4. Intervention de M. Assaad Saab, chef de la mission Prospective à EDF
M. Assaad Saab
- Je serai volontairement bref,
d'autant que notre Directeur général, François Ailleret, a
été très complet dans sa description de la situation du
secteur électrique indien.
J'intégrerai quelques points forts de son message et je soulignerai
surtout quelques points qui nous ont frappés lors de notre mission
d'étude : tous les collègues Indiens, qu'ils interviennent dans
le domaine de l'électricité ou qu'ils soient responsables
politiques -nous avons eu des réunions avec les chambres de commerce de
Bombay et de Delhi, et le patronat indien et la Banque Mondiale lors de la
mission d'octobre 1995- portent une analyse très juste et très
sereine sur le contexte électrique indien. Les compagnies
électriques régionales connaissent en effet une situation
financière très difficile. L'exploitant est intégré
au niveau de l'Etat, mais le taux de retour sur investissement se situe en
permanence entre - 12 et - 15 % par an, et les pertes annuelles globales sont
de l'ordre de 1 % du PIB !
Ceci crée une condition de départ extrêmement difficile,
qui explique les problèmes liés à l'entretien et aux
pertes techniques.
D'autre part, la politique tarifaire " anti-économique "
constitue un autre point noir. Celle-ci a toujours été
utilisée comme outil politique, afin de fournir
l'électricité aux plus pauvres au coût le plus bas. Cela se
traduit globalement par des subventions très fortes au monde agricole et
aux particuliers, qui dénaturent l'équilibre financier.
Les tarifs couvrent globalement 50 à 60 % des coûts marginaux
à long terme. Le président Banker a mentionné tout
à l'heure une augmentation de 25 % des tarifs. Il est vrai qu'il existe
des Etats-pilotes, comme le Karnataka ou l'Orissa, qui ont pris en compte ce
problème, mais le problème est général. D'autres
Etats, moins riches et qui connaissent des facteurs encore moins favorables,
ont encore davantage besoin de ce type de réforme tarifaire...
Tous nos interlocuteurs indiens ont par ailleurs insisté sur la
complexité du cadre institutionnel et sur les problèmes entre le
niveau fédéral et l'Etat. Etant donné la situation
financière des Etats et des compagnies d'électricité, des
comptes garantis sont indispensables au niveau fédéral. Ceci
révèle un problème d'adaptation institutionnelle à
une économie qui se libéralise, et qui a conservé un poids
bureaucratique très important.
Ainsi, pour un projet d'infrastructure électrique, il faut dix-sept
autorisations différentes au niveau local et fédéral !
Cela ne simplifie donc pas la tâche de l'opérateur...
Etant donné l'étendue et l'importance du contexte indien, des
instances réglementaires sont donc indispensables. Il faut les
encourager, et cela reste un des points-clefs de l'évolution de ce
secteur.
Pour qu'un opérateur étranger puisse contribuer à aider
l'Inde, il paraît nécessaire de procéder à la
restructuration des compagnies électriques afin de leur donner une
crédibilité financière et de leur assurer un
assainissement financier satisfaisant, mais également de permettre des
ouvertures de capital et de faire jouer la concurrence, sous forme de gestion
déléguée à un distributeur local.
Une participation dans le secteur de la distribution, qui reste jusqu'à
présent très fermé et entièrement public, donnera
confiance au reste. Les représentants des chambres de commerce indiennes
à Delhi nous ont eux-mêmes tenus ce discours, que l'on peut donc
reprendre à notre compte.
Il est sûr que la réalité économique de l'Inde est
très différente d'un Etat à un autre, et l'on ne pourra
pas évoluer vers une politique électrique tarifaire unique. Il
faut que celle-ci respecte les spécificités d'un certain nombre
d'Etat, mais, globalement, une vérité des coûts est
indispensable.
M. le Président
- M. Kasliwal veut-il réagir ?