ANNEXE II :
ACTES DE LA
TABLE RONDE DU 22 FEVRIER 2013 SUR
LE DISPOSITIF RÉGIONAL D'APPUI AUX
EXPORTATIONS
Introduction
M. Christian Bourquin , rapporteur spécial . - Mesdames et Messieurs, mon cher collègue, outre mes fonctions de président de notre région Languedoc-Roussillon, c'est plus particulièrement en ma qualité de sénateur que j'ai le plaisir de vous accueillir aujourd'hui.
En effet, la commission des finances du Sénat m'a confié le soin de conduire une mission d'information sur le dispositif public de soutien aux exportations agroalimentaires avec mon collègue André Ferrand, co-rapporteur des crédits de la mission « Economie » et qui me fait l'honneur de sa présence, ainsi que nos collègues sénateurs Yannick Botrel et Joël Bourdin, co-rapporteurs des crédits de la mission « Agriculture », qui n'ont pu venir aujourd'hui.
Cette mission a pour objet de dresser un diagnostic de la situation à l'export des industries agroalimentaires françaises et d'évaluer l'action publique de l'État en la matière afin de porter une appréciation sur l'utilisation des crédits budgétaires et l'efficience du dispositif. Nous avons engagé un cycle d'auditions et de visites depuis maintenant un an. André Ferrand s'est tout particulièrement attelé au volet international du réseau d'appui à nos exportations, dont il est un spécialiste reconnu, et a d'ores et déjà versé au débat des propositions pour renforcer l'efficacité de notre « diplomatie économique ».
Pour ma part, j'ai souhaité axer mes travaux sur l'articulation des dispositifs publics nationaux avec l'action régionale d'appui aux exportations agroalimentaires. En effet, les régions participent très activement au développement économique et à l'internationalisation des entreprises. C'est pourquoi, sans que la mission parlementaire que je mène porte spécifiquement sur la politique des régions, respectant en cela la libre administration des collectivités territoriales, je me pose, comme beaucoup d'entre vous, de nombreuses questions sur la manière de rendre encore plus performante l'offre agroalimentaire française à l'étranger. Voilà le cadre de travail que je vous propose.
À partir de cette thématique, des questions se posent. D'abord, notre système est-il optimal ? Quels axes d'amélioration seraient souhaitables pour renforcer la coordination avec l'ensemble des acteurs publics et privés qu'il s'agisse des opérateurs de l'État, des réseaux consulaires, des filières, des interprofessions, et des entreprises ?
Quelles sont les synergies développées de gestion et d'optimisation de notre influence sur les marchés extérieurs ? L'articulation des dispositifs publics nationaux avec l'action régionale d'appui aux exportations agroalimentaires est-elle suffisante ? Quelles seraient les voies d'améliorations envisageables au niveau régional pour mieux faire circuler l'information entre l'aval, le marché à l'export c'est-à-dire la production agricole et agroalimentaire ?
Ces problématiques sont de la première importance car l'export est devenu un objectif majeur du redressement productif de notre pays. En 2012, le déficit commercial de notre pays s'est élevé à 67 milliards d'euros. Ce chiffre est en baisse par rapport à 2011 où il s'établissait à 74 milliards d'euros mais illustre la priorité que nous devons donner au commerce extérieur comme relais de croissance pour nos entreprises et pour l'emploi. Avec mes collègues, nous avions noté que les ventes agricoles et agroalimentaires constituaient un atout formidable pour notre agriculture et notre industrie. Avec 11,5 milliards d'euros d'excédents en 2012, il s'agit du deuxième poste excédentaire de la balance commerciale après l'aéronautique. Pour la région Languedoc-Roussillon, les produits agricoles et de l'industrie agroalimentaire constituent les deux premiers postes d'exportations, devant les produits chimiques, parfums et cosmétiques. Si la région enregistre un solde déficitaire import-export de 500 millions d'euros en matière de production agricole, la filière des fruits et légumes est très dynamique avec notamment le marché Saint-Charles international. Les produits des industries agroalimentaires dégagent un excédent commercial de 500 millions d'euros. Au total, l'agroalimentaire reste à la première place des secteurs de l'industrie manufacturière de la région.
Aussi, je tiens à remercier chacun des intervenants d'avoir accepté de venir nous aider à répondre à la question centrale qui est de savoir comment nous devons nous y prendre pour être plus performant collectivement à l'export.
Pour la bonne organisation des échanges, je vous propose que cette table ronde soit divisée en ateliers.
Un premier atelier, qui se déroulera jusqu'à 11 heures, porte sur un thème pour lequel la parole doit revenir aux acteurs principaux de l'export, c'est-à-dire les producteurs et les entreprises. Ce premier thème s'intitule « Retour d'expérience et recueil des besoins exprimés par les entreprises et opérateurs privés de l'export ». Seront appelés à s'exprimer sur ce point :
- Languedoc-Roussillon Industrie Agroalimentaire (LRIA) : Mme Brigitte Bouillut, déléguée générale
- Coop de France LR : M. Italo Pitis
- Saint Charles Export : M. Jean-Pierre Bourquin
- Foncalieu (groupe coopératif) : M. Michel Bataille
- UCCOAR- Val d'Orbieu : M. Bertrand Girard
- Arcadie : M. Bernard Kimel
- M. Fabrice Rieu : vice Président vins du Roussillon, négociant
- Cémoi, M. Lionel Dufau, directeur général
- L'Olivie : M. Pierre Vialla
- Fromagerie de Hyelvas : Mme Florence Pratlong
- ARTERRIS : MM. Christian Reclus et Hervé Cifaï, directeurs.
La seconde séquence, de 11 heures à 12 heures 30, portera sur le thème suivant « Synergie des acteurs institutionnels régionaux, coordination entre offre régionale et stratégies aux niveaux national et international ». Les orateurs seront :
- DRAAF : MM. Pascal Augier, directeur, et Matthieu Grégory, directeur adjoint
- DIRECCTE : M. Pierre Fabre, Responsable export au Pôle Entreprises - Economie - Emploi
- UBIFRANCE : MM. Benoît Tarche et Marc Fortier, directeur inter-régional et de Mme Claudia Lelong
- Banque publique d'investissement : Mme Françoise Guétron-Gouaze, directrice régionale d'OSEO
- SOPEXA : M. Philippe Nauche, directeur marketing et stratégie
- Douanes : MM. Alain Bar, Directeur Interrégional des Douanes, et Laurent HARAZIN, chef du pôle action économique de la direction régionale
- Sud de France développement : M. François Fourier, directeur
- CCIR : M. Fabien Leroux, directeur
- ERAI (Région Rhône-Alpes) : M. Pierre-Jean Baillot, directeur général adjoint, qui nous fait le plaisir de venir partager avec nous, à l'initiative de mon collègue André Ferrand, certaines bonnes pratiques développées en Région Rhône-Alpes.
- Pour la Chambre régionale d'agriculture : M. Givat interviendra également.
Je remercie également ma collaboratrice, Marie Tchakerian, directrice de la ruralité, de l'agriculture et de l'économie littorale, qui a oeuvré à rendre possible cette rencontre.
Comme vous le voyez, nous sommes très nombreux. Aussi, au sein de chaque séquence les intervenants pourront présenter dans une très courte intervention liminaire leurs principales observations.
Ensuite, au cours des débats, nous pourrons être amenés à vous demander des précisions. Les participants à l'autre séquence pourront également réagir à leur convenance.
M. Ferrand, souhaitez-vous indiquer les points sur lesquels vous souhaitez avoir des réponses ?
M. André Ferrand , rapporteur spécial . - Je voudrais simplement dire que je suis très heureux d'avoir la chance d'écouter une telle assemblée de responsables de ce secteur sur lequel nous travaillons. Je suis quant à moi plus au fait de notre organisation à l'étranger, et j'ai beaucoup à apprendre en ce qui concerne l'organisation en France et en particulier dans les régions. J'ai déjà quand même un certain a priori, celui de penser qu'il est très important de simplifier le dispositif en régions. Comme nous souhaiterions que notre rapport serve à quelque chose, il nous faut dégager des pistes aussi concrètes que possible, et c'est dans cet esprit-là que je souhaite vous entendre. Je voudrais apporter une précision à ce que Christian Bourquin a dit : si on a un excédent en matière agroalimentaire, on le doit aux vins et spiritueux. Hors vins et spiritueux, nous importons plus que nous exportons. C'est un point qu'il faut garder présent à l'esprit. En essayant de trouver des voies pour améliorer la situation de notre balance commerciale sur le plan agroalimentaire, cela nous amène forcément à travailler au-delà du dispositif d'appui aux exportations, sur notre organisation, et notre productivité.
Premier atelier : « Retour d'expérience et recueil des besoins exprimés par les entreprises et opérateurs privés de l'export »
M. Christian Bourquin , rapporteur spécial . - Sur les 67 milliards d'euros de déficit, 42 millions d'euros sont liés aux énergies. Nous sommes donc là pour travailler sur les 23 millions d'euros restant. Pour ouvrir la première séquence de notre table ronde, je donne la parole à Brigitte Bouillut, déléguée générale de Languedoc-Roussillon Industrie Agroalimentaire (LRIA), pour nous exprimer très concrètement les attentes des entreprises vis-à-vis du dispositif public de soutien aux exportations agroalimentaires.
Mme Brigitte Bouillut, déléguée générale de Languedoc-Roussillon Industrie Alimentaire (LRIA) . - Merci, monsieur le Président. Je voudrais centrer mon intervention sur le fait que le tissu agroalimentaire français et régional est constitué à 90 % de TPI et de PMI, or celles-ci rencontrent des problèmes spécifiques à l'export qui ne résident pas seulement dans la clarification de l'offre, mais aussi dans l'analyse de la demande. Pour que les choses marchent, même si l'offre de l'État et de la région est adaptée, il demeure un problème de demande. Il y a une véritable culture de l'exportation et de l'innovation à introduire dans nos entreprises. Ces TPI-PMI ont besoin d'un accompagnement en amont et en aval : en amont, tout le travail de préparation d'une TPI-PMI avant qu'elle n'aille à l'export est très important, en termes d'organisation, de positionnement dans un pays donné, indispensable pour réussir, de situation financière car vous savez que les TPI-PMI sont très fragiles financièrement. En aval, le problème réside dans le fait que beaucoup d'offres de services se focalisent sur la pénétration d'un marché alors que la vraie difficulté est d'y rester. Les investissements sont difficiles à supporter pour la taille des TPI-PMI. Il faut imaginer un accompagnement spécifique sur deux ou trois ans, en amont et en aval : comment rester dans un pays lorsque l'on a une moyenne de 22 salariés et que le patron de l'entreprise doit tout faire ?
M. Christian Reclus, directeur des activités commerciales d'ARTERRIS . - Arterris est un groupe coopératif basé dans la région. Notre activité principale est l'exportation de céréales, et nous avons fait le choix stratégique de nous associer avec un partenaire d'une autre région, le groupe Axéréale, que représente ici Hervé Cifaï, qui est par ailleurs le patron des installations portuaires dont le groupe Axéréale contrôle l'activité. Sans revenir sur le chiffre que vous avez évoqué sur le poids des céréales dans la balance extérieure, je vous rappelle que les céréales françaises représentent 10 milliards d'euros d'exportations par an, que 70 % de l'activité des exportations françaises de céréales se fait dans le bassin de la Méditerranée. A ce titre l'Algérie est le premier client de la France. En ce qui nous concerne, nous considérons, par rapport à cette clientèle et ce bassin de la Méditerranée qui sont structurellement importateurs de céréales alors que nous sommes structurellement exportateurs, qu'il faut construire des liens durables et sécuriser les débouchés de nos producteurs, et donc sécuriser l'approvisionnement de ces régions, qui sont très clairement en attente de relations pérennes avec un pays exportateur comme la France. Le premier axe majeur est donc pour nous de faire en sorte que nous sécurisions ces pays-là en les considérant comme il se doit dans nos relations diplomatiques et commerciales. Je pense que nous devons aussi intégrer plus fortement nos politiques d'exportation de céréales dans le cadre des relations internationales. Nous avons des pays concurrents, dont la stratégie est d'afficher leur politique de l'export ; je pense au Canada, qui est notre premier challenger sur les productions régionales comme le blé dur. Le Canada ne produit que pour exporter et a une vraie politique dans laquelle la préoccupation du client est au coeur du dispositif. Aujourd'hui certains États comme l'Ukraine et la Russie arrivent sur le marché en concurrence de la France. Lorsque des délégations d'acheteurs des offices publics d'Algérie, de Tunisie, d'Egypte ou du Maroc se déplacent en Ukraine ou en Russie, ces délégations sont reçues par les plus hautes instances de ces États, qui ont bien compris le caractère stratégique de cette relation. Si l'on veut soutenir ces pays socialement, il faut alimenter leur population. C'est pourquoi il faudrait trouver avec les banquiers et l'État, le moyen de sécuriser les paiements de ces flux. Certains de ces pays ont des ressources pour payer, je pense notamment à l'Algérie ; d'autres pays sont plus en difficulté et pourront faire défaut pour financer nos exportations ou sécuriser les paiements. Il s'agit d'un axe majeur pour nous. Je vous rappelle que la Méditerranée, c'est un million de tonnes d'export de produits céréaliers et un million de tonnes d'import de produits destinés à l'agriculture, qu'il s'agisse de sous-produits de l'industrie pour l'élevage ou de fertilisants. Le volume d'échanges est donc de deux millions de tonnes sur Sète et Port-La-Nouvelle. Cela nous semble important. Je rappelle simplement que la filière a fait de gros efforts en investissements, que les collectivités locales et les communautés d'agglomération ont fortement investi. Je pense au grand port de Port-La-Nouvelle et nous comptons beaucoup sur les collectivités pour nous accompagner dans notre démarche. Tous les ports aujourd'hui investissent ; il y a cinq ans, il n'y avait pas d'outils d'exportation en Mer Noire. Aujourd'hui ils ont deux fois la puissance de la France en exportations et en outils portuaires. Leur bassin de production est important, certes, mais cela veut dire qu'il faut continuer à accompagner les flux en renforçant la logistique. Nous pensons qu'il faut revenir à une politique du rail qui a perdu sa place en région. Il y a dix ans, on alimentait Port-La-Nouvelle à 80 % avec des trains depuis la région Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées, aujourd'hui le fer n'en représente plus que 12 %. Cela veut dire qu'on met des camions sur la route, et je pense qu'il n'est pas dans notre intérêt, ni économique, ni social, de continuer dans ce sens-là. Il faut trouver un moyen, avec la SNCF, de réorganiser, même si j'ai entendu récemment que la SNCF perdait de l'argent avec la division fret, il faut retrouver le moyen d'accompagner ce flux au moyen du trafic ferroviaire.
M. Christian Bourquin , rapporteur spécial . - Je vous remercie. Je passe la parole à Italo Pitis, de Coop de France Languedoc-Roussillon.
