2. Un prix du timbre élevé
Du fait de l'existence du monopole, le particulier utilisant
le service du courrier ne peut qu'accepter le prix du timbre qui est
fixé sous la tutelle de l'État. Mais
les temps de cette
facilité
, à laquelle il était possible de recourir
sans hésitations à l'époque du budget annexe et dont on
s'est encore servi récemment pour rétablir les comptes de
l'opérateur,
sont désormais révolus
.
Aujourd'hui, les principaux clients de La Poste -les entreprises- ont, pour la
plupart, la liberté de choisir leur fournisseur. Ils suivent
l'évolution du tarif de base du courrier, le comparant au coût
d'un envoi par fax ou d'un transfert de données informatiques. Les
" grands comptes " de La Poste négocient le prix du service
postal, comme n'importe quelle autre fourniture de services ou de
matériel. Ils réclament des tarifs préférentiels en
fonction du nombre d'envois qu'ils adressent et de la qualité de service
qui leur est offerte. Le
timbre
a bel et bien
commencé
à perdre son statut de quasi-redevance prélevée par
l'État, pour devenir
le plus souvent, si l'on excepte les envois des
ménages, un
tarif commercial négocié
.
Or, après des hausses successives, le prix du timbre n'est plus
compétitif. Son augmentation en France entre 1991 et 1996 a
été particulièrement forte. Le coût
d'affranchissement pour la
lettre de moins de 20 grammes
est
passé de
2,30 francs en 1990
à
3 francs en
1996
, ce qui représente une
augmentation de près de
30 %,
largement supérieure à l'évolution de
l'indice des prix à la consommation.
A titre de comparaison, aux Pays-Bas, le tarif de base n'a pas varié
durant la même période.
Cet accroissement du coût de l'affranchissement ne s'est pas
limité en France au prix du service de base.
Au cours de la
même période 1991-1996
, selon les évaluations de La
Poste,
l'ensemble des tarifs courrier a augmenté de 17,4 %
,
soit 7 points de plus que l'indice des prix à la consommation.
Le développement des nouvelles techniques de communication, qui offrent
des services alternatifs à des prix très compétitifs,
interdit désormais la poursuite d'une telle politique. En prenant pour
base l'indice 100 en 1990, les prix moyens des services de
télécommunications qui concurrencent directement la lettre sont
passés, en 1996, à l'indice 95, tandis que le prix du timbre
destiné à l'affranchissement d'une lettre de moins de 20 grammes
est passé de l'indice 100 en 1990 à l'indice 128 en 1996.
Tout laisse à penser que les grands clients de La Poste
n'hésiteront pas à faire jouer davantage encore la concurrence
nationale et même internationale -songeons aux convoitises que suscitent
les segments les plus rentables du marché français de la part de
KPN ou de British Mail- lorsque le monopole commencera à se contracter,
surtout si l'opérateur public ne parvient pas à " tenir ses
prix ". Or, les comparaisons internationales sont défavorables au
timbre français. En Europe, pour le service de base (lettre de moins de
20 grammes), seuls les tarifs d'affranchissement suédois et allemand
sont plus chers que le timbre à l'effigie de Marianne.
Soulignons toutefois, s'agissant de la Suède, que depuis le début
de l'année 1997, le prix du timbre est distinct pour les particuliers
(4,15 francs) et pour les entreprises (1,65 franc).
Le timbre français est 25 % plus cher que le timbre
néerlandais ou britannique.
A titre d'illustration de cette fragilité tarifaire de La Poste
française, le tableau ci-dessous présente les tarifs de la lettre
dans les principaux pays d'Europe et aux Etats-Unis.
ÉVOLUTION DU TARIF DE BASE DE LA LETTRE
(RÉGIME INTÉRIEUR)
(1987-1997)
(en francs)
France |
Allemagne |
Royaume Uni |
Pays-Bas |
Italie |
Etats-Unis |
Suède |
|
1987 |
2,20 |
2,67 |
1,77 |
2,22 |
2,78 |
1,32 |
1,99 |
1997 |
3,00 |
3,36 |
2,39 |
2,39 |
2,53 |
1,80 |
particuliers : 4,15
|
(Source : La Poste)
De même, La Poste subit une forte concurrence sur les marchés qui
ne sont pas protégés par le monopole, tels que la
publicité non adressée : elle est, par conséquent, dans
l'obligation de maîtriser ses coûts. Cet impératif de
stabilisation, voire de compression, des prix se renforcera dans les
années à venir, au gré de l'accroissement tendanciel de la
concurrence.
Il serait donc illusoire de croire que la voie de la facilité
tarifaire reste encore ouverte à La Poste.