B. LA DÉCENTRALISATION A PERMIS UNE AMÉLIORATION DE LA PERFORMANCE PUBLIQUE DANS LE DOMAINE SOCIAL
1. L'amélioration des performances en matière sociale
a) Une dépense maîtrisée dans un contexte difficile
La
dépense d'aide sociale a fortement augmenté au cours des
15 dernières années. La dernière étude de
l'Observatoire national de l'action sociale décentralisée
(ODAS) réalisée sur un échantillon
représentatif de 29 départements métropolitains
relative à l'évolution des dépenses nettes d'aide
sociale
269(
*
)
montre que
celle-ci serait passée de 38,4 milliards de francs à
82,8 milliards de francs en 1999. Elles représentent 60 %
environ des dépenses de fonctionnement des départements.
Ce chiffre doit être complété, pour être exhaustif,
par celui des contingents communaux d'aide sociale qui représentent la
participation des communes à l'effort d'aide sociale
départementale. Les contingents représentaient, en 1999, 12,2
milliards de francs. Il convient de rappeler que ce dispositif de financement
croisé est supprimé à compter de l'exercice 2000 du fait
de l'entrée en vigueur de la CMU.
Cette évolution est à la fois subie et voulue : subie parce
que la persistance de la crise au cours des années 80 et la
montée de l'exclusion ont entraîné, à travers la
mise en place du RMI, à partir de 1988, une forte progression des
dépenses d'insertion et d'aide médicale ; elle est aussi
volontaire parce que les départements ont engagé un effort
d'amélioration du taux d'équipement, notamment en faveur des
personnes handicapées, pour assurer un rattrapage des retards
constatés.
Face à la forte progression des dépenses, force est de constater
que les budgets départementaux ont su absorber sans choc majeur une
profonde modification des contours des publics et des dépenses d'aide
sociale : ils ont su également répondre avec rapidité
aux besoins des personnes traditionnellement accueillies dans les structures
d'aide sociale notamment les personnes handicapées.
DEPENSES NETTES D'AIDE SOCIALE DEPARTEMENTALE 1984-1999
(France métropolitaine)
(en milliards de francs) |
1984 |
1989 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
Aide sociale à l'enfance |
15,0 |
16,8 |
23,9 |
24,9 |
25,9 |
27,1 |
27,8 |
Aide sociale en direction des personnes âgées |
8,7 |
9,3 |
13,1 |
13,5 |
13,1 |
12,3 |
11,7 |
Aide sociale en direction des personnes handicapées |
6,2 |
7,7 |
12,8 |
13,5 |
14,1 |
15 |
15,8 |
Aide médicale |
2,0 |
2,6 |
6,4 |
6,3 |
6,9 |
7,2 |
7,7 |
Charges d'insertion des bénéficiaires du RMI |
|
0,2 |
3 |
3,2 |
3,5 |
4 |
4,2 |
Autres dépenses |
6,5 |
8,7 |
13,8 |
14,2 |
14,8 |
15,4 |
15,6 |
Dépense nette totale |
38,4 |
45,3 |
73 |
75,6 |
78,3 |
81 |
82,8 |
Source lettre de l'ODAS avril 2000
Les
travaux de l'ODAS auquel il sera fait référence permettent
d'effectuer une analyse comparative des dépenses sur les données
les plus récentes.
Les résultats de l'ODAS sont établis à partir de
données rassemblées auprès d'un échantillon
représentatif de 29 départements.
Par convention, les dépenses observées sont les
dépenses nettes d'aide sociale
: elles tiennent compte des
recettes directes correspondantes, avant déduction du contingent
communal, afin d'offrir une photographie la plus réaliste possible de
l'effort des collectivités publiques concernées.
Les données relatives aux bénéficiaires de l'aide sociale
départementale sont issues de l'enquête "
Aide
sociale
" de la
Direction de la recherche, des études, des
évaluations et des statistiques
(DREES) du ministère de
l'emploi et de la solidarité
270(
*
)
.
•
L'aide sociale à l'enfance
représente presque,
avec 28 milliards de francs en 1999, le
premier poste de dépenses de
l'aide sociale départementale
.
Entre 1995 et 1999, ces dépenses augmentent de 4 % par an en
moyenne, soit sensiblement plus que l'inflation.
Comme le souligne l'ODAS, cette augmentation tient pour beaucoup à
l'accroissement de la masse salariale des personnels des
établissements et des assistantes maternelles.
