II. L'ENVIRONNEMENT FISCAL ET RÉGLEMENTAIRE FRANÇAIS EST HANDICAPANT

A. UN ENVIRONNEMENT FISCAL PÉNALISANT

1. Certaines particularités fiscales sont handicapantes

Certaines spécificités fiscales françaises constituent un handicap dans la concurrence opposant les opérateurs établis en France à leurs concurrents étrangers.

Il en est ainsi par exemple de la taxe sur les salaires qui n'existe pas dans les autres Etats membres. Assise sur la masse salariale dont elle peut représenter jusqu'à 13,60 % du montant total, cette taxe entraîne un prélèvement d'en moyenne 6 % du chiffre d'affaires des compagnies d'assurance. Les sociétés d'assurance ont acquitté 2,5 milliards de francs à ce titre en 1995 soit environ 10 % des rémunérations versées.

S'appliquant également aux courtiers, dont la part des salaires avoisine 70 %, elle constitue un handicap sérieux dans la concurrence qui les oppose aux opérateurs étrangers non établis en France sur le marché de la couverture des grands risques.

A l'instar de la précédente, la contribution spéciale des institutions financières est une spécificité française qui a coûté 800 millions de francs aux sociétés françaises d'assurance en 1996. Elle n'est pas déductible de l'impôt sur les sociétés.

D'autres impôts particuliers pèsent sur les sociétés d'assurance comme la taxe sur les excédents de provisions en assurances de dommages depuis 1983 (article 235 ter du CGI). Lorsqu'elle constate que la provision constituée est supérieure au sinistre effectivement enregistré, l'entreprise rapporte à son résultat courant l'excédent ainsi réalisé. Mais elle calcule l'impôt sur les sociétés qui aurait été dû au titre de l'exercice pendant lequel la provision a été déduite et applique à l'excédent d'impôt un taux de 0,75 % par mois depuis la fin de l'exercice de la constitution de la provision initiale. Le différé d'impôt sur les sociétés, en trésorerie, est ainsi couvert par une pénalisation significative, compte tenu des taux d'intérêt actuariels.

Cette taxe rapporte 100 millions de francs par an.

2. Certaines provisions obligatoires ne sont pas déductibles

L'activité d'assurance repose sur la mise en réserve, dès le versement de la prime, des coûts futurs de sinistres ou de remboursement de capitaux, auxquels l'entreprise s'expose pour le compte des assurés pendant toute la période du contrat. La constitution de provisions adéquates, en assurance de dommages comme en assurance vie, constitue une des conditions de la qualité et de la crédibilité du service rendu dans le temps. La réglementation prévoit ainsi que les entreprises d'assurance " doivent constituer, dès la souscription , les provisions mathématiques ou techniques correspondant à la couverture de tous les risques ou obligations du contrat ".

Ces obligations faites aux entreprises d'assurance ne doivent toutefois pas les conduire à déduire ou anticiper des charges sur un exercice dans un but d'optimisation fiscale. L'administration fiscale interprète à cet égard de façon relativement stricte l'article 39-1-5 du code général des impôts qui prévoit que " sont déductibles les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice ".

Elle reconnaît ainsi la déductibilité des provisions mathématiques 32( * ) dès lors que les méthodes de calcul du code des assurances sont bien respectées.

Parfois, c'est la loi fiscale elle-même qui fixe les pratiques comptables et de gestion ou qui détermine des règles forfaitaires ou des méthodes relatives à la déduction de provisions spécifiques (risques dus à des éléments naturels, risque atomique, risques de responsabilité civile résultant de la pollution...).

Toutefois, dans un certain nombre de cas, il peut exister des divergences d'interprétation entre les règles prudentielles tirées des directives européennes et mises en pratique par les entreprises et le droit fiscal. Les entreprises sont alors exposées à des redressements lorsque l'administration ne reconnaît pas des méthodes de provisionnement nouvelles ou afférentes à de nouveaux risques.

