ANNEXES
Contributions de membres
du groupe de
travail
Liste des personnes
auditionnées
A. CONTRIBUTIONS DE MEMBRES DU GROUPE DE TRAVAIL
CONTRIBUTIONS DE MEMBRES
DU GROUPE DE TRAVAIL
Contribution de M. Pierre Laffitte
Audiovisuel et internet large bande
La stratégique percée des
" constellations et satellites "
Le
rapport du groupe de travail constitue une analyse de la situation actuelle du
secteur audiovisuel en tenant largement compte des évolutions
esquissées à la suite des deux éléments
majeurs : la numérisation et l'espace.
La numérisation
pour l'audiovisuel est récente. Elle
résulte des prodigieux progrès de l'industrie informatique
mondiale. La diffusion audiovisuelle numérique permet d'augmenter
l'efficacité des bandes de fréquences. La rareté de cette
ressource naturelle essentielle diminue.
L'espace.
L'utilisation des satellites géostationnaires dont le
caractère transfrontalier permet de renforcer la liberté de choix
des utilisateurs de programmes. La diminution du coût des infrastructures
permettant une large diffusion est certes compensée par le coût
d'accès (parabole) mais le choix d'un programme à
l'intérieur de bouquets est meilleur.
L'objet du rapport bien structuré est de faciliter aux décideurs
politiques et économiques la compréhension des évolutions
en cours. Elle doit permettre de faciliter les réflexions sur les
stratégies et les choix politiques nécessaires.
Ceci exposé, les aspects
internationalisation
et
convergence
des technologies liées aux autoroutes de l'information
méritent, à mon avis, une réflexion plus complète
car nous visons non pas seulement la situation actuelle mais un futur proche
pour informer pleinement le Sénat, le gouvernement et l'opinion publique.
Internet large bande et diffusion audiovisuelle convergent déjà.
Les réseaux grands débits, fibres optiques et câbles au sol
et l'emploi des satellites géostationnaires et bientôt des futures
constellations de satellites à orbite basse.
D'ores et déjà
, il faut souligner quelques faits
majeurs :
- le terminal d'accès numérique de Canal + qui permet à
tout possesseur de téléviseur - c'est-à-dire en France
l'immense majorité - d'accéder à internet.
L'exemple du réseau NETTUNO consortium de professeurs et
d'université de qualité d'Italie, qui diffuse par la
télévision italienne, la RAI, les enseignements de haut niveau.
- L'exemple de Canal pro, qui à l'instar de BBC Select, diffuse de la
formation professionnelle pour les médecins.
- Les projets de type MEDSAT qui au niveau international européen et
circomméditerranéen développeront des
téléservices interactifs pour la téléformation
initiale et professionnelle, télémédecine,
téléservices culturels et touristiques, accès à la
science, mise en commun de potentiels universitaires et de recherche, etc.
- Les réalisations expérimentales de concerts avec solistes
à distance reliés par réseaux ATM (une
démonstration a encore été faite entre l'IRCAM Paris et
Sophia Antipolis il y a moins d'un mois), etc.
Dans le futur proche
, les constellations de satellites en orbite basse
vont rendre pratiques, aisés et généralisés au
monde entier bien de nouveaux téléservices de caractère
audiovisuel personnalisés. C'est une nouvelle révolution
silencieuse dont on peut regretter que trop peu de décideurs se rendent
compte, du moins en Europe.
Les projets tels que
Teledesic
(Bill Gates, Boeing, Motorola, etc.
soutenus fortement par les contrats militaires du Pentagone) et
Skybridge
(Alcatel et ses partenaires européens et japonais) ne
sont pas encore opérationnels. Mais c'est une affaire de quelques
années. Ce sont actuellement les deux seuls projets faisant suite aux
projets purement Télécom, IRIDIUM et GLOBAL STAR.
Le déploiement de ces constellations correspond à des
conséquences pratiques, culturelles, sociales et économiques d'un
ordre de grandeur très supérieur à celui de la seule
télévision traditionnelle.
Dans vingt à trente ans, la communication au sens large correspondra
à près de 50 % du Produit Intérieur Brut mondial
d'après les experts. Certains s'étonneront de ce chiffre.
Précisons qu'il comporte la publicité et le marketing national et
international pour tous les domaines économiques. Aujourd'hui
déjà, l'industrie pharmaceutique américaine finance les
téléservices médicaux diffusés par satellites. Dans
tout le Moyen-Orient les milieux médicaux ne connaissent plus que les
médicaments américains. On mesure les conséquences d'une
généralisation pour l'industrie pharmaceutique européenne,
et pourtant ces téléservices ne sont pas encore interactifs.
