dernière. Cette démarche est à mes yeux plus réaliste que la diffusion d'avis et de recommandations d'un comité à la composition quelque peu hétéroclite, dont les membres émettront des opinions souvent divergentes, voire opposées.
En outre, vous avez évoqué, madame la ministre, la possibilité, l'obligation même, de tenir une réunion publique s'adressant aux riverains dans le cadre de l'enquête publique portant sur une extension d'activité ou de site existant. Mais qu'entendez-vous par « riverains », madame la ministre ? Ce terme peut viser de cent à trois mille habitants selon la définition retenue. En l'absence d'aucune autre précision dans le texte, le mot « riverains » ne signifie absolument rien.
S'agissant maintenant de l'urbanisation, des contraintes existent déjà. Le préfet de mon département m'a ainsi envoyé, en décembre dernier, un arrêté fixant les périmètres de risque et les périmètres de danger - les périmètres Z 1 et les périmètres Z 2. Cependant, si j'ai bien compris, le projet de loi prévoit l'instauration d'un plan de prévention des risques technologiques, le PPRT. Celui-ci se substituera-t-il au dispositif actuel ? Dans l'attente de son entrée en vigueur, qui peut demander jusqu'à cinq ans, que pouvons-nous faire à l'échelon communal ?
A cet égard, je voudrais exprimer les plus vives réserves quant au droit de délaissement. Apparemment, la commune aurait la faculté de recourir au droit de délaissement sur proposition du PPRT. Me confirmez-vous, madame la ministre, qu'il s'agit bien non pas d'une obligation, mais d'une possibilité qui sera offerte aux communes ? En effet, ce dispositif ne sera pas forcément très utilisé, mais, en cas d'emballement à la suite d'un accident, je crains fort, à l'instar d'un certain nombre de mes collègues, que les communes ne doivent affronter seules les difficultés financières qui se présenteraient alors.
Il me semble d'ailleurs dangereux, sur le plan psychologique, de déclarer que vingt ou trente ans seront nécessaires pour assainir la situation, car cela signifie que, pendant ce laps de temps, on laissera en connaissance de cause des personnes habiter en zone de risque, pour des raisons financières. Je vous laisse imaginer la réaction des intéressés !
Je regrette également que le texte ne fasse pas mention des conséquences de l'existence de sites à risque pour le développement économique des zones environnantes. En effet, on constate actuellement un blocage de ce développement autour des sites à risque, ce qui nuit bien sûr aux communes et aux agglomérations concernées. Or le projet de loi ne prévoit rien à cet égard. Pourtant, nous sommes confrontés localement à des difficultés, madame la ministre, et des évaluations circulent en matière de nombre d'emplois à l'hectare. Est-ce ou non légal ? Ce point est-il laissé à l'appréciation du préfet ? Ce sujet révèle des insuffisances.
J'indiquerai pour conclure que votre texte comporte des mesures qui vont dans le bon sens, madame la ministre. Il permettra de combler un certain nombre de lacunes ; cependant, des difficultés d'application apparaîtront. Nous savons tous que le risque zéro n'existe pas, mais, pour s'en rapprocher, il faut prévoir et beaucoup intervenir en amont.
Ne croyez pas que je m'oppose à l'industrie : dans les vingt-quatre heures qui ont suivi la catastrophe de Toulouse, j'ai fait diffuser dans tous les foyers de ma commune un document affirmant la poursuite de l'activité économique sur le site AZF Grande-Paroisse, avec une plus grande sécurité pour les salariés et la population. Cela étant, ce qui est primordial, je le répète, c'est la responsabilité de l'industriel, qui ne peut être exonéré de ses fautes. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Henri Revol.
M. Henri Revol. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'ère industrielle a connu beaucoup de drames malgré une abondante législation et un encadrement très serré des activités du monde du travail. A la suite de la terrible catastrophe de Toulouse, votre prédécesseur, madame la ministre, avait annoncé ce projet de loi et l'on avait failli légiférer sous le coup de l'émotion. Même si le souvenir de ce désastre industriel est encore très présent dans nos pensées, notamment l'épreuve des familles qui ont été durement touchées, vous avez, madame la ministre, pris le temps de la réflexion en reformulant un projet de loi trop hâtif.
Les phénomènes naturels ont également, de tout temps, engendré des drames : ainsi, les inondations survenues récemment dans le Midi ont eu de terribles conséquences, et ce malgré une connaissance ancestrale de la nature.
La législation est-elle la réponse pour se prémunir contre les risques de toute nature encourus par nos sociétés humaines ? Les médecins de montagne ont récemment attiré l'attention sur leurs conditions d'exercice et ont cité à cette occasion des chiffres éloquents : il y a eu, pendant la saison de ski de l'an dernier, 150 000 accidentés parmi les pratiquants de sports d'hiver et l'on compte chaque année plusieurs dizaines de morts dans des avalanches ou lors d'excursions en montagne. A ma connaissance, pourtant, les chutes de neige dans les massifs montagneux ne font pas débat. Cependant, quelques centimètres de neige, voire quelques millimètres, sur les réseaux routiers ou autoroutiers et les embouteillages qu'ils ont engendrés chez les vacanciers qui rentraient nombreux à leurs domiciles ont mobilisé tous les médias pendant des jours, et nécessité un nombre incalculable de réunions de responsables à tous les niveaux, depuis les plus petites subdivisions de l'équipement jusqu'au ministre, qui a dû beaucoup s'investir personnellement.
Alors, nous voici face à un supplément législatif en matière de prévention des risques. Après tout, s'il permet de perfectionner le dispositif actuel sans entraîner de contraintes risquant de paralyser les activités humaines, aussi bien dans le domaine industriel qu'en matière de développement des collectivités locales, pourquoi ne pas l'envisager ?
Dans cette perspective, je soutiendrai nombre des amendements proposés par nos rapporteurs, dont je salue le remarquable travail effectué en peu de jours afin d'aboutir à un texte raisonnable.
Je ne m'attarderai que sur quelques points.
Le texte prévoit, dans son article 2, au titre Ier, la création de « comités locaux d'information et de concertation sur les risques ». C'est une bonne mesure si j'en juge par l'expérience positive de tels comités auprès des installations nucléaires de base. Il faudra toutefois veiller à ne pas enfermer leur composition dans un carcan trop rigide, et laisser une certaine latitude au préfet pour tenir compte des particularités locales.
Il est précisé que ces comités pourront faire appel aux compétences d'experts « reconnus ». Cette faculté de recourir à des experts est également prévue à l'article 10 du présent projet de loi pour les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, sous l'appellation proposée d'« experts en risques technologiques ».
Je m'interroge, et avec moi, je le crois, un certain nombre de mes collègues, sur la définition à donner aux notions d'« expert reconnu » et d'« expert en risques technologiques ». Il faudrait, me semble-t-il - et je souhaite connaître votre point de vue, madame la ministre -, donner un contenu plus précis à la notion d'expert. J'ai en effet à l'esprit des exemples dans lesquels des commissions d'information ont confié des études à des experts membres d'associations engagées qui étaient des militants d'une cause et mettaient à profit leurs connaissances scientifiques pour argumenter en faveur de cette cause, loin de toute préoccupation relevant de l'objectivité.
M. Jean-Claude Carle. Absolument !
M. Henri Revol. Ne faudrait-il pas que les experts soient agréés par les pouvoirs publics, l'agrément n'étant accordé qu'après un examen rigoureux de leurs compétences et de leurs références ?
Un autre point m'interpelle, et je me fonde sur une longue expérience d'élu local ayant souvent été confronté aux enquêtes d'utilité publique : c'est l'obligation prévue par le projet de loi d'organiser une réunion publique lorsqu'il s'agit d'un projet d'installation Seveso « seuil haut ». L'intention est louable, mais sa concrétisation me paraît hasardeuse. En effet, le commissaire enquêteur désigné par le tribunal administratif peut être un bon expert du domaine concerné, mais un très mauvais animateur de débats publics.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. C'est vrai !
M. Henri Revol. J'ai plusieurs exemples récents de réunions publiques organisées dans le cadre d'une enquête, dans l'espoir d'apporter un « plus » au débat démocratique, qui ont tourné au désastre. Ainsi, dans une salle de quatre cents personnes, le nombre d'habitants du secteur concerné a été estimé à une petite centaine. S'y ajoutaient trois cents personnes tout à fait étrangères aux environs immédiats de l'installation, mobilisées par des associations, organisées en véritables bandes de hooligans, empêchant les promoteurs du projet de s'exprimer, face à un commissaire enquêteur âgé et totalement dépassé qui ne pouvait conduire la discussion, le tout donnant lieu à un débat impossible qui s'est terminé dans la confusion la plus totale. Personnellement, il me semble donc plus judicieux de ne pas rendre obligatoire l'organisation de ce type de réunion, rien n'interdisant d'organiser une telle réunion si les acteurs locaux la jugent utile et possible.
Un point très important du projet de loi concerne le contrôle de l'urbanisation et l'expropriation et le délaissement.
S'agissant du contrôle de l'urbanisation, il serait souhaitable de mettre les usines à la campagne et de construire des infrastructures de liaisons rapides entre les installations et les quartiers d'habitation. Il est étonnant que cette idée ne soit pas venue aux industriels. Dans mon département, la Côte-d'Or, il existe une vaste zone où la densité de population est de l'ordre de quatre à cinq habitants au kilomètre carré. Malgré tous les efforts des élus, toutes tendances confondues, depuis trente ans, nous ne parvenons pas à trouver des entreprises, qu'elles soient ou non classées, susceptibles de s'implanter. Nous avons même été candidats pour une prison ; notre candidature n'a pas été retenue. N'est-il pas illusoire de croire que les usines s'implanteront loin de l'habitat ? Mais soyons optimistes et, en effet, si nous arrivons à trouver des candidats, prenons des mesures pour ne pas construire leurs installations trop près des habitations.
En ce qui concerne l'expropriation et le délaissement, qui devraient permettre aux propriétaires riverains les plus exposés de quitter la zone en étant indemnisés, je m'interroge - et j'ai constaté que de nombreux collègues s'interrogent également à cet égard - sur la capacité des collectivités locales à participer au financement, comme je m'interroge sur l'empressement que mettront les entreprises à alourdir leur charge d'investissement si, par ailleurs, elles ont la possibilité de s'implanter dans un autre pays européen moins exigeant.
Voilà, madame la ministre, mes chers collègues, les quelques remarques que je souhaitais formuler sur ce projet de loi. J'espère qu'il pourra être largement amendé, comme le proposent notamment MM. les rapporteurs, afin qu'il constitue un véritable progrès dans le domaine de la prévention des risque technologiques et naturels, sans paralyser le développement économique ni le développement de nos collectivités locales. (Applaudissements dans les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Amoudry.
M. Jean-Paul Amoudry. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dans le contexte des catastrophes technologiques et naturelles que notre pays a connues au cours de périodes récentes et que nous avons toutes et tous à l'esprit, j'accueille très favorablement, bien sûr, l'initiative gouvernementale ayant pour objet d'améliorer la sécurité publique et de limiter les atteintes aux biens.
Or, si cette finalité recueille naturellement l'adhésion, ce projet de loi soulève, compte tenu de l'ampleur des moyens nécessaires à son application, quelques interrogations. Celles-ci, je le précise, doivent être comprises non pas comme une contestation des orientations de ce projet de loi, mais bien comme un appel à prendre en compte, de manière anticipée, les données objectives qui pourraient compromettre l'efficacité des mesures prévues par ce texte.
Je consacrerai mon intervention à la problématique des risques naturels et m'intéresserai, d'abord, aux dispositions du texte aux termes desquelles l'Etat apportera aux communes le concours de ses services, ainsi que les moyens nécessaires à la mise en oeuvre des obligations nouvelles qui s'imposeront aux collectivités.
La représentation nationale comme les collectivités territoriales ont besoin d'être éclairées sur la nature des soutiens et des conseils sur lesquels pourront s'appuyer les responsables locaux.
En particulier, s'agissant des zones de montagne, est-il prévu d'étendre les compétences du service de restauration des terrains en montagne, le RTM, et de faire appel aux directions départementales de l'équipement ou de l'agriculture, ou encore à d'autres services experts de l'Etat ?
Cette question est d'autant plus essentielle que de récents travaux, conduits au Sénat, sur les zones de montagne rappellent que le RTM, qui est une émanation de l'Office national des forêts, n'est que partiellement présent sur le territoire montagneux de notre pays.
J'en viens au volet financier.
En premier lieu, les dispositions du projet de loi prévoient de faire appel à la taxe départementale sur les espaces naturels sensibles, la TDENS, prévue à l'article L. 142-2 du code de l'urbanisme pour financer la prévention contre les risques.
Cette perspective inspire de vives réserves à l'élu départemental que je suis, confronté aux difficultés de couvrir, au moyen de la TDENS, les multiples interventions qu'imposent la sauvegarde des espaces naturels et leur ouverture à un public de plus en plus nombreux.
J'observe, plus généralement, que le financement de la plupart des actions et mesures est mis - expressément ou implicitement - à la charge des communes qui devront assurer les conséquences de décisions qui, elles, relèveront de la compétence de l'Etat.
Cette séparation entre l'autorité chargée de dire le risque et celle qui est chargée de financer sa neutralisation ne risque-t-elle pas de donner lieu à des oppositions ou à des incompréhensions entre les représentants de l'Etat - légitimement soucieux d'assurer la protection maximale des personnes et des biens - et les élus locaux dont les collectivités auront des difficultés pour faire face aux implications financières des mesures prises ?
A cet égard, madame la ministre, il ne semble pas que ce projet ait donné lieu à une étude d'impact, d'où les questions que vous nous posons.
Pourriez-vous toutefois préciser de quels moyens disposera le Fonds de prévention des risques naturels, dont le champ d'intervention est fortement élargi par l'article 26 du projet de loi ?
Enfin, à l'heure de l'acte II de la décentralisation, je m'interroge sur l'articulation entre le dispositif de prévention proposé et le niveau de collectivité en charge de l'aménagement du territoire. En effet, si les lois de décentralisation du début des années quatre-vingt ont confié aux conseils régionaux des compétences en matière d'aménagement du territoire, le projet de loi que nous examinons ne prévoit pas leur implication dans le dispositif de prévention des risques naturels. Pourriez-vous, madame la ministre, nous éclairer sur ce point et nous renseigner sur les coordinations éventuelles entre ce texte et les futurs projets de loi organique que le Parlement sera amené à examiner en application de la réforme constitutionnelle ?
Tout en n'oubliant pas de féliciter MM. les rapporteurs pour leur excellent travail et de vous remercier par avance, madame la ministre, de vos réponses concernant les points soulevés, j'achève mon propos en soulignant que, si l'amélioration de la sécurité des personnes n'a bien sûr pas de prix, toute loi nouvelle ne peut constituer une véritable avancée que si les moyens qu'elle prévoit sont en rapport avec les obligations nouvelles qu'elle crée. (Applaudissements dans les travées de l'Union centriste et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. André Vantomme.
M. André Vantomme. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, pour bien saisir la portée du texte qui nous est soumis, je crois nécessaire d'évoquer d'abord - et c'est un sujet toujours fortement médiatisé - le contexte général des risques et accidents du travail et, ensuite, la genèse de ce projet de loi pour en dégager les lignes de force mais aussi les limites.
Je ferai une remarque liminaire : ce texte ne concerne que les dispositions applicables aux sites Seveso « seuil haut ». Tant mieux pour eux, mais c'est bien regrettable pour les autres, même si cette observation doit être tempérée par les évolutions législatives et jurisprudentielles récentes.
En 1994, selon la CNAMS, le nombre d'accidents du travail avec arrêt s'est élevé à près de 668 000. En 2001, il est passé à plus de 751 000. Le nombre d'accidents mortels s'est élevé à 717 en 2000. Quant aux maladies professionnelles, elle sont en hausse constante, passant de 6 200 en 1988 à près de 40 000 en 2001, soit une hausse d'environ 700 %. Ce chiffre, qui inclut, bien sûr, les victimes de l'amiante et des éthers de glycol, doit être relativisé par trois facteurs : la pénurie de médecins du travail, les pressions exercées sur ceux-ci par les employeurs et une sous-déclaration chronique des accidents et maladies liés à l'activité professionnelle, les employeurs ne souhaitant pas voir leurs cotisations augmenter.