De surcroît, le
coût moyen d'un placement a fortement augmenté (150.000 francs par
an en 1998 contre 87.000 francs en 1989) en raison du renforcement de
l'encadrement dû à la difficulté croissante de la prise en
charge des enfants en danger.
Enfin,
l'augmentation du nombre d'enfants accueillis
joue
également un rôle. Certes, le nombre d'enfants placés
augmente peu : il passe de 134.000 en 1989 à 135.109 en 1992 et
à 138.063 en 1999. La relative stabilité des placements de 1989
à 1992 semble due à la mise en place du RMI qui a
contribué à stabiliser les ressources des familles en
difficulté. Mais, en revanche, le nombre d'actions éducatives en
milieu ouvert ou à domicile augmente sensiblement : celles-ci
passent de 112.777 en 1992 à 127.684 en 1996, soit une hausse de
13,22 %. Cette progression montre la volonté des
départements et de leur service d'aide à l'enfance d'assurer un
maintien de l'enfant dans son environnement.
•
L'aide sociale aux personnes âgées
représente
11,7 milliards de francs
en 1999 alors que son
montant ne dépassait pas 8,7 milliards de francs en 1984.
Plusieurs phénomènes se conjuguent, compliqués au
demeurant par les conséquences de la phase transitoire
consécutive à la mise en place de la prestation spécifique
dépendance.
Il apparaît que le nombre de bénéficiaires des
aides
ménagères
(66.600 en 1999 contre 101.016 en 1992) diminue
régulièrement en raison de l'élévation du niveau de
vie des personnes âgées : le coût total de l'aide
ménagère passe donc de 1,5 milliard de francs en 1989 et en 1992
à 1 milliard de francs environ en 1999.
Le nombre de personnes âgées accueillies en établissement
ou chez des particuliers (accueil familial) est lui aussi plutôt sur une
pente descendante : il passe de 133.900 en 1992 à 123.000 en 1999
en raison de l'augmentation du niveau de vie des personnes âgées
mais aussi du fait que l'entrée en établissement s'effectue en
moyenne à un âge de plus en plus avancé. Il reste que les
dépenses augmentent encore fortement passant de 4,8 milliards de
francs en 1984 à 5,7 milliards de francs en raison du coût
plus élevé de la prise en charge de personnes devenues de plus en
plus dépendantes.
Le facteur essentiel de progression des dépenses proviendra donc de
l'augmentation de l'aide au maintien à domicile par le biais du
versement de l'ACTP aux personnes âgées de plus de 60 ans :
les dépenses vont tripler de 1984 à 1996 passant de
1,8 milliard de francs à 5,3 milliards de francs.
A compter de 1997, ces dépenses diminueront en raison de l'institution
de la PSD, les données demeurant toutefois difficiles à analyser
en raison du caractère récent de la prestation.
•
L'aide sociale aux personnes handicapées
connaît
également une progression non négligeable : elle
représente 15,8 milliards de francs en 1999 contre
6,2 milliards de francs en 1984.
Le première phénomène est celui de l'augmentation
modérée mais régulière du nombre de places en
établissement (79.300 en 1999 contre 69.091 en 1992). La modernisation
des établissements et de leurs conditions de vie explique une
progression du coût de l'hébergement. 12,5 milliards de
francs en 1999 contre 4 milliards de francs en 1984, soit un
quasi-triplement. Ce phénomène recouvre une diversification des
modes de prise en charge : le nombre de places d'accueil de jour a
triplé en passant de 3.116 en 1992 à 8.600 en 1999 ; les
bénéficiaires de l'aide ménagère ou d'auxiliaires
de vie atteint 12.800 en 1999 au lieu de 6.970 en 1992.
La part de l'ACTP aux personnes de moins de 60 ans représente une
dépense de 3,3 milliards de francs en 1999 (90.342
bénéficiaires).
