B. FACILITER L'ACCÈS À LA PROPRIÉTÉ DES JEUNES GÉNÉRATIONS ET DES MÉNAGES MODESTES
Il convient de réduire l'inégalité d'accès à la propriété qui pèse de plus en plus sur les jeunes générations et les ménages modestes .
À ce titre, le Gouvernement propose de prolonger le prêt à taux zéro (PTZ) pour 4 ans à l'article 40 du projet de loi de finances pour 2018, tout en réduisant son champ d'application puisque :
- le PTZ dans le neuf devrait à terme être maintenu pour les seules zones tendues (A et B1), même si depuis le Président de la République a annoncé qu'il le serait également pour deux ans dans les zones B2 et C mais qu'il ne couvrirait plus que 20 % maximum du coût de l'opération au lieu de 40 % actuellement ;
- le PTZ dans l'ancien serait réservé aux zones B2 et C.
En revanche, le Gouvernement a décidé de remettre en cause les aides personnelles au logement destinées à soutenir l'accession à la propriété (article 52 du projet de loi de finances pour 2018 rattaché à la mission « Cohésion des territoires »). Il convient de rappeler que le Sénat s'était opposé à la suppression de ces aides en 2014 (lors de l'examen de la loi de finances pour 2015) car, même si elles sont moins utilisées qu'auparavant, elles continuent de jouer un rôle solvabilisateur important pour les ménages modestes qui remplissent les conditions pour en bénéficier. Le précédent Gouvernement était d'ailleurs revenu sur leur suppression dans le cadre de la loi de finances pour 2016.
Le groupe de travail de la commission des finances du Sénat sur le financement et la fiscalité du logement avait également mis l'accent sur le fait que le coût de l'hypothèque ou du privilège de prêteur de deniers (qui ne peut couvrir que le prix d'achat d'un bien construit ou d'un terrain) demeurait très élevé en France , comparé notamment à d'autres pays européens, et pouvait constituer un frein à l'accession à la propriété .
Or, ce mécanisme de garantie peut principalement être utilisé par les ménages modestes qui ne parviennent pas à obtenir de cautionnement par un établissement financier .
L'hypothèque constituerait ainsi le mécanisme de garantie le plus onéreux . Cela s'explique par le fait qu'elle impose de recourir à un acte notarié (même si les tarifs des notaires ont pu être récemment réduits) et que s'y appliquent également la taxe de publicité foncière et la contribution de sécurité immobilière. Le privilège de prêteur de deniers reste un peu moins couteux car il est dispensé de taxe de publicité foncière. En outre, ces deux dispositifs de garantie nécessitent, pour s'en libérer, de procéder à une mainlevée qui constitue de nouveau un acte notarié et génère donc des frais.
Une réforme du régime de l'hypothèque mériterait donc d'être étudiée afin d'en réduire le coût. L'Institut Montaigne, dans son rapport sur la politique du logement de juillet 2015, avait lui-même soulevé ces difficultés et proposé une telle réforme 64 ( * ) .
Pour faciliter l'accession à la propriété des ménages modestes, il pourrait encore être envisagé de renforcer la garantie de l'État des prêts d'accession sociale (PAS), en augmentant sa part de prise en charge des sinistres enregistrés dans le cadre du Fonds de garantie de l'accession sociale (FGAS) . Celui-ci a été institué pour qu'une garantie publique permette aux ménages modestes d'accéder à l'emprunt.
Ainsi, alors que les pertes sur les prêts garantis au titre du FGAS sont couvertes à 50 % par l'État (les autres 50 % l'étant par le prêteur), elles pourraient désormais l'être à hauteur de 80 % .
Une telle évolution favoriserait le recours à ce fonds, en permettant d'abaisser la pondération en fonds propres attachée à ces prêts hypothécaires, ce qui serait bienvenu compte tenu du durcissement des règles prudentielles applicables.
D'après les chiffrages transmis par le Crédit foncier, cette augmentation de la part des sinistres couverts par l'État engendrerait une dépense supplémentaire de 13 millions d'euros par an, à rapporter toutefois aux plus de 70 000 opérations d'accession sociale sécurisées par an 65 ( * ) et à l'encours net de 50 milliards d'euros du FGAS (soit environ 6 % de l'encours total des crédits immobiliers en France) 66 ( * ) .
Enfin, il pourrait également être envisagé de modifier les règles applicables en termes de droits de mutation à titre gratuit .
Si les transferts familiaux sont susceptibles de jouer un rôle important pour faciliter l'accession à la propriété, ainsi que cela a été précédemment rappelé, l'héritage survient le plus souvent tardivement , après le décès du second parent. L'âge moyen auquel on hérite a ainsi reculé de huit ans depuis 1980 et atteint désormais 50 ans 67 ( * ) .
À cet âge, le patrimoine immobilier est le plus souvent déjà constitué : l'héritage ne peut alors pas jouer son rôle pour faciliter l'accès à la propriété.
Afin de permettre aux jeunes ménages d'accéder plus facilement à la propriété, il serait donc opportun de favoriser la circulation anticipée du patrimoine entre les générations .
À cette fin, il pourrait être décidé d'encourager fiscalement la pratique de la donation des grands-parents vers les petits-enfants , sans remettre en cause le système protecteur de la réserve héréditaire. Cette évolution pourrait par exemple prendre la forme d'une augmentation du montant de l'abattement sur les donations faites aux petits-enfants, actuellement fixé à 31 865 euros, contre 100 000 euros en ligne directe.
* 64 Institut Montaigne, « Politique du logement : faire sauter les verrous », juillet 2015.
* 65 Bilan de l'activité du FGAS pour la génération 2016, par la Société de gestion des financements et de la garantie de l'accession sociale à la propriété (SGFGAS).
* 66 Chiffres de 2015, d'après l'étude de François de Ricolfis, directeur général de la SGFGAS sur « Le fonds de garantie à l'accession sociale (FGAS) », Observateur de l'immobilier, janvier 2017.
* 67 France Stratégie, « Peut-on éviter une société d'héritiers ? », La note d'analyse, n° 51, janvier 2017.