II. L'ÉTAT, SEULE COLLECTIVITÉ PUBLIQUE EN SITUATION DE DÉFICIT DURABLE
Depuis
la loi de finances pour 1999, ont été instaurées de
nouvelles normes relatives aux politiques des finances publiques.
Les pays membres de la zone euro doivent respecter un programme de
stabilité qui fixe des objectifs en terme de besoin ou de
capacité de financement des administrations publiques, qu'il s'agisse de
l'Etat, des régimes de sécurité sociale, des
collectivités locales ou des organismes divers d'administration centrale
(ODAC). Conformément au Pacte de stabilité et de croissance, les
pays membres de l'Union européenne doivent en effet, à terme,
tendre vers un équilibre de leurs finances publiques, voire être
en excédent. Cet objectif doit permettre aux Etats-membres de faire face
aux fluctuations conjoncturelles.
Les objectifs actuellement fixés par le programme 2001-2003 et transmis
aux autorités communautaires sont retracés dans le tableau
suivant.
Hypothèses et principaux résultats du programme
pluriannuel
de finances publiques 2001-2003
Croissance annuelle du PIB (2001-2003) |
2,5 % |
3,0 % |
||
|
1999 |
2000 |
2003 |
2003 |
Déficit public en point de PIB |
2,1 |
1,7 |
0,5 |
0,3 |
Dette publique en point de PIB |
60,3 |
59,4 |
57,7 |
57,2 |
Source : Ministère de l'économie
Cette évolution globale du déficit public recoupe
néanmoins des réalités contrastées que traduise le
tableau ci-dessous qui a été publié postérieurement
à la transmission du programme pluriannuel et intègre, à
ce titre, les résultats connus de l'exécution pour 1999.
Besoin/Capacité de financement des administrations publiques
(en points de PIB)
|
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
Etat |
- 3,0 |
- 2,5 |
- 2,3 |
- 2,1/- 2,2 |
ODAC (a) |
0,1 |
0,15 |
0,2 |
0,15 |
APUL (b) |
0,3 |
0,4 |
0,25 |
0,25 |
ASSO (c) |
- 0,1 |
0,2 |
0,4 |
0,6/0,5 |
TOTAL APU (d) |
- 2,7 |
- 1,8 |
- 1,5 |
- 1,1/- 1,3 |
(a)
Organismes divers d'administration centrale
(b) Administrations publiques locales
(c) Administrations de Sécurité sociale
(d) Administrations publiques
Source : Commission économique de la Nation (mars 2000)
A. LE " LAXISME " DE L'ÉTAT
L'amélioration relative de la situation de l'État reste en effet limitée : elle repose sur la conjoncture et non sur des réformes de structure.
1. La persistance d'un important déficit de fonctionnement
Le
surcroît de recettes résultant de la bonne conjoncture
économique continue de servir à financer des dépenses de
fonctionnement, particulièrement rigides, plus que des dépenses
d'investissement.
En effet, à structure constante, l'examen de la loi de finances pour
2000 montre que les dépenses du budget général qui
augmentent le plus sont les dépenses de fonctionnement (titre III). A
contrario, les dépenses d'équipement (titres V et VI) peuvent
même connaître une légère diminution. En outre, le
gouvernement a prévu des économies de constatation au titre de la
charge de la dette résultant de la diminution du taux
d'intérêt.
Une telle évolution n'est pas infléchie par les mesures contenues
dans le projet de loi de finances rectificative pour 2000. En effet les
crédits consacrés aux dépenses ordinaires civiles (hors
dépenses en atténuation de recettes) augmentent de
7,15 milliards de francs tandis que la variation nette des dépenses
civiles en capital n'est que de 2,6 milliards de francs
28(
*
)
.
Ainsi que cela avait été relevé lors de l'examen du projet
de loi de finances pour 2000, le déficit de fonctionnement de l'Etat
reste important et diminuera moins en 2000 que l'année
précédente, avec une réduction estimée à
20,5 milliards de francs contre 30,9 milliards de francs en 1999.
Evolution du déficit de fonctionnement
Lois de finances |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
Solde de fonctionnement (en milliards de francs) |
- 115 |
- 98,8 |
- 67,9 |
- 47,4 |
Evolution (n/n-1) |
|
|
|
|
- en valeur absolue (en milliards de francs) |
|
+ 16,2 |
+ 30,9 |
+ 20,5 |
- en valeur relative |
|
- 14,1 % |
- 31,4 % |
- 30,2 % |
Source : réponse au questionnaire de la
commission
des finances
Cette persistance d'un important déficit de fonctionnement signifie donc
que le gouvernement continue de dépenser plus, mais pas mieux. Il
continue en effet à emprunter pour régler les dépenses
courantes, ce qui est critiquable, et non pour financer des dépenses
d'investissement, ce qui peut, en revanche, se concevoir.
