VI. L'ACTUALITÉ DU CONSEIL DE L'EUROPE EN DÉBAT

A. RAPPORT D'ACTIVITÉ DU BUREAU ET DE LA COMMISSION PERMANENTE

L'ouverture de chaque partie de session est traditionnellement consacrée à l'examen du rapport d'activité du Bureau et de la Commission permanente.

Le rapporteur, M. Jordi Xuclà (Espagne - ADLE), a introduit son propos en rappelant le caractère inacceptable du refus d'accorder un visa à M. René Rouquet 3 ( * ) , président de la délégation française, par les autorités d'Azerbaïdjan, qui président actuellement le Comité des Ministres. Il a ensuite évoqué l'activité de l'Assemblée au cours de la dernière période qui s'est concentrée une nouvelle fois sur la situation en Ukraine. Il a rappelé que l'annexion de la Crimée constituait clairement une violation du droit international, mais a invité la délégation russe au dialogue. Depuis la résolution d'avril la privant de toute participation au vote, celle-ci a en effet décidé de ne plus participer à aucun des travaux de l'Assemblée, jusqu'à ce qu'elle recouvre tous les droits dont elle disposait.

L'Assemblée a ainsi, durant cette période, organisé des missions afin d'observer le déroulement des élections en Ukraine mais aussi dans « l'ex-République yougoslave de Macédoine ». M. Jordi Xuclà a aussi évoqué les prochaines missions d'observation électorale qui se tiendront le 10 août en Turquie, puis en Bosnie-Herzégovine, et, en novembre, en Moldavie.

M. René Rouquet (Val-de-Marne - SRC) , président de la délégation française, est revenu sur le refus de visa des autorités d'Azerbaïdjan qui l'ont empêché d'assister à la dernière réunion de Bureau et de la Commission permanente à Bakou. Il a déclaré qu'il s'agissait là d'une grave violation des principes de base du fonctionnement du Conseil de l'Europe qui ne doit pas constituer un précédent. Il a ensuite évoqué sa participation à la mission d'observation des élections présidentielles à Kiev et sa région. Il a fait part de ses propres observations sur le terrain en soulignant plusieurs points significatifs : la participation, le professionnalisme dans l'organisation des bureaux de vote et, enfin, la forte présence de la jeunesse ukrainienne, que ce soit comme électeurs ou dans les équipes d'organisateurs, signe d'une conscience politique importante. M. René Rouquet a conclu en rappelant que le Président Porochenko a désormais plusieurs défis à relever. Le premier concerne la sécurisation du Donbass, le deuxième le changement du système, c'est-à-dire la reconstruction politique du pays, et la lutte contre la corruption.

Mme Maryvonne Blondin (Finistère - SOC) , membre elle-aussi de la mission d'observation de l'élection présidentielle, a rappelé que ces élections constituaient un enjeu considérable, alors que le pays était désorganisé, amputé d'une partie de son territoire après l'annexion de la Crimée par la Russie et en proie à des violences sécessionnistes à l'Est, encouragées, si ce n'est initiées, par une puissance étrangère. Dans ces conditions, la nette victoire, dès le premier tour, de M. Petro Porochenko représente une indéniable victoire pour le peuple ukrainien et un signe positif. L'Ukraine, contrairement à plusieurs États issus de l'Union soviétique, est une véritable démocratie. La vitalité de la démocratie ukrainienne a ainsi mis en échec l'opération de déstabilisation de l'Ukraine menée par la Russie. Bien sûr, la situation est loin d'être réglée dans l'Est du pays et il est sans doute trop tôt pour affirmer que l'Ukraine est sortie de la crise, mais les résultats de l'élection présidentielle constituent indéniablement la meilleure base pour un nouveau départ.

Mme Bernadette Bourzai (Corrèze - SOC) a également participé, du 22 au 26 mai dernier, à l'observation des élections présidentielles en Ukraine, plus précisément à Kiev et dans sa région. Elle a tout particulièrement admiré la manière dont les citoyens ukrainiens se sont investis pour organiser l'élection comme pour participer au scrutin qui contraste avec l'absentéisme constaté le même jour lors des élections européennes, en particulier en France. Elle a cependant noté que l'élection avait été fortement perturbée dans la région du Donbass, à peine 20 % des bureaux de vote y étant en réalité ouverts du fait des menaces et intimidations des séparatistes. Elle a estimé que le fait que M. Petro Porochenko soit arrivé en tête aussi bien dans les régions de l'Ouest que dans celles de l'Est était une première étape sur le chemin de la réconciliation entre ces deux régions. Elle a ajouté que si le devenir des relations entre la Russie et l'Ukraine est l'un des éléments de sortie de crise, le reste de la communauté internationale, en particulier l'Europe, a aussi un rôle à jouer, M. Petro Porochenko ayant confirmé, dès son élection, sa volonté d'intégration européenne.

M. Pierre-Yves Le Borgn' (Français établis hors de France - SOC) a évoqué la mission d'observation de l'élection présidentielle et les élections législatives anticipées des 13 et 27 avril derniers en Macédoine. De retour lui-même de ce pays, il a pu y mesurer l'ampleur de l'impasse politique actuelle à Skopje et le profond défi qui se pose à lui en termes de démocratie et d'État de droit. Il a souhaité rappeler que la démocratie ne se résume pas à l'organisation d'élections où se présenteraient une pluralité de candidats et de formations politiques, mais que c'est d'abord un état d'esprit et des garanties concourant tous les jours à un débat serein, contradictoire et respectueux des options de chacun. Or, il a noté à ce sujet que le parti au pouvoir avait mobilisé les moyens de l'État au service de sa campagne électorale, que les fonctionnaires avaient fait l'objet d'intimidations pour assister aux manifestations et même d'un chantage à l'emploi pour eux, leur famille et leurs proches. La démocratie repose par ailleurs sur une presse libre, indépendante et impertinente. M. Pierre-Yves Le Borgn' a indiqué que, si la Macédoine ne manque pas de médias, la plupart d'entre eux sont contrôlés par le parti au pouvoir et le gouvernement en est le premier annonceur. Il en découle une présentation biaisée des débats, favorable à ce parti et à charge contre l'opposition, ainsi qu'une absence d'audace dans l'analyse, quand ce n'est pas une large autocensure. M. Pierre-Yves Le Borgn' a conclu en regrettant la décision des députés de l'opposition élus le 27 avril de démissionner, la place de l'opposition étant au Parlement. Il a conclu son propos en rappelant que le Conseil de l'Europe, son Assemblée parlementaire et la Commission de Venise seraient aux côtés de la Macédoine pour la reconquête des libertés et de l'État de droit le jour où elle le décidera.


* 3 Les autorités azerbaïdjanaises ont délivré un visa à M René Rouquet le 8 avril puis une semaine avant le Bureau de Bakou de mai, elles ont envoyé un courrier à M René rouquet lui indiquant que son visa lui était retiré parce qu'il s'était rendu au Haut-Karabagh, information qu'il avait donnée dans sa demande de visa.

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