B. UNE LOGIQUE DÉVOYÉE
En
dépit de ses imperfections, la logique initiale des lois de
décentralisation avait le mérite d'offrir un nouveau cadre pour
l'action respective de l'Etat et des collectivités locales, de nature
à clarifier l'action publique et d'en renforcer l'efficacité
Or cette logique a été largement dévoyée. Le
schéma initial de répartition des compétences a
évolué vers une
confusion des compétences.
Dans la
période la plus récente, plusieurs dipositifs ont mis en
évidence un mouvement de
recentralisation des compétences.
1. De la confusion...
a) La multiplication des formules de cogestion
S'il
avait conçu les transferts de compétences à partir des
vocations dominantes de chaque niveau, le schéma initial des lois de
1983 n'était pas pour autant parfaitement
rigoureux.
Il laissait
subsister de nombreux domaines où en pratique plusieurs niveaux
étaient susceptibles d'intervenir.
Le principe d'un transfert par blocs de compétences en fonction des
vocations dominantes de chaque niveau a été difficile à
respecter, la plupart des domaines étant
partagés.
Ainsi, pour
l'éducation
, l'Etat a-t-il conservé la
pédagogie, le recrutement, la gestion et la rémunération
des personnels enseignants, chaque niveau de collectivité se voyant
attribuer la responsabilité d'un niveau d'enseignement pour
l'investissement et le fonctionnement : l'école primaire à
la commune, le collège au département, le lycée à
la région et l'université à l'Etat.
Dans d'autres domaines tels que la
culture
ou le
logement
, tous
les niveaux sont appelés à intervenir dans un cadre qui n'assure
pas l'articulation de leurs actions respectives.
En outre, la logique des blocs de compétences n'a pas été
exclusive de
politiques partenariales
entre les différents
niveaux, ce qui a favorisé la complexité du cadre d'exercice des
compétences.
Le domaine de l'aménagement du territoire en constitue une illustration
frappante.
L'aménagement du territoire : une compétence partagée
L'article L. 110
du code de l'urbanisme énonce
que
" le territoire est le patrimoine commun de la Nation. Chaque
collectivité publique en est le gestionnaire et le garant dans le cadre
de ses compétences. Afin d'aménager le cadre de vie, de
gérer le sol de façon économe, d'assurer la protection des
milieux naturels et des paysages et de promouvoir l'équilibre entre les
populations résidant en zones urbaines et rurales, les
collectivités locales
harmonisent
, dans le respect
réciproque de leur autonomie, leurs prévisions et leurs
décisions d'utilisation de l'espace.
"
L'article L. 1111-2
du code général des
collectivités territoriales précise par ailleurs que les
communes, les départements et les régions "
concourent
avec l'Etat à l'administration et à
l'aménagement du territoire, au développement économique,
social, sanitaire, culturel et scientifique, ainsi qu'à la protection de
l'environnement et à l'amélioration du cadre de vie.
"
En vertu de ces textes, chaque niveau de collectivité a donc vocation
à exercer des compétences dans le domaine de l'aménagement
du territoire. Le principe d'un
partenariat
est, en outre, clairement
posé. Aux collectivités s'ajoutent les structures intercommunales
à fiscalité propre (communautés urbaines,
communautés d'agglomération, communautés de communes), qui
exercent à titre obligatoire des compétences en matière
d'aménagement de l'espace et de développement économique.
Le législateur a par ailleurs reconnu une mission spécifique
à l'Etat qui est responsable de la définition et de la conduite
"
de la politique économique et sociale ainsi que de la
défense de l'emploi
" (
article L. 2251-2
du code
général des collectivités territoriales).
Enfin, si une priorité régionale avait à l'origine
été inscrite dans la loi en matière d'aides aux
entreprises (article 4 de la loi n° 82-6 du 7 janvier 1982), cette
priorité était fragile et n'a pas résisté aux
réalités locales.
Au demeurant, était-il envisageable d'ignorer le rôle de certaines
collectivités dans un domaine aussi essentiel que l'aménagement
du territoire ?
Utilisant pleinement leur
compétence générale
, les
collectivités locales ont elles-mêmes eu tendance à sortir
du cadre strict des compétences qui leur ont été
transférées pour répondre aux besoins sociaux ou prendre
des initiatives en faveur des territoires. Telle est aussi la dynamique de la
décentralisation : laisser l'initiative locale s'exprimer
librement, sous le contrôle des citoyens.
Les
financements " croisés "
, longtemps
dénoncés comme source de complexité et de confusion, sont
apparus souvent
indispensables,
par exemple pour réaliser des
équipements dont le coût ne pourrait être assumé par
une seule collectivité.
