B. UN ETAT OMNIPRÉSENT DANS LE DOMAINE DE LA FORMATION
L'Etat
conserve une place centrale dans le dispositif de formation professionnelle.
Si la région a été dotée en 1983 d'une
compétence de " droit commun ", celle-ci n'est pas
considérée comme une compétence " exclusive ".
Cette lecture repose sur une interprétation extensive de
l'article
L. 900-1
du code du travail qui fait de la formation professionnelle
" une obligation nationale à laquelle chacun doit
contribuer ".
L'article 82-1 de la loi du 7 janvier 1983 a souligné, il est vrai, que
les compétences régionales
dans le respect des règles
(...) figurant dans le code du travail
en matière de formation
professionnelle
ainsi que dans les lois non codifiées relatives
auxdites actions ".
Le rapport au Gouvernement
279(
*
)
de M. Gérard Lindeperg,
député de la Loire, illustre bien cette conception relativement
restrictive de la décentralisation en matière de formation
professionnelle :
" En inscrivant le principe d'une
compétence de droit commun, le Législateur n'a pas posé de
principe d'exclusivité de l'intervention des régions sur les
domaines d'intervention transférées, mais un principe d'autonomie
politique, administrative et financière sur les actions qu'elles
conduisent ".
1. L'Etat conserve en droit et en fait une compétence considérable
Aux
termes de la loi du 7 janvier 1983, la compétence
" résiduelle " de l'Etat porte tout d'abord sur les politiques
de formation en faveur de certaines catégories de la population
(détenus, réfugiés, éducation surveillée,
handicapés) correspondant à l'expression d'une solidarité
nationale et dont les actions ne relèvent pas d'une région
déterminée.
L'Etat demeure compétent en ce qui concerne
les actions de
portée nationale
de formation professionnelle continue ou
d'apprentissage.
Par actions de portée nationale, il faut entendre les actions relatives
à des stages assurés par un même organisme dans plusieurs
régions, soit des formations destinées à des apprentis ou
à des stagiaires sans considération d'origine régionale.
Cette définition permet à l'Etat d'inscrire directement des
crédits de formation aux budgets des différents ministères
qui ne relèveront pas des fonds régionaux de la formation
professionnelle et de l'apprentissage. L'instrument principal de gestion de ces
crédits et l'association pour la formation professionnelle des adultes
(AFPA) qui comprend près de 200 sites de formation sur tout le
territoire et qui est dotée d'un budget de près de
4 milliards de francs.
Compte tenu du poids de l'AFPA mais aussi de l'ANPE, dans le dispositif de
formation, l'Etat conserve un levier d'action non négligeable :
c'est l'Etat qui procède à l'agrément des stages dont il
rémunère les stagiaires suivant une procédure de gestion
très centralisée.
L'ASSOCATION NATIONALE POURLA FORMATION PROFESSIONNELLE DES ADULTES (AFPA)
Créée en 1949, l'AFPA est une association de la
loi de
1901 à gestion paritaire (Etat, partenaires sociaux, AFPA)
chargée d'une mission de service public par délégation du
ministre du travail.
Composante du service public de l'emploi, l'AFPA intervient aux
côtés de l'ANPE et des services déconcentrés de
l'Etat, pour permettre à des personnes engagées dans la vie
active, d'acquérir une qualification, de la maintenir ou de la
développer afin de favoriser leur insertion ou leur évolution
dans l'emploi en fonction des besoins du marché du travail. Depuis 1994,
les relations de l'AFPA avec l'Etat sont régies par un " contrat de
progrès ". Le contrat signé pour la période 1999-2003
précise que la mission centrale de l'AFPA est de permettre à des
demandeurs d'emploi adultes d'acquérir une qualification favorisant leur
insertion dans l'emploi.
L'AFPA est théoriquement gérée par deux organes
délibérants, l'assemblée générale et le
bureau. Mais comme le rappelle la Cour des comptes, dans son rapport public
annuel de 1997,
" le président
élu par
l'assemblée générale a toujours été choisie
au sein du collège des représentants de l'administration ;
le ministère du travail, chargé de la tutelle de l'AFPA,
désigne en fait le directeur général et le fait ensuite
agréer par "
l'assemblée
générale ".
En 1998 le budget de l'AFPA était de 5,44 milliards de francs dont
73 % provenaient d'une subvention de l'Etat. L'AFPA employait
11.397 salariés, répartis sur 190 sites d'information et
d'orientation professionnelle et 262 sites de formation. L'AFPA avait
procédé à 161.118 actions de formation et avait
accueilli 155.000 stagiaires environ.
Enfin, l'Etat conserve également la maîtrise des stages
créés en application de programmes établis en fonction des
orientations prioritaires de l'Etat
définies conformément
à la procédure prévue à
l'article L. 910-2
du code du travail. Celles-ci sont déterminées par le
comité interministériel de la formation professionnelle et de
la promotion sociale
après consultation des organisations
professionnelles et syndicales.
Le Plan national d'action pour l'emploi (PNAE) adopté en 1998 illustre
cette notion de programme prioritaire.
La dernière compétence maintenue par la loi à l'Etat porte
sur les
" études et actions expérimentales
nécessaires à la préparation de (ses) actions ainsi que
les moyens pour assurer l'information sur les politiques
engagées ".
Mais surtout l'Etat conserve par-delà les textes plusieurs attributions
essentielles qui lui donne un
pouvoir de fait considérable
.
C'est lui qui
définit le cadre juridique des interventions
de la
formation professionnelle : les modalités de conventionnement des
organismes de formation ou le statut des stagiaires relèvent du pouvoir
normatif de l'Etat.
L'Etat reste maître du contenu pédagogique des formations
dispensées : il détermine les programmes de formation et
gère l'homologation des filières et des diplômes ; il
assure le contrôle pédagogique du dispositif.
De surcroît, l'Etat conserve un rôle prépondérant
dans
la définition des relations avec les partenaires
sociaux
: les confédérations d'employeurs et les
syndicats qui disposent d'une représentation nationale se tournent
naturellement vers l'Etat pour la définition des orientations
prioritaires.
En matière de
contrôle
, l'Etat détient une vraie
compétence exclusive, qu'il s'agisse du respect par les employeurs de
l'obligation de financement du contrôle, des dépenses des
organismes collecteurs de fond ou du contrôle pédagogique des
organismes de formation.