B. UN ACCOMPAGNEMENT PAR LA CNSA QUI DEMANDE À ÊTRE RENFORCÉ

1. La CNSA, pilote du réseau des MDPH

La nature spécifique de la branche autonomie de la sécurité sociale, qui se déploie dans un champ en partie décentralisé du fait de la compétence départementale, conduit la CNSA à assurer un pilotage de réseau distinct du modèle classique. Le rôle de la CNSA a toutefois été renforcé avec la mise en place de la cinquième branche en 2021.

Auparavant, la caisse avait pour rôle d'assurer un échange d'expériences et d'informations entre les MDPH, de diffuser les bonnes pratiques d'évaluation individuelle des besoins et de veiller à l'équité du traitement des demandes de compensation du handicap76(*).

Aux termes de l'article L. 223-5 du code de la sécurité sociale, la CNSA est désormais chargée de piloter et d'assurer l'animation et la coordination des acteurs qui participent à la mise en oeuvre des politiques de soutien à l'autonomie. Elle assure, au bénéfice des départements et des MDPH, une mission nationale d'accompagnement, de conseil et d'audit en vue de déployer des outils de contrôle interne et de maîtrise des risques, de garantir la qualité du service, et de veiller à l'égalité de traitement des demandes de droits et de prestations.

Malgré le renforcement de ses missions, la CNSA n'a pas remis en cause son mode de pilotage, qui continue de s'appuyer principalement sur des recommandations ou des guides. Son rôle reste d'harmoniser les pratiques, de créer une culture commune au sein du réseau et de mettre en place des projets structurants (système d'information commun, déploiement du SPDA notamment).

La feuille de route MDPH 2022 a toutefois marqué un engagement renforcé avec la conduite de projets ambitieux : mise en place du dispositif des droits sans limitation de durée, extension et amélioration de la PCH, déploiement du service en ligne de dépôt des demandes ou encore renforcement de la coopération territoriale.

2. Renforcer l'accompagnement des MDPH tout en préservant l'autonomie des structures
a) À l'échelle locale, le conseil départemental reste le pilote de fait de la MDPH

Sur le terrain, le conseil départemental, qui préside la commission exécutive (Comex) du GIP, est le pilote de fait de la MDPH et le rôle politique joué par son président peut avoir des effets déterminants sur le fonctionnement de la structure.

Le rôle du conseil départemental est aussi renforcé par le niveau parfois très élevé d'intégration des MDPH dans ses services, notamment lorsqu'une maison départementale de l'autonomie (MDA) a été mise en place. Le conseil départemental peut, dans certains cas, employer le personnel de la MDPH et la mutualisation des moyens peut concerner aussi bien la logistique et les systèmes d'information que l'accueil du public.

En outre, hors Éducation nationale, les représentants de l'État apparaissent en retrait : les sous-préfets en charge du handicap sont très souvent absents des Comex, et la présence des directions départementales de l'emploi, du travail et des solidarités (DDETS) est inégale.

b) À l'échelle nationale, la CNSA manque de moyens pour accomplir pleinement sa mission

Ces dernières années, de nouveaux dispositifs ont été mis en place pour renforcer le pilotage national. Dans le cadre de la convention d'objectifs et de gestion État-CNSA 2022-2026, des moyens supplémentaires ont été alloués à la caisse pour accompagner les MDPH les plus en difficulté et développer le contrôle interne au sein du réseau.

Entre 2021 et 2024, la « mission d'appui opérationnelle » (Maop) déployée par la CNSA a permis d'accompagner vingt-quatre MDPH en difficulté sur demande des présidents des conseils départementaux concernées.

Dans un premier temps, l'équipe qui constitue la Maop observe, sur plusieurs mois, l'organisation de la structure pour établir un diagnostic des difficultés rencontrées. Ensuite, elle propose un plan d'action visant à réviser les processus de traitement et finance des postes temporaires afin de résorber les dossiers en attente de traitement. La durée moyenne d'un accompagnement est d'un an et demi à deux ans. Le bilan de la Maop est globalement positif, la plupart des MDPH accompagnées ayant identifié les points de blocage et réduit leur délai de traitement à l'issue de la mission.

Interrogée sur les perspectives de cet accompagnement, la CNSA a indiqué qu'une nouvelle offre serait déployée en 2025, avec la mise à disposition des MDPH d'un « kit d'autodiagnostic » qui leur permettra d'identifier plus facilement la source de leurs difficultés, et d'envisager un plan d'action pour y apporter des réponses.

La seconde structure récemment mise en place par la CNSA est la « mission de contrôle interne et de conformité » (MCIC). L'objectif est de conduire, en 2025, un certain nombre d'audits internes au sein des MDPH afin d'objectiver l'hétérogénéité des pratiques sur certains sujets comme l'attribution de l'AAH.

Malgré cette démarche, le constat de l'insuffisance du pilotage national demeure.

Si la feuille de route nationale MDPH 2022 était particulièrement ambitieuse, et que ses objectifs ont bien été déclinés dans les conventions départementales prévues par la loi77(*), lesdites conventions n'ont fait l'objet d'aucun suivi. De fait, la CNSA n'est pas en mesure de suivre tous les indicateurs mis en place pour la centaine de départements.

L'Igas pointe deux principaux freins au pilotage national. D'une part, les ressources de la CNSA sont limitées : il n'existe pas de direction du réseau au sein de la caisse, et les ressources consacrées à l'animation du réseau restent fragiles. D'autre part, il n'existe pas de relais territoriaux, ce qui accentue le sentiment d'éloignement entre les MDPH et la CNSA.

S'il convient d'attribuer plus de moyens à la CNSA pour piloter le réseau des MDPH, les rapporteures estiment en revanche qu'il n'est pas souhaitable de doter la caisse d'un pouvoir de sanction. En effet, outre les résultats très incertains que produiraient une politique de sanction à l'égard de MDPH supposées « mauvaises élèves », les départements doivent rester autonomes dans l'exercice des compétences qui sont les leurs.

Proposition n° 14 : Pérenniser la mission d'appui opérationnel de la CNSA en lui allouant davantage de moyens humains.


* 76 Article L. 14-10-1 du code de l'action sociale et des familles.

* 77 L'article L. 14-10-7-2 du code de l'action sociale et des familles prévoit qu'une convention pluriannuelle signée entre la CNSA et le département fixe leurs engagements réciproques dans le champ de l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.

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