2. Le coeur du projet de loi de finances
a) Au centre de l'élaboration du projet de loi de finances
Le solde
budgétaire figurant dans un projet de loi de finances constitue une
synthèse de l'ensemble des arbitrages qui sont rendus au cours du
processus d'élaboration d'un projet de loi de finances : rythme
d'évolution des dépenses et prévisions de recettes
fiscales, qui découlent elles-mêmes des hypothèses retenues
en matière d'inflation et de croissance du PIB.
"
La préparation d'un budget étant l'acte politique
central d'un gouvernement
", pour reprendre l'expression de M. Denis
MORIN, ancien directeur de cabinet du ministre de l'économie, des
finances et de l'industrie, les principales décisions, et notamment la
définition du solde budgétaire, sont prises au plus haut niveau.
Comme l'indique la direction du budget dans ses réponses écrites
au questionnaire de votre commission, "
l'équilibre du projet
de loi de finances
et le
choix des articles législatifs
à caractère fiscal ou budgétaire
sont
arrêtés au cours de l'été par le cabinet du Premier
ministre par lequel transite la saisine du Conseil d'Etat
".
b) Le pivot de la discussion au Parlement
L'article d'équilibre budgétaire constitue la
charnière entre les deux parties d'un projet de loi de finances. La
première partie contient l'ensemble des mesures fiscales
destinées à entrer en vigueur dès la promulgation du texte
finalement adopté par le Parlement, ainsi que l'article
d'équilibre, qui détermine le solde budgétaire. La seconde
partie détaille la ventilation des dépenses entre les
différents départements ministériels, et contient
également les mesures fiscales et budgétaires n'ayant pas
d'impact sur le solde budgétaire de l'année à venir.
Cette procédure d'examen en deux parties, prévue par l'article 40
de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 subordonne donc les votes du
Parlement en matière de dépenses à l'adoption de l'article
d'équilibre. Pour n'avoir pas respecté cette procédure, la
loi de finances pour 1980 a d'ailleurs été déclarée
non conforme à la Constitution.
La pratique des discussions parlementaires montre que l'équilibre
budgétaire est une donnée jugée cruciale par le pouvoir
exécutif : le montant arbitré par le Premier ministre au
cours de l'été ne doit pas être remis en cause au cours de
la discussion au Parlement. M. Denis MORIN confirme ce parti-pris en soulignant
que "
chaque année la discussion ajuste ou déplace 5 ou
6 milliards. La tradition s'est instaurée de considérer que
ces ajustements devaient se faire à solde nul
".
Cet état de fait a conduit le président de votre commission,
Alain LAMBERT, à se demander, après avoir relevé que
le déficit n'avait varié que de 73 millions de francs au cours de
l'ensemble de la discussion du projet de loi de finances pour 2000
6(
*
)
, si "
une forme de
fétichisme amène les cabinets à recommander au ministre
d'arriver au terme de la discussion budgétaire à un
déficit budgétaire identique à quelques francs près
à celui annoncé à la presse en septembre ?
".
"
Est-ce qu'il y a un fétichisme du déficit ? Je ne
sais pas.
", a répondu M. Christian SAUTTER, ancien ministre de
l'économie, des finances et de l'industrie, qui a cependant admis
"
il est vrai que dans le débat budgétaire nous avons une
tendance à ne pas faire varier trop le déficit budgétaire
qui, quoi qu'on dise, reste une variable forte du débat politique.
Lorsque les parlementaires proposent des modifications du côté des
recettes, plus rarement du côté des dépenses - cela peut se
faire avec l'accord du gouvernement - on essaie de faire en sorte que le
déficit annoncé ne soit pas trop corrigé.
".
L'équilibre budgétaire est donc une "
variable forte du
débat politique
" que seul le gouvernement peut choisir de
faire varier.