D. L'ARCTIQUE, ENJEU STRATÉGIQUE, RESTE-T-IL UN ENJEU MILITAIRE ?
Richesses naturelles, potentielles nouvelles routes commerciales, revendications territoriales, transformation d'une région qui ne peut que se développer davantage... L'Arctique a tous les attributs d'un des grands enjeux stratégiques du XXI e siècle. Mais constitue-t-il pour autant le théâtre d'un nouveau conflit militaire ?
Certes la valeur militaire de l'Arctique reste évidente pour des raisons géographiques : la région se situe à la fois entre l'Amérique du Nord et la Russie, d'une part, et entre les États-Unis et l'Asie, d'autre part. Pour l'aviation américaine, une base en Alaska est extrêmement pratique pour intervenir, car la distance vers la Chine, le Japon et les deux Corée sont plus courtes que celle partant de la côte ouest.
Durant la Seconde guerre mondiale, l'Arctique était le plus court chemin pour permettre aux convois de navires américains de ravitailler l'URSS engagée dans le conflit armé avec les nazis, via les ports de Mourmansk et d'Arkhangelsk. Durant la Guerre froide, il l'est resté, mais la banquise constituait désormais un abri très prisé des sous-marins pour pouvoir aller espionner l'adversaire, voire s'approcher suffisamment pour pouvoir envoyer des ogives nucléaires. Ce qui a entraîné la multiplication des systèmes de surveillance, d'alerte et autres dans la région. Plus proche de nous, l'Arctique est devenu une pièce essentielle du réseau nécessaire aux défenses anti-missiles et il n'y aurait pas eu « Guerre des étoiles » sans l'Arctique.
Pourtant , le risque d'un conflit armé au Pôle Nord reste faible .
En effet, les conditions météorologiques géographiques (distance, glace) ne se prêtent guère à des affrontements majeurs. Et ce d'autant plus avec une cartographie incomplète. De plus, malgré la volonté de certaines puissances d'augmenter leurs troupes dans la région, les capacités restent assez faibles. Les conflits concernant les revendications territoriales existent entre puissances alliées. On voit mal Washington et Ottawa se déclarer la guerre pour une portion de la mer de Beaufort !
D'une manière plus générale, la coopération pacifique pour résoudre les conflits est la préférence en Arctique, même entre puissances non alliées. Aucun accident vraiment sérieux n'a eu lieu en Arctique depuis la fin de la Guerre froide. Comme le résument les norvégiens : « High north, low tension » , c'est à dire « Dans le Grand nord, il y a peu de tensions ». Il y a donc très peu de raisons que l'Arctique devienne le lieu d'un conflit militaire au XXI e siècle.