C. ENTRE ACTIVITÉ QUASI-NULLE DEPUIS DÉBUT MARS ET FLOU SUR LA MISE EN PLACE DES COLONIES DE VACANCES « STUDIEUSES » : LE SECTEUR DU TOURISME ASSOCIATIF INQUIET POUR SON AVENIR

1. Classes vertes, colonies de vacances, formation au BAFA : un arrêt brutal d'activité depuis le mois de mars
a) Le secteur du tourisme associatif percuté de plein fouet par la crise de Covid-19

95 % de l'activité de classes vertes, 85 % des accueils collectifs de mineurs et 75 % des formations (notamment BAFA) sont à l'arrêt depuis mars. Les conséquences en termes de ressources humaines sont lourdes : ainsi, 70 % des salariés de l'UFCV sont en chômage partiel.

Pour l'activité en central de la Ligue de l'enseignement, à laquelle il faut ajouter les données des fédérations régionales, cet arrêt représente pour 11,7 millions d'euros de séjours scolaires vendus qui ont été annulés.

b) Des acteurs en danger de disparaître

On constate un taux d'inscription inférieur de 40 à 50 % par rapport à la même époque l'année dernière pour la période estivale. Or, la période d'inscription dans les colonies de vacances s'étend normalement de mi-mars à mai.

De nombreux acteurs du tourisme associatif, notamment les plus petits, s'interrogent sur leur capacité de survie. En effet, leur modèle économique est fondé sur une complémentarité d'activités entre accueils pendant les vacances et classes vertes de mi-février à fin août, leur permettant ainsi de tenir sur le dernier trimestre et la première partie du premier trimestre.

À titre d'exemple, 58 % des fédérations de la Ligue de l'Enseignement seront en grande difficulté, voire en rupture de trésorerie à la fin du mois de juin. L'UNAT, pour sa part, a indiqué, que contrairement aux années précédentes, il était impossible de commencer à préparer dès à présent le catalogue des séjours d'hiver, notamment parce que de nombreuses associations organisatrices ne savent pas si elles seront encore en capacité d'exister à la rentrée de septembre.

Un plan de soutien au tourisme d'un montant de 1,3 milliard d'euros a été annoncé par le gouvernement le 14 mai. Le groupe de travail salue cette initiative, ainsi que le maintien des financements de la CAF aux accueils collectifs de mineurs au même niveau que l'année précédente, malgré un nombre d'enfants accueillis dans ces structures quasi-nul en raison du confinement. Toutefois, le groupe de travail souligne que cette aide, versée aux structures d'accueil, ne concerne pas les organisateurs des colonies de vacances.

Préconisation : inclure dans le plan de soutien au tourisme le secteur du tourisme associatif et prendre en compte ses caractéristiques

2. Une volonté politique de redynamiser les colonies de vacances, mais de nombreuses questions demeurent
a) Des modalités de vacances en perte de vitesse, remises à l'ordre du jour en raison de la crise de Covid-19

Les colonies de vacances connaissent depuis plusieurs années une baisse majeure de fréquentation. Ainsi, un sondage de « la jeunesse en plein air » a montré que seul ¼ des enfants âgés de 8 à 12 ans étaient déjà partis en colonie de vacances. Alors qu'il y a une trentaine d'années, près de trois millions d'enfants partaient chaque année en colonie de vacances, ils ne sont désormais plus que 800 000.

La crise de Covid-19, et les annonces du gouvernement visant à instaurer des colonies de vacances « éducatives » ou « studieuses » ont permis de remettre à l'ordre du jour ce type de séjour, ce que le groupe de travail ne peut que saluer .

b) Conditions sanitaires, prise en charge du surcoût, encadrement : de trop nombreuses questions freinent la relance des colonies de vacances

La première d'entre elles concerne les conditions sanitaires à respecter. Celles-ci ne sont pas connues pour l'instant. Elles peuvent entraîner des surcoûts importants en termes de taux d'encadrement, de fréquence de nettoyage, de transport, de sécurité et tout simplement du nombre d'enfants pouvant être accueillis. Or, le prix d'un séjour est calculé au plus juste : de manière générale, pour ne pas être déficitaire, un séjour doit avoir un taux de remplissage de 80 à 85 %. Un tel taux ne pourra pas être atteint, s'il faut diviser par deux le nombre d'enfants accueillis. Le groupe de travail appelle l'État à prendre en charge tout ou partie de ce surcoût : en effet, les prestataires ne disposent souvent pas des moyens de le faire et sont réticents à le faire supporter aux familles, au moment même où les pouvoirs publics cherchent à dynamiser les colonies de vacances.

Un deuxième frein à court, mais aussi à moyen termes pour le développement des colonies de vacances doit être souligné : l'encadrement. Depuis la session de Pâques, les formations aux BAFA sont à l'arrêt . En outre, peu de stagiaires ont pu passer leurs stages pratiques. Quant à ceux qui ont pu le faire, ils ne sont pas diplômés car les jurys n'ont pas pu se réunir. Or, l'encadrement de jeunes en colonies de vacances, centres de loisirs ou classes vertes répond à des normes strictes en termes de ratio titulaire et de stagiaire du BAFA.

