b) La contribution climat-énergie : une taxe carbone ou une taxe sur l'énergie ?
Compte tenu des éléments qui précèdent, le groupe de travail estime que l'objectif de mise en oeuvre à court terme d'une contribution climat-énergie conduit à privilégier l'hypothèse d'une taxe sur les consommations énergétiques , solution d'ailleurs retenue dans l'ensemble des pays ayant déjà mis en place une taxe sur le CO 2 .
Le fait générateur : taxe amont ou taxe aval ? Si le groupe de travail n'a pas abordé de manière approfondie la question du fait générateur et de l'exigibilité de la contribution 50 ( * ) , le Livre blanc en vue de la conférence d'experts sur la contribution climat-énergie indique que « la taxation pourrait intervenir plus ou moins haut dans le processus de distribution au client final. Le signal-prix peut être atténué par un tel choix, sauf si la chaîne de distribution conduit à une bonne répercussion des coûts de production » . Les avantages associés à une taxation amont, telle qu'elle se pratique par exemple pour la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers 51 ( * ) , résident dans un recouvrement simple et suscitant peu de coûts administratifs . Une telle option peut toutefois se révéler moins efficace en termes de signal-prix adressé au consommateur final, signal-prix que les comportements de répercussion des différents intermédiaires pourront contribuer à brouiller. Source : commission des finances |
Le choix d'une accise implique un arbitrage relatif à l'inclusion ou non de l'électricité d'origine nucléaire dans l'assiette de la contribution.
Une lecture attentive de l'article 2 du projet de loi de programme relatif à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement révèle que la contribution climat-énergie aura pour objet « d'intégrer les effets des émissions de gaz à effet de serre dans les systèmes de prix par la taxation des consommations d'énergies fossiles ». De même, le Livre blanc en vue de la conférence d'experts sur la contribution climat-énergie indique, dans ses développements consacrés à l'assiette de la contribution, que « seraient (...) concernés les volumes d'énergie fossile consommés par les secteurs hors ETS 52 ( * ) ».
Selon l'ADEME, « la contribution climat-énergie pourrait être assimilée à une taxe carbone si son assiette vise exclusivement les combustibles fossiles ou le contenu en CO 2 du kilowattheure électrique. Si l'électricité d'origine nucléaire est mise à contribution, la CCE serait plus largement assimilable à une taxe sur l'énergie ». Dans le premier cas, la finalité de la taxe résiderait essentiellement dans la diminution des émissions de dioxyde de carbone. Dans le second, la taxe aurait une vocation plus large d'accroissement du prix des énergies afin d'inciter à réduire toutes les consommations.
Quoiqu'il en soit, le législateur devra veiller à mettre en adéquation l'objectif d'intérêt général assigné à la taxe et la délimitation de son assiette . En effet, une contribution climat-énergie conçue comme un instrument exclusif de réduction des émissions de CO 2 , mais s'appliquant à l'électricité d'origine nucléaire serait très vraisemblablement déclarée inconstitutionnelle . Dans sa décision du 28 décembre 2000 53 ( * ) , le Conseil constitutionnel avait ainsi censuré l'article 37 de la loi de finances rectificative pour 2000 qui étendait la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) à la production d'électricité.
Le Conseil avait en effet considéré que l'objectif assigné à la taxe était « de renforcer la lutte contre l'effet de serre » et « qu'en raison de la nature des sources de production de l'électricité en France, la consommation d'électricité contribu(ait) très faiblement au rejet de gaz carbonique et permet(tait), par substitution à celle des produits énergétiques fossiles, de lutter contre l'effet de serre ». Dans ces conditions, le Conseil constitutionnel avait jugé la différence de traitement imposée à la production électrique sans rapport avec l'objectif d'intérêt général assigné à la TGAP, et contraire au principe d'égalité devant l'impôt.
* 50 Le fait générateur est le moment où la dette fiscale prend naissance, tandis que l'exigibilité constitue le moment où l'administration fiscale peut requérir le paiement de l'impôt.
* 51 La TIPP est perçue à la sortie de l'entrepôt fiscal de stockage ou de la raffinerie.
* 52 « Emission Trading Scheme », soit les secteurs ne relevant pas de la directive 2003/87/CE du 13 octobre 2003 établissant un système d'échange de quotas d'émissions de gaz à effet de serre dans la Communauté.
* 53 Décision n° 2000-441 DC.