Tableau simplifié du budget en actions de
fonctionnement
et d'investissement
Section de fonctionnement
|
Dépenses |
|
|
Recettes |
||||
|
LFI 1998 |
LFI 1999 |
PLF 2000 |
|
|
LFI 1998 |
LFI 1999 |
PLF 2000 |
1. Charges à caractère général |
63,1 |
64,4 |
67,1 |
|
1.
Produits de gestion courante
|
134,7 |
161,3 |
176,1 |
2. Charges de personnel |
610,7 |
652,6 |
675,9 |
|
2. Impôts et taxes (recettes fiscales) |
1.448,2 |
1.534,9 |
1.546,6 |
3. Autres charges de gestion courante |
546,5 |
567,1 |
537,0 |
|
|
|
|
|
4. Charges financières |
248,7 |
253,3 |
251,9 |
|
3. Produits financiers |
20,3 |
22,0 |
23,6 |
5. Charges exceptionnelles |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
|
4. Produits exceptionnels |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
6. Dotations aux amortissements et provisions |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
|
5.
Reprises sur amortissements
|
0,0 |
0,0 |
0,0 |
7. Reversements sur recettes |
233,1 |
248,8 |
263,1 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Déficit section de fonctionnement |
98,8 |
67,9 |
48,6 |
Total |
1.702,0 |
1.786,1 |
1.794,9 |
|
|
1.702,0 |
1.786,1 |
1.794,9 |
Section d'investissement
|
Dépenses |
|
|
Recettes |
||||
|
LFI 1998 |
LFI 1999 |
PLF 2000 |
|
|
LFI 1998 |
LFI 1999 |
PLF 2000 |
1. Dépenses d'investissement |
159,1 |
168,6 |
166,9 |
|
Déficit section de fonctionnement |
- 98,8 |
- 67,9 |
- 48,6 |
- Equipement civil |
78,1 |
82,6 |
84,0 |
|
|
|
|
|
- Equipement militaire |
81,0 |
86,0 |
83,0 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Cessions d'immobilisations financières |
28,0 |
17,5 |
16,9 |
2. Dépenses opérations financières |
378,2 |
300,9 |
423,9 |
|
Ressources d'emprunt |
608,1 |
520,0 |
622,5 |
TOTAL |
537,3 |
469,5 |
590,9 |
|
|
537,3 |
469,5 |
590,9 |
Source : Ministère de l'Economie
2. Un déficit structurel toujours conséquent
La
persistance d'un déficit structurel important montre bien que les
charges de structure restent trop lourdes, et que l'Etat continue de vivre
" au dessus de ses moyens ".
A la différence des années précédentes,
l'évolution de la conjoncture depuis 1997 facilite le
" bouclage " du budget. Cependant le gouvernement ne semble pas en
profiter pour réduire ces charges de structure, et faire jouer au budget
un rôle contra-cyclique. Ainsi l'amélioration de 0,6 point de
PIB du déficit enregistré entre 1998 et 1999 repose pour les deux
tiers sur la conjoncture et un tiers seulement sur les réformes. De ce
fait, les prévisions du gouvernement pour 2000, qui doivent donc
être maniées avec précaution, font fort
opportunément reposer l'amélioration d'ensemble sur le
déficit structurel, ce qui n'était pas le cas des exercices
antérieurs...
La ventilation du déficit des administrations publiques depuis 1994
(en points de PIB)
|
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
Prévisions 2000 |
Déficit structurel |
- 4,6 |
- 4,0 |
- 2,6 |
- 2,2 |
- 2,0 |
- 1,8 |
- 1,5 |
Déficit conjoncturel |
- 1,1 |
- 0,9 |
- 1,5 |
-1,3 * |
- 0,9 |
- 0,5 |
- 0,5 |
*
dont 0,5 au titre de la soulte de France Telecom
Source : Rapport économique, social et financier pour 1999
En conséquence, la réduction de 0,9 point du PIB du
déficit public entre 1998 et 2000 résulte selon le gouvernement
pour une moitié, à hauteur de 0,4 point de PIB, de la diminution
de la partie conjoncturelle du déficit. Celle-ci provient du dynamisme
de l'activité qui devrait excéder, selon lui, sur ces deux
années, la croissance potentielle de l'économie.