Grâce aux trains de satellites tout sera possible dans le monde entier et
partout ! Le commerce électronique mondial sera concerné. Et
aussi au-delà du commerce, tous les domaines d'application et
particulièrement le tourisme, la santé, la culture et donc
l'identité culturelle.
Cette importance économique, sociale et culturelle montre bien pourquoi
le développement des réseaux et constellations de satellites
à orbite basse constitue un domaine stratégique majeur. Il
concerne les pouvoirs publics nationaux et européens.
Le groupe américain, centré sur Teledesic est, pour sa part,
fortement soutenu financièrement par les contrats du pentagone,
notamment en ce qui concerne l'essentiel des dépenses, constitué
par du logiciel. Sur le plan diplomatique, il est soutenu par le gouvernement
fédéral.
La difficulté pour le groupe européen Skybridge d'obtenir les
bandes de fréquence qui lui étaient nécessaires lors des
conférences ad hoc de Genève confirment cette affirmation.
Le groupe Innovation et Entreprise a tenu, à mon initiative, un colloque
au Sénat dont le compte rendu est annexé. Un colloque sur le
même sujet sera organisé au niveau international à Sophia
Antipolis fin 1999.
Il me paraît important que le groupe d'études de la commission des
affaires culturelles puisse poursuivre d'ici quelque temps sa réflexion,
notamment sur ces thèmes, en vue d'une
action politique forte au
niveau français et européen.
Gouverner c'est prévoir.
Contribution de Mme Danièle Pourtaud
En
complément des questions traitées par le présent rapport,
je souhaite attirer l'attention des parlementaires sur deux grands enjeux : la
circulation des oeuvres et le développement des
télévisions locales.
Face à l'explosion des techniques de diffusion, la véritable
richesse sera dans les prochaines années les programmes, d'où la
nécessité de renforcer l'industrie de programmes français.
Quant aux télévisions locales, elles contribuent certainement
à resserrer le lien entre les citoyens et participent ainsi au
renouvellement de notre démocratie.
I - La circulation des oeuvres
Au plan international et plus particulièrement européen, avec
notamment l'avènement du numérique, comment assurer une place
accrue à nos programmes et faire en sorte que la France puisse proposer
des catalogues de qualité et concurrentiels ? La concrétisation
de cet objectif relève de l'urgence à l'heure où
l'exception culturelle est sans cesse remise en cause.
L'objectif majeur qui freine la circulation des oeuvres est la situation
dominante des diffuseurs dans la chaîne production-distribution-diffusion.
Limiter les investissements des chaînes dans la production à
l'achat de droits d'antenne.
D'une part, l'obligation légale qui impose aux chaînes d'investir
dans la production d'oeuvres audiovisuelles leur donne un droit de veto sur
l'exploitation future. Ainsi, la fluidité des programmes est compromise
car les parts co-producteurs interdisent de fait, par exemple, qu'un programme
co-produit par TF1 puisse être ultérieurement cédé
à une chaîne d'un bouquet concurrent. Il serait donc souhaitable
de limiter les investissements des chaînes dans la production à
l'acquisition de droits d'antenne (par exemple : Canal + pour le cinéma).
Réserver les investissements des chaînes aux coproductions
européennes et internationales.
En outre, puisque les chaînes ont la capacité économique
d'affronter les exigences et les risques financiers du marché
international, ne faut-il pas réserver leur investissement obligatoire
à la production liée, afin de favoriser les coproductions
européennes et internationales ?
Toutes ces mesures, qui aboutissent à renforcer la séparation
diffuseur/producteur, permettraient sans doute de revaloriser le rôle du
producteur indépendant dans tout le processus qui va de la
création à la diffusion.
Soutenir les industries de distribution de programmes.
D'autre part, les diffuseurs se sont davantage investis depuis quelques
années dans la distribution. Or, par définition, les diffuseurs
s'adressent à un marché national localisé et
déterminé. De plus, la distribution assurée par les
chaînes est la condition qui leur permet d'échanger en Europe des
droits de distribution pour des achats à moindre prix, plutôt que
de co-produire davantage. Il faut donc favoriser l'émergence des
distributeurs indépendants, qui de la même manière que les
producteurs, ont un intérêt financier à ce que les oeuvres
circulent davantage. A cet égard, plusieurs solutions sont possibles :
encourager l'accès des distributeurs à des prêts
contre-garantis par l'IFCIC (Institut pour le financement du cinéma et
des industries culturelles) afin de proposer aux distributeurs un partage de
risques ; limiter quantitativement les droits à la distribution des
chaînes...