Par ailleurs, certaines branches d'activités gardent un taux élevé d'accidents du travail. En 1999, sur un total interprofessionnel de plus de 717 000, la métallurgie en a compté plus de 100 000, le BTP plus de 122 000, l'agroalimentaire près de 122 000, et le transport-manutention plus de 60 000.
La prévention doit donc être un objectif général, et ne pas viser les seuls sites à risques, où les accidents peuvent provoquer des catastrophes touchant des victimes à l'extérieur de l'enceinte des établissements. Les entreprises de toute taille et de toute nature sont directement concernées.
C'est pourquoi, pour l'ensemble des entreprises, le gouvernement précédent avait commencé à consolider la réglementation. Il a d'abord organisé la mise en oeuvre, à compter du 8 novembre 2002, du décret du 5 novembre 2001 qui instaure l'obligation de formaliser dans un document unique les résultats de l'évaluation a priori des risques qui incombent à l'employeur. Cet inventaire comprend une identification des dangers et une analyse des risques auxquels peuvent être exposés les salariés, y compris les risques de nature psychosociale, tels le stress ou le harcèlement.
Ce document doit être mis à jour régulièrement, laissé à la disposition de la médecine du travail, des représentants du personnel ou, à défaut, des salariés. Ce travail d'évaluation doit ensuite contribuer à élaborer le programme annuel des préventions des risques professionnels auquel est associé le CHSCT dans les établissements de plus de cinquantre salariés où il existe. L'employeur est tenu à une planification de la prévention. Cette obligation est assortie de sanctions.
Sur un plan général, on peut aussi citer l'accord « Travail temporaire » signé le 26 septembre 2002, dont on ne retiendra ici que l'essentiel mais qui a pour principal intérêt de prendre en compte la situation de faiblesse particulière des travailleurs intérimaires au regard de la sécurité dans l'entreprise utilisatrice. Cet accord prévoit la mise en oeuvre d'un programme triennal de prévention pour la branche du travail temporaire. Les grandes entreprises de travail temporaire de plus de cent permanents doivent disposer d'un « interlocuteur sécurité » dans les entreprises utilisatrices. Un tableau de suivi des accidents du travail sera tenu, et le CHSCT de l'entreprise de travail temporaire pourra être invité par le CHSCT de l'entreprise utilisatrice en cas d'accident grave.
Le droit de retrait en cas de danger grave et immédiat, qui est une disposition importante du code du travail, est ouvert aux intérimaires dans certaines conditions, sans retenue sur salaire ni sanction. L'agence d'intérim doit alors prendre contact avec les responsables de l'entreprise utilisatrice pour identifier le danger et y mettre fin. Les salariés intérimaires peuvent se tourner vers le CHSCT de l'entreprise utilisatrice pour un déclenchement du droit d'alerte. L'évaluation des risques, qui est du ressort de l'entreprise utilisatrice, doit être transmise à l'entreprise de travail temporaire, qui la communique à ses salariés. Enfin, les entreprises de travail temporaire pourront s'adresser à plusieurs types de services de médecine du travail - interprofessionnels, professionnels ou d'entreprise - lors des embauches afin de permettre une prise en charge mieux adaptée des salariés.
Examinons maintenant les dispositions existantes pour les entreprises à risques.
Pour ces entreprises, le précédent gouvernement avait aussi déjà pris plusieurs mesures, à la fois des mesures réglementaires et des mesures d'incitation envers les partenaires sociaux. Ainsi, on peut citer, à la suite de la catastrophe d'AZF, la circulaire du 15 novembre 2001 de la direction des relations du travail consécutive à la réunion entre la ministre du travail et les partenaires sociaux des secteurs de la chimie et l'industrie pétrolière. Trois grandes orientations y figurent, parmi lesquelles la constitution d'un groupe de travail pour examiner les mécanismes spécifiques de protection des entreprises à risques. Ce travail devait aboutir au projet de loi Cochet.
Par ailleurs, les partenaires sociaux se sont entendus pour revoir les accords de branche de la chimie - 1992 - et du pétrole - 1995 - et en renforcer les aspects liés à la santé et à la sécurité des travailleurs, dans le cadre de l'accord interprofessionnel du 13 septembre 2000 sur la santé au travail. Ces discusions ont notamment donné lieu à l'accord du 10 juillet 2002 sur l'amélioration des conditions de travail, d'hygiène et de sécurité dans la chimie, qui constitue, comme on peut le constater, l'ossature du présent projet de loi.
Les principales dispositions de cet accord chimie sont les suivantes : un « management de la sécurité » doit être défini pour toutes les entreprises, incluant l'identification des besoins de formation, la maîtrise des procédés et de l'exploitation et l'évaluation des risques ; des procédures doivent être trouvées dans chaque entreprise pour assurer cette maîtrise ; des analyses d'accidents sont menées avec les CHSCT, qui sont également associés au suivi des actions correctives et au développement du retour d'expérience.
L'évaluation des risques inclut l'intervention de ceux qui sont identifiés dans les unités de travail, qu'ils soient physiques, chimiques ou biologiques. Le document unique est mis à jour une fois par an et consigne cet inventaire. Le rôle des CHSCT est renforcé : en cas d'utilisation d'une entreprise extérieure, le CHSCT de l'entreprise utilisatrice peut désigner l'un de ses membres pour participer à l'élaboration du plan de prévention conçu à cette occasion.
Sur les 250 sites classés Seveso « seuil haut », le rôle des réunions trimestrielles du CHSCT est accru par l'accord : des points spécifiques de l'ordre du jour des réunions sont consacrés aux interventions des entreprises extérieures. Des représentants de celles-ci peuvent participer à cette partie des réunions. Une information globale sur les difficultés des plans de prévention, les accidents et les résultats de la prévention est prévue. L'accord recommande aux autres entreprises de type Seveso d'appliquer ce dispositif.
L'accord précise également que le recours à des entreprises extérieures doit s'exercer dans le même contexte de sécurité pour leurs salariés que pour ceux de l'entreprise utilisatrice. Dans les industries à risques, le recours systématique à des emplois précaires et à des mécanismes de sous-traitance, qui permet l'externalisation des risques mais entraîne aussi l'aggravation de ces derniers par manque de coordination et de formation des personnels, exige un contrôle accentué des pratiques et du respect des dispositions légales.
L'entreprise utilisatrice doit mentionner dans le contrat ses risques spécifiques. Un système d'habilitation des intervenants extérieurs est établi : l'entreprise extérieure doit posséder les aptitudes et les compétences lui permettant d'intervenir dans des conditions de sécurité identiques à celles de l'entreprise utilisatrice ; elle doit fournir un dossier sur ce point et disposer de l'encadrement nécessaire. Son personnel doit recevoir, sous la responsabilité de son employeur, une formation adaptée à la sécurité. Les entreprises de maintenance doivent être habilitées par un organisme spécifique pour pouvoir intervenir dans les entreprises de type Seveso « seuils hauts ». Les formations aux risques chimiques et biologiques sont dispensées par des organismes agréés.
L'évolution récente de la jurisprudence n'est pas à négliger. Il convient en effet de ne pas oublier, en matière d'accidents du travail et de maladies professionnelles, les arrêts de la Cour de cassation du 28 février et du 11 avril 2002.
Ces arrêts de principe modifient en profondeur la responsabilité des entreprises. Ils mettent fin à la situation de « compromis historique » qui prévalait sur la base de la loi du 9 avril 1898, soit la réparation automatique des risques professionnels en contrepartie du caractère forfaitaire de l'indemnisation. Bien qu'ils concernent spécifiquement des victimes de l'amiante, ces arrêts posent un nouveau principe qui a vocation à s'appliquer à toutes les victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles.
Selon ces arrêts, en vertu du contrat de travail le liant à son salarié , l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité et de résultat, notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par ce salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés par l'entreprise.
Le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable, au sens de l'article L. 452- 1 du code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur avait, ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.
C'est donc le contrat de travail qui crée pour l'employeur une obligation de résultat quant à la sécurité du salarié. La conscience du risque est accentuée et les mesures de prévention deviennent dès lors indispensables. La victime n'a plus à prouver la faute d'une exceptionnelle gravité de l'employeur. Le constat du manquement à l'obligation de sécurité, d'où résulte la maladie ou l'accident, suffit à établir la faute inexcusable de l'employeur.
La Cour de cassation pose donc que l'obligation de sécurité et de résultat est une obligation d'assurer la prévention dans l'entreprise. Elle participe, par ces arrêts fondamentaux, au mouvement en direction de la réparation intégrale du préjudice et contribue à la prise de conscience et à l'élaboration d'une politique de prévention des risques professionnels.
Il faut noter que cette évolution prévisible avait déjà été prise en compte par le projet de loi Cochet, tendant à renforcer la maîtrise des risques technologiques ; ce dernier proposait en effet que, dans les établissement à risques, « la faute inexcusable de l'employeur soit présumée établie pour les salariés victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle qui n'auraient pas reçu les formations à la sécurité » organisées par l'employeur avant leur première intervention sur le site. Cette mention n'est pas reprise par le présent texte, d'où le dépôt par notre groupe d'un amendement tendant à réparer cette omission.
Le rôle majeur du CHSCT à l'égard du dispositif de prévention nous amène à souhaiter qu'il soit créé à partir de vingt et non plus de cinquante salariés par établissement. L'adoption de cet amendement permettra d'étendre ses bienfaits à un plus grand nombre de salariés.
Pour l'essentiel, ce texte reprend les dispositions du projet de loi Cochet, mais n'intègre pas les propositions du rapport de Jean-Yves Le Déaut de septembre 2002, rédigé au nom de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale, à la suite de la catastrophe d'AZF.
Le rapport de Jean-Yves Le Déaut, dans sa seconde partie, vise à une meilleure prise en compte des facteurs humains de danger. Il développe l'idée qu'écarter les salariés et leurs représentants de la gestion des risques conduit trop souvent à une forme de laxisme en matière de sécurité. Il dresse le constat selon lequel, bien que ses missions aient été élargies à la protection de l'environnement, le CHSCT est relativement impuissant face à ces situations et aux risques industriels.
Il faut réhabiliter le rôle des représentants du personnel dans la prévention et la définition des risques en intégrant le risque industriel en amont, à l'échelon de la négociation collective de branche professionnelle et des accords professionnels et interprofessionnels, en modifiant en profondeur la légitimité et le fonctionnement du CHSCT, celui-ci devenant un acteur de la sécurité industrielle, en créant les comités de site et, enfin, en étendant le délit d'entrave à toutes les nouvelles prérogatives du CHSCT.
Ce rapport traite également de la sous-traitance et de la précarité qui aggravent les risques et doivent être limitées. Il fait apparaître que le management à stricte logique financière s'oppose trop souvent à une démarche de prévention.
Il préconise, dans les sites industriels classés Seveso, la mise sous contrôle de la sous-traitance en cascade, en améliorant les conditions d'intervention des salariés des entreprises extérieures et en renforçant la protection des salariés précaires et extérieurs à l'entreprise.
Ce faisant, ce projet de loi demeure lié à une actualité dramatique et très médiatisée ; toutefois, il ne prend pas en compte la question des accidents du travail et des maladies professionnelles dans son ensemble.
Il s'inscrit néanmoins dans une évolution de la politique de prévention des risques d'accidents auxquels peuvent être exposés les salariés, politique pour l'instant limitée aux seules entreprises de type Seveso « seuils hauts ».
En présentant plusieurs amendements à ce texte, le groupe socialiste du Sénat souhaite contribuer à éviter le renouvellement des situations catastrophiques que notre pays a connues, veiller à ce que les dispositions réglementaires suivent l'évolution des techniques industrielles pour que les salariés de ces entreprises n'en soient plus les victimes et, enfin, exiger que toutes les entreprises de plus de cinquante salariés constituent un CHSCT et le fassent fonctionner ; or je rappelle qu'elles ne sont actuellement que 73 % dans ce cas. (Applaudissements dans les travées du groupe socialiste.)
(M. Guy Fischer remplace M. Jean-Claude Gaudin au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. GUY FISCHER
vice-président
M. le président. La parole est à M. Philippe Leroy.
M. Philippe Leroy. Madame le ministre, le projet de loi que vous nous présentez aujourd'hui est un texte très attendu par une opinion publique qui a été secouée par la catastrophe de Toulouse ou par des catastrophes naturelles et qui souhaite une réponse des pouvoirs publics en matière de prévention des risques.
C'est un texte très attendu qui vient certes s'ajouter à un empilement de lois, de règlements, de normes déjà existants, à l'art industriel qui, depuis une dizaine d'années, s'attache à limiter les risques. Néanmoins, votre façon d'appréhender les choses nous permet d'espérer quelques avancées en matière de prévention et de reconquête des territoires menacés.
Vous avez pris les choses de façon plus politique que technique,...
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. C'est un compliment !
M. Philippe Leroy. ... et je crois que c'est la bonne façon de faire.
Permettez-moi, madame le ministre, de vous présenter politiquement quelques remarques qui recevront, je le souhaite, un accueil bienveillant de la part du Gouvernement. Je vous annonce d'ailleurs d'ores et déjà que je voterai en tout état de cause ce projet de loi, modifié, j'espère, par l'adoption d'un certain nombre d'amendements que j'ai déposés.
S'agissant de la prévention, l'article 1er, qui institue pour les sites classés Seveso l'obligation pour le commissaire enquêteur ou pour la commission d'enquête publique d'organiser une réunion d'information, n'apporte à mon avis aucune valeur ajoutée à l'ensemble réglementaire. J'ai même peur que, le mieux étant l'ennemi du bien, cette disposition n'ait un effet négatif. De façon générale, ces réunions publiques sont l'occasion de débats où la passion dépasse souvent la raison ; elles engendrent plus d'inquiétudes, de réticences, d'amertume que d'espérance.
La valeur ajoutée de cette disposition étant nulle, l'article 1er pourrait donc à mon avis être supprimé sans nuire aucunement à l'équilibre du projet de loi. Au contraire, sa suppression éviterait d'ajouter de la passion là où nous n'attendons que de la raison. Et faisons confiance aux commissaires enquêteurs, aux commissions d'enquête publique, à la réglementation que vous mettez en place pour que l'information du public puisse se faire en dehors des chemins de la passion !
Sur un autre plan, madame le ministre - et bon nombre d'orateurs ont souligné ce point -, les collectivités locales s'inquiètent du financement du droit au délaissement proposé dans votre projet de loi.
Si le droit au délaissement constitue une excellente disposition qui devrait permettre la reconquête d'un certain nombre de nos territoires à risques, la charge financière est cependant énorme et non mesurée : peu d'experts, en effet, sont aujourd'hui capables de mesurer l'énorme masse financière qu'il faudra injecter pour reconquérir ces espaces. D'ailleurs, madame le ministre, comme vous l'avez dit vous-même dans votre exposé introductif, c'est un travail de longue haleine ; vous avez parlé de vingt ans. On en usera des ministres de l'environnement pendant ces vingt années ! (Sourires.) Et je pense, madame le ministre, que, avec un financement bien prévu, vous devriez, en vingt ans, réussir à concrétiser vos propositions. La loi devrait ainsi permettre aux collectivités locales de faire appel à un établissement public foncier, chargé du financement et même de la maîtrise d'ouvrage déléguée d'un certain nombre d'acquisitions foncières liées au droit de délaissement. C'est une orientation qui, à mon avis, rassurerait tout le monde.
Enfin, madame le ministre, deux des propositions de ce projet de loi devraient donner largement satisfaction à nos populations.
J'ai déjà parlé du droit de délaissement qui permet, dans les zones dangereuses situées autour des sites industriels, de régler le problème foncier et de surmonter les « malheurs » fonciers.
J'évoquerai maintenant le délai d'indemnisation que vous souhaitez voir raccourci. C'est une excellente idée que de garantir aux victimes d'un sinistre une indemnisation dans un délai raisonnable : trois mois. Après quoi, les compagnies d'assurance chargées de l'indemnisation se retourneront soit vers l'Etat, soit vers les industriels. Quoi qu'il en soit, cette notion de délai est intéressante.
Je souhaiterais, madame le ministre, que soient étendus aux zones minières, relativement nombreuses en France, les avantages de ces deux avancées formidables - le délaissement et l'indemnisation rapide - qui sont, pour le moment, réservées aux zones de type Seveso.
A mon avis - certes, je ne suis pas expert -, les montants financiers qu'il faudrait engager dans les zones minières pour régler les problèmes de délaissement et d'indemnisation seraient largement inférieurs aux montants consacrés aux zones de type Seveso. La charge financière supplémentaire devant alors être supportée serait raisonnable et répondrait à une nécessité d'équité.
