ANNEXE 2 : CONTRIBUTION ÉCRITE DE LA FÉDÉRATION DES AGENCES LOCALES DE L'ÉNERGIE ET DU CLIMAT

Quelles solutions face au défi de l'ingénierie pour la transition écologique et énergétique dans les petites communes ?

La publication du rapport de l'Inspection générale des finances « L'investissement des collectivités territoriales » d'octobre 2023 vient de confirmer le poids des investissements que les collectivités auront à porter pour réussir la transition écologique : 21 Md€ par an d'investissements d'ici 2030.

Pour opérer la transition énergétique et écologique, et réussir ces investissements majeurs, il est désormais admis qu'il faut de « l'ingénierie ». Aussi, des ressources ponctuelles sont mises à disposition par l'État. Mais de fonds en appels à projets lancés par l'État et ses opérateurs, l'ingénierie est trop souvent financée par le biais d'enveloppes à court terme. Ces enveloppes permettent de financer des chargés de mission ou des bureaux d'études, sans mutualisation, pendant une durée courte, sur un projet.

Plusieurs conséquences :

- Les collectivités sont en situation de concurrence les unes par rapport aux autres pour gagner des appels à projets, au détriment des petites communes, et singulièrement dans les territoires ruraux, qui n'ont pas le temps ou les ressources pour se saisir de ces appels à projets. Pour gagner un appel à projets, il faut bien sûr avoir le temps de candidater.

- On finance des postes par projets, ce qui ne permet pas de couvrir l'intégralité des besoins réels des communes (ne serait-ce que par la diversité des contraintes et chantiers imposés par l'État/la loi : zones à faible émission, zones d'accélération EnR, rénovation des écoles, etc.).

- Par leur court-termisme, la non-stabilité des moyens, ces enveloppes s'opposent à toute visibilité et à des logiques de recrutement, a fortiori de fidélisation des ressources humaines, pourtant indispensables, dans des métiers en tension.

En réalité, il faut plus qu'une expertise technique en appui ponctuel sur un projet. Les territoires ont besoin d'une multitude de compétences, d'expertises (techniques et financières) et d'une ingénierie connaisseuse du territoire, soucieuse d'animer le terrain, pour faire émerger les projets - et les investissements - qui permettent aux plans climat air énergie territoriaux (PCAET) de devenir réalité, et en capacité de suivre les projets dans la durée.

Il ne faut donc pas des chargés de projets isolés, pendant trois ans, ou un bureau d'études pendant trois mois, mais des structures d'ingénierie expertes, neutres et de proximité, présentes dans la durée pour accompagner le Maire durant toute la durée de son projet, de la conception à la réalisation et sans rupture.

L'AMRF n'a pas dit autre chose en conclusion du Grand Atelier des Maires ruraux pour la transition écologique, lorsqu'elle réclamait « un droit à l'accompagnement », reposant sur trois piliers : « Des capacités d'ingénierie technique pour aider les élus à identifier les ressources, et concrétiser les projets, partout, à la plus petite échelle » ; « Des capacités d'animation pour créer des stratégies, des synergies, de l'énergie entre tous les acteurs du territoire et créer ainsi les conditions du changement culturel » et de la formation de tous les élus. 80(*)

Mais penser que chaque commune aura les moyens d'avoir sa propre structure pérenne d'ingénierie dans la durée n'est pas rationnel.

En revanche, ce sont des ressources mutualisables. Bien sûr, les agences locales de l'Énergie et du Climat sont notre modèle : structures souples, associations ou sociétés publiques locales (SPL), elles sont mutualisées à l'échelle de départements, de métropoles ou de pays, selon des périmètres de proximité cohérents et soutenables financièrement. Elles ont des compétences aussi expertes que variées pour calquer aux besoins propres à chaque territoire (qu'ils soient dans les domaines de la mobilité, de la rénovation du patrimoine public, de la rénovation des copropriétés et/ou maisons individuelles, déploiement de la géothermie ou photovoltaïque selon le potentiel, etc.), en toute agilité pour se renouveler au gré des priorités qu'imposent aux collectivités, de l'évolution des réglementations et des urgences.

Aujourd'hui, il y a deux écueils majeurs au développement de ce réseau d'ingénierie territorial mutualisé :

- Malgré la reconnaissance des Agences locales de l'Énergie et du Climat dans le code de l'Énergie81(*), ce modèle mutualisé reste trop faiblement identifié par les collectivités (l'État et ses agences ne participant pas à l'effort pour le faire connaître - hormis dans deux régions, qui ont bénéficié du choix de l'ADEME locale de miser sur le modèle).

- Dans la logique de nos constats précédents, ces structures sont, elles aussi, confrontées à la réalité pernicieuse des appels à projets. Il serait urgent de rassembler des enveloppes pour alimenter un budget unique qui participe au financement du fonctionnement de ces ressources, sans concurrence entre les collectivités.


* 80 L'ensemble de ces citations provient des conclusions du « Grand Atelier des Maires ruraux pour la transition écologique adoptées » lors du Congrès national des maires ruraux de France 2023 https://www.amrf.fr/wp-content/uploads/sites/644/2023/10/VF-_-Livret_GrandAtelier_Orientations.pdf

* 81 Article L211-5-1 du code de l'énergie.

Les thèmes associés à ce dossier

Partager cette page