III. RECOURS À LA PROCÉDURE DE LA DÉCLARATION D'URGENCE : DES RÉSULTATS DÉCEVANTS
Les
commissions confirment que la déclaration d'urgence n'emporte pas
nécessairement célérité accrue du suivi
réglementaire.
La
commission des affaires économiques
a examiné,
après déclaration d'urgence, depuis 1988,
33
lois (lois
d'application directe et lois devenues sans objet exclues).
Seules, 20 d'entre elles (soit 61 %) sont totalement applicables ; 12
(soit 36 %) sont partiellement applicables ; et 1 est inapplicable.
Le constat effectué par la commission des affaires économiques
est sans appel :
« Cette année encore
, l'applicabilité des lois
votées après déclaration d'urgence reste bien
inférieure à la moyenne des autres lois.
On ne peut ainsi que
s'interroger sur l'utilité du recours à cette procédure,
qui, au prix d'une discussion parlementaire tronquée, permet certes de
raccourcir de quelques semaines la navette entre les deux chambres, mais ne
conduit à aucune accélération significative de la mise en
oeuvre de la loi après sa publication ».
La
commission des lois
note que, pendant la session extraordinaire,
trois lois ont été adoptées après
déclaration d'urgence, mais que leur promulgation est trop
récente pour conférer un caractère significatif au
délai d'application.
La
commission des finances
regrette que la loi du 15 mai 2001 relative
aux nouvelles régulations économiques,
« déjà pointée lors du dernier
contrôle », attende toujours plus des deux tiers de son suivi
réglementaire.
IV. PRISE EN CONSIDÉRATION DE L'INITIATIVE PARLEMENTAIRE : BEAUCOUP À FAIRE...
On a
déjà remarqué que le suivi réglementaire des textes
votés à l'initiative des parlementaires était encore trop
fragmentaire, même si un examen brut des statistiques laissait entrevoir
de timides progrès.
Le cas de la loi du 4 mars 2002, tendant à la création d'un
régime complémentaire obligatoire pour les non-salariés
agricoles, est exemplaire.
Issue d'une proposition émanant, à l'Assemblée nationale,
du groupe socialiste et apparentés, elle devait entrer en vigueur au
1
er
janvier 2003. Aucune mesure n'a été prise. Qui
plus est, l'article 61 du projet de loi de finances pour 2003 reporte au
1
er
avril 2003 le service des premières prestations. Pour
quelle raison ? Selon l'exposé des motifs de cet article,
« compte tenu des délais de mise en oeuvre,
comportant la
parution des décrets nécessaires
».
Par ailleurs, il est significatif de relever que la
commission des lois
a examiné, en 2001-2002, 9 propositions de loi, représentant la
moitié de tous les textes soumis à son attention. Elle souligne
l'existence d'une
dissymétrie
au détriment de l'initiative
parlementaire, puisque
5
, sur ces
9
propositions, ne sont pas
applicables (contre
3
pour les projets) ;
1
est
partiellement applicable (
3
pour les projets) ; et
aucune
n'est totalement applicable (
1
pour les projets), compte non tenu des
lois d'application directe.
La
commission des affaires économiques
déplore le faible
taux d'application des dispositions, dans les lois relevant de sa
compétence, introduites à l'initiative du Sénat :
28 %
seulement, contre 86 % pour les mesures votées sur
amendement du gouvernement et 45 % sur amendement adopté par
l'Assemblée nationale.
Elle conclut que «
cette disparité, que l'on ne peut,
compte tenu de ses proportions, considérer comme involontaire de
l'autorité réglementaire, est inacceptable pour le bon
fonctionnement de la démocratie
».
Au moins peut-elle considérer comme
«
satisfaisante
» l'application de 3 lois issues de
propositions sénatoriales, votées depuis 1988
6(
*
)
(loi du 30 mars 1999 relative
à la responsabilité en matière de dommages
consécutifs à l'exploitation minière,
entièrement applicable
; loi du 8 juin 1999 tendant à
protéger les acquéreurs et propriétaires d'immeubles
contre les termites et loi du 19 février 2001 tendant à
conférer à la lutte contre l'effet de serre... la qualité
de priorité nationale, toutes deux
partiellement applicables
).
La
commission des affaires sociales
insiste beaucoup sur les carences
de l'application
des dispositions introduites, par amendements des
parlementaires, dans la loi du 19 janvier 2000 relative à la
réduction négociée du temps de travail : sur 16
d'entre elles, 6 demeurent aujourd'hui inapplicables, représentant
d'ailleurs la totalité du reliquat.
La
commission des affaires sociales
relève aussi que
« bon nombre » de dispositions adoptées à
l'initiative, soit de l'Assemblée nationale, soit du Sénat, et
contre l'avis du gouvernement, lors de la discussion de la loi du
17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social,
éducatif et culturel, n'ont toujours pas fait l'objet de mesures
réglementaires d'application (condition et durée de mise à
disposition des sapeurs-pompiers professionnels ; création d'un
Fonds national de prévention des accidents du travail et des maladies
professionnelles, au sein de la Caisse nationale de retraites des agents des
collectivités locales : à savoir deux articles introduits
par le Sénat). Un constat identique prévaut pour la loi du 17
janvier 2000 de modernisation sociale.