La clarification recherchée par les lois de 1983 n'a ainsi pas atteint
parfaitement son but. Mais pouvait-il en être autrement ?
Le schéma des blocs de compétences constituait une construction
rationnelle et pragmatique bâtie autour d'une certain nombre de principes
qui recueillaient un consensus. Ces principes devaient permettre de canaliser
une
dynamique
que la décentralisation est censée impulser
à l'action publique locale.
Mais cette construction avait surtout le mérite de promouvoir une
philosophie pour le partage des compétences : un Etat
recentré sur ses fonctions essentielles, laissant aux
collectivités locales le soin de gérer toute une série de
missions jusque là assumées par lui.
Or l'Etat n'a pas respecté ce schéma. Il a au contraire de plus
en plus
sollicité les collectivités locales
pour qu'elles
contribuent au
financement de ses propres compétences
.
Le rapport du groupe de travail présidé par M. François
Delafosse sur les relations financières entre l'Etat et les
collectivités locales avait, en 1994, proposé une typologie du
partenariat qui distinguait :
• les
contrats de plan Etat-régions
, qui sont apparus
avec les lois de décentralisation et des réforme des
procédures de planification ;
• les
procédures conventionnelles en dehors des contrats de
plan
, procédures très variables recouvrant notamment le
schéma université 2000, les conventions de développement
culturel, la participation des collectivités lcoales au financement
d'infrastructures pour le compte de la SNCF (matériel, gares,...) ou la
prise en charge des dépenses relatives aux lignes
régionales ;
• les
politiques partenariales se situant en dehors du processus
conventionnel classique
, telles que la politique du RMI sur laquelle votre
rapporteur reviendra plus longuement ;
• des
politiques contractuelles liées à la nouvelle
répartition des compétences ou à une approche
conventionnelle des transferts
, par exemple dans le domaine de la formation
professionnelle.
Le rapport pour 1999 de la commission consultative sur l'évaluation des
charges observe que "
les dépenses des collectivités
locales liées à la mise en oeuvre de politiques
définies par l'Etat
représentent
un coût
croissant
. "
Ces dépenses peuvent, selon le rapport, être regroupées en
deux catégories la participation à des
politiques
menées en partenariat avec l'Etat
, en particulier les contrats de
plan Etat-région, qui font l'objet de développements
spécifiques ci-dessous, et les
charges nouvelles,
lesquelles
recouvrent les dépenses résultant de législations ou
réglementations de portée générale s'imposant aux
collectivités locales comme aux personnes publiques ou privées
(par exemple, les dispositifs relatifs à la neutralisation de l'amiante
dans les bâtiments), celles liées à des prescriptions
européennes ou nationales destinées à répondre
à des exigences d'intérêt général pour des
équipements ou l'exercice de compétences locales (par exemple
pour la gestion des déchets), les charges issues de la transposition
directe ou indirecte aux collectivités locales de décisions
prises par l'Etat (revalorisation des rémunérations des
fonctionnaires ou des minimas sociaux, notamment).
Le législateur a lui-même tendu à privilégier des
formules de cogestion
au détriment d'une plus grande
clarté de l'action publique. Tel fut en particulier le cas pour la mise
en oeuvre du RMI et pour la politique d'aide au logement des personnes
défavorisées.
Les lois des 1 er décembre 1988 et du 29 juillet 1992 relatives au RMI
La loi
n° 88-1088 du 1
er
décembre 1988 bat en
brèche le principe du transfert de blocs de compétences
institué par la loi de décentralisation en mettant en place un
ensemble complexe de compétences cogérées assorties d'un
dispositif financier contraignant pour les départements.
Le RMI repose sur l'articulation entre un revenu minimum et une obligation pour
le bénéficiaire de s'engager dans des actions visant à
assurer son insertion sociale et professionnelle.
Le volet relatif à l'insertion -le " I " du RMI- repose sur la
cogestion des décisions les plus importantes.
L'article 34 de la loi susvisée dispose ainsi que
" le
représentant de l'État dans le département et le
président du conseil général conduisent
ensemble et
contractuellement
l'action d'insertion sociale et professionnelle des
bénéficiaires du revenu minimum d'insertion, avec le concours des
autres collectivités territoriales et des autres personnes morales de
droit public ou privé, notamment les associations, concourant à
l'insertion et à la lutte contre la pauvreté et
l'exclusion "
.