Telles sont, madame le ministre, les quelques observations que je souhaitais présenter, tout en vous félicitant du dépôt de ce projet de loi à caractère politique. Soyez néanmoins un peu plus politique en vous déclarant favorable tant aux quelques amendements que j'ai déposés qu'à ceux de la commission. Néanmoins, je le répète, je voterai en tout état de cause votre projet de loi. (Applaudissements dans les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Yves Dauge.
M. Yves Dauge. Madame la ministre, je ferai quelques observations, qui seront autant de questions, sur le titre II du projet de loi consacré aux risques naturels.
Ma première observation concernera le champ d'application du texte : ce dernier concerne en effet essentiellement les inondations ; or il existe d'autres risques naturels. Bien sûr, un certain nombre de dispositions de ce projet de loi - je pense notamment à l'information - s'appliqueront à l'ensemble des risques naturels. Mais il y aurait à mon avis intérêt à procéder à des avancées significatives, à l'image de celles que nous allons faire avec vous au sujet des inondations, pour certains risques naturels qui ne sont pas l'objet principal de ce texte.
Je prendrai comme exemple - c'est un sujet que vous connaissez d'ailleurs très bien, madame la ministre - la question des habitations troglodytiques, des cavités souterraines et des coteaux qui s'effondrent. C'est un point évoqué à l'article 26 du projet de loi à propos du fonds d'intervention. Il est prévu que ce dernier pourra financer des opérations de reconnaissance de cavités souterraines - c'est une excellente chose - et qu'il pourra également, pour certains travaux, intervenir en cas de danger pour les vies humaines.
Madame la ministre, ceux qui, comme moi, habitent le long de la Loire connaissent bien le sujet de l'effondrement des coteaux, avec tous les risques complexes que cela engendre sur le plan des territoires. Nous savons que sont directement concernés non seulement les vies humaines, mais aussi de nombreuses activités, et bien d'autres sujets encore. Je me demande donc si nous ne pourrions pas engager une réflexion sur ce sujet dans les mois à venir. Il est vrai que certains domaines, telles les cavités souterraines situées dans des zones minières, ont déjà fait l'objet de travaux. Mais des attentes se sont exprimées à ce sujet, alors que ce dernier n'est qu'évoqué dans ce projet de loi.
Je souhaiterais donc que cette question soit posée, pour que le champ des risques naturels soit plus ouvert.
Par ailleurs, je reviendrai sur une question fondamentale, à savoir la planification. Comme nombre de collègues l'ont souligné, notamment Jean-Paul Alduy, la meilleure protection des risques consisterait à consentir un effort particulièrement important en matière de planification. L'article L. 121-1 du code de l'urbanisme, qui a été repris dans la dernière loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU, dispose que « les schémas de cohérence territoriale, les plans locaux d'urbanisme et les cartes communales déterminent les conditions permettant d'assurer » entre autres dispositions « la prévention des risques naturels prévisibles, des risques technologiques, des pollutions et des nuisances de toute nature ».
Cet article est le fondement de tout exercice de planification ; il traite le sujet. Mais, malheureusement, dans nos exercices de planification, ce sujet-là passe souvent derrière bien d'autres sujets.
Pour ma part, je suggérerais que l'Etat, par voie de circulaire ou par tout autre moyen, engage ceux qui ont la responsabilité de la planification sur le plan local à faire de la prévention des risques l'objectif premier de cette planification.
On nous dit : ne vous en faites pas, on va établir des plans de prévention des risques naturels prévisibles. Mais l'établissement du plan doit être un moment fort de l'exercice de planification ! Ce n'est pas une opération qui ne concerne que quelques-uns ! Il faut avoir une vision unitaire de l'exercice de planification, même si, pour certains lieux particuliers, la réflexion doit aller plus loin.
Nous sommes nombreux à penser qu'il faudrait revenir aux logiques de bassins. Il va y avoir, dites-vous, madame, des schémas de prévision des crues par bassin. Très bien ! Mais pourquoi ne ferait-on pas également au niveau du bassin un schéma de prévention des risques ou un PPR, peu importe le nom qu'on lui donnera ? Il y a déjà des établissements publics animateurs des politiques de bassin !
De toute façon, il y a des défaillances dans la maîtrise d'ouvrage : l'Etat ne prescrit rien, les collectivités ne prennent guère d'initiatives ; aucune planification n'est réalisée en amont des PPR. Il serait pourtant logique que, ces derniers s'appliquant en aval, il y ait un exercice de même nature en amont.
En la matière, j'estime - vous m'objecterez que ce n'est pas tellement dans l'esprit de la décentralisation - qu'une politique d'Etat est nécessaire : l'Etat a le droit de prescrire, là où c'est nécessaire, une planification spécifique de prévention des risques à l'échelle des bassins en s'appuyant sur les structures existantes. Nous sommes obligés d'en venir là.
Toujours à propos de la planification, je voudrais évoquer un sujet qui revient sans cesse : la nécessité d'un débat public. Sans mettre en cause le rôle de l'Etat, qui est indispensable, je pense que nous ne ferons pas grand-chose sans le concours des citoyens. Tout le monde le dit. Il faut que la politique de prévention des risques soit portée par les citoyens et par les collectivités locales.
Même si c'est l'Etat qui élabore les PPR, il devra prendre en compte l'avis du citoyen. Au terme d'une réflexion alimentée par tout ce que l'on a pu conserver en mémoire, par tout ce que l'on sait sur le plan scientifique, nous devrons ensemble fixer le niveau de risques accepté ou acceptable. C'est d'ailleurs là qu'est la difficulté : à quel niveau fixer le risque acceptable ? Qui le déterminera ? Ce sera l'Etat évidemment.
Mais si l'Etat intervient après un processus au terme duquel se dégagera un quasi-consensus, les décisions du préfet ou du maire s'en trouveront fortement sécurisées juridiquement. En effet, en cas de problème, on se retourne souvent contre le préfet ou le maire. Si la décision intervient après un véritable débat public, la responsabilité politique sera assumée collectivement. Je me permets d'insister sur ce point pour que l'on y revienne ultérieurement.
Les mesures concernant les zones d'érosion constituent incontestablement un progrès. Le projet de loi présente en l'occurrence une véritable innovation.
Envisagez-vous, madame la ministre, de mettre en oeuvre ces dispositions avec les moyens de financement des ex-contrats territoriaux d'exploitation ? Même si ces derniers changent d'appellation, ils pourraient peut-être fournir des ressources. De toute façon, ce seront les agriculteurs qui seront le plus souvent concernés par les dispositions qu'il faudra prendre.
Evidemment se pose la question du financement de toute cette politique de prévention. En ce qui me concerne, j'ai toujours pensé que bien des situations à risques étaient nées à la suite d'investissements publics ou privés. Aujourd'hui, on va financer la réparation. Très bien ! mais, puisque l'on parle de politique à long terme, la première chose à faire serait d'arrêter de dépenser de l'argent pour détruire ou pour créer des risques.
Il y aurait donc un transfert de lignes financières à faire. L'Etat, avec le fonds d'intervention, pourrait jouer un rôle d'incitation auprès des régions, des départements, des collectivités, un partenariat financier se mettant en place, évidemment, par le biais des contrats de plans. Mais il faut avant tout que le fonds d'intervention soit l'occasion de remettre à plat les modalités de financement. Nombre de problèmes financiers seraient réglés si l'on dépensait moins, mais mieux, autrement et ailleurs.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. C'est sûr !
M. Hilaire Flandre. C'est facile à dire !
M. Yves Dauge. Cela ne réglera pas tous les problèmes financiers, j'en conviens, mais nous n'améliorerons certainement pas les choses en ajoutant une couche d'investissement ou une taxe supplémentaire.
C'est une autre vision des choses qu'il faut avoir, et donc une autre politique qu'il faut mener.
Quoi qu'il en soit, je pense, madame la ministre, que tout cela fait l'objet d'un large accord entre nous. Aussi sommes-nous nombreux, au sein de mon groupe, à avoir envie de voter votre texte. Nous avons déposé quelques amendements qu'il serait utile de prendre en compte, mais les amendements, n'ayez crainte, ne bouleverseront pas l'économie du projet de loi. (Applaudissements dans les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Eric Doligé.
M. Eric Doligé. Permettez-moi, madame la ministre, de vous faire part de ma très grande satisfaction de voir le Parlement examiner un projet de loi relatif aux risques, qu'ils soient technologiques ou naturels.
Le législateur va enfin pouvoir appeler l'attention de nos concitoyens sur la nécessité de développer une culture du risque et de mettre en place un dispositif que je souhaite efficace et qui, parallèlement, ne doit pas apporter de contraintes supplémentaires à notre économie : pari difficile, mais pas impossible !
Culture du risque ne veut pas dire remise en cause de tout ce qui bouge dans notre société ; cela signifie prise en compte, de façon posée et réaliste, de l'existence du risque.
Fruits involontaires du travail de l'homme, les risques technologiques ont tendance à croître en raison d'une évolution très rapide des techniques industrielles et, plus certainement, de la difficulté croissante que nous avons à maîtriser totalement ces techniques.
Quant aux risques naturels, si l'homme n'est qu'un facteur aggravant de leurs conséquences, force est de constater que les séismes, les éruptions volcaniques, les inondations et les autres catastrophes que la nature nous réserve ne sont pas dues à la main de l'homme. Les catastrophes naturelles font partie des risques incontournables avec lesquels nous devons vivre ou, plutôt, réapprendre à vivre.
Le projet de loi présente donc en premier lieu une forte vertu pédagogique dans notre société, qui accepte de moins en moins le risque et qui aime à caresser le rêve du risque zéro, comme cela a été maintes fois rappelé.
L'étude de la répartition géographique de la population confirme que nos concitoyens se concentrent toujours plus autour des grands centres à risques, si possible le long des fleuves et près des zones industrielles, accentuant encore la désertification des zones rurales, en général moins risquées. Cette tendance n'a fait que multiplier les impacts des catastrophes naturelles ou industrielles.
J'illustrerai mon propos en évoquant les risques d'inondation occasionnés par un fleuve fort connu, la Loire. Les études montrent que le nombre de personnes et de biens exposés aux risques d'inondation majeure y est sans cesse croissant. Ainsi, on a pu estimer que 300 000 habitants et plus de 12 000 entreprises sont concernés par une crue centennale en Loire moyenne. Dois-je rappeler qu'il y en a eu trois en vingt ans au xixe siècle ?
Dois-je aussi rappeler que, depuis quelques années, nous savons fort bien ce qu'il serait souhaitable de faire et que, par son inertie naturelle, l'Etat parfois confus et souvent centralisateur - sinon l'inverse - fait piétiner l'action ?
En facilitant la réalisation d'aménagements particuliers permettant de prévenir les inondations en amont des zones urbanisées, en améliorant l'information de la population et en assurant des indemnisations plus rapides et larges, le texte que vous nous soumettez, madame la ministre, devrait permettre de rattraper un retard coupable.
En traitant du risque collectif, en cherchant à rationaliser les comportements, en proposant non seulement d'informer, de former, d'éduquer, de faire prendre conscience, mais aussi de compenser les dommages, le Gouvernement va assurément dans la bonne direction, direction qui n'avait pas été prise depuis les actions innovantes décidées par Michel Barnier. Ces dernières n'ont malheureusement pas toujours été suivies d'effet, l'Etat n'ayant éprouvé aucune gêne à ne pas respecter sa signature dans certains cas.
Au-delà de ce projet de loi, qui peut être considéré comme un début prometteur et que la navette parlementaire ne manquera pas d'enrichir, je souhaiterais vous faire part de quelques réflexions concernant la lutte contre les inondations, fruit d'une expérience de huit années à la tête de l'établissement public gérant la Loire et ses affluents, établissement dont vous étiez, madame la ministre, un membre éminent il y a encore peu de temps. (Mme la ministre sourit.)
M. Yves Dauge. Eh oui !
M. Eric Doligé. En 2001, lors de la constitution par l'Assemblée nationale de la commission d'enquête sur les causes des inondations répétitives ou exceptionnelles, j'avais relevé les difficultés rencontrées dans la gestion de ces crises et l'inadaptation du dispositif législatif et réglementaire destiné à les prévenir.
En matière de prévention des inondations, s'il est indéniable que les citoyens et les collectivités ont été coupables de négligences, l'Etat n'a jamais pris ses responsabilités. Je salue ici, madame la ministre, votre volonté de faire évoluer les habitudes et de sortir de la confusion ambiante.
Il faut d'urgence coordonner les politiques publiques, clarifier les responsabilités en privilégiant une approche de terrain. Le message a encore un peu de mal à passer au niveau de l'Etat.
En matière de réflexion sur la prévention du risque, il faut agir à l'échelle pertinente, qui est celle du « territoire soumis à risque ». Les résultats d'expériences menées sur les crises graves et toutes les études démontrent l'importance de cette notion de « bassin versant » dans la mise en place d'une politique efficace.
L'un des instruments d'organisation et d'action que nous pouvons utiliser - il en est ainsi pour la Loire et ses affluents - est l'établissement public territorial de bassin, l'EPTB, véritable lieu de concertation et de solidarité entre les collectivités et interlocuteur crédible pour les pouvoirs publics à l'échelle d'un bassin versant.
La situation aurait été probablement différente dans la Somme si un EPTB avait existé en son temps, ce qui est aujourd'hui chose faite, me semble-t-il, sous la direction de notre collègue député Alain Gest.
Par ailleurs, je me permettrai d'insister sur la clarification des responsabilités des pouvoirs publics. Pour cela, il est indispensable d'identifier des chefs de file au niveau tant de l'Etat que des collectivités territoriales.
Les conclusions de la Cour des comptes et des commissions d'enquête parlementaires ayant traité de la prévention et de la lutte contre les inondations sont unanimes : les pouvoirs publics interviennent aujourd'hui dans un cadre juridique obsolète, dans un enchevêtrement et une confusion des compétences.
Il est donc prioritaire de clarifier les responsabilités de l'Etat et des collectivités territoriales, mais aussi de prévoir un travail en commun des différents niveaux, locaux, nationaux, parfois même internationaux, à l'exemple de ce qui se passe dans le bassin de la Meuse.
La circulaire d'appel à projets que vous avez adressée, le 1er octobre 2002, aux préfets coordonnateurs de bassin va dans cette bonne direction en relevant deux éléments essentiels pour la réussite de la prévention des inondations : d'une part, la capacité à mobiliser des maîtres d'ouvrage, qui pourront être des syndicats intercommunaux, des conseils généraux ou régionaux, ou également, pour des opérations complexes, des établissements publics territoriaux de bassin, d'autre part, la qualité de la collaboration entre les services de l'Etat et les collectivités locales.
Si le rôle privilégié des établissements publics territoriaux de bassin dans la prévention des inondations est incontestable - c'est le cas sur la Seine, la Loire, le Rhône, la Garonne, l'Oise et la plupart des grands fleuves et rivières - leur statut est quelque peu incertain et ils ne sont toujours pas reconnus par l'Etat. C'est la raison pour laquelle je proposerai au Sénat d'adopter un amendement visant à inscrire dans la loi leur existence et, je l'espère, leur subsistance.
Dois-je rappeler qu'ils assurent la fonction de maître d'ouvrage d'études et de travaux ou encore le montage de financements que l'Etat ne sait ou ne peut pas faire ; qu'ils servent, par le biais de leurs élus, de relais d'information auprès des collectivités et des riverains ; qu'ils coordonnent et animent les actions à l'échelle des bassins, dépassant ainsi les frontières administratives ; enfin, qu'ils assurent la solidarité entre secteurs amont et aval et entre zones urbaines et rurales ?
Il semble prioritaire que les pouvoirs publics s'impliquent dans une démarche commune de définition et de mise en oeuvre de stratégies globales de réduction du risque « inondation », stratégies qui doivent en priorité avoir pour finalité la protection des personnes et reposer sur plusieurs volets qu'il faut inscrire dans la durée.
En premier lieu, il est nécessaire de mettre en place une information et une anticipation des crises qui passe par quatre impératifs : une amélioration de la prévision de l'événement ; une amélioration de l'information et de l'association des riverains ; une instauration d'une véritable conscience du risque « inondation » ; enfin, une préparation à la gestion de la crise.
