SEANCE DU 7 JUIN 2001
M. le président.
« Art. 7. - I. - Le dernier alinéa de l'article L. 131-73 du code monétaire et
financier est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque le montant du chèque rejeté est inférieur à 50 EUR, les frais perçus
par le tiré ne peuvent excéder un montant fixé par décret. »
« I
bis.
- Lorsqu'une banque est dans l'obligation de rejeter un
chèque, elle doit mettre tous les moyens en oeuvre pour informer l'émetteur du
rejet de son chèque, afin qu'il régularise sa situation avant que le rejet ne
soit définitif.
« II. - L'article L. 131-75 du code monétaire et financier est ainsi rédigé
:
«
Art. L. 131-75
. - La pénalité libératoire que le titulaire du compte
doit verser pour recouvrer la faculté d'émettre des chèques est calculée sur la
fraction non provisionnée du chèque. Elle est fixée à 22 EUR par tranche de 150
EUR ou fraction de tranche non provisionnée, et ramenée à 5 EUR lorsque la
fraction non provisionnée du chèque est inférieure à 50 EUR.
« Toutefois, cette pénalité n'est pas due lorsque le titulaire du compte ou
son mandataire n'a pas émis un autre chèque rejeté pour défaut de provision
dans les douze mois qui précèdent l'incident de paiement et qu'il justifie,
dans un délai de deux mois à compter de l'injonction prévue par l'article L.
131-73, avoir réglé le montant du chèque ou constitué une provision suffisante
et disponible destinée à son règlement par les soins du tiré.
« Les dispositions de l'alinéa précédent s'appliquent à l'ensemble des chèques
émis sur un même compte et rejetés pour défaut de provision suffisante au cours
du délai de deux mois prévu au même alinéa.
« Lorsque le délai prévu au deuxième alinéa expire un jour non ouvré, il est
prolongé jusqu'au premier jour ouvré suivant. »
« III. - Les dispositions du présent article sont applicables en
Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis-et-Futuna et à
Mayotte.
« IV. - A titre transitoire et jusqu'au 31 décembre 2001, la pénalité
libératoire visée au II est fixée à 150 F par tranche de 1 000 F ou fraction de
tranche non provisionnée, et ramenée à 34 F lorsque la fraction non
provisionnée du chèque est inférieure à 340 F. »
Par amendement n° 34, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose
:
A. - De remplacer le premier aliéna du I de cet article par trois alinéas
ainsi rédigés :
« I. - L'article L. 131-73 du code monétaire et financier est ainsi modifié
:
« 1° Dans la première phrase du premier alinéa, les mots : "qui a refusé le
paiement d'un chèque pour défaut de provision suffisante" sont remplacés par
les mots : "eut, après s'être efforcé d'en informer le titulaire du compte,
refuser le paiement d'un chèque pour défaut de provision suffisante. Il".
« 2° Le dernier alinéa est complété par la phrase suivante : »
B. - En conséquence, de supprimer le I
bis
de cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement est essentiellement rédactionnel.
Nous prévoyons que le banquier ne peut refuser le paiement du chèque dont il
s'agit qu'après s'être efforcé d'en informer le titulaire du compte.
A la vérité, si l'on suivait littéralement la position adoptée à l'Assemblée
nationale, on aboutirait à des impossibilités de fait, car les obligations
mises à la charge des banques seraient tout à fait irréalistes.
« Mettre tous les moyens en oeuvre pour informer », cela peut-il aller jusqu'à
envoyer un hélicoptère au sommet de l'Himalaya ?
(Sourires.)
Je me pose
sérieusement la question. Cette formule excessivement large pourrait conduire à
des situations incongrues.
La rédaction que nous proposons va dans le sens souhaité par l'Assemblée
nationale, tout en restant raisonnable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Cet amendement vise légitimement à préciser la
rédaction adoptée à l'Assemblée nationale de manière quelque peu impromptue.
Cette rédaction avait d'ailleurs été jugée, dès cette époque, très imprécise.
