5. Le sport et la jeunesse : répondre à un besoin de lisibilité

Tout comme pour le domaine culturel, tous les niveaux de collectivités ont investi le domaine du sport et de la jeunesse, aux côtés de l'Etat et du mouvement sportif. Une coordination de ces interventions serait néanmoins utile.

a) Un domaine d'interventions conjointes des collectivités territoriales, acteurs majeurs du développement du sport et des politiques de jeunesse

Le soutien au développement du sport et aux associations de jeunesse est caractérisé par les interventions conjointes des différents niveaux de collectivités publiques , facteur d'une certaine complexité dans le montage des projets et d'un manque de lisibilité dans l'exercice des responsabilités, par le recours, notamment, à la pratique de financements « croisés » et par l'instruction successive des dossiers par différents services.

Le législateur est resté, en effet, relativement silencieux sur les compétences confiées à chacun des échelons territoriaux, dans un domaine largement laissé à la libre volonté des collectivités locales, qui interviennent dans le cadre de leur clause de compétence générale ou de divers dispositifs contractuels (politique de la ville, etc.).

Ainsi, dans le domaine du sport, la loi n'encadre que la construction, l'entretien et la mise aux normes des équipements sportifs nécessaires à la pratique de l'éducation physique et sportive (EPS), dont la responsabilité incombe aux régions dans les lycées, aux départements dans les collèges et aux communes dans les écoles, par cohérence avec leurs prérogatives en matière scolaire ; elle charge également le département de favoriser le développement des sports de nature 120 ( * ) . La loi du 16 juillet 1984 121 ( * ) s'est limitée à prévoir que les collectivités territoriales et leurs groupements contribuent, aux côtés de l'Etat, des associations et fédérations sportives et du secteur privé, « à la promotion et au développement des activités physiques et sportives » , et qu'elles peuvent concourir au développement du sport de haut niveau 122 ( * ) .

Dans le domaine de la jeunesse, seule la loi du 22 janvier 2002 a mentionné explicitement la compétence de la collectivité territoriale de Corse pour conduire les actions en matière de promotion des activités physiques et sportives, mais aussi d'éducation populaire et d'information de la jeunesse 123 ( * ) .

Pour autant, les collectivités territoriales jouent un rôle prépondérant : aux côtés des financements privés issus du mouvement sportif, elles assument près des trois quarts du financement public du sport (90 % de cet effort relevant des communes), intervenant notamment pour la construction et l'entretien des équipements sportifs et les subventions aux 170 000 clubs sportifs et associations ; elles assurent, par ailleurs, l'essentiel du financement des centres de loisirs - organisés, dans la majorité des cas, par les municipalités ou EPCI - ou encore des centres régionaux ou points communaux d'information des jeunes. Elles sont soumises, dans ces champs d'intervention, aux normes et réglementations édictées par l'Etat et les fédérations sportives. Un alourdissement de leurs exigences peut avoir un impact financier parfois non négligeable pour les collectivités.

C'est pourquoi la mission s'est interrogée , à l'instar de plusieurs personnes auditionnées, sur le rôle des services déconcentrés de l'Etat et notamment des directions départementales de la jeunesse et des sports (DDJS) , dans un domaine relevant largement de l'initiative locale. Dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP), la question du maintien de ces services mérite d'être clairement posée. Un transfert de leurs personnels et attributions aux collectivités devrait très rapidement être envisagé.

Renforcer la coordination entre les acteurs par des réponses adaptées aux spécificités des territoires

Comme pour l'action culturelle, les collectivités territoriales de tous les niveaux sont attachées à conserver une marge d'initiative pour intervenir en faveur du développement d'activités sportives et associatives qui sont des vecteurs de lien social et d'attractivité des territoires. En outre, la logique de répartition des compétences se heurte, là aussi, à des limites, en raison notamment des fortes disparités locales constatées dans ce domaine.


• Cependant, comme l'a fait observer M. Claudy Lebreton lors de son audition devant la mission, en évoquant l'idée d'un « schéma régional de compétences partagées », la clarification des compétences et responsabilités de chacun des niveaux de collectivités pourrait se faire par la voie d'un conventionnement au niveau territorial , qui permet d'apporter une réponse souple et adaptée à la spécificité des territoires. La désignation de « guichets uniques » ou de dossiers d'instruction uniques, pourrait conduire à simplifier et clarifier les modalités de financement des projets. Dans ce cadre, le conseil régional des exécutifs dont votre mission propose l'institution jouera un rôle majeur pour assurer la coordination des interventions.