Par ailleurs, l'utilisation des sols doit être mieux définie grâce à la mise en place de mesures de prévention compatibles avec un risque acceptable d'inondation, ainsi que par une mise en oeuvre rapide des plans de prévention des risques inondations, les PPRI, en veillant à leur cohérence à l'échelle des bassins, et, lorsqu'ils existent, à ce que les schémas d'aménagement et de gestion des eaux, les SAGE, prennent en compte le volet relatif à la prévention des inondations.
Pour ce qui est des travaux, il faut veiller à la réduction de l'aléa en accroissant la rétention des eaux dans l'ensemble du bassin versant, mais aussi à la réalisation, si nécessaire, de nouveaux ouvrages de protection.
Il faut également veiller au bon entretien des cours d'eau et des ouvrages de protection existants en y affectant les moyens de financement nécessaires. A ce propos, j'ai pu constater que, lorsque les moyens étaient disponibles, ils n'étaient pas toujours mobilisés, les dossiers n'étant pas prêts.
Il faut enfin veiller à la réduction de la vulnérabilité des biens publics et privés les plus exposés.
Ces stratégies doivent impérativement être définies dans les meilleurs délais pour les principaux fleuves et grandes rivières de notre pays. Nous ne devons plus continuer à tourner autour du sujet et aller de réunions en réunions de moins en moins utiles.
Enfin, le dernier volet de mesures visant à clarifier les responsabilités des pouvoirs publics est la définition et l'approfondissement de la solidarité entre l'Etat et les collectivités territoriales en matière de responsabilités juridiques et financières.
Si la sécurité est une préoccupation majeure des élus des collectivités territoriales, c'est avant tout l'une des responsabilités de l'Etat, à qui les collectivités demandent d'assumer dans sa plénitude la compétence régalienne de la sécurité. Je ne prendrai pas le temps de développer cet aspect, mais nous y reviendrons lors de la discussion des articles.
L'ensemble des principes à mettre en oeuvre que je viens d'énoncer et les limites de l'approche technique actuelle montrent qu'il convient impérativement de privilégier une approche de terrain en direction des collectivités et des particuliers.
Pour chaque territoire soumis au risque, il convient d'identifier un chef de file à même de coordonner à l'échelle pertinente les stratégies de réduction du risque « inondation » au plus près du terrain.
A cette échelle, les collectivités ou leurs groupements devraient pouvoir intervenir en appui des maires, en amont des crises, pour la formation et l'animation des techniciens des collectivités, pour l'information du public, mais aussi pour la gestion des crises, en participant à la préparation de plans de crises à l'échelle pertinente, qui peut être interdépartementale.
A l'échelon national, il convient de mettre en place un institut français de prévention des inondations, qui aura pour mission prioritaire de fournir un appui technique aux collectivités territoriales, d'être un centre d'expertise en matière de réduction de la vulnérabilité, d'inciter au comportement « vertueux », d'être un centre national d'expertise en matière de retour d'expérience, d'être un lieu de débat public permettant notamment d'évaluer le risque d'inondation, et, enfin, d'être le correspondant national de l'Etat.
Ce centre aura vocation à être le relais national du réseau européen de prévention des inondations, dont Mme la ministre a proposé la création à ses collègues ministres de l'environnement de l'Union européenne le 17 octobre 2002.
Comme vous pouvez le constater, madame la ministre, tous les grands principes évoqués et les mécanismes à mettre en place pour les inondations sont transposables pour les autres grands risques.
Je souhaite que, au-delà de ce texte, la décentralisation confirme la place des collectivités, reconnaisse la subsidiarité et donne à l'Etat toute sa place, mais rien que sa place.
Voilà, mes chers collègues, quelques pistes de réflexions mûries sur le terrain.
Je sais, madame la ministre, que nous saurons cheminer de concert sur le chemin difficile de la réduction des risques. (Applaudissements dans les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que dans certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Madame la ministre, voici ce que, il y a quatorze mois, je disais ici même à votre prédécesseur :
« Les installations Seveso, ce ne sont pas seulement des usines qui explosent, qui fuient ou dont les matières se répandent par accident dans les transports à risques associés. Il faudrait d'ailleurs un plan Seveso adapté pour ces "Seveso roulants".
« Ce ne sont pas seulement des morts brutales, des chairs déchirées ou des quartiers détruits, c'est aussi la contamination lente, comme dans certains quartiers du Nord-Pas-de-Calais. C'est une imprégnation toxique, quotidienne depuis des décennies, de l'air, de l'eau, des sols, autour des sites classés. Chez nous, les sels de métaux lourds, on en respire, on en mange, sous la menace de perdre son emploi.
« Autour de Metaleurop, un périmètre d'intérêt général délimite la zone où il y a cinq fois plus de plomb que la norme admise ! C'est l'empoisonnement à doses quotidiennes. »
Lorsque je donnais cette alarme, nous ne savions évidemment pas qu'en janvier 2003 Metaleurop clôturerait cent ans de cynisme environnemental et social par une annonce de départ sans plan social ni responsabilité assumée.
Devant cet acte, le Gouvernement n'a pas eu de mots assez durs pour fustiger l'entreprise.
C'est dire combien un texte comme celui-ci, dont Yves Cochet a pris l'initiative et que vous avez complété, est bienvenu - mais encore insuffisant - et nous attendons avec impatience que les pouvoirs publics puissent reprendre la main sur les dérives industrielles qui laissent derrière elles des chômeurs, des pollutions, des déficits publics, alors que les responsables de ces dérives s'en vont à l'autre bout du monde faire fructifier le produit de leur « larcin » et rechercher des législations complaisantes.
Je souhaite attirer votre attention sur trois points.
Il s'agit, premièrement, de l'indépendance et des moyens des DRIRE : le temps est venu de faire en sorte que l'inspection ne souffre ni de complaisance avec les acteurs inspectés ni de manque de postes. Les 150 postes créés, l'ajournement décidé pour 2003 et les 200 postes prévus jusqu'en 2007 aboutiront au mieux à 1 400 postes pour 450 000 installations classées, ce qui représente 321 sites pour un seul ingénieur ! Nous serons encore loin de la sécurité.
Il s'agit, deuxièmement, de l'appui aux dynamiques externes et internes à l'entreprise.
La vigilance et le savoir accumulé du monde associatif sont des atouts précieux. Voilà trente ans qu'ils nous racontent une histoire qui a vu s'illustrer Pen~arroya, jadis, ou Metaleurop, tout récemment.
Les CHSCT méritent - vous l'avez dit - d'être entendus, épaulés, respectés. La relecture de leurs alertes est riche de bien des enseignements. Aussi est-il incompréhensible que certains veuillent les dissocier et les fragiliser.
Le recours à la sous-traitance est trop souvent l'occasion de perdre de précieux savoirs, d'externaliser les impacts sur la santé des salariés et de dissoudre la responsabilité de l'employeur.
Enfin, la médecine du travail ne saurait se limiter à la seule « visite médicale ». Pluridisciplinarité, conseil en prévention, dialogue avec les salariés, sont les clefs de la santé au travail et participent pleinement de la prévention des risques.
Des mesures de bon sens s'imposent ; les préfectures peuvent, dès aujourd'hui, les mettre en oeuvre. Savez-vous qu'à Lille le médecin du centre anti-poison n'est même pas informé des matières et des process utilisés sur les sites Seveso ? En cas d'accident, aucune anticipation n'est donc possible.
J'évoquerai, troisièmement, le droit au délaissement. En cas de dépôt de bilan, il ne saurait s'exercer aux frais de la collectivité, déjà meurtrie et exsangue. C'est aux industriels d'alimenter un fonds commun d'indemnisation de l'impact de leurs activités, et l'Etat doit apporter sa contribution quand il n'a pas rempli son devoir de vigilance.
En voulant récemment faire assumer leurs responsabilités aux actionnaires de Metaleurop, le Gouvernement a mesuré la perversion de ce que le Président de la République appelle des « montages juridiquement complexes ». Nous nous heurterons très vite à l'insuffisance du cadre franco-français. C'est donc à l'échelon européen que des règles doivent s'imposer.
Enfin, en vertu de l'exigence d'un développement durable énoncée à Johannesburg, il nous faudra aussi veiller à ne pas devenir complices d'un transfert vers les pays du Sud de productions qui seraient prohibées ici. (Applaudissements dans les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Christian Demuynck.
M. Christian Demuynck. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dans un discours prononcé à Chicago le 28 janvier 1970, le président Georges Pompidou déclarait que « l'emprise de l'homme sur la nature est devenue telle qu'elle comporte le risque de destruction de la nature elle-même ».
Aujourd'hui, une série d'événements particulièrement tragiques, lourds en vies humaines et en implications négatives sur l'environnement, nous incite à envisager que la destruction puisse également se retourner contre l'homme lui-même.
C'est pourquoi je tenais à souligner que ce débat sur le projet de loi relatif à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages ne saurait se réduire à une analyse technique des contraintes administratives et des charges financières qui incombent aux services publics et aux entreprises du secteur industriel.
Il s'agit avant tout, pour le législateur, en s'interrogeant sur le sens du concept de « risque », d'apporter une nécessaire clarification quant à la place qu'il convient de donner à la fois, en amont, au principe de la prévention - et de savoir en quoi il se distingue du principe de précaution - et, en aval, au principe de réparation, qui engage l'individu, la collectivité et les entreprises à davantage de respect et de responsabilité.
A cet égard, je voudrais insister sur le postulat de ce projet de loi, qui récuse l'idée qu'un quelconque « risque zéro » pourrait devenir une nouvelle norme politique, économique, sociale, sanitaire et, pourquoi pas, demain, culturelle.
La croyance idéaliste en un « risque zéro » s'oppose frontalement à la logique du progrès : le drame survenu voilà quelques jours aux Etats-Unis avec l'explosion de la navette spatiale Columbia nous rappelle que le corollaire de toute entreprise ambitieuse est bien l'acceptation d'un risque, aussi calculé soit-il.
Madame la ministre, trois points en particulier me semblent devoir être mis en évidence au sein des articles de votre projet de loi.
D'une part, ce texte tend à mieux définir les responsabilités des différentes autorités publiques en matière de prévision des crues. Etant maire d'une commune pour partie située en zone inondable sur les bords de la Marne, je ne peux que me réjouir de cette volonté de centraliser et de rationaliser le mécanisme de surveillance des crues, tant pour améliorer l'efficacité du système que pour prévenir les litiges quant aux responsabilités des collectivités publiques en cas de catastrophe naturelle.
Dès lors, je souscris sans réserve à la proposition d'amendement de notre commission des affaires économiques visant à confier à l'Etat l'organisation de la surveillance et de la prévision des crues. Il s'agit non de transférer sur d'autres épaules la charge de tout le dispositif, puisque les collectivités territoriales peuvent participer à la prévision des crues, mais bien d'asseoir au niveau national la cohérence d'un système de veille coordonné par un schéma directeur à l'échelle de l'ensemble du territoire.
D'autre part, ce projet de loi tend à préciser les critères à prendre en compte pour délimiter les périmètres des plans de prévention des risques naturels afin d'en faire les instruments essentiels de cette politique. Là encore, j'adhère à la recommandation du rapporteur, notre collègue Yves Détraigne, qui propose de dépasser les limites administratives d'une commune ou d'une communauté de communes.
II ne fait aucun doute, en effet, que cette nouvelle possibilité permettra de rationaliser les systèmes de prévention, en rapprochant davantage la contrainte administrative de la réalité géographique et géophysique locale.
S'engager dans cette voie - c'est-à-dire celle de la mutualisation des décisions et des moyens -, c'est, me semble-t-il, aller dans le sens d'une reconnaissance de l'efficacité de l'approche locale et décentralisée, dans le droit-fil des orientations données par le Chef de l'Etat et le Premier ministre. La question de l'établissement d'une échelle de pertinence pour l'action publique a été au coeur de notre réflexion sur l'organisation décentralisée de la République, et je suis heureux qu'elle trouve une application directe dans ce texte, essentiel pour un très grand nombre de communes.
Enfin, si j'approuve totalement le principe d'une réforme de la procédure d'élaboration d'un PPR, de manière que les élus, les organisations professionnelles, les propriétaires et les associations y soient effectivement accociés, je voudrais en revanche souligner la responsabilité de l'autorité préfectorale dans cette fréquente absence de concertation.
Le département de la Seine-Saint-Denis a récemment fait l'objet d'un PPR élaboré sans concertation ni prise en compte de l'avis et de l'expérience des résidents, pourtant présents depuis plusieurs générations. Arrachage d'arbres, bétonnage de terrains, bouleversement de l'habitat ont suscité une levée de boucliers, aussi bien de la part des élus que des habitants. Mais ceux-ci avaient, au moins dans un premier temps, tendance à se retourner contre les élus, croyant qu'ils étaient responsables. Pour ma part, j'ai organisé une réunion, qui a rassemblé plus de sept cents personnes. Il me semble que de telles réunions sont indispensables à la fois pour informer la population et pour dédramatiser la situation, car les rumeurs les plus alarmistes et les plus dénuées de fondements ont vite fait d'être colportées.
En tout cas, et c'est heureux, en Seine-Saint-Denis, le PPR sera bientôt très largement remanié. Il n'en demeure pas moins qu'aujourd'hui la dynamique de confiance est brisée. C'est pour éviter le blocage qui pourrait, une fois encore, découler d'un manque de communication que, fort de cette expérience, je soutiens la proposition d'inscrire le principe de la concertation dans l'élaboration d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles, par la modification de l'article L. 562-3 du code de l'environnement.
Madame la ministre, je suis convaincu que ce projet de loi peut être l'occasion de responsabiliser nos concitoyens sur les dangers technologiques et naturels, et de clarifier le rôle que doit jouer la collectivité face à ces risques.
Redéfinir la place de chacun et rendre plus lisible la logique de réparation sans transformer nos concitoyens en victimes potentielles permanentes, tel est l'un des mérites de ce texte, qui aura, madame la ministre, mon soutien ! (Applaudissements dans les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.
M. Gérard Larcher, président de la commission des affaires économiques et du Plan. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens à témoigner de la très grande attention avec laquelle la commission des affaires économiques, saisie au fond, et que j'ai l'honneur de présider, a examiné les différentes dispositions du présent projet de loi, qui vient de donner lieu à des interventions dont le rapporteur et moi-même avons apprécié le caractère toujours responsable et constructif.
Je voudrais d'ailleurs remercier M. Yves Détraigne d'avoir accepté, au « crayon levé », d'être le rapporteur de ce projet de loi, après le grand travail qu'avait accompli Joseph Kerguéris, à qui nous adressons nos voeux de très prompt rétablissement.
Cela a déjà été dit, mais il importe de le souligner : même s'il la prend en compte, ce projet de loi s'inscrit au-delà de la très forte et légitime émotion suscitée par l'accident d'AZF à Toulouse et par les très graves inondations du Gard.
Notre responsabilité politique est d'apporter une réponse adaptée à l'attente légitime des personnels de certaines entreprises et de ceux qui résident à proximité ou dans des zones exposées à des risques naturels pour plus de sécurité, de transparence et d'information. Mais il relève aussi de notre responsabilité de concilier cette attente avec les exigences du développement économique du pays et les attentes également légitimes des Français en matière d'emploi.
Les enjeux sont donc à la fois lourds et complexes. Il importe, par conséquent, de ne pas se laisser enfermer dans de fausses contradictions. L'imbrication étroite des sites industriels à risques dans nos territoires fortement urbanisés découle d'un double mouvement : celui des entreprises, qui tendent à s'installer dans les bassins d'emploi, et celui des salariés, qui souhaitent élire domicile à proximité de leur lieu de travail, quand ils ne sont pas purement et simplement logés aux alentours par leur entreprise. C'est une réalité dont nous devons tenir compte dans l'appréciation du risque.
Parallèlement, la relative fréquence des catastrophes naturelles et surtout les interrogations sur de possibles dérèglements climatiques liés à l'intensification des activités humaines interpellent les décideurs publics, qui doivent, eux aussi, mettre en place des stratégies d'anticipation.
Face à un risque technologique ou naturel, l'opinion publique, relayée par les médias, réclame l'application du principe de précaution. Pour les tenants d'une écologie radicale, l'invocation de ce principe revient à placer la nature au-dessus de l'homme et à reléguer au second plan les valeurs de civilisation qui prônent le progrès de l'humanité, et donc, à l'extrême, à inhiber toute innovation.