Le Gouvernement, qui s'en était remis à la sagesse de l'Assemblée nationale,
avait eu l'occasion de le dire.
Je comprends donc le souci de M. le rapporteur général. Toutefois, les
obligations qui résulteraient de cet amendement seraient extrêmement assouplies
par rapport à la version précédente, au point de n'être pas suffisantes pour
répondre pleinement aux objectifs du Gouvernement en la matière.
A une rédaction excessivement contraignante, issue de l'Assemblée nationale,
je crains qu'on ne substitue, ici, une rédaction excessivement souple.
Peut-être pourrons-nous trouver une rédaction plus équilibrée au cours de la
navette.
J'y suis, pour ma part, tout à fait disposée.
En l'instant, en tout cas, la rédaction proposée ne me paraît pas pleinement
satisfaisante.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 34, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 112, M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent, à la fin du texte présenté
par le I de l'article 7 pour compléter le dernier alinéa de l'article L. 131-73
du code monétaire et financier, de remplacer les mots : « fixé par décret » par
les mots : « équivalent au dixième du montant du chèque ».
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
La question de la facturation des incidents de paiement est sans nul doute
l'une de celles qui caractérisent le mieux la qualité actuelle des relations
entre les établissements de crédit et leur clientèle.
S'il s'émet chaque année, dans notre pays, quelque cinq milliards de chèque,
environ six millions d'entre eux ont finalement l'objet d'un traitement par la
voie contentieuse.
On se situe donc
a priori
sur une base d'un millième des chèques sans
couverture suffisante, singulièrement des chèques dont le montant observable
est en moyenne relativement faible : autour de 350 francs.
Ces chèques sans provision engendrent pour les tireurs des frais d'une nature
double : d'une part, ceux qui sont prélevés par l'établissement de crédit
lui-même pour assurer la couverture du risque ; d'autre part, les pénalités
libératoires acquittées auprès du Trésor public.
S'agissant des frais bancaires, dont il est question dans cet amendement, nous
nous permettons simplement de rappeler que, dans certains cas, on parvient à
des montants de frais sans commune mesure avec le montant des chèques émis au
départ de la procédure.
Ainsi, une association de consommateurs nous a indiqué le cas d'une personne
qui a dû s'acquitter, entre les frais dus à son établissement de crédit et les
pénalités libératoires, d'une somme équivalente à près de trois fois le montant
des sommes incriminées et insuffisamment provisionnées.
Permettez-nous de douter de la valeur pédagogique, pour le tireur de chèques,
d'un tel acharnement !
Posons une bonne fois pour toutes la question : quelle est la valeur d'une
démarche qui consiste à demander aux émetteurs de chèques sans provision
toujours plus de frais et de pénalités divers, alors même que, bien souvent, un
tel comportement est non pas le produit d'une volonté délibérée mais le simple
constat de difficultés financières personnelles aux multiples origines ?
Il nous semble donc indispensable, aujourd'hui, de fixer des limites à
l'acharnement des établissements de crédit à facturer les incidents de
paiement.
Voilà pourquoi nous proposons que les frais applicables aux « petits » chèques
sans provision ne puissent être supérieurs au montant de la pénalité
libératoire qui est applicable par ailleurs.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement ne nous paraît pas opportun.
En premier lieu, pour une banque, le coût du rejet est le même, semble-t-il,
que le chèque soit de 150 francs ou de 150 000 francs. La proportionnalité
n'est donc pas justifiée.
En second lieu, il paraît important de conserver la référence à un décret pour
permettre au Gouvernement de procéder aux consultations nécessaires et
d'aboutir, si possible, à un relatif consensus entre les banques et leurs
clients.
Cela étant dit, nous souhaiterions connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Bien évidemment, nous partageons le souci des auteurs
de cet amendement de fixer un plafond à un niveau significatif mais
suffisamment bas pour faciliter la régularisation de la situation des auteurs
de petits chèques sans provision.