•
Les dépenses d'insertion
constituent le poste de
dépenses d'aide sociale qui a connu la progression la plus
spectaculaire : ces dépenses qui étaient quasi-inexistantes
en 1984, avec 2 milliards de francs, atteignent en 1999
11,9 milliards de francs. Le RMI mis en place en 1988, loin
d'atténuer la charge des départements, a en réalité
été un puissant facteur d'accélération des
dépenses puisqu'il a permis une meilleure identification des personnes
et familles en difficulté et qu'il a généré
l'ouverture d'un certain nombre de droits connexes (prise en charge des
dépenses de cotisation d'assurance personnelle et de l'aide
médicale). Les dépenses d'aide médicale qui vont
être transférées à l'assurance maladie à
compter du 1
er
janvier 2000, représentaient
7,7 milliards de francs en 1999.
b) La décentralisation n'est pas un facteur d'aggravation des inégalités de l'offre sociale
Selon
une idée reçue, communément répandue, la
décentralisation aurait pour effet de
renforcer les
inégalités
en matière de réponse sociale sur le
territoire. En raison des inégalités de potentiel fiscal entre
les départements, les citoyens auraient droit à un traitement
différencié selon leur localisation.
Cette approche est simplificatrice à l'excès : la
réalité est qu'il existe des disparités en matière
d'équipement pour personnes âgées et pour personnes
handicapées sur le territoire, mais que
celles-ci étaient
bien
antérieures à la décentralisation
. Elles
tiennent notamment à des raisons historiques et aux conditions dans
lesquelles l'initiative privée s'est manifestée sur le terrain.
Ainsi, les initiatives des collectivités locales et des associations a
été le principal moteur de la création
d'établissements pour enfants handicapés au cours des
années 50 et 60. Ces initiatives, qui se sont poursuivies au niveau des
structures pour adultes, n'étaient pas nécessairement
coordonnées et n'avaient donc pas de raison d'aboutir à une
densité égale d'un département à l'autre.
•
La gestion centralisée n'est pas une garantie
d'homogénéité
Au-delà des diversités historiques, il apparaît qu'une
gestion centralisée ne garantit nullement une
homogénéisation des prestations et des structures sur l'ensemble
du territoire national.
La Cour
des comptes relevait, dans son
rapport de 1996, que les disparités géographiques existaient
avant la décentralisation en matière sociale.
De surcroît, il existe également des disparités importantes
dans les domaines du secteur social et médico-social dont l'Etat a
conservé la gestion. Ainsi, le taux d'équipement en CAT,
financés sur le budget de l'Etat, varie de un à deux suivant les
départements.
S'agissant de l'implantation des
maisons d'accueil
spécialisé
(MAS) financées par l'assurance maladie, M.
Pierre Gauthier, directeur de l'action sociale, rappelait que le taux
d'équipement variait de un à cinq selon les départements.
Il est vrai qu'il s'agit d'établissements créés par la loi
du 30 juin 1975 dont l'implantation demeure relativement récente.
L'examen de la densité de places en MAS rapportées à la
densité par habitant fait apparaître des écarts encore plus
importants : certains départements comptent 0,25 place de MAS
pour 1.000 habitants alors que, pour d'autres, ce taux atteint 7,52.
Mais surtout il est frappant de constater
qu'une prestation non
contributive,
telle que l'AAH, dont le financement est assuré par
l'Etat et
dont les règles d'attribution sont fixées
uniformément sur tout le territoire national, fait également
apparaître d'importantes disparités départementales,
ce
qui est pour le moins paradoxal.
L'enquête IGF/IGAS de janvier 1999 sur les dysfonctionnements de
l'allocation aux adultes handicapés avait mis en évidence que les
taux d'attribution de l'AAH variaient de 1,14 % à 0,78 % en
1996 selon les départements, les taux étant
particulièrement élevés dans la partie la plus rurale du
grand ouest et plus faible dans la région parisienne. Le rapport
soulignait l'influence de facteurs tels que la plus ou moins forte
capacité d'accueil des handicapés et de la richesse imposable.
Une analyse plus récente
271(
*
)
portant sur un échantillon
représentatif de 24 départements montre qu'à la fin de
1998, le taux d'allocation de l'AAH pour 1.000 habitants de 25 à 49 ans
variait de 8 à 48,
soit dans un rapport de 1
à 6
.
Les disparités ne s'expliquent pas seulement en raison des
différences de profil des demandeurs qui se présentent à
chaque COTOREP. C'est ainsi qu'interviennent également " la
pression de la demande " (nombre de dossiers à traiter) et la
situation locale en matière de chômage et de minima sociaux.
