II. UN CONTRÔLE QUI TEND VERS L'ÉVALUATION

La nécessaire conformité des mesures d'application à la volonté du législateur conduit à envisager la question de l'application des lois au-delà de leur simple applicabilité pour envisager une démarche d'évaluation dans le cadre d'un véritable « circuit normatif » ouvrant de nouveaux horizons au contrôle parlementaire.

A. 2012, UNE NOUVELLE DYNAMIQUE

1. L'élargissement du champ du contrôle parlementaire de l'application des lois

Nonobstant certaines limites tenant au processus d'élaboration des décrets, on peut considérer que la parution des mesures nécessaires est « sous contrôle », au moins pour partie. Pour autant, il ne s'agit là que d'applicabilité ...

La conclusion est beaucoup plus prudente si l'on aborde la question, non plus en termes seulement quantitatifs d'applicabilité, mais en termes qualitatifs d'application proprement dite, approche pourtant plus ambitieuse et plus instructive car elle s'intéresse non seulement à la parution en temps utile des décrets, mais surtout à leur contenu, déterminant dans la mise en oeuvre effective des lois.

La création fin 2011 de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois s'inscrit dans cette perspective. Sans préjudice des compétences des commissions permanentes, cette instance nouvelle s'est en effet vu confier par le Bureau comme mission première d'informer le Sénat sur la mise en oeuvre effective des lois votées par le Parlement.

Dotée des pouvoirs classiquement reconnus aux organes du contrôle parlementaire (auditions, élaboration de rapports d'information, organisation de débats en séance publique, ...) elle peut en outre se voir attribuer, si nécessaire, les prérogatives d'une commission d'enquête.

La Commission sénatoriale a adopté, depuis sa création, en liaison avec les commissions permanentes en charge du suivi des lois, dix rapports thématiques , présentés le plus souvent par des rapporteurs de sensibilités politiques différentes (plus deux autres rapports encore en cours d'élaboration). Leurs travaux ont montré que nombre de mesures législatives, bien que pleinement applicables, demeurent non ou mal appliquées .

Ainsi, le rapport de nos excellents collègues MM. Claude Dilain et Gérard Roche sur le droit au logement opposable (DALO) a constaté que cinq années après son adoption, la loi devenue « administrativement applicable » est toutefois mise en oeuvre avec difficulté dans certains départements, si bien que des milliers de ménages prioritaires demeurent très mal ou non logés, malgré leur situation prioritaire et urgente ; il met notamment en exergue l'absence des conditions nécessaires à la mise en place de ce droit, à savoir l'insuffisance et l'inadaptation financière et géographique de l'offre locative sociale. En outre, il a relevé que la mise en oeuvre du DALO ne permet pas d'assurer le respect de l'objectif de mixité sociale inscrit dans la loi. Les rapporteurs ont ainsi pu alerter les commissaires et le Gouvernement sur la nécessité de développer une offre locative mieux adaptée aux ménages les plus modestes d'une part, et d'améliorer la gouvernance et le respect des objectifs de mixité sociale, d'autre part.

Liste des rapports d'information de la commission sénatoriale
pour le contrôle de l'application des lois en 2012 et 2013

- Lutte contre la piraterie maritime : une loi utile, une mission sans fin : Rapport n° 499 (2011-2012) du 11 avril 2012 - par MM. Jean-Claude Peyronnet et François Trucy ;

- Communication audiovisuelle et nouveau service public de la télévision : la loi du 5 mars 2009 à l'heure du bilan : Rapport n° 572 (2011-2012) du 30 mai 2012 - par MM. David Assouline et Jacques Legendre ;

- Crédit à la consommation et surendettement : une réforme ambitieuse à compléter : Rapport n° 602 (2011-2012) du 19 juin 2012 - par Mmes Muguette Dini et Anne-Marie Escoffier ;

- Le droit au logement opposable à l'épreuve des faits : Rapport n° 621 (2011-2012) du 27 juin 2012 - par MM. Claude Dilain et Gérard Roche ;

- Loi Handicap : des avancées réelles, une application encore insuffisante : Rapport n° 635 (2011-2012) du 4 juillet 2012 - par Mmes Claire-Lise Campion et Isabelle Debré ;

