B. TRAVAILLER À MAINTENIR LA PAIX
1. Processus de réparation et de réconciliation pour surmonter les conflits passés et construire un avenir commun de paix : la question des mesures réparatoires justes et équitables
Le Conseil de l'Europe devrait établir un « processus de médiation » pour aider les États membres à résoudre les différends post-conflit et à trouver « des réparations et des voies de recours » qui désamorceraient les tensions, surmonteraient les divisions passées et oeuvreraient à un avenir commun pacifique, a proposé l'APCE, lors d'un débat tenu le mercredi 26 juin 2024.
Approuvant une résolution et une recommandation, sur le rapport de Lord Richard Keen (Royaume-Uni - CE/AD), l'Assemblée parlementaire a déclaré que les États membres pourraient soumettre leurs différends à un tel mécanisme, qui impliquerait un tiers médiateur neutre et consultation avec des victimes et d'autres groupes concernés.
Il convient d'éviter que le mécanisme de médiation fasse double emploi ou entre en conflit avec les autres processus déjà en place, mais il pourrait offrir « une boîte à outils plus large », mieux adaptée, pour faire face aux complexités des situations post-conflit et aux besoins des victimes.
« Une solution de médiation pourrait aider à examiner de manière contextuelle et holistique les questions très complexes entre États afin de trouver des solutions réalisables, exécutoires et opérantes dans l'intérêt des victimes et d'une paix durable », a ainsi estimé l'Assemblée.
Selon elle, il devrait y avoir une obligation pour les États membres de s'engager dans un tel processus de bonne foi, avec des « répercussions potentielles » sur les États qui ne le font pas, et un devoir pour eux de coopérer sincèrement aux résultats. En l'absence de consentement des deux parties, le processus pourrait être initié par l'Assemblée, le Comité des Ministres ou le Secrétaire général.
2. Appel à la restitution de Varosha à ses habitants légitimes
Les dispositions pratiques prises par le chef de la communauté chypriote turque depuis octobre 2020 en vue de rouvrir l'accès à Varosha - une zone clôturée de la ville de Famagouste qui est une « ville fantôme » depuis la division de l'île - constituent une « modification inacceptable » de son statut et une grave violation des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité des Nations Unies, selon l'APCE, et qui sape les chances de parvenir à un règlement global de la question chypriote.
Dans une résolution adoptée le jeudi 27 juin 2024, sur le rapport de M. Piero Fassino (Italie - SOC), l'APCE a demandé la restitution de Varosha à ses habitants légitimes, soit sous le contrôle des Nations Unies, soit dans le cadre d'un ensemble de mesures de confiance réciproques entre les deux communautés de l'île. Compte tenu de l'importance hautement symbolique de Varosha pour la communauté chypriote grecque, une telle mesure « contribuerait grandement à un règlement global », a estimé l'APCE.
L'Assemblée parlementaire a félicité les deux municipalités de Famagouste/Gazimagouse d'avoir établi « un dialogue constructif et tourné vers l'avenir » et les a encouragées à élaborer des projets communs bicommunautaires visant à « préparer Famagouste, y compris Varosha, à un avenir commun après la résolution ultérieure de la question chypriote ».
Elle a également souligné la possibilité, pour les Chypriotes grecs qui le souhaitent, de demander l'indemnisation, l'échange ou la restitution de leurs biens abandonnés en 1974 dans le cadre de la « Commission des biens immobiliers » (CBI) créée dans le nord de Chypre à la suite d'un arrêt de la Cour de Strasbourg, notant que dans la plupart des cas traités jusqu'à présent, la CBI s'est prononcée en faveur de l'indemnisation conformément aux demandes des requérants. Toutefois, l'Assemblée a également déclaré comprendre que, pour la plupart des Chypriotes grecs habitants légitimes de Varosha, le fait de s'adresser à la CBI « n'est politiquement ni acceptable ni réalisable ».
Près de 50 ans après la division de l'île, la persistance du conflit gelé à Chypre « nuit aux intérêts vitaux de tous les Chypriotes et risque de conduire à une escalade dangereuse », a souligné l'Assemblée. Elle a réaffirmé son engagement en faveur d'une solution équitable, durable et globale pour une Chypre pacifique et unie qui « garantirait les droits légitimes des Chypriotes grecs comme des Chypriotes turcs, dans le plein respect des valeurs et des principes du Conseil de l'Europe ».
L'Assemblée a notamment soutenu les efforts continus du Secrétaire général des Nations Unies et de sa nouvelle envoyée personnelle pour rouvrir les négociations entre les deux communautés chypriotes et a appelé toutes les parties concernées à « contribuer à la reprise rapide du processus politique ».
M. Claude Kern a participé au débat.
3. L'après-conflit : désamorcer les bombes à retardement pour un retour en toute sécurité des populations déplacées
Au cours de sa séance du jeudi 27 juin 2024, l'APCE a exprimé sa préoccupation concernant l'utilisation d'armes explosives dans les zones peuplées, en particulier les mines terrestres et les bombes à sous-munitions. Elle a précisé que ces armes entraînaient souvent le déplacement forcé de personnes à l'intérieur et au-delà des frontières, et empêchait ensuite leur retour volontaire, sûr, digne et durable. Évoquant la population civile fortement touchée par les armes explosives en Ukraine, l'Assemblée parlementaire a dénoncé les effets durables sur les victimes, notamment des conséquences physiques, psychosociales et sur la santé mentale.
La résolution adoptée, sur la base du rapport de M. Domagoj Hajdukoviæ (Croatie - SOC), souligne les dégâts considérables causés par l'utilisation d'armes explosives, qui s'étendent, au-delà du bilan humain, aux infrastructures, aux services essentiels et à l'environnement.
Afin de remédier à cette situation, l'APCE a appelé les États membres à prendre des mesures législatives pour « garantir la dépollution des restes explosifs de guerre dans les territoires ruraux et urbains », et « interdire en toutes circonstances l'emploi, la mise au point, la production, le stockage ou le transfert de mines antipersonnel et d'armes à sous-munitions ». A cet égard, elle a demandé aux États d'envisager de ratifier les différentes conventions sur les mines terrestres antipersonnel et les armes à sous-munitions. L'APCE a également encouragé la coopération internationale pour renforcer les efforts de déminage humanitaire.
En outre, selon le texte adopté, les États membres devraient faciliter le retour volontaire, sûr et digne des personnes déplacées de force et leur réintégration, en les impliquant sur les conditions de leur rapatriement, et en fournissant une assistance suffisante pour couvrir leurs besoins élémentaires.