2. Des objectifs attrayants
Il est possible de s'appuyer une nouvelle fois sur l'examen des AAI pour tenter de préciser les raisons de la popularité d'une notion dont nous avons vu la difficulté de définir le contenu juridique. On en revient ainsi à la l'approche " téléologique " de M. Hervé Bourges, qui semble bien la meilleure façon d'aborder la question.
a) L'efficacité administrative
Les AAI
ont été la plupart du temps créées pour
gérer des secteurs d'activités considérés comme
rebelles aux procédés classiques du droit public en raison de la
technicité des matières traitées ainsi que de la
rapidité des évolutions qui s'y manifestent. Il s'agit de rester
efficace dans un contexte particulier. L'idée d'une gestion moderne,
souple et efficace d'un secteur économique tel que la communication
audiovisuelle, dont la technicité et le caractère évolutif
sont très accusés, ne peut de fait que recueillir une large
adhésion.
L'autre avantage d'une régulation " souple ", moins normative,
serait la possibilité de gérer de façon plus
discrète qu'actuellement les intérêts économiques
nationaux, en évitant la publication de textes réglementaires
très exposés à la critique lors des négociations
internationales qui poursuivent le démantèlement des mesures
protectionnistes nationales. Cette qualité n'est pas négligeable
alors que la France dispose d'une des réglementations protectrices les
plus complètes et les plus critiquées.
b) La neutralité politique
Elle
résulte des transferts de compétence dont
bénéficient les AAI. L'objectif de neutralité politique,
qui explique largement le succès actuel des AAI, fait de celles-ci des
avatars modernes du mythe traditionnel du pouvoir technicien.
On peut distinguer trois catégories de motifs de soustraire au politique
la gestion de certaines matières.
- Le pouvoir politique est parfois soupçonné d'éprouver la
tentation soumettre à une logique partisane la gestion de secteurs
sensibles sur le plan politique. Ce motif a été
déterminant dans la création des AAI chargées de
réguler la communication audiovisuelle.
- Le pouvoir politique peut être tenté par l'inaction face
à des questions qui ne comportent pas de véritables enjeux
politiques en dépit de leur importance pour la vie quotidienne des
citoyens. Le Médiateur et la Commission d'accès aux documents
administratifs répondent largement au souci de prévenir ce risque.
- Les AAI peuvent enfin correspondre à la volonté d'éviter
le risque de paralysie du politique quand la technicité des
problèmes rend les décisions difficiles à trancher. La
neutralité est alors considérée comme une condition de
l'efficacité.