- Loi pénitentiaire : de la loi à la réalité de la vie carcérale : Rapport n° 629 (2011-2012) du 4 juillet 2012 - par M. Jean-René Lecerf et Mme Nicole Borvo Cohen-Seat ;

- Contrôle et évaluation des dispositifs législatifs relatifs à la sécurité intérieure et à la lutte contre le terrorisme (compte-rendu de l'état des travaux d'octobre 2012 par M. David Assouline) ;

- Du Grenelle à la Conférence environnementale : à la recherche d'un nouveau souffle : Rapport n° 290 (2012-2013) du 23 janvier 2013 - par Mme Laurence Rossignol et M. Louis Nègre ;

- État, opérateurs, collectivités territoriales : le triple play gagnant du très haut débit : Rapport n° 364 (2012-2013) du 19 février 2013 - par MM. Yves Rome et Pierre Hérisson.

- L'autonomie des universités depuis la loi LRU : le big-bang à l'heure du bilan : Rapport n° 446 (2012-2013) du 26 mars 2013 - par Mme Dominique Gillot et M. Ambroise Dupont ;

A ces rapports déjà publiés s'ajoutent plusieurs autres en cours d'élaboration , dont deux qui devraient être présentés d'ici à la fin juillet 2013 sur, d'une part le statut de l'auto-entrepreneur (rapport de M. Philippe Kaltenbach et Mme Muguette Dini), d'autre part sur l'industrie du tourisme (rapport de MM. Luc Carvounas, Louis Nègre et Jean-Jacques Lasserre).

2. Pour une politique d'évaluation systématique

Au-delà de l'évaluation ponctuelle de l'application de telle ou telle loi, dans le cadre de tels rapports le Parlement gagnerait à investir pleinement le nouvel horizon qui se présente en termes d'évaluation.

La révision constitutionnelle de 2008 a créé à cet égard, un nouveau cadre propice, ainsi que de nouveaux outils. Il est donc grand temps d'en exploiter tous les potentiels en replaçant la problématique de l'application des lois dans le circuit normatif d'ensemble .

Cette approche globale de circuit conduit à considérer les différentes procédures et instruments, tant dans la phase « aval » qu'en amont de l'application des lois. En effet, cette dernière ne peut être dissociée ni de l'évaluation de la norme, ni même de son élaboration. Elle constitue le passage obligé entre ces deux extrémités du circuit.

Les pistes de réflexion sont nombreuses. On songe dès à présent aux études d'impact, outil encore récent mais dont les potentialités mériteraient d'être mieux exploitées.

3. L'engagement du nouveau Secrétariat général pour la modernisation de l'action publique (SGMAP) au service d'une nouvelle culture administrative

La nécessité d'un « réglementer moins mais mi eux » inspire l'action du nouveau secrétariat général pour la modernisation de l'action publique (SGMAP). Institué par décret du 30 octobre 2012, le SGMAP est chargé de la politique de modernisation . Placé sous l'autorité du Premier ministre, il regroupe :

- la direction interministérielle pour la modernisation de l'action publique, anciennement direction générale à la modernisation de l'État 35 ( * ) ;

- la direction interministérielle des systèmes d'information et de communication de l'État (DISIC).

Il prendra également en charge la coordination interministérielle de la réforme des services déconcentrés de l'État, ainsi que la mission chargée de faciliter la mise à disposition des données publiques (mission dite « Etalab »).

Sa mission de modernisation, posée aux articles 2 et 3 du décret constitutif, porte tant sur la simplification des normes et démarches administratives que sur la transparence et la qualité des services rendus ainsi que sur l'évaluation des politiques publiques dans un contexte de transition numérique et d'intégration des agences et des opérateurs.

La démarche adoptée par le SGMAP, au-delà de la prise en compte des aspects méthodologiques et organisationnels, est de nature structurelle afin de trouver de nouveaux équilibres entre l'ensemble des dimensions de l'action publique, tant sociales que politiques, publique que partenariale, étatiques que déconcentrées ou décentralisées.

