B. DE NOUVELLES RÈGLES DU JEU POUR L'EXERCICE EN PARTENARIAT DE COMPÉTENCES PARTAGÉES
1. Entre l'Etat et les collectivités locales : un partenariat rééquilibré
a) Pour un Etat " contractuel "
L'Etat " contractuel "
que votre mission
d'information souhaite voir émerger est un Etat qui a pleinement
intégré le rôle et la place des collectivités
locales dans le fonctionnement des institutions et la mise en oeuvre de
l'action publique.
Recentré sur ses fonctions essentielles, cet Etat fait confiance aux
collectivités locales pour prendre en charge les missions qui appellent
une
gestion de proximité.
Si nécessaire, il peut développer avec elles des
partenariats
notamment pour fédérer les énergies au
service de l'intérêt général.
A cette fin le contrat peut être un vecteur efficace pour mettre en place
des
cofinancements
lorsqu'ils s'avèrent indispensables.
Selon la formule utilisée devant votre mission d'information par notre
collègue Jean-Pierre Raffarin, président de l'Association des
régions de France, le cofinancement est nécessaire à un
" actionnariat de projet ".
Mais il importe de définir un cadre contractuel
clair
et
équilibré.
b) Une nouvelle règle du jeu pour les relations contractuelles entre l'Etat et les collectivités locales
La
clarification du cadre contractuel des relations entre l'Etat et les
collectivités locales doit être envisagée aux
différentes étapes
de la procédure contractuelle.
Mais la
pertinence
du recours à la technique contractuelle doit
au préalable être examinée. Selon le domaine
concerné, la contractualisation peut être source de
confusion
et doit donc être
écartée.
Il en est ainsi pour des compétences qui appelant une gestion de
proximité peuvent en réalité parfaitement être
décentralisées.
La technique contractuelle n'est alors
rien d'autre qu'un moyen pour l'Etat de garder la maîtrise d'oeuvre alors
même que les financements sont majoritairement apportées par les
collectivités locales.
Dans des domaines qui, à l'inverse, relèvent des
compétences régaliennes de l'Etat,
la contractualisation
peut être de nature à
diluer
les responsabilités.
Elle nuit donc à la clarté de l'action publique. Le contrat doit
donc être réservé aux domaines qui relèvent
effectivement d'une
responsabilité partagée
entre l'Etat
et les collectivités locales.
Un second préalable concerne
l'éparpillement des
procédés contractuels.
Il apparaît indispensable que
pour un même domaine, les actions conjointes menées par l'Etat et
les collectivités locales fassent l'objet d'un
document contractuel
unique. Cette méthode est source de clarté et
d'efficacité.
Ces préalables étant posés, votre mission d'information
juge d'abord nécessaire une première clarification qui porte sur
les collectivités qui doivent être associées à ce
partenariat.
Contrairement à une pratique observée dans la
période récente, décrite dans la première partie du
présent rapport, si l'Etat veut solliciter les collectivités
locales dans un domaine considéré, il doit associer dès la
phase de négociation, tous les partenaires dont les compétences
seront concernées par le contrat.
Une deuxième clarification doit porter sur les
conditions de
négociation du contrat.
Votre mission d'information juge nécessaire que cette négociation
soit menée au plus près des réalités locales.
L'Etat doit donc rompre avec la tradition de l'acte unilatéral qui
imprègne encore trop souvent les comportements administratifs. Le
" dirigisme méthodologique " n'est pas adapté à
une négociation équilibrée entre partenaires
responsables.
La clarification doit également porter sur le
contenu
des
contrats passés par l'Etat avec les collectivités locales.
Le contrat ne doit plus être, comme il l'a été trop
souvent, un instrument de transfert de charges de l'Etat vers les
collectivités, sans transfert parallèle des
responsabilités.
Selon le principe " qui paie commande ", l'Etat ne peut avoir recours
à la technique contractuelle pour faire financer ses propres
compétences par les collectivités locales tout en gardant la
maîtrise d'oeuvre.
En outre, une
définition précise des engagements
respectifs de l'Etat et des collectivités cocontractantes apparaît
indispensable à l'efficacité même de l'outil contractuel.
Enfin, la clarification souhaitée par votre mission d'information
implique que les partenaires au contrat
respecte les engagements qu'ils ont
souscrits.
Le bilan établi par le présent rapport a mis en évidence
que l'Etat s'était trop souvent dispensé d'exécuter les
obligations qu'il avait lui-même librement contractées.
Cette démarche
décrédibilise l'Etat
comme
partenaire des collectivités locales. Elle met en cause la
portée
même du procédé contractuel qui n'a de
sens que pour autant que les cocontractants se sentent tenus par les
engagements figurant au contrat.
La
mauvaise exécution
des obligations contractuelles peut
également mettre en cause l'efficacité de l'outil contractuel. Il
en est ainsi notamment des retards dans les financements, retards qui
perturbent le bon déroulement des actions conjointement
décidées.
Ces défaillances posent le problème de l'organisation de l'Etat,
de sa capacité à concevoir et à appliquer des
procédures efficaces
.
Mais les collectivités locales ne doivent pas subir les
conséquences des insuffisances des procédures appliquées
par l'Etat.
C'est pourquoi, votre mission d'information considère que les
défaillances de l'Etat dans le respect de ses obligations contractuelles
pourraient faire l'objet de
sanctions financières.
De telles sanctions inciteraient à une
meilleure définition du
contenu
et de l'échéancier
des obligations respectives
des partenaires au contrat. Elle les conduirait, le cas échéant,
à mieux distinguer entre, d'une part,
l'énoncé
d'objectifs
n'ayant pas de traduction immédiate et donc
insusceptibles d'engager la responsabilité contractuelle et, d'autre
part, les
engagements précis
des cocontractants pouvant mettre en
jeu leur responsabilité en cas de défaillance.