Ainsi, un certain nombre de provisions jugées indispensables par les assureurs pour une gestion prudente et constituées conformément aux règles déterminées par les autorités prudentielles ne sont pas acceptées par l'administration fiscale en franchise d'impôts. C'est notamment le cas de :

- la provision de gestion qui vise à couvrir l'ensemble des charges de gestion lorsque les frais de gestion versés par l'assuré sont insuffisants : en dépit du fait qu'il s'agisse d'une provision pour perte probable, estimée de manière détaillée et réajustée avec les paramètres du portefeuille de contrats, l'administration conteste sa déductibilité.

- la provision pour aléas financiers, instituée en 1984 pour couvrir des risques de baisse de rendement de l'actif par rapport à des engagements garantis à un taux minimum vis-à-vis de l'assuré : cette provision a été contestée par l'administration fiscale malgré le caractère réglementaire de son calcul ; depuis le 1 er juillet 1993, elle a été réformée sans pour autant que sa déductibilité soit établie de façon certaine.

- le provisionnement des risques souscrits au titre de l'assurance construction, établi à partir de 1983 de manière forfaitaire, par référence au montant des primes perçues pendant les trois premières années puis, en pourcentage de la prime pendant les dix années suivantes. La modification en 1995 de ces règles contestées par l'administration ne lui a toujours pas donné satisfaction.

3. La fiscalité pesant sur les contrats d'assurance est très élevée

Les opérations d'assurance supportent une taxe spécifique, la taxe sur les conventions d'assurance. A l'exception des contrats d'assurance sur la vie 33( * ) , des indemnités de fin de carrière et de plusieurs autres garanties dans le domaine des transports, de l'agriculture et des exportations, la taxe concerne tous les versements de l'assuré à l'assureur pour des risques situés en France.

Elle est calculée à des taux différents selon les types de garantie et d'activité des assurés. Ainsi, l'assurance automobile est taxée à 18 % dans sa composante de responsabilité civile obligatoire comme pour la couverture des dommages ; l'assurance incendie pour les particuliers est taxée à 30 % tandis que les autres parties d'un contrat multirisque de l'habitation le sont à 9 %, taux de droit commun. Les biens professionnels des industriels, commerçants et artisans relèvent quant à eux d'un taux de 7 %, de même que les pertes d'exploitation des entreprises.

Les sommes encaissées au titre des taxes sur les conventions d'assurance représentaient 26,1 milliards de francs en 1996 , soit, en moyenne, 13 % des cotisations d'assurance dommages encaissées. Le montant de cette recette pour 1999 est estimé à 26,5 milliards de francs.

Une parafiscalité variée

A la taxe sur les conventions d'assurance s'ajoute une parafiscalité variée, représentant 6 milliards de francs pour la seule contribution à l'ACOSS sur les primes d'assurance automobile et près de 3 milliards de francs pour les autres prélèvements (cf. tableau n° 1 ci-dessous). On dénombre sept catégories de prélèvements, généraux ou particuliers, sur des contrats d'assurance de dommages, à des fins de mutualisation nationale, sectorielle ou professionnelle de risques importants ou de coûts collectifs :

L'assurance maladie : la partie des primes relative à l'assurance obligatoire de responsabilité civile, en matière automobile, donne lieu, depuis 1967, à un prélèvement au profit du régime général d'assurance maladie de la sécurité sociale (versement à l'agence centrale des organismes de sécurité sociale -ACOSS), dont le taux est passé de 3 % à 15 % depuis sa création et dont le produit global dépasse le montant des coûts supportés par l'assurance maladie du fait des accidents automobiles : la couverture obligatoire de la responsabilité fournit une assiette au financement de la sécurité sociale.