M. Italo Pitis, Coop de France Languedoc-Roussillon . - Beaucoup de choses ont déjà été dites, je vais essayer de vous faire un rapide compte-rendu. Coop de France Languedoc-Roussillon existe depuis peu. Pour vous présenter rapidement notre structure, il s'agit de la représentation unifiée des coopératives agricoles du Languedoc-Roussillon et elle a vocation à représenter l'ensemble de la coopération sur l'ensemble des métiers : par exemple Arterris est adhérent de Coop de France Languedoc-Roussillon. Brigitte Bouillut a bien souligné l'essentiel de ce qui a été évoqué lors de nos travaux, c'était la différence de taille de nos entreprises. Vous avez-vous-même évoqué, ainsi que Monsieur Ferrand, la puissance que représentait l'agroalimentaire dans nos exportations. Nous avons également la chance de représenter les entreprises coopératives du secteur viticole de notre région. Il n'empêche que nous avons, même dans ce secteur qui est très présent, des différences de taille, avec certaines entreprises qui sont des TPE. Celles-ci n'ont jamais fait d'exportations et ne savent pas par quel bout commencer. A l'inverse, nous avons quelques entreprises qui sont même des champions autour de la table, et qui savent parfaitement bien travailler à l'international. Le constat serait déjà de dire qu'on a une différence énorme, de taille, d'approche et de connaissance. Que ce soit au niveau de la coopération ou des autres entreprises qui ont participé à la préparation de ces travaux, trois grands thèmes font l'unanimité. Le premier est tout d'abord la connaissance que peuvent en avoir les écoles, les étudiants, et donc les futurs cadres de notre tissu économique. Nous pensons tous, en tout cas, c'est ce qui est ressorti, qu'il y avait sans aucun doute un déficit de connaissance. Notre ambition était de retourner de façon un peu plus forte et plus visible auprès de ces écoles, très en amont, pour leur donner envie, à la fois de venir travailler dans l'agroalimentaire, bien évidemment, mais aussi de leur dire qu'il y a une multitude de métiers, et notamment une dimension export qui est très importante, à la fois pour les entreprises, mais également pour notre balance commerciale. La connaissance et la formation sont absolument nécessaires. Il faut essayer de les structurer pour que les entreprises trouvent une réponse auprès de nos écoles en termes de formation. Comment être plus présents à l'exportation.
Le deuxième thème concerne la compétitivité, l'accompagnement et l'innovation. En général les gens ne savent pas ce qu'il y a dans le terme innovation. En effet, l'innovation est un terme assez moderne mais les gens ne savent pas ce qu'elle recouvre et imaginent qu'elle concerne la biotechnologie. Pas seulement car elle est également présente dans les structures, l'organisation des ressources humaines, etc. Nous y travaillons bien sûr, mais beaucoup d'entreprises n'y ont pas accès ou n'ont en tout cas pas la bonne démarche. On a cru comprendre qu'il y avait un projet dans la région du nom de Realis qui représente un incubateur en devenir et peut-être une réponse. Le terme de compétitivité des entreprises renvoie à la notion de fiscalité. En effet, toute société désirant s'engager dans une démarche d'export a besoin de moyens, et cela passe par la fiscalité liée à ce type d'investissement important.
Le dernier point est l'accompagnement. Je viens de citer Realis qui pourrait être une piste, un instrument de travail pour nos entreprises, mais il y a eu d'abord un consensus sur la synergie des actions, des opportunités, des travaux de différentes instances oeuvrant de façon souvent éclatée. En conclusion, comment peut-on faire pour que l'ensemble des aides, des propositions, des instances, des institutionnels et des gens compétents, puissent proposer une seule clef d'entrée aux entreprises : une démarche unique, commune et simplifiée d'accès à l'export.
M. Christian Bourquin , rapporteur spécial . - Merci, je passe maintenant la parole à M. Jean-Pierre Bourquin.
M. Jean-Pierre Bourquin, Saint-Charles Export . - Saint-Charles Export est né à la suite de manifestations agricoles contre les importations qui mettaient à mal nos productions locales. Voyant que cela ne menait à rien, on a réussi grâce au directeur départemental de l'agriculture et au préfet de l'époque à créer un groupement de PME à l'export. Celui-ci comprend les instances publiques - avec l'accompagnement de la région, du conseil général et de l'agglomération de communes - la logistique du transport, la logistique maritime, la production locale de tout le sud de la France, Coop de France et les banques. Ce groupement a été créé pour changer un peu la donne. En effet les fruits et légumes, tout comme les denrées périssables en général, sont différents des vins et des céréales où le facteur temps est moins primordial. On a voulu voir comment se passait le marché à l'export et surtout faire venir les gens pour leur montrer nos capacités. Avec ce groupement nous représentons 2,2 millions de tonnes de produits comprenant les importations, la production locale et l'ensemble des fruits et légumes de la région. En premier lieu, nous sommes allés voir Ubifrance dont les données et le cadre ne correspondaient absolument pas à notre attente, et avec le directeur, M. Lecourtier, on a trouvé un terrain d'entente. Il a accepté de nous aider dans notre démarche : mission de prospection à quatre ou cinq dans les pays de l'Est notamment et faire venir sur place nos acheteurs. Depuis la création de ce groupement en 2007, nous réalisons 57 % de chiffre d'affaires de plus à l'export, à savoir 257 millions d'euros par an. Lorsque nos acheteurs voient nos vergers, nos coopératives, notre façon de travailler, ils sont très surpris de découvrir que dans le sud de la France il y a un potentiel énorme. C'est à travers ce constat qu'on continue à démarcher, aussi bien dans tous les pays de l'Est que dans les pays scandinaves. Nos entreprises commencent à comprendre que l'export constitue un marché permanent. L'idée de réserver une partie de sa production dans ce but n'a pas été évidente mais elle fait son chemin chez les dirigeants des structures commerciales. Nous sommes en train de gagner le pari qu'on s'est fixé. J'en profite pour remercier Ubifrance d'avoir accepté le défi proposé, ainsi que la région qui a permis ces investissements car nous avions démarré sans financement, et amener sur notre territoire les acheteurs étrangers présente un coût important. En fruits, en légumes et en denrées périssables, c'est une démarche qu'il faut maintenir et faire accepter par les producteurs. Après, pour la notoriété nous participons aux salons européens spécialisés. Mais c'est une autre démarche car Perpignan ou Montpellier, en fruits ou légumes, n'évoquent rien pour le directeur d'un supermarché à Moscou !
Je souhaiterais ajouter une dernière précision à propos de la distorsion de concurrence en raison de la taxe affectée au Centre Technique Interprofessionnel des Fruits et Légumes (CTIFL). Nos acheteurs à l'export refusent de la payer et ce sont les entreprises qui la prennent totalement en charge. Cette taxe crée une distorsion non négligeable avec nos voisins espagnols par exemple. Son existence est justifiée en France puisqu'elle nous permet d'avoir un centre technique dédié, mais pour continuer à développer l'export il faudrait trouver un autre moyen de prélèvement qui ne le pénaliserait pas l'export.
M. Christian Bourquin , rapporteur spécial . - C'est la question qu'on évoquait tout à l'heure sur la fiscalité en général.
M. Jean-Pierre Bouquin. - Tout à fait, mais en plus, dans ce cas-ci elle est spécifique aux fruits et légumes.
M. Christian Bourquin , rapporteur spécial . - Je passe la parole à M. Michel Bataille.
M. Michel Bataille, Foncalieu . - Foncalieu est une union coopérative basée à Carcassonne. Elle intervient sur les quatre départements viticoles du Languedoc-Roussillon. C'est une entreprise de taille moyenne avec 52 millions d'euros de chiffre d'affaires et 80 % d'activités réalisées à l'export. Quelques points d'ordre général : on a parlé de compétitivité en matière d'innovation, je considère qu'on a toujours un problème de compétitivité coût de nos entreprises à l'export avec le risque important de faire glisser la commercialisation de produits conditionnés amenant de la valeur ajoutée vers des produits en vrac. Cette tendance est une erreur stratégique parce que la valeur ajoutée se construit, tout comme l'emploi se créée, sur le conditionnement en région, le marketing et la force commerciale qui l'accompagnent. Un exemple, le groupe anglais Asda adossé au groupe Walmart, a décidé l'année dernière d'intégrer son conditionnement au Royaume-Uni. D'autres sont en train de le suivre et immanquablement c'est de la valeur ajoutée qui va disparaître en région, éventuellement des emplois. Nous étions des fournisseurs d'Asda bouteilles, nous sommes devenus fournisseurs d'Asda vrac et ce n'est pas du tout le même chiffre d'affaires. C'est un point extrêmement important. Quant à la productivité des transports, il y a un énorme problème : actuellement un acheminement par camion vers l'Angleterre coûte aussi cher que celui par voie maritime vers la Chine. C'est un problème majeur pour nous et l'Europe.
Globalement, nos entreprises, pour exporter, ont besoin d'un renforcement de fonds propres puisque la mise en oeuvre de la loi de modernisation de l'économie (LME) il y a quelques années a été finalement négative dans la mesure où en France nous aurions à 100 % une facture sous 60 jours. Or, à l'exception de la Chine qui paie d'avance, nous livrons à l'étranger avec des paiements à 90 jours, voire 120 jours au Royaume-Uni alors que le délai de règlement de nos fournisseurs est raccourci. Bien sûr, je rejoins ce qui a été dit en matière d'assurance-crédit. C'est un facteur extrêmement important. Aujourd'hui nous ne sommes pas suffisamment couverts, l'entreprise a le cruel dilemme soit de livrer avec des risques d'incidents de paiement, soit de refuser la livraison. La politique de l'État en matière d'assurance-crédit peut aider ou pas les entreprises. Je voudrais évoquer un point de détail viticole mineur mais qui a son importance. On nous impose un certain nombre de règles au sein de l'Union européenne, et dans le même temps les États membres n'appliquent pas les mêmes normes d'étiquetage. Pour un produit ou marque similaire, cela nécessite de constituer plusieurs stocks en fonction du pays de destination.
En ce qui concerne les moyens d'accompagnement, je voudrais évoquer trois points. Le premier porte sur le dispositif de l'organisation commune de marché (OCM) pays tiers mis en place. Il a été extrêmement fastidieux à monter malgré son utilité. La problématique de ces aides c'est qu'elles ne sont pas renouvelables au-delà de trois ans pour ces mêmes pays. Brigitte Bouillut l'a souligné tout à l'heure, le problème lorsqu'on a démarré dans un pays, c'est d'y rester et d'y croître. Nous nous sommes implantés à Shanghaï, mais nous ne disposons plus de moyens aidés actuellement pour continuer notre développement en Chine, et aller au Brésil ne fait pas partie de notre stratégie immédiate. S'inscrire dans la durée est important. L'autre point concerne les aides régionales, et notamment celles au renforcement des équipes commerciales et marketing. Extrêmement intéressantes, elles nous ont été très utiles car elles constituent un levier important pour développer l'export, recruter des collaborateurs étrangers, les installer dans ces pays. Elles se sont révélées d'une grande efficacité et je souhaite qu'elles puissent continuer en ce sens. Enfin, dernier point : le taux d'aide. Lorsque l'année dernière, de PME nous sommes devenus une entreprise de taille intermédiaire, nos financements ont diminué de moitié. Le Premier ministre avait souligné que la force de l'Allemagne réside dans le nombre de ses entreprises de taille intermédiaire. Au moment où notre croissance nous a permis de passer dans cette catégorie, nos financements en ont subi les conséquences car de 40 % l'année dernière ils sont passés à 20 %. Il faudrait donc accompagner cette décroissance. Lorsqu'on investit dans un pays, s'il n'y a pas d'aide en matière de recrutement la charge est lourde pendant cinq, six ans. La taille de l'entreprise est un handicap et la très forte césure pose un problème. Voilà ce que je souhaitais vous faire partager.
M. Christian Bourquin , rapporteur spécial . - Merci, je passe la parole à votre voisin M. Bertrand Girard du Val d'Orbieu.
M. Bertrand Girard, Val d'Orbieu . - Je voudrais simplement dire qu'il est possible de faire de l'export et de construire en créant de la valeur. J'aimerais juste profiter de l'occasion qui m'est donnée pour dire pourquoi c'est possible. J'ai passé vingt ans de ma vie à l'étranger dans six ou sept pays différents, sur plusieurs continents et j'ai une vision sur le plan international qui me permet de synthétiser des éléments clés de réussite. La formulation « faire de l'export » m'ennuie un peu car cela signifie démarcher des clients, voir où ils sont et c'est cette étude qui nous amène à générer une vision, définir des objectifs et les moyens pour y arriver. L'analyse du marché est cruciale. Globalement en France le dispositif d'accompagnement à l'export est exceptionnel, avec peu d'équivalence dans le monde en termes de compétences réunies selon mon expérience transversale sur ce sujet. L'essentiel consiste à se poser les bonnes questions : est-ce qu'on veut y aller, est-ce qu'on a une vision, est-ce qu'on connaît ses clients, quels sont les objectifs qu'on veut se fixer, est-ce qu'on y met les bons moyens (argent et compétences). Une fois le projet défini c'est possible, si on prend l'exemple du groupe que j'anime, Val d'Orbieu. A mon arrivée il y a trois ans, le groupe faisait 168 millions d'euros de chiffre d'affaires, 47 millions à l'export, aujourd'hui c'est 300 millions d'euros de chiffre d'affaires dont 70 à l'export. En ce qui concerne la progression de ce dernier chiffre, je n'ai pas attendu les aides. On a au préalable « nourri » une vision, un business plan avec des objectifs, des ressources financières et des compétences. On s'est ensuite demandé dans la construction du budget comment financer cette activité au développement ? Comment se faire accompagner, y compris financièrement ? L'aide en elle-même n'est pas un objectif mais un élément accompagnateur d'un projet qu'on fera de toute façon et inscrit dans le long terme. En France, on fait de « l'explortation », avec les aides on explore, au bout d'un an ou deux déçu on revient. On ne construit pas d'avenir durable dans ces conditions.
Pour en revenir aux clés du succès, je rejoins en cela Mme Bouillut, l'interrogation doit porter, et ce quelle que soit la taille de l'entreprise, sur la nature du projet, comment on va le bâtir, quelles sont nos forces, comment se préparer, a-t-on les bons produits pour les bons marchés, les moyens adéquats pour y arriver, les bonnes compétences et la taille critique qui varie selon le secteur d'activité. Bien se préparer c'est bien réfléchir à ce que représente l'entreprise, ses forces, ses faiblesses, écrire un plan, le budgéter, définir des axes de progrès. Cette étape franchie, on dispose d'un plan clair, quitte à appliquer des marges correctives. On sollicite ensuite le réseau d'aides, extrêmement riche en Languedoc-Roussillon et doté d'un solide savoir-faire. Ubifrance et Sopexa ici présents sont de formidables réseaux accompagnateurs, il n'y a pas de problème à trouver des appuis, faire des salons, des conseils spécifiques ; la richesse de l'information est là. C'est avant tout une question d'analyse et d'introspective sur l'entreprise. Pour conclure, c'est là le défaut dans la cuirasse du combattant français à l'export : le manque d'aide à diagnostiquer en interne afin d'évaluer sa capacité à attaquer les marchés. Une fois qu'on a fait ça, soit on se dit on n'y va pas parce qu'on n'est pas prêt, évitant ainsi de gaspiller les aides publiques, mais une fois la décision prise on trouve à sa disposition toutes les forces dans notre pays. Dans toutes les régions, existent de forts potentiels. Lorsque M. Ferrand évoque l'Allemagne dont l'export agroalimentaire dépasse celui de la France, il faut mentionner aussi la Hollande dont le territoire est pourtant bien inférieur au nôtre. C'est donc davantage un problème de comportement managérial dans notre pays et d'appréhension du sujet.
