Mme Ketty Bernos, Sous-directrice de l'autonomie au Conseil général de la Guadeloupe
Comme vous l'avez compris, la Guadeloupe doit relever un défi majeur avec le vieillissement de sa population et la prise en charge de la perte d'autonomie. Elle doit se fixer des objectifs devant l'urgence de l'action sociale face à une population qui s'accroît.
L'évolution des populations dans les outre-mer, et singulièrement en Guadeloupe, va dans le sens du vieillissement pour deux raisons majeures :
- l'émigration des jeunes vers la métropole ou vers des pays attractifs comme le Canada, le Japon ou la Chine, que ce soit pour des études, des raisons professionnelles compte tenu du fort taux de chômage dans les Antilles, ou même pour des raisons personnelles et affectives ;
- le retour au pays de Guadeloupéens retraités.
Face à ces perspectives, le département de la Guadeloupe, bientôt classé deuxième département le plus âgé de France, cherche à anticiper la réponse publique avec des budgets contraints. D'ici trois ans, si les adaptations ne se font pas au fur et à mesure, la collectivité, actuellement en situation financière saine, risque de se trouver en fort déséquilibre.
Le budget pour l'autonomie des personnes âgées et personnes handicapées en Guadeloupe représente actuellement un tiers des dépenses pour un montant d'environ 328 millions d'euros par an. Or, différentes études montrent que la prise en charge de la dépendance par l'aide sociale sera sans cesse accentuée. D'ailleurs, avec son schéma de l'autonomie, la collectivité a dressé dès 2010 ses objectifs stratégiques et opérationnels. Ainsi, en 2012, les avancées s'adaptent aux réalités du terrain, à savoir une orientation franche vers le maintien à domicile, une offre d'hébergement diversifiée et un autre point nodal, des actions de prévention contre l'isolement et la maltraitance, des phénomènes nouveaux qui apparaissent avec l'évolution de la population.
Aujourd'hui, l'action sociale et médico-sociale en faveur des personnes âgées a un nouveau visage. En 2012, l'action sociale face à la perte d'autonomie s'est renforcée grâce notamment à l'ouverture de nouveaux lits et places en EHPAD, la mise en oeuvre de nouveaux dispositifs de soutien à domicile tels que la garde itinérante de nuit et l'augmentation de deux heures de l'ensemble des plans d'aide des bénéficiaires de l'APA classés en GIR 3 et 4. La formation des accueillants familiaux a été mise en place. L'implication des obligés alimentaires a été accentuée, auprès des enfants et ceux qui doivent aider d'une manière ou d'une autre les parents âgés. Et une recherche plus systématique des recours sur succession sur les biens de la personne âgée a été organisée.
Concernant la coordination gérontologique et du handicap, le Conseil général s'est doté d'un instrument de soutien à la modernisation des services prestataires de services à domicile grâce à la signature d'une convention avec la Caisse Nationale de Solidarité pour l'Autonomie (CNSA). En outre, l'analyse stratégique de la collectivité s'est poursuivie au sein de groupes de travail pour la mise en place de son schéma de l'autonomie. Les réflexions ont été enrichies par les conclusions de la mission prospective initiée par le Conseil général, l'AFD et l'Agence régionale de santé (ARS), concernant les incidences de la prise en charge des personnes âgées dépendantes sur le budget de la collectivité départementale.
Aussi les orientations budgétaires proposées en 2013 concernant la prise en charge de la dépendance visent en premier lieu à concrétiser les projets lancés au titre du schéma de l'autonomie pour la période 2010-2014 et en second lieu à poursuivre les actions d'amélioration continue de la qualité du service rendu à l'usager par les services départementaux. Ainsi, on veut encourager et développer le service à domicile par des dispositifs obligatoires tels que l'allocation personnalisée à l'autonomie (APA). L'évolution de ce dispositif indique une stabilisation des effectifs des bénéficiaires de l'APA. Au troisième trimestre on compte environ 8 000 bénéficiaires de l'APA dont 517 bénéficiaires en établissement.
En 2012, l'effort de la collectivité a porté sur la revalorisation des plans d'aide correspondant à une augmentation de la dépense de 4,8 millions d'euros pour une année pleine.
En 2013, la télégestion sera introduite afin d'améliorer l'effectivité de la prestation d'aide à domicile et de réduire les délais de paiement des prestataires. Le dispositif d'aide-ménagère va lui aussi être amélioré par la mise en place d'un système de télégestion.