L'instance de décision et d'arbitrage en matière de modernisation de l'action publique est le Comité interministériel pour la modernisation de l'action publique (CIMAP). Sa première réunion, qui s'est tenue le 18 décembre 2012, a conduit à établir un programme de cinquante décisions de renforcement de l'efficience administrative et de quarante évaluations de politiques publiques. Le deuxième CIMAP du 2 avril 2013 poursuit l'engagement ainsi pris, tout en annonçant trente nouvelles décisions ainsi qu'un nouveau cycle d'évaluations de neuf politiques publiques.

a) Plus seulement « rendre compte » mais aussi « se rendre compte »...

Au-delà de la réorganisation administrative, le SGMAP vise notamment à s'inscrire dans une démarche transversale et globale de la résolution des problèmes des usagers et des administrations dans la réalisation de leur mission. Cette approche traduit la même préoccupation que celle du Sénat, de s'assurer d'une bonne application des lois.

La méthodologie employée tend à accentuer l'association de l'ensemble des acteurs, publics et privés, leurs partenaires (opérateurs, collectivités territoriales, organismes de protection sociales, associations) ainsi que les bénéficiaires des politiques publiques dans l'établissement de la cohérence des schémas décisionnels.

Le nouveau secrétariat vise ainsi à remédier à un affaiblissement du sens des réformes précédemment réalisées au titre de la Révision générale des politiques publiques (RGPP) ainsi que l'a constaté le rapport des trois inspections sur le bilan de cette dernière 36 ( * ) . Le rapport relève que l'objectif de la RGPP de vouloir garantir la pertinence des politiques publiques a été « compromis par la méthode retenue ». Ainsi, met-il l'accent sur une approche trop restreinte car limitée à l'État, en dehors de toute concertation interne et externe.

Extraits des missions du SGMAP

« Article 2 I. - Le secrétariat général pour la modernisation de l'action publique coordonne, favorise et soutient, au niveau interministériel, les travaux conduits par les administrations en vue d'évaluer et de moderniser l'action publique, afin d'améliorer le service rendu aux citoyens et aux usagers et de contribuer à la bonne gestion des deniers publics

II. - Il veille à ce que les systèmes d'information et de communication concourent à améliorer la qualité, l'efficacité, l'efficience et la fiabilité du service rendu et à simplifier les relations entre les usagers et les administrations de l'État, et entre celles-ci et les autres autorités administratives.

III. - Il coordonne l'action des services de l'État et de ses établissements publics pour faciliter la réutilisation la plus large possible de leurs informations publiques. Il administre le portail unique interministériel destiné à rassembler et à mettre à disposition librement l'ensemble des informations publiques de l'État, de ses établissements publics et, si elles le souhaitent, des collectivités territoriales et des personnes de droit public ou de droit privé chargées d'une mission de service public.

Il coordonne les travaux interministériels relatifs à l'amélioration du fonctionnement des services déconcentrés de l'État.

IV. - Il veille à l'association des agents publics, des usagers et des partenaires de l'administration à l'ensemble de ces démarches.

Article 3 [...] IV. - La direction interministérielle pour la modernisation de l'action publique est chargée de l'animation et de la coordination des travaux d'audit et d'évaluation des politiques publiques. Elle réalise, en associant les administrations et corps d'inspection et de contrôle des ministères concernés, les travaux destinés à mesurer l'efficacité et l'efficience de ces politiques en veillant à comparer leurs résultats aux objectifs poursuivis et aux moyens mis en oeuvre et à dégager des voies d'amélioration. »

Source : décret du 30 octobre 2012.

En outre, focalisée sur la recherche d'économies rapides, la RGPP n'a pas pris assez en compte l'adaptation nécessaire des acteurs et des usagers. Le rapport dresse ainsi le constat sévère d'un ressenti négatif :

« La RGPP a souffert en outre de défauts qui ont nui à sa crédibilité :

- l'accumulation de réformes de nature et de portée très inégales a parfois rendu leur mise en oeuvre plus complexe et en a affaibli le sens ;

- la communication s'est révélée à la fois lénifiante et trop technique ;

- la gestion des ressources humaines n'a pas été à la hauteur de l'enjeu. Les outils mis en place n'ont pas permis d'éviter l'aggravation des désajustements entre missions et effectifs ; les moyens mobilisés pour accompagner les restructurations ont été limités, à l'exception de quelques grosses opérations ; les retours catégoriels, au demeurant financés sans augmentation des enveloppes antérieures, n'ont pas été utilisés comme un levier d'accompagnement des réformes.