Il faut le dire clairement : notre commission des affaires économiques a récusé cette vision des choses.
Nous sommes là au coeur d'un débat qui me paraît fondamental : donner un juste contenu à ce principe. Comme le soulignait très justement Philippe Kourilsky, directeur général de l'institut Pasteur, dans son ouvrage Du bon usage du principe de précaution, l'essentiel du débat porte sur la place de l'homme dans la nature et sur la façon dont il peut l'utiliser pour son bien, sans négliger la réflexion sur les limites et les risques de cette utilisation.
De cette réflexion naît une double affirmation, qui a guidé notre examen du projet de loi ainsi que les propositions du rapporteur adoptées par la commission des affaires économiques.
Premièrement, il n'existe aucune opposition de principe entre précaution et progrès technologique, et la commission des affaires économiques défend l'intérêt d'un secteur industriel fort, innovant et créateur d'emplois.
Deuxièmement, l'application « positive » du principe de précaution récuse l'abstention ou l'interdit paralysant. Elle impose d'agir au mieux, en toute connaissance de cause.
D'où la volonté exprimée par la commission de ne pas laisser s'accumuler des « strates réglementaires » successives qui, in fine, interdisent toute action, tant pour les acteurs économiques que pour les collectivités territoriales. Cela explique les réserves de certains de nos collègues à l'égard de l'obligation d'organiser une réunion publique d'information lors de l'enquête.
En outre, comme l'a très justement souligné notre rapporteur, nous devons être attentifs à la compétitivité de notre industrie et ne pas multiplier les obligations qui pèseraient sur la compétitivité de nos entreprises. Ce souci, partagé par une large majorité des membres de la commission des affaires économiques, nous a conduits à proposer la suppression de l'article 14 du projet de loi, proposition que notre rapporteur a évoquée et qui a paru susciter l'intérêt de Mme la ministre.
Il nous semble en effet que la réalisation d'une nouvelle étude viendrait alourdir la procédure de création de telles industries, qui doivent déjà, je le rappelle, effectuer une étude d'impact sur l'environnement et une étude de dangers.
Il convient également de veiller à ce que les moyens financiers accompagnent la définition de nouvelles responsabilités, afin que ces dispositions ne restent pas lettre morte ; sinon, les bénéficiaires potentiels ne pourraient, à bon droit, qu'être déçus. Je pense notamment au financement des mesures d'urbanisme qui pourraient être prévues par les plans de prévention des risques technologiques.
Autre préoccupation exprimée par la commission : la nécessité de veiller à ce que, sur l'ensemble du territoire, les services compétents fassent une application homogène et intelligente de la réglementation.
M. Jean-Louis Carrère. Cela va être dur !
M. Gérard Larcher, président de la commission des affaires économiques. Il nous paraît indispensable de parvenir à une harmonisation des jurisprudences appliquées aux activités industrielles, qui varient trop souvent d'une région à l'autre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. C'est sûr !
M. Gérard Larcher, président de la commission des affaires économiques. En cela, madame la ministre, votre souci d'imposer une méthodologie identique sur tout le territoire ne peut que répondre aux attentes des élus et des entrepreneurs ; c'est, au demeurant, tout simplement conforme à la justice.
Dans le même état d'esprit, la commission a estimé souhaitable que soit assuré un traitement équitable pour nos concitoyens qui seraient exposés à des risques différents mais entraînant les mêmes effets. C'est la question du régime appliqué aux populations soumises à des risques miniers qui est ainsi posée. Peut-on accepter que ces populations ne puissent pas, dans les mêmes conditions, faire usage du droit de délaissement ou obtenir une indemnisation rapide - car la loi de 1999 nous a laissés sur notre faim, notamment en matière d'indemnisation rapide, et c'est l'un des points sur lesquels nous souhaitons recevoir certaines assurances - que celles qui sont exposées aux risques technologiques ? Sans doute le texte qui résultera de nos travaux n'apportera-t-il pas toutes les garanties souhaitées par la commission, mais ce point mérite d'être débattu.
En matière de risques naturels, le projet de loi comporte, nous semble-t-il, de réelles avancées, à travers la définition de nouveaux outils d'intervention pour les collectivités territoriales et l'utilisation des moyens existants rendue plus facile. Cependant, il ne traite pas de la nécessaire coordination des services de l'Etat en ce qui concerne la prévention des risques naturels. Dans le domaine de l'eau, cinq ministères interviennent à un titre ou à un autre. Les élus locaux s'inquiètent à juste titre de cette multiplicité de responsables, qui complique et parfois paralyse leur action.
Ainsi, s'agissant de la prévision des crues, la commission des affaires économiques confie expressément à l'Etat - vous voyez que nous savons faire confiance à l'Etat - la responsabilité de l'organisation de ce maillon, essentiel pour réagir de manière adaptée à une catastrophe naturelle. Il importe que cette responsabilité ne soit pas émiettée entre plusieurs interlocuteurs.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en examinant ce projet de loi, la commission des affaires économiques du Sénat a cherché à faire un vrai travail politique en ce qu'elle s'est efforcée d'interpréter la demande publique afin de proposer des mesures qui « optimisent » le bien public.
Pour cela, loin de stigmatiser telle ou telle catégorie d'acteurs, nous préconisons la responsabilisation - vous avez vous-même employé ce mot, madame la ministre - de l'ensemble des citoyens, qui doivent effectivement être formés à une véritable culture du risque. A la peur doit se substituer le sens de la responsabilité partagée, de la prise de risque maîtrisée. Tels sont les thèmes autour desquels nous nous sommes retrouvés, au sein de la commission des affaires économiques. (Applaudissements dans les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que dans certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Tout d'abord, permettez-moi de me féliciter de l'excellent travail que nous avons effectué ensemble cet après-midi, notamment grâce à vous, monsieur le président de la commission des affaires économiques, et au rapporteur, M. Yves Détraigne.
Je tiens à saluer ces travaux marqués par le sens de la responsabilité, par l'absence de polémique et par l'intérêt des propositions qui ont été émises, même si, bien évidemment, je ne les partage pas toutes.
Tous les orateurs, implicitement ou explicitement, ont bien compris que ce texte invitait, comme l'a dit M. Jean-Paul Alduy, à une rupture culturelle.
La responsabilité des élus, de l'Etat, mais aussi celle des citoyens, des associations, sans oublier celle des industriels, qu'a évoquée M. Massion, figure bien dans le code de l'environnement ; elle est évidemment fondamentale. Il en est de même de la lucidité des différents acteurs, obtenue par une information active et permettant une conscience du risque. C'est ce qui a amené M. Eric Doligé a dire que ce texte avait d'abord une qualité pédagogique.
Nous voulons aborder les problèmes en amont par la réduction de la vulnérabilité et avoir une approche préventive plutôt que curative.
Enfin, pour les risques industriels comme pour les risques naturels, nous voulons traiter collectivement, solidairement, les erreurs du passé, sans stigmatiser qui que ce soit ni désigner de coupables, puisque nous sommes tous les héritiers de cette histoire.
Certains ont regretté que des risques ne soient pas pris en compte dans ce texte. Mais il est d'abord dédié aux risques susceptibles de causer des pertes en vies humaines. C'est le fil conducteur du texte. Ne soyez donc pas étonnés de ne pas y trouver l'ensemble des risques qui peuvent menacer nos concitoyens.
M. Fernand Demilly a évoqué les atteintes au trait de côte ; M. Phlippe Leroy a parlé des sites miniers et de la nécessité de leur étendre les techniques de délaissement ou d'accélération de l'assurance. Ces questions sont intéressantes, mais un texte tenant en compte tous les risques n'aurait pas, je le crains, reçu l'accord du ministère des finances en raison de ses implications financières ; sinon, je vous aurais volontiers suivis !
Certains ont dit que ce texte ne visait que les inondations. Ce n'est pas le cas, même si, à l'évidence, c'est le risque naturel qui menace le plus nos concitoyens puisque deux millions de personnes sont concernées. Mais je n'oublie pas, à la suite de M. Yves Dauge, les problèmes des coteaux de la Loire ou d'autres risques d'effondrement.
Des aspects ont été provisoirement mis de côté, même s'ils touchent à la vie humaine. Certains ont regretté - je pense à Mme Marie-Christine Blandin en particulier - que des sites industriels, par ailleurs dangereux, ou des sites d'exploitation - je pense aux gares, aux ports - n'aient pas été traités dans le texte. Avec mon collègue Gilles de Robien, j'ai demandé une étude. J'espère bien que le débat, ici ou à l'Assemblée nationale, nous permettra des avancées significatives sur cette question extrêmement importante.
Mme Blandin a également évoqué la situation de Metaleurop. J'ai souhaité qu'à l'occasion de la discussion de ce texte soient examinées des propositions permettant de trouver, au moins en partie, une solution, d'autant que, à travers cette ténébreuse et sinistre affaire, nous avons pris conscience d'un certain nombre de vides juridiques. A l'évidence, nous ne pouvions donc pas parler de risques technologiques et industriels sans évoquer la situation de Metaleurop !
Je vais m'efforcer de répondre aux interrogations qui m'ont été posées, mais je ne serai toutefois pas exhaustive en ce début de soirée, me réservant d'être plus précise au cours de la discussion des articles. A ce stade de notre débat, la fin de la discussion générale, je me limiterai à trois catégories de questions : celles qui portent sur l'architecture financière, celles qui traitent des aspects méthodologiques et, enfin, celles qui sont relatives au volet social.
De nombreux orateurs m'ont fait part de leurs inquiétudes en matière de financement, notamment MM. Yves Coquelle, Francis Grignon et Claude Biwer. Vous avez raison de rappeler que la charge financière considérable revient, en premier lieu, à l'Etat, ce qui n'a peut-être pas été réaffirmé de façon suffisamment claire dans les articles de ce texte. J'accueillerai donc favorablement les amendements de M. Yves Détraigne qui vont dans ce sens.
Je sais bien que, si les choses vont sans dire, elles vont encore mieux en le disant !
Il est important de savoir que cette architecture financière aura besoin d'être pilotée. Aussi la préconisation, par M. Philippe Leroy, d'un établissement public foncier me paraît-elle être un élément tout à fait intéressant. Vous pensez, monsieur le sénateur, que cet établissement public foncier devrait être un établissement public national. Je préférerais pour ma part qu'il soit un établissement public foncier de site, à mon sens plus opérant, mais nous pourrons revenir sur le sujet au cours de la discussion des amendements.
A ceux qui craignent qu'on sollicite trop les petites communes rurales, je veux dire que ce seront les maîtres d'ouvrage qui fixeront le financement des servitudes. Bien entendu, il ne sera pas question d'imputer à de petites communes rurales des financements qu'elles seraient tout à fait incapables de supporter.
M. Jean-Paul Amoudry a craint, lui aussi, que l'argent ne manque. Je lui rappelle que nous avons décidé de consacrer 130 millions d'euros, pris sur le budget de l'Etat, aux plans de prévention des inondations. Des sommes extrêmement importantes sont également consacrées à la prévention des risques naturels dans les contrats de plan. Pour piloter moi-même ce genre d'opérations sur le terrain, je sais que l'argent ne manque pas, je vous l'assure, et que les lignes budgétaires sont même considérables ! Les difficultés ne sont pas tant dans les masses budgétaires que dans la maîtrise d'ouvrage, qui doit être robuste, et dans l'analyse méthodologique, qui, si elle est faible, ne permet pas de piloter des opérations efficaces.
C'est à une nouvelle culture que je vous invite et, avec ce projet de loi, j'ai le sentiment que nous avons, en partie au moins, résolu ces questions.
J'en viens aux critiques que vous avez émises sur la méthodologie.
Beaucoup d'entre vous ont regretté que certains dispositifs soient bureaucratiques et, par là même, contre-productifs. Un certain nombre des observations qui ont été formulées par les femmes et les hommes de terrain que vous êtes sont tout à fait justifiées. Pour l'article 1er, M. Henri Revol a souligné l'incapacité - le mot est peut-être fort : je dirai les difficultés - qu'éprouvent certains commissaires enquêteurs à organiser des réunions publiques. A l'évidence, l'architecture de l'article 1er mérite d'être refondue.
Pour l'article 14, M. le rapporteur Yves Détraigne ainsi que M. Philippe Arnaud ont, eux, signalé que l'étude d'occurrence était difficile à mener à bien - si tant est qu'il soit possible d'y parvenir, d'ailleurs - et que, pour être efficace, elle nécessiterait des fonds considérables. Je retiens ces observations, et nous allons travailler sur l'article 14.
M. Henri Revol a craint que la composition des CLIC ne soit trop rigide. Nous ferons une analyse du fonctionnement de ces commissions locales d'information et de concertation au bout d'un an et nous verrons s'il y a lieu de la modifier. Il ne serait sans doute pas inutile que soit éditée une charte des CLIC, mais je préfère le faire après cette période expérimentale plutôt qu'en première intention.
M. Daniel Raoul m'a demandé comment nous allions articuler les secrétariats permanents de prévention des pollutions industrielles, les S3PI, avec les CLIC. Des CLIC pourront fusionner avec des S3PI ; ils deviendront alors des sous-commissions de ces secrétariats. Des CLIC et des S3PI pourront aussi coordonner leurs actions.
Nous avons d'ailleurs mené, dans ce qu'on appelle le couloir de la chimie, près de Lyon, une démarche de coordination entre le secrétariat permanent pour la prévention des pollutions industrielles et des risques dans l'agglomération lyonnaise, dit Spiral, et les commissions expérimentales, démarche qui, sur le plan méthodologique, est tout à fait intéressante à analyser.
J'aborderai maintenant le volet social. En la matière, MM. André Lardeux et André Vantomme ont formulé des observations intéressantes, même si elles sont contradictoires. Les articles 5 à 11 du projet de loi que j'ai l'honneur de vous présenter ont fait l'objet, sous l'égide de mon collègue M. François Fillon, d'un dialogue social approfondi. Selon les indications de M. le Premier ministre, on a fait appel à la responsabilité des partenaires sociaux, qui ont donné leur accord sur un texte soigneusement équilibré.
D'une certaine façon, et involontairement, M. André Vantomme a répondu à ma volonté de ne pas modifier cet équilibre fragile. En voulant faire la promotion du précédent gouvernement, il a reconnu en effet que la barre était déjà haute pour les industriels et qu'il était inutile d'alourdir encore le dispositif.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai répondu de façon très brève - peut-être trop brève, d'ailleurs - à vos questions, mais nous reviendrons au cours du débat sur ces aspects financier, méthodologique et social.
Pour conclure, je veux remercier celles et ceux qui ont abordé la question sous un angle plus global : M. Yves Dauge et tout particulièrement M. Eric Doligé - ce qui ne m'a pas étonnée, compte tenu de sa qualité de président de l'établissement public Loire, l'EPL.
M. Doligé a bien rappelé que la sécurité était une responsabilité régalienne, mais que, pour autant, nous étions tous, même si l'Etat était garant de cette sécurité, appelés à l'assurer sur le terrain. Il a donc fait appel à la responsabilité de l'Etat, mais il a bien indiqué que l'échelle pertinente était celle du territoire soumis à risque, du bassin versant, et il a rappelé l'intérêt des établissements publics territoriaux de bassin. Il pourrait être utile que notre texte concrétise l'existence de ces établissements publics territoriaux de bassin, qui, pour l'instant, n'ont pas de fondement législatif.
Il a insisté sur le rôle de la collectivité chef de file, ce qui nous ramène au débat sur la décentralisation voulu par le Premier ministre. Ce rôle pourrait, demain, être confié à l'Institut français de prévention des inondations, préfiguré par le réseau européen d'expertise que j'ai réussi à faire avaliser par nos partenaires de l'Union européenne. Je suppose, monsieur le président de l'EPL, que vous avez déjà un site à proposer pour cet institut ! (Sourires.)
Enfin, je vois comme un clin d'oeil le fait que les deux derniers intervenants, MM. Christian Demuynck et Gérard Larcher, nous aient proposé une réflexion sur le principe de précaution, réflexion à laquelle je souscris.