II - Le développement des télévisions locales
Au plan national, comment garantir une place aux télévisions
locales et favoriser ainsi la liberté d'expression, moteur essentiel de
notre démocratie ? Quel avenir pour les télévisions
locales ?
En France, quelques expériences de décrochages locaux et de
télévisions locales de proximité.
A la différence de nombreux états européens, la France, en
matière de télévisions locales, n'est qu'en phase
d'expérimentation. Il existe actuellement en France 140
expériences de télévisions locales, que l'on peut classer
en deux catégories. Il faut distinguer d'une part les décrochages
(Il y a 43 décrochages locaux) et d'autre part les
télévisions locales de proximité : 13 chaînes sont
diffusées durablement par voie hertzienne (5 en métropole et 8 en
outremer), 44 sont des télévisions temporaires, auxquelles
s'ajoutent environ 70 canaux locaux du câble. Les
télévisions locales de proximité sont soit
gérées par une société commerciale, soit d'essence
associative.
Les programmes locaux plébiscités par le public.
Toutes ces expériences sont de vrais succès auprès du
public. Par exemple, les décrochages locaux de M6 (10 par jour de 7
minutes autorisés par le CSA) réalisent de très bonnes
audiences auprès d'un public jeune. France 3 (qui dispose de 13
directions régionales, soit 24 éditions régionales qui
représentent 10 000 heures de programmes par an, et une vingtaine
d'éditions locales) améliore son audimat de 14 points dans les
décrochages. Et, la plupart des TV locales de proximité
remportent des succès d'audience. Sous toutes les formes, elles assument
ainsi une sorte de " service public de proximité ", qui permet
un meilleur exercice local de la citoyenneté, favorise l'apparition de
nouveaux acteurs, et enrichit le paysage audiovisuel.
Le problème crucial est actuellement celui de leur financement.
Aucune des TV locales ne sont rentables ; et surtout, aucune n'est susceptible
de devenir bénéficiaire, ni même d'équilibrer ses
comptes dans l'état actuel des choses. Les TV locales hertziennes sont
notamment en situation très précaire car elles nécessitent
un budget d'au moins 10 millions de francs. Actuellement, les financements
sont très diversifiés, selon le support et même au sein
d'un même support : fonds propres, collectivités territoriales,
actionnaires privés, publicités locales et publicités
régionales... Un projet de créer 20 chaînes locales en
agglomération a montré que pour les faire vivre, il faut
400 millions de francs par an. Or, les subventions et la publicité
ne sont pas susceptibles de produire une telle somme aujourd'hui.
Plusieurs formes de financements peuvent être envisagées :
l'autorisation de la publicité pour les grandes surfaces. Cette
autorisation risque néanmoins de déséquilibrer fortement
les autres médias, en particulier la Presse Quotidienne Régionale
et les radios généralistes.
• les subventions des collectivités locales. Une
réflexion est cependant nécessaire afin de garantir
l'indépendance éditoriale.
• Un fonds complémentaire de financement qui pourrait
être inspiré de ceux qui existent déjà pour aider au
développement des nouveaux médias.
Des fréquences et un fonds de soutien national pour les
télévisions locales de nature associative.
On assiste actuellement à l'émergence de
télévisions locales associatives, dont l'existence, qu'il
s'agisse des autorisations de fréquence ou des financements, doit faire
l'objet d'une réflexion approfondie. En la matière, le CSA donne
des autorisations provisoires. Par exemple, Ondes Sans Frontières (OSF),
télévision locale située dans le XXe arrondissement
à Paris, a bénéficié de deux autorisations
temporaires successives.
L'intérêt pour les démocraties vivantes de ces
télévisions associatives en prise avec les structures de
quartier, doit nous aider à réfléchir sur la
manière de garantir leur existence. Il est sans doute nécessaire
d'envisager de leur réserver des fréquences hertziennes ou des
canaux sur les réseaux câblés, en particulier dans les
grandes agglomérations.
Leur nature associative nécessitera certainement un financement public
important, dont le modèle pourrait être calqué sur celui
des radios associatives. Une opportunité pourrait être
trouvée à travers la taxation des recettes publicitaires
supplémentaires que percevraient les chaînes privées,
lorsque la loi sur le financement du secteur public aura produit ses effets.