Un petit mot pour terminer sur Val d'Orbieu-Uccoar. Le groupe comprend 2 500 vignerons, douze coopératives de villages, des centres de vinification où les vignerons apportent leurs raisins. Ces douze centres de vinification sont des sociétés actionnaires-fournisseurs d'une société appelée Val d'Orbieu qui elle-même dispose de quatorze filiales industrielle ou commerciale, cela représente 500 employés. Finalement nous sommes 2 500 PME, chaque vigneron constitue une PME avec son compte d'exploitation. Cela fait de nous le premier groupe coopératif viticole français avec le devoir de réussir. Dans ce cadre, l'export est un élément essentiel de notre développement. Notre ambition est d'arriver à 100 millions d'euros de chiffre d'affaires à l'international le plus rapidement possible et nous n'oublions pas la France qui demeure notre marché berceau. L'export est la voie de croissance et de création de valeur essentielle pour notre groupe et pour beaucoup d'acteurs, à condition d'adopter un comportement managérial solide avec un accompagnement en matière de ressources et de mettre à profit les dispositifs existants.
M. Christian Bourquin , rapporteur spécial . - Merci, je passe la parole à M. Fabrice Rieu, vice-président des Vins du Roussillon.
M. Fabrice Rieu, vice-président des Vins du Roussillon . - Je suis vice-président des vins des Roussillon mais je suis aussi négociant dans une petite entreprise des Pyrénées orientales qui a été lauréate du premier prix national d'innovation agroalimentaire en 2002 et du prix Alfred Sauvy en 2003. Mais malgré ces prix, le développement de notre entreprise à l'export a été extrêmement difficile parce que nous faisons partie de ce que Mme Bouillut a appelé les TPE-PME ou TPI-PME. Or, dans une petite entreprise, le chef d'entreprise fait tout et il manque toujours de temps pour monter des dossiers qui lui permettraient d'attaquer des marchés à l'export. Il est vrai que nous avons beaucoup de chance, dans la région, d'avoir des structures qui nous aident, comme Sud France Développement qui accompagnent bien les petites entreprises à l'export. Nous nous appuyons aussi beaucoup sur notre interprofession et là, je vais parler un peu de la mécanique interprofessionnelle où nous rencontrons de nombreuses difficultés pour développer l'export.
Une petite entreprise a besoin que ceux qui l'aident, que ce soit les interprofessions ou les acteurs sur le marché tels que Sud France Développement, puissent lui consacrer le maximum de temps. Or lorsqu'on « attaque » certains pays tiers comme la Chine ou les États-Unis et que l'on demande à bénéficier de financements - je rejoins Michel Bataille sur ce qu'il disait tout à l'heure sur la complexité de montage de ces dossiers - on a effectivement besoin de simplification, mais pas seulement. On a également besoin de réalisme. Lorsqu'on part sur un programme de deux ou trois années et qu'on nous laisse « au milieu du gué », qu'on a commencé à investir sur certains pays, il y a un danger majeur, après avoir occupé un espace, de laisser cet espace vacant et on aura, en plus, gâché du temps, de l'énergie et de l'argent.
Il y a des problématiques aussi dans des programmes nationaux, avec FranceAgrimer, notamment pour investir les marchés européens. Alors qu'au niveau du Roussillon, on souhaitait se lancer sur le marché très important de la Pologne, citée par la banque HSBC comme l'un des quatre pays majeurs dans lesquels il faut investir dans les prochaines années, on vient d'apprendre que ce pays vient d'être écarté des programmes de financement ou de soutien.
Si les acteurs comme les interprofessions ou d'autres acteurs, destinés à nous servir de relais sur le terrain, ne sont pas suffisamment aidés et entourés, et surtout ne mettent pas en place les programmes réalistes qui vont nous permettre de développer ces marchés, nous, en tant que petites PME, nous n'aurons jamais accès à ces marchés. Donc aujourd'hui nous avons besoin de relais très importants. Quid des prochains programmes qui vont se mettre en place ? Que vont devenir les fonds viticoles ? Il y a des arbitrages budgétaires qui vont être, cette année, extrêmement difficiles mais le vivier d'emplois que représentent ces PME en France, ces petits négoces de vins, ces petits producteurs, toutes ces entreprises ont besoin que ces programmes continuent d'être accompagnés et aidés. En région Languedoc-Roussillon, nous bénéficions d'accompagnements tels que le conseil régional, le conseil général qui viennent abonder les fonds propres des interprofessions - ensuite, nous allons rechercher des crédits européens. Nous avons véritablement besoin de ces accompagnements parce que le levier de croissance est vraiment à l'export. Le marché national, même pour des entreprises comme la nôtre, est très difficile aussi parce que l'autre frein, c'est la logistique et le coût du transport. Quand on est à Perpignan, expédier des bouteilles même sur Paris coûte beaucoup plus cher que pour des producteurs de la Vallée du Rhône. Il y a des distorsions tarifaires. Et lorsqu'on souhaite exporter, qu'on passe par le port de Marseille qui est en grève environ 120 jours par an et qu'on a des clients qui nous facturent des pénalités au Japon ou en Chine, on se retrouve avec des difficultés et on finit par se demander si on ne va pas s'adresser au port de Barcelone parce que, peut être, il y aura moins de facteurs de risques de grèves... Je suis un peu provocateur, ce n'est pas un cri d'alarme mais une prise de conscience par rapport à toutes ces difficultés. Je milite pour les toutes petites entreprises dont je fais partie. Malgré les accompagnements dont nous bénéficions aujourd'hui, il existe quand même beaucoup de difficultés et aujourd'hui, je continue à penser qu'on manque peut-être encore d'interaction entre l'articulation et la connaissance de ces fonds. Malgré les informations qu'ont les petites entreprises à travers les collectivités territoriales et les interprofessions, elles manquent aujourd'hui d'une vision synthétique et plus simple.
M. Lionel Dufau, directeur général du groupe CEMOI . - Le groupe CEMOI représente 750 millions d'euros de chiffre d'affaires. 500 millions sont faits au départ de nos sites français et sur ces 500 millions, 100 millions sont à destination de l'export. Principalement en Europe parce que, effectivement, l'export est un sujet très vaste. Entre l'expédition de céréales par bateaux complets et l'expédition de palettes de vin au Japon, les sujets sont extrêmement variés. 100 millions d'euros d'export, ça peut paraître important mais par rapport à l'Asie, je suis un tout petit fournisseur puisque je réalise environ 5 millions d'euros sur la Chine. Quelle que soit la taille de nos entreprises, nous partageons les mêmes problématiques. Je pense que la première des contraintes au niveau de l'export, c'est la commercialisation. Je peux avoir un produit, je peux avoir de l'innovation, si je n'ai pas le réseau de commercialisation, je ne peux rien faire.
Donc la première des choses, même pour un gros groupe, s'il n'a pas la capacité financière pour rémunérer des commerciaux à travers le monde, c'est de s'appuyer, dans un premier temps, sur des partenaires. Et là, par rapport à la diversité des pays, le rôle que pourrait peut-être avoir la puissance publique serait un rôle de conseil sur le choix des partenaires. On passe par des importateurs, des distributeurs, ce qui permet aussi de limiter le risque puisqu'il y a un engagement commun entre l'importateur et le fabriquant. Choisir le bon partenaire, c'est parfois s'assurer d'un développement du chiffre d'affaires extrêmement rapide. On pourrait imaginer, par rapport aux TPE et PMI, que le conseil de l'État dans le choix d'importateurs communs renforcerait effectivement l'attractivité d'une marque, comme Sud de France par exemple.
Le deuxième point, que l'on met en place généralement pour le développement de l'export, c'est le choix, à un moment donné, d'investir structurellement dans un pays. L'année dernière, nous avons ouvert un bureau commercial aux États-Unis. Aujourd'hui, nous avons eu l'aide d'Ubifrance en termes de conseil sur les processus juridiques qui sont longs et complexes. On s'imagine toujours que créer une entreprise aux États-Unis, c'est très simple. C'est en partie vrai mais, pour obtenir un visa, même quand en venant de France, c'est extrêmement compliqué. On a mis quasiment huit mois pour obtenir un visa de travail pour les États-Unis.
Ce dont on se rend compte aussi, en termes de contrainte à l'export, c'est qu'il s'agit aussi d'un engagement humain. Aujourd'hui, nous avons une personne qui travaille pour le marché américain mais la problématique, c'est qu'elle est toute seule. On pourrait peut-être avoir des bureaux de pépinières qui regrouperaient l'ensemble de ces sociétés, qu'elles soient petites ou grosses. Cela créerait une sorte d'émulation et on pourrait mutualiser un certain nombre de coûts mais je pense que c'est aussi un facteur de réussite humaine. Si l'on envoie un salarié à l'étranger et qu'on ne peut le joindre que téléphoniquement et ce uniquement quelques heures par semaine, qu'on ne peut le rencontrer que quelquefois dans l'année, cela crée une difficulté. On pourrait imaginer des bureaux dans des grandes villes telles que Shangaï ou New York, une pépinière de plusieurs entreprises, de plusieurs forces commerciales. Je crois à l'effet de réseau. Je crois aussi que le partage de l'expérience au quotidien, le fait de dire : « J'ai un contact commercial sur telle chaîne de distribution américaine, tel fournisseur logistique », est quelque chose d'utile.
La troisième contrainte, qui a été soulevée, ce sont les aspects logistiques, c'est la gestion des INternational COmmercial TERMS (INCOTERMS). De nombreuses entreprises ont une vision partielle de ce qu'est l'INCOTERM et des conséquences d'organisation et financières qu'elles vont avoir. On se rend compte que plus on grossit à l'export, plus l'INCONTERM devient complexe. Au départ, on commence à travailler en « ex-works », c'est-à-dire que c'est le client qui se charge du transport. Et plus on grossit, plus cette contrainte revient au fournisseur. Il y a des INCOTERMS de style BTP, c'est-à-dire « rendu sur place avec les droits de douane payés ». Quand on parle de pays comme les États-Unis, c'est extrêmement vaste et, au-delà d'avoir de la connaissance commerciale, il faut aussi avoir une connaissance des réseaux de distribution, des prestataires logistiques et, cela impose une contrainte supplémentaire. Cela impose d'acquérir de nouvelles compétences. La première étape consiste à connaître les contraintes légales relatives au pays où l'on souhaite exporter. Et au fur et à mesure du développement, ce sont les contraintes logistiques qui viennent complexifier encore le dossier. Et c'est là où l'État peut nous être utile, dans la connaissance et le conseil de tous ces réseaux de distribution.
M. Pierre Vialat, l'Olivie . - Je suis le patron du domaine de l'Olivie où je produis et transforme des olives et de l'huile d'olives. Mon expérience en matière d'export date de quatre ou cinq ans. J'ai connu deux sortes d'expériences. Une très heureuse et une autre beaucoup plus longue à mettre en place, par laquelle je vais commencer. Lorsque nous avons décidé de nous lancer à l'export, nous avons participé à des salons organisés par Sud de France à Montpellier. Mais nous nous sommes aperçus que les acheteurs étaient surtout des acheteurs qui avaient, eux aussi, des petites structures, c'est-à-dire une, deux ou quatre boutiques, et nous nous sommes vus émiettés dans une dizaine de pays avec des petits importateurs. Petite entreprise, petit importateur, des packagings très peu adaptés à chacun des pays, des coûts de livraison très importants, impossibilité de développer une marque qui leur soit propre. Nous nous sommes vus, petit à petit, émiettés et passer de pays à pays. Donc une expérience très positive mais qui a montré la difficulté d'être présent dans un pays de façon très sporadique, ce qui n'est pas bon pour nos petites entreprises. Il est donc très important de bien connaître le pays, de bien adapter le packaging et de se concentrer sur quelques pays uniquement, sans s'éparpiller.
Deuxième expérience : nous avons répondu à l'appel d'offre d'une chaîne de distribution qui s'appelle Loblaw, qui est une grosse chaîne de distribution au Canada. Grâce à l'innovation de l'un de nos produits, nous avons décroché un gros marché. Mais la première commande était de 75 000 bouteilles, ce qui est beaucoup pour de l'huile d'olive. Le temps d'adapter le packaging à la législation du pays, etc..., il aurait fallu entre quatre et six mois, ce qui était impensable pour le pays. Mais comme ils voulaient cette huile d'olive, l'acheteur nous l'a importée en vrac et a créé lui-même toute la chaîne, exactement la même que nous : la même bouteille, le même type de bouchon, le même type de packaging mais aux couleurs de son pays. Nous avons réalisé que, par manque de réactivité de l'ensemble de nos entreprises, l'achat des bouteilles, l'achat des bouchons, le packaging, la législation à mettre en place, le développement du pack, tout ça nous aurait pris tellement de temps que, si ce pays n'avait pas tant aimé notre produit, il n'aurait pas été présent là-bas. Ils auraient fait appel à un autre fournisseur, nous étions en concurrence avec l'Italie et d'autres moulins en France.
Il est nécessaire d'une part, de cibler les produits, apprendre à bien connaître le produit, le pays dans lequel on va importer. S'il n'y a pas le marché, il ne faut pas y aller. Il faut nous aider à trouver les gros importateurs et les grossistes, nous aider à nous adapter à ces grossistes, même si nous sommes une petite PME. C'est ce que j'ai retenu de mes expériences et ce que je souhaite pour continuer à exporter.
Mme Florence Pratlong, fromageries de Hyelvas . - Nous fabriquons du fromage de brebis au lait cru et nous exportons principalement vers l'Europe, l'Allemagne et la Belgique, et un petit peu sur les États-Unis pour les fromages à affinage plus long. Donc il est possible d'exporter des fromages au lait cru aux États-Unis même si c'est compliqué. Nous travaillons pour l'export depuis une douzaine d'années. Cela a nécessité beaucoup de préparation. Je crois qu'en tant que toute petite entreprise, ce dont nous avons besoin, c'est effectivement de nous dire que nous travaillons dans la durée, que nous avons besoin d'être préparés, que nous devons cibler, parce que, justement, comme nous sommes petits, nous ne pouvons pas aller partout. On choisit ce que l'on va faire et si on choisit, on se donne une piste et on peut avancer. Il y a de la place pour les petites entreprises. Cela veut dire que, si on se situe dans la durée, on n'est pas sur du trois ans mais sur plus. Cela veut dire qu'il faut avoir anticipé. Il faut donc pouvoir être accompagné pour développer une réflexion et une stratégie. C'est le seul moyen d'être efficace. Et cet accompagnement doit s'inscrire sur le long terme, parce qu'une petite structure ne dispose pas de gens qui ne sont là que pour réfléchir, pour connaître le pays. Nous avons besoin d'aller chercher des informations qui ne sont pas forcément toutes à disposition. Je suis également toujours très préoccupée par tout ce qui est formation, scolarité et ambiance. J'ai bien aimé que le sujet soit abordé parce que, dans nos entreprises, arrivent des salariés qui ont été formés, des apprentis qui ont des idées. Nous avons du mal à trouver des personnes qui, quel que soit le poste qu'elles occupent dans l'entreprise, aient dans l'idée que l'export est une réalité. Nous ne travaillons plus seulement dans notre département, dans notre région ni même dans notre pays, nous pouvons aller plus loin. Si on veut bouger, il faut que cela devienne, culturellement, quelque chose de naturel. Les langues, l'échange, l'ouverture, les différences, les différences de consommation. Ce n'est pas parce qu'on ne va pas consommer notre fromage comme en Lozère qu'il ne sera pas bon. Tant mieux s'il est consommé autrement ailleurs. Osons, acceptons et ouvrons-nous. Cela dépend aussi de choses qui ne sont pas simplement des aides à l'export ou des salons qu'on va pouvoir faire, c'est beaucoup plus large. Je me réjouis que cela ait été dit parce que je voulais en parler. Les questions de logistique aussi sont importantes, surtout dans nos régions d'accès difficile. L'accès aux transports est compliqué et en tant que petite entreprise, nous avons besoin que les choses soient simples. Il faut que ce soit simple, compréhensible et accessible, y compris pour les grandes entreprises.