D'une certaine façon, ici, ce soir, au Sénat, nous avons conclu nos travaux sur une réflexion préparatoire à cette charte de l'environnement voulue par le Président de la République - dont, à Nantes, se sont tenues les premières assises - pour porter au plus haut niveau de notre droit, c'est-à-dire au niveau constitutionnel, les principes qui ont guidé nos réflexions et nos débats de cet après-midi, et je veux vous en remercier. (Applaudissements dans les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que dans certaines travées du RDSE.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
DÉPÔT D'UNE QUESTION ORALE AVEC DÉBAT
M. le président. J'informe le Sénat que j'ai été saisi de la question orale avec débat suivante :
M. Jean-Claude Carle attire l'attention de M. le ministre des sports sur la place prépondérante que doit tenir le sport dans notre société et sur son importante dimension sociale.
Le 8 décembre dernier ont été présentées les conclusions des états généraux du sport. Aussi, suite aux diverses rencontres et concertations qui ont eu lieu entre les différents acteurs du monde sportif, il demande à M. le ministre quelles seront les priorités de son ministère dans les prochains mois.
Plus précisément, la création, d'une part, d'un « observatoire du sport » dans chaque région et, d'autre part, d'une « fondation du sport » a été évoquée. Aussi M. Jean-Claude Carle aimerait connaître le rôle précis de ces structures ainsi que la manière dont elles seront gérées et dont elles fonctionneront (n° 10).
Conformément aux articles 79 et 80 du règlement, cette question orale avec débat a été communiquée au Gouvernement et la fixation de la date de la discussion aura lieu ultérieurement.
DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI
M. le président. J'ai reçu de MM. Jean-Pierre Sueur, Bertrand Auban, Jacques Bellanger, Gilbert Chabroux, Roland Courteau, Yves Dauge, Jean-Pierre Demerliat, Claude Domeizel, Michel Dreyfus-Schmidt, Bernard Frimat, Charles Gautier, Jean-Pierre Godefroy, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Serge Lagauche, Roger Lagorsse, André Lejeune, Pierre Mauroy, Jean-François Picheral, Bernard Piras, Mme Gisèle Printz, MM. Daniel Reiner, Roger Rinchet, Claude Saunier, Simon Sutour, Pierre-Yvon Trémel, André Vantomme, Marcel Vidal et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, une proposition de loi relative aux opérations funéraires, à la protection des familles à la suite d'un décès et à l'habilitation des opérateurs funéraires.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 161, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
TEXTE SOUMIS AU SÉNAT EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de règlement du Conseil sur les mesures que la Communauté peut prendre en regard de l'effet combiné des mesures antidumping ou compensatoires et des mesures de sauvegarde.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-2195 et distribué.
RENVOIS POUR AVIS
M. le président. J'informe le Sénat que le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions relatives à l'urbanisme, à l'habitat et à la construction (n° 160, 2002-2003), dont la commission des affaires économiques et du Plan est saisie au fond, est renvoyé pour avis, à sa demande, à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
J'informe le Sénat que le projet de loi relatif aux entreprises de transport aérien et notamment à la société Air France (n° 108, 2002-2003), dont la commission des affaires économiques et du Plan est saisie au fond, est renvoyé pour avis, à sa demande, à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
ORDRE DU JOUR
M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 5 février 2003 :
Suite de la discussion du projet de loi (n° 116, 2002-2003) relatif à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages.
Rapport (n° 154, 2002-2003) de M. Yves Détraigne, fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan.
Avis (n° 143, 2002-2003) de M. André Lardeux, fait au nom de la commission des affaires sociales.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements
Projet de loi relatif à la répression de l'activité de mercenaire (n° 287, 2001-2002) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 5 février 2003, à dix-sept heures.
Conclusions de la commission des affaires sociales sur la proposition de M. Bernard Joly visant à restreindre la consommation de tabac chez les jeunes (n° 77, 2002-2003) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 10 février 2003, à dix-sept heures.
Question orale avec débat (n° 10) de M. Jean-Claude Carle à M. le ministre des sports sur la politique du sport :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 10 février 2003, à dix-sept heures.
Projet de loi relatif aux entreprises de transport aérien et notamment à la société Air France (n° 108, 2002-2003) :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 11 février 2003, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 11 février 2003, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures vingt.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD
ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES DU SÉNAT
Etabli par le Sénat dans sa séance du mardi 4 février 2003 à la suite des conclusions de la conférence des présidents
Mercredi 5 février 2003, à 15 h 15 et le soir :
Ordre du jour prioritaire
Suite du projet de loi relatif à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages (n° 116, 2002-2003).
Jeudi 6 février 2003 :
Ordre du jour prioritaire
A 9 h 30 :
1° Suite du projet de loi relatif à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages.
A 11 h 30 :
2° Projet de loi relatif à la répression de l'activité de mercenaire (n° 287, 2001-2002).
(La conférence des présidents a décidé de fixer au mercredi 5 février 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.)
A 15 heures et le soir :
3° Suite du projet de loi relatif à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages.
Mardi 11 février 2003 :
Ordre du jour réservé
A 10 heures :
1° Conclusions de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi de M. Bernard Joly visant à restreindre la consommation de tabac chez les jeunes (n° 77, 2002-2003).
(La conférence des présidents a décidé de fixer au lundi 10 février 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.)
A 16 heures :
2° Question orale avec débat (n° 10) de M. Jean-Claude Carle à M. le ministre des sports sur la politique du sport.
(En application des premier et deuxième alinéas de l'article 82 du règlement, la conférence des présidents a fixé à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront dans le débat les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 10 février 2003.)
Mercredi 12 février 2003, à 15 heures et le soir :
1° Sous réserve de la transmission du texte et de la décision du Sénat, nomination des membres de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi pour l'initiative économique (AN, n° 507 rect.).
(Les candidatures à cette commission spéciale devront être déposées au secrétariat central du service des commissions au plus tard le mardi 11 février 2003, à 17 heures.)
Ordre du jour prioritaire
2° Projet de loi relatif aux entreprises de transport aérien et notamment à la société Air France (n° 108, 2002-2003).
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 11 février 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 11 février 2003.)
Jeudi 13 février 2003 :
A 9 h 30 :
Ordre du jour prioritaire
1° Suite du projet de loi relatif aux entreprises de transport aérien, et notamment à la société Air France.
A 15 heures et le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures.)
Ordre du jour prioritaire
3° Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi pour la sécurité intérieure.
4° Suite de l'ordre du jour du matin.
Le Sénat suspendra ses travaux en séance plénière du dimanche 16 au dimanche 23 février 2003.
Mardi 25 février 2003 :
A 9 h 30 :
1° Dix-huit questions orales (l'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement) :
- n° 117 de M. Bernard Piras à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales (Financement des opérations de gestion des déchets) ;
- n° 120 de Mme Marie-Claude Beaudeau à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire (Situation des agents de la fonction publique ayant été exposés à l'amiante) ;
- n° 123 de M. Jean-Claude Peyronnet à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire (Régime indemnitaire applicable aux agents d'entretien des collectivités territoriales) ;
- n° 130 de M. Jacques Peyrat à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire (Classification des communes et calcul de l'indemnité de résidence des fonctionnaires) ;
- n° 132 de M. Daniel Goulet à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire (Suivi du sommet de la Terre de Johannesburg) ;
- n° 134 de M. Francis Grignon à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité (Professionnalisation des métiers du domicile) ;
- n° 138 de M. Gérard Delfau à Mme la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées (Conditions d'accueil des personnes handicapées dans le département de l'Hérault) ;
- n° 141 de M. René-Pierre Signé à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer (Avenir du transport scolaire) ;
- n° 142 de M. François Marc à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité (Accidents du travail dans le secteur agroalimentaire) ;
- n° 143 de M. Philippe Madrelle à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité (Indemnisation des victimes de l'amiante) ;
- n° 145 de M. Jean-Pierre Demerliat à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire (Prise en charge du traitement et des charges sociales des agents communaux exerçant un mandat syndical) ;
- n° 147 de M. Simon Sutour à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer (Développement du centre météorologique du mont Aigoual) ;
- n° 148 de M. Bernard Dussaut à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales (Prorogation d'une communauté de communes en Gironde) ;
- n° 153 de Mme Danielle Bidard-Reydet à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche (Avenir de l'entreprise Aventis) ;
- n° 154 de M. Alain Gournac à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire (Prévention de l'échec scolaire des enfants précoces) ;
- n° 157 de M. Thierry Foucaud à M. le ministre délégué au commerce extérieur (Négociations de l'accord général sur le commerce et les services) ;
- n° 158 de M. Adrien Gouteyron à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales (Plan de maîtrise de pollutions agricoles) ;
- n° 165 de M. Jean-Léonce Dupont à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales (Conditions de classement d'une commune en station touristique autorisant l'ouverture d'un casino).
A 16 heures et, éventuellement, le soir :
Ordre du jour prioritaire
2° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions relatives à l'urbanisme, à l'habitat et à la construction (n° 160, 2002-2003).
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 24 février 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 24 février 2003.)
Mercredi 26 février 2003 :
Ordre du jour prioritaire à 15 heures et le soir :
Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions relatives à l'urbanisme, à l'habitat et à la construction.
Jeudi 27 février 2003 :
Ordre du jour prioritaire à 9 h 30 :
1° Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions relatives à l'urbanisme, à l'habitat et à la construction.
A 15 heures et, éventuellement, le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures.)
Ordre du jour prioritaire
3° Suite de l'ordre du jour du matin.
Mardi 4 mars 2003 :
Ordre du jour prioritaire
A 9 h 30 :
1° Projet de loi autorisant l'approbation de l'avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Sultanat d'Oman en vue d'éviter les doubles impositions (ensemble un protocole) (n° 94, 2002-2003).
2° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'avenant à la convention entre la République française et la République fédérale d'Allemagne en vue d'éviter les doubles impositions et d'établir des règles d'assistance administrative et juridique réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, ainsi qu'en matière de contributions des patentes et de contributions foncières, du 21 juillet 1959, modifiée par l'avenant du 9 juin 1969 et par l'avenant du 28 septembre 1989, signé à Paris le 20 décembre 2001 (n° 136, 2002-2003).
3° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Lettonie relatif au statut de l'immeuble de la légation de la République de Lettonie à Paris (n° 109, 2002-2003).
4° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Lituanie relatif au statut de l'immeuble de la légation de la République de Lituanie à Paris (n° 110, 2002-2003).
5° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Estonie relatif à l'indemnisation de la République d'Estonie pour l'immeuble de son ancienne légation à Paris (n° 111, 2002-2003).
(La conférence des présidents a décidé que ces trois projets de loi feraient l'objet d'une discussion générale commune).
6° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de l'accord de stabilisation et d'association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et l'ancienne République yougoslave de Macédoine, d'autre part (ensemble sept annexes et cinq protocoles) (n° 134, 2002-2003).
7° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de l'accord de stabilisation et d'association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République de Croatie, d'autre part (ensemble huit annexes et six protocoles) (n° 135, 2002-2003).
8° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne relatif à la construction et l'entretien de ponts frontières sur le Rhin dont les Parties contractantes n'assurent pas la maîtrise d'ouvrage (n° 112, 2002-2003).
9° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation du protocole de Carthagène sur la prévention des risques biotechnologiques relatif à la convention sur la diversité biologique (n° 137, 2002-2003).
10° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Son Altesse Sérénissime le Prince de Monaco relatif à l'attribution et à l'utilisation par la société Télé Monte-Carlo de fréquences hertziennes terrestres pour la diffusion de son programme à partir d'installations d'émission implantées en territoire français (ensemble une annexe) (n° 113, 2002-2003).
11° Projet de loi autorisant l'approbation de la convention sur les effets transfrontières des accidents industriels (ensemble treize annexes) (n° 311, 2001-2002).
12° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de l'accord euro-méditerranéen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République arabe d'Egypte, d'autre part (n° 133, 2002-2003).
13° Projet de loi autorisant l'adhésion de la France au protocole de 1996 à la convention de 1972 sur la prévention de la pollution des mers résultant de l'immersion de déchets (n° 310, 2001-2002).
14° Projet de loi autorisant l'approbation de la convention sur les polluants organiques persistants (ensemble six annexes) (n° 395, 2001-2002).
15° Projet de loi autorisant l'approbation de la convention sur la procédure de consentement préalable en connaissance de cause applicable à certains produits chimiques et pesticides dangereux qui font l'objet d'un commerce international (ensemble cinq annexes) (n° 396, 2001-2002).
(La conférence des présidents a décidé que ces deux projets de loi feraient l'objet d'une discussion générale commune.)
16° Projet de loi autorisant l'approbation du protocole d'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Grand-Duché de Luxembourg relatif au raccordement du Grand-Duché de Luxembourg au TGV est-européen (ensemble trois annexes) (n° 130, 2002-2003).
A 16 heures et le soir :
17° Eloge funèbre de Robert Calmejane.
Ordre du jour prioritaire
18° Sous réserve de son dépôt sur le bureau du Sénat, projet de loi de sécurité financière.
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 3 mars 2003, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.
- à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 3 mars 2003.)
Mercredi 5 mars 2003, à 15 heures et le soir :
Ordre du jour prioritaire
Suite du projet de loi de sécurité financière.
Jeudi 6 mars 2003 :
A 9 h 30 :
Ordre du jour prioritaire
1° Suite du projet de loi de sécurité financière.
A 15 heures et, éventuellement, le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs des questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures.)
Ordre du jour prioritaire
3° Suite de l'ordre du jour du matin.
Mardi 11 mars 2003 :
A 9 h 30 :
1° Questions orales.
A 16 heures et le soir :
Ordre du jour prioritaire
2° Suite du projet de loi de sécurité financière.
Mercredi 12 mars 2003, à 15 heures et le soir :
Ordre du jour prioritaire
Suite du projet de loi de sécurité financière.
A N N E X E 1
Question orale avec débat inscrite à l'ordre du jour
de la séance du mardi 11 février 2003
M. Jean-Claude Carle attire l'attention de M. le ministre des sports sur la place prépondérante que doit tenir le sport dans notre société et sur son importante dimension sociale. Le 8 décembre dernier, ont été présentées les conclusions des états généraux du sport. Aussi, suite aux diverses rencontres et concertations qui ont eu lieu entre les différents acteurs du monde sportif, il demande à M. le ministre quelles seront les priorités de son ministère dans les prochains mois. Plus précisément, la création, d'une part, d'un « observatoire du sport » dans chaque région et, d'autre part, d'une « fondation du sport » a été évoquée. Aussi M. Jean-Claude Carle aimerait connaître le rôle précis de ces structures ainsi que la manière dont elles seront gérées et dont elles fonctionneront (n° 10).
A N N E X E 2
Questions orales inscrites à l'ordre du jour
de la séance du mardi 25 février 2003
N° 117. - M. Bernard Piras attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur la difficulté de mettre en place un système pertinent de recouvrement des sommes relatives à l'enlèvement des ordures ménagères. La taxe (TEOM) et la redevance (REOM) comportent chacune des inconvénients. Pour ce qui est de la taxe, le problème principal concerne son évaluation puisqu'elle s'appuie sur l'impôt foncier sur les propriétés bâties, son calcul étant déconnecté du service rendu. Ainsi, l'assiette de la TEOM étant celle du foncier bâti apparaît injuste dans la mesure où la valeur locative utilisée pour le calcul de cet impôt varie de façon souvent incompréhensible et opaque. En outre, il n'existe pas de lien entre l'assiette et la quantité de déchets produits. En ce qui concerne la redevance, la difficulté majeure porte sur le recouvrement des impayés, la redevance ne bénéficiant pas du privilège du Trésor sur créances. En revanche, elle présente l'avantage important d'être fondée sur une logique économique où le paiement par l'usager vient en contrepartie du coût du service rendu. Le choix de cette logique économique, au travers de laquelle la collectivité est incitée à mieux maîtriser les coûts et l'usager à limiter la quantité de déchets qu'il produit, apparaît préférable dans un contexte de modernisation, de transparence et d'efficacité de la gestion des déchets. L'évolution technologique des moyens de collecte, avec notamment la possibilité d'équiper les engins de dispositifs informatiques de pesée embarquée, devrait contribuer à favoriser le développement du recours à la redevance. Ainsi, si la REOM répond beaucoup mieux aux objectifs annoncés de maîtrise des déchets, sa mise en oeuvre, avec notamment les frais de gestion qui relèvent de la collectivité, laquelle doit établir les fichiers, préparer les factures et gérer les nombreux impayés, constitue un lourd handicap à son développement. Il lui demande donc de prendre rapidement des dispositions pour moderniser le régime de la redevance avec, par exemple, un renforcement notable des pouvoirs de la collectivité en cas d'impayés. La création d'un instrument qui allierait les avantages de la taxe et de la redevance serait la meilleure solution. Une telle évolution est-elle envisageable ?