L'élément central de la politique d'insertion est le
programme
départemental d'insertion
(PDI) annuel qui, aux termes de
l'article 36, évalue les besoins à satisfaire, recense les
actions d'insertion déjà mises en place, évalue les moyens
supplémentaires à mettre en oeuvre, estime les besoins de
formation des personnels et "
définit les mesures
nécessaires pour harmoniser l'ensemble des actions d'insertion conduites
ou envisagées dans le département
".
Le champ du PDI peut être élargi "
à l'ensemble de
la lutte contre la pauvreté et l'exclusion et à l'ensemble des
actions en faveur de l'insertion ".
Or, le PDI est élaboré et adopté par le
conseil
départemental d'insertion
(CDI) dont les membres sont
nommés conjointement
par le président du conseil
général et par le préfet. Afin de souligner encore le
régime de la " cogestion ", l'article 35 prévoit
que le CDI est
coprésidé
par le préfet et par le
président du conseil général ou leur
délégué.
A l'échelon inférieur, la cogestion est également à
l'oeuvre dans le fonctionnement des
commissions locales d'insertion
(CLI) qui déclinent sur leur territoire les compétences des CDI,
animent la politique locale d'insertion et approuvent les contrats d'insertion
signés par les bénéficiaires de l'allocation
(art. 42-1). Là encore, ce sont le préfet et le
président du conseil général qui
nomment conjointement
les membres des CLI
, soit en désignant leurs propres
représentants, soit en choisissant d'un commun accord des
représentants des communes ou des " forces vives " locales
(système éducatif, institutions, entreprises, associations).
La cogestion institutionnelle n'a pas toujours suscité la dynamique
attendue, sans doute parce qu'elle est apparue imposée par
l'extérieur plutôt qu'animée par des initiatives communes.
La Cour des comptes, dans son rapport public de 1995, soulignait que le
rôle des CDI relevait
" plus de l'information que de la
décision lorsque leur intervention se réduit à avaliser
les propositions préparées par le services de l'Etat et du
département "
.
Chaque PDI devait donner lieu, aux termes de l'article 39, à la
signature d'une convention définissant les conditions, notamment
financières, de mise en oeuvre du PDI. Là encore, la Cour des
comptes, à l'occasion d'une enquête réalisée sur
20 départements en 1993, constatait l'absence d'une telle
convention dans 10 départements sur 20, faisant allusion à
l'attitude réservée des conseils généraux.
A la cogestion vient s'ajouter un mécanisme de
mobilisation
forcée des crédits départementaux
. L'article 38
de la loi précitée dispose ainsi que
" pour le
financement des actions inscrites au programme départemental d'insertion
et des dépenses de structure correspondantes, le département est
tenu d'inscrire annuellement un crédit égal au moins à
20 % des sommes versées au cours de l'exercice
précédent par l'Etat dans le département au titre de
l'allocation de RMI "
. Le taux précité a
été porté à 17 % par la loi instituant la
couverture maladie universelle (CMU).
Cette obligation d'inscription des crédits est accompagnée d'un
report automatique des crédits non consommés d'une année
sur l'autre. L'article 41 prévoit ainsi que
" le montant
des crédits n'ayant pas fait l'objet d'un engagement de dépenses,
constaté au compte administratif, est reporté
intégralement sur les crédits de l'année
suivante "
.
En l'absence d'affectation ou de report des crédits, le préfet
est habilité à mettre en oeuvre la procédure d'inscription
d'office d'une dépense obligatoire prévue à
l'article 52 de la loi du 2 mars 1982 ; toutefois, cette
procédure n'a jamais été mise en oeuvre dans cette
hypothèse.
La nature des dépenses pouvant être financées par le
département est entendue strictement. Lorsqu'une action d'insertion
financée par le conseil général concerne plusieurs types
de publics, la quote-part sur les " 20 % " est calculée
au prorata de la part des bénéficiaires du RMI dans
l'action ; il faut, par ailleurs, que le lien entre les actions et les
bénéficiaires du RMI soit clairement établi.
Les dépenses d'assurance personnelle pour les
bénéficiaires du RMI non couverts au titre de l'assurance maladie
et maternité, prises en charge par les départements avant
l'instauration de la CMU, n'étaient pas considérées comme
des dépenses d'insertion et, à ce titre, ne pouvaient être
imputées sur les crédits d'insertion. La seule exception
autorisée était la prise en charge de l'aide médicale
fournie aux bénéficiaires dans la limite de 3 % des
crédits départementaux d'insertion.