A contrario,
il ne nous paraît pas
approprié de déterminer ce seuil directement dans la loi, à la fois pour des
raisons de souplesse et de réalisme et parce que nous avons besoin de procéder
à une large concertation avec les professionnels et les associations de
consommateurs. Cette concertation visera à concilier le souci de ne pas
alourdir de manière excessive les charges d'exploitation des banques avec la
lutte contre l'exclusion bancaire à laquelle, vous le savez, le Gouvernement
est très attaché.
Il va de soi que le Gouvernement retiendra à cet effet un montant
substantiellement inférieur à celui des frais qui sont actuellement perçus par
les banques.
Pour ces raisons, je suis défavorable à l'amendement n° 112.
M. le président.
Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Défavorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 112.
M. Thierry Foucaud.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Pour partie, la réponse de Mme la secrétaire d'Etat nous satisfait. Cela
étant, puisqu'il y a une sagesse positive et une sagesse négative - je l'ai
appris au cours de nos débats - je vous indique, madame la secrétaire d'Etat,
que le maintien de cet amendement est un maintien positif
(Sourires)
pour aller dans le sens de ce que nous préconisons les uns et les autres, à
savoir la concertation avec les usagers en vue de réduire le montant facturé à
ces pauvres gens en difficulté, car je vise bien ici ceux-là, et non pas les
personnes qui trichent et qui sont d'ailleurs peu nombreuses.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?
Je mets aux voix l'amendement n° 112, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 113 rectifié, M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent :
I. - Dans la seconde phrase du premier alinéa du texte présenté par le II de
l'article 7 pour l'article L. 131-75 du code monétaire et financier, de
remplacer la somme : « 22 EUR » par la somme : « 15 EUR » et la somme : « 5 EUR
» par la somme : « 3 EUR ».
II. - Après le II de cet article, d'insérer un paragraphe additionnel ainsi
rédigé :
« ... La perte de recettes résultant pour l'Etat de la diminution de la
pénalité libératoire prévue à l'article L. 131-75 du code monétaire et
financier est compensée à due concurrence par le relèvement du taux fixé à
l'article 219 du code général des impôts. »
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Cet amendement porte sur la question de la pénalité libératoire prélevée sur
les émetteurs de chèques sans provision pour régulariser leur situation.
Dans les faits, la rédaction actuelle de l'article L. 131-75 du code monétaire
et financier ne modifie pas de manière significative la situation présente. En
effet, depuis 1991, le montant de la pénalité libératoire est fixé à 150 francs
par tranche de 1 000 francs de chèques non provisionnés.
En y regardant d'un peu plus près, la référence des 22 euros est relativement
proche - je crois qu'il s'en faut de quelques francs actuels - de celle des 150
francs, puisque la conversion nous donne un montant de 144,32 francs.
Nous nous devons de rappeler que le montant des pénalités libératoires a été
relevé de manière non négligeable récemment ; il nous semble que cette
situation doit évoluer.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission estime qu'il faut conserver un niveau
suffisant aux sanctions prévues dans ce dispositif. C'est pourquoi elle est
défavorable à l'amendement.
M. Jacques Machet.
Très bien !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Il faut, en effet, maintenir le caractère dissuasif
des pénalités tout en facilitant la régularisation des situations les plus
délicates. C'est ce que nous avons fait en définissant de manière plus
restrictive l'assiette des pénalités et en réduisant le montant de ces
pénalités pour les petits chèques sans provision. Nous sommes parvenus, je
crois, à une solution équilibrée.
Réduire encore le montant de ces pénalités, comme le prévoit l'amendement n°
113 rectifié, risquerait, de mon point de vue, de nuire à l'efficacité du
dispositif de sécurisation des moyens de paiement et de lutte contre les
chèques sans provision.
Par conséquent, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 113 rectifié, repoussé par la commission et
par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 7, modifié.
(L'article 7 est adopté.)
Article 8
(précédemment réservé)