(b) Un niveau inacceptable d'échec scolaire
Un niveau inacceptable d'échec scolaire est également constaté dans les DOM.
C'est un enjeu national puisque, en France, 150 000 jeunes quittent chaque année le système scolaire sans diplôme.
Dans les DOM, le phénomène est ancien et transversal : en Martinique 26 % des 25-34 ans ayant quitté le système éducatif sont sans diplôme, en Guyane 58 % des 25-34 ans (moyenne nationale 19 %)...
Actuellement , entre un quart et la moitié des jeunes des DOM sortent du système scolaire sans aucun diplôme ni qualification .
L'échec touche majoritairement les garçons. L'écart des résultats scolaires entre filles et garçons est particulièrement important aux Antilles. À la rentrée 2007, par exemple, 91 % des filles atteignaient le niveau baccalauréat (niveau IV) contre 62 % des garçons. Cet échec scolaire des garçons explique la persistance des écarts de formation avec la France métropolitaine.
Parmi les causes les plus couramment avancées de l'échec scolaire, figurent principalement des orientations plus subies que choisies, le manque d'information et de soutien ainsi que le décalage avec l'environnement culturel.
On insistera sur deux points essentiels qui distinguent les DOM de l'hexagone.
S'agissant du manque ou de la mauvaise orientation de ces jeunes , les conclusions du rapport Descoings sur la réforme des lycées, comme celles de la mission sénatoriale sur les jeunes, pointent les graves lacunes de l'Éducation nationale sur ce volet pourtant essentiel de la formation.
Interrogés à ce sujet, les services du ministère de l'éducation nationale soulignent que les choix d'orientation se font actuellement dans le s mêmes conditions que dans l'hexagone. Mais les résultats en sont nettement différents.
À l'issue de la classe de troisième, les demandes des familles dans les quatre académies d'outre-mer, ainsi que les décisions des principaux de collège, favorisent une orientation des élèves vers la voie professionnelle. Alors qu'en métropole 59 % des demandes des familles et 57 % des décisions concernent la voie générale et technologique, les taux concernant les quatre académies d'outre-mer sont respectivement de 51 et 49 %.
Seules les demandes des familles en Martinique se rapprochent de celles de la métropole : 56,27 % souhaitent en effet une orientation vers les voies générale et technologique.
En fin de classe de seconde, il faut souligner aussi l'importance donnée, dans les quatre académies d'outre-mer, au redoublement par les conseils de classe. Alors que 4,62 % des familles demandent un redoublement pour leur enfant scolarisé (4,52 % en métropole), les décisions de redoublement affectent 22,45 % des élèves concernés contre seulement 17,7 % en métropole. En outre, l'orientation vers les premières technologiques est plus importante dans les quatre académies d'outre-mer : 27,63 %, soit 3 points de plus qu'en métropole.
L'orientation des enfants des DOM vers ces formations professionnelles pourrait apparaître a priori comme une bonne chose si ces formations étaient véritablement axées sur les emplois locaux, mais leur faible degré de qualification et de préparation à la vie professionnelle font qu'elles débouchent souvent sur un échec. De fait, ces orientations, plus subies que voulues, précèdent trop souvent des sorties du système scolaire sans aucun diplôme.
D'autre part, le dispositif de soutien scolaire n'apparaît pas spécialement renforcé par rapport au système mis en place dans l'hexagone .
Les aides mises en place dans les académies ultramarines au profit des élèves en difficulté sont celles prévues au niveau national. Il s'agit principalement du programme personnalisé de réussite éducative (PPRE), créé par l'article 16 de la loi n° 2005-380 du 23 avril 2005 d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école.
Le pourcentage d'élèves des écoles élémentaires bénéficiant d'un PPRE dans les académies d'outre-mer s'élève à 6,61 % : 5,38 % en Guadeloupe, 8,77 % en Guyane et 4,72 % en Martinique.
Dans le second degré (classes de sixième, cinquième et quatrième au collège), il s'élève globalement à 6,61 %, et à 5,14 % en Guadeloupe et 7,35 % en Guyane.
Toutefois, on notera que les stages de remise à niveau mis en place pour les élèves de CM1 et CM2 connaissant des difficultés en français et en mathématiques, qui touchent 7,2 % des élèves au plan national, ne concernent que 8,6 % des élèves guyanais et 14,9 % des élèves martiniquais.
Face à l'ampleur des difficultés correspondant au retard scolaire des enfants, les moyens mobilisés par l'État semblent encore trop limités pour renverser une tendance qui inscrit l'échec scolaire comme une donnée structurelle du système scolaire dans les DOM.
Cette mobilisation passe, comme au plan national, par l'instauration d'un service public adapté de l'orientation pour le secondaire, chargé de suivre les collégiens et lycéens tout au long de leur scolarité et d'éclairer leur choix.
Au niveau de chaque académie, il paraît, en outre, nécessaire d'associer davantage les collectivités territoriales (en particulier les communes) à des projets éducatifs locaux adaptés aux réalités et aux besoins locaux, comme la Maison familiale rurale à Mana (Guyane) qui accueille des adolescents peu réceptifs au cursus scolaire afin qu'ils acquièrent une formation pratique.
L'introduction de davantage de souplesse apporterait également des améliorations, telle que la mise à disposition, en tant que de besoin, des professeurs du primaire pour donner des cours dans les collèges aux enfants en retard scolaire, mesure qui se pratique avec succès en Martinique, ou encore les dispositifs d'accompagnement éducatif organisés par l'académie de La Réunion hors temps scolaire (heures de soutien, stages, renforts d'enseignants expérimentés, répartition des moyens en fonction des besoins).
Proposition n° 71 : Créer un service public de l'orientation, dans le cadre des établissements scolaires, pour les élèves du secondaire. |