2. La sagesse fiscale
La place
croissante du secteur public local dans l'économie nationale s'est
accompagnée par un développement du financement de ses
dépenses par la fiscalité :
- en 1970, le montant des dépenses des APUL était 2 fois
supérieur au montant de la fiscalité perçue à leur
profit. Ce rapport s'établissait à 1,8 en 1982. Il était
de 1,6 en 1998 ;
- entre 1988 et 1998, le montant total des recettes des collectivités
locales a progressé de 56 % alors que celui des recettes fiscales a
augmenté de 83 %.
Le poids croissant de la fiscalité
La comptabilité nationale retrace le poids des
prélèvements obligatoires perçus au profit des
administrations publiques locales en points de PIB. Le taux de
prélèvements obligatoires des APUL s'élevait à
3,4 % en 1970, 4,8 % en 1982 et 5,8 % en 1998.
La part dans le PIB de la fiscalité locale en 1998 était 1,7 fois
supérieure à celle de 1970. La part dans le PIB des
prélèvements obligatoires perçus par la
sécurité sociale en 1998 n'est que 1,5 fois supérieure
à celle de 1970. Quand à l'Etat, la part de ses
prélèvements obligatoires dans le PIB en 1998 est
inférieure à celle de 1970.
Part des prélèvements obligatoires (PO) perçus au profit de l'Etat, des APUL et des organismes de sécurité sociale dans les PO de l'ensemble des administrations publiques
(en %)
|
1970 |
1982 |
1992 |
1998 |
Etat |
52,4 |
42,2 |
39,1 |
38,3 |
APUL |
9,6 |
11,2 |
11,7 |
12,9 |
Sécurité sociale |
37,3 |
44,3 |
45,9 |
45,8 |
Données chiffrées : Projet de loi de finances pour 2000, rapport économique, social et financier.
S'agissant des collectivités locales proprement dites (communes, départements, régions), la part des recettes fiscales dans leur budget s'accroît de manière continue entre 1988 et 1998 :
Part des recettes fiscales dans les recettes des collectivités locales
(en milliards de francs)
|
1988 |
1998 |
Recettes totales |
500,2 |
782,4 |
Recettes fiscales |
226,6 |
415 |
Part des recettes fiscales dans les recettes totales |
45,3 % |
53 % |
Données chiffrées : Les collectivités locales en chiffres 1999, DGCL. Les données de 1998 ne sont que des premières estimations tirées des budgets primitifs
Une
augmentation qui s'explique par la nécessité de financer les
compétences locales
L'augmentation du poids de la fiscalité locale et de la part de la
fiscalité dans les ressources locales s'explique en partie par le fait
que l'Etat a transféré certains impôts aux
collectivités locales afin de leur permettre de financer les
compétences que leur ont conféré les lois de
décentralisation. Le produit de cette fiscalité dite
" transférée " s'élevait à 47,3 milliards
de francs en 1998, soit 11 % des recettes fiscales des
collectivités locales (communes, départements, régions).
Mais surtout,
l'augmentation du poids de la fiscalité locale
s'explique par le fait que l'évolution des dotations de l'Etat ne permet
pas aux collectivités locales de faire face au coût de leurs
compétences, obligatoires ou transférées par les lois de
décentralisation.
En admettant, à la lumière des éléments
évoqués plus haut et notamment des efforts des
collectivités locales pour maîtriser l'évolution de leurs
dépenses de fonctionnement, que l'augmentation du montant des
dépenses des collectivités ne résulte pas d'un laxisme
budgétaire mais de la nécessité d'assumer convenablement
des compétences de plus en plus coûteuses, on constate que
l'évolution des dotations de l'Etat aux collectivités locales (+
47 milliards de francs, soit + 37 %, entre 1988 et 1988) ne suit pas
l'évolution des dépenses des collectivités locales (+ 275
milliards de francs, soit + 54 %, sur la même période).
La fiscalité a donc été utilisée pour
résorber partiellement cet écart, sachant que les
collectivités (contrairement à l'Etat
17(
*
)
) ne peuvent pas financer par
l'emprunt leurs dépenses de fonctionnement. Ainsi les recettes fiscales
ont augmenté de 188 milliards de francs (+ 83 %) entre 1988 et
1998.