M. Christian Bourquin , rapporteur spécial . - L'accompagnement spécifique des TPI-PME, est un thème fort. L'investissement et l'innovation, la compétitivité et la fiscalité, la formation et la sensibilisation à l'export des entreprises, le conseil en stratégie et commercialisation, la diffusion des bonnes pratiques entre les entreprises exportatrices. Mais je vous pose une question. Autour de la table, il y a des acteurs de l'État mais vous, en tant qu'entreprises, avez-vous une vision claire de l'organisation du dispositif public de soutien aux exportations ? Et, à cet égard, quelles seraient les améliorations éventuelles que vous attendez ? Qui souhaite réagir ?
M. Bertrand Girard, UCCOAR-Vald'Orbieu . - Il y a une richesse vraiment importante de compétence et de savoir-faire dans les réseaux d'appui à l'export en France. Par contre, dénicher de manière exhaustive tout ce qui se fait, clairement la réponse est non.
Il est toujours délicat de donner une appréciation. C'est comme quand vous procédez à l'évaluation d'un collaborateur dans une entreprise, mais je crois qu'il y a un décalage entre l'attente d'un système simplifié, abordable et décodable pour une entreprise, qu'elle soit petite, moyenne ou grande. Nous avons vraiment besoin de simplification dans les chemins organisationnels des gens sur lesquels on peut s'appuyer. Nous avons besoin de clarté concernant les compétences qui peuvent être affichés dans les différents appuis et c'est parfois un peu compliqué voire une question de chance. Cela dépend des pays, des secteurs, et un effort de clarification général serait nécessaire : le problème n'est pas la compétence mais de trouver le bon interlocuteur, peut-être arrêter une démultiplication d'interlocuteurs au dispositif qui, finalement, font toujours appel aux même sources de financement et après, dans cette offre, aller directement au bon interlocuteur avec la bonne compétence en face de la bonne problématique. Et ça, ce n'est pas simple du tout.
M. Italo Pitis, Coop de France . - Tout a été dit, une remarque par contre. Cette clé d'entrée, cette clé unique, cette simplification, ce guichet, on peut l'appeler comme on veut mais qui permettrait une simplification serait le bienvenu parce que tout le monde a exprimé ce souhait. Il ne faudrait pas, si ce guichet unique se crée demain, quel que soit l'organisme ou l'instance qui le pilote, que ce soit un « guichet pouvoir ». On a parlé de TPE, on a parlé de grosses entreprises, d'entreprises moyennes, il faudrait que ce guichet soit à l'écoute des entreprises et non pas une espèce de clé dentée où l'on se formate à ce qu'on attend un peu de nous. Parce que, justement, il y a énormément d'entreprises avec énormément de diversité. Il faut de la simplification mais il ne faut pas que cela devienne un contrepouvoir ou un super pouvoir avec une démarche qui ne tiendrait pas compte des spécificités.
M. Bertrand Gérard . - Si je peux me permettre de rajouter un mot, je crois qu'il est nécessaire de faire émerger une classe d'entrepreneurs tant dans le dispositif à l'appui que chez les entrepreneurs eux-mêmes. Nous devons parler la même langue. Et c'est parfois compliqué. Il faut comprendre quelles sont les attentes. L'accompagnement export, quel qu'il soit, s'il veut être efficace, ne doit pas être une énième administration. Nous devons nous trouver face à des compétences qui s'expriment avec un vrai comportement d'entrepreneur. Je suis sûr que dans les réseaux, on « patine » parfois sur le sujet. Et cela est très lié au phénomène d'une jeune génération pas tout à fait formée selon ces préceptes d'entreprise si chers à d'autres économies, qu'elles soient chinoise ou américaine aujourd'hui, culturellement. C'est un vrai sujet d'éducation, c'est un des sujets phare. J'ai été effaré, lors d'une réunion à laquelle participait Italo, il y a quelque temps, au cours de laquelle on a demandé : « Avez-vous trouvé des stagiaires ou des jeunes cadres-export ? La réponse était non, alors que dans la région, on a de très belles écoles. Quand on cherche une personne pour faire un stage, elle demande combien elle sera payée avant de demander ce qu'il y a à faire. Évidemment, on va payer un stagiaire conformément à la loi, mais personnellement, lorsque je faisais des entretiens d'embauche quand j'avais vingt ans, je ne me posais pas la question de savoir combien j'allais gagner, j'essayais de me dire « je vais faire le boulot ». C'est une question de comportement et de volonté d'apprentissage. Cela se ressent pleinement dans toute la chaîne humaine et des compétences, y compris auprès des prestataires d'accompagnement. On a besoin d'entrepreneurs qui fassent des réponses simples. C'est une sorte de comportement et de culture d'entreprenariat qui donnerait un sacré coup de fouet à l'innovation et à l'export en général.
Mme Florence Pratlong . - En tant que petite entreprise, si on veut exporter et être aidé, il existe des possibilités à la chambre de commerce et d'industrie (CCI), à la région. Par contre, l'autre aspect, c'est de dire « Est-ce que c'est simple, est-ce qu'on va arriver à ne pas être submergé ? Est-ce qu'on va être accompagné dans une vision, dans un objectif, dans le fait d'être fidèlement accompagné dans ce qui est le projet de l'entreprise sans être orienté d'emblée vers des marchés, la Chine ou les États-Unis, qui ne correspondraient pas forcément avec le projet de l'entreprise. Ça montre aussi que dans tous ces accompagnements, c'est vraiment important de placer l'entreprise au centre parce que in fine , même si elle bénéficie de fonds publics, c'est elle qui va avancer et du coup, ça rejoint aussi la culture de l'entreprise.
M. Michel Bataille . - Je ne peux qu'aller dans le sens de ce que mes collègues ont évoqué et bien sûr, c'est beaucoup plus difficile pour les petites entreprises. L'idée de guichet unique qu'a développée Italo me paraît une bonne idée. Nous avons été habitués à travailler avec les services de la région ou les services de la DRAAF mais on sollicite beaucoup moins facilement Oseo ou Ubifrance. Il faudrait presque un interlocuteur par entreprise qui puisse accompagner l'entreprise par rapport à un businessplan. Nous avons une vision globale de notre entreprise, dans ses marchés et dans ce qu'elle vise. En face, il faut qu'on mette en place les différents pontages avec les différents services et ça prend évidemment beaucoup de temps. Je pense qu'il serait aussi enrichissant pour les services de l'État de participer activement à l'émergence et à la réussite de ces projets plutôt que d'avoir un aspect trop administratif. Nous savons qu'il y a des règles auxquelles on ne peut pas déroger.
M. Fabrice Rieu . - Une petite précision concernant les problèmes à l'exportation pour les petites entreprises dans le domaine viticole. Il y a les barrières douanières qui concernent les produits alcoolisés et qui sont extrêmement variables et complexes dans les pays, le manque d'information au rapport à ça, le fait que les règles changent en permanence. Prenons par exemple le cas de la Chine. Aujourd'hui, par exemple, il existe des problématiques parce que les vins doux naturels, par rapport à des analyses, peuvent contenir certains produits et certains seuils, en rapport avec l'âge des vignes, la manière dont elles ont été travaillées dans le passé et qui font ressortir des problématiques pour exporter nos produits. Beaucoup de produits sont bloqués sur le territoire chinois ou sur le territoire japonais pour ces raisons. C'est un problème d'information générale, les entreprises ne sont pas forcément au courant et ça peut coûter très cher à une entreprise d'exporter des produits qui vont rester bloqués, parfois jusqu'à quatre mois, à l'arrivée. Ça peut en mettre certaines en faillite.
L'autre volet, c'est la difficulté pour obtenir ces dossiers. Le montage des dossiers pour répondre aux appels d'offre européens sont très coûteux. Sincèrement, je ne peux pas dire comment va être le marché chinois dans cinq ans ou à quel niveau il en sera et lorsqu'on ne respecte pas les plans à la lettre de l'utilisation des fonds européens, on peut avoir des factures qui sont rejetées et après, lorsqu'on fait un appel d'offre, on ne peut choisir qu'une seule structure unique sur le pays en question et s'engager pour plusieurs années, ce qui peut priver de l'occasion de travailler avec d'autres structures dans certains pays. Au final ce n'est pas que de la simplification dont nous avons besoin, mais aussi de la flexibilité pour correspondre parfaitement avec la réalité des marchés et avec la vitesse à laquelle certains marchés se créent à l'export.
Mme Brigitte Bouillut . - Au sujet de votre question sur la compréhension des compétences des différents acteurs, c'est vrai que nous sommes une structure relais. L'un des intervenants a dit l'importance du relais. Le patron d'une PME ne peut pas tout savoir, passer du temps à collecter l'information, etc... Le fait que ce guichet unique éventuel soit aussi relié de façon active à des systèmes-relais pourrait donner plus de puissance encore au système. Au niveau de la connaissance des entreprises, si j'en juge par le retour que me font les entreprises de l'industrie agroalimentaire de la région, j'ai le sentiment - je parle sous le contrôle de ceux qui sont ici - qu'il y a deux structures qui sont proches du terrain et qui les comprennent bien. D'une part, Oseo, dont les acteurs sont implantés dans des départements très proches, qui suivent les entreprises sur la durée et qui suivent l'évolution des entreprises sur dix ans ou quinze ans, ce qui est très important pour connaître toute leur solidité. Et d'autre part, Sud de France Développement qui a acquis une connaissance du tissu des PME-PMI agroalimentaires assez importante.
Mais nous aussi, structures relais, avons parfois des difficultés. Récemment, une entreprise sétoise avait un problème d'importation et d'exportation, dans les deux sens. Elle avait une question très précise sur une réglementation. Moi-même, structure-relais, même si je connais les grandes missions de chacun, je n'ai pas trouvé pas du premier coup le bon interlocuteur. Mais en deux coups de téléphone, oui. On peut y arriver. Ce n'est pas une si grande confusion que cela pour nous, structures-relais. Par contre, le chef d'entreprise ne savait absolument pas à qui s'adresser, il était perdu, il tournait en rond.
M. Pierre Vialla . - Je pense que ce qui est important quand une petite entreprise va à l'export, c'est qu'il faut qu'on comprenne qu'on ne va pas chercher des aides, c'est l'inverse. Quand on part à l'export, c'est comme quand on crée une nouvelle entreprise. On monte un projet et une fois qu'on a monté un projet, démarché les banques, travaillé le packaging, et réalisé les études de marché, on va chercher des aides. Il faudrait que les aides soient au service d'un projet et il ne faut pas que l'entreprise se dise « Je vais aller à l'export parce qu'il y a une aide pour exporter vers ce pays ». L'important est de prendre le sujet dans l'autre sens afin que les acteurs publics qui viennent aider le projet à se réaliser.
Second atelier : « Synergie des acteurs institutionnels régionaux, coordination entre offre régionale et stratégie au niveau national et international »
M. Christian Bourquin , rapporteur spécial . - Je vous propose de passer au deuxième atelier sur le thème de la synergie des acteurs régionaux et la coordination entre l'offre régionale et les stratégies à l'international.
Les intervenants du premier atelier sont invités à rester.
M. André Ferrand , rapporteur spécial . - Je serais particulièrement intéressé si, pendant cette deuxième séquence, les intervenants, c'est-à-dire les représentants des différentes institutions régionales ou nationales qui sont là, voulaient bien considérer les lignes fortes qui ont été évoquées. Il y a deux points auxquels je tiens particulièrement. Premièrement, la simplification. Il y a quelque chose qui est assez simple dans cette région qui est Sud de France Développement. Mais si on veut progresser dans des occasions exceptionnelles comme celles-ci, quand tous les acteurs sont réunis, je crois qu'il ne faut pas hésiter à aller de l'avant, c'est pour cela que j'emploie le mot de « guichet unique », ce terme illustre la simplification, mais il ne doit pas être équivoque. Les PME ont besoin d'un interlocuteur et d'un accès.
Deuxième point, - Madame, je buvais vos paroles quand vous parliez de formation - nous avons embrayé sur la culture de l'entreprise et sur la culture de l'international, ce qui est un peu la même chose d'ailleurs. Si on veut aller à l'international, il faut être bon, il faut être performant, innovant, bien gérer, etc... Tout cela forme un ensemble dont nous avons grand besoin, non seulement au niveau régional mais aussi au niveau national. On touche un point fondamental et j'aimerais bien qu'on aborde la question de l'enseignement. C'est à l'école que devrait commencer l'esprit d'entreprise, l'esprit de l'international, etc... N'est-ce pas notre rôle de politique, justement, de reposer la question : n'y a-t-il pas quelque chose à faire pour imprégner tout le tissu social, au niveau des régions en particulier, pour que la France devienne un pays d'entrepreneurs tournés vers l'international ? C'est peut-être très ambitieux mais je pense que si nos intervenants voulaient bien parler en particulier de ces deux sujets, la simplification de l'organisation nationale et l'imprégnation d'une culture de l'entreprise et de l'international, j'en serais personnellement heureux.
M. Christian Bourquin , rapporteur spécial . - Ce sujet est ajouté à nos travaux. La thématique qui est posée est donc la synergie. Synergie des acteurs institutionnels régionaux et coordination entre l'offre régionale et stratégie au niveau national et international. M. Pascal Augier, directeur de la DRAAF, je vous propose d'ouvrir cette séquence.
M. Pascal Augier, directeur de la DRAAF . - Il y a deux publications récentes. L'une sur les exportations de vins du Languedoc-Roussillon - il s'agit d'une première car nous n'avions pas les données jusqu'à l'année dernière. Nous avons également, à l'occasion des rencontres régionales sur l'agroalimentaire, fait un état de l'ensemble des aides européennes internationales aux industries agroalimentaires. Vous allez voir que rien qu'avec le volume des documents, il y a un ensemble de dispositifs d'aides qui est conséquent. Je commencerai tout simplement par un paradoxe. Dans cette région, effectivement, on a essentiellement des PME et des TPE, vous le savez tous, même si certains groupes plus importants, moyens, sont aussi autour de la table. L'essentiel de nos entreprises sont quand même des petites et des très petites entreprises. Pour autant, le Languedoc-Roussillon est assez performant à l'export. On fait 2,7 milliards d'euros par an à l'export dans le domaine agricole et agroalimentaire et pour la région, cela représente presque 43 % de l'export. Mais ces deux filières-là, agricole et agroalimentaire, représentent 43 % de l'ensemble des produits qu'on exporte de la région. D'où l'importance de la matinée d'aujourd'hui et de l'item que vous traitez. Dans ces filières, la filière vin est la première mais il y a aussi les céréales et les dérivés de céréales, les fruits et légumes et, même si les chiffres d'affaires sont beaucoup plus faibles à l'export, également la filière élevage. A travers le port de Sète on exporte beaucoup d'animaux. Ces secteurs agricoles de l'agroalimentaire représentent un secteur puissant en Languedoc-Roussillon et c'est normal qu'on puisse se préoccuper à la fois de la situation actuelle mais surtout de favoriser le développement de cette exportation. Cela doit passer par un appui aux PME et aux TPE. Il faut aider les grandes entreprises mais si on ne s'intéresse pas à ce tissu de PME et de TPE, on passe un peu à côté des enjeux majeurs. Je vous remettrai, dans une note écrite, un certain nombre d'éléments qui ressortent des ateliers très intéressants qui ont eu lieu dans le cadre des rencontres régionales pour les industries agroalimentaires et la filière bois, dont l'atelier qui s'est tenu au début du mois de février qui a fait ressortir un certain nombre d'éléments intéressants venant de la part d'entreprises 40 ( * ) . Ce n'est donc pas une vision administrative ou politique des choses, ce sont aussi les attentes des entreprises, il est donc intéressant de les analyser.