N° 120. - Mme Marie-Claude Beaudeau attire l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire sur la situation des agents de la fonction publique et territoriale ayant travaillé dans des services utilisant ou manipulant de l'amiante. Elle lui fait en effet observer que l'article 41 de la loi n° 98-1194 de financement de la sécurité sociale pour 1999 réserve le bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (ACAATA) aux salariés relevant du code du travail et en exclut donc les agents de la fonction publique territoriale et hospitalière. Elle lui demande donc de lui préciser les mesures qu'il envisage de prendre afin que ces agents exposés à l'amiante puissent bénéficier de l'ACAATA.
N° 123. - M. Jean-Claude Peyronnet attire l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire sur le régime indemnitaire applicable aux agents d'entretien des collectivités territoriales. En effet, suite à la modification des régimes indemnitaires des fonctionnaires de l'Etat par quatre décrets en date du 14 janvier 2002, les collectivités territoriales ont procédé par application du principe de parité à la refonte de leurs régimes indemnitaires. Or, il semble qu'une difficulté ait surgi en ce qui concerne les agents d'entretien. En effet, suite à l'abrogation du décret du 6 octobre 1950, ces agents ne peuvent plus bénéficier du régime des indemnités horaires pour travaux supplémentaires (décret n° 2002-60 du 14 janvier 2002). Aussi, certaines collectivités ont décidé d'appliquer à ces agents l'indemnité d'administration et de technicité (IAT) instituée par le décret n° 2002-61 du 14 janvier 2002. Or, la circulaire du 11 octobre 2002 (ministère de l'intérieur/DGCL-NOR LBL BO2 10023C) indique l'inapplicabilité de l'IAT aux agents d'entretien en raison de l'équivalence avec les agents de travaux de l'équipement pour lesquels une prime spécifique existe (prime de l'article 4 du décret n° 91-875 du 6 septembre 1991). Cette interprétation est cependant discutable dans la mesure où la majorité des agents d'entretien des collectivités ne peut pas bénéficier des dispositions de l'article 4 du décret n° 91-875 du 6 septembre 1991 car « ne participant [pas] aux travaux effectués par la collectivité ou l'établissement ». Par ailleurs, la circulaire du 11 octobre 2002 réaffirme dans le même temps que l'IAT consolide les IHTS versées forfaitairement, dispositif auquel étaient éligibles les agents d'entretien. Dans ces conditions, les services du contrôle de légalité ont relevé un risque d'illégalité des dispositifs mis en oeuvre par les collectivités. En conséquence, il souhaiterait, en vue d'éviter toute insécurité juridique, qu'il lui confirme la légalité de l'attribution de l'IAT aux agents d'entretien des collectivités territoriales en application des arguments ici développés.
N° 130. - M. Jacques Peyrat souhaite appeler l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire sur le caractère injuste et inadapté des critères d'attribution de l'indemnité de résidence versée aux fonctionnaires comme complément de rémunération afin de compenser les différences du coût de la vie d'une zone géographique à une autre. Le taux de cette indemnité varie en effet en fonction de trois zones, avec un taux de 3 % du traitement brut pour la zone 0, un taux de 1 % pour la zone 2 et 0 % pour la zone 3. Or le classement actuel des communes du territoire métropolitain dans ces différentes zones résulte pour l'essentiel d'une répartition opérée en 1945. Certaines communes ont depuis connu un développement démographique, économique et social, comme le département des Alpes-Maritimes. En effet, ce département, et notamment la ville de Nice, sont actuellement classés en zone 2 alors que le coût de la vie est connu pour y être très élevé dans bien des domaines, dont celui de l'immobilier. La faiblesse de l'indemnité allouée apparaît dès lors comme un obstacle certain à la mutation des fonctionnaires. Pour La Poste, le taux de refus atteint cette année le record de 80 %. Dans la police, le refus de mutation est également très important. Par ailleurs, cette situation apparaît d'autant plus injuste que le département du Var et le département des Bouches-du-Rhône voient le nombre de leurs communes en zone 0 augmenter au fil des années sans que le coût de la vie y soit plus élevé qu'à Nice. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui faire connaître s'il envisage une éventuelle révision du classement actuel des communes du territoire métropolitain afin de prendre en compte les réalités économiques locales et d'assurer l'égalité de traitement des fonctionnaires.
N° 132. - M. Daniel Goulet, s'étant rendu à Johannesburg pendant toute la durée du sommet de la Terre, a pu prendre connaissance des études faites notamment sur la déforestation et ses effets au regard des changements climatiques. Lors d'un débat sur l'avenir de la sylviculture devant l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe en janvier 2002, il avait fait adopter un amendement visant à solliciter des Etats membres afin qu'ils interviennent auprès de leurs administrations pour tenter de limiter les consommations de papier. En effet, chaque parlementaire est bien conscient et s'indigne parfois de l'abondance, voire de l'excès, de documents reçus chaque jour, en particulier de certains ministères de certaines administrations. Ces derniers devraient montrer l'exemple par une réduction substantielle des publications sur papier d'autant plus inutile que la diffusion par voie électronique est désormais très répandue. Il interroge donc M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire pour savoir quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour engager son administration et ses services dans la voie des économies dans l'utilisation du papier. Economies qui seront profitables non seulement aux contribuables et au ministère du budget mais aussi qui iront dans le sens d'un plus grand respect des ressources naturelles de la planète qui constitue notre patrimoine commun.
N° 134. - M. Francis Grignon appelle l'attention de M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité sur le renforcement de la professionnalisation des métiers du domicile. Le 29 mars 2002, les partenaires sociaux ont signé un accord de branche relatif aux emplois, aux classifications et aux rémunérations afin de renforcer la professionnalisation des métiers du domicile. Les associations d'aide aux mères et aux familles à domicile participent à la mise en oeuvre des politiques d'action sociale et familiale. Elles interviennent auprès de familles, de personnes handicapées ou de personnes âgées qui rencontrent des difficultés de santé, d'autonomie ou d'insertion. Les efforts de professionnalisation du secteur de l'aide à domicile et de reconnaissance de ces métiers ont besoin d'être valorisés par de réelles définitions d'emploi, par une classification cohérente et par des grilles de rémunération attractives. Il le prie donc de bien vouloir lui indiquer les initiatives qu'il envisage de prendre afin que cet accord puisse être agréé et que son financement puisse être assuré de façon à pouvoir rémunérer comme il se doit les professionnels de ce secteur.
N° 138. - M. Gérard Delfau attire l'attention de Mme la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées sur le sous-équipement alarmant du département de l'Hérault en matière d'accueil de personnes handicapées dans une structure spécialisée. Il n'existe aucun établissement pour les enfants gravement autistes, jusqu'à l'âge de douze ans. Ils sont pris en charge dans des IME qui n'ont ni les moyens financiers ni l'encadrement nécessaire. Au-delà de douze ans, un seul établissement est habilité à les accueillir, dont la liste d'attente décourage les familles. Cette situation est ancienne et la forte croissance démographique du département vient l'aggraver. En tant que président de l'association L'Ensoleillade, qui gère un institut médico-éducatif (IME), une maison d'accueil spécialisée (MAS) et un service d'éducation spécialisé et de soins à domicile (SESSAD) sur sa commune, à Saint-André-de-Sangonis, il tire le signal d'alarme. En effet, il constate un malaise chez le personnel salarié : la mise en place des 35 heures et la faiblesse des moyens alloués ne lui permettent plus de s'occuper aussi bien que par le passé des résidents. C'est humainement insupportable pour le personnel d'encadrement, pour les patients et leur famille ainsi que pour les élus ! Par ailleurs, en tant que gestionnaire, il s'inquiète de l'arrivée prochaine du « budget global ». Sur la base actuelle, la MAS, sous-dotée, au départ, serait promise à des difficultés quasi insurmontables. Or, pour tous ces points, il ne trouve aucun interlocuteur qui lui apporte, au niveau local, de solution. Il lui signale que les services déconcentrés du ministère, à Montpellier, sont tellement sous-équipés en personnel que, lors du conseil d'administration de L'Ensoleillade, le 25 octobre dernier, le budget « prévisionnel » de 2002 n'avait toujours pas été reçu ! Aussi, au nom des élus de cette instance, il lui demande quelles mesures elle compte prendre pour que cela ne se reproduise pas et qu'une mise à plat soit décidée et effectuée pour l'année 2003. Sans oublier de rendre hommage aux nombreux bénévoles qui oeuvrent dans ce secteur sensible.
N° 141. - M. René-Pierre Signé souhaiterait attirer l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sur l'inquiétude des acteurs du transport par autocar, notamment scolaire. Le protocole d'accord de 1992 relatif au contrat de travail des conducteurs scolaires intermittents a été dénoncé. A compter d'avril 2003, les entreprises du secteur ne pourront plus recourir à des conducteurs intermittents, qui devront être rémunérés à temps complet sur cinquante-deux semaines et non sur les trente-cinq de la période scolaire. La dénonciation de ce protocole d'accord par les syndicats entraînera de tels surcoûts que l'avenir des transports scolaires devient incertain. Cependant, un accord social a été signé le 18 avril dernier qui permettrait la continuation du service avec un accompagnateur économique des organisateurs du transport dans un cadre juridique que l'Etat devrait définir. Il souhaiterait connaître la position du Gouvernement sur ce problème très important en zone rurale.
N° 142. - M. François Marc attire l'attention de M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité sur les conditions de travail des métiers de l'agroalimentaire et plus particulièrement sur les risques d'accidents du travail encourus par les employés de la profession. Particulièrement déterminants en Bretagne, les métiers de l'agroalimentaire, notamment ceux de l'abattage et de la conservation, révèlent un taux d'accidents de travail bien supérieur à ceux du régime général ainsi qu'un indice de fréquence (rapport du nombre d'accidents sur le nombre de salariés) plus élevé que pour l'ensemble de la France. Selon les statistiques de la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM) et de la direction des risques professionnels de la chambre d'agriculture de Bretagne, un salarié de l'abattage de bétail et de découpe de viande sur cinq est aujourd'hui susceptible de connaître un accident de travail par an (soit 225 contre 46 dans le régime général). Au-delà du coût financier causé par le coût direct des arrêts de travail représentant l'équivalent de 800 emplois à temps plein, le coût humain de cet état de fait (maladies professionnelles, troubles musculo-squelettiques engendrés par le travail à la chaîne...) s'illustre à travers une pénibilité de ces métiers bien supérieure à celle de l'ensemble des autres secteurs professionnels. Il lui demande en conséquence quelles dispositions le Gouvernement compte mettre en oeuvre pour remédier à cette situation d'injustice vis-à-vis du risque encouru dans ce secteur et quelles évolutions il est envisagé de faire suivre au niveau de la réglementation du travail dans le but d'atténuer les risques personnels des salariés les plus exposés.
N° 143. - M. Philippe Madrelle appelle l'attention de M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité sur le caractère nécessaire et indispensable d'une réparation juste et équitable en faveur des victimes de l'amiante. Il lui rappelle que, lors du dernier conseil d'administration du FIVA (fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante), une proposition commune émanant des associations de défense des victimes de l'amiante et des organisations syndicales avait été élaborée ; cette proposition concernant le barème médical et le principe du barème d'indemnisation va dans le sens d'une équitable réparation, mais les représentants des pouvoirs publics se sont abstenus. Les résultats de ce vote ne devant pas être entérinés et deux nouveaux membres venant d'être nommés au conseil d'administration du FIVA, il lui fait part de l'inquiétude légitime des membres des associations de défense des victimes de l'amiante qui attendent toujours réparation. Il lui rappelle que l'amiante cause le décès de trois mille personnes par an et que de nombreux départements sont cruellement touchés par ce fléau, en particulier celui de la Gironde. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui préciser les mesures qu'il compte prendre afin que les familles des victimes de l'amiante obtiennent dans les plus brefs délais une indemnisation juste et équitable.
N° 145. - M. Jean-Pierre Demerliat attire l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire sur la prise en charge des traitements et charges sociales des agents qui exercent un mandat syndical dans les petites collectivités locales. Dans les collectivités de plus de cinquante agents, les centres de gestion remboursent le traitement et les charges sociales des agents désignés par les organisations syndicales pour bénéficier de décharges d'activités de service ou d'autorisations spéciales d'absence. Dans les collectivités de moins de cinquante agents, où les autorisations spéciales d'absence font l'objet d'une répartition entre les différentes organisations syndicales qui désignent parmi les agents de ces collectivités ceux qui les représentent, aucun remboursement n'est obligatoire. Ainsi donc, toute désignation d'agent par une organisation syndicale induit une charge extrêmement lourde pour les petites communes : elles doivent non seulement supporter le paiement du traitement et des charges du fonctionnaire en question mais également financer son remplacement. Il demande donc quelles mesures pourraient être envisagées afin que la prise en charge de l'exercice du droit syndical n'obère pas les finances des petites collectivités.
N° 147. - M. Simon Sutour attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sur le maintien et le développement du centre météorologique du mont Aigoual dans le département du Gard. Les récentes inondations des 8 et 9 septembre dernier sont venues rappeler l'importance de la prévision en matière météorologique dans la prévention et dans la gestion des situations de crise : l'envoi des informations spéciales lors des épisodes dangereux, notamment en ce qui concerne les fortes précipitations, s'avère indispensable pour la gestion des crues. La localisation, la qualité du matériel et l'expérience des grands professionnels font de la station du mont Aigoual un maillon indispensable de la prévision météorologique en région Languedoc-Roussillon. La station est le véritable poumon des Cévennes et les retombées économiques sont considérables, tant localement au niveau touristique que nationalement pour Météo-France qui bénéficie ainsi d'un centre stratégique et profitable. Or, la communauté de communes de l'Aigoual regroupant les neuf communes situées de part et d'autre du massif s'est récemment émue des menaces de restrictions budgétaires qui pèsent sur le centre météorologique de l'Aigoual, et plus particulièrement sur les baisses d'effectifs envisagées concernant le personnel de Météo-France ; l'effectif actuel est à la mesure des besoins de l'observatoire ; deux personnes en continu sont indispensables pour un bon fonctionnement de la station et pour assurer la continuité de ses missions. C'est pourquoi il souhaiterait que le ministre puisse apporter des garanties quant à sa volonté de maintenir les effectifs en place au centre météorologique du mont Aigoual et lui préciser quelles sont ses intentions pour contribuer au développement de la station.
N° 148. - M. Bernard Dussaut appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur le dossier de prorogation de la communauté de communes du Haut Entre-Deux-Mers (Gironde). Créée en janvier 1997, cette communauté de communes devait être renouvelée à compter du 1er janvier 2003 pour une durée illimitée. Les démarches ont été engagées dès le mois de juillet 2001. Les réunions avec les services de l'Etat se sont multipliées au cours de l'année 2002 et les procédures exigées par l'administration ont été respectées. Le 20 décembre 2002, l'accord pour la signature de l'arrêté de prorogation semblait acquis. Le 31 décembre, par téléphone, il était annoncé que le ministère de l'intérieur avait donné des directives pour que l'arrêté ne soit pas signé. A l'heure où l'on parle d'une nouvelle étape de la décentralisation, où l'on affirme que « l'organisation de nos institutions ne peut être conçue depuis Paris en ignorant l'histoire et les réalités locales de la France », il souhaiterait connaître sa position sur la manière dont fut conduit ce dossier par ses services.
N° 153. - Mme Danielle Bidard-Reydet attire l'attention de M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche quant au devenir de la recherche sur les sciences de la vie en France et plus particulièrement sur l'entreprise Aventis. Le personnel du site de Romainville, suite à l'annonce de la restructuration annoncée le 18 octobre 2002 par la direction, a décidé de proposer un projet alternatif qui permettrait de préserver les compétences, les infrastructures, et les emplois. Il permettrait de développer la recherche dans la chaîne du médicament en matière de produits anti-infectieux. Ce projet s'inscrit, par ailleurs, dans les préoccupations de la Commission de Bruxelles. Ce projet vient d'être présenté au comité central d'entreprise. Elle lui demande ce qu'il compte faire pour soutenir ce dossier.