Evolution du mode de financement des compétences locales entre dotations et fiscalité
(en milliards de francs)
|
1988 |
1998 |
Evol. en volume |
Evol. en % |
Dépenses |
500,4 |
781,4 |
+ 275 |
+ 54 |
Recettes, dont : |
500,2 |
782,4 |
+ 282,2 |
+ 56 |
Recettes fiscales |
226,6 |
415 |
+ 188,4 |
+ 83 |
Dotations |
127,7 |
174,7 |
+ 47 |
+ 37 |
Autres recettes |
145,9 |
192,7 |
46,8 |
+ 32 |
Données chiffrées : Les collectivités locales en chiffres 1999, DGCL. Les données de 1998 sont des estimations.
La
volonté d'alléger la pression fiscale
Les recettes fiscales des collectivités locales se partagent entre le
produit d'impôts indirects (droits de mutation, vignette, taxe sur
l'électricité, taxe sur les cartes grises, etc.) et
d'impôts directs, les " quatre vieilles " (ou encore
" quatre taxes ") auxquelles s'ajoutent la taxe d'enlèvement
des ordures ménagères et le versement transport. En 1998, les
" quatre taxes " représentaient près des trois quarts
des recettes fiscales perçues par les collectivités locales et
les structures intercommunales à fiscalité propre
(322 milliards de francs pour un total de 437 milliards).
Depuis 1996, les collectivités locales ont entamé un mouvement de
ralentissement de l'évolution des
taux
des impôts directs
locaux. Alors que les taux avaient augmenté de 3,5 % entre 1995 et 1996,
leur progression a été ramenée à 0,9 % en
1997, 0,6 % en 1998 et 0,5 % en 1999. Le mouvement concerne
l'ensemble des taxes. Ainsi, l'augmentation des taux de taxe d'habitation est
passée de 4,2 % en 1996 à 0,4 % en 1999 tandis que
celle des taux de taxe professionnelle est passée de 3,3 % en 1996
à 0,5 % en 1999.
Le ralentissement de la progression des impôts locaux témoigne
d'une véritable volonté d'alléger la pression sur les
contribuables locaux, et s'accompagne d'un mouvement de ralentissement de
l'évolution des
produits votés
. Pour les quatre taxes,
l'augmentation du produit voté est passée de 4,6 % en 1996
à 0,6 % en 1999.
Par ailleurs, il convient de signaler que, contrairement aux idées
reçues, le développement de l'intercommunalité, n'a pas,
au niveau national, entraîné d'augmentation de la pression fiscale
locale. On constate en effet que
l'augmentation de la part des impôts
perçus par les structures
intercommunales à fiscalité
propre s'est accompagnée d'une
réduction de la part du produit
des quatre taxes bénéficiant aux communes
. La part des
communes et de leurs groupements dans les impôts directs locaux a
même légèrement diminué entre 1988 et 1998. On a
donc assisté à une substitution des groupements aux communes,
sans effet sur le contribuable local
18(
*
)
.
Répartition du produit de la fiscalité directe locale (hors compensations) entre ses différents bénéficiaires
(en %)
|
1988 |
1998 |
Etat |
6,5 |
7,0 |
Taxes annexes |
8,1 |
8,0 |
Régions et TSE |
4,3 |
6,7 |
Départements |
23,8 |
23,3 |
Communes et EPCI
, dont :
|
57,8
|
54,9
|
Total |
100,0 |
100,0 |
Source : Annuaire statistique de la direction générale des impôts, 1998.
S'agissant de l'ensemble des administrations publiques locales, le rapport préliminaire de la Cour des comptes sur l'exécution de la loi de finances pour 1999 indique que la part dans le PIB des prélèvements obligatoires des APUL a enregistré une baisse en 1999, pour s'établir à 5,5 points de PIB, après trois années de stabilisation à 5,7 % . Les prélèvements obligatoires perçus par l'Etat ont connu une augmentation en 1999, pour s'établir à 17,8% du PIB, contre 17,2 % en 1998.