B. RÉALISATIONS ET PROJETS
1. La création d'un réseau international pour la gestion de l'eau sur le plateau des Guyanes (Guyane)
Du 23 au 25 octobre 2013 s'est tenu à Cayenne un colloque international sur les modalités de coopération transfrontalière en matière de développement durable entre les pays du plateau des Guyanes (Brésil, Guyane, Suriname, Guyana, Venezuela, Colombie). Il avait notamment pour objectif d'identifier au niveau régional les problèmes de disponibilité (quantité, accessibilité) et de qualité (pollutions et assainissement) de la ressource en eau, les enjeux de préservation des milieux aquatiques, ainsi que les coopérations potentielles à mettre en oeuvre pour faciliter sa gestion. Cet événement, qui a permis aux participants de partager leurs expertises et de mieux appréhender leurs cadres institutionnels, légaux et réglementaires respectifs pour la gestion de l'eau, a fait émerger un réseau, le Water Views and Information Network in the Guiana Shield (WAVINGS). Un portail Internet ( www.guianashield.org/wavings/ ) est hébergé par le Guiana Shield Facility , qui est un organisme de financement géré par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et destiné à soutenir des projets de conservation des écosystèmes et de développement durable dans les pays du plateau des Guyanes. Sur la période 2015-2017, les axes de travail sont les suivants : - croisement de l'expertise des services hydrologiques des différents pays du plateau des Guyanes ; - étude de préfiguration de la création d'un service hydrologique régional à l'échelle du plateau des Guyanes ; - création du service et intégration au système World Hydrological Cycle Observing System (WHYCOS), programme de l'Organisation météorologique internationale (OMI). |
Sources : DEAL Guyane - Guiana Shield Facility
2. Le réservoir d'Ouaboudé (Nouvelle-Calédonie)
Le réservoir d'Ouaboudé est un ouvrage majeur situé à proximité de l'aéroport de Nouméa. Il a été conçu comme un ouvrage de secours en cas d'épisodes pluvieux forts qui demandent de gérer une variation très importante de la turbidité. Ce projet a été réalisé à la demande du Grand Nouméa. Il comprend deux unités d'une capacité de 4 000 m 3 situées en surplomb, entre la station du Mont Té et la rivière Tontouta, où sont utilisés 8 à 10 puits de forage. La fréquence d'utilisation du réservoir demeure variable par construction, puisqu'il s'agit d'un ouvrage de secours, mais elle doit croître, dans des proportions difficilement prévisibles, avec le changement climatique. Il a fallu tenir compte de ce caractère aléatoire au moment d'estimer a priori les risques et les coûts à la fois pour la construction et l'entretien. La concession a été récemment révisée pour permettre une clarification des rôles : la collectivité territoriale récupère l'ouvrage et porte l'investissement, la Calédonienne des eaux récupère l'exploitation. De nouveaux outils d'aide à la décision faciliteront la construction des prochains ouvrages. Le Programme hydrologique international (PHI) de l'Unesco permet depuis 2013 de décrire l'état actuel des aquifères de la Nouvelle-Calédonie et de fournir des projections sur vingt ans, dans le cadre d'une étude globale concernant 43 petits pays insulaires en développement. Une cartographie est prévue, de même que des schémas d'utilisation de la ressource en eau souterraine sur le long terme. |
Sources : Calédonienne des eaux - Suez - Ministère des outre-mer
3. L'assainissement des eaux usées par filtration sur roseaux (Martinique)
Le projet ATTENTIVE (Assainissement des eaux usées adaptées au contexte tropical par traitements extensifs utilisant des végétaux) vise à développer des stations écologiques innovantes, adaptées au climat et au contexte économique et social, et à mettre en place les conditions de généralisation de ces filières en autonomie. Il utilise les recherches menées par l'équipe Epure de l'Institut national de recherche en sciences et technologie pour l'environnement et l'agriculture (Irstea) à Lyon qui travaille depuis de nombreuses années sur les petites collectivités en milieu rural et le développement des filières de traitement extensives. L'Irstea, dont 70 % des recherches menées concernent l'eau, en particulier la bio-indication (travaux à partir de diatomées et de macrophytes) et l'adaptation des systèmes d'épuration, est à l'origine du système français de filtres plantés de roseaux. Ce traitement optimise le cycle naturel d'épuration de l'eau. Il consiste à faire circuler de manière gravitaire les eaux brutes domestiques à travers des bassins successifs dans lesquels un mélange de minéraux plantés de végétaux permet le traitement des eaux usées. Par construction, ces dispositifs sont économes en énergie et permettent également de limiter les rejets azotés en milieu naturel. Face aux problématiques d'assainissement des petites et moyennes collectivités des outre-mer, le projet ATTENTIVE doit permettre de valider des dispositifs adaptés au contexte tropical. Il permet, à partir de suivi à l'échelle pilote et en taille réelle, de diffuser des