Des voies de « spécialisation » des interventions de chacun des niveaux de collectivités se dessinent et pourraient être explicitées, via la désignation d'un « chef de file » en fonction des dossiers ou domaines d'intervention. En tenant compte du principe de subsidiarité et de la cohérence avec les autres compétences, il apparaît ainsi, dans le domaine du sport, que les communes sont les premiers interlocuteurs des clubs locaux tandis que les régions sont d'abord en relation avec les ligues et le soutien au développement du sport de haut niveau ; l'intervention du département pour favoriser l'accès aux sports des publics handicapés ou en insertion est cohérent avec leur rôle de garant des solidarités et leurs attributions exclusives.


• En matière d'équipements sportifs, la responsabilité de leur construction et de leur gestion pourrait être confiée aux communes et à leurs groupements - déjà propriétaires de près de 80 % des équipements et gestionnaires de 70 % d'entre eux 124 ( * ) - avec l'appui financier des départements ou des régions pour les grands équipements structurants.

Notons que cette compétence tend de plus en plus à être exercée à l'échelon intercommunal , dans un souci de mutualisation des moyens et d'aménagement cohérent du territoire. Certaines subventions sont d'ailleurs réservées aux équipements « d'intérêt communautaire », afin d'inciter les communes à transférer la compétence.

Cependant, les compétences des départements et des régions en matière d'équipements sportifs dans les collèges et lycées (qui représentent une dépense obligatoire pour les établissements dont ils ont la charge depuis les lois de 1983) sont suffisamment lisibles pour ne pas être remises en cause. Afin d'assurer, toutefois, une utilisation optimale de ces équipements et de garantir un bon usage des investissements publics, leur mise à disposition gagnerait à être favorisée en dehors des horaires de fréquentation par les publics scolaires, dans le cadre de conventions locales , comme cela se fait déjà par endroits.

Par ailleurs, il convient de bien rappeler que les collectivités territoriales sont tenues de verser une contribution financière, correspondant aux frais de fonctionnement de l'équipement, à la collectivité mettant à leur disposition les installations sportives dont elle est propriétaire 125 ( * ) .

Propositions de la mission

-  Instituer une contractualisation au niveau régional afin d'assurer la coordination des interventions et la simplification des modalités d'instruction et de financement des projets (via notamment la désignation de « chef de file » en fonction des domaines d'intervention, la création d'un guichet unique et d'une instruction unique).

-  Confier aux communes et à leurs groupements la construction et la gestion des équipements sportifs, sans préjudice de la responsabilité des départements et régions pour la construction d'installations sportives dans les collèges et lycées ; généraliser la mise à disposition des équipements des collèges et lycées par voie de conventions locales.

* 120 Aux termes de l'article L. 311-3 du code du sport, le département élabore, en ce sens, un « plan départemental des espaces, sites et itinéraires relatifs aux sports de nature ».

* 121 Loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives.

* 122 Article L. 100-2 du code du sport.

* 123 Article L. 4424-8 du code général des collectivités territoriales, issu de la loi n° 2002-92 du 22 janvier 2002 relative à la Corse.

* 124 Il existe au moins un équipement sportif dans toutes les communes de plus de 1 000 habitants.

* 125 Rappelons qu'aux termes de l'article L. 1311-15 du code général des collectivités territoriales, « l'utilisation d'équipements collectifs par une collectivité territoriale, un établissement public de coopération intercommunale ou un syndicat mixte fait l'objet d'une participation financière au bénéfice de la collectivité territoriale, de l'établissement public de coopération intercommunale ou du syndicat mixte propriétaire de ces équipements. ».

Par ailleurs, la possibilité, pour les collectivités territoriales gérant les collèges et les lycées, d'utiliser les installations sportives communales a été admise par le Conseil d'Etat dans ses arrêts du 3 septembre 1997, ville de Montpellier, et du 13 mars 1998, département de la Moselle.

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