L'indemnisation des dommages corporels et matériels des victimes d'accidents de chasse et d'accidents de la circulation causés par un inconnu, un non-assuré ou un insolvable : alors même que l'obligation d'assurance n'existait pas encore, le progrès qu'a constitué, pour les victimes, la création, en 1951, d'un fonds de garantie contre les accidents de circulation et de chasse, en cas d'accident causé par un auteur inconnu, non assuré ou insolvable, est financé par plusieurs types de ressources, dont une contribution des entreprises d'assurances, à hauteur de 10 % des dépenses du fonds, dont une taxe de 0,10 F par personne garantie pour les chasseurs, mais aussi par une taxe additionnelle de 0,1 %, assise sur la partie responsabilité civile des contrats automobile. Cette taxe a été récemment réduite de 1,9 % à 0,1 %, soit un niveau symbolique compte tenu des provisions acquises par le fonds, qui dispose de la personnalité et se comporte comme un assureur. De tels mécanismes existent aussi à l'étranger. Le champ de l'indemnisation des accidents automobile a été très sensiblement accru en France, par la loi du 5 juillet 1985, dite "loi Badinter".

L'indemnisation des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions : l'indemnisation des victimes du terrorisme, mais aussi de toute infraction pénale non indemnisée à un autre titre, est financée par une contribution obligatoire sur les contrats d'assurance de biens, dont le montant est passé de 1 F en 1991 à 15 F en 1996. Le fonds reçoit ainsi environ 0,9 milliards de francs de la part des assurés.

Le fonds de prévention des risques majeurs naturels , institué en 1995 (article L. 431-14 du Code des assurances) pour l'expropriation et la sauvegarde des populations habitant des zones à risques : le fonds, qui est géré par la caisse centrale de réassurance (CCR), dispose d'un prélèvement, à la charge des entreprises d'assurance, de 2,5 % sur les cotisations additionnelles finançant les catastrophes naturelles.

Le fonds national de garantie des calamités agricoles , normalement inassurables, est couvert par des contributions calculées aux taux de 5 %, 7 % ou 15 % sur les contrats d'assurance de dommages en agriculture (dommages aux cultures, aux récoles, aux bâtiments et au cheptel ainsi que sur les véhicules utilitaires agricoles), qui s'ajoutent aux dotations de l'Etat, versées à la CCR.

En matière d' assurance construction , a été mis au point un mécanisme destiné à prendre en charge les sinistres des chantiers antérieurs à 1983, date de l'institution d'une assurance par capitalisation pour les chantiers futurs : les primes d'assurance des entreprises et des maîtres d'ouvrage (dommages à la construction et responsabilité décennale) supportent une contribution de 8,5 % (artisans) ou 25,5 % (autres assurés) pour équilibrer les sinistres des travaux passés ; en outre une contribution additionnelle de 0,4 % du chiffre d'affaires des opérateurs du bâtiment a été recouvrée par les entreprises d'assurances, garantissant la responsabilité décennale de leurs clients, pour la période 1991-1996 (art. A 1 635 bis AB et AC du Code général des impôts). Dans un tel cas, les entreprises d'assurances, considérées par l'administration fiscale comme solidairement responsables du paiement des taxes, avaient un rôle de pur recouvrement d'un impôt dont elles ne maîtrisaient pas l'assiette. Cette contribution additionnelle de 0,4 % n'a pas été prorogée en 1997.

Le fonds commun des accidents du travail agricole est alimenté, d'une part, par une contribution des exploitants (65 %) sur les cotisations d'assurances légales d'accident du travail agricole et, d'autre part, par une contribution des membres non salariés des professions agricoles (exploitants et leurs familles), perçue sur les cotisations d'assurance obligatoire acquittées au titre des contrats d'assurance contre les accidents de la vie privée, les accidents du travail et les maladies professionnelles. Le taux a été porté de 3,5 % à 7 %, à compter du 1 er janvier 1996, puis à 10 % à compter du 1 er janvier 1997.

Si l'on ajoute à cette somme le montant des recettes encaissées au titre des diverses mesures parafiscales recensées dans l'encadré ci-dessus, le total de prélèvements pesant sur l'assurance de dommages s'élève à 35,8 milliards de francs en 1996 , hors prélèvements indirects. Cela représente 18 % des 198 milliards de francs de primes d'assurance de dommages collectées en 1996.

Cette charge est supportée en réalité de manière indistincte par les entreprises d'assurances et par les assurés. Elle n'est pas spécifique à la France mais reste la plus élevée d'Europe comme le montre le tableau ci-après 34( * ) , constituant à cet égard un frein à la couverture des risques localisés en France.