D'autres dispositifs facultatifs ont été mis en place par la volonté publique. Je veux parler de la garde itinérante de nuit, un dispositif tout nouveau qui permettra de doubler le nombre de bénéficiaires de l'accompagnement de nuit : il s'agit de passer de 400 personnes âgées à 1 000 personnes âgées durant l'année 2013. On a également initié un partenariat avec les centres communaux d'action sociale pour améliorer l'organisation des dossiers d'aide sociale et être dans la préadmission. Mais également avec des associations comme l'association guadeloupéenne pour la téléassistance et l'association Alma pour aider à la promotion des aides techniques à domicile, et pour lutter contre l'isolement et la maltraitance des personnes âgées.
En 2012, nous avons généralisé le dispositif de transport à la demande qui avait été auparavant expérimenté en Nord Grande-Terre. Nous souhaitons en 2013 travailler sur la promotion et le développement du portage de repas.
S'agissant de l'offre d'hébergements, conformément au programme régional interdépartemental d'accompagnement des handicaps et de la perte d'autonomie, deux établissements ont ouvert en 2012 : « Soley an Nou » à Port Louis et « A Ka Maman » à Morne à l'Eau. La Guadeloupe dispose donc de 17 EHPAD pour 950 lits d'hébergement permanent et temporaires dont 863 places habilitées à l'aide sociale (soit 75 %), et 4 établissements d'accueil de jour pour 59 places dont 53 habilitées à l'aide sociale. Cependant, certains programmes dont l'ouverture était programmée en 2012 connaissent des retards et sont reportés sur 2013. C'est le cas de la Fondation Caisse d'Épargne à Saint-Louis de Marie-galante avec 60 places d'hébergement permanent et la Fondation Caisse d'Épargne à Basse-Terre. Outre les opérations reportées, 4 opérations nouvelles devraient aboutir (Saint-Claude, Vieux-Fort, Capesterre-Belle-Eau, et Sainte-Rose), soit un total de 460 lits et places supplémentaires dont 358 habilitées à l'aide sociale.
L'accroissement de l'offre d'accueil institutionnel nécessite une forte implication financière du département en termes de subvention d'investissement et de financement des dépenses de fonctionnement.
Compte tenu de l'évolution démographique prévue dans les vingt prochaines années et de l'accroissement attendu de la demande sociale dans le champ de la dépendance, la collectivité départementale, en partenariat avec l'AFD et l'ARS, a, je l'ai déjà dit, passé commande d'une étude prospective pour être en mesure d'apprécier l'incidence budgétaire de la prise en charge des personnes âgées dépendantes. Les résultats de cette étude permettront aux membres de l'assemblée d'effectuer des choix éclairés quant aux politiques publiques à mettre en oeuvre au profit du grand âge.
L'hébergement en accueil familial est une autre forme que nous développons en Guadeloupe. Aujourd'hui 168 familles sont agréées pour l'accueil des personnes âgées et des personnes handicapées, ce qui représente environ 450 places. 45 journées de formation ont été organisées en 2012 au profit de 170 accueillants familiaux. La collectivité a donc satisfait son obligation légale de formation prévue par la réglementation et ce programme de formation se poursuivra en 2013.
Nous travaillons à la coordination gérontologique et du handicap avec la mise en place d'un observatoire départemental du vieillissement et du handicap. C'est tout nouveau puisque cet observatoire a été ouvert en 2012 : on pourra parler de son activité réelle en 2013...
En juillet, l'assemblée départementale a autorisé son président à signer avec la CNSA une convention sur la modernisation des services à la personne, programmée sur quatre ans (2012-2015) avec trois axes :
- la mutualisation en vue de l'amélioration de la structuration du secteur et de l'offre de services ;
- la valorisation des métiers de services à la personne ;
- l'amélioration de la qualité du service rendu à l'usager.
Cette convention doit permettre l'allocation d'une aide globale de 2 millions d'euros au secteur de l'aide à domicile.
Voilà dressés dans le temps qui m'a été imparti les contours de l'action départementale de la Guadeloupe en direction de ses seniors qui sont des acteurs forts de la dynamique familiale et économique de notre région.
Merci de votre attention.
M. François-Xavier Guillerm, animateur des débats
Merci Mme Ketty Bernos. Je précise que vous n'êtes arrivée de Guadeloupe que hier !
L'enquête de l'INED porte sur les DOM mais ne porte pas sur Mayotte car ce territoire n'avait pas encore le statut de département au moment où l'enquête a été réalisée. Pour parler de Mayotte, nous avons demandé au sénateur Thani Mohamed Soilihi de bien vouloir nous apporter son témoignage.