Au final, la RGPP a été mal vécue par de nombreux agents de l'État ».

La nouvelle démarche impulsée par le SGMAP, dépassant le simple réflexe de « rendre compte », tend au contraire à « se rendre compte », par la voie de l'écoute des usagers et des retours sur le terrain de l'application des normes. Le SGMAP a constitué à cette fin des panels d'administrés dont les attentes sont analysées. Des « parcours usagers » sont établis. Ils conduisent à la mise en oeuvre de tests identifiant la complexité d'un processus, qui serait indécelable, sans la vision transversale d'un organisme comme le SGMAP.

La mise en oeuvre du RSA illustre cette complexification des dispositifs dont il convient de prendre conscience dans le cadre de l'application des lois, afin d'y remédier par des ajustements éventuellement normatifs.

En outre, un outil de consultation et d'évaluation des PME dit « test PME » est mis à la disposition des administrations afin de recueillir, notamment les observations des entreprises sur les normes particulièrement complexes les concernant. 37 ( * )

Ainsi, ce test PME tend à établir l'impact de la production normative sur les entreprises essentiellement à trois niveaux :

- celui des coûts financiers pour les entreprises (lorsqu'il y a création de nouvelles taxes et droits ou charges),

- celui des coûts organisationnels (adaptation de la production, de la distribution, de la communication, des ressources humaines, de l'investissement, aux nouveaux standards environnementaux et sociaux),

- et enfin celui des charges administratives additionnelles.

Un tel test contribue à l'émergence d'une culture administrative de l'évaluation.

Parmi les nombreux chantiers programmés 38 ( * ) , deux axes intéressent directement la réflexion sur les voies et moyens d'améliorer l'application des lois : la simplification et l'évaluation.

b) Un ambitieux chantier: l'évaluation des politiques publiques

Conformément aux orientations du SGMAP, quarante-neuf politiques publiques seront ainsi évaluées dans un premier temps pour l'être toutes d'ici 2017. Les quarante premières évaluations, qui auront lieu en 2013, couvrent un champ de la dépense publique de l'ordre de 250 milliards d'euros (soit 20 %), avec un objectif de un milliard d'euros d'économies pour 2014, renouvelé en 2015.

Un calendrier a été établi en fonction du caractère prioritaire des politiques publiques, de l'importance des enjeux budgétaires ou de la multiplicité des structures et outils mis en place appelant une simplification. La gouvernance de ces travaux est assurée par le CIMAP.

Gouvernance des évaluations

« Le CIMAP est l'instance décisionnelle : il programme les évaluations de politiques publiques ; durant les travaux d'évaluation, il est informé des diagnostics et de l'ensemble des propositions de scénarios de réforme envisagés ; il valide, à l'issue de ces travaux, le scénario de réforme à retenir ainsi que le plan d'action associé.

Les évaluations sont conduites sous la responsabilité des ministres compétents, qui désignent les personnalités ou structures chargées de piloter les évaluations, déterminent les modalités d'association des partenaires concernés et précisent les calendriers adaptés aux enjeux de chaque évaluation. Une méthodologie type est proposée aux ministères sur la base des préconisations des inspections générales interministérielles, mais elle sera adaptée et précisée pour chaque évaluation.

Un comité de pilotage restreint, présidé par le directeur de cabinet du Premier ministre, associant le ministère en charge de la réforme de l'État et le ministre chargé du budget veillera à la coordination de ces travaux.

