B. LA FONTE DE L'INLANDSIS GROENLANDAIS : DANGER POUR LA PLANÈTE ET OPPORTUNITÉ POUR LE GROENLAND ?

Comme nous alerte le GIEC, « le niveau mondial des mers continuera à s'élever au cours du XXI e siècle » et « il est très probable que cette élévation se produise à un rythme plus rapide que celui observé entre 1971 et 2010, en raison du réchauffement accru de l'océan et de l'augmentation de perte de masse des glaciers et des nappes glaciaires ». Et les experts d'ajouter avec un niveau de confiance élevé : « l'augmentation de la fonte superficielle de la calotte du Groenland dominera l'augmentation des précipitations neigeuses, entraînant une contribution positive au niveau futur des mers » 5 ( * ) .

Or, c'est bien la fonte de la glace d'eau douce qui fait monter le niveau des océans, et non la fonte de la banquise d'eau de mer. Si près de 70 % des réserves d'eau douce sont dans l'Antarctique, la fonte des 10 % que recèle l'inlandsis groenlandais aura un impact certain sur le niveau des mers.

Cela n'est pas sans danger pour la France. Une étude réalisée sur la France métropolitaine montre toutefois que les effets de la montée des eaux semblent devoir être limités sur l'ensemble du littoral d'ici à la fin du siècle : 2 000 hectares seraient concernés par l'érosion et 36 000 hectares par la submersion, soit, au total, 0,07 % de la superficie de la France. Cela concerne principalement les estuaires et les deltas et notamment la Camargue.

En revanche, les territoires d'outre-mer seront plus exposés. Le relief et l'altitude moyenne de Saint-Pierre-et-Miquelon, de la Martinique, de la Guadeloupe, de La Réunion, de Mayotte et de la Nouvelle-Calédonie devrait leur permettre de ne pas être inquiétées. La mangrove et la dispersion des eaux amazoniennes devraient permettre à la Guyane d'être relativement préservée. Tel n'est pas le cas de la Polynésie française et de ses atolls, appelés à disparaître sous la montée des eaux.

Cet exemple sensible amène à préciser un point. L'Arctique est bien la première victime du réchauffement climatique en raison de l'augmentation plus importante des températures qui l'affecte. Mais il n'est pas menacé de disparition par la montée des eaux comme peuvent l'être des îles du Pacifique ou certains littoraux. Pourtant, c'est bien la fonte des glaces d'eau douce qui entraînera l'augmentation du niveau des eaux, ce qui prouve que la fonte de l'inlandsis groenlandais est bien un problème mondial.

Pour le Groenland, le recul de la glace est à la fois une transformation exceptionnelle de son environnement et une opportunité de pouvoir accéder aux ressources que contiennent sol et sous-sol . En effet, en fondant, la glace du Groenland permet certains mois seulement par an de cultiver la terre, d'exploiter des gisements miniers et d'hydrocarbures. Ce qui était impossible devient possible. Du moins, en théorie.

À cela, on peut ajouter le fait que certaines espèces de poissons pourraient migrer dans les eaux groenlandaises comme cela s'est déjà passé dans les eaux islandaises. Toujours en mer, la fonte de la banquise estivale qui pourrait faire de l'Arctique une troisième route maritime commerciale entre est et ouest ferait du Groenland une étape stratégique. Et ce d'autant plus, dans le cas d'une route passant directement par le pôle nord libre des glaces, ce que le GIEC n'exclue pas : « un océan arctique presque sans glace en septembre avant le milieu du siècle est probable ».

Si l'ensemble de ces transformations devenait réalité, le Groenland serait plongé dans la mondialisation encore plus vite et encore plus fortement qu'il ne l'est actuellement. Sera-t-il en mesure de faire face ?


* 5 GIEC, 201 3: Résumé à l'intention des décideurs, Changements climatiques 2013: Les éléments scientifiques. Contribution du Groupe de travail I au cinquième Rapport d'évaluation du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat [sous la direction de Stocker, T.F., D. Qin, G.-K. Plattner, M. Tignor, S. K. Allen, J. Boschung, A. Nauels, Y. Xia, V. Bex et P.M. Midgley]. Cambridge University Press, Cambridge, Royaume-Uni et New York (État de New York), États-Unis d'Amérique.

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