3. Élever le niveau requis au niveau A2 puis B1
Il est illusoire de penser qu'un étranger puisse s'insérer socialement et professionnellement dans la communauté nationale avec un niveau de langue A1.1. Ce niveau ne permet ni l'emploi, ni la participation à la vie sociale et citoyenne, ni même la compréhension de la plupart des dossiers et formulaires administratifs. Bien que l'effort soit louable et traduise une prise de conscience du problème au sein de l'OFII et de son ministère de tutelle, le projet de décret visant à relever le niveau requis à A1 ne modifie pas ce constat.
Élever significativement le niveau requis aurait certes un coût important , puisque cela signifierait à la fois un allongement de la durée des formations et un élargissement des personnes assujetties à ces dernières. Ainsi, l'OFII estime que la seule élévation au niveau A1, actuellement en cours, conduirait à rendre la formation linguistique obligatoire pour 9 000 personnes supplémentaires. C'est pourquoi l'élévation au niveau A2 puis B1 n'est envisageable, d'un point de vue budgétaire, que combinée à l'instauration d'une participation financière des étrangers aux frais de formation . En outre, ce coût initial supérieur serait susceptible de réduire les coûts futurs , non supportés par l'OFII mais par d'autres financements en grande partie publics, en particulier dans des organismes socioculturels de quartiers.
Par ailleurs, un tel relèvement du niveau devrait s'accompagner d'une sensibilisation des auditeurs de l'OFII , qui devront être plus attentifs lors de la délivrance de l'attestation ministérielle de dispense de formation linguistique (AMDFL). Même en cas de délivrance, si le niveau de français de l'étranger est faible tout en étant suffisant, les auditeurs devraient encourager les migrants à s'engager malgré tout dans un parcours de formation co-financé par l'OFII.
La combinaison d'une élévation du niveau requis et d'une participation financière des migrants a déjà fait l'objet d'une recommandation (n° 30) du Haut conseil à l'intégration dans le cadre de son avis de 2010 précité : « Le Haut conseil demande au Gouvernement de reconsidérer le dimensionnement du dispositif du contrat d'accueil et d'intégration, afin de se rapprocher de l'importance des moyens mis en oeuvre en Allemagne, quitte à envisager un abandon de la gratuité et une prise en charge partielle par les migrants eux-mêmes ».
4. Organiser des stages d'intégration intensifs
En définitive, votre rapporteur spécial estime qu'il y a lieu, sur certains aspects, de s'inspirer du modèle israélien historique des Kibboutz , bien qu'il soit très spécifique à l'intégration de populations non hébraïophones en Israël. Les Kibboutz, villages d'inspiration socialiste, ont été particulièrement utilisés au milieu du XX e siècle pour faciliter l'intégration des populations juives de la diaspora, par un apprentissage intensif de l'hébreu et une assimilation du mode de vie israélien.
Dans le contexte français, il s'agirait d'organiser des stages de formation intensifs, combinant l'ensemble des composantes existantes (formations linguistique, civique et « Vivre en France »). Actuellement, il apparaît en effet que la durée des formations, la dispersion géographique entre les sites, l'absence de liens entre les différents modules et l'absence de sanction réellement dissuasive en cas d'échec conduisent à un parcours globalement fort peu « intégrateur » .
Ces stages pourraient être proposés de façon facultative ; il n'est pas impossible que certains publics, désireux de rassembler en quelques semaines ou mois l'ensemble des obligations du CAI, optent pour cette formule.