règles de dimensionnement avec les règles de gestion associées et de développer localement une expertise forte aussi bien en termes de construction que d'appui technique. Trois installations (deux en Martinique et une en Guadeloupe) sont aujourd'hui en phase de test et fonctionnent de manière satisfaisante. Elles sont 2,5 fois plus compactes que les installations similaires dans l'Hexagone, ce qui est particulièrement important sur des îles exiguës. Les premières analyses relatives à leur efficacité spécifique au contexte tropical, déjà prometteuses, permettent d'être optimiste sur la généralisation de ces installations de traitement. Ce projet est cofinancé à hauteur de 40 % par l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (Onema) dans le cadre de la solidarité interbassin. Il a été récompensé en 2014 par le grand prix national du génie écologique, porté par le ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. |
Sources : DEAL Martinique - Onema
4. La station d'eau potable de Matiti (Guyane)
La Guyane connaît une augmentation très forte de la population, de l'ordre de +3 % par an. Cette croissance démographique est notamment remarquable dans l'Ouest guyanais, la commune de Saint-Laurent du Maroni connaissant un rythme d'expansion de +8 % par an. Cette situation entraîne une hausse rapide et intense des besoins en eau, qu'il faut parvenir à satisfaire malgré de fortes contraintes naturelles, au premier rang desquelles le biseau salé du Maroni. Le changement climatique provoque l'élévation du niveau de la mer de 3,5 mm par an. Sur la surface très plane que constitue le rivage guyanais, son impact est très net. En outre, des saisons sèches plus marquées conduisent au tarissement relatif du débit des fleuves. Conjugué avec les projets de barrage sur le Maroni au Suriname pour le développement de l'agriculture, le changement climatique augmente très fortement le risque de salinisation des prises d'eau dans le bassin du Maroni. Il a donc été nécessaire de prendre en compte le facteur climatique dans la construction de l'usine d'eau potable de Matiti. Pour sécuriser la ressource en évitant la salinisation, l'ouvrage a été remonté de 15 km en amont sur le Maroni. L'opération a duré six ans. Le financement des investissements est venu de subventions publiques (État : 12 millions euros, Feder : 7,5 millions et région : 2,3 millions), auxquelles s'ajoute un emprunt de 12,3 millions auprès de la Caisse des dépôts et consignations. |
Sources : Société guyanaise des eaux - Suez
5. Osmosun : le couplage de l'énergie solaire et du dessalement (Polynésie française)
Suez s'appuie sur l'expertise de la société Mascara-NT pour développer actuellement un projet de production d'eau potable par osmose inverse avec désinfection au fil du soleil. La société Mascara-NT a, en effet, développé le couplage de l'osmose inverse et du photovoltaïque, avec une totale autonomie à l'égard des énergies fossiles. La production varie avec l'intensité solaire captée et la production est assurée sans stockage d'énergie. Cette approche technologique très innovante doit être désormais testée sur sites réels pour répondre efficacement aux attentes des collectivités isolées des zones côtières arides et insulaires. Est d'ores et déjà prévue l'installation d'un démonstrateur d'une capacité de production de 80 m 3 par jour à Bora Bora où la filiale polynésienne de Suez exploite déjà deux unités traditionnelles de dessalement par osmose inverse utilisant l'énergie électrique. Ce sera le premier site permettant de valider les performances sur le terrain, avant d'installer l'unité de production sur l'île voisine de Maupiti, en conditions réelles d'autonomie énergétique et d'exploitation. |
Sources : Suez - Daniel Villessot (colloque Entreprises et dynamiques sectorielles du Pacifique, Sénat, 25 juin 2015).
6. Le couplage de l'incinération des déchets et du dessalement (St-Barthélemy)
Les ressources en eau sur l'île de Saint-Barthélemy sont très limitées et la consommation humaine est satisfaite par le dessalement d'eau de mer. Les techniques utilisées permettent d'anticiper la croissance de la consommation d'eau. Si la consommation est aujourd'hui d'environ 730 000 m 3 par an, elle n'était en effet que de 480 000 m 3 il y a dix ans et de 300 000 m 3 il y a quinze ans. Après l'utilisation passée de la technique de compression mécanique, la production est désormais réalisée par deux procédés complémentaires et différents : l'osmose inverse et le dessalement thermique appelé Multi-Effect Distillation (MED). L'unité MED est couplée à l'usine d'incinération d'ordures ménagères, qui lui assure sa source d'énergie principale, c'est-à-dire la production de vapeur. Cette technique, particulièrement innovante, est très économe en utilisation d'énergie fossile et permet simultanément une valorisation du traitement des déchets. Saint-Barthélemy a été la première île à utiliser ce procédé novateur et respectueux de l'environnement. |
Sources : Déplacement de la mission à Saint-Barthélemy en juillet 2015 - Tiru - SIDEM Saint-Barthélemy Veolia Water