Fiscalité et parafiscalité comparées dans les principaux pays de l'Union européenne en 1996

Chiffres en % ou en unités monétaires nationales T = taxes P = parafiscalité

Risques assurés

Incendie

et risques industriels

Santé

Automobile

Transport

Type d'impôt

 
 
 
 

RC

Dommages

 
 

T

P

T

P

T

P

T

P

T

P

Allemagne 8

10,00

8,00

0,00

0,00

15,00

0,00

15,00

0,00

15,00

0,00

Belgique

9,25

6,50

9,25

10,00

9,25

17,75

9,25

17,50

9,25

0,00

Espagne 7

0,00

5,50

0,00

0,50

0,00

3,50

0,00

0,50

0,00

0,50

Italie 6

21,25

0,10

2,50

0,00

12,50

8,10

12,50

8,10

7,50

0,00

Pays-Bas

7,00

0,00

0,00

0,00

7,00

0,00

7,00

0,00

7,00

0,00

Royaume-Uni 5

2,50

35 GBP

2,50

0,00

2,50

0,00

2,50

0,00

0,00

0,00

France 4

7-30 1 2

15 F

7,00 3

0,00

18,00

15,50

18,00 2

15 F

0,00

15 F

1. Tarif normal de 30 % : pour les risques professionnels et les pertes d'exportation : 7 %.

2. La loi du 02 février 1995 a institué, en outre, un prélèvement de 2,50 % assis sur les primes ou cotisations additionnelles relatives à la garantie " catastrophes naturelles " au profit du fonds de prévention et risques majeurs.

3. Le taux réduit de 7 % (au lieu de 9 %) s'applique uniquement lorsque la garantie prévoit le versement d'indemnités ou le remboursement de frais qui, par nature, entrent dans le champ d'application de la sécurité sociale.

4. L'assurance construction (RC, dommages) supporte des taxes de 9 % et une parafiscalité variable de 8,50 % à 25,50 % à laquelle s'ajoute une contribution de 0,40 % sur le chiffre d'affaires réalisé en France par les assujettis pour la période du 01 janvier 1991 au 31 décembre 1996. Dans les autres pays, le taux de droit commun de taxe s'applique généralement (Allemagne : 15 ; Belgique : 9,25 ; Espagne : 0,50 ; Royaume-Uni : 2,50  puis 4,0 ; Italie : 21,25 ; Pays-Bas : 7).

5. 4 % au lieu de 2,50 % à partir du 1 er avril 1997.

6. Une parafiscalité additionnelle de 0,10 % s'applique sur les cotisations des contrats contre les risques incendie, RC générale, auto " risques divers " et vol, pour alimenter un fonds de solidarité pour les victimes d'extorsion.

7. Des taxes parafiscales additionnelles s'appliquent avec des taux variables, faibles ou des montants fixés aux assurances de dommages aux biens automobile, assurances de personnes et sont destinées au fonds pour l'assurance des risques extraordinaires.

8. Par ailleurs, la taxe sur l'assurance multirisque habitation des particuliers est fixée à 14 % à laquelle s'ajoute une parafiscalité de 2 %.

Source : Encyclopédie de l'assurance, Jean-Pascal Beaufret, La fiscalité de l'assurance

Ce tableau montre clairement que la France est le pays qui taxe le plus lourdement les contrats d'assurance, devant l'Allemagne, l'Italie, la Belgique, qui la suivent d'assez près, et loin devant la Grande-Bretagne, dont le niveau de fiscalité contribue probablement au développement de son marché de l'assurance. Ainsi, le véhicule assuré en France paiera 335 F pour 1 000 F de cotisation obligatoire de responsabilité civile contre 25 F au Royaume-Uni, 35 F en Espagne, 150 F en Allemagne et 206 F en Italie.

Or, comme le fait très opportunément remarquer le Commissariat Général du Plan, la charge fiscale globale qui pèse sur les produits d'assurance est un élément du prix de revient qui peut exercer un effet de détournement du flux de demande adressée aux produits français, dans le cadre de la libre prestation de services.

