C. DES TAUX DE RETOUR QUI TÉMOIGNENT D'UNE EXPATRIATION DE PLUS EN PLUS DURABLE
L'appréciation qu'il convient de porter sur
l'expatriation de
jeunes français qualifiés à l'étranger
dépend très largement du nombre des retours en France. Qu'une
partie de l'élite entrepreneuriale française acquière
à l'étranger une expérience et revienne la mettre en
oeuvre en France ne peut être que profitable pour l'économie
nationale. Lorsque ces mêmes personnes s'installent durablement voire
définitivement à l'étranger, le bilan de
l'opération et le jugement qu'elle appelle sont à
l'évidence tout autres.
Or, quelques données semblent indiquer que le nombre des retours tend
à diminuer.
Une enquête auprès de 1.000 jeunes diplômés
résidant à l'étranger a été conduite par
Taylor Nelson/SOFRES, du 5 au 15 juillet 1999, dans le cadre d'un
rapport de la Chambre de Commerce et d'Industrie de la région
Rhône-Alpes concernant les départs des jeunes
diplômés à l'étranger. 31 % de ces jeunes
diplômés affirment ne pas avoir l'intention de revenir s'installer
en France, et 80 % d'entre eux invoquent, pour expliquer leur
décision, le fait que leur carrière professionnelle est mieux
assurée à l'étranger
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*
)
.
Les chiffres fournis par les autorités américaines sur les
Français ayant obtenu un visa en raison de leur compétence
professionnelle confirment que le nombre des retours diminue.
Le nombre des visas permanents obtenus par les Français permet
d'approcher le nombre de ceux qui, ayant décidé de prolonger leur
séjour aux Etats-Unis au-delà de cinq ans, ont, en
général, l'intention de s'y installer définitivement. Or,
ce nombre a plus que doublé depuis 1975. Il est passé de 1.634 en
1975 à 3.079 en 1996.
Il en va de même des naturalisations, dont le nombre est passé de
741 en 1980 à 2.257 en 1996.
Ces données sont évidemment très partielles, mais elles
sont corroborées par les témoignages oraux recueillis par le
Groupe de Travail en Californie et à Londres.
Il est manifeste qu'en particulier pour les Français qui ont
créé leur entreprise à l'étranger, le retour en
France devient improbable. Les investissements consentis, les efforts faits
pour trouver des partenaires et se constituer une clientèle, les
habitudes de travail, la qualité de l'environnement professionnel, le
sentiment de ne pas pouvoir obtenir les mêmes résultats en France,
rendent un retour difficile même si la plupart affichent un fort
attachement à la France et à la culture française.
Ceux qui, en dépit d'une réussite professionnelle à
l'étranger, reviennent, le font souvent soit parce que leur conjoint ne
s'acclimate pas dans les pays d'accueil, en particulier aux Etats-Unis, soit
pour donner à leurs enfants une éducation française.
L'ancrage à l'étranger des créateurs d'entreprises est
-cela se comprend- d'autant plus fort qu'ils ont mieux réussi. Pour
ceux-là, la perspective d'avoir à se soumettre à la
fiscalité française du patrimoine constitue un obstacle qu'ils
hésitent à franchir. L'impôt sur la fortune, c'est
incontestable, incite au départ et freine les retours.
CHAPITRE II -
DES EXPATRIATIONS QUI TRADUISENT LE
CHOIX
D'UN ENVIRONNEMENT FAVORABLE À LA CRÉATION
ET AU
DÉVELOPPEMENT DES ENTREPRISES
Etudiants, doctorants, chercheurs, cadres d'entreprises, jeunes non qualifiés à la recherche d'un emploi et d'une meilleure connaissance de l'anglais, créateurs d'entreprises ou investisseurs ne partent ni exactement pour les mêmes raisons, ni avec les mêmes objectifs. Mais de leurs diverses motivations, il en est une qui émerge, qui l'emporte sur toutes les autres et qui mérite pour cette raison de retenir l'attention : la recherche d'un environnement ouvert à l'initiative individuelle, favorable à la création d'entreprises et permettant aux audacieux de faire fortune quand ils réussissent.