B. UNE TENDANCE AU SAUPOUDRAGE ET À L'INEFFICACITÉ
1. Un ciblage insuffisant conduisant à un manque de cohérence
La Cour des comptes constate que dans un contexte d'enveloppes financières en baisse, l'analyse sectorielle reflète des insuffisances dans la fixation des priorités et dans la préparation des projets .
Les volets territoriaux présentent, en particulier, un contenu d'une grande diversité , ce qui ne permet pas d'en dégager de véritables lignes directrices.
Comme dans les générations précédentes de CPER, des phénomènes de saupoudrage des crédits et d' inscription de petites opérations , d'un montant financier peu élevé, sont relevés. Ce constat est d'autant plus frappant sur la génération de CPER 2007-2013 que les financements y sont pour la première fois en recul.
2. Un impact limité sur le développement des territoires
La Cour des comptes relève un faible effet péréquateur des CPER , dont ce n'est d'ailleurs pas, a priori , la vocation. L'effort financier de l'État semble en fait dépendre davantage des thématiques contractualisées dans chacun des CPER que d'une volonté de péréquation entre les régions.
Concernant la dimension territoriale des CPER, l'enquête a fait apparaître l' impact limité du volet territorial sur le développement des zones rurales. Et il est, en outre, difficile d'apprécier l'efficacité des contrats interrégionaux 12 ( * ) compte tenu de leur faible taux d'exécution.
Malgré toutes ces limites, les autorités régionales voient dans les CPER, d'après la Cour des comptes, un dispositif indispensable , dont le principal mérite demeure, à leurs yeux, à travers la mobilisation des acteurs, l'élaboration d'une stratégie partenariale et pluriannuelle , en lien avec les fonds européens. Ces contrats illustreraient, conformément à l'objectif d'une République unitaire décentralisée, l'association entre l'État et les régions pour le développement du territoire. Ils autorisent et sécurisent le financement de projets majeurs qui, en leur absence, peineraient à émerger.
Dans une période de raréfaction des ressources publiques, une définition mieux affirmée des priorités est nécessaire, afin que chaque contrat se concentre, dans le cadre d'une stratégie nationale prédéfinie , sur les priorités réelles des régions et non sur une liste de projets sans effet structurant.
C. UN SUIVI DÉFAILLANT
1. Des tentatives d'amélioration inabouties
La Cour des comptes relève que le cadre normatif fixé en 2007 cherchait à rationaliser les outils et les instances de pilotage des contrats . Dans les faits, le pilotage s'est pourtant avéré largement informel et parcellaire.
Le système d'information Présage , censé constituer la clef de voûte de la gouvernance et l'outil de suivi partagé de l'exécution des contrats, s'est révélé très insuffisant pour des raisons qui tiennent à la fois à sa conception et à son manque d'appropriation par les acteurs, en particulier régionaux.
Conçu pour le suivi des crédits européens, il ne donne qu'une image incomplète de ceux relevant de l'État et une vision très déformée de ceux des régions. La majorité de celles-ci, dotées de leurs propres logiciels, ne l'utilisent d'ailleurs pas.
2. Un taux d'exécution difficile à apprécier
Le taux d'exécution des contrats reste éloigné des objectifs définis initialement .
Selon les données fournies par Présage, avec les limites qui s'y attachent, le taux d'engagement constaté au 25 mai 2014 serait de 64,4 % des opérations initialement programmées soit 17 milliards d'euros sur un total de 26,4 milliards d'euros , avec une variation notable de ce taux selon la collectivité considérée : 75 % pour l'État 13 ( * ) , 54,5 % pour les régions, et 41,1 % pour les autres collectivités.
Les paiements effectifs à la même date atteindraient 60,5 % des opérations engagées, soit 10,3 milliards d'euros sur un total de 17 milliards d'euros .
Destiné à se substituer à Présage, un nouveau logiciel , dénommé Synergie , devrait être mis en place. La Cour des comptes, sans remettre en cause l'intérêt de ce projet, souligne son coût élevé , de l'ordre de 55 millions d'euros, ainsi que les nombreuses incertitudes qui entourent sa réalisation.
Par ailleurs, l'évaluation et la révision à mi-parcours des CPER, prévues dès l'origine, sont restées jusqu'ici techniques et limitées, alors qu'elles devraient être stratégiques et globales .
* 12 Ces contrats, issus de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, sont des documents qui traduisent en projets les orientations des schémas interrégionaux, documents stratégiques à long terme rendus obligatoires par la même loi. Il s'agit de favoriser les synergies entre régions autour de problématiques communes. Il existe ainsi, en 2014, onze contrats interrégionaux, dont cinq pour les massifs et six pour les bassins fluviaux.
* 13 D'après le CGET, le taux d'exécution des crédits de l'État devrait atteindre 87,5 % à la fin de l'année 2014.