En effet, bien que ce soit le lieu de localisation du risque qui emporte la taxation, il est bien difficile en pratique de vérifier que les contrats d'assurance passés auprès de compagnies étrangères pour des risques théoriquement situés en France acquittent bien les taxes françaises. En conséquence, il n'est pas exclu que le gouvernement français se prive d'une partie de sa substance imposable en maintenant des taux de taxation sur les contrats d'assurance qui incitent à la délocalisation des risques.

Or, malgré un effort d'allégement de la fiscalité des contrats d'assurances de dommages intervenu entre 1989 et 1993 dans un souci d'harmonisation européenne et de réduction des taxes indirectes, la fiscalité et la parafiscalité des contrats d'assurance se sont encore alourdies récemment afin de contribuer au financement d'actions publiques de couverture de risques collectifs. Il en résulte un "coin" fiscal non négligeable qui n'est probablement pas sans lien avec le tassement du marché de l'assurance dommages en France.

En effet, comme l'observe Jean-Pascal Beaufret, aujourd'hui directeur général des impôts, " cette situation fournit probablement une explication partielle au niveau, relativement faible, des primes d'assurances de dommages par habitant, en France, au regard du niveau de richesse économique 35( * ) . "

4. L'instabilité du régime fiscal de l'assurance vie est source de délocalisation de l'épargne

Il est incontestable que l'assurance vie a bénéficié jusqu'à présent de conditions fiscales fort avantageuses. En effet, non seulement les revenus générés par un tel contrat étaient exonérés au bout de huit ans et le capital transmis sans droits de succession, mais en outre le versement des primes octroyait le droit d'en déduire un quart sur le montant même de l'impôt sur le revenu. Un tel régime fiscal a fortement contribué au succès de leur placement.

Toutefois, après un grignotage progressif de ces avantages (voir encadré ci-dessous), la loi de finances pour 1998 a mis fin à l'exonération générale dont bénéficiaient les produits des bons de capitalisation et contrats d'assurance vie. Une telle mesure a déstabilisé l'équilibre de ces placements au point de tarir brutalement les flux de primes versées depuis le début de l'année 1998.

L'article 24 du projet de loi de finances pour 1999 entaille à nouveau le régime fiscal de faveur de l'assurance vie en remettant en cause l'exonération de droits de mutation à titre gratuit dont bénéficient les contrats. Il soumet en effet les sommes reçues par chaque bénéficiaire d'une assurance vie à raison du décès de l'assuré à un prélèvement de 20 % sur la part des sommes excédant un million de francs. Encore convient-il de préciser que cette mesure est le résultat d'une amodiation considérable apportée par l'Assemblée nationale.

En effet, initialement, le durcissement du régime était encore plus sévère puisque le projet de loi prévoyait une inclusion des contrats dans le patrimoine soumis à droit de mutation des assurés décédés, lorsque la somme des valeurs de rachat des contrats rachetables et des primes versées sur les contrats non rachetables au jour de décès de l'assuré excède un million de francs ou 30 % de cette somme augmentée de l'actif net successoral et des donations de moins de dix ans. En outre, il était prévu que cette disposition s'appliquerait aux successions ouvertes à la suite du décès d'assurés survenus à compter de 1999 quelle que soit la date à laquelle les contrats d'assurance vie auraient été signés.

Modifications du régime fiscal de l'assurance vie

Régime fiscal des produits des contrats d'assurance vie

Depuis 1996, plusieurs dispositions sont venues écorner l'exonération générale d'impôt dont bénéficiaient les produits des bons de capitalisation et contrats d'assurance vie d'une durée minimum de huit ans :

Ces produits ont tout d'abord été assujettis à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) au taux de 0,5 % lors de l'institution de cet impôt en février 1996. Echappent en revanche à la CRDS les revenus des livrets A, des livrets d'épargne populaire et des Codevi.