Trois grands sujets ressortent. Il y a d'une part la compétitivité, qui est essentielle, c'est un axe fort de travail. Il y a tout un travail de mutualisation qui est absolument nécessaire lorsqu'on est une petite entreprise. On ne peut pas tout faire tout seul, il faut mutualiser beaucoup de choses. En particulier tout ce qui est logistique, cela a été abordé longuement autour de cette table, il faut qu'on travaille ensemble pour être plus forts en matière de transport. En matière de prospection de marchés aussi, on ne peut pas tout faire tout seul quand on est une petite entreprise ainsi qu'en matière d'innovation. Nous avons là d'énormes progrès à faire collectivement. Prospection de zones ciblées, où on peut aller ensemble, dans quels pays et où il vaut mieux éviter d'aller parce qu'on prendra trop de risques commerciaux ou parce que l'investissement à faire est trop démesuré par rapport aux moyens qu'on pourra y consacrer. Nous avons beaucoup d'accompagnement à l'innovation technologique, par contre, beaucoup moins à l'innovation non technologique, en particulier l'innovation commerciale. On a beaucoup de choses à faire et on a des dispositions qui mériteraient d'être renforcées.
Deuxième thématique : la formation. Je rejoins ce que vous disiez à l'instant : certaines entreprises ressentent très fortement le besoin d'avoir des jeunes et des moins jeunes formés avec une vision internationale, ce qui est encore un peu différent. Là je prendrai une autre casquette que certains ne me connaissent pas, je suis aussi le recteur d'académie pour l'enseignement agricole en région Languedoc-Roussillon. Pour l'enseignement agricole, en tout cas, c'est un axe fort. L'international est l'une des cinq missions pour l'enseignement agricole. Nous essayons d'envoyer nos jeunes à l'étranger, non seulement pour découvrir les pays mais aussi pour se former aux langues. C'est un handicap majeur que nous rencontrons, de même que la connaissance de la culture des marchés. Si les chinois aiment nos produits, ils les consomment différemment, donc il faut les adapter. Il faut avoir cette culture. Donc, La formation est donc un axe fort. Je ne rentre pas dans les détails mais c'est un élément qui nous a interpelés et nous allons essayer d'accompagner la réflexion.
Je terminerai mon propos sur l'accompagnement des entreprises. Nous avons, à mon avis, ne serait-ce qu'autour de cette table, un ensemble d'outils d'accompagnement financiers, administratifs, techniques, juridiques. Il faut faire en sorte de faciliter la vie des entreprises. Les grands groupes savent se débrouiller seuls mais les petites entreprises, parfois avec des relais, arrivent à trouver la bonne information. Mais si on avait une meilleure organisation, je pense qu'on serait collectivement plus efficaces en faveur de l'économie de la France et de cette région en particulier.
M. Christian Bourquin , rapporteur spécial . - Merci, je passe la parole à M. Pierre Fabre, de la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE), où il est le responsable export au pôle Entreprises - Economie - Emploi.
M. Pierre Fabre, responsable export, de la DIRECCTE . - Vous avez rappelé la gravité du déficit commercial et Mme Nicole Bricq a proposé un plan pour réduire ce déficit à zéro. Ce plan passe par quatre groupes de produits : mieux se nourrir, mieux communiquer, mieux se soigner, mieux vivre en ville. Il est clair que la région Languedoc-Roussillon est particulièrement bien placée pour contribuer puissamment à cet effort, dans deux secteurs notamment : mieux se soigner et surtout, mieux se nourrir avec l'agroalimentaire. Le poids de l'industrie agroalimentaire dans cette région est très important et représente 12,5 % du PIB régional et 25 % des exportations. Pour autant, on peut faire encore mieux puisque la région n'exporte que 15 % de sa production agricole, industrie agroalimentaire, alors qu'au niveau français, on en est à 22 ou 23 %. Il y a donc un potentiel très important. Le choix qui a été fait au niveau national est particulièrement intéressant pour le Languedoc-Roussillon. Il reste à voir maintenant comment on peut l'articuler avec la politique régionale qui doit être définie par les régions puisque c'est l'acte 3 en matière de décentralisation. De plus en plus de pouvoir sera dévolu aux régions et notamment en matière de développement international.
L'investissement étranger est particulièrement important, les entreprises étrangères, notamment Nestlé et Mars emploient 4 200 personnes, c'est-à-dire presque 40 % de l'emploi des industries agroalimentaires en Languedoc-Roussillon, soit 300 millions d'euros d'exportations et à peu près 20 % des exportations régionales. C'est très important de conserver une image d'attractivité. En ce moment on en parle beaucoup, pour diverses raisons et c'est un sujet sur lequel il convient d'être extrêmement vigilant.
Maintenant, parlons du dispositif et de sa lisibilité. C'est vrai que chaque fois qu'on parle de dispositif public, qui est difficile d'accès, qui est compliqué, je me sens un peu visé. De mon point de vue, il me paraît simple mais c'est normal. Ceci dit, après 30 ans à l'étranger, quand on revient en région, on s'aperçoit qu'effectivement, pour des PME et pour des TPE surtout, c'est très difficile. Je ne crois pas qu'on puisse exiger des entreprises de connaître tout cela. Ce qui est important, c'est de mettre à leur disposition des gens qui connaissent le dispositif. Je crois savoir que la future banque publique d'investissement (BPI) aura des développeurs ou des chargés d'affaires dont la grande majorité proviendra d'Ubifrance et dont le profil sera de bien connaître tout le dispositif et toutes les aides. Il est vrai qu'il y en a beaucoup mais elles s'adaptent à la PME, à la TPE, comme l'A3P de la COFACE qui permet à une entreprise de décrocher 30 000 euros pour aller prospecter un marché jusqu'au dispositif lourd pour financer des Airbus ou des centrales nucléaires. Cela peut donc effectivement être touffu mais on ne va pas non plus reprocher à la COFACE de répondre à presque toutes les problématiques.
Autre sujet important, les problèmes de documentation, d'information sanitaire, phytosanitaire, de norme et d'étiquetage. Ce qui m'a surpris, dans cette région, est le nombre d'entreprises de taille moyenne qui ont rencontré des problèmes à l'exportation en matière de documentation sanitaire ou qui ne s'orientent pas vers l'export parce qu'elles ne sont pas sûres de leur dossier et ne veulent pas courir le risque d'avoir un container bloqué quelque part. Il y a donc là un effort à faire en matière de documentation. Il est important que les entreprises agroalimentaires puissent savoir où se trouve la personne qui pourra les informer exactement sur les conditions d'importation de tel ou tel produit vers tel ou tel pays dans le monde.
S'agissant des problèmes de diagnostic, les entreprises de Languedoc-Roussillon sont très petites. Il y a, en moyenne, beaucoup plus de TPE dans l'agroalimentaire en Languedoc-Roussillon qu'en France et le taux d'échec à l'exportation, au bout de cinq ans, est de 88 % des entreprises. Une partie est due à la mortalité des entreprises, mais il faut quand même s'interroger sur ce chiffre car il s'agit là d'une part de la vie des entreprises mais également de l'utilisation des deniers publics. Je pense qu'ils pourraient être mieux utilisés. Il faut savoir dire non. Il m'est arrivé de dire non à une entreprise qui voulait prospecter. Mieux vaut avoir moitié moins d'entreprises à l'export qu'un taux d'échec de 90 %. Au final, on aura davantage d'entreprises qui auront réussi et qui auront pu se maintenir sur les marchés internationaux.
Dans le cadre de la loi de décentralisation, il a été demandé aux régions de fournir un schéma régional de développement économique et d'innovation. A l'intérieur de ce schéma figure le fameux plan régional d'internationalisation des entreprises (PRIE). J'ai commencé à travailler avec l'un de vos collaborateurs dans cette maison pour l'aider à approcher ce sujet qui est nouveau pour les conseils régionaux. Or, je me suis aperçu qu'apparemment, il n'y a pas de mutualisation du savoir-faire ou de l'expérience entre les régions françaises. Et je pense qu'il serait intéressant, dans le cadre de l'ARF, que la région Languedoc-Roussillon puisse se rapprocher de régions qui ont du succès à l'export. Il y a l'Alsace, Rhône-Alpes et d'autres afin de mutualiser les savoir-faire et les expériences et pouvoir offrir le meilleur service aux entreprises.
M. Christian Bourquin, rapporteur spécial . - Il n'y a pas de coordination entre l'État, au sens gouvernemental du terme et les régions. Donc si déjà au niveau politique, il n'y a pas de coordination, je conçois qu'il n'y ait pas de coordination au niveau régional.
M. Pierre Fabre . - Non, je ne parle pas de coordination, je parle d'échange, de mutualisation de savoir-faire, de bonne pratique.
M. Christian Bourquin, rapporteur spécial . - C'est une bonne pratique de dire que, à l'échelle de l'État, on nous dit ce qu'on sait faire, comment on arrive dans un pays, et après qu'on dise aux régions, regardez, allez-y dans ce cadre-là dans ce pays. On ne peut pas dire qu'il y ait une grande coordination.
M. Pierre Fabre . - Non. La coordination, on a essayé de la mettre en place. Vous-même avez écrit aux préfets de régions, il y a deux ans, pour proposer d'héberger le guichet unique prévu par la charte de l'exportation. Vous avez écrit trois mois avant la signature de la charte nationale. Malheureusement, pour des raisons sur lesquelles nous n'allons pas revenir, nous n'avons pas pu signer de charte en région, maintenant le nouvel acte, c'est la création, de la BPI Oseo, qui sera l'occasion d'essayer à nouveau d'avoir un guichet unique. Il faut un guichet unique avec des interlocuteurs clairement identifiés et pas une plate-forme Internet ou un numéro de téléphone. Il faut des personnes qui puissent répondre directement aux questions des entreprises.
M. Christian Bourquin, rapporteur spécial . - Pour Ubifrance, je propose au directeur d'agrotech, Benoît Tarche, d'intervenir.
M. Benoît Tarche, directeur d'Agrotech - Ubifrance est un réseau. De ce fait, je vais vous proposer une intervention polyphonique avec trois co-interventions. Donc, je commencerai et je passerai ensuite la parole à M. Marc Fortier et à Mme Claudia Lelong pour présenter un peu mieux l'action d'Ubifrance au niveau de la région en particulier. L'export n'est plus une option de développement, c'est une nécessité et il reste à savoir comment on l'aborde. Ce qu'on a vu également, c'est que l'export, c'est compliqué et il y a de fortes chances que ça le demeure. C'est long, ça prend du temps et ça continuera à en prendre. C'est coûteux parce que ça implique une stratégie sur le long terme.
Le rôle d'un dispositif public comme Ubifrance, c'est d'essayer de rendre un peu plus simple ce qui sera toujours compliqué. Pour cela, la réorganisation du réseau d'Ubifrance qui date maintenant de quatre ans, nous sommes un jeune établissement avec une longue histoire, a eu pour but de mettre en place une « boîte à outils » qui doit permettre de répondre à l'ensemble des besoins d'une entreprise ou d'un collectif d'entreprises dans sa démarche d'export sachant qu'Ubifrance intervient sur l'identification des opportunités de marché, sur l'accompagnement sur les marchés pour rencontrer les bons opérateurs et finaliser un contrat et faire en sorte que ce contrat soit bien signé et respecté. Cela nous engage dans les relations que nous avons avec les entreprises. Il faut rajouter de temps en temps quelques instruments dans la boîte à outils. Sur le cas spécifique de la Chine notamment des problématiques d'accès, de dédouanement, de libération des produits ont été signalées. C'est pourquoi, au mois de septembre dernier, nous avons installé un collaborateur spécialement dédié au « dernier kilomètre », si je peux reprendre l'image. Ca ne sert à rien de dépenser au niveau de l'instance nationale, régionale et individuelle des entreprises beaucoup d'argent pour se retrouver avec un container bloqué à une frontière. On est vraiment là dans cet esprit de flexibilité et d'adaptation d'un outil à des problématiques différentes. Si je peux résumer, un outil, c'est un peu l'histoire du ciseau à bois, « on peut se couper les doigts ou faire une oeuvre d'art ». Il faut s'appuyer sur des stratégies individuelles d'entreprise, des stratégies régionales clairement identifiées portées par des fédérateurs régionaux clairement identifiés et intégrer le tout dans une approche nationale. Une stratégie nationale n'est absolument pas parachutée, elle n'est que la consolidation de toutes ces démarches et j'insiste là-dessus parce que c'est vraiment une démarche que l'on souhaite approfondir avec les régions : faire converger les stratégies nationales d'accompagnement à l'export avec les stratégies régionales. La stratégie nationale n'a de sens que si elle porte l'ensemble de ces composantes régionales. Dans le secteur agroalimentaire plus que tout autre, les identités régionales sont fortes même sous une « ombrelle France » qui elle-même a une identité forte. On est vraiment dans une approche d'équipe de rugby, chacun est sous le même maillot avec des fonctions différentes. Dans cette unification des stratégies qui se traduisent par un programme France export agroalimentaire qui est porté par l'ensemble des acteurs, qu'ils soient régionaux ou nationaux, ça oblige à des échanges réguliers.
Dès cette année, les partenaires régionaux participeront à la préparation et aux réflexions menées pour l'élaboration du programme France-Export. Ça va se faire en juin, il va y avoir des ateliers de travail avec les partenaires régionaux pour construire ce programme France-export. Cela va nécessiter aussi de la formation pour nos équipes. On va approfondir ce qu'on a déjà fait dans votre région puisque au niveau agroalimentaire, nos spécialistes du secteur sont régulièrement sensibilisés et formés auprès des partenaires régionaux ou acteurs professionnels sur la spécificité de certains produits. On l'a fait dans le domaine des fruits et légumes, ici, il n'y a pas très longtemps. Nos spécialistes des marchés sont venus s'imprégner de la problématique de ces produits et comment mieux les accompagner à l'export, comment mieux sensibiliser les entreprises aux démarches à entreprendre. On est vraiment dans une action collective structurée conjointe. A côté de ce sillon principal, il y a les sillons secondaires qu'il ne faut pas oublier parce que une participation à un salon, c'est bien, les rencontres avec les acheteurs c'est bien mais ce sont des actions sporadiques qui sont limitées dans le temps, qui doivent s'inscrire dans une stratégie de long terme. Il y a un travail important à mener et à approfondir en région pour permettre à des entreprises d'être mieux préparées à l'export et mieux accompagnées au moins sur le moyen terme dans leurs démarches sur les marchés et leur formation sur place. Beaucoup de mes collaborateurs viennent régulièrement animer des ateliers en région pour les former à la démarche export en agroalimentaire, dans les fruits et légumes, dans la viande, dans le vin, etc. Il y a donc ce travail de préparation, d'information et d'accompagnement sur les marchés d'intérêt pour les produits spécifiques de l'entreprise, d'être présents pour faire en sorte que la mise en contact sur les marchés avec les bons acteurs fonctionne et que la réaction chimique qui se traduise par la signature d'un contrat s'effectue. On a donc un souci d'impact qui est largement réparti, évidemment, entre le dispositif public et les acteurs régionaux. Nous le mesurons étroitement et je crois que les informations que nous commençons à en tirer depuis la mise en place de cet instrument de mesure, c'est-à-dire depuis le 1 er janvier de l'année dernière, sont très intéressantes. Nous faisons mesurer systématiquement toutes nos actions par un prestataire extérieur Ipsos qui mesure le contrat signé, la suite d'une action d'accompagnement public ou l'action en cours. C'est mesuré à six mois et deux ans, de façon à recouvrir l'ensemble de la vie de la négociation commerciale et ce qui est assez intéressant, c'est qu'il existe une marge de perfection importante. Actuellement, nous sommes, dans l'agroalimentaire, toutes régions confondues, sur un peu plus de 50 % de contrats signés ou en voie de l'être à six mois après une action d'accompagnement par Ubifrance, ce qui est important, mais ce qui montre bien qu'il y a une marge de progrès dans la mesure où les entreprises sont mieux préparées à la base et sont mieux accompagnées dans la durée. Je pense qu'il y a de ce fait un certain nombre de pistes sur lesquelles il faut vraiment tous travailler, la stratégie conjointe, l'accompagnement personnalisé dans le temps et la sensibilisation respective entre le réseau public et les opérateurs régionaux.
