SYNTHÈSE

La santé scolaire joue un rôle crucial dans le système éducatif français, en assurant le suivi et la promotion de la santé des élèves. La loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 lui a conféré deux missions : favoriser la réussite scolaire et réduire les inégalités de santé. La santé scolaire inclut des actes de prévention, des visites médicales et des dépistages obligatoires, notamment à 6 et 12 ans, mais aussi toutes les actions destinées à promouvoir la santé et le bien-être des élèves.

Depuis 1945, la compétence « santé scolaire » est détenue par l'Etat. Contrairement à d'autres pays où elle est souvent sous la tutelle du ministère de la Santé, elle relève, en France, du ministère de l'Éducation nationale depuis 1991, Cette politique est élaborée en collaboration avec les autorités de santé publique et est régie par le Code de l'éducation et le Code de la santé publique. Les acteurs de la santé scolaire comprennent notamment les médecins, infirmiers, assistants sociaux et psychologues de l'Éducation nationale.

Cependant, la santé scolaire fait face à des défis majeurs, notamment une pénurie de personnel, avec 45% des postes de médecins scolaires vacants en 2022, et une répartition inégale des effectifs sur les territoires. La pandémie de Covid-19 a accentué les difficultés d'accès aux soins tout en mettant en lumière des besoins accrus en matière de prévention et de gestion des épidémies. En parallèle, les troubles psychiques chez les jeunes ont fortement augmenté, avec une progression alarmante des tentatives de suicide : +63 % chez les 10-14 ans et +42 % chez les 15-19 ans en 2022.

Malgré les efforts financiers de l'État, la santé scolaire reste confrontée à une faible attractivité des postes, des conditions de travail dégradées et une gestion à la fois complexe et cloisonnée. La centralisation administrative rigide et les interactions souvent compliquées entre les différents acteurs entravent son efficacité. En outre, le manque de coordination entre les services et l'absence d'un budget unifié compliquent la mise en oeuvre de politiques uniformes. Il est donc essentiel de repenser l'organisation de la santé scolaire.

Face aux nombreuses difficultés endémiques de la santé scolaire, un transfert de compétence pourrait être envisagé à différents échelons pour améliorer le pilotage et assurer une meilleure prise en charge des élèves. Une analyse comparative de ces options a donc été élaborée. Son objectif est d'évaluer et de comparer les différents scénarios d'évolutions organisationnelles et de transferts, dans le but d'identifier la solution la plus adaptée pour atteindre les objectifs suivants : garantir une équité d'accès aux soins pour les enfants, répondre aux nouveaux défis sanitaires et optimiser l'utilisation des ressources.

Le maintien de la compétence au niveau de l'État avec des évolutions organisationnelles peut se réaliser par des réformes au sein du ministère de l'Éducation nationale ou sous la tutelle du ministère de la Santé et des ARS. La première option inclut notamment la modernisation des pratiques et la revalorisation des métiers de la santé scolaire. Cela garantirait un pilotage uniforme et une approche intégrée santé-éducation, mais les ressources limitées et la difficulté à prendre en compte les spécificités locales demeuraient. La seconde option, sous la tutelle du ministère de la Santé et des ARS, améliorerait la coordination des acteurs de la santé publique et la prise en charge des élèves, mais pourrait entraîner une déconnexion avec le système éducatif et des disparités entre les ARS.

Par ailleurs, le transfert de la compétence de la santé scolaire aux collectivités territoriales pourrait s'opérer à plusieurs niveaux : Départements, EPCI/métropoles ou communes. Un transfert aux Départements favoriserait une meilleure continuité de services avec les services Départementaux de protection maternelle et infantile (ci-après « PMI »), tandis qu'un transfert aux EPCI/métropoles offrirait une proximité accrue avec les élèves et une plus grande flexibilité dans la gestion des ressources. Opter pour les communes permettrait d'ajuster les services aux spécificités locales et de stimuler l'innovation. Cependant, ces trois scénarios présentent le risque d'accentuer les inégalités d'accès aux soins en fonction des disparités locales. En parallèle, déléguer certaines activités périphériques à la compétence de santé scolaire à des associations permettrait d'exploiter leur expertise spécifique et renforcer les initiatives de prévention. Néanmoins, cela pourrait également engendrer une fragmentation des services et des difficultés de coordination.

Enfin, des rappels règlementaires de l'hypothèse du transfert de la compétence médecine scolaire aux Départements ont été développés. Il convient tout d'abord de rappeler que la proposition de loi adoptée par le Sénat envisage l'hypothèse d'un transfert expérimental de la compétence médecine scolaire aux seuls Départements volontaires et ce, pour une durée limitée. Cette expérimentation, qui entre dans le champ d'application de l'article 72 alinéa 4 de la Constitution, permettra de déroger à titre temporaire aux dispositions législatives et réglementaires relatives à la médecine scolaire.

Contrairement à un transfert expérimental, un tel transfert définitif de la compétence engendrerait de nombreuses problématiques juridiques. En effet, tout transfert de compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Il conviendra alors de déterminer les modalités de compensations financières accordées aux Départements. En outre, les missions transférées devront être précisément définies afin d'éviter des éventuels chevauchements de compétences entre les différents acteurs territoriaux (services Départementaux de la PMI, services municipaux de santé scolaire). De surcroît, la question du transfert de personnel de l'Etat vers les Départements devra être étudiée plus avant (mise à disposition, droit d'option). Enfin, les biens et les contrats devront également faire l'objet d'un transfert aux Départements pour que ces derniers puissent exercer dans de bonnes conditions cette nouvelle compétence.

Par ailleurs, les mécanismes juridiques à droit constant permettant, dans une moindre mesure, de répondre aux dysfonctionnements actuels rencontrés par l'Etat dans l'exercice de la compétence médecine scolaire, ont été également abordés, mais restent naturellement à approfondir dans le cadre d'une étude plus détaillée intégrant des éléments concrets. Premièrement, la création d'un groupement d'intérêt public (ci-après « GIP ») entre l'Etat et des collectivités territoriales serait une option afin de mettre en commun des différents moyens relatifs à la santé scolaire et ainsi permettre une meilleure allocation des ressources. Deuxièmement, la possibilité pour les agents publics de cumuler plusieurs emplois est un mécanisme prévu par les textes et qui pourrait permettre, sous réserve de respecter les conditions prévues par les textes, de rendre plus attractive la médecine scolaire. De plus, les mécanismes de convention de délégation de compétence, entre l'Etat et les collectivités, prévus par le code général des collectivités territoriales (ci-après « CGCT ») pourraient être davantage utilisés pour expérimenter des transferts de compétence. Enfin, des recommandations organisationnelles pourraient être envisagées pour renforcer la santé scolaire.

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