Puis, lors de la réforme de la contribution sociale généralisée (CSG) opérée par la loi de financement de la sécurité sociale du 27 décembre 1996, ils ont été assujettis à cet impôt au taux de 3,4 %. Les produits attachés aux bons de capitalisation et aux contrats d'assurance vie seront en particulier imposés en couru, c'est-à-dire annuellement, à partir de 1997, ou lors du dénouement pour les contrats en unités de compte. Seuls les livrets A, les livrets d'épargne populaire et les Codevi restent totalement exonérés.

Le prélèvement total sur les produits d'épargne-assurance, précompté par les assureurs, atteint donc 3,9 % du total des intérêts versés.

Cette réforme était importante puisqu'elle rendait les revenus de l'épargne immobilisée en assurance vie sensibles à toute augmentation de la CSG, ce qui n'allait pas tarder à se produire.

• En effet, la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 a porté le taux de la CSG à 7,5 % et le total des prélèvements sociaux à 10 %.

Enfin, la loi de finances pour 1998 a mis fin à l'exonération des produits des contrats d'assurance vie pour les contrats souscrits à compter du 1 er janvier 1998 et au delà d'un plafond de 30.000 francs pour un célibataire et 60.000 francs pour un couple marié. Les contribuables peuvent toutefois continuer à opter pour un prélèvement libératoire au taux spécifique de 7,5 % (hors prélèvements sociaux).

La loi a cependant prévu une exception pour les contrats dits "DSK" placés à 50 % au moins en actions françaises.

Les réductions d'impôt sur le revenu

• Alors qu'elles permettaient précédemment une déduction du revenu global, les primes d'assurance vie et les garanties de rente viagère d'une durée minimale de 6 ans ont donné droit, de 1984 à 1996, à une réduction d'impôt, égale à 25 % de la fraction de la cotisation représentative de l'opération d'épargne, plafonnée à 4.000 francs plus 1.000 francs par enfant à charge. L'avantage maximum était donc de 1.000 francs plus 250 francs par enfant.

• La loi de finances pour 1996 a supprimé cet avantage pour les nouveaux contrats conclu à compter du 20 septembre 1995 ainsi que pour les primes relatives à des contrats anciens à versements libres. Elle a maintenu la réduction d'impôt pour les contrats anciens à primes périodiques jusqu'à la fin de ces contrats et pour tous les contrats souscrits par des contribuables dont la cotisation d'impôt sur le revenu et inférieure ou égale à 7.000 francs.

• La loi de finances pour 1997 a complété le dispositif en supprimant totalement les réductions d'impôt, même pour les souscripteurs acquittant moins de 7.000 francs d'impôt sur le revenu. Une réduction d'impôt est, cependant, maintenue pour les contrats de " rente-survie " et " d'épargne handicap ", qui garantissent aux bénéficiaires infirmes le versement d'un capital ou d'une rente viagère.

Il ne faut pas sous-estimer le risque de délocalisation de l'épargne que ces mesures induisent. En effet, le Luxembourg vient récemment de faire état d'un taux de croissance de son assurance vie de 56 % dû, pour l'essentiel, au " captage " d'une épargne limitrophe.

Or, dans l'assurance vie, les assureurs traditionnels subissent de plein fouet la concurrence des bancassureurs. Ils ont fait face jusqu'à présent en puisant dans leurs réserves de plus-values latentes et grâce à des portefeuilles de contrats moins bien servis, notamment en participation aux bénéfices. Aujourd'hui ces ressources se sont taries. De plus, en raison de l'allongement de la durée de la vie, il apparaît rétrospectivement que les primes de certains contrats à taux garantis parfois élevés ont été sous-tarifées.

Dans le contexte actuel de décrue des taux d'intérêt et de grande volatilité des marchés financiers qui pèse sur les résultats financiers des assureurs, tout nouveau choc de fiscalité sur l'assurance vie pourrait donc encourager les " fuites " de notre épargne vers l'étranger et être source de difficultés graves pour les assureurs si des retraits massifs devaient intervenir.

Une telle hypothèse est d'autant plus problématique qu'outre une fiscalité pénalisante, les assureurs français sont soumis à des règles de gestion plus restrictives que certains de leurs compétiteurs étrangers.

Page mise à jour le

Partager cette page