(a) La décentralisation a permis un effort de rattrapage en matière d'équipements pour personnes handicapées adultes ou âgées
•
Les études sur l'évolution des disparités
départementales en matière d'aide sociale qui sont
nécessairement des études lourdes nécessitant un certain
recul, ne portent que sur la période qui s'étend jusqu'à
1993, soit les dix premières années de la
décentralisation. L'analyse devra être affinée sur les
années suivantes où les dépenses d'insertion et d'aide
médicale ont pris une place plus importante dans les budgets
départementaux en raison de l'augmentation du chômage de longue
durée et de l'aggravation des phénomènes d'exclusion.
Par ailleurs, la mise en place de la PSD à partir de 1997 et la
suppression corrélative de l'attribution de l'ACTP aux personnes
âgées de plus de 60 ans a certainement des incidences sur les
disparités de prestation comme il est de règle dans les
premières années de fonctionnement d'un dispositif nouveau.
Pour autant, le débat, focalisé sur
la question des
disparités dans l'attribution de la PSD, ne doit pas occulter les
phénomènes de longue durée : la
décentralisation de l'aide sociale
sur près de dix ans n'a
pas été synonyme d'une tendance à
la dispersion
des
niveaux d'intervention des départements elle est allée de pair,
au contraire, avec une
convergence des niveaux de dépenses par
habitant
.
Comme le souligne M. Jean-Louis Sanchez, directeur de l'ODAS, "
Parmi
les diverses inquiétudes exprimées lors de la
décentralisation de l'aide sociale, l'une des plus vives portait sur
l'aggravation des inégalités en matière d'offre de
services des départements. Même si la réglementation
nationale assurait, et continue d'assurer, l'uniformisation des conditions
minimum d'accessibilité aux droits, on pouvait penser que les
disparités déjà existantes avant la
décentralisation allaient perdurer, voire s'accroître. Or,
l'analyse de l'évolution des dépenses de l'ensemble des
départements permet de constater l'existence d'une tendance plutôt
orientée vers la convergence des budgets d'action
sociale.
"
272(
*
)
La Cour des comptes, dans son rapport de 1995, relevait ainsi une tendance
à la réduction des écarts géographiques de la
dépense par habitant entre 1988 et 1993, retenant comme base de calcul
le rapport entre la dépense moyenne des départements ayant le
montant des dépenses par habitant le plus élevé d'une part
et celles des départements ayant le montant des dépenses par
habitant le plus faible d'autre part.
Cette méthode fait apparaître une réduction des
écarts départementaux importante (- 25,3 %) pour l'aide
médicale pour des raisons tenant à l'uniformisation des
règles d'attribution d'une aide aujourd'hui
" recentralisée ".
Elle fait ressortir également
une réduction significative des
écarts concernant l'aide sociale à l'enfance
(- 8,5 %)
et l'aide sociale aux personnes handicapées
, à la fois
pour les dépenses d'ACTP (- 9,9 %) et pour les aides à
l'hébergement (- 10,4 %). Seule l'aide sociale aux personnes
âgées ne fait pas apparaître de baisse d'écart, ce
qui s'explique à la fois parce que les données statistiques
n'intègrent pas l'effet du versement de l'ACTP à des personnes de
plus de 60 ans, mais aussi parce que les dépenses d'aide
ménagère ou d'hébergement en établissement ont
légèrement diminué du fait des tendances
démographiques et de l'amélioration du niveau de vie des
personnes âgées.
L'ODAS a également réalisé une étude en retenant
comme indicateur de dispersion le rapport de la dépense du
81
ème
département au
15
ème
département.
Evolution comparée des dépenses d'aide sociale et de leur dispersion 273( * )
|
Taux de
croissance
|
Taux
d'évolution
|
Tendance
|
Aide sociale aux personnes âgées |
- 3 % |
- 4 % |
La dispersion reste importante |
Aide sociale à l'enfance |
+ 24 % |
- 6 % |
Poursuite du resserrement à un rythme lent |
Allocation compensatrice |
+ 50 % |
- 19 % |
Accélération du mouvement qui date surtout de 1989 |
Hébergement des personnes handicapées |
+ 97 % |
- 12 % |
Mouvements erratiques depuis 1989, qui se poursuivent |
Ensemble de l'aide sociale |
+ 42 % |
- 3 % |
|
Sources : SESI, ODAS
Elle souligne ainsi que
c'est dans le secteur de l'hébergement des
personnes handicapées, où la croissance des dépenses a
été la plus forte, que la réduction des disparités
a été la plus significative.
