C. UNE MARGE QUASI-INEXISTANTE POUR LES ÉTABLISSEMENTS SCOLAIRES LES PLUS PETITS
Au-delà de la seule réforme du lycée, pour les inspections générales12(*), « il apparait qu'une taille minimale semble nécessaire pour pouvoir mettre en place l'offre de formation. En dessous de seize divisions au collège et de neuf divisions de seconde au lycée, il est difficile de couvrir l'ensemble des besoins, notamment l'ouverture des enseignements optionnels ». Et de constater pour les établissements de petite taille : « L'autonomie se trouve ainsi limitée par la contrainte que représente l'insuffisance de la dotation, liée à la taille de l'établissement. Les choix opérés risquent dans ces cas d'être influencés par des politiques académiques ou nationales plutôt que guidés par une stratégie d'établissement ».
Les dédoublements des classes de langues ou encore la limitation du nombre d'élèves dans les classes de sciences pour des raisons de sécurité limitent de facto les marges horaires des établissements. Ils ne sont pourtant pas pris en compte dans l'attribution des dotations.
Dans le cadre d'un dialogue de gestion déconcentré, les rapporteurs préconisent l'instauration d'une part spécifique de dotation horaire globale tenant compte des besoins spécifiques de certains établissements scolaires (difficultés sociales, éloignement géographique ...).
L'attribution de la dotation horaire globale dans l'académie de Lille
Lors de son audition, Mme Valérie Cabuil, rectrice de l'académie de Lille, est revenue sur la répartition de la DHG dans son académie. Celle-ci comporte trois volets :
- un volet réglementaire, défini par les textes (voir encadré ci-dessus) ;
- un volet dit « structure », qui a pour objet de permettre aux établissements de petite taille de proposer une « offre de formation aussi diversifiée que dans les grands établissements » ;
- un volet social calculé sur la base de l'indice de position sociale (IPS) - celui-ci varie de 70 à 130 dans l'académie13(*) - ainsi que sur le nombre de lycéens issus d'un collège de REP, REP + ou disposant d'un IPS faible. Ce volet social correspond en moyenne à 5 à 6 % de la dotation d'un établissement. Il peut néanmoins représenter jusqu'à une dizaine de postes dans certains établissements défavorisés.
Le rapport de l'inspection générale sur l'évaluation de la mise en oeuvre des enseignements optionnels au sein du nouveau lycée général et technologique souligne que : « la mission a pu identifier l'existence d'une taille critique d'établissement nécessaire pour permettre le plein déploiement de la réforme. Selon les avis de certains secrétaires généraux rencontrés, cette taille pourrait être proche d'une capacité de 950 à 1 000 élèves ou de neuf divisions par niveau. Pour les lycées d'une taille inférieure, il est très difficile de parvenir avec la seule marge d'autonomie à remplir à la fois l'objectif d'accompagnement des élèves, de financement des dédoublements et de proposition d'une offre d'enseignements optionnels ».
Pour les lycées de petite taille, la quasi-intégralité de la dotation horaire globale est consommée pour proposer des options et spécialités en nombre suffisant : il s'agit d'une nécessité pour l'attractivité de l'établissement et pour ne pas limiter les élèves dans leurs choix d'études supérieures. De fait, leur autonomie pédagogique disparait sans pour autant permettre une mise en oeuvre de la réforme dans de bonnes conditions.
Face au constat d'un empiètement sur l'utilisation de la dotation horaire globale pour mettre en oeuvre des politiques nationales et centralisées, les rapporteurs préconisent l'examen, chaque année, de la manière dont sont utilisées les marges de manoeuvre de l'établissement. Ce rendez-vous annuel doit être l'occasion pour l'équipe pédagogique de réfléchir collectivement à l'utilisation de ces marges, mais aussi d'identifier le rognage sur l'autonomie de l'établissement prévue par les textes. Ce recueil d'éléments, en lien avec la précédente recommandation, est un élément essentiel pour le chef d'établissement dans le cadre de son dialogue de gestion avec le rectorat, pour l'attribution des moyens.
Recommandation n° 3 : Examiner chaque année en conseil d'administration, après avis du conseil pédagogique, la manière dont sont utilisées les marges de manoeuvre de l'établissement.
* 12 Rapport annuel 2019 des inspections générales - l'autonomie des établissements scolaires.
* 13 À la rentrée 2022, l'IPS moyen des collégiens en France est de 105. Les huit départements les plus défavorisés socialement ont un IPS moyen inférieur à 95. 90 % des collèges en REP + ont un IPS inférieur à 83. Note d'information n° 23.16 « l'indice de position sociale : un outil statistique pour décrire les inégalités sociales entre établissements », DEPP, mars 2023.