• 50 % de titulaires du BAFA (ou équivalent)

• 30 % de stagiaires BAFA (ou équivalent)

• 20 % de personnes non qualifiées

Préconisation : indiquer rapidement aux professionnels du secteur les conditions sanitaires à respecter pour l'organisation des séjours de mineurs cet été

c) La nécessité de rassurer et de convaincre les familles pour toucher le « public cible » et redynamiser les colonies de vacances

I l est important de rassurer et convaincre les familles d'inscrire leurs enfants en colonie de vacances, condition sine qua non pour dynamiser ces dernières. Des villes peuvent financer jusqu'à 90 à 95 % du coût de la colonie de vacances pour certains enfants. Or, chaque année, tout le budget alloué n'est pas dépensé : la question financière n'est pas le seul frein pour les familles. Les obstacles sont nombreux : freins cultuel, culturel, psychologique, la sécurité, l'encadrement.

Aujourd'hui, plus que jamais, un travail partenarial avec les travailleurs sociaux et les animateurs est nécessaire pour persuader les familles d'envoyer leurs enfants en colonies de vacances, d'autant plus que beaucoup d'entre elles hésitent déjà à remettre leurs enfants à l'école, dans un environnement pourtant familier. La définition rapide du protocole sanitaire applicable aux séjours et aux accueils collectifs de mineurs est nécessaire ; elle représente une étape indispensable pour rassurer les parents.

Enfin, un travail d'information et de communication à destination des enfants qui ne sont jamais partis en colonies de vacances et qui sont l'un des publics que les pouvoirs publics considèrent comme prioritaires , est indispensable.

3. Les colonies de vacances « studieuses » : un programme annoncé et mis en avant par le gouvernement mais aux contours encore flous à moins de deux mois des vacances d'été

Annoncées par le gouvernement comme réponse au confinement des élèves et à la rupture de la continuité pédagogique, des colonies de vacances « studieuses » doivent voir le jour pour la période estivale 2020. Le groupe de travail souhaite avant tout réaffirmer que par essence, toute colonie de vacances est éducative. Elle apprend à l'enfant la vie collective, à acquérir de nouvelles compétences autour d'activités culturelles et sportives.

Force est de constater que les organisateurs de séjours disposent de très peu d'informations sur le contenu et le cadre de ces colonies de vacances apprenantes ou studieuses. À moins de deux mois du début des vacances d'été, il est plus qu'urgent d'apporter des précisions sur ce dispositif. En effet, à l'exception de quelques-uns, très peu de prestataires proposent des séjours intégrant du soutien scolaire. Le projet pédagogique doit donc entièrement être repensé pour intégrer cette composante, et ceci en quelques semaines. Or, en temps ordinaire, la préparation de nouveau type de séjour se fait près d'un an à l'avance.

Mais de nombreux flous demeurent sur ce dispositif.

a) Quels objectifs pour ces séjours « apprenants » ?

S'agit-il de permettre à l'enfant de retrouver des repères , et confiance en soi, le remobiliser en vue de la reprise des cours en septembre, ou bien d'un soutien scolaire , avec des objectifs de progression à atteindre dans l'acquisition des compétences ?

b) Quel projet pédagogique ?

Si l'objectif premier est scolaire, se pose la question de l' organisation des enseignements (classe d'âge, groupe de niveau), des matières enseignées et du nombre d'heures. Or, les enfants ont besoin de sortir, de s'aérer après un confinement de plusieurs mois, ce « droit aux vacances » comme l'a indiqué le Ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse devant la mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de Coronavirus-Covid 19 de l'Assemblée nationale. D'ailleurs, à l'origine, les colonies de vacances ont une vocation hygiéniste . Il serait regrettable que les colonies de vacances de l'été 2020 enferment les enfants entre les quatre murs d'une salle de classe.

c) Qui pour encadrer les enfants ?

Le confinement l'a rappelé, si besoin en était, à de nombreux parents : l'enseignement nécessite des compétences professionnelles propres, bien différentes de celle de l'animation. Dans ces conditions, une participation d'enseignants est-elle envisagée et sous quelle forme, d'autant que ces derniers seront déjà sollicités par l'éducation nationale pour la mise en place de stage de remise à niveau à la fin du mois d'août, après deux trimestres de forte mobilisation pour assurer la continuité pédagogique sous de nouvelles formes ? Si tel est le cas, par qui seront-ils payés : l'éducation nationale, l'organisateur du séjour ?

Enfin, le groupe de travail attire l'attention du gouvernement sur les effets pervers d'une labellisation . Un exemple précédent de label intitulé « génération camp colo », lancé en 2015-2016 n'a pas produit l'effet escompté : très lourd à mettre en place et dans des délais très contraints, il n'a au final profité qu'aux grandes structures, les seules capables de répondre dans les temps à cet appel à projet et accentuant ainsi l'écart entre les grandes et petites structures. Lors de son audition devant la commission de la culture, de l'éducation et de la communication le 13 mai dernier, Gabriel Attal a indiqué que la formule choisie serait au final plutôt l'organisation de séjours suivant un cahier des charges, qu'une labellisation.

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