II. ENCORE ET TOUJOURS, DE TROP LONGS DÉLAIS D'APPLICATION
Le
Premier ministre, qui assure l'exécution des lois, rappelle
périodiquement, aux ministres, le contenu des instructions permanentes,
qui fixent à
un délai de 6 mois, à compter de la
publication,
la date-limite de sortie des décrets. Mais la
commission des affaires économiques
, par exemple, constate que
« cet objectif est loin d'être atteint ». De fait,
les mêmes causes produisant les mêmes effets, la situation
n'évolue toujours pas dans un sens favorable. Il est ainsi caricatural
de constater, avec la
commission des lois
, que certains textes,
adoptés avant l'année 2001-2002, n'ont fait l'objet d'aucune
mesure d'application en 2001-2002.
La
commission des affaires économiques
identifie trois causes
principales de cette lenteur : les exigences de la concertation avec les
professionnels (loi du 8 juin 1999, tendant à protéger les
acquéreurs et propriétaires d'immeubles contre les
termites) ; sans doute « un pur et simple enlisement
administratif (loi du 9 juillet 2001 d'orientation sur la forêt) ;
sans doute aussi un moindre empressement au suivi réglementaire des
dispositions introduites dans les lois, étrangères à
l'initiative du gouvernement (loi du 30 décembre 1996 sur l'air et
l'utilisation rationnelle de l'énergie : conditions requises par le
Sénat pour un taux maximal d'oxygène des carburants).
La
commission des finances
insiste sur la longueur de la concertation
avec les professionnels, en rappelant que la loi ne doit pas être
« un élément de négociation, mais une source
inconditionnelle d'obligations ».
A propos de l'application de la loi du 19 janvier 2000 relative à la
réduction négociée du temps de travail, la
commission
des affaires sociales
cite, parmi les difficultés
rencontrées :
- la nécessité de prendre en considération les
spécificités de certaines professions pour le calcul de la
durée du travail, ce qui explique la publication de décrets,
encore plus de deux ans après la promulgation du texte
4(
*
)
;
- l'instabilité du suivi réglementaire, qui confère,
aux textes d'application, la qualité de « variable
d'ajustement » de la mise en oeuvre de dispositions
législatives contraignantes
5(
*
)
.
Vis-à-vis de la loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale
et médico-sociale, le gouvernement a élaboré un calendrier
prévisionnel de publication des décrets d'application
(
circulaire du 10 janvier 2002
, diffusée huit jours, seulement,
après la loi). Louable pratique.
Cette procédure aboutissait à fixer trois délais :
- l'un, pour les dispositions à rendre applicables dès le
premier semestre 2002 (par exemple, mise en place des nouvelles institutions
consultatives du secteur) ;
- l'un, pour les dispositions à rendre applicables avant la fin de
2002 (par exemple, dispositions propres aux établissements
publics) ;
- l'un, pour les dispositions à rendre applicables au-delà
de 2002 (par exemple, règles de répartition des dotations
départementales).
Cette initiative était intéressante. Mais ce calendrier n'a pu
être respecté, et ce, pour deux raisons :
- le changement de gouvernement, après l'élection
présidentielle, a imposé, aux nouveaux ministres, un
« délai d'appropriation » des textes, pour en
effectuer l'inventaire ;
- la longueur de la concertation avec les associations sociales et
médico-sociales.
La
commission des lois
rappelle que 12 articles, sur les 71, de la
loi
du 15 novembre 2001
relative à la
sécurité quotidienne, ont été adoptés, en
nouvelle lecture, par le Sénat, sur proposition du gouvernement, dans le
cadre de la lutte anti-terroriste ; bien que le caractère tout
à fait inhabituel de la procédure ait été
justifié par l'extrême urgence, plusieurs de ces articles restent
inappliqués
onze mois après leur adoption
.
De même peut-on regretter que
trois lois relatives à
l'outre-mer
, respectivement votées en 1999
(Nouvelle-Calédonie), 2000 (orientation pour l'outre-mer) et 2001
(Mayotte), c'est-à-dire avant l'année 2001-2002, demeurent
partiellement
applicables et ce, au moment où le Parlement entame
l'examen d'une révision constitutionnelle (octobre 2002).
Mais la principale anomalie, déjà signalée, est le
résultat de l'absence de tout suivi réglementaire sur une loi
dont 35 de ses 167 articles prévoyaient l'intervention de décrets
d'application, la
loi du 27 février 2002
relative à la
démocratie de proximité. Au moins le Ministre de
l'Intérieur a-t-il recensé les dispositions d'application
immédiate et les dispositions requérant des décrets ou des
arrêtés (circulaire du 27 mars 2002, adressée aux
Préfets). Pour sa part, le Ministère de l'écologie et du
développement durable a établi la liste des décrets
à publier, assortie d'un échéancier, sur les titres de la
loi concernant différents aspects
« environnementaux ». On ne saurait mieux illustrer la
carence sur des textes lourds, soumis à concertation
interministérielle...
La
commission des affaires étrangères
examine
essentiellement des conventions internationales (42 en 2001-2002) ; elle
n'est donc assurément pas confrontée aux mêmes
difficultés que les autres commissions. Il est donc d'autant plus
regrettable que la loi ancienne, du 22 octobre 1999, portant organisation de la
réserve militaire et du service militaire, ne soit toujours pas
totalement applicable.
Sur ce texte, des dispositions réglementaires restent à
intervenir, portant sur :
- la possibilité de prime pour les réservistes
exerçant une activité dans la réserve
opérationnelle ;
- la situation des agents publics non titulaires exerçant une
activité dans cette même réserve opérationnelle ;
- la définition des catégories d'activité du service
de défense.
Enfin, s'agissant de l'instauration d'une journée générale
du réserviste, un décret en Conseil d'Etat est toujours en
attente.
Cependant, pour l'année 2002, une circulaire du ministre de la
défense a prévu une journée spécifique - le 23
novembre - destinée à diffuser une information
décentralisée sur la réserve opérationnelle afin de
favoriser les recrutements nécessaires.