Même si le PDI peut être étendu à l'ensemble des
actions d'insertion et de lutte contre l'exclusion dans un département,
la loi précise expressément que les crédits obligatoires
au titre de l'article 38 doivent rester affectés aux
bénéficiaires du RMI.
Cette absence de souplesse a souvent fait l'objet de critiques de la part des
responsables des conseils généraux. Ainsi, à l'initiative
de notre collègue, M. Jean Delaneau, une proposition de loi a
été adoptée par le Sénat en mars 1998
(n° 91, 1997-1998) afin d'autoriser l'imputation des dépenses
départementales consacrées à la lutte contre la
pauvreté et l'exclusion, dans la limite de 10 %, sur le quota des
crédits départementaux d'insertion. Cette proposition
raisonnable, qui avait reçu un avis défavorable du Gouvernement,
n'a jamais été mise en discussion à l'Assemblée
nationale.
Il est à noter que le taux de consommation des crédits
départementaux d'insertion n'a fait qu'augmenter pour atteindre
97 % en 1995, témoignant ainsi de la volonté d'agir des
départements malgré des débuts difficiles.
Enfin, il faut rappeler que la loi n° 92-722 du 29 juillet 1992
portant adaptation du RMI a confirmé le principe de la cogestion et a,
en outre, institué le
Fonds d'aide aux jeunes
(FAJ)
financé par l'Etat et le département, la participation de ce
dernier devant être
" au moins égale
"
à celle de l'Etat.
L'emprise croissante de l'Etat sur les collectivités
locales
en matière d'habitat et d'urbanisme
au début des
années quatre-vingt-dix
La loi
du 7 janvier 1983 laissait une relative autonomie à la commune pour
définir ses propres options en matière d'habitat et de logement.
Certes, aux termes de l'article 77 de la loi précitée, les
régions disposaient d'une compétence financière de droit
commun pour attribuer des subventions en complément des aides de l'Etat
ou de leur propre initiative, afin d'améliorer la qualité de
l'habitat des quartiers et des logements existants ou l'équipement de
terrains à bâtir.
Mais, aucune collectivité ne pouvant exercer de tutelle sur une autre,
les communes disposaient d'une compétence réelle pour
définir leurs priorités en matière d'habitat (art. 76) et
établir un programme local de l'habitat (PLH) ayant pour fonction de
déterminer les
" opérations prioritaires et notamment les
actions en faveur des personnes mal logées ou
défavorisées "
(art. 78). De nombreuses communes se
doteront d'un PLH (plus de 300) alors que ce document n'avait pas de
caractère obligatoire.
Au début des années 90, se fondant sur la lutte contre les
exclusions par le logement, le Gouvernement mettra en place divers
mécanismes afin d'asseoir son intervention dans un contexte où la
crise de financement du logement social et l'insuffisance du financement par
l'Etat des prêts locatifs aidés (PLA) génèrent de
fortes tensions sur le marché locatif pour les personnes modestes ou en
difficulté.
•
•
La loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la
mise en oeuvre du droit au logement
présentée par M. Louis
Besson, institue
une forme de cogestion
entre le préfet et le
président du conseil général dans le domaine du logement
pour les personnes défavorisées.
Un plan départemental
d'action pour le logement des personnes défavorisées
(PDALPD)
doit être élaboré par l'Etat et par le
département : il récapitule les mesures qui doivent
permettre aux personnes en difficulté d'accéder à un
logement indépendant ou de s'y maintenir : en particulier, le
PDALPD
" analyse les besoins et fixe par bassin d'habitat
les
objectifs à atteindre en matière de logement
notamment
(...)
par la création d'une offre supplémentaire de
logements et
la mise en place d'aides spécifiques ".
Le plan est complété par un
mécanisme financier
spécifique
-le fonds de solidarité pour le logement (FSL)-
destiné à accorder des aides financières aux locataires ou
aux candidats locataires.
De même que les fonds d'aide aux jeunes qui seront institués en
1992, les FSL sont
financés à parité par l'Etat et le
département
, ce dernier étant tenu de compléter le
niveau de la subvention déléguée par l'Etat à
partir de la dotation annuelle inscrite chaque année en loi de finances.
Un autre instrument est mis en place en vue de favoriser l'attribution de
logements locatifs sociaux du secteur des HLM aux personnes et familles
défavorisées : le
protocole d'occupation du patrimoine
social
(POPS) doit ainsi fixer des objectifs d'accueil de personnes en
difficulté dans le parc social "
lorsque la situation
l'exige
". Il est conclu entre le préfet, les
représentants des collectivités territoriales et des organismes
d'HLM
" à l'initiative d'au moins deux des
partenaires ".