Or, dans ce domaine,
"
l'augmentation des prestations repose essentiellement sur la mise en
oeuvre d'orientations politiques s'adaptant au contexte financier
".
En revanche, peuvent être considérées comme des domaines
à plus faible convergence de dépenses, l'aide sociale à
l'enfance et l'aide sociale aux personnes âgées.
L'aide sociale à l'enfance (ASE) est un secteur dont la dépense
augmente peu et pour lesquels l'éventail des dépenses se resserre
donc légèrement. L'ODAS fait néanmoins observer que les
plus fortes augmentations de dépenses concerne en majorité les
départements du sud et de l'ouest de la France dont les dépenses
étaient traditionnellement moins élevées :
l'uniformisation s'est donc effectuée sur des critères
socio-démographiques.
L'aide sociale aux personnes âgées non handicapées ne
connaît pas d'évolution forte : cela ne signifie pas qu'il
n'y ait eu aucun mouvement, mais les principales hausses et les principales
baisses concernent des départements dont la dépense était
faible. Au demeurant, le niveau d'intervention des départements
dépend beaucoup des données socio-démographiques.
• L'effort des départements a donc été
particulièrement soutenu en ce qui concerne les établissements
d'accueil pour personnes handicapées.
Le nombre de places d'accueil est passé de 39.000 en 1984 à
71.000 en 1994, puis à 92.000 au 1
er
janvier 1998
principalement sous forme de la création de foyers occupationnels et de
foyers d'hébergement.
Cet effort a permis un véritable rattrapage des retards constatés
au moment des lois de décentralisation qui s'est poursuivi dans les
années 1990 au moment où la crise s'approfondissait et où
une part plus importante des budgets locaux était absorbée par
les dépenses d'insertion.
Dix ans d'évolution des établissements médico-sociaux pour adultes handicapés
|
Nombre |
Nombre de places installées |
Evolution du nombre de places |
TE
(1)
pour
|
Evolution du CV (2) |
|||
|
1988 |
1998 |
1988 |
1998 |
|
1988 |
1998 |
1988/1998 |
Foyer d'hébergement |
935 |
1.229 |
30.915 |
39.283 |
+ 27 % |
1,04 |
1,24 |
- 19 % |
Foyers occupationnels |
345 |
882 |
13.755 |
29.731 |
+ 11,6 % |
0,46 |
0,94 |
- 22 % |
Foyers à double tarification |
nd |
187 |
nd |
6.222 |
nd |
nd |
0,20 |
nd |
*
Coefficient de variation
Champ : France métropolitaine
Date : données au 1
er
janvier 1988 et 1998
Source : DREES/Enquête ES - Population INSEE - projections
Omphale
Ces données appellent deux observations.
L'effort en matière d'équipements pour personnes
handicapées concerne non seulement les adultes handicapés
physiques et mentaux mais également des personnes âgées
proches de l'âge de 60 ans pour lesquelles l'infirmité s'est
déclarée tardivement, même si les données
statistiques ne permettent pas de mesurer la part relative des deux
catégories de population.
Les départements ont
réalisé un effort à la fois qualitatif et
quantitatif
: une première période a été
consacrée à la transformation de places vétustes
d'hospices en autant de places plus adaptées et plus coûteuses
dans les foyers d'accueil modernisé.
Cet effort s'est poursuivi pour faire face à l'afflux régulier de
nouveaux demandeurs, de l'ordre de 5.000 par an en moyenne. L'aide sociale en
matière d'hébergement des personnes handicapées adultes ou
vieillissantes constitue un poste de dépense important, ce qui conduit
à nuancer les reproches adressés aux départements
concernant leur manque de " générosité " en
matière de gestion de la PSD.
La seconde observation porte sur la
nécessité du maintien
d'une marge de manoeuvre financière des départements
. Les
investissements pour créer des places nouvelles sont d'autant plus
aisés que la section de fonctionnement du budget social est
équilibrée. A cet égard, le renchérissement du
coût des services peut amoindrir la faculté d'investissement des
budgets départementaux.
c) Les départements ont su développer leurs services sociaux
Dans son
rapport public de 1995 relatif à l'aide sociale départementale,
la Cour des comptes a reconnu
le caractère
" réussi " du partage des services et des effectifs
résultant de la mise en oeuvre de la loi du 22 juillet 1983. Des
conventions ont assuré le partage des services et des effectifs à
partir du début de l'année 1985. Trois agents sur quatre des
DDASS ont été transférés aux départements.