M. Marc Fortier, directeur régionale d'Ubifrance . - Je suis basé à Lyon et couvre cinq régions françaises. Je suis rentré il n'y a pas très longtemps du réseau étranger et j'ai eu, comme Pierre Fabre, une expérience de 35 ans à l'étranger sur sept pays qui sont des pays phares pour le commerce extérieur français, entre États-Unis, Inde, Chine, Corée, Moyen Orient et Allemagne
Tout d'abord, je voulais dire combien il y avait de la résonance dans ce que vous aviez dit pour les 800 collaborateurs que nous avons dans 70 pays et 80 bureaux Ubifrance à travers le monde. L'expression de madame Brigitte Bouillut « l'important c'est d'y rester » correspond à notre politique car nous voulons que les entreprises s'installent et développent des courants d'affaires. Le sondage IPSOS est essentiel pour mesurer des courants d'affaires car c'est là notre indicateur de performances. Il faut véritablement s'inscrire sur la durée et c'est le message que l'on envoie aux opérateurs en France et aux régions. Faisons du partenariat sur le long terme avec une vision, une bonne technologie, un bon produit, une bonne image, des ressources financières et des cadres compétents. Si le chef d'entreprise n'a pas une bonne vision, elle restera là et elle n'ira pas à l'international alors que son entreprise a un potentiel comme M. Bertrand Girard l'a rappelé. Le succès à l'exportation est une question d'hommes et de femmes. Il faut donc absolument que ceux qui partent prospecter les marchés soient préparés à le faire. Négocier un marché c'est également maîtriser les paramètres culturels. On ne s'improvise pas négociateur en Chine ou au Moyen Orient sans avoir analysé un certain nombre de différences culturelles. Tout ceci pour revenir sur ce qui sera déterminant pour notre commerce extérieur. Bien sûr il y a les démarches collectives, et on constate un peu partout dans les régions une véritable synergie entre les partenaires et les opérateurs dans les démarches collectives. Mais le résultat in fine que l'on constate sur le marché, c'est le succès d'une démarche individuelle. C'est bien pour cela que nous mettrons des chargés d'affaires à l'international au sein de la BPI qui se mettra en place, qui s'occuperont d'un portefeuille de 15 à 20 entreprises qui ont un potentiel. Nous nous occuperons d'elles pendant deux ans jusqu'à ce qu'elles soient un champion reconnu dans leur branche au niveau international. Aussi je crois que les régions ont un rôle à jouer dans cette démarche individuelle. Nous sommes en train de réfléchir à une séquence que nous voulons proposer aux régions : il s'agit de leur demander, à travers leurs outils et leurs instruments, qu'elles identifient les entreprises qui ont à la fois les ressources humaines, le bon produit, la bonne image et la volonté d'y aller. Ensuite on ne peut pas embarquer tout le monde à la fois, il faut y aller par pallier. Que l'on prenne 10, 15 ou 20 entreprises, on s'en occupe sur 20 ans et l'on définit des séquences. On ne peut rien faire si l'on n'y est pas bien préparé : diagnostic, préparation, élaboration d'une stratégie, d'un plan d'action, d'un calendrier et mesure des résultats au fur et à mesure. Ensuite il faut faire des accompagnements sur des pays ciblés car on ne peut pas aller sur tous les pays à la fois. Il faut établir une hiérarchisation des marchés. Lesquels sont les plus solvables, lesquels sont les plus porteurs et lesquels sont les plus ouverts et ont le moins de barrières douanières ou de contraintes techniques ? Une fois que l'on emmène l'entreprise et qu'on la met en relation avec les bons partenaires, il est indispensable de mettre en place un suivi. L'échec de la plupart de nos PME sur nos marchés étrangers est dû à l'absence de réactivité dans les six mois qui ont suivi la mise en relation. La plupart des interlocuteurs, qu'ils soient du Moyen Orient ou d'ailleurs ne prennent pas en considération les vacances d'été. Quand on est en Asie, on attend une réponse dans la semaine qui suit la mise en relation. Et le dernier point, une fois que les entreprises ont établi un contact, qu'elles ont établi un courant d'affaires, il faut absolument qu'on participe à leur maintien sur leur marché. Le maintien est indispensable et pour cela, il faut vraiment s'appuyer sur des prestataires de qualité qui sont spécialisés à la fois dans le droit des sociétés, dans la logistique pour aider ces entreprises à rester sur ces marchés. Je laisserai notre déléguée régionale Mme Claudia Lelong parler très rapidement des synergies des partenaires au niveau de la région Languedoc-Roussillon.
M. André Ferrand , rapporteur spécial . - Notre propos est d'évaluer l'ensemble du système d'appui. Il est important qu'on y reste et j'ai bien noté que vous étiez l'un des six directeurs inter régionaux d'Ubifrance. Ce qui m'intéresserait est de savoir quel rôle joue un directeur interrégional ? Vous-même étant en charge de l'Auvergne, du Languedoc-Roussillon, de PACA et de Rhône Alpes.
M. Benoit Tarche . - Au quotidien dans les régions nous avons des délégués régionaux qui sont en contact avec l'ensemble des partenaires qu'il s'agisse des réseaux consulaires, des agences de développement de la région et des directions des services de l'État. C'est un travail quotidien. Nos délégués ont un rôle à la fois d'animation, de coordination et de facilitateur pour amener les entreprises qui le souhaitent vers notre réseau étranger. Ils ont également un rôle de promoteur des opérations du programme France export national. Ainsi le programme France est décliné au niveau de la région Languedoc-Roussillon où les partenaires s'approprient un certain nombre d'opérations pour les inclure dans leur programme régional.
Les directeurs inter régionaux ont pour mission de mutualiser les bonnes pratiques qui existent entre les différentes régions car on a des formats très différents. Des régions travaillent avec une agence de développement comme nous en avons une ici en Auvergne ou en Rhône-Alpes avec ERAI. D'autres n'en n'ont pas et essaient alors de donner des orientations à nos délégués pour porter un message un peu plus « politique » à destination des directeurs en charge de l'économie dans les régions et des directeurs des chambres de commerce pour essayer d'anticiper les fameuses décisions qui se mettront en place dans les mois qui viennent. Nous restons également à la disposition des régions pour participer à l'élaboration des PRIE. Nous sommes une « courroie de transmission » en région entre nos directions régionales et nos bureaux Ubifrance à l'étranger.
Mme Claudia Lelong, déléguée régionale d'Ubifrance . - Je suis en poste en Languedoc-Roussillon depuis 2009. L'action en tant que déléguée régionale est en synergie avec les équipes de Sud de France développement, que ce soit dans la partie multi sectorielle, environnement, TIC multi développement, et la partie agro qui est un pan important de notre économie. Les équipes d'Ubifrance sont en permanence en contact avec les équipes de Sud de France et avec OSEO puisque l'on a développé des aides et des prêts spécifiques pour l'export. Mon bureau est hébergé à la chambre régionale de commerce et d'industrie et je suis en contact les équipes des neuf chambres de commerce.
Ce partenariat donne de très bons résultats : pour 2012, 711 entreprises du Languedoc-Roussillon sont engagées sur des missions individuelles et 524 ont participé à des opérations collectives. Un point que l'on n'a pas évoqué ce matin, c'est le volontariat international en entreprise (VIE). En Languedoc-Roussillon, on a la chance de pouvoir s'appuyer sur les maisons de la région qui propose des postes disponibles aux entreprises ce qui veut dire qu'actuellement nous avons 57 VIE en poste, alors qu'en 2009 nous n'en avions qu'une quarantaine. Le VIE peut faire partie d'un accompagnement global des entreprises pour leur développement à l'international.
Mme Françoise Guétron-Gouaze, directrice régionale d'OSEO . - Aujourd'hui se tient le premier conseil d'administration de la Banque publique d'investissement (BPI). Celle-ci a pour mission de devenir le guichet unique pour l'accompagnement public à travers les chargés d'affaires OSEO qui deviennent des chargés d'affaires BPI. Ce ne sera pas une plateforme virtuelle et il y aura bien des gens en chair et en os dans les différentes régions, avec l'habitude de travailler en lien direct avec les entreprises. En outre, la BPI va accueillir des collaborateurs issus d'Ubifrance qui vont apporter leur expertise sur la partie internationale. A terme la BPI intégrera également la partie publique de la COFACE. La BPI est à la fois un financeur et un accompagnateur, parce qu'elle reprend l'activité d'OSEO à travers des produits qui existent comme le prêt participatif export, le contrat de développement export qui permet d'accompagner les entreprises pour trouver la trésorerie dont elles pourraient avoir besoin pour aller s'implanter à l'export. Ces produits tout à fait atypiques ne se trouvent que chez OSEO et pas chez les banquiers. Ce sont des produits que l'on qualifie chez nous de « mezzanine » car ils se situent entre les fonds propres et l'endettement classique. Ces prêts sont destinés à financer la trésorerie sur une durée en général de sept ans et à un taux bien inférieur à celui que l'on peut trouver sur le marché.
Ensuite il y a quelque chose qui est mal connu des banquiers et des entreprises malgré toutes les informations qu'on peut leur apporter, c'est la garantie des prêts bancaires qui sont dédiés à l'international ; c'est-à-dire tout ce qui peut concerner les cautions export. Vous savez que les banquiers et raisonnent en encours et quand on leur garanti une partie de leurs risques, ils vont plus loin dans l'accompagnement de l'entreprise. Avec le « buzz » fait autour de la BPI, je pense que cela permettra aux banquiers de savoir un peu mieux ce que fait OSEO.
Ensuite, j'ai beaucoup entendu parler de l'innovation. C'est vrai que le secteur agroalimentaire est un secteur qui vient peut-être un peu moins rechercher de crédits innovation. Or, l'innovation n'est pas uniquement de la R&D. Par exemple, à l'international, nous proposons déjà une aide au partenariat technologique et une aide au développement de l'innovation à l'international. Là je crois qu'il ne faut pas se mettre de barrières et il ne faut pas hésiter à nous interroger.
Quand j'ai reçu l'invitation pour cette table ronde, j'ai réfléchi à ce qu'il peut manquer. Je pense que l'on pourrait mobiliser les créances des donneurs d'ordre à l'étranger, au moins les donneurs d'ordre européens car aujourd'hui avec OSEO, on mobilise déjà les grands donneurs d'ordre privés et le secteur public. On pourrait peut-être réfléchir à un système qui irait encore plus loin et prendre en compte au niveau de l'Europe les grands donneurs d'ordre privés car les grandes entreprises allemandes ou italiennes présentent un risque minime. Reste à savoir comment au niveau législatif on pourrait mettre cela en ordre de marche. Ensuite, comment faire pour ne pas être surpris par un « one shot », c'est-à-dire comment fait-on pour rester plus longtemps que les deux ans de financement prévus à l'export. Comment faire pour que l'entreprise pérennise son implantation dans le pays vers lequel elle a été aidée.
M. Christian Bourquin , rapporteur spécial . - Merci, Madame, je propose à M. Philippe Nauche, directeur marketing et stratégie chez SOPEXA de prendre la parole.
M. Philippe Nauche, directeur marketing et stratégie chez SOPEXA . - Je voulais juste préciser que SOPEXA, créée en 1961 par M. Edgard Pisani avec les pouvoirs publics et les professionnels de l'agroalimentaire à l'époque, est devenu aujourd'hui un groupe marketing international alimentaire qui gère pour le compte du ministère de l'agriculture une délégation de service public depuis 2008.
Je souhaiterai revenir sur deux points qui tiennent compte également des remarques qui ont été faites par un certain nombre d'entreprises. La première concerne l'offre : nous travaillons régulièrement, notamment avec Ubifrance, dans le cadre d'une instance qui s'appelle le Comité technique pour essayer d'améliorer la coordination de nos programmes et l'on est conscient qu'il y a encore des grandes pistes d'amélioration. Mais je tiens à dire aux opérateurs qui nous utilisent et qui nous voient, notamment au travers des salons, que c'est un travail que nous menons depuis bientôt trois ans. Nous essayons là aussi d'offrir avec Benoît Tarche quelque chose qui soit le plus lisible et le plus clair possible. Nous avons véritablement besoin de faire passer cette information, nous nous avons fait le choix non pas de s'implanter en région mais de s'appuyer sur les relais régionaux car c'est vous qui connaissez le tissu régional et les entreprises. C'est en échangeant régulièrement avec vous, parce que vous connaissez la demande des entreprises, que nous pourrons améliorer notre offre. Car si l'offre et la demande ne se rencontrent pas un moment, on aura tout faux que ce soient les chambres de commerce, Ubifrance, Sopexa, et toutes les structures qui s'occupent de promotion.
J'ai fait une tournée en 18 mois sur 22 régions et 84 structures qui s'occupent de près ou de loin de promotion. 84 cela peut paraitre beaucoup, c'est vrai qu'il y a des structures qui s'occupent que de la France, d'autres de l'international, d'autres du collectif, d'autres de l'individuel ; cela peut expliquer dans certaines régions cette hétérogénéité du dispositif. Il faut quand même savoir qu'il y a beaucoup de structures qui s'occupent de promotion de près ou de loin en France.
Ensuite Mme Bouillut a évoqué le sujet de la demande je pense que là aussi on a un gros travail de ciblage, de segmentation, de typologie de l'entreprise car encore une fois je ne suis pas certain que les demandes de Bertrand Girard soient du même niveau sur les mêmes marchés du même modèle que Mme Pratlong. Là je crois qu'il faut que l'on soit aussi souple et inventif que possible dans nos produits. Enfin je voudrais terminer, en donnant trois réflexions. M. André Ferrand parlait tout à l'heure que notre solde de commerce agroalimentaire qui avoisine les 11 milliards d'euros cette année était masqué par cet arbre que sont les vins et spiritueux qui a eux seuls vont représenter 9 milliards et demi de solde. Moi je pense qu'il faut qu'on utilise cette force, les vins et spiritueux comme un atout, nous le voyons bien et Ubifrance le fait également, les vins et spiritueux peuvent souvent être une locomotive pour d'autres produits dans un certain nombre de marchés : bien sûr, on pense au mariage naturel des vins et des fromages mais il n'y a pas que ce mariage qui peut aider à tirer d'autres produits à l'export.
On cloisonne trop entre ministères et entre structures alors qu'il y a de très belles choses à faire avec la culture, le tourisme, l'agroalimentaire. Les Italiens l'ont bien compris à New-York, les Espagnols l'ont compris dans d'autres pays, nous le faisons aussi de temps en temps mais pas suffisamment : je pense à la très belle opération pour la vallée du Lot « tourisme et gastronomie », en Belgique. Des synergies de cette nature devraient apporter un plus à nos entreprises, en tous cas dans certains marchés.