Le secrétariat général pour la modernisation de l'action publique (SGMAP) assurera le secrétariat de ce comité de pilotage et apportera, en tant que de besoin, un soutien méthodologique et technique aux équipes en charge de l'évaluation. »

Source : Décision n°39 du relevé de décisions du CIMAP du 18 décembre 2012

Planning des évaluations du premier cycle au 3 avril 2013

RAPPORT ANNUEL SUR L'APPLICATION DES LOIS -72-

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DEUXIÈME PARTIE :
DE L'APPLICABILITÉ À L'APPLICATION : UNE CONTINUITÉ LOGIQUE -73-

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Source SGMAP

Cet examen devrait associer les différents acteurs concernés, tels que les collectivités territoriales et les bénéficiaires de ces politiques. En outre, il permettra d'enrichir les débats parlementaires par la voie de la transmission aux commissions, des résultats des évaluations, comme le prévoit l'article 92 de la loi de finances pour 2013 :

« I.  Au moins quinze jours avant chaque réunion du comité interministériel pour la modernisation de l'action publique, le Gouvernement peut transmettre aux commissions chargées des finances et aux autres commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat l'ordre du jour détaillé ainsi que tout élément d'information mentionné au II disponible à cette date.

II.  Au début de chaque trimestre, le Gouvernement transmet aux commissions chargées des finances et aux autres commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat les éléments utiles faisant état :

1°Des résultats des évaluations réalisées ;

2°Du suivi de la mise en oeuvre des réformes précédemment décidées et de leur incidence constatée sur les dépenses et les emplois publics ;

3°Des décisions prises et de leur incidence sur les emplois et les dépenses publics ;

4°Des modalités d'association des agents publics et des usagers des services publics.

III.  Les commissions parlementaires concernées peuvent adresser au Premier ministre et au ministre chargé de la réforme de l'État toutes observations qui leur paraissent utiles.

Ces éléments peuvent donner lieu à un débat à l'Assemblée nationale et au Sénat. »

Ce nouveau plan de modernisation de la vie publique comprend également une réflexion au niveau infra-politique, sur la mise en oeuvre d'études « ex-post » des lois et règlements , en lien avec le nouveau commissariat à la stratégie et à la prospective. Les modalités de cette évaluation ne sont, toutefois, pas à ce jour définitivement arrêtées.

Enfin, une suite sera donnée aux intéressantes propositions faites par MM. Lambert et Boulard, en matière de normes applicables aux collectivités territoriales. Leur remarquable rapport a mis en évidence « une liste de normes qui nécessitent une évaluation afin de décider de l'opportunité de leur suppression ou de leur allègement. Le Gouvernement engage cette évaluation ».

c) L'allègement des normes : « Une création = une suppression »

Parmi l'ensemble des objectifs de simplification des normes par le SGMAP 39 ( * ) , arrêtés le 18 décembre 2012 40 ( * ) , figure la mise en oeuvre du « 1 pour 1 : une norme créée = une norme supprimée ». En clair, lorsqu'un ministère souhaite édicter un nouveau texte, il doit proposer l'abrogation d'une autre mesure.

On ne peut que souscrire à ce « moratoire réglementaire », tout en s'interrogeant sur la viabilité des suppressions de normes qu'il suppose. Il serait souhaitable que les allègements induits concernent le même champ et s'adressent aux mêmes destinataires que la nouvelle réglementation.

Au-delà de cette approche quantitative de lutte contre l'inflation normative, le CIMAP poursuit un objectif de bonnes pratiques en étendant les études d'impact réglementaire aux projets concernant les autres usagers de l'administration. Un tel projet doit permettre une production réglementaire de qualité plus pérenne. Elle requiert, cependant, l'émergence d'une culture du contrôle et de l'évaluation, sous peine de ralentir la publication des mesures.

Le nouveau plan de simplification prévoit d'« associer les agents des services déconcentrés à l'élaboration des instructions et circulaires ministérielles afin de vérifier qu'elles sont suffisamment simples et opérationnelles ». Un test « administration territoriale de l'État », sur le modèle du « test PME », devrait être mis en place. En outre, une instruction du 2 avril 2013 relative à l'interprétation facilitatrice des normes a déjà demandé aux ministres de veiller à ce que leurs services « utilisent toutes les marges de manoeuvre autorisées par les textes et en délivrent une interprétation facilitatrice pour simplifier et accélérer la mise en oeuvre des projets publics ou privés ».