N° 154. - M. Alain Gournac attire l'attention de M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire sur la prévention de l'échec scolaire des enfants dits « intellectuellement précoces ». Il n'est pas encore suffisamment su que ces enfants dits « intellectuellement précoces » sont en situation d'échec pour la simple raison que dès leur scolarisation leur soif d'apprendre n'a pas été stimulée par un rythme d'apprentissage adapté à leurs potentialités et qu'ils ont fini par s'ennuyer à l'école, voire à la prendre en grippe. Bénéficiant de grandes facilités, ils ne sont pas entraînés à l'effort personnel et, par la même occasion, n'acquièrent pas la discipline et les méthodes de travail sans lesquelles il n'est pas de réussite durable possible. Ces méthodes doivent s'acquérir, dès les premières années, pour permettre à ces enfants intellectuellement précoces de donner toute leur mesure. Ceux-ci représentent de 2,5 à 5 % d'une classe d'âge et appartiennent à tous les milieux, ce qui tend à prouver que la précocité n'est pas un phénomène social ou culturel. Elle existe. C'est un fait. Soyons pragmatiques : 33 % de ces enfants sont en situation d'échec en fin de 3e, 17 % d'entre eux font des études médiocres. C'est un gâchis évident. C'est un principal de collège de son département des Yvelines qui a créé, il y a dix ans exactement, une association aujourd'hui reconnue pour la qualité de son travail sur la question de la précocité. Elle comptait 40 adhérents la première année, elle en compte 3 500 aujourd'hui avec des antennes un peu partout en France. Ce n'est pas, bien entendu, le signe que le nombre des enfants précoces est en augmentation dans notre pays, mais celui d'une prise de conscience grandissante de la réalité d'un problème. C'est aussi le signe que parler de la précocité est devenu possible dans notre société et que cela le devient aussi dans nos écoles. Aussi, il lui demande ce qu'il envisage de mettre en oeuvre pour permettre une meilleure prise en compte de cette réalité et quels sont ses projets en vue d'une meilleure intégration de ces enfants, il le répète, de toute condition sociale, dans notre système scolaire.
N° 157. - M. Thierry Foucaud souhaite interroger M. le ministre délégué au commerce extérieur sur les conditions de déroulement des actuelles négociations relatives à l'accord général sur le commerce et les services. Alors que ce texte se fixe pour objectif la libéralisation de l'ensemble des services, publics ou non, aucune concertation digne de ce nom n'a été menée, ni avec la société civile ni avec ses représentants élus. Au niveau communautaire, la Commission européenne a certes invité les citoyens à s'exprimer avant le 10 janvier 2003, mais c'est par le biais d'une consultation publique ouverte sur son site internet dans un délai très court, avec de surcroît peu d'informations sur le contenu des négociations en cours. Voilà qui en restreint l'impact. Les députés européens n'ont, quant à eux, pas été appelés à voter sur ces questions. Pour ce qui concerne notre pays, « la France défendra une position issue de la plus large concertation avec les parlementaires et les organisations non gouvernementales », avez-vous dit. Pourtant, la position de la France est déjà définie, alors que les parlementaires n'en ont pas débattu. Surtout, les dangers de l'accord général sur le commerce des services justifient un grand débat national, or les délais ne sont pas suffisants pour le mener dans de bonnes conditions. Voilà pourquoi il lui demande quelles mesures il envisage de prendre pour, dans ce cadre, sauvegarder nos services publics, rendre publiques et soumettre au Parlement les propositions de la France avant de poursuivre toute négociation.
N° 158. - M. Adrien Gouteyron attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales sur la question du plan de maîtrise des pollutions agricoles. Il lui rappelle que les agriculteurs sont conscients de l'importance et la nécessité de cette politique. Or, aujourd'hui les zonages ont été modifiés depuis le 1er janvier 2003. Pour répondre à la directive européenne de résorption des nitrates, priorité est aujourd'hui donnée aux élevages situés en zones vulnérables et, en dehors de ces zones, à tous les élevages de plus de 90 UGB. Il lui indique, à ce sujet, que beaucoup d'exploitations en zone de montagne n'atteignent pas ce seuil. D'autre part, avec ce retrait des zones non vulnérables, ce sont des régions entières qui s'étaient engagées dans le PMPOA dès 1994, qui se sentent aujourd'hui mises à l'écart du programme environnemental. Il lui demande donc, d'une part, s'il envisage de mettre en place un financement complémentaire associant modernisation et amélioration environnementale. Il lui demande d'autre part, alors que les zones de montagne furent à la fois les plus respectueuses de l'environnement et les plus pénalisées dans leur mise aux normes, s'il envisage de promouvoir une révision des zonages. En effet, ces zones s'engagent dans des filières de qualité qui nécessitent une grande adaptation des exploitations à ces problèmes agri-environnementaux.
N° 165. - M. Jean-Léonce Dupont rappelle à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales que l'autorisation instituée par la loi du 15 juin 1907 modifiée réglementant les jeux dans les casinos des stations balnéaires, thermales et climatiques et le décret n° 59-1489 du 22 décembre 1959 est accordée par le ministre de l'intérieur dans les localités auxquelles le caractère de station balnéaire, thermale ou climatique a été reconnu dans des conditions fixées par le code des communes. Cette possibilité est ouverte de fait aux « stations classées » mais cette expression est ambiguë. Il existe en effet un classement officiel prévu par la loi et des classements organisés par des associations de communes pour favoriser leur promotion, comme par exemple les « stations vertes de vacances ou les villages de neige ». Sans méconnaître les conditions nécessaires pour accéder à ce classement, à savoir disposer d'une ressource touristique et d'une capacité d'accueil suffisantes, il apparaît que la procédure de classement est lourde et complexe car elle nécessite au niveau local la réalisation d'une enquête publique et l'obtention de nombreux avis d'organismes départementaux et, au niveau national, de nombreux avis, ainsi qu'une instruction conduite par des ministres différents suivant le type de station. Des territoires correspondant à ces critères ne bénéficient d'aucune prime à l'aménagement du territoire et certains viennent de subir de plein fouet des fermetures d'usines comme par exemple Moulinex à Bayeux. Ces territoires devraient pouvoir bénéficier d'une priorité pour l'accession au classement. Il lui demande, dans l'esprit de la loi de décentralisation et du droit à l'expérimentation qui semble s'affirmer, si une communauté de communes disposant d'une façade maritime, considérée comme un haut lieu touristique et ayant les capacités d'accueil suffisantes, pourrait voir son territoire classé en station touristique et bénéficier de l'autorisation de créer un casino.
NOMINATIONS DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES ET DU PLAN
MM. Dominique Braye et Charles Guené ont été nommés rapporteurs du projet de loi n° 160 (2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions relatives à l'urbanisme, à l'habitat et à la construction.
COMMISSION DES FINANCES
M. Jacques Chaumont a été nommé rapporteur du projet de loi n° 94 (2002-2003) autorisant l'approbation de l'avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Sultanat d'Oman en vue d'éviter les doubles impositions (ensemble un protocole).
M. Jacques Chaumont a été nommé rapporteur du projet de loi n° 136 (2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'avenant à la convention entre la République française et la République fédérale d'Allemagne en vue d'éviter les doubles impositions et d'établir des règles d'assistance administrative et juridique réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, ainsi qu'en matière de contribution des patentes et de contributions foncières, du 21 juillet 1959, modifiée par l'avenant du 9 juin 1969 et par l'avenant du 28 septembre 1989, signé à Paris le 20 décembre 2001.
COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LÉGISLATION, DU SUFFRAGE UNIVERSEL, DU RÈGLEMENT ET D'ADMINISTRATION GÉNÉRALE
M. Pierre Jarlier a été nommé rapporteur pour avis du projet de loi n° 160 (2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions relatives à l'urbanisme, à l'habitat et à la construction, dont la commission des lois est saisie pour avis.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON
QUESTIONS ORALES
REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT
(Application des articles 76 à 78 du réglement)
Sous-titrage des programmes télévisés
et niveau sonore des publicités
164. - 31 janvier 2003. - M. Jean-Pierre Godefroy souhaite attirer l'attention de M. le ministre de la culture et de la communication sur l'accès des personnes sourdes ou malentendantes aux programmes télévisés. Le sous-titrage reste pour cela le moyen le plus adéquat. Un rapport vient d'être remis conjointement à M. le ministre de la culture et de la communication ainsi qu'à M. le ministre de la santé. Il en ressort que seuls 1 à 20 % des émissions sont sous-titrées selon les chaînes ; il s'agit le plus souvent de fictions. Par ailleurs, la qualité du sous-titrage est le plus souvent décevante. Ce rapport donne un état des lieux accablant qui place la France très loin derrière d'autres pays européens qui sous-titrent jusqu'à 75 % de leurs programmes. De ce fait, c'est toute une catégorie de nos concitoyens qui ne peuvent accéder à l'information et à la culture télévisuelle, contrairement au droit qui leur est reconnu par la loi n° 2000-719 du 1er août 2000 sur l'audiovisuel. Il souhaiterait connaître les mesures que le ministre de la culture et de la communication entend mettre en place pour favoriser le sous-titrage et atteindre l'objectif de rattrapage préconisé par ce rapport, c'est-à-dire 50 % de programmes sous-titrés d'ici à cinq ans. A l'inverse, l'on peut constater sur la plupart des chaînes un volume sonore différent entre les programmes et les « pauses » publicitaires : le son des réclames est nettement plus fort que le reste des programmes. Ainsi, à défaut de rester devant leur écran à regarder les publicités, les téléspectateurs les entendent-ils. Dans certains immeubles d'habitations collectives, les intermèdes publicitaires peuvent alors constituer des nuisances sonores particulièrement irritantes. Le décret n° 92-280 du 27 mars 1992 prévoit que le niveau sonore des séquences publicitaires et des écrans qui les précèdent ne doit pas excéder le volume sonore moyen du programme. Il semble que ce ne soit pas le cas et il demande en conséquence comment il entend faire respecter, par l'ensemble des chaînes, la réglementation sur ce point.
Conditions de classement d'une commune
en station touristique autorisant l'ouverture d'un casino
165. - 31 janvier 2003. - M. Jean-Léonce Dupont rappelle à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales que l'autorisation, instituée par la loi du 15 juin 1907 modifiée réglementant les jeux dans les casinos des stations balnéaires thermales et climatiques et le décret n° 59-1489 du 22 décembre 1959, est accordée par le ministre de l'intérieur dans les localités auxquelles le caractère de station balnéaire, thermale ou climatique a été reconnu dans des conditions fixées par le code des communes. Cette possibilité est ouverte de fait aux « stations classées », mais cette expression est ambiguë. Il existe en effet un classement officiel prévu par la loi et des classements organisés par des associations de communes pour favoriser leur promotion, comme, par exemple, les « stations vertes de vacances » ou les « villages de neige ». Sans méconnaître les conditions nécessaires pour accéder à ce classement, à savoir disposer d'une ressource touristique et d'une capacité d'accueil suffisantes, il apparaît que la procédure de classement est lourde et complexe car elle nécessite au niveau local la réalisation d'une enquête publique et l'obtention de nombreux avis d'organismes départementaux et, au niveau national, de nombreux avis, ainsi qu'une instruction conduite par des ministres différents suivant le type de station. Des territoires correspondant à ces critères ne bénéficient d'aucune prime à l'aménagement du territoire et certains viennent de subir de plein fouet des fermetures d'usines comme, par exemple, Moulinex à Bayeux. Ces territoires devraient pouvoir bénéficier d'une priorité pour l'accession au classement. Il lui demande, dans l'esprit de la loi de décentralisation et du droit à l'expérimentation qui semble s'affirmer, si une communauté de communes disposant d'une façade maritime, considérée comme un haut lieu touristique et ayant les capacités d'accueil suffisantes pourrait voir son territoire classé en station touristique et bénéficier de l'autorisation de créer un casino.
Développement du trafic aérien
166. - 4 février 2003. - M. Jean-Marie Poirier rappelle à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer que dans le débat relatif à l'opportunité d'un troisième aéroport une donnée semble être occultée. Le régime du couvre-feu applicable à l'aéroport d'Orly entre 23 h 30 et 6 heures, conformément à la décision ministérielle du 4 avril 1968, fait l'objet de nombreuses dérogations. Aussi, le seuil fixé par l'arrêté ministériel du 6 octobre 1994 qui limite à 250 000 créneaux horaires la capacité de l'aéroport d'Orly est en passe d'être atteint notamment en raison de plusieurs infractions à cette restriction. Conformément au rapport d'activité 2002 de l'autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (ACNUSA), des carences au niveau tant matériel qu'humain font perdre beaucoup de son efficacité à la procédure de sanction de ces infractions. Il lui demande s'il envisage d'augmenter le nombre d'agents assermentés et d'octroyer des moyens nouveaux pour que la procédure soit menée dans des délais raisonnables et que le droit soit respecté. Par ailleurs, la limite des 250 000 créneaux horaires étant essentiellement volontariste, l'aéroport d'Orly pouvant techniquement supporter 320 000 mouvements annuels sans remise en cause du couvre-feu, la tentation de revenir sur l'arrêté du 6 octobre 1994 ne risque-t-elle pas d'être grande en l'absence d'une capacité d'accueil, sur un autre aéroport, du développement prévisible du trafic aérien ? La levée de ce seuil aggraverait de façon insupportable la gêne subie par les riverains. Les directives de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) relatives au bruit soulignent en effet que la nocivité du bruit réside davantage dans sa répétition que dans le niveau sonore. Si la mission d'information parlementaire se prononçait, à l'issue de ces travaux, contre une troisième plate-forme aéroportuaire, il lui demande quelles sont les mesures envisagées pour absorber le développement du trafic aérien francilien tout en respectant la qualité de vie des riverains de l'aéroport d'Orly et si la limitation à 250 000 créneaux horaires autorisés par l'arrêté ministériel du 6 octobre 1994 sera maintenue.
Constructibilité des bergeries et abris en bordure de littoral
167. - 4 février 2003. - M. Jean Bizet attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer sur la constructibilité des bergeries et abris en bordure du littoral. L'article L. 164-4 du code de l'urbanisme exprime les fortes restrictions de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 sur l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, dite loi « littoral », en prescrivant notamment des extensions d'urbanisation en continuité du bâti existant ou en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. Depuis, une disposition nouvelle, introduite par l'article 109 de la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d'orientation agricole, stipule que par dérogation, les constructions ou installations liées aux activités agricoles qui sont incompatibles avec le voisinage des zones habitées peuvent être autorisées « en dehors des espaces proches du rivage ». On aurait pu considérer que cette disposition pouvait constituer une avancée permettant de résoudre, en communes littorales, par exemple les travaux de constructions de bâtiments d'élevage résultant de la « mise aux normes ». Or, il apparaît que l'administration interprète de façon extensive le terme « proche du rivage » qui s'applique sur tous les espaces « visibles du rivage » et peut concerner des zones de plusieurs centaines de mètres, voire de kilomètres du rivage. La géographie du département de la Manche avec plus de 330 km de côte et la mise en place de productions animales spécifiques, telles que « l'agneau de pré-salé », nécessitent de trouver une solution aux difficultés actuellement rencontrées pour la constructibilité des bergeries et abris en bordure du littoral. Pour cela, il conviendrait que la restriction apportée par l'article 109 de la loi d'orientation agricole puisse être levée, sinon de manière absolue, du moins au profit des productions pour lesquelles cette proximité du rivage est nécessaire en raison de leur nature même ou d'une dénomination géographique reconnue. Par conséquent, il lui demande quelle suite le Gouvernement entend réserver à cette proposition ?
Gestion des étangs
168. - 4 février 2003. - M. Georges Mouly attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie et du développement durable sur le problème posé par la gestion des étangs qui, depuis la promulgation de la loi sur l'eau n° 92-3 du 3 janvier 1992, pose en général de trop nombreux problèmes en France et, en particulier, dans la région Limousin où les maires se retrouvent trop souvent en première ligne face aux tensions opposant agriculteurs, pêcheurs, usagers et brigades départementales du Conseil supérieur de la pêche appliquant d'une manière particulièrement stricte une loi dont chacun reconnaît, onze ans plus tard, qu'elle est peut-être inadaptée au terrain. Il lui demande en conséquence si elle compte prochainement proposer une réforme de cette loi et, en tout état de cause, si elle peut lui apporter des précisions quant à la gestion des étangs, la taxe sur les plans d'eau, la notion de valorisation économique des piscicultures et tous autres points faisant aujourd'hui l'objet de nombreux litiges dans le milieu rural concerné.