EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 21 octobre 1998 sous la
présidence
de M. Adrien Gouteyron, président, la commission des affaires
culturelles a procédé, sur le rapport de M. Jean-Paul Hugot,
à l'examen des conclusions du groupe de travail sur la communication
audiovisuelle.
Un débat a suivi la présentation du rapport.
M. Pierre Laffitte
a relevé la nécessité, dans la
communication audiovisuelle, d'un état des lieux élaboré
du point de vue des responsables politiques, et a estimé qu'il
n'existait pas à cet égard de corpus aussi précis que le
document élaboré par le groupe de travail. Il a proposé de
poursuivre ce travail dans un souci plus prospectif, en tenant compte en
particulier de la percée de la diffusion satellitaire, de la prochaine
arrivée de l'internet à large bande, et d'innovations telles que
le terminal numérique de Canal +, qui permet l'accès à
internet sur le poste de télévision, ou de services innovants
comme Canal Pro, qui proposent des programmes de formation interactifs
extrêmement performants.
Il a relevé que les nouveaux services représentaient des chiffres
d'affaires potentiels cent fois plus importants que ceux de l'audiovisuel
classique, et donc un enjeu dont la compétition actuelle entre le projet
satellitaire Teledesic, développé aux États-Unis avec
l'appui massif du Pentagone, et le projet Skybridge, conduit par Alcatel sans
l'aide de l'Etat, permet de prendre la mesure.
Le
président Adrien Gouteyron
a estimé qu'il appartenait
effectivement à la commission de prendre la mesure de ces enjeux et de
donner à ses travaux une dimension prospective.
M. Franck Sérusclat
a demandé des précisions sur
l'analyse du rôle du législateur proposée par le rapport.
Mme Danièle Pourtaud
a estimé que le rapport du groupe de
travail constituait un bon outil pour amorcer le débat que susciteront
les prochains projets de loi sur la communication audiovisuelle, et a
demandé s'il abordait le dossier des télévisions locales
et celui de la circulation des programmes audiovisuels.
Avant de répondre à ces questions et observations,
M.
Jean-Paul Hugot
a souligné qu'elles mettaient en évidence la
nécessité pour la commission de conserver une " capacité
de veille " à l'égard des évolutions de la communication
audiovisuelle et de poursuivre la réflexion amorcée par le groupe
de travail.
En ce qui concerne le rôle du législateur, il a indiqué que
le rapport du groupe de travail avait dressé un état des lieux en
évitant de proposer des solutions aux problèmes
évoqués. Il s'agissait uniquement d'élaborer des analyses
et de dessiner des pistes afin de permettre au législateur de conserver
un recul à l'égard des informations que lui présentent les
acteurs de la communication audiovisuelle, comme à l'égard de la
logique spécifique du progrès technique. La mission du
législateur, en effet, n'est pas de cautionner ou d'enregistrer le
progrès mais de le diriger.
A titre d'exemple, il a estimé qu'en ce qui concerne le statut juridique
des entreprises de la communication audiovisuelle, le législateur devait
élaborer un cadre juridique inscrivant le développement des
entreprises dans la logique des valeurs qui correspondent à ses
préoccupations propres.
En ce qui concerne par ailleurs le rôle d'acteur de l'Etat, il est
souhaitable que le législateur se penche sur la frontière de plus
en plus artificielle entre l'audiovisuel extérieur et l'audiovisuel
intérieur. Le législateur doit aussi prendre position sur
l'évolution et le rôle du secteur public face au
développement de la télévision payante. Il s'agit de
savoir s'il y a nécessité de garantir la pérennité
d'un certain nombre d'intérêts dont l'audiovisuel public est
porteur, ou si l'Etat doit être cantonné dans un rôle de
réglementation. Il importe à cet égard de définir
les conditions de légitimité du secteur public.
Enfin, la mise en place de l'organe de régulation de la communication
audiovisuelle s'est effectuée de façon pragmatique, sans
véritable réflexion sur la façon dont la régulation
s'articule avec nos traditions juridiques. Il importera d'examiner de ce point
de vue la portée des dispositions institutionnelles que comportera le
projet de loi annoncé.
M. Pierre Laffitte
a rappelé que dans le secteur des
télécommunications, des obligations de service public
étaient imposées aux opérateurs privés en
dépit de la déréglementation. Il est essentiel de
réfléchir à la façon dont il serait possible de
limiter, dans la communication audiovisuelle, une dérive libérale
supprimant toute règle déontologique et empêchant
l'affirmation des identités culturelles. Il est important de mener une
réflexion prospective à ce sujet.
Mme Danièle Pourtaud
a estimé que cette
préoccupation légitimait la poursuite de la politique des quotas
de production, notant que les programmes sont les principaux vecteurs de
l'avenir. Elle a jugé que l'élaboration éventuelle d'un
socle minimum de service universel applicable à la fois à la
communication audiovisuelle et aux télécommunications ferait
ressortir l'opposition entre la logique du libéralisme et celle de
l'économie encadrée.
Le
président Adrien Gouteyron
a alors rappelé que le
rapport du groupe de travail proposait une analyse des problèmes
posés, mais ne préjugeait pas des choix qui pourraient être
défendus par les uns ou par les autres au moment du débat sur les
projets de loi annoncés.
M. Jean-Paul Hugot
a confirmé que le rapport ne prenait position
que sur l'affirmation de la responsabilité du politique face à
des démarches qui confondent souvent la logique technique ou
entrepreneuriale avec l'intérêt public.
Il a aussi indiqué que le dossier des télévisions locales
n'était pas abordé dans la mesure où il s'inscrit dans la
problématique de la communication locale, qui couvre un champ plus large
que celui de la communication audiovisuelle.
A l'issue du débat, la commission a décidé de faire
procéder à la publication des conclusions du groupe de travail
sous forme de rapport d'information.