Enfin, à l'heure de la mutualisation, je crois que pas mal de structures se posent la question de l'hébergement d'entreprises : ERAI et d'autres structures travaillent sur l'accompagnement des entreprises. Là il y a un gros travail à faire car cela nous arrive aussi de temps en temps d'héberger des entreprises. L'union et la mutualisation sur les salons, les semaines françaises ou le démarchage commercial ne sont pas encore assez developpés aujourd'hui.
Monsieur Alain Bar, directeur interrégional des douanes . - Comme vous le savez, la douane est chargée de la régulation du commerce international. Dans ce domaine, elle doit concilier à la fois la facilitation et le contrôle des échanges. Je vais me focaliser aujourd'hui sur la facilitation mais si vous avez des questions sur les contrôles je pourrai également y répondre.
Sur la facilitation, la priorité de l'administration des douanes aujourd'hui est la simplification et la rapidité des formalités douanières bien entendu pour aider les entreprises qui exportent mais qui importent aussi. Je voudrais donc citer trois axes forts de notre action en ce domaine. Le premier axe est de nouer une relation avec les entreprises, cela fait plusieurs années que l'on y travaille, à savoir une relation plus personnalisée en matière de conseil. Nous avons créé depuis plusieurs années déjà dans chaque direction interrégionale des pôles d'action économique comme à Montpellier, dont la mission est de piloter la relation nouvelle que l'on entend développer avec les entreprises. Cela repose essentiellement sur une cellule de conseil aux entreprises, que chaque opérateur, chaque entreprise peut naturellement consulter, sur deux types de missions, l'une dédiée aux « grandes entreprises » et l'autre aux petites et moyennes entreprises.
Le deuxième axe, concerne le développement des outils de dédouanement modernes et sécurisés, c'est-à-dire des procédures dématérialisées et des téléprocédures. Notre système s'appelle DELTA et son objectif est de supprimer tous les papiers en matière de formalités douanières. L'objectif étant de réduire le délai de dédouanement. Ce délai moyen de dédouanement est aujourd'hui de cinq minutes ce qui est extrêmement faible, je pense que l'on peut l'améliorer un peu et c'est donc le résultat de la mise ne place de ces téléprocédures.
Le troisième axe fort est la mise en oeuvre d'un guichet unique des formalités administratives. La douane a déjà dématérialisé 82 % de ses procédures mais il en reste encore un certain nombre qui ne dépendent pas directement de ses missions. Vous savez, la douane positionnée à la frontière remplit un certain nombre de missions pour le compte d'autres administrations françaises, voir communautaires et il y a un certain nombre de documents, dits des documents d'ordre public, qui sont les certificats sanitaires, phytosanitaires, les autorisations d''exportation de matériel de guerre qui ne nous concernent pas directement et qui sont encore en format papier.
En 2010 la Direction générale des douanes a reçu un mandat ministériel pour mettre en place un guichet unique dont elle a la charge du pilotage et dont l'objet est de simplifier le plus possible les relations avec les autres administrations concernées avec le passage frontière, de simplifier les réglementations et de coordonner les contrôles. Le but étant dans l'idéal d'avoir un seul point d'arrêt pour les marchandises et de contrôle pour arrêter la superposition des contrôles et des contraintes que cela impose pour les transporteurs. Le troisième mandat est de dématérialiser les documents qui viennent d'autres administrations : nous avons les outils informatiques depuis mars 2013, la machine est en place et il suffit de la faire fonctionner. Deux tiers des documents sanitaires pour les contrôles vétérinaires sont dématérialisés donc on espère progresser encore dans ce domaine et rendre le plus fluide possible le passage en douane.
Pour conclure le constat que je souhaitais faire, ce qui n'est pas propre à cette région, c'est qu'il y a une relative méconnaissance des entreprises, des règlementations douanières. Certes elles sont compliquées car elles ne sont pas que nationales mais aussi communautaires. On s'aperçoit aussi que beaucoup d'entreprises méconnaissent assez largement les problèmes de logistique et cela peut les handicaper très fortement dans leurs opérations d'importation comme d'exportation. La problématique est de savoir comment mieux former ces entreprises. Nous y participons à travers des actions dans les universités par exemple où il y a des cursus sur la logistique ou le transport international, on organise des réunions douane - entreprises où les entreprises peuvent poser des questions. Ce n'est peut-être pas suffisant et il faudrait peut-être trouver des moyens de répondre à une culture internationale notamment sur les aspects procéduraux, réglementaires et logistiques.
M. Christian Bourquin , rapporteur spécial . -Merci à vous. Pour Sud de France développement je propose à M. François Fourrier de prendre la parole.
M. François Fourier, directeur de Sud de France développement . - Sud de France développement a pour mission d'accompagner les entreprises depuis 2005 dans le secteur du vin de l'agroalimentaire, le multisectoriel et le tourisme. Nous essayons de créer des synergies et d'accompagner à l'international environ 1 800 entreprises chaque année avec 472 actions dans le domaine du vin et de l'alimentaire. On a toujours à l'esprit d'accompagner les entreprises au mieux et de leur faciliter la tâche. En région, il y a un besoin de simplifier les choses. Pour les entreprises, c'est souvent un parcours du combattant pour obtenir des informations. Il y a bien entendu l'accueil physique, ne « pas parler à une machine », et il y a maintenant des moyens techniques, avec des plates-formes techniques pour éviter de remplir x fois le même dossier.
Deuxièmement nous accompagnons les entreprises internationales via différents prestataires de services. Or, en région on a plus besoin d'avoir des partenaires que des prestataires de services, surtout dans un contexte de contraction des moyens financiers et de recherches de meilleures synergies. Cela veut dire qu'il ne faut pas répercuter ces pertes financières à nos entreprises via des prix au mètre carré de salon plus importants.
Que la région communique sous l'ombrelle « France » est important mais ce n'est pas non plus vital si cela devient trop cher à nos entreprises d'y être. Il faut donc vraiment que l'on arrive à trouver des synergies avec UBIFRANCE dont nous sommes le premier client. Nous utilisons leurs services tant à Paris qu'à l'international. Il faut surtout que Paris s'adapte aussi à la demande des régions. Je sais que c'est complexe car chacun a ses spécificités et ses besoins. A l'étranger les maisons internationales avaient été critiquées mais plus de mille entreprises les utilisent tous les ans. On accueille des commerciaux export, des VIE, avec cette mentalité « terrain-terrain » qui correspond à la demande des entreprises. Comme l'a dit Madame Bouillut il ne faut pas envoyer les entreprises au « casse pipe ». On reçoit de Paris - ce n'est pas une critique... - un long programme d'opérations avec tous les secteurs d'activité, mais nos entreprises n'ont pas la capacité financière de participer à toutes ces opérations.
Plutôt qu'elles se dispersent, il faut les canaliser sur des programmes de deux ou trois ans, leur faire leur programme d'actions et d'accompagnement financier avec un renforcement au niveau de leurs ressources humaines, des langues etc. Accompagner un groupe d'une vingtaine d'entreprises pilotes c'est intéressant, mais en région on a énormément de petites entreprises qu'il faut continuer à accompagner sinon on ne créera pas d'exportateur. Les études COFACE qui ont été faites ces cinq dernières années à la demande de Sud de France développement montrent que ces petites entreprises présentent un chiffre d'affaires qui a augmenté entre 8 et 15 % en moyenne grâce à l'export.
Par exemple quand on travaille avec Ubifrance on « mâche le travail » sur les entreprises et ils nous accompagnent sur la sélection de prospects et une organisation, etc... Je viens d'apprendre qu'une étude IPSOS a été mise en place pour voir les résultats concrets sur nos entreprises et voir la pertinence de chaque euro dépensé. Nous voulons faire vivre l'image régionale car Sud de France est un succès à l'international. C'est important pour nous de garder notre stratégie et à nos vrais partenaires de s'adapter à nos demandes. Ce qu'on nous demande en région, pourquoi ne pas le faire à Paris ? Il y a AtoutFrance pour le tourisme, il y a SOPEXA, il y a UBIFRANCE, il y a en fait beaucoup d'interlocuteurs. Peut-être que fusionner tout le monde serait bien à tous les niveaux.
M. Christian Bourquin , rapporteur spécial . - Nous avons avec Sud de France la seule organisation qui, je crois au monde met l'économie derrière une marque. Cela paraît normal en termes d'agroalimentaire, le produit est derrière une marque. Mais je voulais vous dire que l'on était allé plus loin car l'on a mis également le tourisme derrière la marque. Cela obéit à un principe très simple, on a des études là-dessus, et je me suis calé là-dessus en termes de décision.
Quand on pose la question à un européen : « où veux-tu aller passer tes congés ou vivre tes loisirs ? », les trois quarts des réponses sont : « je veux aller voir ce territoire qui a fait ce bon produit et l'environnement du bon produit ». Cela ouvre les portes à la gastronomie, et à tout le territoire de la région évidemment. Les produits qui partent par votre entremise vers l'extérieur sont nos ambassadeurs et c'est là où notre produit est allé qu'il faut aller chercher nos touristes de demain. Or si on le fait à travers plusieurs référents, on va s'y perdre ! Vous avez sous la marque, le produit qui fait un aller mais qui procure aussi un acte économique de retour : cela s'appelle le tourisme. En gros c'est comme si vous aviez au niveau français au Gouvernement le ministre de l'agriculture qui serait le ministre du tourisme en même temps. Cela paraitrait quelque peu fantaisiste aujourd'hui et bien c'est ce que nous faisons en région. Excusez-moi de ce complément d'information mais il me paraissait essentiel de vous exposer la stratégie mise en oeuvre par la région.
Pour la CCI régionale, je propose à M. Fabien Leroux d'intervenir.
M. Fabien Leroux, directeur de la CCI international Languedoc-Roussillon . - Les chambres de commerce et d'industrie ont assez peu été citées depuis le début de cette table ronde et pourtant j'ai la faiblesse de croire qu'elles peuvent répondre à un certain nombre des préoccupations qui ont été exprimées depuis le début de la matinée. J'ai noté pèle mêle les questions de structuration, de préparation et d'accompagnement en amont. J'ai noté aussi la nécessité de tout apprendre et j'ai aussi relevé la question du diagnostic interne, j'y reviendrai un peu plus tard dans mon intervention car tout cela fait partie du quotidien des chambres de commerce. Il est vrai aussi que le « scope » d'intervention des CCI ne concerne pas uniquement l'agroalimentaire et touche évidemment tous les autres secteurs d'activité de l'économie de la région.
En deux mots, le réseau des CCI du Languedoc-Roussillon comprend 9 chambres de commerce territoriales, réparties sur tout le territoire et une chambre de commerce et d'industrie régionale. L'international est maintenant considéré comme une véritable priorité des élus des chambres de commerce qui ont décidé, il y a un peu plus de quatre ans, de mutualiser les compétences internationales de ces chambres en créant « CCI International Languedoc-Roussillon » dont je suis le directeur. Ils ont décidé de faire cela en partant du principe ou du constat que l'échelon pertinent en matière économique c'est bien l'échelon régional et non pas l'échelon infra départemental ou territorial tout cela afin d'être plus lisible, plus efficace, plus pertinent et probablement pour rendre plus simple la perception que pouvait en avoir les entreprises. Aujourd'hui l'équipe CCI Languedoc-Roussillon est composée d'une quinzaine de collaborateurs, répartis sur l'ensemble du territoire. Nous nous organisons également avec le pôle « quali méditerranée » des rencontres B 2 B à l'occasion des rencontres annuelles « quali méditerranée ». Le mandat très clair qui m'a été donné par les élus des chambres de commerce et d'industrie de la région est de travailler en partenariat, en collaboration et en complémentarité avec les partenaires du commerce extérieur de la région au premier rang desquels Sud de France Développement. Nous avons des échanges réguliers, nous montons un certain nombre d'opérations ensemble et le programme d'actions que nous proposons au titre des chambres de commerce est fait en collaboration avec Sud de France Développement. Notre deuxième partenariat très fort dans la région est conclu avec Ubifrance dont nous hébergeons au sein de la CCI de région un délégué. Ce partenariat vaut donc avec tous les autres partenaires de l'export en région, et en particulier, avec les douanes puisque nous organisons assez régulièrement des rencontres douanes entreprises avec OSEO, la DIRECTTE et les conseillers du commerce extérieur de la France qui ont une action pédagogique assez forte en direction des PME et des étudiants.
Notre mission essentielle est d'accompagner au quotidien et en proximité les entreprises. C'est la vraie valeur ajoutée des CCI : nous conseillons, nous informons, nous sensibilisons les entreprises à l'international. Nous avons aussi décidé dans le cadre de la mutualisation des compétences internationales de spécialiser tous nos conseillers à l'international par zone géographique, ce qui est un petit peu différent de l'approche qui est à la fois celle de Sud de France Développement et celle d'Ubifrance. Cela ne nous empêche pas une réflexion sur le fait de doter nos conseillers en développement international d'une double compétence, la première étant la compétence pays et la seconde étant la compétence filière sectorielle afin d'être plus pertinent et de répondre également aux demandes plus précises des entreprises.
Nos actions se déclinent en quatre grands thèmes. Dans le cadre de la sensibilisation et de l'information, nous organisons des journées « pays » dont un certain nombre d'entre elles concernent plus spécifiquement l'agroalimentaire y compris le vin. Nous avons notamment avec Ubifrance organisé les années passées des rencontres agroalimentaires, en faisant venir des experts pays en agroalimentaire dans les territoires pour porter la bonne parole aux entreprises et pour les recevoir en entretien individuel, leur permettant ainsi d'évoquer leurs problématiques spécifiques. Nous avons aussi développé cette année un projet dans le domaine de l'agroalimentaire bio au Benelux et en Suisse. Nous organisons beaucoup de formations en matière internationale où nous avons créé un cycle spécifique. Si je reprends le programme de celles qui ont déjà eu lieu ou celles qui vont avoir lieu, nous avons eu une formation sur les clés de la logistique internationale. Nous organisons des ateliers primo exportateurs ; pour les entreprises qui découvrent l'exportation on essaie sur une journée de leur donner les principales clés et les erreurs à ne pas commettre. On insiste beaucoup sur l'interculturel et la manière de se comporter en face d'un acheteur étranger. Ensuite on assure la promotion des opérations qui sont montées par nos partenaires Ubifrance, Sud de France et les CCI à l'étranger. Contrairement à pratiquement toutes les CCI françaises, en Languedoc-Roussillon, nous ne sommes pas un opérateur, car ce rôle est rempli par Sud de France Développement. Aussi nous avons considéré que nous n'avions pas à organiser la participation d'entreprises de la région à des grands salons ou des forums à l'étranger.
M. Christian Bourquin, rapporteur spécial . - Merci je donne la parole à M. Guy Givat.
M. Guy Givat, président de la chambre régionale d'agriculture - Avec les chambres d'agriculture on revient aux racines de l'agroalimentaire car ce sont les agriculteurs qui produisent ce que vous transformez et ce que vous savez vendre. La priorité est qu'il y ait un lien étroit entre les agriculteurs et les commerciaux. Dans le système coopératif cela se fait naturellement parce ce sont des adhérents. Depuis que j'assure la présidence de la chambre, j'ai beaucoup travaillé avec l'ARIA. Aujourd'hui nous sommes en contact avec les deux principaux secteurs de commercialisation. vingt ans en arrière, nous n'étions que des fournisseurs de matière première. Or, aujourd'hui nous sommes en train de regarder où nous pouvons placer nos produits.
