C. DES FACTEURS DE COMPLEXITE POUR L'ORGANISATION TERRITORIALE
Plusieurs facteurs de complexité pour l'organisation territoriale méritent d'être relevés. Ils tiennent aux ambiguïtés de la politique des pays, à la prolifération des " zonages " et aux mécanismes complexes des interventions communautaires.
1. Les ambiguïtés de la politique des pays
a) La loi d'orientation du 4 février 1995 : le pays espace de projet
La
reconnaissance des pays dans la loi du 4 février 1995 d'orientation pour
l'aménagement et le développement du territoire avait
été fondée sur cinq principes directeurs qui,
conformément au souhait du Sénat, privilégiaient la
souplesse
et faisaient du pays un périmètre pertinent pour
la mise en oeuvre de
projets de développement
sans qu'il puisse
s'agir de créer un nouvel échelon d'administration locale.
Reconnu comme
outil essentiel de la politique d'aménagement et de
développement du territoire,
le pays devait , selon
l'article
23
de la loi, exprimer la communauté d'intérêts
économiques et sociaux et, le cas échéant, les
solidarités réciproques
entre la ville et l'espace rural.
Le pays était fondé sur la
libre adhésion
des
collectivités locales désireuses de travailler ensemble autour
d'objectifs partagés et de définir, en concertation avec les
autres acteurs concernés, un projet commun de développement.
Reposant sur la volonté locale, la création du pays était
simplement constatée par la commission départementale de la
coopération intercommunale , l'autorité administrative se bornant
à
publier
la liste et le périmètre des pays.
Ces derniers devaient exprimer
une cohésion géographique,
culturelle, économique ou sociale fondée sur une
réalité spatiale
. Ils ne devaient donc en aucun cas
constituer une nouvelle structure ajoutant à la complexité de
l'organisation territoriale.
Le législateur de 1995, soucieux d'affirmer pleinement la
libre
initiative locale,
avait écarté du dispositif toute formule
contraignante de coopération intercommunale dans le cadre du pays.
L'élaboration d'un projet de développement devait se fonder sur
un diagnostic du territoire concerné permettant de concevoir des
objectifs de développement et des actions inscrites dans la
durée. Il devait permettre aux collectivités territoriales, en
concertation avec les acteurs socioprofessionnels,
d'agir autrement
que
dans les cadres traditionnels à partir d'un projet global qui transcende
les logiques sectorielles, fédère des financements multiples et
mobilise les différents acteurs pour sa mise en oeuvre.
Mais tel que conçu par le législateur de 1995, le pays
n'avait
pas la personnalité juridique.
Il constituait un espace pertinent
pour concevoir un projet global, lequel devait ensuite être porté
par les collectivités parties prenantes au projet.
Lancée sur ces bases en 1995, l'opération de préfiguration
a mis en évidence l'intérêt et la richesse du partenariat,
expressément prévu par la loi du 4 février 1995, qui a
permis de mobiliser au mieux les compétences au service de projets
communs de développement.
Les élus locaux ont joué un rôle prépondérant
dans l'initiative des projets. Les départements et les régions -
déjà très engagés dans des politiques de
développement local avant même l'émergence des pays - ont
pu jouer un rôle d'impulsion appréciable. La participation active
des acteurs socio-économiques doit également être
relevée.
Au total, conçu de manière souple et en fonction des
réalités locales, le pays devait permettre de
fédérer des objectifs
et de
démultiplier des
financements. Quelque 200 pays seraient en cours d'organisation sur le
territoire national.
b) La loi du 25 juin 1999 : une procédure plus complexe
Il est
malheureusement à craindre que les modifications introduites par la loi
du 25 juin 1999, contre l'avis du Sénat, ne conduisent à une
formalisation excessive de nature à mettre en cause la souplesse voulue
à l'origine par le législateur et de conférer aux pays une
position ambiguë
dans l'organisation territoriale.
C'est ainsi que les pays doivent désormais faire l'objet d'une
reconnaissance administrative.
Un
périmètre
d'étude
doit être
arrêté par le
préfet après avis conforme de la conférence
régionale de l'aménagement et du développement du
territoire et après avis simple de la commission départementale
de la coopération intercommunale et des préfets de
départements et de régions. Un
périmètre
définitif
est ensuite établi après l'adoption de la
charte du pays.
Le pays est obligatoirement doté d'un
conseil de
développement
composé des représentants des milieux
socio-professionnels et associatifs.
Par ailleurs, pour conclure un contrat particulier au contrat de plan, les pays
devront se constituer en
groupement d'intérêt public de
développement local
, sauf s'ils sont déjà
organisés en établissements publics de coopération
intercommunale à fiscalité propre intégrant l'ensemble
des communes inscrites dans le périmètre.
Le défaut de publication du décret d'application, plus d'un an
après l'entrée en vigueur de la loi, semble malheureusement
confirmer que ces modifications risquent d'être source d'une
plus
grande complexité.