Enfin, le CIMAP propose d'améliorer le cheminement des textes en rationalisant le processus de consultations . Conformément aux décisions du 18 décembre 2012, 101 commissions administratives ont été supprimées. Ce nombre correspond à 15 % du nombre total des commissions consultatives. La cible prochaine à atteindre est de 25 % de réduction dès juin 2013.

Cette démarche trouve un prolongement dans le cadre des prescriptions de l'instruction du 30 novembre 2012 relative à la réduction du nombre des instances consultatives, qui prévoit que la création d'un nouvel organisme consultatif est désormais subordonnée à la suppression d'une autre entité.

En complément de ce processus de restructuration visant à supprimer les commissions dont la consultation tend à retarder la publication des textes, le CIMAP a pour objet de renforcer les « consultations utiles ». C'est pourquoi, chaque ministère doit désormais établir une « cartographie » faisant apparaître sa stratégie de consultation et les instances qui y contribuent. Le comité encourage également les ministères à privilégier des modes de consultation innovants et souples avant toute décision.


* 35 En conséquence, le décret de 2012 abroge le décret no 2005-1792 du 30 décembre 2005 portant création d'une direction générale de la modernisation de l'État au ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État.

* 36 Rapport en date du 25 septembre 2012 sur Bilan de la RGPP et conditions de réussite d'une nouvelle politique de réforme de l'Etat de l'IGA, l'IGF et l'IGAS de Marianne Bondaz, Sophie Delaporte, Werner Gagneron, Philippe Rey, Cyrille Bret, Martine Marigeaud, Pierre Deprost, Nathalie Destais, Yves Rabineau, Michel-Henri Mattera.

* 37 Le test PME constitue : « un outil d'évaluation : étude quantitative sur six semaines maximum effectuée auprès d'un échantillon restreint et diversifié d'une vingtaine d'entreprises mesurant les conséquences d'un texte sur une entreprise (relever auprès des entrepreneurs leurs avis sur l'impact, la complexité des tests et les alternatives à y apporter ; Un outil d'évaluation : recueillir des informations utiles pour les agents pour l'élaboration des études d'impact. Un recours au test PME pet également s'avérer utile lorsque les agents rencontrent des difficultés pour répondre aux obligations fixées par l'étude d'impact et dans les cas ou des divergences importantes sur les conséquences d'un texte subsistent et venant réduire la qualité de l'étude d'impact. » Source : SGMAP .

* 38 Le programme établi le 18 décembre 2012 prévoit de « simplifier l'action publique », « Mesurer la qualité du service public », « Accélérer la transition numérique », « Évaluer pour moderniser les politiques publiques », « Intégrer les agences et les opérateurs dans la modernisation de l'action publique ».

* 39 Cf . la circulaire du 19 février 2013 qui vise à communiquer aux membres du Gouvernement, le nouveau programme d'action de simplification des normes. Ce dernier comprend des mesures de simplification de textes, une incitation aux procédures consultatives participatives. Il appartiendra à chaque ministère d'élaborer, en lien avec leur programmes ministériels de modernisation et de simplification (PMMS), un programme pluriannuel de simplification, avant la fin du premier semestre 2013. Cette mission de simplification demeure supervisée par le secrétaire général du Gouvernement, assisté d'un d'une directrice, adjointe au secrétaire général du Gouvernement, Mme Célia Vérot, chargée de la simplification et des missions précédemment exercées par le commissaire à la simplification M. Rémi Bouchez.

* 40 Les CIMAP des 18 décembre 2012 et 2 avril 2013 ont notamment fixés comme objectifs au titre des bonnes pratiques normatives le fait de ne pas surtransposer les directives communautaires, d'appliquer le principe de proportionnalité dans la rédaction des lois afin de laisser des marges de manoeuvre pour permettre une application adaptée aux situations concrètes, de « Renforcer la sécurité juridique en faisant application des dates communes d'entrée en vigueur des textes règlementaires (1er janvier/1er juillet) et différer de deux mois au minimum les modifications de réglementation concernant les entreprises et d'un mois celles intéressant le public afin que les acteurs concernés aient le temps de s'adapter ».

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