Permettez-moi aussi d'échanger sur les produits qui pourraient occuper un peu plus le territoire car nous avons de la terre libre en Languedoc-Roussillon et il faudrait peut-être produire un peu plus dessus pour que les touristes viennent... Les produits doivent être présentés dans un cadre environnemental le plus agréable possible. Trois produits ont été cités : le vin, l'élevage et les céréales qui participent à l'excédent de la balance commerciale. Les vins : je tiens à y revenir sur le travail énorme qui a été fait. Concernant l'élevage et les céréales, nous sommes un bassin céréalier très important en blé dur. En élevage nous avons la Lozère certes mais aussi le Rhône où beaucoup de produits viennent sur Sète pour être embarqués côté Méditerranée. Il ne faut pas négliger ce marché, ni des céréales ni de l'élevage du pourtour méditerranéen car actuellement, notamment l'Algérie mais aussi le Maroc, il y a énormément de capitaux chinois qui sont en train de s'installer dans l'agriculture car ils savent très bien qu'ils sont à une heure de vol de l'Europe. Nous sommes une porte d'entrée pour l'Europe là aussi. Je pense que l'on a un travail important à faire sur les deux ports Sète et Port la Nouvelle.
Pour être relativement bref je dirai que l'agriculture doit s'adapter : si le producteur fait du bon vin et que personne ne veut le boire, c'est que ce n'est pas du bon vin. Donc le réseau technique est relativement important et comporte plus de 300 personnes sur les 5 départements qui peuvent apporter un conseil aux agriculteurs et les orienter pour que leurs produits soient vendus. Puis il ne faut pas oublier qu'à Montpellier il y a un centre de recherche agro-économique important, nous avons donc tous les atouts pour travailler ensemble.
M. Christian Bourquin, rapporteur spécial . - La région a participé et a initié des travaux sur le canal de Sète au Rhône pour aller chercher les blés durs et les céréales du centre de la France. Ainsi, avec Port la Nouvelle, tous les produits du Lauraguais et du Midi Pyrénées, soit un potentiel à l'exportation des céréales en gros à 70 voire 80 %, qui serait rassemblé physiquement autour de la méditerranée et après sur le monde. Ce sont des investissements que nous sommes en train de faire au travers de la région.
Ce sont des ports que l'on relance : pour vous donner une idée on met 300 millions d'euros pour le port de Sète et 200 millions à Port La Nouvelle.
Je donne la parole à M. Pierre Jean Baillot, directeur général adjoint, concernant ERAI pour clôturer le débat.
M. Pierre Jean Baillot, directeur général adjoint d'ERAI . - Ce que l'on veut tous c'est simplifier et rationaliser nos structures et nos relations. ERAI entreprise internationale a été crée en 1987 le Conseil régional qui, en partie, abonde l'association loi 1901. Avec 27 implantations à travers le monde dans 21 pays on n'est pas du tout dans le même modèle. Comme Sud de France, nous sommes à Shanghai où l'on porte ce qui était le pavillon de la région Rhône-Alpes lors de l'exposition universelle. Ce pavillon de 3 000 mètres carrés a été conservé comme une « grosse maison » pour la région Rhône-Alpes. Pour le reste, nous avons créé des bureaux d'accompagnement d'entreprises et de domiciliation d'entreprises. Nous sommes aujourd'hui très clairement confrontés à la baisse des subventions publiques ; la seule dotation qui nous arrive est celle de la région Rhône-Alpes, donc on fonctionne comme une PME qui doit gérer des coûts et qui doit augmenter la prestation payante d'accompagnement d'entreprise. On a réussi au mois de juin 2011 à créer une équipe Rhône-Alpes de l'export avec cinq signataires initiaux que son l'État, la région, le Secrétaire d'État au commerce extérieur, la CCCIR représentant les onze chambres territoriales en Rhône Alpes ainsi qu'Ubifrance et ERAI. On a signé ensemble un vrai engagement rejoint ensuite par les autres opérateurs au mois de novembre de la même année : OSEO, la COFACE, les conseillers du commerce extérieur, la chambre des métiers. Nous avons conclu une convention bilatérale entre Ubifrance et ERAI. L'organisation nationale et une régionale enfin signent et se mettent d'accord pour aller plus loin. Même si c'est une perte de souveraineté, c'est un début de renonciation nécessaire à certains pans d'action car évidemment on ne peut pas être partout. On ne peut pas emmener toutes les entreprises dans le monde pour tout faire. L'équipe régionale de l'export prend les différents stades de développement de l'entreprise. Il y en a qui savent mieux faire que les études d'implantation, ou faire de la domiciliation. Nous avons bien travaillé avec Ubifrance et cela commence à porter ses fruits, il y a maintenant des actions communes qui se déroulent.
Vous connaissez la situation économique de l'Espagne aujourd'hui, donc nous avons été amenés à « réduire la voilure » ; il y avait deux solutions soit « on coupait toutes les têtes » soit on arrivait à garder une présence car il y a aussi un lien entre la Catalogne au niveau politique en terme de coopération. Nous sommes encore dans les bureaux d'Ubifrance nous avons poursuivi les activités et l'on a encore une personne ainsi que d'autres idées de rationalisation de nos structures.
On discute aujourd'hui à partir d'une convention que nous avons signée avec Sopexa en Chine. L'équipe régionale export fonctionne mais n'en est qu'au début de sa mise en marche même si l'agroalimentaire n'est pas notre spécialisation, ni notre champ d'action en tant que tel. Aujourd'hui, ERAI ne peut être comparé à Sud de France en termes de lisibilité. Comme l'a rappelé le Président Bourquin, l'agroalimentaire c'est très compliqué. Comme nous l'avons évoqué il faudrait « fusionner tout cela » ; pas par une marque « Rhône Alpes » car il faudrait sur l'agroalimentaire mettre tout le monde autour d'une même structure au-delà même d'une barrière régionale mais laissons les politiques faire cela...
Ce que l'on a initié, c'est cette synergie avec d'autres agences régionales comme Bretagne commerce international (BCI). On commence à oeuvrer pour le rapprochement avec les différents opérateurs, on fait plus que dialoguer, on commence à construire des programmes communs d'action. On réfléchit aussi avec les Pays de la Loire pour une implantation dans un pays étranger, Pourquoi ne pas partager des implantations dans le monde ? L'idée est aussi aller au-delà, je n'ai pas en tête les coopérations que vous menez au niveau international en Languedoc-Roussillon, mais en Rhône-Alpes une dizaine qui fonctionnent. On pourrait collaborer entre les régions puis poursuivre une politique d'essaimage. Avec nos amis de Québec, ERAI a mis en place une coopération depuis 1986 qui s'appuie sur une structure et aujourd'hui nous communiquons sur une carte conjointe. Nous avons deux bureaux aux États-Unis, l'un à Atlanta, l'autre à Philadelphie. Ils viennent d'ouvrir en bureau à New-York. Nous n'aurions pas les moyens d'en ouvrir un mais nous avons une place qui nous est réservée pour nos entreprises ce qui nous permet d'avoir un pied d'accès à New-York. Inversement et cela nous va très bien dans le modèle économique nous avons des entreprises québécoises à Shanghai, en cours d'implantation à Casablanca et également au Burkina. Nous venons de signer avec l'agence wallone à l'exportation, un peu sur la même logique et avec l'Emilie Romagne en Italie.
M. Christian Bourquin, rapporteur spécial . - J'ai deux questions auxquelles la réponse peut être rapide. La première, sur le fait que le Gouvernement a lancé deux projets celui du plan d'action agroalimentaire à l'export et celui de la création de référents régionaux en matière agroalimentaire et du bois. Quels sont les objectifs de ces dispositifs et où en est-on de leur déploiement ? Ma seconde question, et je l'ai entendue de la part de certains d'entre vous, c'est au niveau régional : qui est le « chef d'orchestre » pour les services de l'État ?
M. André Ferrand, rapporteur spécial . - On l'a déjà dit depuis ce matin, pour aller à l'international il faut avoir une certaine taille et pour s'unir et se regrouper il existe des coopératives. Pour ma part je connais mal les coopératives mais si dans l'agroalimentaire c'est la bonne manière d'atteindre la taille critique pour exporter, encore faut-il que le système juridique et administratif des coopératives soit optimal. Il serait peut être intéressant si l'on a quelques minutes pour notre rapport en particulier d'avoir un éclairage sur ce plan.
Mme Brigitte Bouillut . - Lorsque l'on veut mutualiser les entreprises pour l'export, la solution juridique du groupement d'intérêt économique (GIE) vient spontanément à l'esprit pour permettre facilement à un collectif d'entreprises qui vient de se créer de mener à bien un projet et de le réussir. Les collectivités locales et publiques nous demandent souvent d'avoir un groupement d'entreprises comme porteur d'un projet, on n'a pas trouvé à cette heure la formule juridique simple, rapide qui permet de multiplier les groupements d'entreprises ce qui me parait être une bonne solution en plus de la coopération bien entendu. Je serai très intéressée sur une recherche sur des formes juridiques le groupement d'entreprises.
M. Pascal Augier . - Pour compléter ce que vient de dire madame Bouillut, j'avais été auditionné au Conseil économique et social sur la même thématique, saisine que je peux vous faire parvenir qui comprend une des propositions que j'avais émise : il s'agit de créer une société en actions simplifiée (SAS) export avec un groupement d'employeurs (GE) ou un GIE. Il y a un vrai sujet à explorer là dans le format coopératif, notamment pour des petites sociétés 5, 10, 15 personnes, qui ont besoin de mutualiser, sans forcément rentrer dans un système coopératif. Avec les statuts d'une SAS, le fonctionnement en termes de capital peut se réguler facilement. C'est une formule qui peut être innovante d'un point de vue organisationnel.
M. Matthieu Gregory . - Le référent régional en matière agroalimentaire doit être un acteur fort dans le contexte où les entreprises connaissent parfois des difficultés. Plus on travaille en amont sur ces difficultés, plus on peut aider une entreprise à sortir de la crise l'agroalimentaire qui est un secteur fort pour la région Languedoc-Roussillon à l'international. Voici le rôle qui a été donné, évidemment en collaboration étroite avec vos services comme on l'a toujours fait. Pour répondre à votre seconde question, concernant le « chef d'orchestre » dont j'ai parlé sauf pour les services de l'État....
M. Pierre Fabre . - S'agissant du développement de l'international il est clair que maintenant le chef d'orchestre c'est la région. Cela a été dit, cela a été acté et maintenant il appartient aux régions de remettre ce fameux plan régional d'internationalisation des entreprises qui sera l'alpha et l'oméga de leur prochaine mandature de développement. Il peut s'inscrire dans le cadre de la politique de Mme Bricq aux fameuses quatre familles de produits à développer : mieux se nourrir, mieux se soigner, mieux communiquer, mieux vivre en ville. Le Languedoc-Roussillon pour au moins trois de ces familles est quand même bien placé. Tant mieux ! M. François Fourrier demandait à ce que l'État s'adapte à l'état des régions. Mais cela va encore plus loin ce sont les régions qui sont invitées à exprimer leurs besoins et à mettre en oeuvre un plan pour les satisfaire. C'est très clair.
M. Christian Bourquin, rapporteur spécial . - L'État a effectivement souhaité faire reposer sur les régions ce rôle de pivot dans l'internationalisation des entreprises et je m'en félicite car nous avons une connaissance fine du tissu entrepreneurial.
M. Pierre Fabre . - Juste un complément sur le lien entre le référent régional et le plan d'action qui est portée par Mme Bricq et par M. Garot, l'un est une composante de l'autre. Lorsque les deux ministres ont porté sur les fonds baptismaux ce plan d'action à l'occasion du SIAL au mois d'octobre dernier, ce plan comportait six volets avec la mise en place de ces référents, un effort d'optimisation des ouvertures de marchés, comment tout le dispositif se coordonne pour ouvrir le marché et permette ensuite des actions commerciales. Une action qui intègre également la formation des entreprises : leur permettre d'être agrée pour ces exportations, un comité « Asie » qui sert un peu de pilote de ce plan d'action, qui réunit les organisations professionnelles dans l'agroalimentaire pour mieux aborder la Chine et d'autres actions que je ne vais pas détailler de cette approche.
M. André Ferrand, rapporteur spécial . - Je voudrais profiter de la présence de tous les acteurs pour dire un mot sur nos « pavillons » à l'international. Ceux qui les ont pratiqués se rendent compte que nous n'en sommes pas encore arrivés à la situation optimale qui serait que le pavillon France soit présent partout dans le monde avec tous nos opérateurs, sous le même toit français. Ce n'est pas le cas. Je pense que tout le monde est d'accord. Et là je voudrais l'avis de tous pour une ombrelle unique où il faut raisonner international et agir régional. Cela peut résumer ce sur quoi nous sommes tous d'accord. J'ai écouté ton discours sur le lien entre le tourisme et le fait que les gens venaient dans un pays qu'ils appréciaient. Tout cela a beaucoup de sens, d'autant plus que nous avons une région qui a une personnalité, une identité véritablement forte avec ses propres couleurs. Optimalement sous le grand toit français que l'on rencontrerait partout, les couleurs, la forme on sait que c'est attractif, on retrouverait la Bretagne, la Provence, Sud de France etc... Là je regarde Benoit Tarche et Philippe Nauche pour dire que c'est encore quelque chose que l'on n'a pas encore résolu et je vous pose la question pensez-vous que l'on va y arriver ? Allons-nous progresser dans ce sens et qu'en pensez-vous ?
M. Philippe Nauche . - Si je peux me permettre mais je crois que Benoît Tarche complètera sur le même registre que moi, dans ce que vous avez indiqué M. Ferrand, il y a deux sujets. François Fourrier l'a évoqué tout à l'heure, il y a le sujet de l'intelligente place à donner à la France, aux régions et à l'entreprise dans le cadre d'un salon. Car l'image France est porteuse, peut-être encore plus sur les pays tiers que sur les pays européens. Je pense que la région a toute sa place sur un salon. C'est un équilibre architectural à trouver sur lequel Ubifrance et Sopexa sommes en train de travailler : nous avons fait des propositions en tous cas dans le cadre d'un « club des régions » que nous avons créé pour améliorer la visibilité des régions cela est un premier point. Il y a eu une demande de nos tutelles qui est la DGPAT et la DG Trésor, pour faire en sorte que l'ensemble de nos pavillons France que ce soient ceux menés par la CCI, Ubifrance, Sopexa, Adepta, Sud de France, et d'une manière générale les opérateurs qui emmènent les entreprises à l'international fassent en sorte que notre pavillon soit le même au niveau de la signalétique et de la charte graphique que l'on soit au Bénin, en Allemagne, en Espagne ou aux États-Unis. C'est une demande de nos tutelles de travailler dans ce domaine-là. Nous sommes donc en train de travailler sur le sujet.
M. Benoit Tarche . - Juste pour compléter, effectivement dans la question il y a deux niveaux. Il faut faire vivre l'identité régionale et dans les produits agroalimentaires, il y a toujours des histoires à raconter. Or, les régions sont plus fortes pour raconter des histoires auprès des acheteurs à l'étranger. Donc évidemment on travaille depuis longtemps sur ces secteurs en ménageant à chaque fois cette hiérarchie entre l'ombrelle France et faire vivre dessous les identités régionales et la réalité propre de l'identité propre de l'entreprise dans un savant mélange qu'il ne faut pas oublier, l'une a enrichit l'autre. Si je prends les exemples de nos coopérations régulières avec Sud de France, sur les salons en Chine particulièrement, il y a toujours un long travail de préparation pour permettre à ces différentes identités de coexister et je crois que Sud de France peut répondre sur ce point là ultérieurement.
Au second niveau, nous travaillons sur le visuel commun entre les pavillons portés par les différents opérateurs.
M. Christian Bourquin, rapporteur spécial . - Il me reste à vous remercier tous de votre participation.
* 40 Cf. pièce jointe n° 1 .