N° 306

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025

Enregistré à la Présidence du Sénat le 5 février 2025

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur le bilan de l'application de la loi du 11 février 2005,

Par Mmes Chantal DESEYNE, Marie-Pierre RICHER
et Corinne FÉRET,

Sénateur et Sénatrices

(1) Cette commission est composée de : M. Philippe Mouiller, président ; Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale ; Mme Pascale Gruny, M. Jean Sol, Mme Annie Le Houerou, MM. Bernard Jomier, Olivier Henno, Xavier Iacovelli, Mmes Cathy Apourceau-Poly, Véronique Guillotin, M. Daniel Chasseing, Mme Raymonde Poncet Monge, vice-présidents ; Mmes Viviane Malet, Annick Petrus, Corinne Imbert, Corinne Féret, Jocelyne Guidez, secrétaires ; Mmes Marie-Do Aeschlimann, Christine Bonfanti-Dossat, Corinne Bourcier, Céline Brulin, M. Laurent Burgoa, Mmes Marion Canalès, Maryse Carrère, Catherine Conconne, Patricia Demas, Chantal Deseyne, Brigitte Devésa, M. Jean-Luc Fichet, Mme Frédérique Gerbaud, M. Khalifé Khalifé, Mmes Florence Lassarade, Marie-Claude Lermytte, Monique Lubin, Brigitte Micouleau, M. Alain Milon, Mmes Laurence Muller-Bronn, Solanges Nadille, Anne-Marie Nédélec, Guylène Pantel, M. François Patriat, Mmes Émilienne Poumirol, Frédérique Puissat, Marie-Pierre Richer, Anne-Sophie Romagny, Laurence Rossignol, Silvana Silvani, Nadia Sollogoub, Anne Souyris, MM. Dominique Théophile, Jean-Marie Vanlerenberghe.

L'ESSENTIEL

La loi du 11 février 2005 a suscité l'immense espoir, pour les personnes en situation de handicap, d'une compensation effective des conséquences du handicap et d'un accès à l'emploi renforcé.

Vingt ans après, la commission des affaires sociales dresse un bilan en demi-teinte, et appelle à ne pas renoncer aux ambitions initiales.

I. DROIT À COMPENSATION : DES AVANCÉES INDÉNIABLES, DES AMBITIONS PARTIELLEMENT ATTEINTES

A. LA PRESTATION DE COMPENSATION DU HANDICAP : UNE RÉPONSE GLOBALE ET INDIVIDUALISÉE AUX BESOINS DE COMPENSATION

1. La PCH : une approche globale et individualisée du droit à compensation

Dans l'objectif d'atteindre l'égalité des chances et de garantir aux personnes handicapées le libre choix de leur projet de vie, la loi de 2005 a institué la prestation de compensation du handicap (PCH).

L'ambition de la PCH est de garantir une compensation individualisée des conséquences du handicap. Elle permet de financer des besoins de nature très différente : aide humaine, aides techniques, aménagement du logement et du véhicule, aide animalière et autres aides spécifiques ou exceptionnelles.

La PCH est attribuée par la maison départementale des personnes handicapées (MDPH), au sein de laquelle une équipe pluridisciplinaire évalue les besoins de compensation à l'aune des aspirations et du projet de vie de la personne, qui est associée du début à la fin du processus d'attribution de la prestation.

2. Depuis 2005, des réformes de la PCH qui ont permis d'améliorer la couverture des besoins

Les critères d'éligibilité de la PCH ont été progressivement assouplis. En 2008, la PCH a été ouverte aux enfants, un droit d'option restant avec le complément d'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) ; et en 2020, la limite d'âge fixée à 75 ans pour demander la PCH lorsque le handicap a été reconnu avant 60 ans a été levée. Par ailleurs, depuis le 1er janvier 2023, la liste des critères qui permettent l'accès à la PCH a été étendue afin d'en faciliter l'accès aux personnes atteintes d'une altération psychique, mentale ou cognitive.

Dans le même temps, les besoins couverts par la PCH ont été élargis. Une « PCH parentalité » a été créée en 2021 pour financer l'aide humaine et technique dont peuvent avoir besoin les parents en situation de handicap. La même année, la préparation des repas et la vaisselle ont été intégrées aux besoins en aide humaine couverts par la PCH, et en 2023, un forfait surdicécité a été mis en place.

3. Des objectifs fixés par la loi de 2005 qui ne sont que partiellement atteints

Alors que la loi de 2005 prévoyait la suppression des barrières d'âge dans un délai de cinq ans, la limite fixée à 60 ans n'a jamais été levée. Ainsi, les personnes dont le handicap se déclare après 60 ans ne sont pas éligibles à la PCH mais bénéficient de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA). Or, il existe des différences de prise en charge entre ces deux prestations, l'APA ne couvrant que partiellement les charges liées à la perte d'autonomie.

De plus, le droit à compensation applicable aux enfants est d'une grande complexité et ne répond pas de manière satisfaisante aux besoins.

Enfin, malgré l'étendue de la PCH, certaines personnes continuent d'assumer un reste à charge important. Le niveau de prise en charge des aides techniques n'a pas été revalorisé depuis 2006, et les aides techniques innovantes ne sont pas prises en charge. Certaines aides sont tout simplement exclues du périmètre de la PCH, à l'image des aides ménagères et des assistants de communication.

4. Un dynamisme des dépenses qui se heurte à la problématique du financement

Depuis sa création, la PCH se caractérise par son dynamisme. En 2023, on dénombre 350 811 bénéficiaires de la PCH, dont 317 836 adultes et 32 975 enfants, contre près de 7 000 en 2006. Les dépenses de PCH sont quant à elles passées de 1,1 milliard d'euros en 2010 à près de 3,1 milliards d'euros en 2024, soit une hausse de 155 %.

Évolution des dépenses de PCH et des financements PCH
versés aux départements depuis 2014

Ce dynamisme s'explique tout d'abord par la croissance démographique et l'allongement de l'espérance de vie des personnes en situation de handicap, qui se traduisent mécaniquement par la hausse du nombre de bénéficiaires et de la durée de prise en charge. Il résulte également des réformes mentionnées ci-avant.

Les départements, qui sont chargés du versement de la PCH, font difficilement face au dynamisme des dépenses. L'effort repose en grande partie sur eux, la compensation assurée par l'État par le biais du concours versé par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) ayant chuté de 60,4 % en 2009 à près de 30 % en 2024.

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