6. Réfugiés, demandeurs d'asile et personnes déplacées dans la Communauté d'Etats indépendants, et réfugiés et personnes déplacées en Transcaucasie - Intervention de M. Jean SEITLINGER, député (UDF) (Mardi 24 juin)
L'Assemblée aborde la discussion commune de deux
rapports : le premier sur les réfugiés dans la CEI et le
second sur la situation des réfugiés en Transcaucasie.
a) Les réfugiés et les personnes déplacées en
CEI
Selon le HCR, depuis 1989, neuf millions de personnes se sont
déplacées dans la région de la Communauté des Etats
indépendants (CEI), beaucoup d'entre elles involontairement, rappelle le
Rapporteur. Il s'agit là des mouvements de population d'une ampleur et
d'une complexité sans précédent depuis la deuxième
guerre mondiale. Leur origine est diverse : la détérioration
économique, sociale et écologique, les conflits armés, le
nationalisme violent, les violations des droits de l'homme et des droits des
minorités, l'insécurité, etc. Ces déplacements ont
de très graves conséquences humanitaires et risquent
également d'influencer la stabilité et la paix dans cette
région.
L'Assemblée considère que le Conseil de l'Europe a un rôle
important à jouer tant pour garantir le respect des droits des
réfugiés, des demandeurs d'asile et des personnes
déplacées que pour contribuer à l'élimination des
causes de déplacement. Par conséquent, elle formule des
recommandations aux Etats européens de la CEI et invite les Etats
membres du Conseil de l'Europe à contribuer généreusement
au financement des programmes d'assistance pour ces pays.
b) La situation des réfugiés en Transcaucasie
La Transcaucasie compte environ un million et demi de réfugiés et
de personnes déplacées qui vivent dans des conditions
humanitaires très difficiles. L'Azerbaïdjan en recense environ
900.000, l'Arménie 300.000 et la Géorgie 300.000. Après
l'ancienne Yougoslavie, la Transcaucasie est à présent la
région européenne la plus touchée par ce problème.
Faute, de disposer de moyens suffisants pour faire face à cet afflux
humain, les trois pays du Caucase, sont toujours largement dépendants de
l'aide internationale, tant humanitaire que destinée aux projets de
développement. De même, le rapatriement des personnes
déplacées n'avance pas en raison de progrès insuffisants
dans la solution des conflits en Abkhasie et en Haut-Karabakh.
L'Assemblée souhaite attirer l'attention sur cette crise humanitaire qui
passe largement inaperçue dans le reste de l'Europe. Elle recommande au
Comité des ministres d'intensifier, en coopération avec d'autres
organisations internationales compétentes, les programmes à
l'intention de ces pays. Elle invite le Fonds de développement social du
Conseil de l'Europe à établir une "
task force
"
pour examiner ses moyens d'intervention en Transcaucasie et recommande aux
Etats caucasiens concernés de faire du rapatriement la priorité
dans leurs négociations de paix.
M. Jean SEITLINGER, député (UDF),
intervient dans le
débat en ces termes :
" Monsieur le Président, mes chers Collègues, au nom du
Groupe du parti populaire européen, je voudrais remercier la commission
des migrations, des réfugiés et de la démographie, plus
particulièrement ses deux rapporteurs, Mme Guirado et
M. Filimonov, pour s'être à nouveau penchée sur cette
question des réfugiés. En effet même si, depuis plusieurs
années, il y a un cessez-le-feu, il était important d'alerter
encore une fois notre Assemblée, et, au-delà, la
communauté internationale, sur la situation de plusieurs millions de
réfugiés dans les républiques de la CEI, plus
spécialement dans les trois pays de Transcaucasie.
En effet, il ne faudrait pas que ces réfugiés tombent dans
l'oubli. Les médias, par définition, sont focalisés sur un
seul événement. C'était hier la Yougoslavie ; c'est
aujourd'hui l'Afrique, notamment le Zaïre et le Rwanda. Il faut absolument
que nous, ici, qui comptons, en tant qu'invités spéciaux et,
prochainement, comme membres à part entière, des pays de
Transcaucasie, nous préoccupions du sort de ces réfugiés.
Vous le savez, l'aide humanitaire ne dure pas éternellement ; nous
devons en fixer les limites car il faut éviter de créer un
syndrome de dépendance. Il faut progresser vers des systèmes
globaux d'assistance aux personnes vulnérables, réfugiées
ou non. Nous devons donc continuer à marquer nos préoccupations
pour ces millions de personnes.
Je veux également insister sur le fait que nous ne devons pas faire de
procès d'intention. Le débat d'aujourd'hui n'est nullement la
remise en cause de la résolution votée le 22 avril dernier.
Je sais gré à Mme Guirado, d'avoir souligné à
deux reprises, au début et à la fin de son intervention, le
caractère spécifique, particulier de son rapport et du
présent débat.
De même, ne faisons pas de procès d'intention aux auteurs de
certains des amendements déposés. Je me suis entretenu avec
M. Gross et M. Ruffy. J'ai beaucoup travaillé avec eux en
commission et je me porte garant de leur parfaite honnêteté
intellectuelle. En la circonstance, ils ont uniquement utilisé une
terminologie géographique et non une terminologie historique ou
politique. Ne cherchons aucune arrière-pensée dans leur
démarche. Ils ont voulu seulement poser le problème des
réfugiés et insister sur leur triste sort. Par conséquent,
ne faisons ici aucun procès d'intention.
Alors, que peut faire le Conseil de l'Europe ? Nous avons
déjà plusieurs conventions sur les droits de l'homme, contre la
torture, la Convention de Genève de 1951. Au-delà, nous devrions
demander - si ce n'est déjà fait - qu'au prochain
Sommet des chefs d'Etats et de gouvernement de notre Organisation, soit
élaborée une charte pour la protection des
réfugiés. Je ne vais pas énumérer ici tout ce que
pourrait contenir une telle charte ou convention. Je ne citerai que le droit au
retour, l'interdiction du refoulement, le respect de la propriété
ou, pour le moins, l'indemnisation des biens ou des pertes subies par les
réfugiés.
J'ajoute qu'il ne faut pas confondre le problème des
réfugiés avec celui de l'immigration, deux problèmes tout
à fait différents. Je sais que certains Etats ont émis des
réserves à propos d'une telle charte.
Il s'agit en l'espèce de réfugiés et de personnes
déplacées et pas du tout de problèmes de travailleurs
migrants.
Je rappelle également que, parmi les engagements prévus à
l'article 9 au mois d'avril 1996, on demandait à la Croatie de
respecter le droit pour les réfugiés des autres
républiques de recouvrer leurs biens et d'obtenir réparation.
Enfin, pour conclure, je tiens à souligner qu'aucune garantie juridique
ne saurait dispenser de la nécessité absolue de trouver des
solutions politiques aux conflits et aux tensions.
Dans la résolution que nous avons adoptée le 22 avril dernier,
nous avons inscrit le droit au retour des réfugiés, tant ceux
d'Abkhazie que ceux du Haut-Karabakh, avec une garantie de
sécurité. La seule vraie réponse que nous pouvons apporter
est la solution politique, préalable à l'exercice réel du
droit au retour des réfugiés ".
Au terme du débat, la recommandation 1334, contenue dans le rapport
7829, amendée, est adoptée.
Puis, la recommandation 1335, contenue dans le rapport 7837, amendée,
est également adoptée.
Enfin, la directive 533 figurant dans le rapport 7837 est adoptée sans
amendement.