Aucune difficulté majeure n'est apparue en matière de personnel.
Les dépenses de personnel affectées aux différentes
missions de l'action sociale ont augmenté de 6 % par an en moyenne
entre 1984 et 1989 avant les mesures de revalorisation catégorielle
(accord " Durieux-Durafour ") pour des raisons liées à
la revalorisation du statut des travailleurs sociaux mais aussi à des
décisions volontaristes
des responsables départementaux.
C'est ainsi que les effectifs ont souvent dû être renforcés
pour assurer les tâches liées à la mission d'insertion des
titulaires du RMI.
Par ailleurs, les départements ont souhaité fréquemment
augmenter le recrutement d'agents de catégorie A
afin de
renforcer le taux d'encadrement qui était souvent inférieur
à la moyenne dans les services sociaux de l'Etat.
Il convient également de rappeler que les services de l'Etat avaient
recours à une " facilité " de gestion du
personnel : traditionnellement en effet les caisses d'allocations
familiales (CAF) et les caisses de la mutualité sociale agricole (MSA)
mettaient à disposition du service social départemental, dans la
cadre de la " polyvalence de secteur ", des services chargés
du suivi des familles. Un remboursement partiel des frais correspondants
auprès des caisses de CAF et de MSA était prévu dans le
cadre de conventions.
A partir de 1983, un
mouvement de déconventionnement
s'est
engagé : d'une part, il s'agissait pour les départements de
recouvrer une certaine autonomie dans l'organisation de leurs services ;
d'autre part, les CAF, dont les personnels étaient parfois
réticents à l'égard de l'émergence du nouveau
pouvoir local, y ont vu une occasion de se recentrer sur leur mission
familiale. Alors que 89 CAF sur 124 étaient conventionnées avec
les départements au moment de la décentralisation, seules 52
l'étaient encore en 1996 et une vingtaine d'entre elles envisageaient
alors de se retirer
274(
*
)
.
• A partir du 1
er
janvier 1987, les dépenses de
matériel et de fonctionnement, les immeubles et les équipements
ont également fait l'objet de conventions de partage.
A cet égard, il est important de rappeler, comme le fait la Cour des
comptes, qu'au moment des transferts de compétences, l'informatique
était très peu développé au sein des services
sociaux. "
L'aide sociale générale pouvait être
traitée le plus souvent manuellement, malgré un nombre important
de dossiers
".
Les départements ont donc
procédé à l'informatisation de la plupart des grandes
prestations.
• Enfin, les départements ont souvent pris l'initiative de
développer des projets d'organisation innovants autour de la notion
de
territorialisation de l'action sociale
. Traditionnellement, les
découpages administratifs dans le secteur social s'articulent autour de
catégories de population aux caractéristiques communes
(handicapés, chômeurs, ...) ou à partir de la gestion de
grandes prestations (RMI, AAH, etc.).
Le risque de cette approche " segmentée " est de manquer
d'efficacité face à la tendance à la diversification des
prestations sociales et surtout d'empêcher la concrétisation d'un
" projet " d'insertion ou de prise en charge des personnes
concernées.
Comme le rappelle M. Jean-Louis Sanchez, délégué
général de l'ODAS, les départements ont souvent
initié des démarches pour remettre en cause l'organisation
traditionnelle des services.
Dans le secteur de la
protection de l'enfance
, de nombreux
départements ont ainsi procédé à un regroupement
des services d'aide sociale à l'enfance et de prévention
maternelle et infantile. S'agissant de l'action sociale, le tiers des
départements ont procédé à des restructurations
autour du concept de " projet " (santé, prévention et
politique de l'enfance, de la mère et de la famille, personnes
âgées et handicapées, insertion).
Certains départements ont choisi une démarche de
déconcentration de l'ensemble des services au niveau de " maisons
du département " afin de regrouper des services d'action sociale
aussi bien que des services techniques et culturels.
Simultanément, deux tiers des départements ont
procédé au redécoupage des circonscriptions d'action
territoriale en s'efforçant d'être mieux adaptés aux
bassins de vie.
Ces tentatives et ébauches d'une action sociale territorialisée
plus lisible et plus proche du citoyen permettent de relativiser les reproches
émis par la Cour des comptes sur le faible nombre de schémas
départementaux des établissements sociaux et
médico-sociaux régulièrement adoptées.