B. DES DÉLAIS INACCEPTABLES
Lord Woolf confirme le jugement de son
prédécesseur dans l'affaire Rastin v. British Steel Plc (1994) :
"
Les délais ont depuis longtemps été reconnus
comme les ennemis de la justice
". Ils jouent au détriment des
parties (mais pas de leurs défenseurs selon Lord Woolf) et ils
occasionnent des coûts supplémentaires.
La durée des procédures ne parait toutefois pas imputable
à l'insuffisance des moyens des juridictions pour faire face au nombre
des affaires mais à l'exploitation par les parties de la
procédure civile elle-même.
1. L'exploitation de la procédure par les défenseurs
"
La complexité de la procédure civile
elle-même permet à la partie la plus fortunée ou la plus
expérimentée de faire traîner en longueur le délai
d'examen et d'augmenter les coûts, en argumentant sur des points
techniques ou des questions périphériques au lieu de mettre
l'accent sur le fond de l'affaire. Trop souvent, de telles tactiques sont
utilisées pour intimider la partie la plus faible et produire une
solution qui est soit injuste, soit d'un coût disproportionné,
soit déraisonnablement tardive
21(
*
)
.
"
L'enquête menée à l'occasion du rapport Woolf montre que la
plupart des affaires civiles ont une
durée globale de 20 à 35
mois
mais que, en matière de
dommages corporels
et de
faute médicale
, la durée médiane est respectivement
de
54
et
61 mois
...
22(
*
)
On observe en outre une tendance à l'allongement de ces délais
pour les dommages corporels lorsque l'affaire est simple et
bénéficie de l'aide judiciaire.
2. La durée des audiences
Si pour les affaires simples la durée des audiences
peut être relativement courte (quelques heures), elle dépasse en
tout état de cause celles constatées dans le système
français ; les parties sont en effet libres de faire comparaître
témoins et experts, de les interroger et contre-interroger et de plaider
longuement.
La mission a pu constater par elle-même la lenteur de ce
déroulement en assistant à plusieurs audiences civiles
menées par un juge unique.
Pour les affaires complexes, les audiences peuvent couramment durer plusieurs
jours, voire plusieurs semaines.
En revanche, le juge, en matière civile, rend sa décision et la
motive à l'issue des débats. En conséquence, il doit, au
fur et à mesure que ceux-ci se déroulent, prendre note et
préparer son jugement. Il ne semble donc pas y avoir de mise en
délibéré.
Selon certains praticiens, dégager le juge de la prise de notes
manuscrites permettrait d'économiser jusqu'à 40 % du temps
d'audience.
En conclusion
, le système ne répond donc plus aux besoins
si bien que la confiance des milieux d'affaires dans la justice anglaise
s'érode. Ceux-ci sont tentés de désigner contractuellement
des juridictions capables de répondre aux situations urgentes ou
recourrent aux transactions.