Lorsqu'un POPS, demandé par le préfet, n'est pas conclu en six
mois, celui-ci peut désigner les ménages devant être
impérativement logés par les organismes d'HLM, ces
désignations s'imputant sur les droits à réservation du
préfet dans le département (
art. L. 441-2 du code de
la construction et de l'habitation dans la rédaction issue de
l'article 15 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990
).
•
•
La loi n° 91-662 du 13 juillet 1991
d'orientation pour la ville
(LOV)
va imposer à certaines
catégories de communes des contraintes particulières en
matière de gestion de leur habitat.
Dès son article premier, la loi précitée met l'accent sur
le principe du retour à l'intervention de l'Etat en matière
d'équilibre de l'habitat : "
afin de mettre en oeuvre le
droit à la ville, les communes, les autres collectivités
territoriales et leurs groupements, l'Etat et leurs établissements
assurent à tous les habitants des villes des conditions de vie et
d'habitat favorisant la cohésion sociale et de nature à
éviter ou à faire disparaître les phénomènes
de ségrégation
".
L'article 3 ajoute que
" la réalisation de logements
sociaux est d'intérêt national et que les communes ou leurs
groupements doivent
(...)
permettre la réalisation de ces
logements "
.
Afin de garantir les objectifs, la LOV impose la réalisation d'un
programme local de l'habitat
(PLH) ainsi qu'une
norme quantitative de
réalisation de logements sociaux
à certaines
catégories de communes. Il s'agit de celles qui sont comprises dans une
agglomération de plus de 200.000 habitants, dont la proportion de
logements sociaux ne dépasse pas 20 % et dont le taux
d'allocation-logement ne dépasse pas 18 % par rapport au nombre de
résidences principales.
Les communes concernées doivent impérativement établir
dans un cadre intercommunal un programme local de l'habitat définissant
pour cinq ans
" les objectifs et principes d'une politique visant
à répondre aux besoins en logements "
.
Le préfet joue un rôle important dans cette
procédure : il est chargé de transmettre aux communes
" toutes informations utiles " ainsi que "
les objectifs
locaux à prendre en compte
" en matière de
diversité de l'habitat et de répartition équilibrée
des différents types de logements : le préfet peut
éventuellement adresser des demandes motivées de modification
à l'EPIC. L'aide financière de l'Etat en matière d'habitat
et d'action foncière est conditionnée par l'adoption du PLH.
Au vu du PLH, les communes concernées doivent en outre s'engager
à procéder aux actions foncières et aux acquisitions
immobilières nécessaires pour réaliser un nombre minimal
de logements sociaux en fonction du nombre de logements. Une
pénalité financière est prévue en cas de
non-respect de l'objectif sous forme d'une contribution communale
représentant 1 % de la valeur locative imposée au titre de
la taxe foncière. La procédure, extrêmement lourde,
s'avérera difficile à mettre en oeuvre.
Par ailleurs, en l'absence de PLH, le préfet peut exercer par
substitution au nom de l'Etat le droit de préemption urbain dans la
commune.
b) Un cadre contraignant pour les collectivités locales
Or le
cadre de cette cogestion est apparu contraignant pour les collectivités
locales et peu respectueux de leur liberté de décision.
Comme l'attestent les deux exemples exposés ci-dessus, les
dispositifs législatifs
ont soit imposé aux
collectivités locales des actions conditionnées par les
décisions de l'Etat, soit ménagé à ce dernier la
faculté de faire prévaloir son point de vue.
Le contrat, instrument privilégié de la cogestion, s'est
développé dans un cadre inégalitaire, au détriment
des collectivités locales. Votre rapporteur exposera, ci-dessous, de
manière plus détaillée cette
logique contractuelle
inégalitaire
.
Au total, cette déviation de la logique initiale s'est traduite par une
intervention accrue de l'Etat
là où il aurait dû se
recentrer sur ses fonctions essentielles et par un
encadrement plus
strict
des conditions d'exercice des compétences locales, là
où l'initiative et la responsabilité des acteurs publics locaux
auraient dû prévaloir.
Cette situation n'est pas satisfaisante au regard de
l'efficacité de
l'action publique
, laquelle exige une meilleure définition du
rôle respectif des différents acteurs. Elle n'est pas non plus
satisfaisante pour le
citoyen
et le
contribuable local
qui sont
en droit d'identifier les responsables des actions publiques et de
connaître précisément quelle est la destination de la
contribution qui leur est demandée.
Des dispositifs plus récents aggravent cette situation en favorisant une
véritable recentralisation des compétences.